Scènes Magazine
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scènes magazine ricardo castro au septembre musical ISSN 1016-9415 photo © Tatiana Golsman 264 / juillet - août 2014 CHF. 10.-- 7 € GRANGE AUX CONCERTS CERNIER, EVOLOGIA PARC RÉGIONAL CHASSERAL SALINE ROYALE Design : SIFON Graphisme / www.sifon.li ARC ET SENANS JACK QUARTET STEFANO BOLLANI ORCHESTRE DES JARDINS MUSICAUX STILE ANTICO MICHEL PORTAL – VINCENT PEIRANI SCHOLA HEIDELBERG COLLEGIUM NOVUM ZÜRICH SYLVIE COURVOISIER TRIO ENSEMBLE VOCAL DE LAUSANNE KONUS QUARTETT FRANÇOIS SALQUE MONDRIAN ENSEMBLE VOKAL ENSEMBLE ZÜRICH LE MOMENT BAROQUE NOUVEL ENSEMBLE CONTEMPORAIN QUATUOR SINE NOMINE ENSEMBLE BATIDA ASASELLO QUARTETT BEÑAT ACHIARY GEIR DRAUGSVOLL www.jardinsmusicaux.ch COMMUNE VAL-DE-RUZ Fonds européens de développement régional Les Jardins Musicaux ont été sélectionnés dans le cadre du programme de coopération territoriale européenne interreg iv a France-Suisse 20072013 PARTENAIRES DES JARDINS MUSICAUX PARTENAIRE DE PARTENAIRES MÉDIA Etat de Berne — Pro Helvetia — Conseil général du Doubs — Ville de Neuchâtel — Ville de La Chaux-de-Fonds — Fondation de famille Sandoz — Fondation Norbert Schenkel — Hôtel Palafitte — Fondation UBS pour la culture — Viteos — Fondation Tanner — Payot libraire — Felco — Béroche Excursions — Buffet d’un tram — Sahli & Suriano SA — E-Gestion — AtelierM — Hôtel de Commune Dombresson — Brasserie du Poisson — Brunner & Associés — Fondation Cerebral Berne — Brasserie Le Cardinal — Hôtel Alpes et Lac — Encaveurs d’Auvernier — Humbert-Droz Transports SA — Steinway Hall Suisse romande Hug Musique — Auberge du Siam — Garage AutoPlus — Amis des Jardins Musicaux — Drac de Franche-Comté — Espace Val-de-Ruz — Infomaniak Network s o m m a i r e 6 cinéma 6 8 9 10 11 13 14 19 cine die / raymond scholer cinémas du grütli / serge lachat sortie dvd : the immigrant / christian bernard neuchâtel : international film festival / frank dayen sous la loupe : au fil d’ariane / christian bernard sous la loupe : la chambre bleue / serge lachat les films du mois / christian bernard, serge lachat en exergue : le film pour le 3ème âge... / serge lachat 20 22 24 24 25 26 26 27 berlin : tristan und isolde, castor et pollux, lucia di lammermoor / éric pousaz berne : ariadne auf naxos / éric pousaz turin : guillaume tell / éric pousaz milan : elektra / gabriele bucchi madrid : lohengrin / françois lesueur avignon : cavalleria rusticana / pagliacci / françois jestin nice : dreyfus / françois jestin lyon : simon boccanegra / françois jestin 28 29 30 théâtre forum meyrin : une femme sans histoire / r. schautz chronique théâtrale lyonnaise / frank langlois théâtre de l’orangerie : été 2014 / rosine schautz 31 32 34 35 36 37 38 40 montreux jazz festival / frank dayen piano à ernen : 4 héritiers de géza anda / beata zakes entretien : ada pesch / emmanuèle rüegger entretien : xenia jankovic / régine kopp cernier : jardins musicaux 2014 / frank fredenrich cernier : le scorpion, l’amour et les quatuors / chr. wasselin entretien : maryse fuhrman / frank fredenrich entretien : anne blanchard / pierre-rené serna 42 44 45 46 48 49 50 52 53 54 présentation : à l’ouest, du nouveau ... / éric pousaz portrait : alisa weilerstein / yves allaz portrait : conrad van alphen / pierre jaquet portrait : conrad tao / pierre jaquet portrait : lionel cottet / yves allaz entretien : ricardo castro / martine duruz en résidence : le youth orchestra of bahia / monica schütz portrait : yuri azevedo / monica schütz portrait : alexander gurning / éric pousaz portrait : james ehnes / yves allaz 20 opéra 28 spectacles 31 festivals 41 septembre musical 264 / juillet - août 2014 57 festivals 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 fribourg : musiques sacrées / yves allaz avignon, 68e édition / laurence tièche-chavier avignon par la danse / bertrand tappolet genève : musiques en été / martine duruz entretien : clémentine margaine / pierre-rené serna la roque d’anthéron / maya schautz rossini opera festival pesaro / françois jestin festival berlioz + festival de saint-céré / p-r. serna, é. pousaz rencontres d’évian + la chaise-dieu / m. duruz, c. wasselin en suisse : rencontres de champéry, les haudères, piano à st.ursanne, sommets du classique de crans-montana gstaad : menuhin festival / christian bernard tannay : variations musicales / éric pousaz sion festival : 50 ans ! / yves allaz 70 71 72 72 73 73 74 74 75 75 76 78 79 80 arles : fondation van gogh / régine kopp arles : rencontres photographiques / bertrand tappolet mémento beaux-arts : france musée bonnard, le cannet : les belles endormies mémento beaux-arts : ailleurs courtauld gallery, londres : de brueghel à freud, gravures mémento beaux-arts : suisse romande fondation baur : textiles bouddhiques japonais mémento beaux-arts : suisse alémanique centre paul klee, berne : taking a line for a walk bex & arts / bertrand tappolet valais : l’art au cœur des alpes / françoise-hélène brou lucerne, kunsthalle : obscure transparency / f.-h. brou musée de l’élysée : luc chessex / catherine graf 82 maison européenne de la photographie : françoise huguier & marie-paule nègre / christine pictet comédie française : lucrèce borgia / julien roche opéra : poppée paupérisée / pierre-rené serna caen : rameau maître à danser / pierre-rené serna sceaux : cendrillon / stéphanie nègre opéra de paris : palais de cristal & daphnis et chloé / stéphanie nègre chronique des concerts / david verdier mémento théâtre théâtre 13 / seine : mazùt mémento expositions musée du louvre : masques, mascarades, mascarons 70 expositions 82 paris 83 84 87 88 88 89 90 90 91 91 88 les mémentos ABONNEZ-VOUS! Découvrez chaque mois dans nos pages : L’actualité culturelle d’ici et d’ailleurs Cinéma Concerts Livres Opéra Critiques Danse Expositions Théâtre Entretien Avant-Premières Mémento Scènes Magazine - Case postale 48 - 1211 Genève 4 Tél. (022) 346.96.43 / de France +41 22 346.96.43 www.scenesmagazine.com / e-mail : [email protected] COMMANDE D’ABONNEMENT scènes magazine Nom Prénom Adresse Code Postal Localité Pays un abonnement (10 numéros) à 80 SFrs / Europe : 120 Sfrs. / hors Europe : 140 Sfrs. un abonnement France (10 numéros) à 70 € un abonnement de soutien (10 numéros) à 100 SFrs à partir du N° A renvoyer à SCENES MAGAZINE CP 48 - 1211 GENEVE 4 - Suisse avec le règlement par chèque ou virement sur le CCP Scènes Magazine 12-39372-8 Date Signature EDITO L’été des festivals en Suisse et ailleurs direction Frank Fredenrich, Jean-Michel Olivier, Jérôme Zanetta comité de rédaction Christian Bernard, Serge Bimpage, Françoise-Hélène Brou, Laurent Darbellay, Frank Dayen, Martine Duruz, Frank Fredenrich, Jérôme Zanetta éditeur responsable Frank Fredenrich publicité bimpage-communication Viviane Vuilleumier secrétaire de rédaction Julie Bauer collaborateurs Yves Allaz, Philippe Baltzer, Julie Bauer, Nancy Bruchez, Gabriele Bucchi, Claudia Cerretelli, Romeo Cini, Sarah Clar-Boson, Martina Diaz, Catherine Graf, Emilien Gür, Bernard Halter, Christophe Imperiali, Pierre Jaquet, François Jestin, Régine Kopp, Serge Lachat, Frank Langlois, David Leroy, François Lesueur, Anouk Molendijk, Paola Mori, Michel Perret, Eric Pousaz, Stéphanie Nègre, Christine Pictet, Christine Ramel, Serene Regard, Christophe Rime, Julien Roche, Emmanuèle Rüegger, Maya Schautz, Rosine Schautz, Raymond Scholer, Monica Schütz, Pierre-René Serna, Bertrand Tappolet, Laurence Tièche Chavier, Tuana Gökçim Toksöz, David Verdier, Christian Wasselin, Beata Zakes, François Zanetta maquette : Viviane Vuilleumier imprimé sur les presses de PETRUZZI - Città di Castello, Italie La Grange aux Concerts des Jardins Musicaux © Pierre-W. Henry Le prochain numéro de Scènes Magazine paraîtra le 5 septembre 2014 scènes magazine case postale 48 - 1211 Genève 4 Tél. (022) 346 96 43 de France 00-41-22 346 96 43 www.scenesmagazine.com e-mail : [email protected] c i n é le cinéma au jour le jour Cine Die 67e Festival de Cannes Quinzaine des Réalisateurs 6 France : Le film plébiscité par la presse et les jurys fut Les Combattants, premier long métrage du Français Thomas Cailley, qui l’emportait à cause de l’histoire d’amour peu commune qu’il raconte. Arnaud, un jeune charpentier, a repris avec son frère l’entreprise laissée par feu leur père. La fille d’un client, Madeleine, est belle et sportive, mais un peu garçon manqué. Ses manières brusques (impeccable Adèle Haenel) déconcertent et attirent Arnaud. De plus, elle cherche à s’inscrire dans un camp d’entraînement pour parachutistes de l’armée. Elle est complètement obnubilée par l’idée de la fin programmée de notre civilisation, à laquelle elle veut survivre en entraînant son corps et son mental au maximum. Ni une ni deux, Arnaud s’engage aussi. On y apprend des techniques de survie : p.ex. manger des sardines crues passées au mixer ou nager avec un sac à dos rempli de briques. Jusqu’au jour où Madeleine trouve à redire à la compétence des militaires et décide de quitter le camp sur un coup de tête, suivie par Arnaud. La forêt française se mue alors en jungle pour Robinsons amoureux. Loin des supermarchés, ils pourront s’éclater et ne vivre que de la nature. Mange tes Morts de Jean-Charles Hue suit la virée nocturne dans le monde des « gadjos » de quatre jeunes gens issus de la communauté des gens du voyage à la recherche d’une cargaison de cuivre. Deux d’entre eux sont fiers de leur foi chrétienne qui les empêche de faire trop de mauvais coups. Mais leur impétuosité leur joue quelques tours. Une excursion dans un milieu totalement exotique et assez difficile d’accès, puisque ce n’est que grâce aux sous-titres m a pus : la violence sanguinolente reste dans les normes et on est à des lieues de la sauvagerie sourde de Vinyan (2008). La contribution française de loin la plus jouissive est venue du plus austère des cinéastes français, Bruno Dumont. Il s’agit d’une minisérie réalisée pour la télévision (elle pourra être vue en septembre prochain sur ARTE) intitulée P’tit Quinquin. Située dans le hinterland de Boulogne-sur-Mer, l’action implique l’écolier au bec-delièvre, Quinquin, ses copains de jeu et sa petite amoureuse de la ferme d’en face, un détective grisonnant secoué de tics originaux et protéiformes, accompagné d’un sous-fifre au verbe acerbe, des familles qui ont quelque chose à cacher (oncle handicapé mental ou amant black), le tout sur fond d’enquête criminelle : en effet, en quelques semaines sont découverts quatre cadavres (quelquefois en morceaux) dans des endroits assez inhabituels (p.ex. les boyaux d’une vache retrouvée dans un bunker du Mur de Laurent Lucas et Lola Dueñas dans «Alleluia» l’Atlantique) et le fin fond de tout ça, eh bien, faudrait bien m’élucider cela, Monsieur le commissaire. Hilarant et chaleureux (l’écolier étreint longuement sa copine en lui murmurant « mon amour »), à l’opposé des graves, sérieuses et quelquefois barbantes paraboles qui ont jusqu’ici constitué l’œuvre du cinéaste philosophe, P’tit Quinquin m’a prodigieusement requinqué. Adèle Haenel et Kévin Azaïs dans «Les Combattants» anglais que nous pûmes comprendre de quoi ils causaient en français. Alleluia du Belge Fabrice du Welz se donne comme l’adaptation libre d’un fait divers qui a secoué les Etats-Unis de 1947 à 1949. Le couple Martha Beck et Raymond Fernandez, soudés pour le meilleur et le pire, séduisirent successivement une vingtaine de femmes esseulées pour les escroquer et les tuer. Leur odyssée mortifère fut l’objet de trois adaptations cinématographiques : The Honeymoon Killers (1970, Leonard Kastle), Profundo Carmesi (1996, Arturo Ripstein) et Lonely Hearts (2006, Todd Robinson). On se perd en conjectures sur ce que Welz a voulu apporter de neuf à ce cor- a c t Grande-Bretagne : Catch me Daddy, le premier long métrage de Daniel Wolfe, montre la collusion du crime et de l’Islam dans l’Albion ternie de Monsieur Cameron. Un papa pakistanais a perdu sa fille chérie aux sirènes de la turpitude occidentale. Laila travaille en effet comme coiffeuse et crèche avec son petit ami écossais, chômeur de son état, dans une caravane. Les tourtereaux n’ont hélas pas quitté les environs de la petite ville du Yorkshire où le père a établi son restaurant. Lorsque papa est fin prêt pour le « crime d’honneur », ses sbires, parmi lesquels le frère aîné de Laila, engagent un duo de malfrats anglais comme chiens renifleurs et le couple est vite débusqué. Suit une nuit d’enfer qui rappelle dans son intensité They Live by Night / Les Amants de la Nuit (1947, Nicholas Ray), mais avec une sensation de panique encore amplifiée par le fait que le spectateur est conscient qu’il ne s’agit pas d’une fiction hollywoodienne, mais que la chose est peut-être en train de se dérou- u a l i t é c i n é m a ler quelque part en Angleterre pendant qu’on regarde le film. Les autres fictions britanniques étaient gentilles et civilisées en comparaison : Pride de Matthew Warchus est un récit historique plein de verve et d’humour sur la prise de contact en 1984 entre deux organisations guère en odeur de sainteté chez Margaret Thatcher, les mineurs en grève depuis 10 mois et les activistes (artistes et libraires) de l’association Lesbians and Gays Support the Miners. Au début, les mineurs, homophobes à l’instar du citoyen britannique lambda, aimeraient bien se passer de l’appui des tantouzes, mais comme leurs caisses sont vides et que ces drôles de zigotos amènent de l’argent, quelques représentants locaux sont d’accord pour accueillir une délégation du LGSM. Les épouses échangent bientôt des recettes de cuisine et de masturbation avec les lesbiennes du groupe, les hommes constatent que les homos dansent divinement et ont ainsi un succès fou auprès des filles, et bientôt les plus dégourdis prennent des leçons de danse pour leur faire concurrence. Sus donc à Maggie et à l’homophobie ! Queen and Country de John Boorman fait suite à Hope and Glory de 1987. Si, dans celui-ci, l’auteur revisitait ses années d’enfance sous le blitz de la Seconde Guerre mondiale, il éclaire dans celui-là quelques faits saillants de son service militaire en 1952, au moment où la Guerre de Corée battait son plein. En dehors des premières armes érotiques et du premier amour absolu (dont l’objet est évidemment une aristo inaccessible), le film décrit par le menu la vie de l’homme des casernes avec une galerie savoureuse de portraits d’officiers, du pathologique à pleins tubes (David Thewlis) au professionnel blasé (Richard E. Grant) en passant par l’illuminé des trophées (Brian O’Byrne), à la façon d’un Hogarth, soulignant le trait, mais sans méchanceté excessive, avec une élégance et un humour en somme britanniques. Miles Teller dans «Whiplash» Autres pays: Whiplash de l’Américain Damien Chazelle raconte le chemin de croix d’un jeune batteur sur la longue route de l’excellence et sous la férule d’un chef d’orchestre qui n’admet pas la moindre critique de ses jugements. Jeux de pouvoir où il s’agit de créer ses propres règles, tant les dés sont pipés. Rarement mise en scène m’a autant fasciné par la clarté de son intention. Le Procès de Viviane Amsalem des Israéliens Ronit Elkabetz et Shlomi Elkabetz se déroule à 99% devant un tribunal de rabbins auquel Viviane a demandé d’être divorcée de son mari. Mais le mari ne consent pas. Alors le tribunal a les mains liées. Et cela dure des années, alors que les époux ne vivent plus ensemble, que ni l’un ni l’autre ne voient personne en dehors des membres de leurs familles. La femme n’a tout simplement pas les mêmes droits que l’homme. Cette injustice ne semble pas incommoder les docteurs de la foi. a c t u a l Un autre film israélien m’a bien bouleversé : At li layla de Asaf Korman. Chelly vit avec sa sœur Gabby, handicapée mentale. L’arrivée du beau Zohar dans sa vie va engendrer une fêlure dans la relation symbiotique des deux sœurs. Gabby passe désormais certaines journées dans une institution ad hoc. Un jour Chelly découvre que Gabby est enceinte. Elle prend alors vis-à-vis de Zohar une décision qui va briser deux vies qui n’avaient pas besoin de ça. Cold in July de l’Américain Jim Mickle démarre comme Seong-gyun Lee dans «A Hard Day» un polar, bifurque au bout d’un quart d’heure sur un pamphlet contre les liens entre mafia et police, et finit par devenir la tragédie d’un vieil homme qui se rend compte que son rejeton est un monstre sociopathe qui ne mérite qu’un sort, l’élimination pure et simple. Adapté d’un roman de Joe R. Lansdale, le film réunit pour notre plus grand plaisir Sam Shepard et Don Johnson en vieux redresseurs de torts aidés du jeunet Michael C. Hall, le tueur en série adoré des fans de la série Dexter. A Hard Day du Coréen Seong-hun Kim est l’illustration parfaite de la « loi de l’emmerdement maximum ». En se rendant à l’enterrement de sa mère, Gun-su, détective à la police criminelle, tue un homme dans un accident de voiture. Pour se couvrir, il cache le corps dans le cercueil de sa mère. Hélas, il ne lui a pas fait les poches et voilà que le fichu portable du mort sonne au moment ou l’employé des pompes funèbres va arriver. Ce ne sont que les vingt premières minutes de cette jouissive litanie de contretemps épouvantables qui va s’abattre sur un flic pas plus pourri que la moyenne. Marché du Film Het Vonnis du Flamand Jan Verheyen est le meilleur film de procès que j’aie vu depuis longtemps. L’argumentaire des adeptes de la loi et celui des adeptes de la justice est passé au crible fin à propos de la libération pour vice de forme (suivie de son assassinat) d’un meurtrier. Passionnant. En el Ultimo Trago du Mexicain Jack Zagha Kababie est un road movie où 3 octogénaires entreprennent un voyage pour honorer une promesse faite à leur ami qui vient de mourir. Acteurs époustouflants, finesse de la description, tendresse inouïe des personnages : j’espère que le film va être pris en compétition à Toronto ou à Venise. Voilà, il me reste à vous souhaiter un bel été et ne cherchez pas le programme de la Cinémathèque : elle ferme en juillet/août. Raymond Scholer i t é 7 c i n é m a les cinémas du grütli Hommages En juillet-août, les Cinémas du Grütli présentent quelques sorties à ne pas manquer comme Blue Ruin (2013) de Jeremy Saulnier, Prix FIPRESCI au Festival de Cannes, Ugly (2013) d’Anurag Kashyap, sélectionné pour la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, ou encore Out of the Furnace (2013) de Scott Cooper. que lui rendait la Cinémathèque suisse qui présentait une douzaine de films permettant de mesurer le talent de l’acteur. Si je crois utile de reparler aujourd’hui de cet acteur qui a su s’imposer comme l’un des plus grands de sa génération par l’intensité de son jeu et le large éventail de son registre, c’est que les Cinémas du Grütli lui consacrent à leur tour un hommage dès le 18 juin. Et si le nombre de films montrés est légèrement inférieur à celui de la Cinémathèque, je souligne la présence de 3 films absents à Lausanne : Almost Mais l’été est aussi pour le Grütli l’occasion de présenter trois hommages : l’un à Catherine Deneuve, un autre à Philip Seymour Hoffman, un troisième enfin, après le Festival de Locarno, à la société de production italienne Titanus. Catherine Deneuve 8 Du 23 juillet au 19 août, les Cinémas du Grütli rendent hommage à l’une des plus grandes actrices de cinéma, Catherine Deneuve. Il sera possible de prendre une fois de plus la mesure de son art dans des films récents comme Rois et reines (2004) et Conte de Noël (2008) de Desplechin, Bancs publics, Versailles rive droite (2009) de Bruno Podalydès, Potiche (2010) d’Ozon, Elle s’en va (2013) d’Emmanuelle Bercot …, mais aussi dans des films plus anciens comme (sous réserve à l’heure où j’écris ces lignes) Les Parapluies de Cherbourg (1964) de Jacques Demy, Répulsion (1965) de Polanski, Tristana (1970) de Bunuel, Touche pas à la Femme blanche (1974) de Ferreri, Hôtel des Amériques (1981) de Téchiné, Drôle d’endroit pour une rencontre (1988) de Dupeyron… Et surtout, en projection 35mm Philip Seymour Hoffman dans «Les marches du pouvoir» de George Clooney garantie, une rareté sur grand écran, Hustle / La Cité des Dangers (1975) de Robert Aldrich ! Philip Seymour Hoffman Raymond Scholer a déjà évoqué Philip Seymour Hoffman dans le numéro de juin de Scènes Magazine à l’occasion de l’hommage Catherine Deneuve dans «Elle s’en va» d’Emmanuelle Bercot © Xenix films a c t u a Famous (2000) de Cameron Crowe, Punch Drunk Love (2002) qui marque la poursuite d’une collaboration avec celui qui a probablement le mieux su révéler le talent de Philip Seymour Hoffman, Paul Tomas Anderson. Ce cinéaste l’avait fait remarquer dans son rôle d’homosexuel amoureux d’une star du X dans Boogie Night (1997) avant de lui offrir une sorte de consécration avec son rôle de leader d’un mouvement religieux dans The Master (2012). Probablement sa performance la plus remarquée avec celle où il incarne l’écrivain Truman Capote dans Capote (2005) de Bennett Miller, film qui donne la mesure de l’investissement corporel d’un Philip Seymour Hoffman méconnaissable, amaigri, à la gestuelle maniérée et à la voix haut perchée, bien loin de sa voix habituelle de baryton… Troisième film absent à Lausanne, The Ides of March / Les Marches du Pouvoir (2011) de George Clooney, dans lequel un Philip Seymour Hoffman retors à souhait aide le cinéaste à doubler un film politique d’un film noir ! Et, après leur passage à la Cinémathèque, Happiness l i t é c i n é m a jeux de mots du « bärndütsch » de l’auteur. En racontant en flashes-back l’histoire d’un trentenaire qui, dans les années 80, peine à se réinsérer après une peine de prison pour trafic de drogue, le film comme le roman nous plongent dans la médiocrité d’un gros bourg suisse où tout le monde connaît tout le monde et où le silence règne sur les petites ou moins petites magouilles, un univers que tout Suisse né dans une petite ville ou un village reconnaîtra, même de ce côté de la Sarine. Titanus «Traumland» de Petra Volpe (1997) de Todd Solondz, The talented Mr. Ripley (1999) d’Anthony Minghella, Before the Devil knows you’re dead (2007), le dernier film de Sidney Lumet avant sa mort, ainsi que Doubt (2008) de Patrick Shanley et Good Morning England / The Boat that rocked (2009) de Richard Curtis. Films suisses Les Cinémas du Grütli sortent cet été deux films suisses primés aux Quartz : Traumland de la réalisatrice Petra Volpe qui, dans un style quasi documentaire, fait se croiser à Zürich une Sortie DVD THE IMMIGRANT de James Gray, avec Joaquin Phoenix, Jeremy Renner, Marion Cotillard DVD ou édition combo blu-ray + DVD + copie digitale, Wild Side, Sortie: 20.03.2014 jeune prostituée bulgare et un quatuor de gens aisés financièrement, mais solitaires. Film qui a valu à Bettina Stucky le Prix suisse de la meilleure interprétation féminine. Et surtout Der Goalie bin ig: tiré du roman éponyme de Pedro Lenz qui a collaboré au scénario, le film de Sabine Boss a remporté cette année 7 distinctions dont le Quartz d’Or du meilleur film suisse. Heureuse coïncidence : le livre de Lenz (Prix Schiller en 2011) vient d’être traduit en français par Daniel Rothenbühler et Nathalie Kehrli (Ed. « D’En-bas »), qui s’efforcent de respecter l’oralité, le rythme et les version tronquée de cet entretien (12', avec plus d'extraits du film). Comme d’habitude on pousse à l’achat du blu-ray qui seul permet d’avoir la totalités des bonus. Pratique d’autant plus scandaleuse que l'entretien avec Gray est comme toujours avec lui passionnant, éclairant sa personnalité comme ses choix de mise en scène. Les relations familiales The Immigrant est à la fois un mélodrame confinant à la tragédie, une critique sur fond d’épopée du rêve américain, et le film d’un grand cinéaste dont la thématique récurrente est l’identité et ses clivages. Remarquable travail de reconstitution, précis et réfléchi, avec une mention particulière pour le chef-opérateur Darius Khondji dont la palette s’étend des tons chauds au sépia des photos de l’époque, donnant un sentiment physique de la précarité. Il filme Marion Cotillard comme une Madone de Bellini. Si pour cette édition, image et son sont correctement restitués, il faut comme d’habitude être attentif aux différences concernant les bonus. L' intéressant entretien avec Darius Khondji (20') ne se trouve que dans le blu-ray. L'entretien avec James Gray ne figure en intégralité (36') que dans le blu-ray également, le DVD ne présentant qu'une a c t u Après Locarno, les Cinémas du Grütli proposent une série de films de la société de production Titanus qui joua un rôle déterminant pour le cinéma italien. Née en 1904, ayant surtout fleuri après la 2ème guerre mondiale et accompagnant l’essor du néo-réalisme (en suivant surtout Rossellini et de Sica), cette société a cessé de produire pour le cinéma en 1964 après avoir dépensé des sommes exorbitantes pour Le Guépard de Visconti. Mais elle est encore active aujourd’hui dans la production télévisuelle et représente donc un cas unique de longévité. Bel été cinéphilique à toutes et tous ! Serge Lachat ayant toujours été un thème central dans ses films, The Immigrant compris, l’entendre parler de sa famille et en particulier de ses relations avec ses grands-parents, nous en apprend beaucoup. D’autant qu’il le fait à sa manière, mélange de franchise, de réflexion et d’humour (il fait d’excellentes imitations). Christian Bernard «The Immigrant» avec Bruno (Joaquin Phoenix) et Ewa (Marion Cotillard) a l i t é 9 c i n é m a neuchâtel Fantasy et indépendance Chouette ! Le NIFFF secouera Neuchâtel une 14e fois cet été, en suivant les trois tendances qui ont assis sa réputation : le supergenre fantastique, le nouveau cinéma asiatique et les images numériques, iques, iques. Cette édition déflore l'influence des comics américains dans les réussites du romancier George R. R. Martin et du réalisateur Kevin Smith, mais aussi celle du giallo italien dans l'esthétique cinéma du tandem Cattet-Forzani et celle des trucages des films de grands monstres en noir et blanc. Plus de 100 films attendent quelques 31'000 fans, ainsi que de nombreuses rencontres et événements spectaculaires. Qui donc succèdera à Baratheon, King Kong et Godzilla ? Les têtes d'affiche 10 A tout seigneur, tout honneur : le NIFFF invite le Tolkien américain, le romancier George R. R. Martin. Il est le créateur de Game of Thrones, une histoire d'héroï-fantasy que la chaîne HBO a adapté en une série dont la quatrième saison consacre le succès insolent sur les petits écrans. Journaliste, écrivain de nouvelles de science-fiction, de fanfiction et de romans de fantasy, scénariste de séries TV, amateur de comics, expert au jeu d'échecs, le souverain Martin donnera à ses fidèles sujets une masterclass autour de son empire, en partenariat avec la Maison d'Ailleurs. En outre, le NIFFF a demandé à Martin de programmer quelques-uns des films qui ont influencé son travail. Parce qu'il cache plusieurs atouts dans ses manches, le festival a aussi donné une carte blanche au réalisateur indépendant américain Kevin Smith. Lui aussi fan de comics, ce jeune réalisateur new-jersiais a déjà décroché en 1994 le Prix de meilleur réalisateur au Festival de Sundance pour Clerks, film qui a aussi raflé le Prix du Public à Deauville. Indépendant farouche et grosse gueule revendiquée, ami de Ben Affleck et Matt Damon - mais pas de Prince ni de Tim Burton -, Kevin Smith n'a pas toujours «Clerks» de Kevin Smith a de Spielberg. Enfin, Alexandre Poncet fera le tour des effets indispensables pour bien animer les monstres au cinéma (Godzilla, King Kong, ou son Frankenstein à lui) et Sven Martin trahira quelques secrets des dragons de Game of Thrones - il n'est pas de parenté avec George R. R. Martin. Les toiles arachnéennes Devant les artistes, des films. Parmi le large éventail de ses sélections (compétitions internationale de longs et courts-métrages fantastiques, compétition de courts-métrages suis- tourné des films fantastiques. La preuve, Clerks II, ou la comédie Jersey Girl (Père et fille). A Neuchâtel, il présente Tusk, son dernier né, un film d'horreur qui réunit son ami Michael Parks (acteur récurrent dans les films de Un des dragons de «Game of Thrones», présenté par Sven Martin Tarantino), Johnny Depp et Haley Joel Osment (le gosse du Sixième Sens et de A. I. ses, sections Ultra Movies et Films of the Third Kind, sans compter les cartes blanches), le Intelligence artificielle). NIFFF programme quelques exclusivités, dont Pour une esthétique des images Young Detective Dee : The Rise of Sea Dragon Né en l'an 2000, le NIFFF ne cesse de du Hong-Kongais Tsui Hark, qu'on ne présente regarder devant et de se demander à quoi res- plus tant son œuvre réjouit le festival, ou sembleront les images de demain. C'est dans ce iNumber Number du Sud-Africain Donovan but qu'il a créé le symposium “Imaging the Marsh, adaptation de Zoo City, roman de SF de Future“. Sur deux jours, les 8 et 9 juillet, tables sa compatriote Lauren Beukes. Autre découverrondes et rencontres, ouvertes au public, réuni- te, Discopathe, le premier long-métrage de ront les professionnels de la question. Cette Renaud Gauthier : inconnu hors du monde du année, l'événement se concentre sur la concep- clip et de la pub, le Québécois propose un slastion de jeux vidéo indépendants et sur les effets her (excusez les gros mots !) dans le style des visuels. A côté d'une Game genre publique aura polars des années 70. lieu une masterclass avec le tandem réalisateur Hélène Cattet et Bruno Forzani sur l'esthéEnfin, le NIFFF consacre sa rétrospective tique du giallo et les effets spéciaux dans le au cinéma japonais, histoire de fêter les 150 ans cinéma indépendant. Rappelons-nous leur Amer d'une collaboration helvético-japonaise. Japon – un des dix meilleurs films de l'année 2010 imaginaire voit le jour en collaboration avec le selon Tarantino - et Musée d'ethnographie de Neuchâtel. L'Etrange Couleur Tentaculaire cette année, le NIFFF sait tisser ses des larmes de ton toiles pour mieux happer ses proies… concicorps. De son côté, liantes. Le frisson a du bon ! l'expérimenté Scott Frank Dayen Squires dira tout sur le cloud tank effect, effet qui l'a rendu NIFFF, du 4 au 12 juillet, www.nifff.ch célèbre depuis Rencontres du 3e type c t u a l i t é c i n é m a sous la loupe Au fil d’Ariane La soixantaine venue Robert Guédiguian nous offre ce que le générique désigne comme “une fantaisie”, un film labyrinthique à la fois léger et grave, follement libre. Un film, aussi, marqué par une double distance. Celle apportée par l’âge sans doute, et, pour le spectateur, celle induite par un traitement mêlant librement naturalisme et théâtralité. On pense à Fellini et à Resnais. Distance qui conduit Guédiguian, paraissant soudain moins engagé qu’il a pu l’être, à s’interroger avec Jean Ferrat (dont les chansons sont omniprésentes dans le film): “Faut-il pleurer, faut-il en rire… On ne voit pas le temps passer ». Le labyrinthe est celui dans lequel se perd en toute liberté, entre rêve et réalité, son Ariane interprétée par Ariane Ascaride, sa compagne de vie et de cinéma (16 films écrits pour elle…). Le film sera donc aussi un cadeau offert à de Naxos…) et d’appartements blancs, une simulation en images de synthèse comme les architectes en produisent. Ce grand spectacle se termine à l’atterrissage dans une cuisine qui prend les couleurs du réel, où Ariane s’affaire à préparer son gâteau d’anniversaire. D’emblée se trouvent ainsi annoncés les deux formes ou thèmes dominants du film, le labyrinthe et le survol. Le labyrinthe c’est celui que nous allons parcourir en suivant Ariane errant au gré de ses rencontres, le survol ce sera celui de questions graves aussitôt quittées qu’abordées par ce film riche en références, qui ne s’appesantit jamais. Les rencontres d’Ariane ? Les acteurs de la « famille Guédiguian » : tour à tour Darroussin excellent en chauffeur de taxi désespérant d’être payé (plus tard il sera un metteur en scène au bord du suicide) et tous ceux qui forment le petit monde du Café L’Olympique (transformé en Café L’Olympe par un mauvais contact…) où Ariane trouve refuge : Gérard Meylan, le patron toujours fâché, Jacques Boudet, un Ariane Ascaride et Jean-Pierre Daroussin dans «Au Fil d'Ariane» © Agora Films improbable Américain Ariane Ascaride dont le personnage, se retrou- (il a l’accent d’Oxford) 100% Marseillais, vant seul au début du film face à son gâteau notant sur un carnet ses pensées (mais quand il d’anniversaire, amis et familles s’étant excusés, les lit, on se dit bien que ce sont des citations, part à l’aventure dans Marseille… comme chez Godard, ici de Pasolini, de Tchekhov (sur l’éternelle beauté du Monde qui Le film séduit d’emblée par sa liberté, existait bien avant nous et existera bien après Guédiguian lui ayant donné une forme proche nous…), de Lacan avec son fameux "L' amour, de l’« impromptu » au théâtre, qu’il définit c'est vouloir donner quelque chose que l'on a comme « une petite pièce de poésie faite à toute pas, à quelqu'un qui n'en veut pas..." allure, ludique et jubilatoire ». De fait, dès les premières images nous sommes à la place d’une La séduction du film tient pour une grande caméra aussi aérienne que la musique, survolant part à ce qu’il mélange librement un portrait un dédale de rues, d’immeubles (portant le nom réaliste de Marseille, avec ses lieux et son petit a c t u a l i t peuple chers à Guédiguian, à une veine poéticofantastique. Sur le versant réaliste, on trouve le café face à la mer, dos aux raffineries; le vol à la tire dont est victime Ariane; le vieil Africain qui perdrait sa retraite s’il retournait dans son Afrique jamais oubliée, car c’est la loi… Sur le versant poétique, la tortue qui parle avec Ariane (et là c’est au Bird People de Pascal Ferran que le cinéphile peut penser) ; la visite de nuit au musée d’Histoire naturelle du Palais Longchamp où le vieil Africain a passé 40 ans en compagnie des animaux d’Afrique, mais empaillés ; l’immersion dans la mer, pour leur donner une sépulture, des fœtus d’animaux volés au musée, sur le Stabat Mater de Pergolesi (cet adieu poignant aux êtres jamais nés seraitil un message très privé adressé à Ariane Ascaride ?). Ce ne sont là que quelques-uns de ces moments, quelques-uns des fils (d’Ariane) que le spectateur tirera ou non, au gré de sa fantaisie et de sa culture. Ce qui noue la gerbe de cet inventaire à la Prévert? Le sentiment que Guédiguian fait le tour de tout ce qu’il aime et qui l’attache à la vie, pêle-mêle, la musique, les livres, la beauté du corps féminin, son Marseille à lui, plutôt prolo, Ariane Ascaride, le cinéma… parce qu’ « on ne voit pas le temps passer » et que la vie devant soi paraît soudain bien courte. Le cinéma : de toutes les références dont le film est riche - Guédiguian parle de révérences et de reconnaissances de dettes - ce sont les références purement cinématographiques qui retiennent le plus l’attention. Avant tout celles renvoyant à Fellini. Comment ne pas penser à Giulietta Massina en voyant Ariane Ascaride invitée par Guédiguian à « sortir son clown » comme il le dit. Et puis il y a la baignade dans la fontaine, clin d’œil explicite à La Dolce Vita. Mais, plus profondément, c’est à un autre film de Fellini que l’on pense lorsque le film arrive à sa fin. Ariane trouve enfin la sortie du labyrinthe : ce sera le spectacle. Elle chante la chanson de Kurt Weill/Bertold Brecht que sa mère chantait, devant tous les personnages réunis, et lorsqu’elle se sera réveillée de ce qui n’était qu’un rêve, pourra s’établir alors un va-et-vient entre personnages, acteurs, et membres de la famille d’Ariane (donc de Guédiguian). Avec ce Fil d’Ariane, bel hommage rendu à sa vraie famille, celle de ses personnages et des acteurs, Guédiguian nous offre son 8 ½. Le compliment n’est pas mince. Christian Bernard é 11 c i n é m a sous la loupe La Chambre bleue Présenté à Cannes cette année dans la section Un certain regard, La Chambre bleue de Mathieu Amalric est un film court (1h16), sec, tout le contraire de Tournée, son premier long-métrage présenté au Festival, lui aussi, il y a 4 ans. Tournant avec une équipe réduite et un budget minimal, l’acteur-cinéaste a épuré au maximum sa réalisation, accordant une grande attention au cadre (le film retrouve le format 4/3 d’antan), privilégiant les plans fixes et relativement courts, mais très composés, avec des personnages qui n’apparaissent presque jamais dans leur totalité comme s’ils étaient enfermés dans un espace trop petit pour eux… Bref, Amalric raconte d’une manière très personnelle une histoire qui relève du fait divers déjà mille fois vu : après nous avoir exposé la relation charnelle torride (violente même puisque le film s’ouvre sur la lèvre de l’homme mordue au sang) de ses protagonistes dans la chambre d’hôtel bleue du titre, le cinéaste nous plonge immédiatement par le montage dans des scènes d’interrogatoire de police et des scènes chez le juge et chez un psychologue. Dans ce va-et-vient nerveux entre passé et présent, au gré des mêmes questions x fois posées, le spectateur essaie de découvrir peu à peu ce qui s’est passé. Il apprend ainsi qu’Esther et Julien s’étaient connus à l’école, mais que, issu d’une classe sociale inférieure, le garçon n’avait pas osé abordé la jeune fille. Ils s’étaient ensuite perdus de vue. Elle était devenue pharmacienne dans la pharmacie familiale de son époux, lui avait quitté la petite ville pour sa formation. A son retour, après être devenu agent régional d’une multinationale de machines agricoles et avoir fondé une famille, il s’était installé dans une magnifique maison moderne en bordure de la ville et menait une vie confortable et sans problème jusqu’à ce qu’une rencontre de hasard déclenche une relation passionnelle (« une révélation de la sensualité », dit-il au juge) qui culpabilisait Julien, mais qu’Esther s’obstinait à faire durer. Quelque temps après, le mari déjà malade de la pharmacienne était décédé « de mort naturelle » selon le médecin de famille, mais peu de temps après, la mort de Delphine, l’épouse de Julien, avait lancé l’enquête, les a c t u interrogatoires et le procès des protagonistes. De façon assez classique, le spectateur comme le juge cherchent bien sûr savoir ce qui s’est passé exactement, à deviner si certaines scènes pourraient révéler les intentions de Julien de tuer son épouse, comme lors de jeu du « bouchon » poussé trop loin lors d’une baignade, ou cette étrange façon de faire trembler l’échelle sur laquelle Delphine était montée pour enlever les décorations de Noël. Mais plus que dans le déchiffrement de ce qui s’est passé exactement, l’essentiel du film est bien plutôt dans l’atmosphère trouble qui parler d’extase ?), et qui semble peu à peu contaminer toute sa vie. Ainsi il a de moins en moins de vrais contacts avec sa femme ou sa fille, et, lors des interrogatoires, il répond comme s’il n’était pas vraiment concerné, comme s’il n’était pas absolument sûr de ce qu’il avait vécu ou même de ce qu’il est en train de vivre au présent. « La vie est différente quand on la vit et quand on l’épluche aprèscoup », dit-il au juge perplexe devant ce flottement. On le sait, Amalric excelle dans ce jeu halluciné (il suffit de penser à son jeu dans L’Amour est un Crime parfait des Larrieu ou dans La Vénus à la fourrure de Polanski…), mais Stéphanie Cléau (sa compagne dans la vie et qui n’est pas comédienne !) comme Léa Drucker réussissent également à troubler le spectateur par leur manière d’être plus les témoins que les actrices de ce qui leur arrive. Et la musique de Grégoire Hetzel, inspirée de celle de Bernard Herrmann (et parfois un peu trop insistante), renforce notre indécision en donnant des accents « lynchiens » à ce banal fait divers… «La Chambre bleue» © Look Now ! baigne cette histoire à la fois limpide et insaisissable, dans cette étrangeté qui contamine tout le film : ainsi la « rime » qui va de l’abeille que Julien chasse de la chambre d’amour à celle qui se pose sur la glace de sa fille paniquée pour s’arrêter enfin longuement sur celles qui, peintes, se retrouvent multipliées sur le plafond bleu du tribunal donne à l’univers du film une inquiétante étrangeté. Etrangeté qui se retrouve surtout dans la façon de Julien de se sentir comme « à côté de lui-même », état qu’il connaît dans sa relation passionnelle (peut-on a l i t Ainsi, paradoxalement, alors même que l’histoire se dévoile sans qu’il y ait de vraie contestation de quiconque sur ce qui s’est passé, le spectateur reste indécis, ne sait pas si les coupables sont vraiment coupables et si le jugement rendu à l’unanimité est juste. Indécision qui semble partagée par Julien lui-même à sa sortie du tribunal au plafond bleu comme la tapisserie de la chambre… Serge Lachat é 13 c i n é m a femme par le mari !), derrière le fonctionnement très ritualisé de la justice rabbinique, ce qui se dessine, c’est une société israélienne caricaturalement patriarcale ! Une femme témoin met même ce caractère patriarcal en rapport avec l’immigration massive de juifs venus de Russie et se fait illico remettre à l’ordre! Ce qui signifie que, pour les juges comme pour tous les hommes qui passent devant ce tribunal (sauf pour l’avocat de Viviane), la femme est considérée comme l’objet, la propriété de son mari. Ils ne peuvent simplement pas concevoir qu’une femme puisse désirer vivre seule ! Et encore moins admettre qu’elle laisse exploser sa colère et braver l’autorité (forcément patriarcale) devant l’enfermement auquel tous la condamnent… Un sujet difficile, un flot de paroles quasiment ininterrompu, pas vraiment d’action, on pourrait craindre le pire. Or le scénario et les dialogues sont si brillants, tous les acteurs si excellents que je ne me suis pas ennuyé une seconde ! Ce film restera exemplaire dans la liste des films de procès. Les films du mois 14 Serge Lachat Ronit Elkabetz dans «Gett, le procès de Viviane Amsalem» © Agora Films GETT, LE PROCES DE VIVIANE AMSALEM de Ronit et Shlomi Elkabetz, avec Ronit Elkabetz, Simon Abkarian, Menashe Noy,… (Israël , France, Allemagne, 2014) Le film de procès est un genre prisé du cinéma. Il permet de tourner avec relativement peu de moyens et s’apparente à la tragédie classique (unités de temps, de lieu et d’action). De tels films ont fleuri dans le cinéma classique américain (12 Hommes en colère (1957) de Sidney Lumet, Jugement à Nüremberg (1961) de Stanley Kramer, Du Silence et des Ombres (1962) de Robert Mulligan, et la même année Le Procès d’Orson Welles…) et plus récemment encore avec Le Verdict (1982) de Lumet encore, Music Box (1990) de Costa-Gavras, L’Affaire Pélican (1993) d’Alan Pakula,… Présenté à Cannes cette année dans « Quinzaine des Réalisateurs », le film de Ronit et Shlomi Elkabetz s’inscrit donc dans un genre balisé, mais il a pour lui l’originalité (nous sommes confrontés à un tribunal rabbinique en Israël aujourd’hui) et la rigueur (nous sommes dans un huis-clos, toujours dans la même petite salle de ce tribunal rabbinique (seules quelques pauses dans le couloir adjacent permettent une respiration), avec des séances qui se répètent mois après mois, année après année (plus de 5 ans !!!) pour a THE FACE OF LOVE régler la question du divorce d’un couple en crise. Pour comprendre un tel étalement dans le temps, il faut savoir qu’en Israël, il n’y a ni mariage civil, ni divorce civil. Seuls des rabbins peuvent prononcer une union ou sa dissolution. Mais cette dissolution n’est possible qu’avec le consentement du mari qui peut refuser sans fin la décision/proposition des juges. C’est ce qui se passe dans le cas présent : au début du film, Viviane Amsalem demande le divorce depuis 3 ans, son mari le lui refuse. Et nous assistons aux passes d’armes des avocats (pour le mari, c’est son frère), des témoins et des juges. Comme la demande se fonde uniquement sur la fin de son amour pour son mari auquel elle n’a par ailleurs rien à reprocher (il s’est montré responsable dans l’entretien de la famille, il ne s’est jamais montré violent physiquement (sa violence est plus pernicieuse), il n’a pas été infidèle, s’est montré bon père et manifeste obstinément son désir de la reprendre), les juges vont assez rapidement montrer de la compréhension pour le point de vue masculin. C’est là que le film excelle : derrière le tragicomique (le film évite d’être plombant en étant souvent drôle), l’absurde de la procédure, derrière les duels oratoires des avocats, la manifestation par les juges de leur autorité, sinon de leur autoritarisme, au gré du défilé des témoins (parfois en couple, avec contrôle de la parole de sa c t u a d’Arie Posin, avec Annette Bening, Ed Harris, Robin Williams… (USA, 2013) Nikki (Annette Bening), belle femme d’âge mûr, architecte d’intérieur (son originalité est de meubler pour les mettre en valeur des maisons et appartements destinés à la vente ; elle travaille donc en quelque sorte dans la fiction !), est veuve depuis cinq ans. Elle a perdu Garrett (Ed Harris), l’homme de sa vie, qui s’est noyé au cours de vacances au Mexique. Elle a essayé d’en faire le deuil en vidant sa maison de tout ce qui pouvait le lui rappeler (à l’exception d’une photo du couple qu’elle cache). Par ailleurs, elle est mère d’une fille adulte qui ne rencontre pas, elle, l’homme de sa vie et qui vit loin de San Francisco, à Seattle. Un jour, Nikki croise le parfait sosie de son défunt mari, Tom (Ed Harris encore), professeur d’art, qu’elle séduit d’autant plus facilement qu’il est disponible, quitté par sa femme, avec laquelle pourtant il entretient des rapports encore très forts. Tom cache à Nikki une faiblesse cardiaque, et elle ne lui dit presque rien de son défunt mari, pas plus qu’elle ne parle de sa nouvelle relation à sa fille, ni à quiconque, surtout pas à son voisin et ami (Robin Williams). Cette romance cachée a-t-elle une chance de réussir ? Le film rappelle forcément Vertigo (référence assumée, l’affiche du film d’Hitchcock fait l i t é c i n é m a «The Face of Love» © Ascot Elite partie des décors professionnels de Nikki), mais la comparaison nuit au film d’Arie Posin qui n’installe aucun trouble dans l’esprit du spectateur. Le scénario est maladroit, souvent peu crédible (pourquoi ces cachotteries, pourquoi une fin aussi invraisemblable et aussi précipitée ?), et le cinéaste se contente de jouer la carte du mélodrame, brassant romance, âge mûr, derniers feux de l’amour, douleur et désillusion. Même si Annette Bening et Ed Harris réussissent à rendre cette histoire attachante, les invraisemblances et les coups de force du film et du scénario laissent le spectateur sur sa faim. penser), en passant par The Player (d’Altman en 1992). Mais en même temps, le film de Cronenberg se distingue de tous ces films par une curieuse absence de « regard » : on ne sait pas vraiment qui regarde ce monde en déliquescence et on ne sait pas vraiment à qui s’adressent les regards que les personnages adressent à la caméra… Car, bien sûr, cette dénonciation d’Hollywood se fait essentiellement par le portrait d’une série de personnages tous plus névro- jeune fille (Mia Wasikowska) qui porte des traces de brûlures sur le corps et le visage (seule à rappeler les mutilations des personnages qui parcourent les premiers films de Cronenberg) et qui se fait engager (comme quoi ? assistante ? femme à tout faire ?) par une actrice mûrissante (Julianne Moore), constipée (!) et rendue hystérique par la peur de ne plus trouver de rôle et surtout par son obsession à vouloir endosser le rôle qui avait rendu sa mère célèbre (voir la scène où elle explose littéralement de bonheur lorsqu’elle apprend qu’elle a le rôle parce que celle à qui il était destiné a accouché d’un enfant mort-né !!!). La jeune fille tombe par ailleurs amoureuse d’un chauffeur de limousine (Robert Pattinson) qui rêve de devenir scénariste ou acteur. En leur compagnie, le spectateur croise un enfant-star (Evan Bird), sorte de mini Justin Bieber totalement capricieux, tyrannique, grossier, parfaitement au courant des règles du jeu hollywoodien et qui donc humilie un partenaire plus jeune qui pourrait devenir un concurrent; puis il rencontre un curieux coach pour comédien qui est aussi ostéopathe, psychanalyste et gourou aussi prétentieux que cynique (John Cusack). Les (véritables ?) liens entre ces différents personnages ne sont dévoilés que progressivement, et les intrications des différentes histoires n’apparaissent que tardivement. Mais curieusement tout est dévoilé « à froid », sans qu’une Serge Lachat MAPS TO THE STARS de e David Cronenberg, avec Julianne Moore, Mia Wasikowska, John Cusack,… (CAN-USAFR-GER, 2014) Il paraît que Cronenberg a mis plus de huit ans avant de pouvoir porter à l’écran le scénario de Bruce Wagner (connu comme auteur de la série « White Palms »). A mon modeste niveau, j’avoue avoir mis plus d’une semaine avant de pouvoir rédiger cette chronique. Ce film contient en effet quelque chose de mystérieux et de « malaisant » qu’il est difficile de mettre au jour. Bien sûr, le spectateur voit immédiatement qu’il se trouve devant une peinture acerbe du monde hollywoodien et de l’usine à rêve qui domine encore la production cinématographique. De ce point de vue, Maps to the stars se situe dans une lignée qui va de Sunset Boulevard (de Wilder en 1950) à Mullholland Drive (de Lynch en 2001 auquel Maps to the Stars fait souvent a c t u Julianne Moore dans «Maps to the star» © Pathé films sés, psychotiques, tordus et avides d’argent et de gloire les uns que les autres, personnages qui se croisent longtemps sous nos yeux avant que nous déchiffrions les liens qui les unissent. Celle qui semble la moins « tordue », à laquelle le spectateur est prêt à s’identifier, est une mystérieuse a l i t véritable attente ait été créée par le cinéaste qui, plus encore que dans ses autres films, abat ses cartes comme dans un jeu cérébral et glacial. Même les scènes les plus violentes semblent filmées avec distance. Ainsi la scène dans laquelle la jeune fille tue sa patronne en la frappant avec é 15 c i n é m a une statuette dorée (un Oscar ?) s’étire d’abord longuement sur les problèmes gastriques, les flatulences et les pets de l’actrice assise sur les toilettes (courageuse Julianne Moore de mettre ainsi en danger son image d’actrice!) Glaciale enfin « l’explication » de toute cette pourriture comme produite par l’inceste du couple central. Cette révélation, loin de bouleverser le spectateur, arrive comme un constat médico-légal qui dénonce toute la production hollywoodienne comme le fruit sec (mort-né) d’un univers endogamique. C’est dire que Maps to the Stars dessine non seulement la cartographie d’Hollywood avec les adresses de ses vedettes, mais s’offre ultimement comme l’autopsie d’un corps mort capable seulement de produire dans une répétition sans fin des films « morts-nés ». Mais ce faisant, le film s’offre également comme un cadavre sans plus rien de réellement vivant. Serge Lachat LA RITOURNELLE 16 de Marc Fitoussi, avec Isabelle Huppert, JeanPierre Darroussin, Michael Nyquist… (France, 2013) Brigitte (Isabelle Huppert) et Xavier (JeanPierre Darroussin) sont éleveurs (de Charolais) en Normandie. Ils ont dans les 50-60 ans, de grands enfants qui ont quitté le domicile (le fils fait le désespoir de son père en voulant devenir clown et faire une école de cirque plutôt que de reprendre la ferme !). La vie professionnelle exigeante et l’usure du temps ne sont pas sans effet sur le couple. D’autant plus que, sans être vraiment une Madame Bovary, Brigitte semble avoir d’autres aspirations que l’élevage. Un soir, une fête organisée chez les voisins pour le bac de leur fille l’amène à croiser Stan, charmant jeune homme qui pourrait être son fils et que le harcèlement dont il fait l’objet de la part des filles de son âge pousse à s’intéresser à une vraie femme. Ravie de voir qu’elle peut encore séduire, Brigitte, qui souffre d’un psoriasis sur la poitrine, prétexte un rendez-vous chez un médecin de Paris pour s’éloigner 2-3 jours de la ferme. Les retrouvailles avec Stan à Paris la confrontent à la médiocrité et à la lâcheté du petit séducteur, mais elle décide de rester tout de même dans la capitale. A son hôtel, elle fait la connaissance de Jesper (Michael Nyqvist), un parodentiste danois venu pour un congrès. Celui-ci saura charmer Brigitte, d’autant plus qu’il n’est pas rebuté par ses problèmes de peau… Pendant ce temps, Xavier, qui a compris ce qui se passait, cherche à rejoindre sa a Isabelle Huppert et Jean-Pierre Darroussin dans «La Ritournelle» © Frenetic Films femme à Paris. Il la découvre avec Jesper, rentre à la ferme en passant voir son fils dont il découvre et admire enfin le travail, et, après une explosion de jalousie, comprend qu’il peut encore sauver son couple. Le film de Fitoussi revisite une histoire déjà x fois vue, et même si le cinéaste en est bien conscient (le titre du film en témoigne), il ne réussit pas à redonner beaucoup de sève à cette ritournelle en augmentant l’âge des protagonistes. Malgré un Darroussin crédible en éleveur, le film ne quitte jamais les clichés. Est-ce parce qu’Isabelle Huppert est moins convaincante dans son rôle de paysanne rêveuse qui fait une crise d’adolescence tardive ? Est-ce parce que Paris n’est jamais qu’une carte postale touristique (la scène en bateau-mouche !) ? La rencontre de Jesper qui assume son rôle de touriste (il veut même voir Paris du haut de la Grande Roue !) ne suffit pas à justifier un parcours aussi traditionnel… Seule l’indigence du scénario « explique » ces plans de pur « remplissage » qui ne réussissent en tout cas jamais à donner une dimension contemplative au film. Quant à la réconciliation finale du couple au bord de la mer Morte (sur un conseil thérapeutique donné par l’amant danois), elle relève plus du tour de passe-passe scénaristique que d’une vraie compréhension de la crise qui vient d’être traversée… Serge Lachat THE HOMESMAN de Tommy Lee Jones, avec Tommy Lee Jones, Hilary Swank (USA, 2014) Après le succès à Cannes en 2005 de Trois enterrements, déjà un western tentant de réinven- c t u a ter le genre (difficile de nos jours de faire un western purement classique), l’acteur-réalisateur récidive sur la Croisette avec The Homesman. On a beaucoup lu que l’on avait à faire à un western allant à contre-courant du genre: rôle inhabituellement important joué par les femmes (certains critiques allant jusqu’à en faire un western féministe), chariot allant non pas vers l’ouest, mais vers l’est, de la sauvagerie à la civilisation, description également inhabituelle de l’extrême dureté de la vie de pionnier sur la frontière, traitement différent des scènes obligées (le saloon, les Indiens)... Le résultat en serait une démythification du genre et des valeurs de courage ordinairement attachées à la conquête de l’ouest. Pourtant, s’il est vrai que les ingrédients du mythe ici présents ne sont pas mis au service du mythe par Tommy Lee Jones, le film n’en donne pas moins une impression d’ambiguïté plus ou moins calculée qui fait à la fois son intérêt et sa faiblesse. L’histoire située dans les années 1850 est celle de Mary Bee Cuddy (Hilary Swank), une femme indépendante et déterminée dans la trentaine s’occupant seule mais avec succès de sa ferme dans l’immensité du Nebraska. Un peu trop directe et décidée, elle fait fuir les hommes à qui elle propose le mariage. Trois femmes de la communauté sont devenues folles suite à diverses tragédies (viols, morts d’enfants évoqués en flash-back), et devant le désistement de leurs maris, Mary Bee se porte volontaire pour les escorter dans un chariot vers l’est, direction une institution religieuse prête à les recueillir en Iowa. Le voyage étant éminemment dangereux pour quiconque, a fortiori une femme seule, elle n’hésite pas, tombant sur George Briggs (Tommy l i t é c i n é m a Lee Jones) un déserteur et voleur de terrains abandonné sur un cheval la corde au cou, victime de la loi de Lynch, à le libérer moyennant son engagement à l’accompagner dans son long périple. L’engagement est d’autant plus facilement obtenu qu’il n’a pas trop le choix, et qu’une prime de 300$ lui est promise. Commence alors un road-movie avançant au rythme lent du voyage, ménageant diverses rencontres et autant de pistes scénaristiques, pour certaines assez vite abandonnées. Celle avec les méchants Indiens ne débouchera pas sur la traditionnelle fusillade, ceux-ci se contentant de partir du chèque ayant fait faillite, il fera tout-de-même fabriquer avec l’argent de Mary Bee Cuddy une pierre tombale à son nom; mais la pierre tombera accidentellement à l’eau depuis le bac la transportant… On voit que le scénario, flirtant volontiers avec l’humour noir, s’emploie par ses virages surprenants à miner tout message trop bétonné. Il donne l’impression d’avancer à la manière de Briggs qui répond toujours à la question de ce qu’il compte faire, “je ne sais pas”. Ça ne manque pas de charme. Reste au bout du compte la description d’un monde de duretés où règnent sans partage, la nécessité, le hasard et l’indivi- Hilary Swank dans «The Homesman» avec un cheval. Autre piste davantage suivie, celle de la religion, si fondamentale pour cette société de pionniers et pour Mary Bee en particulier, conduira à des conclusions ambiguës : la droiture et le dévouement de Mary Bee la croyante, la mènent pourtant au suicide; celui-ci n’empêche pas Briggs d’abandonner les femmes en les vouant à une mort certaine; et s’il les amène finalement à bon port, en une apparente rédemption, c’est parce qu’elles l’ont rattrapé à son campement le soir… Et quand Briggs, ayant demandé de quoi nourrir ses protégées dans un hôtel à la Lucky Luke au luxe improbable, se trouve brutalement éconduit par les propriétaires, il les maudit et les voue aux démons, mais il préfère s’assurer du bon fonctionnement de la justice divine en mettant lui-même le feu à l’hôtel… Mais à l’arrivée, quand il apprendra que ses 300$ ne peuvent lui être versés, la banque d’émission a c t u dualisme forcené. Comme dans un western en somme… Hilary Swank dans son meilleur rôle depuis longtemps porte le film, Tommy Lee Jones soignant son personnage de bougon intelligent s’offre des morceaux de bravoure et des gros-plans. Sans être un grand film The Homesman, en fait juste un western de plus, se laisse regarder avec plaisir. Christian Bernard L’INTREPIDO de Gianni Amelio (Italie 2013), avec Antonio Pane, Livia Rossi, Gabriele Rendina… Présenté à la Biennale de Venise en 2013, où son acteur principal Antonio Panese reçut le Prix du meilleur acteur, le film d’Amelio arrive enfin sur nos écrans. Film « inclassable » (est-ce une comédie, un drame social, un regard « politique » a l i t sur l’Italie (ou le monde) en crise économique d’aujourd’hui ?), il est à la fois héritier de la tradition néo-réaliste italienne et d’un cinéma plus onirique. Tout entier attaché à suivre son protagoniste qui est quasiment de tous les plans, il nous raconte la vie d’un anti-héros quinquagénaire qui, depuis qu’il a perdu son travail (quasiment rien ne nous est dit de ce travail) accumule les petits boulots. Il est devenu LE remplaçant idéal, curieusement capable d’exercer tous les métiers, de maçon à conducteur de tram, d’aide-soignant à cuisinier, de bibliothécaire à livreur de pizza… Encore plus curieusement, il semble trouver dans l’exercice de ces différentes activités un plaisir sans cesse renouvelé dans la rencontre des autres, au point qu’il semble indifférent à la question de la rémunération. Divorcé, il vit une relation privilégiée avec son fils de 25 ans, dans lequel il voit un musicien prometteur, mais dont il ne mesure pas tous les problèmes existentiels. Voyant toujours quelque chose de positif même dans les situations apparemment désespérées, il refuse de se laisser abattre et cherche à consoler les « âmes perdues » qu’il croise. Ange ou saint, on ne sait trop comment considérer cet Antonio Pane bon comme le pain. Mais Amelio croit-il possible de nous refaire Miracle à Milan (1951) de Vittorio de Sica ? Si son film garde par bien des aspects des allures de conte, son héros Antonio, même s’il ressemble à Toto, ne sauve personne. Et surtout pas la jeune fille dépressive dont il tombe amoureux et à laquelle il prodigue conseils et encouragements sans réussir à empêcher son suicide. Pas plus qu’il ne pourra sauver l’adolescent que son patron mafieux lui demande d’accompagner chez son père ou son oncle pour un rendez-vous qui se révèle une sordide rencontre avec un pédophile. Tout ce qu’Antonio pourra sauver en fin de compte, c’est sa propre droiture, son optimisme envers et contre tout. L’Intrepido nous encourage (comme le père le fait pour son fils sur le point de tout abandonner) à essayer de trouver le bonheur malgré tout, à n’être pas trop sévères avec nousmêmes. Film frustrant et émouvant, répondant au désir inextinguible d’Amelio de raconter un conte moderne, mais sans illusions quant à la situation dans une Europe en crise… Serge Lachat é 17 Abonnez-vous ! www.lepoche.ch Aurore Faivre, comédienne CRÉATION VISUELLE JEAN-MARC HUMM, LA FONDERIE PHOTOGRAPHIE AUGUSTIN REBETEZ LE POCHE GENÈVE EST SUBVENTIONNÉ PAR LA VILLE DE GENÈVE (DÉPARTEMENT DE LA CULTURE) LA RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE. IL EST GÉRÉ PAR LA FONDATION D’ART DRAMATIQUE (FAD) LE POCHE Une saison qui scintille... c i n é m a en exergue... Le film pour le 3ème âge, un genre ou une mode ? La sortie quasi simultanée sur nos écrans de Face of Love d’Arie Posin et de La Ritournelle de Marc Fitoussi, juste après Le Vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire du Suédois Felix Herngren, ne peut manquer d’attirer l’attention. Et de renforcer l’impression que la multiplication de films racontant des histoires de personnages mûrs, sinon franchement vieux, n’est pas le fruit du hasard. A l’évidence, cette multiplication est le résultat de deux vieillissements : celui d’actrices et d’acteurs que tous nous considérons comme excellents (et que donc nous avons plaisir à voir et revoir sur les écrans), et celui du public de cinéma. Il suffit de faire la queue aux caisses pour constater qu’à l’exception des films pour enfants et des blockbusters qui ciblent un public adolescent, la plupart des films drainent un public plutôt âgé. On peut donc légitimement imaginer que scénaristes et cinéastes (vieillissant eux aussi) cherchent certes à raconter des histoires « à portée universelle », mais plus précisément destinées à un public d’un certain âge, comme on dit. Un film a peut-être plus que les autres contribué par son succès à Cannes en 2013 et dans la foulée par son succès public à valoriser cette tendance. C’est Amour (2012) de Michael Haneke avec Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant qui incarnent un couple âgé attendant la mort dans un huis-clos bouleversant. Vrai film d’auteur, ce film aura montré que les personnes âgées et leurs problèmes de fin de vie ne font pas peur aux spectateurs et a donc peutêtre encouragé les producteurs à exploiter ce nouveau « filon ». Difficile pour moi de dater précisément et avec sûreté le moment où est née cette « tendance » qu’illustre parfaitement Quartet (2012), le premier film de Dustin Hoffman comme réalisateur, qui raconte la vie dans une maison de retraite d’anciens musiciens et chanteurs (au générique, Hoffman reconnaît sa dette au documentaire de Daniel Schmid Le Baiser de Tosca, 1984). Maggie Smith, Tom Courtenay, Bill Connolly et Pauline Collins y jouent les rancœurs, jalousies, amours et amitiés d’un quatuor de chanteurs d’opéra… Ce film (qui repasse ces derniers temps sur a c t u majoritairement les productions. Ainsi, en 2012 toujours, Meryl Streep et Tommy Lee Jones s’en donnaient à cœur joie dans Tous les espoirs sont permis de David Frankel, une histoire de couple en thérapie conjugale. Ainsi encore, en 2013, Marion Vernoux permettait à Fanny Ardant de retrouver les faveurs du public dans Les beaux Jours, une comédie dans laquelle elle joue une dentiste retraitée qui se voit offrir « un forfait découverte » dans un club de retraités où elle redécouvre l’amour et les plaisirs de la sexualité (avec un animateur plus jeune, il est vrai)… La tendance peut prendre des formes plus grossièrement mercantiles lorsque, dans Las 19 «Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire» de Felis Herngren © Ascot films Canal Plus) est intéressant dans la mesure où il utilise très majoritairement des actrices et acteurs âgés et ne se contente pas de plonger « homéopathiquement » un ou deux acteurs vieillissants dans une histoire de gens en pleine force de l’âge, comme cela arrive fréquemment pour Catherine Deneuve, Helen Mirren, Meryl Streep par exemple pour les actrices, et Tommy Lee Jones, Harvey Keitel pour les hommes. La productrice de Quartet déclarait d’ailleurs explicitement : « Je crois que nous sommes en train de nous éveiller à l’idée qu’il existe aujourd’hui un immense public dont on ne s’est pendant trop longtemps pas du tout occupé. Il y a une forte demande pour de bonnes et surprenantes histoires touchant au crépuscule de la vie. Quartet répond à cette demande en montrant que le crépuscule n’est pas forcément synonyme de déprime, loin de là ». C’est évidemment vers des comédies romantiques plus « légères » que vont se tourner a l i t Vegas (2013) par exemple, Jon Turteltaub offre à Morgan Freeman, Michael Douglas, Kevin Kline (le plus jeune avec ses 67 ans !) et Robert de Niro une seconde jeunesse au gré d’une folle virée dans la capitale du jeu pour enterrer la vie de garçon de l’un d’entre eux ! Ou, pire encore, voire grotesque, lorsque Sylvester Stallone lance Arnold Schwarzenegger, Bruce Willis, Harrison Ford et d’autres « vieillards » encore fortement dotés en testostérone dans l’aventure explosive d’Expendables (2009). Reste à savoir si ces quelques rappels permettent d’affirmer que nous sommes en train d’assister à l’émergence d’un vrai « genre » cinématographique (qui, on le voit, peut d’ailleurs se fondre dans tous les genres au sens classique du mot) ou s’il s’agit seulement d’une mode passagère ? Serge Lachat é o p é r opéra à berlin L'opéra à toutes les sauces Avec ses trois scènes lyriques offrant des spectacles différents chaque soir, Berlin est un lieu idéal pour expérimenter les diverses approches qu'adoptent les metteurs en scène pour revitaliser le répertoire. Plongée dans un monde foisonnant d'idées ... et de traditions. Un Tristan embourgeoisé 20 Réunissez toutes les images que vous suggère la légende de Tristan et Yseult et son adaptation par Wagner pour la scène lyrique et oubliez-les. Graham Vick a opté pour un renouvellement radical de l'iconographie habituelle en plaçant ses personnages dans un cadre délibérément bourgeois, un appartement aux meubles confortables où la passion qui brûle entre Tristan et Isolde est symbolisé par un grand luminaire enveloppé d'un large drap noir, - pour annoncer la fin tragique ? Plusieurs personnages hantent ce lieu sans qu'on comprenne ce qu'ils y cherchent. On y croise une cuisinière aux fourneaux, un homme en pleine séance de rasage, un vieillard aux toilettes, visiblement torturé par ses hémorroïdes, et j'en passe. Presque constamment sur scène, Tristan et Isolde font semblant de s'ignorer quand le livret ne prévoit pas leur présence sur le plateau, et pendant le long duo du 2e acte se comportent comme un couple de nouveaux mariés empruntés de se retrouver enfin seul dans le salon tandis qu'un homme nu, à leur côté, creuse avec une lenteur calculée un trou, semble-t-il pour y déposer un cercueil. Il faut attendre la fin de l'opéra pour découvrir la seule idée qui fait sens lorsqu'on voit Isolde revenir en vieille femme méconnaissable sur la scène tandis que Tristan s'éloigne dans le jardin sans la reconnaître. La musique dédommage fort heureusement de ce naufrage scénique en rendant justice aux demandes exorbitantes du compositeur. Dirigé avec feu par un Donald Runnicles qui n'hésite pas à bousculer certains tempi dans le duo du 2e acte pour rendre encore plus sensible la montée a de la passion, l'orchestre rend justice à ce langage instrumental foisonnant avec un luxe inouï de nuances et une dynamique sonore d'une irrésistible tension. Les deux protagonistes de la soirée, qui étaient déjà présents à Genève en 2005 dans les rôles principaux du Tannhäuser signé par Olivier Py, soulèvent à juste titre l'enthousiasme du public. Stephen Gould prête à Tristan un timbre éclatant et fluide, quoique trop monocolore parfois, qui tient la distance sans aucun signe de fatigue. Quant à Nina Stemme, elle est devenue entretemps une des meilleures interprètes du rôle écrasant d'Isolde, un personnage qu'elle rend à la fois vulnérable et vibrant sans jamais mettre en péril un matériau vocal d'une indiscutable autorité tout au long du spectacle. La chaleur du timbre, la précision et la justesse de l'intonation, l'éclat mordoré d'aigus qui ne sonnent jamais dur font de son portrait un moment de théâtre qui mérite amplement le détour. (Signalons que ces deux chanteurs d'exception seront présents dans ces mêmes rôles sur la scène de l'Opéra de Zurich dès le 25 janvier 2015 !). La basse chinoise Liang Li sait rendre passionnante la longue plainte du Roi Marke grâce par un usage extrêmement raffiné d'un legato long et limpide alors qu'Egils Silins (Kurwenal) et Tanja Ariane Baumgartner (Brangäne) remplissent leurs rôles de serviteurs à la perfection avec des voix à la fois puissantes et lumineuses. Musicalement, l'honneur de Wagner est donc sauf ce soir-là... (Représentation du 14 mai) Un Castor et Pollux à la diète Aussi étonnant que cela paraisse, aucun opéra de Rameau n'avait été représenté jusqu'ici sur une scène berlinoise!... Pour se montrer à la hauteur de cette occasion exceptionnelle, la Komische Oper a donc décidé de rompre avec sa politique habituelle de chanter tous les ouvrages mis à l'affiche en allemand afin de pouvoir proposer de Castor et Pollux une version dans sa langue originale française. Si les accents baroques de certains interprètes ne facilitent pas vraiment la compréhension du texte, les sons collent au moins à la musique de façon presque concordante, ce qui n'eût pas été le cas dans une traduction allemande. La mise en scène de Barrie Kosky se passe de tout décor. L'action se joue dans une grande boîte en bois; seuls quelques tas de terre noire signalent l'entrée des Enfers. Les costumes sont ceux que porterait n'importe quel citoyen dans une grande ville européenne; seuls quelques éléments (comme les ailes de Mercure) signa- Deutsche Oper : «Tristan et Isolde» avec Stephen Gould et Nina Stemme © Bettina Stöss a c t u a l i t é o p é r a Komische Oper : «Castor et Pollux» © Iko Freese / drama-berlin.de lent la fonction précise des personnages-clefs. Surprenant au premier abord, ce type de traduction scénique favorise une relecture qui souligne la violence des rapports entre les personnages et la mise à nu des ressorts dramatiques d'une intrigue qui n'a rien perdu de sa pertinence malgré le recours systématique à la mythologie pour expliquer ce que la psychologie nous a appris à voir avec d'autres yeux depuis le début du XXe siècle. Le public en tous les cas ne s'est pas laissé désarçonner par un renouvellement aussi sévère de l'univers de Rameau et a fait fête aux artisans en fin de spectacle. Le quatuor central convainc presque sans réserves: Nicole Chevalier incarne une Télaïre au soprano clair et intense, Annelie Sophie Müller, une Phébé aux accents tendres et mélancoliques, Allan Clayton, un Castor à l'émission agréablement suave mais parfois engoncée, et Günter Papendell, un Pollux au baryton large et chaleureux. Alexey Antonov, un Jupoiter tonnant au sens propre du terme, et Aco Aleksander Biscevic, un Mercure au ténor vif-argent, s'insèrent dans cette production étonnante avec un sens du timing parfait et contribuent efficacement au succès public d'une soirée décidément pas comme les autres. (Représentation du 15 mai) est pour eux : créée en décembre 1980, elle en est déjà à sa 130e reprise et figure encore au programme de la saison prochaine. Avis aux amateurs! L'artiste italien ne s'embarrasse pas d'une relecture qui donnerait un sens moderne à l'oppression que vit Lucia dans un univers machiste piétinant sans pitié ses rêves de bonheur individuel au nom d'une obscure raison familiale. L'action scénique se déroule sans accroc, et la tâche du spectateur est encore facilité par deux énormes coupures qui raccourcissent le specta- cle de plus de vingt minutes en éliminant le duo de Lucia avec son confesseur et la scène opposant Edgardo, l'amant rejeté, à Enrico, le frère au tempérament belliqueux. Il faut dire que la musique en est moins directement accessible ... Dans de telles circonstances, l'attention du spectateur se concentre vite sur la seule musique, et là, de nouveau, la direction de la Deutsche Oper a bien fait les choses. Hulkar Sabirova possède tous les atouts d'une grande Lucia : des aigus stratosphériques et sûrs, un médium large et porteur et des graves sonores mais agréablement coulants. Il lui manque tout au plus une couleur de timbre plus personnelle qui rendrait son interprétation vraiment inoubliable. Yosep Kang en Edgardo possède les mêmes atouts et le même défaut: son chant clair a quelque chose d'envoûtant dans le duo du 1er acte, de déchirant dans son air du suicide mais ne dégage au final qu'une tonalité d'ensemble plutôt passe-partout. Bastiaan Everink en Enrico joue les méchants avec une belle ardeur et un baryton agréablement agressif alors que Katarina Bradic en Alice, Marko Mimica en Raimondo et Matthew Newlin en Arturo s'acquittent de leur tâche avec élégance. Cravaché par un Ivan Repusic un brin pressé, l'orchestre offre de la partition de Donizetti une interprétation soignée tandis que le chœur se montre à la hauteur de sa réputation dans ses interventions d'un indiscutable aplomb. (Représentation du 16 mai). Éric Pousaz Une Lucia à l'ancienne Revoir un opéra joué dans des magnifiques toiles peintes avec leurs perspectives savamment calculées est certainement un rêve pour bien des spectateurs. Cette production de Lucia de Lammermoor, conçue par Filippo Sanjust, a c t u Deutsche Oper : Hulkar Sabirova est «Lucia di Lammermoor» © Bettina Stöss a l i t é 21 o p é r a liser son public vieillissant. Doit-on aller si loin dans la provocation pour rajeunir l'audience ? N'y a-t-il pas d'autres lieux où aller pour se rincer l'œil et se délecter de la m... des autres ? La musique est servie convenablement, mais seuls trois artistes possèdent le minimum requis pour leurs rôles : le Compositeur véhément, au timbre chaud et soyeux de Claudia Eichenberger, qui au demeurant assume son rôle « All You Can Fuck » s'inscrit en grandes lettres rouges au-dessus du décor de travesti avec une crânerie admirable, la l'île déserte où Ariane a été abandonnée par Thésée. Il s'agit en l'occurrence Zerbinette aux aigus sûrs et aériens de Yund'un salon-lavoir miteux, avec cabinet de toilettes attenant, où s'entassent de la Jeong Lee qui fait sensation dans son long air lingerie d'une propreté douteuse, quelques peluches et un lit pour inviter virtuose couronné par un mi suraigu solaire et d'éventuels hôtes de passage à une petite pause récréative. parfaitement assumé. Du côté des hommes, c'est le Maître de musique de Kai Wegner qui emporte la palme haut la main avec son chant aux graPour passer le temps, l'amante abandonnée conque ne connaissant pas l'œuvre de tenter une ves déliés et une diction impeccable rendant s'amuse lascivement avec les cadavres nus de reconstruction de l'intrigue qui tourne autour de compréhensible chaque mot du précieux texte deux jeunes hommes blessés à qui elle fait cette femme givrée déguisée en Alice au Pays de Hofmannsthal. L'Ariane de Bettina Jensen diverses papouilles affriolantes (s'agit-il des des Horreurs. Le Théâtre de Berne, comme convainc presque dans le duo final avec sa voix victimes du Minotaure ?); puis elle s'offre une beaucoup d'autres scènes lyriques, peine à fidé- forte aux envolées chargées d'émotions wagnélongue séance sur le trône de riennes mais montre clairetoilettes pisseuses sur les ment ses limites dans les deux parois noircies desquelles se grands airs du début où la lit, tagué en grandes lettres ligne de chant paraît trop mauves un “Fuck Thésée“, heurtée et privée de rondeurs accusant directement l'amant dans le bas de la tessiture. Le infidèle qui l'a abandonnée quatuor de la Commedia deldans ce lieu improbable. l'arte fait de son mieux dans On l'aura compris: cette ses costumes impossibles nouvelle mise en scène de mais manque curieusement de Lydia Steier ne donne pas synchronisme tout comme les dans la dentelle. A vrai dire, trois Naïades aux timbres trop un tel salmigondis d'inepties fatigués pour caresser les déliscéniques ne mériterait pas cates harmonies que le comqu'on s'y arrête. Que faire en positeur leur a réservées. effet d'un Bacchus en marcel L'Orchestre Symphoet boxers distendus, d'un nique bernois se sort de sa Arlequin et de sa clique transtâche difficile avec les honformés en ouvriers chargés de neurs mais sa section de cordécontaminer une centrale des, souvent acides, et les atomique accidentée avant de intonations imprécises des se muer en grandes folles chicors auraient peut-être justifié chement habillées de trucs en quelques répétitions suppléplumes tout droit sorties de mentaires. Cependant, le chef leur cage, les Naïades déguiKevin John Edusei parvient sées en Heidi passant leur tout de même à proposer de la temps à nettoyer ce lieu musique une interprétation dégoûtant ? And so what ? qui tient la route, contraireaurait-on envie de citer en ment au chaos qui envahit la paraphrasant une phrase scène dès les premières mesupublicitaire célèbre. Non seures d'un Prologue uniquement lement, l'auteure de cette construit sur la recherche du fumisterie se moque de son gag facile... (Représentation public, mais elle ne raconte du 19 avril) «Ariadne auf Naxos» avvec Michael Feyfar, Yun-Jeong Lee, Wolfgang Resch © Annette Boutellier Éric Pousaz rien et l'on pourrait défier qui- à berne Ariadne sur les toilettes de Naxos... 22 a c t u a l i t é o p é r a teatro regio, turin Guillaume Tell L'ultime chef-d'œuvre de Rossini est mentionné dans toutes les histoires de l'art lyrique comme un tournant essentiel dans l'évolution du genre. A sa manière, la révolution opérée par le compositeur italien n'est en effet pas loin d'égaler en importance celle qu'opèrera plus tard Richard Wagner avec Tristan. 24 Malheureusement, dès que l'on parle des représentations modernes de cet ultime ouvrage pourtant essentiel du cygne de Pesaro, les malentendus s'accumulent. Généralement, comme ce fut le cas notamment à Zurich et Genève, de trop nombreuses coupures défigurent l'harmonie des actes; en outre, les insuffisances des chanteurs déséquilibrent les ensembles et les trouvailles plus ou moins convaincantes des metteurs en scène desservent le propos dramatique pourtant parfaitement homogène du musicien et de ses librettistes. Mais les choses semblent sur le point de changer. Ainsi, après Pesaro l'été dernier, le Teatro Reggio de Turin affichait-il une production respectueuse de toutes les intentions du compositeur en sa fin de saison actuelle. La mise en scène est moderne tout en suivant dans les grandes lignes les didascalies du livret, et elle rend la place qui leur est due aux deux longs divertissements dansés; la distribution parvient à réunir les meilleurs spécialistes du chant rossinien du moment; et l'orchestre, ainsi que les chœurs du théâtre piémontais, se surpassent dans ce spectacle exceptionnel par son envergure, qui va certainement occuper une place de choix dans les annales du théâtre. Graham Vick et son décorateur Paul Brown transplantent l'action dans un décor d'une blancheur éclatante qui évoque de loin les paysages typiques de la Suisse primitive. Il s'agit pourtant moins pour eux d'illustrer les différentes étapes de la légende du vaillant paysan qui tient tête à l'occupant autrichien que de montrer les formes variées que prennent les humiliations subies par les Helvètes placés sous le joug des tenants de l'autorité étrangère. A ce titre, les deux longs ballets admirablement chorégraphiés par Ron Howell se révèlent des modèles d'intégration dans l'action scénique de divertissements dansés qui n'ont plus rien de purement décoratifs. A la tête d'un orchestre brillantissime et des chœurs superlatifs du théâtre turinois, Gianandrea Noseda met un point d'honneur à hisser ses interprètes à leur meilleur niveau; en l'état actuel, cette troupe d'opéra n'a vraiment plus aucune comparaison à craindre, même avec les meilleures maisons d'opéra italiennes les plus célèbres du moment. En jouant habilement des contrastes entre les soli des vents, le chant moelleux des cordes et les nombreuses interventions des chœurs, le chef souligne toute la diversité novatrice du langage de Rossini; l'auditeur émerveillé comprend alors immédiatement, au fil de cette représentation enthousiasmante, l'incroyable révolution qu'a représenté ce traitement inouï jusqu'ici des voix d'un grand orchestre et d'une importante masse chorale qui vont ouvrir toutes grandes les portes du romantisme musical le plus échevelé. Fouillée dans ses moindres détails, l'œuvre apparaît soudain dans toute sa force première et fait apprécier à sa juste valeur le coup de tonnerre incroyable qu'a représenté la création de cet ouvrage immense en 1929 dans un Paris alors encore dominé par les envolées virtuoses des divas et autres vedettes narcissiques aux gosiers exhibitionnistes. La très nombreuse distribution réunie pour l'occasion ne comporte pour a c t «Guillaume Tell» avec John Osborn (Arnold Melchtal) et Angela Meade (Mathilde) ainsi dire aucun point faible. Dalibor Jenis brille en Guillaume Tell avec son timbre caressant, aux inflexions légères et à l'émission d'une imperturbable fluidité qui lui fait cultiver le bel canto avant la recherche de l'effet spectaculaire. En Arnold Melchtal, John Osborn ne cède lui non plus jamais à la tentation d'en faire trop et aligne ses aigus triomphants et solaires sans histrionisme excessif. Angela Meade prête à Mathilde un timbre rayonnant, parfois un rien trop lourd déjà, mais avec quels pianissimi éthérés et quels contre-uts lumineux! Fabrizio Begi, un Melchtal au timbre sombre d'une vaillance confondante dans la véhémence de ses imprécations au 1er acte, Luca Tittoto, un Gessner vipérin d'une retenue vocale d'autant plus remarquable que la voix ne semble jamais inutilement malmenée, Anna Maria Chiuri, une Hedwige aux graves profonds mais entonnés avec netteté et Marina Bucciarelli, une Jemmy portant admirablement le travesti et dotée d'une voix presque enfantine encore dont la tonalité claire se détache facilement des autres jusque dans les grands ensembles, complètent l'ébouriffant trio de tête sans jamais démériter. Mais c'est en fait l'entier de la distribution, avec en tête le chant triomphant du marin qu'incarne un Mikeldi Atxalandabaso aux accents percutants, qui rend admirablement justice à cet ouvrage dont on peut espérer que de telles productions inciteront les directeurs de théâtre à faire preuve d'un peu plus d'imagination lorsqu'ils décideront prochainement de mettre un titre de Rossini à l'affiche de leur théâtre... Signalons tout de même en passant que Guillaume Tell est programmé, dans les mois qui viennent, à Monte Carlo, Bologne, Edinbourg, Munich et Londres avant son retour à l'affiche du Met de New-York dans deux ans... (Représentation du 11 mai) Éric Pousaz scala de milan Elektra Elektra, dernière mise en scène de Patrice Chéreau (disparu en octobre 2013) reçoit une consécration triomphale à la Scala après l'accueil enthousiaste reçu, lors de sa première, au Festival d'Aix l'année passée. La distribution reste dans son ensemble inchangée (René Pape mis à part, qui reprend le rôle d'Oreste à la place de Michail Petrenko) et le spectacle garde la puissance d'un grand travail d'équipe et d'un résultat artistique de très haut niveau. La force épurée et les lignes minimalistes de la mise en scène prennent si possible encore plus de relief dans la salle fastueuse du Piermarini. Dans un décor stylisé (conçu par Richard Peduzzi) d'une cour de palais qui baigne dans la lumière d'une fin d'après-midi un peu à la De Chirico, ce que u a l i t é o p é r a Chéreau met en scène est moins l'accomplissement d'une tragédie de la vengeance familiale que l'impossibilité de cette même tragédie. Chéreau semble avoir suivi les mots prononcés par Elektra lorsque elle reconnaît son frère Oreste, résolu à venger la mémoire d'Agamemnon : «Heureux qui peut agir. L'action est comme un lit où l'âme se repose...». Ce repos rêvé de l'action, interdit à Elektra (comme à Hamlet) et donné à son frère, est le clivage que Chéreau creuse pendant tout le spectacle, en choisissant de représenter plus le drame des trois femmes (la protagoniste, sa sœur Chrysothemis et Klytaemnestra) hantées par l'arrivée d'Oreste que l'arrivée libératrice de celuici. Dans cette vision, le rapport entre Klytaemnestra et Elektra devient le centre du drame et acquiert une nouvelle force tragique: celle d'un lien interrompu et comme mutilé par la mission même de la vengeance qu’Elektra s'est donnée. La sortie de scène d'Oreste, froide et procédurière, après la tuerie finale, semble confirmer ce déplacement du tragique de l'action au rêve (ou plutôt au fantasme) de l'action par le metteur en scène français. On comprend bien que tout élément hyperbolique et jubilatoire de la relecture du mythe ancien faite par Strauss (plus que par Hoffmanstahl, sans doute) disparaisse au profit d'une lecture où les conflits sont d'abord d'ordre psychologique: plus de cris d'égorgement, de sang, de torches flamboyantes (tout au plus une petite bougie), de danses de bacchantes. Le personnage de Klytamenestra est ainsi totalement dépourvu de l'aspect gore et décadent qui lui est traditionnellement attribué. Cela grâce aussi à l'interprétation superbe de Waltraud Meier, qui chante chaque note du rôle plutôt au lieu de recourir à un sprechgesang déglingué, comme nombre de ses collègues. A côté d'elle il faut saluer l'excellente prestation d'Evelyn Herlitzius, qui tient tête jusqu'à la dernière mesure à ce rôle massacrant autant sur le plan scénique que vocal. Adrianne Pieczonka est une bonne Chryothemis, malgré quelques occasionnelles aspérités dans la ligne aiguë de ce rôle aussi très exigeant. Thomas Randle est un Aegisth correct et René Pape un Oreste à la ligne vocale ferme et majestueuse. Signalons enfin la présence de deux vétérans du chant wagnerien des années '80: Franz Mazura (90 ans!) en Précepteur d'Oreste et Donald McIntyre (qui fut le Wotan dans le Ring de Chéreau/Boulez à Bayreuth) dans le petit rôle du Vieux Serviteur. Esa-Pekka Salonen se confirme comme un des grands chefs d'aujourd'hui dans ce genre de répertoire. A la tête de l'Orchestre de la Scala, le chef finlandais maîtrise chaque aspect de la partition de Strauss. En suivant le conseil de Strauss lui-même à un jeune chef d'orchestre («Dirigez Elektra comme si Mendelssohn l'avait écrite»), Salonen fait davantage ressortir les moments de lyrisme (la reconnaissance d'Oreste est un des moments magiques de la soirée) et certains effets précieux de l'orchestration que l'éléphantiasis sonore. Public enthousiaste et visiblement ému pour une soirée de grand théâtre et de grande musique (24 mai 2014). Gabriele Bucchi teatro real, madrid Lohengrin Wagner était une nouvelle fois à l'affiche du Teatro Real avec un Lohengrin confié à Lukas Hemleb et dirigé par Harmut Haenchen, quelques semaines après le «Lohengrin» © Javier désormais célèbre Tristan und Isolde del Real / Teatro Real signé Sellars et Viola. De toute évidence cette production présentée tout le mois d'avril et donnée en hommage à Gérard Mortier décédé il y a peu, ne restera pas dans l'histoire de l'opéra. Gérard Mortier a très certainement cru en ce projet avec autant d’enthousiasme et de conviction qu'en concevant pour Paris cette version mythique de Tristan dont les vidéos ont failli disparaître en 2008. Sellars n'est cependant pas Hemleb, metteur en scène très inégal au théâtre et à l’opéra, comme le prouve ce Lohengrin d'un autre âge, poussif et poussiéreux, qui traduit un manque de travail et d’inspiration. Les décors uniques sont toujours dangereux car ils peuvent porter l'action, la sublimer comme la rendre stérile et la déprécier. L'affreuse caverne qui tient lieu de décor à ce Lohengrin, sans référence à une époque déterminée, peuplée d'êtres costumés à la hâte, montre rapidement ses limites, d'autant que le plateau est, soit encombré par les chœurs et les figurants massés à l'avant-scène, soit vide et mal éclairé, les solistes devant se contenter de maigres indications scéniques. Difficile dans un espace si hostile, de comprendre les motivations des Brabançons et les enjeux poursuivis par les ennemis du Roi Heinrich, la magicienne Ortrud et son mari Friedrich von Telramund, qui espèrent anéantir Elsa, persuadée qu'un chevalier va venir la sauver. Pas une once de poésie dans cette vision caricaturale qui fait penser à ces premiers jeux vidéos au graphisme grossier, mais des images qui font peine à voir, comme celle où le peuple retrouve enfin Gottfried, l'héritier du royaume, pauvre statue de bronze accueillie dans la liesse comme le porteur de tous les espoirs. Les oreilles ont heureusement plus de chance grâce à une distribution homogène et à des interprètes qui savent chanter ce répertoire exigeant. Si le Lohengrin de Christopher Ventris est loin de posséder le physique espéré du chevalier, le ténor possède encore les moyens du rôle : moins nuancé et stylisé que l'est actuellement Jonas Kaufmann, idéal dans ce personnage, son récit du Graal et ses adieux au dernier acte, voient cependant ses ressources s'amenuiser et la fatigue transparaître. Catherine Nagelstad est assez formidable en Elsa, sa ligne de chant charnue, sa rigoureuse musicalité et le grain particulier de sa voix pleine et étendue, révélant les linéaments de ce personnage border line, qu'elle s'approprie malgré la laideur environnante. Tenu avec une grande adresse vocale, une tension palpable et une présence maléfique par Deborah Polaski, tout simplement impressionnante et par le vigoureux baryton Thomas Johanes Mayer, le couple Ortrud/Telramund fait froid dans le dos, tandis que Franz Hawlata campe avec aplomb un Roi plein de sollicitude, secondé par le Hérault d'une belle énergie de Anders Larsson, épaulés par les beaux Chœurs du Théâtre. Dans la fosse, Harmut Haenchen montre une fois encore son affinité avec le répertoire wagnérien qu'il dirige avec toute sa fougue et qu'il anime avec passion du plus infime piano au plus fracassant fortissimo (Représentation du 17 avril) François Lesueur «Elektra» a c t u a l i t é 25 o p é r a à avignon Cavalleria Rusticana / Pagliacci Des voix puissantes à l’Opéra Grand Avignon, dans la reprise de la mise en scène de Jean-Claude Auvray. 26 La production initialement créée aux Chorégies d’Orange en 2009, adaptée pour l’Opéra de Marseille en 2011, fonctionne toujours aussi bien, avec une densité dramatique encore plus forte dans le cadre de scène plus resserré de l’Opéra d’Avignon. Malgré tous ses efforts, appréciables et appréciés, le ténor Jean-Pierre Furlan reste le point faible de la distribution, avec quelques aigus certes bien soutenus, mais un chant trop souvent en force et qui perd de son assise dans le medium. Turiddu est l’emploi qui convient le mieux à ses moyens actuels, son Canio paraissant en panne d’énergie en première partie de Pagliacci. Le baryton Seng Hyoun Ko possède un volume toujours aussi impressionnant, mais on peut émettre des réserves sur l’intonation parfois imprécise, et la caractérisation des personnages. Lorsqu’Alfio s’exprime on entend Scarpia, et en Tonio la charge caricaturale dans le buffo est peut-être excessive. Nino Surguladze (Santuzza) est puissante, crédible et touchante… même si on ne comprend pas grand-chose à sa prononciation ! Svetlana Lifar (Mamma Lucia) fait entendre un accent slave très prononcé, et Virginie Verrez (Lola) est sans problèmes, d’une voix assez corsée. La Nedda de Brigitta Kele est belle en scène, le volume est consistant, les graves beaucoup plus pâles toutefois. Elégance du style et richesse du timbre caractérisent le baryton Armando Noguerra (Silvio), tandis que le deuxième ténor Leonardo Cortellazzi (Peppe) se montre convaincant. La direction musicale de Luciano Acocella est bien dans le ton de cette double affiche vériste par excellence : du brillant, de l’éclat – et les décibels qui les accompagnent ! –, mais aussi une certaine virtuosité des instrumentistes, et une profondeur du discours musical. Les chœurs sont en revanche inconstants, après une première impression favorable, les décalages dans les attaques sont nombreux, le son manque vraiment d’homogénéité avec Jean-Claude Malgoire quelques éléments qui prolongent la note légèrement après les collègues alentour, l’ensemble retrouvant heureusement son unité dans les passages forte. Quelques jours plus tard, L’Orchestre Régional Avignon Provence est cette fois sur scène pour un concert intitulé « Les musiciens de MarieAntoinette », dirigé par Jean-Claude Malgoire. Grétry, Haydn, Piccinni, Gluck, Mozart sont au programme, et le baryton Nicolas Rivenq ne peut masquer aujourd’hui l’usure de ses beaux moyens. Hasard de la vie, les programmes de salle ont « bien été imprimés mais se sont égarés », ce qui donne l’occasion au chef d’orchestre d’installer une conversation avec le public lorsqu’il présente, avec une grande et sympathique érudition, les œuvres remises dans leur contexte historique. François Jestin Mascagni : CAVALLERIA RUSTICANA Leoncavallo : I PAGLIACCI – le 20 mai 2014 à l’Opéra Grand Avignon Concert Malgoire – Rivenq – le 23 mai 2014 à l’Opéra Grand Avignon à nice Dreyfus Ni opéra, ni pièce de théâtre, Dreyfus est plutôt un spectacle musical de Michel Legrand, proposé en création mondiale à l’Opéra de Nice. C’était Jean-Louis Grinda, alors directeur de l’Opéra Royal de Wallonie, qui avait passé commande de l’ouvrage, mais celui-ci n’avait pas pu être créé à Liège à la suite de son départ en 2007 pour prendre les rênes de l’Opéra de Monte-Carlo. La musique de Michel Legrand est bien tournée, souvent joyeuse et dynamique mais sans tapage, à dominante militaire, sans exclure quelques rythmes sud-américains ou d’Europe centrale. Servie par l’Orchestre Philharmonique de Nice en fosse sous la baguette de Jérôme Pillement, la partition s’écoute avec plaisir mais sans surprise, et on replonge plus d’une fois dans Les Parapluies de Cherbourg ou Les demoiselles de Rochefort… écrits il y a 50 ans ! La troupe – entièrement sonorisée – est très disparate, entre acteurs, chanteurs de comédies musicales et chanteurs d’opéra qui ne tiennent pas les premiers rôles habituellement. La pièce est centrée autour du person- «Cavalleria Rusticana» © Delestrade a c t u a l i t é o p é r a nage d’Esterhazy, qui prend le rôle également du récitant, défendu par l’acteur Pierre Cassignard, malheureusement très peu chanteur lorsqu’il pousse la note, fausse, d’une voix éraillée. Pour retrouver la douceur d’une mélodie, mieux vaut tourner ses oreilles vers le couple Dreyfus – Vincent Heden (Alfred) et Rachel Pignot (Lucie) – qu’on sent plus habitués au répertoire du musical. Quelques airs individuels sont jolis, voire sucrés lors de la lecture des lettres qu’ils s’envoient, mais l’émotion n’est pas au rendez-vous, la « modernisation » du vocabulaire dans le texte écrit par Didier van Cauwelaert n’étant par ailleurs pas toujours convaincante. La production de Daniel Benoin est fluide et s’appuie sur un dispositif scénique particulièrement efficace pour les nombreux enchaînements de tableaux. A mi-plateau, une structure verticale sur trois niveaux, partagée en neuf « cases », permet le déroulement de saynètes successives ou simultanées. Au final, il s’agit d’une belle fresque historique, intéressante, didactique, mais sans grande émotion, et qui finit par sembler un peu longue (soirée d’un peu moins de trois heures, en deux parties). Le public bat des mains en mesure aux saluts, en musique, des artistes au rideau final… premiers applaudissements de la soirée. François Jestin Legrand : DREYFUS – le 30 mai 2014 à l’Opéra de Nice «Dreyfus» © Jaussein à lyon Simon Boccanegra «Simon Boccanegra» © Stofleth rabâché. Les réalisations vidéo, qui empruntent à Tim Burton pour le style en noir et blanc de dessins griffonnés à destination d’un jeune public, paraphrasent le plus souvent sans utilité le texte ou l’action. Déjà les premières images laissent dubitatifs : la neige qui tombe, est-ce vraiment ce qui caractérise le mieux la ville de Gênes ? Et puis arrivent le couteau sous la gorge d’une jeune fille, un revolver, des loubards menaçants, quelques tentatives de suicide, et des grabataires équipés de phlébos et / ou déambulateur qui composent le Conseil. En revanche, on cherche en vain toute la soirée la mer, composante essentielle de l’opéra, ou a minima un certain sentiment de sa proximité, et ce ne sont pas les dessins de trois vaguelettes en fond de plateau qui font illusion. Plus grave, au bout du troisième lancer de confettis, ou lorsque après avoir dessiné deux cœurs à jardin et à cour, un gros cœur lumineux est hissé par deux câbles pendant le duo entre Amelia et Gabriele, on commence à se demander (au milieu des spectateurs qui pouffent) si la réalisation visuelle n’a pas vocation à se moquer de l’ouvrage... Heureusement on retrouve dans la direction du jeune chef (31 ans) Daniele Rustioni la musique chatoyante, évocatrice tour à tour d’un paisible coucher de soleil en bord de mer, ou de la violence des traitrises et vengeances ourdies. La distribution vocale brille d’abord par la présence d’Ermonela Jaho (Amelia), capable de sons filés pianissimi mais aussi de notes chantées très généreusement, sa prise de rôle est un coup de maître et elle se montre comme d’ordinaire très investie dans son personnage. Déjà entendu à Nice dans le même emploi, le ténor Pavel Cernoch (Gabriele Adorno) se montre à la hauteur, d’une belle ligne vocale plutôt ensoleillée. Dans le rôle-titre, Andrzej Dobber déçoit par rapport à ses prestations antérieures : mis à part quelques problèmes d’intonation et de sons fixes, le baryton projette certes puissamment, mais allège plus difficilement et Simon est un rôle qui demande certainement plus de raffinement et d’humanité. La basse Riccardo Zanellato (Fiesco) est à la fois musical et joliment timbré, mais manque un peu d’épaisseur et attrape les notes les plus graves plutôt timidement. Pour compléter les rôles principaux, l’autre baryton Ashley Holland (Paolo) possède bien le grain vocal du méchant, mais on attend en général de ce personnage un peu plus de volume et d’arrogance dans l’émission. Une nouvelle production pleine de clichés agressifs qui empêchent d’apprécier pleinement les délices d’un des chefs-d’œuvre de Verdi. François Jestin Verdi : SIMON BOCCANEGRA – le 7 juin 2014 à l’Opéra de Lyon Le metteur en scène allemand David Bösch est visiblement un adepte du Regietheater, mais à peu près toutes ses propositions ont un goût de déjà-vu a c t u a l i t é 27 s p e c t a c l e s l’omnipotence des femmes ? Sommes-nous un jour libérés de nos vies familiales, de nos contextes sociaux, de notre éducation, de nos héritages, de nos contextes singuliers, de nos psychismes, de nos ‘folies’ pour aller vite ? Congeler un bébé, est-ce se le garder à jamais petit et pour soi seul ? Qu’est-ce que la maternité ? Qu’est-ce qu’un corps ? Et enfin, de quoi ‘bébé’ est-il le nom ? Comme le résumait parfaitement Lestrade à la sortie de son film : «Je voulais rendre racon- théâtre forum meyrin Une femme sans histoire Le 23 juillet 2006, Jean-Louis Courjault découvre deux nouveau-nés dans le congélateur de sa cuisine à Séoul où il s’est fait muter. 28 Ainsi commence la fameuse affaire Courjault qui a défrayé la chronique coréenne puis française, et interpellé sur ce que l’on appelle un peu vite parfois le déni de grossesse. Après enquête et procès, la mère infanticide sera condamnée, le 18 juin 2009, à huit ans de prison pour le meurtre de ses bébés. L’histoire d’une banalité presqu’exemplaire au sens le plus sinistre du terme avait inspiré en 2007 un livre à Mazarine Pingeot, Le cimetière des poupées, qui d’emblée avait fait scandale, la fille du président étant enceinte au moment de la parution, et surtout la famille Courjault s’évertuant à en interdire la sortie avant la fin de l’instruction ! Dorian Rossel, qui avait déjà adapté pour le théâtre la mini-série documentaire Soupçons axée sur l’Affaire Michael Peterson (célèbre écrivain américain meurtrier de sa femme) retrouve le cinéaste Jean-Xavier de Lestrade pour porter à la scène le documentaire produit par Arte en 2009 Parcours meurtrier d'une mère ordinaire : l'affaire Courjault. Questionnement Si l’histoire fait frémir et ne cesse de questionner tout un chacun, l’Affaire est traitée ici sans emphase moralisatrice, sans parti pris malsain ni voyeurisme vulgaire. Pour Lestrade, il s’agissait avant tout d’entrer dans une logique de meurtrière afin de comprendre par quel biais on peut en arriver là, à ça, et surtout comment une mère de cinq enfants décide d’en tuer trois à la naissance tout en continuant de regarder grandir les deux qui restent… Cette histoire sordide nous fait entrer non dans un conte de fées moderne qui aurait mal tourné, ni dans la tête d’un ‘monstre’, mais plutôt au cœur d’une contemporanéité qui ne sait plus comment gérer, comprendre, prendre acte des derniers tabous. A nous dès lors de nous interroger sur des questions premières : qu’est-ce qu’une mère avec en corollaire : qu’est-ce qu’une épouse ? Donner la vie est-il l’envers de donner la mort, ou vice versa ? Ranger ses nouveau-nés dans un frigo à côté de la nourriture : quelle signification y trouver ? Jusqu’où peut aller Dorian Rossel © Naomi Cahen table cette histoire insensée et pourtant chargée de sens. Sans coller à Véronique Courjault l’étiquette déresponsabilisante du déni de grossesse, ni celle de monstre. Car c’est refuser de voir que son histoire nous concerne tous, et profondément.» Dorian Rossel entre dans les pas du cinéaste non pour donner à voir ‘la vérité sur l’Affaire Véronique Courjault’, mais plutôt pour éclairer certaines facettes de cette Femme sans histoire. Rosine Schautz Une femme sans histoire Dorian Rossel – Cie STT TOURNÉE 2014 - La Bâtie Festival de Genève / Théâtre Forum Meyrin, du 30 août au 2 septembre - TPR - Arc en Scènes, La Chaux-de-Fonds, du 26 novembre au 29 novembre mais aussi : - Spectacles Français, Théâtre Palace Bienne, le 14 novembre - Bonlieu Scène Nationale, Annecy, du 19 novembre au 20 novembre «Une femme sans histoire» © Nicolas Lieber a c t u a l i t é s p e c t a c l e s toires (individuelles et collectives) qu’il porte en une décorative futilité. Le contraire même du propos qu’il aspirait à servir… chronique lyonnaise Festivals à l’honneur Chaque année, juin venant, alors que les institutions permanentes (TNP, Théâtre des Célestins, Maison de la Danse) achèvent leur saison, Lyon et son agglomération s’enorgueillissent de deux grands festivals dont l’envergure est internationale : les Nuits de Fourvière et Jazz à Vienne. Deux spectacles d’ouverture ont confirmé ce rang et ces ambitions. Sur les ruines romaines (au sommet de la colline de Fourvière), Gwenaël Morin et sa troupe proposent, durant deux mois, une trilogie Sophocle : Ajax (du 3 au 21 juin), Œdipe roi (du 24 juin au 12 juillet) et Électre (du 15 au 30 juillet). Un point capital, qui conditionne tout ce projet : les représentations débutent à 18h30 et se déroulent a giorno. Nul décor, nul costume (tee-shirt, jean et baskets), nul maquillage, aucun élément architectural qui guiderait les voix des comédiens et une indifférenciation des sexes. Bref, rien pour enjôler le spectateur. Du théâtre à main et à voix nus. Le texte jaillit, surpuissant ; ses enjeux politiques, dramaturgiques et anthropologiques (enterrer les morts) semblent de l’encre fraîche. Dans notre vie théâtrale que le confort des salles couvertes souvent amollit, la capacité de ces comédiens (notamment Virginie Colemyn, incandescente d’ubris dans les rôles d’Ajax et Teucros) à interpeler les spectateurs et à toiser les cieux est renversante. Un rare moment de théâtre. Après cet Ajax, le spectateur descend d’un étage de la colline de Fourvière, se restaure et gagne sa place dans le Grand Théâtre de la colline antique de Fourvière. Au menu, Zinnias, the life of Clementine Hunter, dernier opus de Bob Wilson. Cet opéra de chambre rend hommage à Clementine Hunter (1887-1988), afroaméricaine qui, après avoir travaillé dans diverses plantations, débuta la peinture, en autodidacte, son demi-siècle passé. Ses œuvres, naïves (au sens d’Henri Rousseau, dit Le douanier) et incluses dans un mouvement dénommé Folk Art, peignent des scènes et personnes liées à son univers autobiographique et à la ruralité agricole. L’establishment artistique et politique étasunien reconnut tardivement cette artiste alors qu’elle était octogénaire. Cet opéra de chambre a sollicité le concours de trois « plumes » (l’écrivaine Jacqueline Woodson ; et les librettistes a c t u Bernice Johnson-Reagon et Toshi Reagon), de Sheryl Sutton (jadis lumineuse interprète du Regard du sourd) et Toshi Reagon (passionnante folk & blues woman). Au travers de Clementine Hunter, ce projet s’est assigné le but (la mission ?) de présenter un siècle-et-demi de musique noire étasunienne. Et là le bât a blessé : à vouloir chasser tant de lièvres à la fois, Bob Wilson a dispersé son projet, n’a pu aller au-delà de la superficialité ; il a mué son opéra de chambre en simple revue de music-hall. Trop consensuelle, trop lisse et Et le 6 juin, à l’Auditorium de Lyon, le Wayne Shorter Quartet a ouvert Jazz à Vienne. Soirée mémorable, de la musique de chambre au sommet. Le premier set a été exemplaire : un flux de 45 minutes fait de plusieurs sections enchaînées. Loin de tout standard, chacune d’elles est un espace virtuel d’invention dans lequel chaque membre du quartet propose de minuscules jalons sonores qui seront échangés et combinés, en souveraine liberté. Il y a quelque chose de mallarméen dans ce travail prodigieux : le silence règne, universel, dans lequel ces éclats créent de multiples et oniriques miroitements. Certes, à 81 ans, Wayne Shorter a le souffle plus court ; mais quand ses trois partenaires l’y invitent, il sait rappeler quel virtuose-roi il fut. Autour du Boss (saxophone ténor au début, puis le soprano), trois autres incroyables musiciens : le pianiste Danilo Perez (entre Ravel et les répétitifs étasuniens), le contrebassiste John Patitucci (à l’archet, il dévoile un stupéfiant lyrisme) et le percussionniste Brian Blade (ce «Zinnias, the life of Clementine Hunter» de Robert Wilson © Stephanie Berger trop jolie (avec ses chatoyantes couleurs et avec sa chorégraphie attendue), cette production n’est jamais ni profondément belle, ni émouvante, tandis que son rythme dramaturgique est uniforme. Elle glisse sur la perception, lasse durant le spectacle et s’oublie dès la représentation finie. Le talent individuel de chaque membre de cette équipe n’est pas en cause mais le projet a été paresseusement envisagé, au point de muer ces musiques et les douloureuses his- a l i t bruitiste maîtrise autant le jeu allusif que des sons aux abyssales densités). Durant ce concert, un ange a réellement plané… Frank Langlois Les Nuits de Fourvière : www.nuitsdefourvière.com ; 04 72 32 00 00 Jazz à Vienne : www.jazzavienne.com ; 0892 702 007 é 29 «La seconde surprise de l’amour», photo de répétition Crédit : Théâtre de l'Orangerie 2014 (M. Vanappalghem) s p e c t a c l e s théâtre de l’orangerie Été 2014 Saison alléchante concoctée par Valentin Rossier pour son bel espace du Parc La Grange. Au menu voire à la carte: auteurs immanquables, acteurs phares du théâtre contemporain, textes en partage, musique, danse, créations et… récréations festives ! Avant de passer à table, un apéritif ? 30 1.- La Seconde surprise de l’amour, Marivaux/Rossier, 24 juin-13 juillet L’histoire : Mon premier est une Marquise, veuve inconsolable, mon deuxième est un chevalier trahi par sa maîtresse, mon troisième date de 1727, mon tout est une ‘seconde’ surprise de l’amour, comédie en trois actes et en prose de Marivaux, pièce qui fait suite à sa Surprise de l’amour de 1722. Dénominateur commun de ces deux œuvres : l’amour. Evidemment. L’amour qui survient par surprise, et qui se dit à quelque deux siècles d’écart en un français des plus contemporains. 2.- Derniers remords avant l’oubli, Lagarce/Kacenelenbogen, 16-26 juillet L’histoire : Dans une maison jadis achetée en commun pour trois fois rien, Pierre, Hélène et Paul, ambiance mai 68, ont vécu une passion. La fille et l’un des garçons en sont partis, et chacun de son côté a ‘repris le tourbillon de sa vie’. Quinze ans plus tard, le trio se retrouve pour vendre cette maison. Mais la vente sert avant tout de prétexte pour parler de soi, entre soi, par deverssoi. L’atmosphère est lourde, pleine d’opacités, de sous-entendus, une atmosphère orageuse à souhait car les protagonistes de ces Derniers remords avant l’oubli réunis malgré eux pour revisiter leurs amours de jeunesse, doivent sortir des placards quelques souvenirs oubliés, quelques idéaux morts, quelques secrets ‘de famille’, et comme le dit cash le titre, assumer quelques derniers remords. 3.- Hot house, Pinter/Musillo 29 juillet-10 août L’histoire : La pièce se déroule dans une institution - maison de repos ? Sanatorium ? - dont les résidents, peut-être des patients, sont désignés par des numéros. Suite à une rumeur de meurtre et de viol puis de grossesse évoquée par un des personnages, le scrupuleux directeur Roote charge Gibbs d'enquêter pour démasquer les coupables. Mais Roote se voit lui-même accusé… Un certain chaos anime dès lors ladite institution. a 4.- Le rêve penché, Boucris/Correvon, 5-23 août, spectacle destiné aux jeunes enfants dès 3 ans L’histoire : Un petit garçon a décidé de braver ses cauchemars. Dans sa quête initiatique, il croisera « une faune drolatique et inquiétante » et recevra l’aide d’une étrange dame qui « apprivoise les sons, les contes et les peurs ». 5.- Doute, Shanley/Bouvier, 13-23 août L’histoire : Au milieu des années 1960, la directrice d’une école catholique, Sœur Aloysius, de caractère soupçonneux et adepte de règles très sévères, reproche à la jeune Soeur James sa façon par trop enthousiaste et spontanée de donner ses cours. Par ailleurs, elle voit d’un mauvais œil la complicité du Père Flynn avec son jeune élève noir. Afin de garder l’emprise, elle décidera de provoquer un esclandre qui bouleversera la vie de tout le collège. 6.- Iphigénie en Tauride, Goethe/Nkebereza, 26 août-6 septembre Iphigénie en Tauride (Iphigenie auf Tauris) est une réécriture par Goethe de la tragédie grecque d’Euripide, la Tauride étant ici un pays imaginaire. Le titre original d'Euripide signifiait Iphigénie chez les Tauri, peuplade scythe établie en Crimée. L’histoire : Iphigénie qui a failli être immolée à Aulis lors du départ de la flotte grecque pour Troie est tenue pour morte. Or elle a été sauvée par Diane et transportée dans les airs jusqu'en Tauride, où elle est devenue la prêtresse de la déesse. Dans cette presqu'île sauvage, le culte à Diane est cruel : on y immole, sans autre forme de procès, tous les étrangers abordant les côtes. Au fil des années, grâce à son influence généreuse, Iphigénie arrive à convaincre le roi Thoas de faire cesser les sacrifices humains inhumains... Suite au refus d’Iphigénie de l’épouser - elle rêve encore et toujours de retrouver sa Grèce - il les rétablira derechef. Survient Oreste, le frère, et là tout s’embrouille, s’emmê- c t u a le, se détraque. A la fin, tout se recomposera joliment, Iphigénie pourra même rentrer ‘à la maison’, mais avant cela, elle tient à se réconcilier avec le roi. Ainsi, dans un beau dernier geste, Thoas acceptera de lui tendre la main en gage de leur ancienne amitié. « Adieu ! ». La pièce s'achève sur ce mot. 7.- Les méfaits du tabac, Tchékhov/Podalydès, 9-19 septembre Il s’agit d’un « concert en un acte » créé aux Bouffes du Nord au printemps dernier. Programme musical pour voix, violon et piano et texte de Tchekhov. Sorte de traduction/transmission du texte en musique, et non simple illustration sonore. L’histoire : Nioukhine, la cinquantaine, doit donner une conférence, à la demande de sa femme, sur les méfaits du tabac dans un cercle de province. En fait, c’est ce que l’on croit. On découvre assez vite que ce long monologue décrit les pans de vie d’un homme tyrannisé par sa femme, qui trouvera là l’occasion de parler de lui en toute liberté. Programme musical : - Sonate no 1 en si mineur BWV 1014 pour violon et piano de J. S. Bach - Romance op. 47 no 1 de P. I. Tchaïkovski, - Sequenza VIII pour violon de L. Berio - Partita no 2 en do mineur BWV 826 de J. S. Bach 8.- Dansehabile, Foofwa d’Imobilité/Uma Arnese 23-26 septembre Deux pièces, deux chorégraphes différents, mais un fil conducteur : l’écriture de soi par la danse, l’affirmation de son identité et la valorisation de ses particularités. Grand bal de l’Orangerie – 27 septembre Rosine Schautz l i t é Crédit : Théâtre de l Orangerie 2014 (M. Vanappalghem) f e s t i v a montreux, du 4 au 19 juillet 2014 Montreux Jazz Festival Cette deuxième édition sans Claude Nobs est l'occasion pour son successeur de recadrer la manifestation sur le genre musical qui a fait sa réputation, le jazz, qui se taille la part du lion dans la programmation. Deuxième édition sans Claude Nobs, et déjà, le nouveau capitaine, Mathieu Jaton, rajuste le cap. Au lieu du grand paquebot millefeuille pour attirer tous les publics, cette croisière 2014 vire de bord en revenant au bercail initial. Ce retour au port permet de faire le plein pour un nouveau voyage, qui promet de se recentrer sur son identité : le Montreux JAZZ Festival. Et rien de tel que de vieux loups de mer pour galvaniser les plus jeunes mousses, quitte à relever du paradoxe pour certains : eh oui, le jeune aime les vieux, l'héritier paraît plus nobsien que Nobs. Moins funky donc ? Ou alors c'est que les vieux se sont passé le mot pour aider le jeune Jaton ? Jugez plutôt : le bluesman Buddy Guy, le guitariste hollywoodien Lee Ritenour et son comparse, le pianiste et compositeur Dave Grusin, l'une des dernières divas du blues new yorkais Sweet Georgia Brown, le pianiste de Kingston Monty Alexander, le Lausannois autodidacte François Lindenmann, et la déclinaison des John : John Scofield, Dr. John, Jack DeJohnette. Voire encore cette soirée jazz à ne pas manquer, qui réunit Richard Galliano et Didier Lockwood, puis Herbie Hancock et Wayne Shorter. Hormis Stevie Wonder, que Nobs n'était jamais parvenu à faire venir, tous les grands noms cités – et la plupart des autres ci-dessous - sont déjà venus à Montreux. Autre changement. Vu les larges cartes blanches que l'ancien patron avait accordées à son ami Quincy Jones, parrain de la manifestation, on aurait pu craindre que le producteur dénicheur de talents phagocyte davantage le MJF. Mais c'est un autre chemin que Jaton a choisi. Peut-être que les talents de l'écurie Q, quoique pleins d'espoirs, lui paraissent encore trop adolescents, voire trop showy - plus que l'humble Jamie Cullum en tout cas. A en croire le nouveau timonier, le jazz nécessite une certaine maturité, une capacité d'improvisation et d'écoute que seules les valeurs confirmées possèdent, à l'instar du batteur Manu Katché ou de Prism, formation du guitariste Dave Holland qui réunit Eric Harland, Kevin Eubanks et Craig Taborn. Jazz on the rock Troisième innovation : la suppression de la soirée brésilienne - Coupe du monde oblige ? A côté du jazz, les accents pop-rock trouvent conservent d'excellents ambassadeurs : Chris Rea, Stephan Eicher, Etienne Daho. Deux autres chanteurs francophones ont participé aux Triplettes de Belleville (2003), film d'animation de Sylvain Chomet : M (l'autre Chedid) et Thomas Dutronc (l'autre, aussi). L'homme à l'harmonica du Montreux Jazz n'a rien à voir avec Ennio Morricone : Robert Plant est un Sweet Georgia Brown © Lionel Flusin FFJM a c t u a i t s ancien de Led Zeppelin, qui a quitté le dirigeable de plomb avec Jimmy Page à temps. Aussi à l'aise à l'harmonica qu'à la guitare ou au saxophone, le nord-irlandais Van Morrison est un chanteur-compositeur avant tout : "Born To Sing : No Plan B". Enfin, côté groupes de rock, la tendance 2014 est de préférer les formations jeunes, anglaises, et de privilégier ceux qui ne font pas dans le tricot : que ce soient les trublions de Bristol, Massive Attack, précurseurs du trip hip, les Morcheeba de Douvres, les londoniens Babyshambles de Pete Doherty et, dans une moindre mesure - parce que plutôt folkeux Fink, de Brighton. De manière générale, les nouveaux artistes sont programmés au Montreux Jazz Lab. Et ils sont un certain nombre. Qui va piano… A côté de quelques vedettes actuelles (le toujours heureux Pharrell Williams, la guitariste belge Selah Sue, l'urban folk de l'Irlandais Ed Sheeran, voire le duo rappeur Outkast), un instrument se fait davantage entendre dans la programmation, en dissonance avec l'affiche officielle de cette 48e édition : le piano. Celui de l'improvisateur Yaron Herman, celui de l'Arménien prodige Tigran Hamasyan, ou des Genevois Marc Perrenoud et Leo Tardin, cette fois-ci sans son Grand Pianoramax et en duo avec le multi-instrumentiste turc Burhan Ocal. On l'entend, Mathieu Jaton s'est donné pour tâche de reprendre le gouvernail du MJF d'une main de maître et le voilà bien barré. Frank Dayen Montreux Jazz Festival, du 4 au 19 juillet, www.montreuxjazz.com Stevie Wonder © Livenation l l é 31 f e s t i v a l s piano à ernen Quatre héritiers de Géza Anda Depuis 40 ans, le charmant village valaisan d’Ernen vit des étés musicaux aux parfums divers. Des mélomanes peuvent aussi s’essayer à la plume dans un séminaire donné par Donna Leon. 32 été, ce n’est certainement pas un hasard. Chacun d’entre eux a brillé parmi les lauréats du prestigieux “Concours Géza Anda“ qui a lieu à Zürich tous les trois ans, en hommage à ce pianiste hongrois à la technique aussi naturelle qu’époustouflante, décédé prématurément en 1976. Le plus expérimenté des quatre, le Vénitien Pietro de Maria, a remporté le premier prix en 1994; Jinsang Lee, originaire de la Corée de Sud, l’a suivi quinze ans plus tard, tandis que les deux derniers: la Russe Varvara Nepomnyashchaya et Kim Da-Sol (Sud-Coréen également) se sont affrontés lors de la finale 2012, pour se partager la première et la deuxième places… L’été commencera et se terminera en musique de chambre; la deuxième partie de juillet sera consacrée au baroque, avec ses compositeurs illustres, instruments d’époque et interprètes connus et à découvrir. Plus tôt, une semaine de juillet aura fait de la place au piano, en mode récital, avec quatre noms clefs. Rite de passage commun Si les quatre pianistes se retrouvent dans la programmation du Musikdorf cet Varvara Nepomnyashchaya Se croiser à Ernen en 2014 recréera un climat de compétition digne d’un concours international, mais sans pression, dans un environnement bucolique et devant un public déjà conquis. Quatre profils, quatre personnalités 13 juillet : soirée Schubert/Liszt. Lauréat de nombreux prix internationaux (Nagoya 2005, Chopin Competition in Asia 2006, 3e prix au Concours Robert Schumann et à Genève en 2008, Queen Elizabeth en 2010, premier prix du Concours d’Epinal en 2011, 2e Géza-Anda en 2012), Kim Da-Sol est né en Corée du Sud en 1989. Plusieurs festivals (Bayreuth, Euro Music depuis 2006, Roque d’Anthéron) ont été marqués par son passage. Actuellement établi en Allemagne, il se perfectionne à la “Haute Ecole pour la musique et le théâtre“, à Hanovre, auprès de Karl-Heinz Kämmerling. L'artiste se produit avec de nombreuses phalanges à travers le monde : Tonhalle de Zürich, OSR, Berlin Kammerorchester, Sinfonia Varsovia… En musique de chambre, il a collaboré, entre autres, avec David Geringas. C’est un Asiatique type, qui se distingue par une extrême concentration, une gestuelle minimaliste, une virtuosité bien maîtrisée, et enfin une capacité de construire digne d’un architecte. Sa participation au XVIe Concours Chopin en Pologne a contribué à sa réputation de vrai magicien du clavier, majestueux dans l’exploration de toutes les richesses sonores. Kim Da-Sol a c t u a l i t é f e s t i v a l s 15 juillet : Brahms, Schumann, Prokofiev. Varvara Nepomnyashchaya - ou souvent simplement Varvara - a vu le jour à Moscou en 1983. Diplômée du Conservatoire Tchaïkovsky de la capitale, elle aussi a suivi une formation en Allemagne (“Ecole Supérieure de Musique et de Théâtre“ à Hambourg). A Zürich en 2012, elle rafle également le prix du public, pour son interprétation du 3e Concerto de Beethoven sous la baguette de David Zinman. Décrite souvent comme peu conventionnelle, son approche est parfaitement slave : sa maîtrise technique constitue un cadre solide pour sa richissime palette d’émotions, sans jamais brider sa créativité ni son imagination. Pietro de Maria © Leonardo Ferri 16 juillet : Beethoven, Schumann, Mendelssohn, Schubert. L’Italien Pietro de Maria a eu un parcours plus latin : des études à Venise, puis un perfectionnement à Genève, auprès de Maria Tipo. De Varvara le rapproche le Prix Tchaïkovsky, décroché à Moscou en 1990, mais il s’est égale- ment distingué en Allemagne, à Hambourg. C’est également un chopiniste accompli : il a enregistré une intégrale de Chopin pour DECCA et a célébré le bicentenaire de ce compositeur en 2010 par une série de récitals dans de nombreux pays. On le qualifie souvent de pianiste-poète, en relevant sa qualité d’improvisation contrôlée. 17 juillet : Schubert, Liszt, Granados. Jinsang Lee, né à Seoul en 1981, comme son compatriote Kim Da-Sol, figure également parmi les lauréats du Prix Schumann. Il possède également dans son palmarès un prix Mozart et un Scarlatti, sans oublier le galon obtenu en 2008 à Hong Kong, d’un jury présidé par Vladimir Ashkénazy. Il a étudié à Nuremberg et à Cologne. Comme ses pairs, il peut se vanter d’une longue liste de collaborations avec des phalanges et des chefs renommés. Mais ce qui le distingue des musiciens-interprètes, c’est son intérêt particulier pour la fabrication et l’accordage. Dans sa quête d’un instrument parfait, il n’a pas hésité à approcher Steinway et à pren-dre des cours auprès d’une star de la confection des pianos, Stefan Knüpfer. Passionné de mécanique, il ne peut pas se contenter de conduire une automobile, il doit savoir la démonter! Du coup, s’embarquer dans un voyage musical avec Jinsang Lee, c’est comme devenir passager d’un bolide finement tuné… C’est aussi le programme le plus osé, avec l’Espagnol Granados au menu. Beata Zakes 4-5 juillet: Musique de chambre; 11-17 juillet: piano; 19-30 juillet: baroque; 18-24 juillet: séminaire de littérature (avec Donna Leon et Judith Flanders); 2-15 août: musique de chambre «plus», «master classes» d’orgue avec Zsigmond Szathmáry (pour la 35e fois!) Billets et renseignements: www.musikdorf.ch Jinsang Lee © Jinsang Lee a c t u a l i t é 33 f e s t i v a l s Nous faisons aussi des trouvailles sur You Tube! En ce qui concerne la structure des concerts nous voulons qu’elle soit articulée en alternance par exemple d’airs chantés et de pièces instrumentales. entretien Ada Pesch Un village pittoresque dans les montagnes du Haut-Valais accueille depuis une vingtaine d’années des musiciens passionnés de musique baroque. À la tête de cet ensemble, Ada Pesch, 1ère violon solo de la Philharmonia, l’orchestre de l’Opéra de Zurich. Nous lui avons posé quelques questions. L’entête du site du festival de musique baroque de Ernen est une citation de Glenn Gould : « C’est mon amour pour Bach qui a fait que je suis devenu musicien. » Qu’est-ce qui a fait que vous êtes devenue une musicienne, plus précisément une musicienne baroque ? 34 Je ne sais pas pourquoi j’ai toujours voulu jouer du violon. Mes parents ne sont pas musiciens. Mon père était astrophysicien, ma mère femme au foyer. À l’Université de Bloomington dans l’Indiana, j’ai eu Gyorgy Sebok comme professeur de piano. Or il donnait des master class à Ernen. Et c’est ainsi que je me suis rendue dans ce village pour la première fois en 1983, alors que j’étais encore étudiante. Depuis, j’y suis allée chaque année. Mais à l’époque, il n’y avait pas encore de la musique baroque dans ce festival. Quand Gyorgy Sebok est décédé à la fin des années quatre-vingt nous, les musiciens, nous avons décidé de continuer. En ce qui concerne ma passion pour la musique baroque, elle est née en 1990 quand j’ai entendu Harnoncourt diriger Alcina de Händel à Zurich. Cela a changé ma vie! À Bloomington, je ne m’intéressais pas du tout à la musique baroque. Au contraire, ajouter quelque J’aime beaucoup ces étés à Ernen. Le village est merveilleux. Ce que nous vivons est intense : nous répétons pendant toute la journée, nous nous nous moquions des baroqueux. C’est après l’Alcina que j’ai décidé de fonder l’orchestre la Scintilla, avec des musiciens de la Philharmonia de Zurich. Nous jouons de la musique baroque sur des instruments d’époque. Comment est née la partie de musique baroque parmi les autres qui constituent le festival « Musikdorf Ernen » ? Au début, il n’y avait qu’un concert de musique baroque. Nous ne savions pas si le public allait venir. Les musiciens aussi étaient sceptiques! Et ce fût un succès. Nous jouons dans une église qui est un très beau cadre. Nous avons augmenté le nombre de concerts d’abord pour une période d’une semaine et maintenant le festival de musique baroque dure deux semaines. Les musiciens aussi veulent revenir ! Parmi les compositeurs que vous interpréterez cet été, il en a de très connus comme Vivaldi, Händel, Frescobaldi, et d’autres que le public ne connaît pas. Comment avez-vous structuré les concerts ? Je ne me considère pas comme une spécialiste de musique baroque. Les musiciens qui sont invités le sont par contre. Ils font des recherches dans les bibliothèques et ce sont eux qui proposent les partitions qu’ils veulent jouer. Par exemple cette année nous jouerons de la musique baroque du Portugal, parce que la cantatrice invitée, Ana Quintans, est portugaise. J’ai découvert beaucoup de compositeurs de musique baroque Ada Pesch, photo Francesco Walter / Musik dorf grâce aux musiciens. e Aimeriez-vous chose? n t r e La mezzo soprano Ann Hallenberg fait partie du Baroque Ensemble mangeons aussi ensemble. A partir de cette année, Deirdre Dowling et moi, nous partageons les responsabilités. Elle vit en France et elle connaît tout le monde, elle connaît Ernen et elle me connaît! Je dois dire que j’étais dépassée par l’ampleur que prend le festival. Elle est une organisatrice née. Propos recueillis et traduits par Emmanuèle Rüegger Le festival de musique baroque dure du 19 au 30 juillet Billets et renseignements: www.musikdorf.ch t i e n f e s t i v a l s Comment faire venir et fidéliser le public, alors que l’offre des festivals de musique est très abondante et particulièrement à ce moment-là en Suisse ? 41e festival Ernen Musikdorf Comme chaque été depuis plus de quatre décennies, le village d'Ernen en Valais accueillera une manifestation marquée par le souvenir de son fondateur, le pianiste György Sebök (1922-1999). Décliné désormais en quatre temps bien distincts, le festival proposera tout d'abord un week-end intensif de musique de chambre avec le Trio Olivier Schnyder et le ténor Daniel Behle (Schubert, Brahms, Ketelborn le 5 juillet, Brahms, Smetana, Faure, Schumann le 6) avant d'afficher quatre récitals de piano du 12 au 18 juillet. Place ensuite au « barock » du 20 au 31 juillet pour se terminer avec « Kammermusik plus » du 3 au 16 août. Quant aux amateurs de polars, ils seront sans doute intéressés par la présence dans ce lieu paisible d'une mélomane vénitienne qui a fait connaître le nom du commissaire Brunetti... Quelques questions à Xenia Jankovic, chargée de la programmation de la musique de chambre. Est-ce que le thème choisi pour cette édition, Le pouvoir de l’amour, convient à la musique de chambre ? Nous voulions tout d’abord, avec le directeur artistique, choisir le pouvoir et l’amour. Deux thèmes qui sont finalement plus proches de l’opéra. Nous nous sommes alors mis d’accord sur le pouvoir de l’amour, un thème plein de ressources pour la musique de chambre, qui permet aussi aux organisateurs de mieux se présenter et au public d’avoir un fil conducteur. L’amour est un thème musical par excellence, car l’amour unit, réconcilie et nous fait entrer au plus profond de nous-mêmes. Comment avez-vous composé votre programme ? Avez-vous privilégié les compositrices ? Non, je ne l’ai pas fait consciemment, cela s’est ainsi donné. Je me suis aperçue qu’il y a beaucoup de belles pièces de Fanny Mendelsohn qu’on peut combiner avec Clara Schumann et Robert Schumann. Il y a beaucoup de morceaux que les gens ne connaissent pas et j’aime beaucoup leur faire découvrir d’autres créations. Je me réjouis que les gens découvrent de nouvelles œuvres. C’est ainsi que j’ai aussi choisi de programmer Lera Auerbach, d’origine russe mais qui vit à New York et que j’aurais beaucoup aimé inviter. Elle sera présente avec deux œuvres, en harmonie avec le thème choisi : Sogno du Stabat Mater (2009), d’après G.B. Pergolesi e n t r Xenia Jankovic et Memory of tango (2002). De manière exemplaire, on pourra entendre une confrontation entre musique ancienne et moderne avec Pergolesi et Auerbach. Le célèbre duo de Pergolesi, écrit pour soprano et alto sera interprété sous forme d’une transcription pour violon, violoncelle, et cordes et trouvera sa version moderne avec Lera Auerbach. Dans le cas de La Flûte enchantée, ce sont aussi deux versions qui seront proposées : l’une étant la version piano pour quatre mains interprétée par Denis Russell Davies et Maki Namekawa, l’autre sera une version cabaret, opéra pour deux violoncelles avec Alain Schudel et Daniel Schaerer dans une mise en scène de Dominique Muller. D’une manière générale, j’aime beaucoup cette combinaison de morceaux contemporains que l’on ne connaît pas et d’œuvres plus classiques. Car, soudain, les morceaux classiques s’écoutent aussi dans une autre perspective. Imaginez qu’il fut un temps à Ernen, où la population autochtone ne venait pas aux concerts où étaient programmés Stravinski ou Bartok. Cela a beaucoup changé entretemps. e t i e A Ernen règne une forme de simplicité qui existe peut-être moins ailleurs. C’est une symbiose entre la nature et la musique, qui fait notre succès. Les gens se laissent inspirer par la nature et la musique. On est dans une atmosphère très intime, les gens se rencontrent et il y a des échanges avec les musiciens. On parle ensemble et rien n’est superficiel. Si ailleurs, pour beaucoup de gens, il s’agit de se montrer, de défendre son image, à Ernen, il y a une authenticité, des relations plus profondes. Depuis trente ans, au moment où le festival a été créé par György Sebök, tout d’abord en 1974 avec des masters classes, puis élargi à un ensemble de musique de chambre, on peut dire que ce festival est né sous une bonne étoile. Et si l’on y a goûté, on y revient. Notre public est local mais il a aussi pas mal d’étrangers, qui veulent écouter la musique dans ce cadre très intimiste, des Hollandais, des Allemands, des Japonais, des Américains. Nos concerts sont presque toujours complets. L’essentiel étant d’assurer un très haut niveau qualitatif. Comment faites-vous pour réunir une vingtaine de musiciens, juste le temps du festival et obtenir une couleur sonore cohérente ? Ce sont des musiciens formés à al musique de chambre. Certains viennent depuis plusieurs années, d’autres s’y ajoutent. Ils ont beaucoup d’expérience et savent s’adapter rapidement. J’organise assez de répétitions mais l’essentiel est que les musiciens se connaissent bien. Ils jouent sans chef d’orchestre sauf pour les morceaux de Lera Auerbach et Ivan Jevtic. Moimême, je joue dans chacun des concerts, un morceau. Avez-vous une recommandation spéciale, des œuvres pour lesquelles vous aimeriez partager votre amour de la musique ? C’est difficile, tout me semble digne d’intérêt mais disons que cette année le focus sur Ivan Jevtic, Lera Auerbach, la pièce de Holliger, Der bleiche Engel der Zukunft, mais aussi La Muse et le poète de Saint Saëns, vont être de passionnantes découvertes pour plus d’un auditeur. Propos recueillis par Régine Kopp n 35 f e s t i v a l s les jardins musicaux 2014, cernier Contemporain ! S'il fallait décerner la palme d'or de l'originalité à une programmation festivalière, il ne fait guère de doute que les Jardins Musicaux de Cernier l'obtiendraient sans donner lieu à de longs débats. Année après année, les compositeurs habituellement programmés lors de manifestations vouées à la musique contemporaine trouvent leur place tout naturellement lors des rendez-vous à la Grange aux concerts, entremêlés en quelque sorte avec à propos à des valeurs plus conventionnelles. 36 Certes, Tchaïkovsky et Schubert sont bien à l'affiche, ceci pour donner un côté plus rassurant à un programme proposant quelques classiques du siècle passé dont les œuvres n'envahissent pourtant pas les soirées musicales, ainsi Luigi Nono, Iannis Xenakis, Karl Heinz Stockhausen ou Gérard Grisey et Martin Matalon. A l'origine de ces choix originaux, un duo d'organisateurs composé du chef d'orchestre Valentin Reymond et de Maryse Fuhrmann, avec la collaboration de Jean Prévost. Martin Matalon Cette 27e édition s'inscrira dans la continuité des précédentes, se partageant entre la Grange aux concerts située sur le site d'Evologia à Cernier, ainsi que dans le parc Chasseral et à la Saline royale d'Arc et Senans en France voisine. Une fois encore, on retrouvera donc un Orchestre des Jardins musicaux dont les membres sont pour la plupart des fidèles à ce rendez-vous estival et sont accueillis par des amis et relations, créant ainsi un ancrage local auprès des mélomanes de la région. Cet attachement et ces fidélités permettent aux Jardins musicaux de réussir l'alchimie particulière e consistant à faire coincider un projet artistique original, le planning des interprètes et un budget raisonnable. Création musicale suisse Cette édition 2014 sera toutefois marquée par une collaboration avec l'Association Suisse des Musiciens qui est présidée par William Blank. Ainsi huit créations seront présentées dans le cadre des journées de la Création Musicale Suisse lors de huit concerts à l'affiche proposant des œuvres de compositeurs suisses. Un autre compositeur vivant sera à l'honneur, il s'agit de Martin Matalon, originaire d'Argentine mais installé en France, dont on poura entendre Le Scorpion, une pièce pour percussions destinée à l'origine à accompagner le film de Luis Bunuel L'Âge d'or. Une œuvre qui, selon Valentin Reymond, correspond parfaitement à l'esprit des Jardins musicaux : „spectaculaire et accessible“. Disparu en 1998 à lâge de 52 ans, Gérard Grisey a laissé des œuvres qui commencent à être de plus en plus respectées et, de ce compositeur très marqué aussi bien par les références du passé que par les musiques extra-européennes, on pourra entendre Les Chants de l'amour pour douze voix et bande magnétique. Et si l'opéra saute son tour jusqu'à l'été 2015, le rendez-vous cinématographique est prévu, ainsi que la collaboration avec la Cinémathèque de Lausanne, avec Le Kid, film et musique de Chaplin, avec l'Orchestre des Jardins musicaux que dirigera Valentin Reymond. C'est le même orchestre qui officiera n t r e bien entendu pour le programme „classique“ , à savoir des airs de Rachmaninov et Tchaîkovsky précédant Les Saisons du même Tchaïkovsky, une suite pour piano orchestrée par Alexander Gauk à l'occasion du cinquantième anniversaire de la mort du compositeur en 1942. Un autre programme traditionnel (Schubert/Brahms) sera proposé avec le Tremplin offert à de jeunes musiciens sous la houlette du Quatuor Sine Nomine. Mais Nono (Fragmente-Stille, An Diotima pour quatuor à cordes) et Xénakis (Tetora et Tetras) seront à l'affiche avec des œuvres trop rarement programmées, dans l'interprétation des spécialistes made in USA, le Jack Quartet. Ne craignant pas de bouleverser les habitudes des mélomanes, le festival proposera un concert fort matinal avec deux Concertos brandebourgeois à 7h30 un dimanche matin... Ces amateurs matinaux seront-ils les mêmes que les mordus de jazz et de musique improvisée à qui des moments musicaux seront proposés en compagnie de Michel Portal ou de François Salque et de l'accordéoniste Vincent Peirani, du pianiste Stefano Bollani ou du Trio Sylvie Courvoisier (à Tramelan) ? Compositeurs à l’honneur D'autres compositeurs importants du siècle passé seront à l'honneur, puisque l'on retrouvera Stockhausen avec Gesang der Jünglinge, une œuvre datant du milieu des années 1950, marquant la naissance de la musique électronique, en compagnie de Mortuos plango, vivos voco pour sons traités par ordinateur de Jonatha Harvey (1980). Mais il est difficile d'imaginer une édition des Jardons musicaux sans un concert consacré à Chostakovitch, et c'est ainsi que la 14e Symphonie sera dirigée (à nouveau) par Valentin Reymond, toujours avec l'orchestre „maison“. Plus imprévisible, le nom d'André Caplet est également à l'affiche et c'est l'Ensemble Vocal de Lausanne qui interprétera Le Miroir de Jésus avec la mezzo-soprano Marie-Claude Chappuis en soliste, sous la direction de Jean-Claude Fasel. Faire connaître des œuvres qui emploient un langage musical d'aujourd'hui, proposer des découvertes, ouvrir la curiosité au vaste répertoire actuel en perpétuelle évolution, tel est bien le propos de la programmation des Jardins Musicaux à l'occasion de cette 27e édition. D’après des propos recueillis par Frank Fredenrich Plus d’informations sur : http://www.jardinsmusicaux.ch/ t i e n f e s t i v a l s les jardins musicaux 2014, cernier Le scorpion, l’amour et les quatuors Du 15 au 31 août, les Jardins musicaux de Cernier vous invitent à entrer dans une grange qu’ils font résonner du côté de Neuchâtel. Il était une fois une grange. Non, ce n’est pas celle de Meslay découverte sur les bords de Loire un beau jour de 1963 par le pianiste Sviatoslav Richter, mais celle qui abrite les concerts d’un festival baptisé « Les Jardins musicaux ». Elle est située à Evologia, au cœur du canton de Neuchâtel. Evologia : un nom qu’on peut juger trop beau pour être vrai, qui sonne comme celui d’une cité utopique destinée à préserver l’écologie ou l’évolution, forcément durables, mais qui est tout à fait réel. Il s’agit d’un parc consacré aux métiers de la terre, situé entre plaine et montagne, qui vient couronner d’une certaine manière la bonne idée qu’avait eue Frédéric Soguel, en 1885, d’installer une école d’agriculture. Cette école a prospéré, mais les temps sont devenus inquiets : la nature est menacée, l’art est fragile, or l’une et l’autre peuvent s’unir pour préserver l’essentiel. A partir de là, marier l’amour des grands espaces et le travail qui les rend hospitaliers, à l’amour de la musique qui est aussi une manière d’œuvrer avec la manière brute du son, allait presque de soi. La 17e édition des Jardins musicaux aura lieu du 15 au 31 août. Comme il s’agit de concerts donnés dans une grange, c’est-à-dire loin de la ville qui étouffe, le festival a eu la bonne idée de s’allier à des partenaires situés dans un environnement relativement proche : le Parc régional Chasseral (et le Canton de Berne), la Saline royale d’Arc-et-Senans, la Cinémathèque suisse, la Collection d’art brut de Lausanne. Tapas et ateliers Un coup d’envoi (musique, vin et tapas !), vingt-sept concerts mais aussi une dizaine de bal(l)ades au sein du Parc régional Chasseral composent le programme. Sans compter des ateliers à vivre en famille, car il n’est pas d’initiative musicale aujourd’hui, institution ou festival, qui n’ait son programme pédagogique et ludique. Mais les Jardins ont aussi leur orches- a c t u tre, composé d’environ soixante-dix musiciens et dirigés par Valentin Reymond, qui assureront plusieurs concerts tout au long du festival. Parmi les rendez-vous inscrits au programme, on notera en particulier quatre concerts hors du commun consacrés à la musique de notre temps ou d’un passé récent. Le premier, qui aura lieu le jeudi 21 août à 19h, permettra d’entendre Le Scorpion, une partition écrite par Martin Matalon, dans un premier temps, pour le film de Buñuel L’Âge d’or. Le musicien argentin (installé à Paris) en a fait dans un second temps une œuvre de concert pour six percussionnistes, deux pianos et dispositif électronique ; elle sera ici interprétée par l’Ensemble Batida. Le lendemain, à la même heure, le Jack Quartet interprétera des pièces de Gesualdo, Rodericus et Dufay, ainsi que Tetras (1983) et Tetora (1990), deux des quatre quatuors composés par Iannis Xenakis, un compositeur qui fit les grandes heures de la musique dite contemporaine des années 19601970, mais qui connaît aujourd’hui un relatif purgatoire. Dignes héritiers des Quatuors Arditti, Kronos et Muir et de l’Ensemble Intercontemporain, les musiciens du Jack Quartet n’ont pas leurs pareils pour télescoper les siècles. Éloge de l’optimisme Le lundi 25 août à 21h, un concert intitulé « Territoires » réunira le violoncelliste François Salque et l’accordéoniste Vincent Peirani à la faveur d’une joute musicale écrite et improvi- a l i t sée. Le devenir de la musique selon François Salque ? Il tient en quelques phrases : « Certains usages de la musique disparaissent, et d’autres disciplines comme la danse ou la méditation ont recours à des musiques raffinées. Il y a aussi les découvertes de l’ethnomusicologie et les pratiques de la communication qui font qu’on ouvre les portes, qu’on se rapproche, qu’on se mélange. Il est difficile à mon sens d’être pessimiste : certains types de concert vont se raréfier mais au profit d’autres pratiques. Pour ma part, j’assure de nombreuses créations, je fais différents usages de mon violoncelle, je mêle les musiques du monde, le jazz, à la musique savante occidentale. » Le jeudi 28 août, enfin, à 19h, la Schola Heidelberg emmenée par Walter Nussbaum fera entendre Les Chants de l’amour composés de 1982 à 1984 par Gérard Grisey pour douze voix et bande magnétique. « La Musique a au moins ceci de commun avec l’Amour que l’être humain y découvre et y apprend le Temps », disait ce compositeur prématurément disparu qui s’inspire ici aussi bien des polyphonies pygmées que de Jean Ockheghem ou des trouvailles Jack Quartet © Henrik Olund de Julio Cortazar, et utilise un matériel sonore issu de nombreuses langues différentes, lequel mêle noms d’amants et d’amantes célèbres (Tristan, Isolde, Orphée, Eurydice, Don Quichotte, Dulcinée, Roméo, Juliette), litanies sur des mots amoureux, etc. L’amour n’a-t-il pas toujours trouvé son terrain d’élection dans les jardins ? Christian Wasselin Pour tout savoir : www.jardinsmusicaux.ch, 41 32 889 36 05 é 37 f e s t i v a l s Sept propositions, parmi lesquelles figurent un Jeu de l’oie, jeu de l’ouïe pour une plongée active dans le monde des sons, un atelier de composition, un autre de sculptures sonores ou encore, une répétition de l’orchestre du festival où chacun est parrainé par un musicien. entretien Maryse Fuhrman Hormis l'originalité d'une programmation sans égale sur le « marché » festivalier, les Jardins musicaux se caractérisent par une ouverture avec les institutions et lieux divers de la région. Parc régional Chasseral, Saline royale d'Arc et Senans en France voisine, mais également Cinémathèque suisse de Lausanne et Musée de l'Art brut figurent à l'affiche de cette édition 2014. Le point avec Maryse Fuhrman, organisatrice de la manifestation avec Valentin Reymond. Concerts et activités au Parc Chasseral 38 Nous développons depuis 2011 avec le Parc régional Chasseral des propositions événementielles qui conjuguent une découverte patrimoniale ou architecturale avec la découverte d’une œuvre musicale forte qui s’inscrit dans ce contexte. Si nous étions certains dès le départ de toucher juste avec cette idée, nous avons été les premiers surpris de son succès immédiat. Celuici est tel que d’autres institutions régionales demandent aujourd’hui à rejoindre cette association de compétences, étonnement complémentaire. Si pour le festival, la programmation musicale se place naturellement au centre de chacun des projets, notre but est à chaque fois de la conjuguer d’une façon créative à deux au-tres principes indissociables de Bal(l)ades ; la collaboration active d’acteurs locaux et une communication visant d’autres publics aussi bien que les coutumiers du festival. Pour les Bal(l)ades de 2014, nous proposons cinq concerts d’artistes de haut vol tels le Sylvie Courvoisier Trio à Tramelan, le magnifique ensemble vocal anglais Stile Antico à La Neuveville, l’accordéoniste danois Geir Draugsvoll à SoncebozSombeval, le Lemanic Modern Ensemble à Dombresson et l’Orchestre des Jardins Musicaux (OJM) à Saint-Imier pour une projection live du film The Kid de Chaplin. Collaboration avec la Saline royale De son côté, notre collaboration avec la Saline Royale d’Arc-et-Senans se perpétue, tout en se renouvelant. À son tour, elle entre dans le concept Bal(l)ades qui devient ainsi transfrontalier. Cinq événements labélisés seront à découvrir dans la région franc-comtoise cet été, avec en particulier le chanteur basque Beñat Achiary et l’ensemble Oración. Ateliers et Tremplins Le 22 août : Beñat Achiary © Guillermo Navarro e La cinémathèque Nous sommes heureux de poursuivre avec la Cinémathèque suisse l’exploration, entamée il y a quatre ans, de l’œuvre universelle de Charlie Chaplin. Et nous fêterons le centenaire de la première apparition du personnage de Charlot au Cinéma avec neuf représentations du film Pour chacune de nos éditions, nous prenons soin de développer un axe de programmation destiné aux plus jeunes générations. Comme en 2013, un Tremplin est mis en place à l’intention d’instrumentistes romands prometteurs. Placé cette année sous le mentorat du Quatuor Sine Nomine, le travail musical et pédagogique conduit en amont du festival aboutira à une représentation en concert des deux chefs-d’œuvre que représentent le Quartetsatz de Schubert et le 2e sextuor de Brahms. Les Ateliers à destination des enfants et des écoles du primaire nous permettent d’ouvrir les coulisses du festival à des enfants de tous âges, de leur offrir des expériences originales ou en les préparant particulièrement à un concert ! n t r e Les 15 et 16 août : Stile Antico © Marco Borggreve The Kid avec l’Orchestre du festival. Collaboration avec la Collection de l’Art Brut de Lausanne Pour illustrer le programme du Festival, nous avons choisi, depuis 2013, le compagnonnage d’auteurs d’Art Brut qui expriment si intensément l’indicible, mais aussi la drôlerie, la joie, la nécessité d’agir dans un état d’intime et féroce liberté. L’élan vital qui émane de leurs créations est saisissant. En associant ces auteurs à des œuvres musicales sœurs, nous avons voulu contribuer à porter un autre regard sur ces êtres à l’imagination salvatrice qui ont saisi le possible avec une telle force que souvent le possible en vient à supplanter le réel. Cette année, nous proposons quelques films au Mycorama, à Evologia ainsi que des documents, qui apportent un éclairage complémentaire sur ces auteurs étonnants. Propos recueillis par Frank Fredenrich t i e n f e s t i v a l s 39 Orchestre Jardins Musicaux © Pierre-W.Henry Le 24 août : Quatuor Appassionato a c t u Le 26 août : Le pianiste et compositeur Stefano Bollani © Paolo Soriani a l i t é f e s t i v a l s entretien avec anne blanchard Beaune cuvée 2014 Pour sa 32e édition, le Festival de Beaune met les petits plats dans les grands. Et – surprise ! – il s’intitule désormais « Festival international d’opéra baroque & romantique ». Anne Blanchard, qui préside à l’institution depuis sa création, nous explique ces nouvelles orientations. La grande nouveauté de cette édition du festival serait-elle l’irruption dans le XIXe siècle ? Elle avait été cependant déjà amorcée il y a déjà quelques années, avec la Missa solemnis, des extraits de Leonore le premier opéra et préfiguration du Fidelio de Beethoven, les symphonies du jeune Beethoven, ou des récitals consacrés à Rossini… 40 Toutefois, il s’agit cette fois d’un tournant : puisque surgit un opéra, intégralement… Oui, vous avez raison. C’est même le cœur de notre deuxième week-end… avec le chœur de l’Armée française, des grands professionnels, que nous avons souhaité associer à notre projet de Cenerentola de Rossini. Ce sera dirigé par Christophe Spinosi, qui était chez nous jusqu’à présent plutôt un chef vivaldien, mais qui a fait sa belle réputation ailleurs depuis sept-huit ans en dirigeant Rossini. Il reprendra du reste cet opéra quinze jours plus tard à Salzbourg, mais avec une distribution différente. Notre Cenerentola, ou Angelina, sera Gaëlle Arquez. Elle sera en compagnie d’Edgardo Rocha, Anna Kasyan, Riccardo Novarro, vieil habitué de notre festival : une distribution maison. Et l’on retrouve vos piliers habituels, que sont Haendel et Rameau… Eh oui ! Puisque Beaune a une tradition Haendel de trente ans, à la tête d’une trentaine d’opéras et d’une dizaine d’oratorios. Beaune, festival Haendel par excellence ! Pour la France en tout cas. Il y aura donc Thésée, un opéra assez rarement donné et que nous n’avions jamais programmé. Nous avons fait appel à notre fidèle Federico Maria Sardelli, qui dirigera l’orchestre Modo Antiquo, avec encore une distribution choisie par nous : Gaëlle Arquez à nouveau, Francesca Boncompagni, Anna Quintans. Serse est un opéra un peu plus connu, mais qui n’est pas non plus si courant. Il est présenté par l’orchestre Il Pomo d’Oro, un ensemble italien magnifique, dirigé par ce violoniste virtuose qu’est Riccardo Minasi. Avec David DQ Lee, notre contre-ténor fétiche, Lawrence Zazzo, Delphine Galou, Sunhae Im, une habituée de Beaune, Anna Quintans toujours, Luigi De Donato, Victor Sicard. Pour cet opéra mélange de bouffe et de tragique, dans la grande tradition vénitienne… Et vous célébrez l’année Rameau, comme il se doit... Bourgogne et Festival de Beaune obligent ! Puisque nous avons été créés en 1983, l’année de la première “année Rameau“, que nous n’avions pas manqué de commémorer. Nous avons choisi deux opéras, tout comme pour Haendel. Nous aurons ainsi Zaïs, pastorale héroïque, par Christophe Rousset, qui sera enregistré par l’Union européenne de radio, avec les Talens Gaëlle Arquez © Gilles Bré́bant e n t r e lyriques et l’excellent Chœur de Namur, et une jolie distribution de chanteurs parmi nos coutumiers du festival. Et il y aura Castor et Pollux, dirigé par Raphaël Pichon et son ensemble Pygmalion, mais dans une distribution différente de celle que l’on a pu entendre récemment à Paris au Théâtre des Champs-Élysées : Florian Sempey, Emmanuelle de Negri, Clémentine Margaine. N’y aurait-il pas aussi d’autres anniversaires à marquer, notamment chez les compositeurs baroques ? Vous pensez à Gluck ! Il sera présent dans le récital de Gaëlle Arquez. Seulement, il est vrai. Mais sachant que nous l’avons célébré avec un an d’avance lors de l’édition précédente. Cette année, la possibilité ne s’est pas présentée pour un opéra… Qu’en est-il des oratorios, concerts et récitals ? Signalons : les Motets sacrés de Rameau et Mondonville par William Christie et ses Arts florissants, en clôture du festival ; les Ode à Sainte Cécile de Purcell et de Britten par Paul McCreesh, ou le côté sacré du festival ; des cantates de Bach chantées et dirigées par Andreas Scholl. Et viendront les récitals : Delphine Galou dans Vivaldi et Haendel, accompagnée par les Ambassadeurs ; notre cher David DQ Lee aidé de l’ensemble Pulcinella pour Purcell et Haendel ; Julie Fuchs, qui n’était jamais venue à Beaune, pour Mozart et Rossini, accompagnée par le piano-forte d’Alphonse Cemin ; et enfin Gaëlle Arquez, qui en sus de Gluck, chantera Haendel, Vivaldi et Charpentier, secondée par l’ensemble les Accents. Elle a déjà chanté deux éditions précédentes à Beaune, et cette année revient pour trois soirées. Et la dernière mention revient de droit à vos mécènes, soutiens indéfectibles du festival… Nous avons ici aussi nos fidèles : France Telecom et sa Fondation Orange, toujours la Caisse des dépôts, et toujours les Hospices Civils de Beaune. Et nous avons nos partenaires : le Conseil régional, la Ville de Beaune, le Ministère de la Culture et le Conseil général. Les partenaires médias sont pour leur part France Musique, évidemment, et Opéra Magazine. Beaune c’est une longue histoire, de découvertes mais aussi de fidélités. Propos recueillis par Pierre-René Serna Inf. : www.festivalbeaune.com t i e n 28.08 – 12.09.2014 www.septmus.ch sep t m u s c h Char es D Charles Dutoit u oit Jiří iř Bělohlávek Bě oh ávek Conrad van Alphen C onrad v an A phen R icardo Castro Ca tro Ricardo Yuri Azevedo Yu r A zevedo Philharmonie Ph lha mon e tchèque chèque Royal Orchestra Roya Philharmonic Ph lharmon c O rchestra LLondon ondon Russian Orchestra Russian National Nationa O rchestra Youth Orchestra Youth O rchestra of of Bahia Bahia Quatuor Qua atuor Van Van Kuijk Kui k Martha Argerich Ma tha A ger ch Delphine D elph ne Bardin Bardin Corey Cerovsek C orey C erov ek Alexandra A lexandra Conunova Conunova Lionel Cottet L onel C ottet Colin Currie C ol n C u re James ames Ehnes Ehnes Alexander Gurning A lexander G u ning Mami M ami Hagiwara Hagiwara Chihiro Hosokawa C hih ro H osokawa Alexey A lexey Ivannikov vann kov Paavali Jumppanen Paaval Ju mppanen Alexander A exander Kutuzov Kutuzov Jerry err y Léonide Léon de Radu Lupu Rad du L upu Mikhail Pletnev Mikha l P etnev Julien Quentin ul en e Q uent n Conrad Tao Conrad T ao Varvara Var vara Claudio Vignali C audio V igna i Alisa Weilerstein A isa W ei erstein septembre musical septembre musical de montreux A l'Ouest, du nouveau... L'événement de la prochaine édition du Septembre Musical de Montreux se résume en un curieux vocable : le YOBA. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, ces quatre lettres ne sont pas le fruit d'une coquetterie orthographique sortie de l'imagination fertile d'un journaliste en mal de nouveauté pour donner un coup de jeune au 'Lioba' désignant le fameux Ranz des Vaches gruyérien dont il introduit le refrain. Il s'agit d'un acronyme pour Youth Orchestra Of Bahia, un organisme calqué sur le principe du fameux Sistema vénézuélien aux destinées duquel préside le jeune et bouillant Gustavo Dudamel. Et c'est précisément cet orchestre que la direction du Festival de Montreux s'enorgueillit d'avoir invité cette année pour véhiculer du Brésil une image autre que footballistique... 42 « Créer des êtres humains par la musique », tel est le credo du fondateur du Bahia Orchestra Projet, le pianiste et chef d'orchestre brésilien Roberto di Castro. Le but de cette formation qui a vu le jour en 2007 seulement est de donner l'accès au monde enchanté de la musique à des enfants de classes défavorisées. Riche de plus de mille participants, ce projet suscite l'enthousiasme général de ceux qui ont eu l'occasion d'en apprécier les fruits. Très vite, les tournées à l'étranger ont augmenté en nombre et en cadences et partout, l'écho auprès du public comme de la critique est enthousiaste. Les instrumentistes de cette formation symphonique, âgés de 12 à 20 ans, sont des musiciens aux talents déjà éprouvés avec lesquels les plus grands solistes acceptent de collaborer, car ils sont conscients de l'extraordinaire apport que représente leur expérience à la formation et au perfectionnement technique de ces jeunes musiciens. A Montreux, par exemple, Martha Argerich et le pianiste belge Alexander Philharmonie tchèque © Yunus Durukan a c t u a Gurning joueront en leur compagnie le Concerto pour deux pianos de Francis Poulenc. Lors de la présentation du programme de la prochaine édition du Septembre Musical de Montreux, M. Tobias Richter s'est réjoui d'avoir pu mener son projet à bien. En effet, une telle invitation ne va pas de soi et nécessite en amont un long travail de préparation, qui va de la récolte de fonds à la mise en place de l'infrastructure d'accueil des musiciens. « En faisant venir cet orchestre à Montreux, mon idée n'était pas seulement de faire entendre au public un ensemble symphonique parmi d'autres, mais de mettre l'accent sur l'importance du travail qu'implique la mise sur pied de concerts avec des musiciens qui ne sont pas tous professionnels. Le jeune public des écoles de la région sera même invité à assister à un concert qui lui sera spécifiquement réservé, dont le programme mêlera les noms de Rossini, Holst et Fernández... Dans les concerts inscrits au programme du festival à proprement parler, les barrières entre la musique folklorique et les partitions classiques s'estomperont aussi, de façon que le public puisse entrer directement en contact avec une tradition musicale d'Amérique latine qui nous reste encore trop souvent étrangère.. Un vent de folie Ainsi, la Première Symphonie de Mahler. interprétée après le Concerto de Poulenc le 7 septembre, aura-t-elle été précédée le 6 septembre par un programme comprenant les Danses Symphoniques extraites de West Side Story du compositeur américain et chef d'orchestre Leonard Bernstein, un Body Concerto de Julia Wolfe, la fameuse Rhapsody in Blue de George Gershwin et la non moins connue Bacchiana Brasileira no 4 de Hector Villa Lobos. La dernière soirée fixée au 9 septembre sera encore plus ébouriffante avec des œuvres d'Ari Barroso, Silvestre Revueltas, Alberto Ginastera, Arturo Marquez, Wellington Gomes et Zequinha de Abreu. Notons encore, le 8 septembre, une soirée réservée à l'ensemble de percussions et de vents de l'orchestre qui offrira un panorama de musiques riches en rythmes et en couleurs, avec des œuvres de Kurt Weil, Carlos Chaves ainsi que des pièces extraites du répertoire brésilien et latinoaméricain pour percussion. Voilà de quoi faire souffler un vent de folie sur la manifestation montreusienne que l'on ne pour- l i t é s e p t e m b r e Royal Philharmonic Orchestra London et Charles Dutoit © Yunus Durukan ra pas accuser, cette année, de manquer d'air ! Le reste du programme voguera sur des eaux nettement plus tranquilles. En début de manifestation, le concert inaugural sera assuré par les membres de la fameuse Philharmonie tchèque qui interprétera Smetana, le fameux Concerto de violoncelle de Dvorak avec la complicité d'Alisa Weilerstein en soliste et la 7e Symphonie de Beethoven sous la direction de Jirí Belohlávek. Le lendemain soir, ce sera au tour du Russian National Orchestra de proposer un programme entièrement consacré à Mozart avec Mikhail Pletnev à la direction et au piano pour les Concertos de piano KV 246 dit «Lutzow» et K 491 après l'Ouverture de la Musique maçonnique funèbre K. 477. Ce même orchestre, avec le même soliste, sera dirigé le samedi 30 août par Conrad van Alphen dans un programme où figurera le Concerto de piano de Schumann avec, avant l'entracte, la Symphonie no 3 dite Ecossaise de Mendelssohn en guise d'amusebouche. aux lauréats de la compétition organisée par le Parmigiani Montreux Jazz Festival. Cette très longue soirée permettra de mettre en parallèle des pièces de styles divers dont on peut espérer Nouveauté c Festival Academy qui se produiront les 2, 3 & 4 septembre dans le cadre enchanteur de la grande salle du Château de Chillon. La partie symphonique du programme du festival se terminera avec deux soirées où se produira le Royal Philharmonic Orchestra de Londres placé sous la direction de son chef permanent Charles Dutoit, avec le pianiste Radu Lupu dans le 3e Concerto de Beethoven, entouré de l'Ouverture du Vaisseau Fantôme de Wagner et la 15e Symphonie de Chostakovitch le mercredi 10 septembre; le lendemain soir, 11 septembre, ce sera une soirée franco-russe avec Bartok, Moussorgsky / Ravel et Camille Saint-Saëns dont le Concerto de violon no 3 sera interprété par le soliste James Ehnes. Le Festival se terminera sur une soirée de musique de chambre donnée au Théâtre de Vevey le vendredi 12 septembre avec, au programme, la Fantaisie de Schubert D 934, la Sonate K 376 de Mozart et la Sonate dite à Kreuzer de Beethoven que joueront le violoniste Corey Cerovsek et le pianiste Jiri Behlolavek © Petra Hajska Autre nouveauté de cette édition 2014 : la Nuit des Pianistes, qui se donnera dans la salle des fêtes du Grand Hôtel du Lac à Vevey le lundi 1er septembre à partir de 18 heures. « Notre intention, dit M. Richter, est de réunir quelques-uns des pianistes les plus prometteurs entendus récemment aux Concours Tchaïkovski, Geza Anda ou Clara Haskil et de les associer a m u s i c a l t u qu'elles contribueront à élargir l'horizon musical d'un public qui n'aurait peut-être pas fait l'effort d'acheter un billet pour un récital classique ou pour une soirée entièrement dédiée au jazz!... » Suivra le volet attendu des trois soirées réservées aux jeunes artistes repérés à la Verbier a l i t Paavali Jumppanen. Une ultime soirée symphonique, confiée à Marek Janowski dirigeant son orchestre berlinois, a finalement dû être supprimée pour des raisons budgétaires... Éric Pousaz Adresse du site internet pour l'obtention du programme complet et la location de billets : http://www.septmus.ch/ é 43 s e p t e m b r e m u s i c a l portrait de la violoncelliste Alisa Weilerstein Le jeudi 28 août, à l’Auditorium Stravinski, la violoncelliste américaine Alisa Weilerstein sera la soliste du concert inaugural du Septembre Musical. Elle y interprétera le Concerto en si mineur d’Anton Dvorak, en compagnie de la Philharmonie Tchèque, et sous la conduite de Jiří Bělohlávek. L’Ouverture de La Fiancée vendue de Smetana et la 7e Symphonie de Beethoven compléteront le programme. 44 Née à Rochester dans une famille de musiciens - père violoniste, membre fondateur du Quatuor de Cleveland ; mère pianiste réputée – la jeune Alisa fait à 13 ans ses débuts de concertiste avec l’Orchestre de Cleveland. A15 ans, elle se produit déjà au Carnegie Hall et donne son premier concert avec Zubin Mehta et le New York Philharmonic. A l’affiche, le Concerto d’Elgar. Une œuvre dont elle dira, au micro de Frédéric Lodéon, lors de son passage de février 2013 à Paris, que, jeune, l’écoute de l’enregistrement de Jacqueline Dupré, l’héroïne de son enfance, était pour elle un rituel quasi quotidien. Elle ajoute qu’elle a dû, à 12 ans, lorsqu’elle a commencé à étudier sérieusement ce concerto, mettre les disques de Jacqueline Dupré de côté afin de trouver sa propre voie. Ce Concerto d’Elgar, elle va l’enregistrer à Berlin en 2010 avec Daniel Barenboim et la Staatskapelle, un CD complété par le Concerto de son compatriote Elliott Carter et le Kol Nidrei de Max Bruch, captés en public. Bolivar Symphony Orchestra et Gustavo Dudamel comme aux Proms de la BBC à Londres, où elle interprète, sous la baguette d’Osmo Vänskä, le 1er Concerto de Chostakovitch. Avec Yuri Temirkanov et la Philharmonie de Saint-Pétersbourg, elle entreprend une vaste tournée à travers les USA. Avec ses parents, elle se produit au sein du Un agenda chargé Diplômée en histoire russe de l’Université de Columbia à 22 ans, Alisa Weilerstein enchaîne les succès, en musique de chambre ou comme soliste des grands orchestres d’Amérique du Nord et d’Europe. Elle joue au Venezuela avec le Simon Weilerstein Trio familial. Elle manifeste aussi un vif intérêt pour la musique actuelle. Elle donne, déjà en 2008, la première mondiale des 24 Préludes pour violoncelle et piano de Lera Auerbach, avec le compositeur au piano et fait connaître à travers le monde une pièce d’Osvaldo Golijon, Azul, pour violoncelle et orchestre. Son prochain disque, Solo, annoncé pour octobre de cette année, fait la part belle à la musique contemporaine. On y trouvera, outre la Sonate op. 8 de Zoltan Kodaly et la Suite pour violoncelle seul de Gaspar Cassado (18971966), une page d’Osvaldo Golijon, Omaramar, ainsi que de Bright Sheng, Seven Tunes Heard In China. Pendant la saison 2013/ 2014, elle a été artiste en résidence au Cincinnati Symphony Orchestra. Virtuosité et musicalité Alisa Weilerstein n’est pas une inconnue en Suisse. On a pu l’entendre à Verbier en 2008, en compagnie des pianistes Jonathan Gilad et Yuja Wang ou avec orchestre dans le Triple Concerto de Beethoven, ainsi qu’à Zürich où elle a interprété, avec l’Orchestre de la Tonhalle, sous la direction du compositeur, Reflections on Narcissus, pour violoncelle et orchestre, de Matthias Pintscher. Elle sera de retour sur les bords de la Limmat le 31 décembre de cette année, à l’occasion du Silvesterkonzert pour y faire valoir sa virtuosité, sa technique hors pair et sa chaleureuse musicalité dans les Variations Rococo de Tchaïkovski. Des qualités qui font tout le prix du CD Decca qui vient de paraître, consacré précisément au Concerto en si mineur op. 104 de Dvorak, un disque qui bénéficie de l’accompagnement des mêmes interprètes que l’on entendra à Montreux, soit Jiří Bělohlávek et la Philharmonie Tchèque. Une aubaine à ne pas manquer. Yves Allaz JEUDI 28 AOÛT, 19h30, AUDITORIUM STRAVINSKI Jiří Bělohlávek, direction Alisa Weilerstein, violoncelle Philharmonie tchèque Alisa Weilerstein. Decca / © Harald Hoffmann a c t u a l i t é s e p t e m b r e conrad van alphen au septembre musical Générosité et enthousiasme Il est né en 1963 à Pretoria, mais il a fait carrière dans la vieille Europe, dans un pays dont la culture est proche de la sienne, les Pays-Bas. Portrait d'un chef qui a été contrebassiste à ses débuts. m u s i c a l Il a gravé, en compagne de l'Orchestre WDR de Cologne, la musique colorée, un brin inquiétante, évoluant dans toutes les échelles instrumentales, riches de trouvailles rythmiques, du film L'Héritage, née de l'imagination d’Olivier Militon. La musique contemporaine l'intéresse; l'homme a créé - en 2011 - Tornado, une partition du compositeur néerlandais Patrick van Deurzen. Cet ouvrage complexe, aux arêtes rythmiques marquées, tonal, dessine un paysage contrasté, qui pourrait fort bien accompagner une film de science fiction ou fantastique ! Fureteur et enthousiaste, le musicien a enregistré une version reconstituée par Jos van der Zander d'un concerto pour... hautbois de Beethoven, avec l'Orchestre de Chambre de Rotterdam et Alexei Ogrintchouk en soliste. Transmetteur de savoirs Conrad van Alphen Sa vie et ses activités sont un modèle artistique: créativité dans l'interprétation comme dans la formation d'ensembles, imagination et engagement au podium, recherche constante de nouveautés et d'horizons inexplorés, voyages et amitiés, conseils et encouragements aux jeunes... Qui est ce chef si dévoué, qui a effectué tant de choses, pourtant à peine quinquagénaire ? D’Afrique du Sud au monde entier En 2000, il a fondé l'Orchestre de Chambre de Rotterdam; mais pour beaucoup, ce musicien établi aux Pays-Bas depuis 1989 est le chef du Sinfonietta Rotterdam. Ce Sud-Africain, que les déplacements n'effrayent pas - il a dirigé l'Orchestre Philharmonique de Xiamen - a aussi conduit - c'était entre 2005 et 2009 - l'Orchestre Philharmonique d'Etat de Kislovodsk, une ville située entre Sotchi et Grozny la tchétchène ! a c t u Cette expérience avec des musiciens russes explique sans doute pourquoi il viendra se produire à Montreux avec l'Orchestre national de Russie, le 30 août prochain. En mai 2014, il est retourné en Afrique du Sud pour diriger le Johannesburg Philharmonic Orchestra. C'est dire si sa vie est un tourbillon, une valse un peu folle, faudrait-il mieux dire ! Sa direction vive et colorée - on pense à Mariss Jansons ou au Karajan des débuts - a séduit de nombreux publics. Dans les premières symphonies, Beethoven est présenté comme le continuateur de Haydn, dans son humeur, son énergie et son tempérament jubilatoire. Dvorak est un romantique juvénile et enthousiaste, tandis que Chostakovitch, dans sa 9e symphonie, est un potache insouciant, agréablement insolent ! Franchissant les frontières stylistiques, Conrad van Alphen conduit également des pages de Piazzolla, en leur conférant le déhanchement nécessaire ! a l i t Sa générosité l'a amené à accompagner, encourager et parrainer de nombreux jeunes musiciens en début de carrière dans des concerts qui ont eu beaucoup de succès aux Pays-Bas. Pour des plus avancés, le directeur musical donne des «master classes», notamment à Saint-Pétersbourg. Chaque chef débutant peut diriger pendant trente minutes environ, un ouvrage symphonique, choisi d'entente avec le maestro. Le résultat est ensuite longuement discuté, pendant l'exécution et après. C'est dire si le «patron» a une pédagogie active; son enseignement est totalement dévoué à ses élèves, en adéquation avec son tempérament engagé ! En Afrique du Sud, il s'est associé au projet «South African National Youth Orchestra Foundation», un organisme qui soutient des jeunes en leur accordant des bourses et en leur offrant des possibilités de formation. Pierre Jaquet SAMEDI 30 AOÛT, 19h30, AUDITORIUM STRAVINSKI, MONTREUX Conrad van Alphen, direction. Mikhaïl Pletnev, piano Orchestre national de Russie Felix Mendelssohn-Bartholdy - Symphonie n° 3 en la mineur op. 56 «Ecossaise». Robert Schumann - Concerto pour piano et orchestre en la mineur op. 54 é 45 s e p t e m b r e m u s i c a l cié à des lignes sonores du synthétiseur. Cette musique ne rejette pas complètement la tonalité. Si certains y verront une concession complaisante offerte au public, d'autres apprécieront le désir du spécialiste du clavier d'échapper aux modes et d'aller à la rencontre de ses auditeurs. conrad tao au septembre musical « Musicissimo ! » Il est d'origine chinoise, mais vit à New-York; il joue Beethoven en se servant d'une liseuse, compose de la musique électronique et joue du violon à ses heures perdues. Portrait d'un artiste de la nouvelle génération. 46 Né en 1994 à Chicago, dans une famille chinoise établie aux Etats-Unis, Conrad Tao a la musique dans le sang. A l'âge de 18 mois déjà, il aurait tapoté sur un piano des chansons pour les tout petits ! Son premier petit récital est donné à l’âge de 4 ans... Enfant, ses parents l'ont emmené à de grands concerts; il prétend y avoir beaucoup appris, comme dans une école. A treize ans, l'adolescent jouait le concerto pour piano n°1 de Mendelssohn... Etabli à New York depuis l'âge de 9 ans, il est aujourd'hui un “Gimore Young Artist“, honneur décerné tous les deux ans aux éléments les plus prometteurs de la nouvelle génération de pianistes américains. Le concertiste a déjà entrepris de nombreuses tournées - comme soliste ou avec des orchestres - en Italie, au Mexique, au Chili, en Russie, en Chine et à Singapour... Boulimique de sons, le clavier ne lui suffit pas : le musicien s'est intéressé au violon et a donné des récitals dont le niveau paraît comparable à celui de bien des spécialistes ! Conrad Tao a aussi toujours voulu composer, depuis qu'il était tout petit, et la création de sa propre musique occupe une place importante dans sa production artistique. Un touche à tout Le musicien vit à New York, et adore tout ce que peut offrir cette cité; rencontres, cultures... « Je veux absorber cette ville. Il y a tant de choses qui ont une dimension musicale ». a La nécessité de bâtir soigneusement un programme, de lui donner une cohérence, pas forcément historique, est à ses yeux un élément clef. Là réside déjà l'originalité d'un artiste. La recherche des défis, la remise en cause inces- Éclat et fulgurance Le jeu scintillant amène à penser parfois à Lang Lang. A l'heure des programmes télévisés dans lesquels des débutants doivent se présenter devant un jury pour entreprendre une carrière sur la scène, le public ne peut qu'apprécier ce genre de prouesses; le type de jeu incarné par Conrad Tao a sans doute de l’avenir, dans une ère assoiffée de sensationnel, ne sachant estimer que la performance. Ceux qui applaudissent à un double salto arrière effectué devant eux, ou à l’exploit d’un mathématicien prodige, applaudiront certainement la technique de Conrad Tao; mais d'aucuns estimeront que sa musicalité peut sans doute encore gagner en profondeur et en maturité... Il faut toute de même veiller à se rappeler qu'au-delà d'éblouissantes investigations techniques et sonores, il est passionnant d'observer un artiste en maturation. Pierre Jaquet MARDI 2 SEPTEMBRE, 19h30, CHÂTEAU DE CHILLON Conrad Tao sante, l'inspirent et le stimulent, comme en témoigne le programme au Château de Chillon. Fan de technologie, le concertiste utilise une liseuse en guise de partition. Le jeune homme a publié l'Album Voyage : on y trouve, mélangés sans préoccupations chronologiques, mais avec des désirs d'échos entre les œuvres, Railroad de Thelonious Monk, des préludes de Rachmaninov, Vestiges, pages crées par l'interprète, Gaspard de la nuit (Ravel) et, avant deux improvisations sur les mélodies des Beach Boys, une autre page née de son imagination: Iridescence pour piano et Ipad, une musique un peu “planante“, dans laquelle le piano est asso- c t u a Conrad Tao, piano David Lang - cage Johann Sebastian Bach - Toccata en fa dièse mineur BWV 910 Elliott Carter - Two Thoughts about the Piano Julia Wolfe - Earring Sergueï Rachmaninov - Etudes-Tableaux en la mineur n° 2 op.39 David Lang - wed John Cage - In a Landscape Modest Moussorgski - Tableaux d'une exposition l i t é s e p t e m b r e m u s i c a l 47 Mercredi 3 septembre au Château de Chillon : Alexandra Conunova (avec Lionel Cottet, violoncelle et Julien Quentin, piano) Vendredi 12 septembre au Théâtre de Vevey : Corey Cerovsek & Paavali Jumppanen a c t u a l i t é s e p t e m b r e m u s i c a l portrait du violoncelliste genevois Lionel Cottet La carrière du violoncelliste Lionel Cottet, né à Genève en 1987, connaît un essor remarquable. Ancien élève de François Guye au Conservatoire de sa ville natale, ce brillant musicien se produira les 30 juillet et 2 août prochains au Festival de Verbier, ainsi que le 3 septembre au Septembre Musical, en trio au château de Chillon avec la violoniste Alexandra Conunova et le pianiste Julien Quentin. Auparavant, il aura joué au Marlboro Festival, dans le Vermont, et entrepris une grande tournée en Argentine en compagnie du guitariste Federico Diaz. Bénéficiaire à ses débuts du Pour-cent culturel Migros et boursier des fondations Leenards et Wilsdorf, Lionel Cottet, après ses études genevoises, s’est perfectionné à la Juilliard School of Music de New York, au Mozarteum de Salzburg, ainsi qu’à la Hochschule de Zürich, auprès de Thomas Grossenbacher. 48 qui font encore frémir de nos jours bien des élèves de conservatoire. A l’écoute, son Concerto en ré majeur no 2 pour violoncelle et orchestre – il en a composé 10 - s’avère fort plaisant, et surprenant : il contient notamment un Fandango qui rappelle irrésistiblement celui, fameux, du Padre Soler. Un concerto à connaître absolument, ce d’autant que Lionel Cottet Parcours Lauréat d’Astral Artists à Philadelphie et du Swiss Ambassador’s Award, Lionel Cottet a très vite l’occasion de se produire avec quelques-uns des orchestres européens les plus réputés, tels l’Academy of St Martin in the Fields, l’Orchestre Symphonique d’Etat de Russie, ou, en Suisse, le Musikkollegium de Winterthour et l’Orchestre de la Suisse Italienne, ainsi que dans nombre de festivals, en Suisse et ailleurs. En duo avec le pianiste Louis SchwizgebelWang, il est invité à Davos, Verbier ou Gstaad et collabore avec l’Österreichisches Ensemble für Neue Musik de Salzbourg pour la création de pièces de compositeurs actuels. En 2013 paraît chez Sony un CD consacré à diverses œuvres de deux contemporains de Beethoven, Bernhard et Andreas Romberg. Violoncelliste célèbre de son temps, Bernhard Romberg a écrit pour son instrument des pages hérissées de difficultés l’interprète avec élégance et subtilité, et qu’il bénéficie de surcroît de l’accompagnement tout en délicatesse de l’orches-tre bavarois des Hofer Symphoniker conduit par le jeune chef tessinois Luca Bizzozero. Sur le même CD, en duo avec Federico Diaz, Lionel Copttet joue aussi le Divertimento pour violoncelle et guitare sur des chants populaires autrichiens, de Bernhard également, tandis que de son cousin Andreas, le violoniste Yury Revich fait connaître le Concerto no 3. Un disque qui a reçu un très bon accueil de la presse spécialisée. Notons que Lionel Cottet jouera ce même 2e Concerto de Bernhard Romberg à l’Opéra de Lausanne, dans le cadre des Concerts du Dimanche de l’OCL, le 12 avril 2015, sous la direction du jeune chef espagnol Gustavo Gimeno, l’assistant d’Abbado à Lucerne et de Jansons à Amsterdam. Récital en trio Au Septembre Musical, Lionel Cottet sera l’hôte du château de Chillon en compagnie d’Alexandra Conunova et de Julien Quentin. Alexandra Conunova est née en Moldavie, a étudié à Hanovre et vit à Vevey. Julien Quentin est un ancien élève d’Alexis Golovine au Conservatoire de Genève. Tous deux sont passés par Verbier. A Chillon, la violoniste jouera avec Quentin le Grand duo pour violon et piano D. 574 de Schubert, et avec Cottet la Sonate pour piano et violoncelle no 1 op. 38 de Brahms. Ensemble, ils interpréteront le Trio no1 de Mendelssohn, dans le cadre chargé d’histoire de la pittoresque Salle des Chevaliers. Yves Allaz MERCREDI 3 SEPTEMBRE, 19h30, CHÂTEAU DE CHILLON Alexandra Conunova, violon Lionel Cottet, violoncelle Julien Quentin, piano Johannes Brahms - Sonate pour violoncelle et piano en mi mineur op. 38 Franz Schubert - Grand duo pour violon et piano en la majeur D 574 Felix Mendelssohn-Bartholdy - Trio n°1 en ré mineur Lionel Cottet a c t u a l i t é s e p t e m b r e entretien avec un chef, pianiste et professeur engagé Ricardo Castro Ricardo Castro, pianiste et chef d’orchestre, né dans l’Etat de Bahia au Brésil, est à l’origine du projet social et culturel NEOJIBA. Inspiré par l’exemple vénézuélien El Sistema, existant depuis près de 35 ans et mondialement connu, Neojiba signifie « Centres d’Etat des orchestres de jeunes et d’enfants de Bahia », et a donc vu le jour en 2007 à Salvador. Il a pour objectifs l’intégration sociale d’enfants défavorisés, le partage du savoir et l’excellence artistique. un objectif, car la formation musicale est aussi importante que l’école. Tous les enfants ont en principe les moyens de communiquer par la musique. Certains peuvent avoir le sens du rythme même s’ils n’ont pas celui de la mélodie, d’autres peuvent posséder simplement une jolie voix, qui trouvera son emploi dans le chœur. On donne aussi à des enfants et des adultes handicapés, (aveugles, autistes, trisomiques ou atteints par la démence) l’occasion de participer et de recevoir un enseignement. A leur arrivée, les enfants ont en général choisi un instrument, mais il est nécessaire d’observer d’abord leurs particularités physiques et leur personnalité avant de prendre la décision finale. Par exemple si l’enfant est introverti, on évitera la trompette, instrument bien trop exposé dans l’orchestre. Ricardo Castro à la tête du YOBA © Tatiana Golsman A l’heure actuelle, sept orchestres sont en activité, dont le Youth Orchestra of Bahia (YOBA), et d’autres sont en train de se développer dans d’autres villes. La croissance est d’une incroyable rapidité et ouvre des perspectives réjouissantes pour le monde du travail. En effet les places se multiplient et les jeunes engagés dans le projet Neojiba peuvent y rester toujours s’ils le désirent : ils seront à la fois de très bons musiciens ET de très bons professeurs Scènes Magazine a demandé à Ricardo Castro d’expliquer le fonctionnement de cette structure hors du commun. Les enfants sont admis en moyenne à l’âge de sept ans dans le projet, mais cela peut être aussi avant ou après. Certains jeunes très motivés entrent rapidement dans les orchestres plus avancés. Un garçon de 10 ans a été récemment accepté et un an plus tard il faisait déjà partie des violoncellistes d’une tourné internationale. Selon Ricardo Castro il faut être très attentif aux cas spéciaux. Malheureusement tous les candidats ne peuvent être encore intégrés : les places et les finances ne sont pas illimitées. Mais c’est e n t r Une méthodologie nouvelle La méthodologie s’appuie sur deux principes de base essentiels : premièrement, les musiciens les plus avancés et membres du Yoba ont l’obligation de contribuer à l’enseignement des plus jeunes. Certains sont très doués pour la pédagogie, qu’ils ont apprise sur le tas et les élèves écoutent très volontiers les directives des jeunes « multiplicateurs ». Le nombre d’heures de cours donnés par ces derniers chaque semaine varie suivant le temps dont ils disposent, car beaucoup sont encore à l’école, ou à l’université. Les membres des autres orchestres, eux, ne font que suivre des cours. Deuxièmement, l’enseignement est d’abord collectif : cela permet e t i e m u s i c a l aux élèves de s’intégrer dans un orchestre, sans traumatisme. Au début on leur attribue un instrument moins en vue : ils se sentent bien, en sécurité. On crée une communauté musicale, une vie communautaire centrée sur la recherche de la beauté. Plus tard on passe aux cours individuels. C’est beaucoup mieux que l’inverse car il est souvent difficile de se retrouver seul face à un professeur pendant des années, et avec un instrument qui ne sonne pas. La plupart des élèves des écoles de musique sont découragés. Chez nous en revanche, dit Ricardo Castro, il n’y a pratiquement pas d’abandon. Même quand les jeunes sont à l’université ou travaillent, ils continuent. Car la majorité des élèves va à l’école jusqu’à 18 ans, puis à l’université ! La discipline, la faculté de se concentrer, qu’ils ont acquises à Neojiba, leur rendent l’école plus facile. S’ils ne deviennent pas musiciens, ils peuvent rester en contact avec la musique en se dirigeant vers la lutherie ou la radio par exemple. L’important c’est qu’ils aient un désir et que ce désir soit entendu. Quant à la théorie elle n’est pas oubliée mais liée à la pratique : si l’on joue Beethoven, on étudie la partition et tout ce qui concerne ce compositeur pendant les répétitions. Collaboration avec la Suisse Le Conservatoire de Genève coopère avec Neojiba. Il envoie au Brésil une fois par année des étudiants en pédagogie et le semestre peut compter dans leur cursus. Des professeurs du Conservatoire, membres ou non de l’OSR, vont donner des cours à Bahia et les élèves brésiliens viennent à Genève pour des périodes plus ou moins longues. Ricardo Castro a lui-même étudié à Genève : le piano, dans la classe de virtuosité de Maria Tipo puis la direction d’orchestre avec Arpad Gerecz. Il partage maintenant son temps entre le Brésil et la Suisse puisqu’il est professeur de piano depuis 1992 à la HEMU (Haute école de musique Vaud-ValaisFribourg). D’après des propos recueillis par Martine Duruz AUDITORIUM STRAVINSKI Youth Orchestra of Bahia - SAMEDI 6 SEPTEMBRE, 19h30, Ricardo Castro, direction et piano & Colin Currie, percussion - DIMANCHE 7 SEPTEMBRE, 18h00, Ricardo Castro, direction Martha Argerich, piano Alexander Gurning, piano n 49 s e p t e m b r e m u s i c a l Chaves et du répertoire latino-américain pour percussion. L’orchestre clôturera son passage montreusien sur une note ensoleillée avec un concert « Brazilian Beats » dirigé par le jeune et prometteur Yuri Azevedo (cf. encadré). le youth orchestra of bahia en résidence Un souffle exotique ! En prélude à son édition anniversaire l’an prochain (70ème édition en 2015 !), le Septembre Musical propose cette année un projet qui amènera un vent exotique mais frais aux amateurs de musique classique : la résidence de l’Orchestre des Jeunes de Bahia (YOBA – Youth Orchestra of Bahia). Formation principale du programme NEOJIBA, l’ensemble brésilien animera pendant cinq jours le festival de la Riviera vaudoise avec workshops, masterclass, conférence, répétition publique, un concert des écoles avec orchestre géant et quatre concerts symphoniques. Une collaboration avec les plus grands 50 Sous la baguette de Ricardo Castro, le YOBA partagera la scène avec plusieurs solistes de renommée internationale lors de quatre concerts se distinguant par leur répertoire et leur formation musicale. Tout d’abord un concert « Americas » (Bernstein, Gershwin, Wolfe et Villa-Lobos), avec la participation du percussionniste écossais Colin Currie et la performance pianistique du chef Ricardo Castro. Le lende- main, jour de l’indépendance brésilienne, l’orchestre donnera un concert « Titans » en interprétant la 1ère symphonie de Mahler du même nom et en accompagnant en première partie de concert pas moins que la grande Martha Argerich et le pianiste belge Alexander Gurning dans le double concerto pour piano de Poulenc. Le concert « Ensembles du NEOJIBA » réunira les ensembles de vents et percussion du YOBA, Colin Currie et le violoniste canadien Corey Cerovsek autour d’œuvres de Kurt Weil, Carlos NEOJIBA, un programme pionnier au Brésil Le programme NEOJIBA possède ses quartiers généraux à Salvador, la capitale de Bahia, le plus grand état appartenant à la région « Nordeste » du Brésil, d’une superficie égale à celle de son voisin le Venezuela ou à la France. Première capitale de la colonie portugaise, São Salvador da Bahia de todos os Santos (son nom d’origine) est célèbre pour ses trois cent soixante-cinq églises baroques et l’architecture coloniale de son centre historique, mais surtout parce qu’elle est le berceau de la culture afrobrésilienne. La capoeira, le candomblé, la percussion et la samba, autant de fruits de l’héritage africain au Brésil. C’est dans cette région aux saveurs et couleurs vives, animée chaque année par un carnaval aussi populaire que touristique, que le pianiste et chef d’orchestre bahianais Ricardo Castro crée en 2007 le programme NEOJIBA (Núcleos Estaduais de Orquestras Juvenis e Orquestra Sinfonica Juvenil da Bahia © Tatiana Golsman a c t u a l i t é « Qui enseigne apprend » La pratique collective est le moteur de l’apprentissage musical des membres du programme, mais favorise également leur développement personnel avec l’écoute, la concentration, la solidarité et la conscience collective. Ils se réunissent plusieurs heures tous les jours de la semaine pour jouer ensemble, étudier les œuvres par pupitres ou en tutti. La transmission par ses paires est par ailleurs l’objet de la devise de NEOJIBA, « Aprende quem ensina » (« Qui enseigne apprend », en français), ce qui crée un système d’ensei- Martha Argerich © Yunus Durukan Infantis da Bahia – Centres d’Etat d’Orchestres d’Enfants et d’Adolescents de Bahia), qui procure un enseignement de pratique orchestrale et chorale de différents niveaux et sans distinction sociale. Inspiré du programme vénézuélien fondé en 1975 par José Antonio Abreu, El Sistema*, NEOJIBA transforme aujourd’hui, au travers de la pratique collective des instruments de l’orchestre symphonique classique, la vie de plus d’un millier de jeunes Bahianais et possède le statut de programme prioritaire du gouvernement de Bahia, un soutien institutionnel et financier d’une importante envergure. 51 Intégration sociale et excellence musicale C’est en offrant aux jeunes une réelle opportunité de sortir de leur cadre de vie quotidienne (souvent géographiquement limité par les fortes disparités sociales), en mélangeant concrètement les couches de la société (dans un orchestre de jeunes, par exemple), que l’on peut faire disparaître les barrières sociales. Les jeunes, issus des multiples strates qui constituent la population bahianaise, reçoivent un enseignement musical pratique et théorique ainsi que du matériel pédagogique gratuits et se voient prêter un instrument sans frais. Le transport est financé (le prix du billet de bus est absurdement cher à Salvador), tout comme le goûter. L’enseignement musical est dispensé par des professionnels hautement qualifiés, généralement de passage dans le núcleo (le terme générique pour centre) pour une courte durée. Le reste du temps, les musiciens plus expérimentés sont les moniteurs des plus jeunes. a c t u Colin Currie © Marco Borggreve a l i t é s e p t e m b r e gnement à l’horizontale. Dès lors qu’il a appris ne serait-ce qu’une gamme, tout enfant peut transmettre ses connaissances à son voisin. L’engagement et le travail de NEOJIBA est déjà largement reconnu, en témoignent la nomination de son fondateur et directeur général Ricardo Castro au titre de personnalité de l’année dans son pays en 2011. En 2013, il devient le premier Brésilien à recevoir le titre de membre honoraire de la prestigieuse Royal Philharmonic Society. YOBA, ambassadeur international 52 Les meilleurs musiciens du programme sont réunis sous l’enseigne du Youth Orchestra of Bahia, la formation qui se rendra à Montreux en septembre. Mais qu’on ne s’y trompe pas : chaque musicien a l’obligation de passer une audition annuelle afin de confirmer sa place au sein de la formation. Cela a l’avantage de d’offrir régulièrement aux plus jeunes l’opportunité d’intégrer l’orchestre, dont les cent vingt-cinq membres sont âgés entre treize et vingt-neuf ans. Véritable ambassadeur du programme NEOJIBA à l’étranger, le YOBA est en 2010 le premier orchestre de jeunes du Brésil à se produire en Europe. Il joue dans des salles prestigieuses telles que le Konzerthaus de Berlin, le Yuri Azevedo Yuri Azevedo intègre le programme NEOJIBA à l’âge de quinze ans en tant que percussionniste. Très vite attiré par la direction d’orchestre, il prend sa première leçon avec le vénézuélien Manuel López-Gómez. Il continue ensuite ses études de direction avec Eduardo Torres, puis Ricardo Castro. Il se fait notamment remarquer en 2012 au Festival d’Hiver de Campos do Jordão (São Paulo), où il est le premier chef d’orchestre à recevoir le Prix Eleazar de Carvalho, considéré comme l’un des prix les plus prestigieux de la musique classique au Brésil. Aujourd’hui âgé de 22 ans, il a déjà dirigé l’Orchestre symphonique de Miami, l’Orchestre symphonique de São Paulo et l’Orchestre symphonique de Bahia, et a récemment été à la tête du YOBA lors de sa première tournée aux Etats- a m u s i c a l Victoria Hall de Genève et le Royal Festival Hall de Londres. A retenir également : l’enregistrement du premier CD de l’orchestre, Bahia Orquestral, paru en mars dernier conjointement à un DVD, et sa récente tournée aux Etats-Unis avec le pianiste Jean-Yves Thibaudet. Il s’est produit avec d’autres grands solistes tels que Lang Lang, Maria João Pires, Shlomo Mintz et les sœurs Labèque. Activités pédagogiques au Septembre Musical La résidence du YOBA sera une occasion unique pour le public d’observer et expérimenter la méthodologie de pédagogie musicale appliquée dans le programme NEOJIBA. Le Festival proposera en effet cette année une palette d’activités pédagogiques qui marqueront la présence de cet orchestre aux saveurs particulières au bout du lac Léman. Outre une répétition publique menée par le jeune chef de 22 ans Yuri Azevedo (cf. encadré), les musiciens du YOBA animeront des ateliers destinés aux instruments à cordes et aux vents. De la même manière, la section percussion du YOBA aura l’occasion de profiter de la présence du grand percussionniste Colin Currie lors d’une masterclass, ouverte elle aussi au public. L’Auditorium Stravinsky se verra pris d’as- Unis. A Montreux, Yuri Azevedo mènera de sa baguette le concert de l’Orchestre géant et dirigera le YOBA pour sa dernière soirée de rési- saut lors du Concert des Ecoles, une rencontre qui réunira trois cents musiciens de la région sur scène, accompagnés de membres du YOBA. De tous âges et tous niveaux confondus, ils se partageront les partitions en fonction de leur niveau pour former un Orchestre géant, réunis sous la baguette du jeune Yuri Azevedo. Pour reprendre les mots du directeur du festival Tobia Richter, la résidence du YOBA marquera « une édition qui marie les continents et les générations, sans conteste le signe d’une nouvelle manière d’aborder la musique classique au XXIème siècle ». Monica Schütz * Dans le cadre du festival, Ricardo Castro donnera une conférence sur El Sistema. L’Association Suisse des Amis de NEOJIBA (ASANBA) est en constante recherche de dons d’instruments pour le programme : [email protected] Infos NEOJIBA : www.neojiba.org neojiba.blogspot.ch dence, consacrée à des pièces du répertoire brésilien. Monica Schütz Yuri Azavedo © Tatiana Golsman c t u a l i t é s e p t e m b r e Fulgurance un pianiste pas comme les autres Alexander Gurning Comme beaucoup de représentants de la nouvelle génération de pianistes virtuoses, Alexander Gurning peut se flatter d'avoir parcouru un itinéraire artistique pour le moins original... Né en Belgique de parents indonésien et polonais, le jeune prodige suit d'abord les cours du Conservatoire Royal de Bruxelles avant de devenir, pour trois ans, l'assistant du pianiste russe Evgeny Moguilevsky. Il part ensuite pour Moscou où il parfait son éducation musicale et pianistique dans le conservatoire de cette ville qu'il quitte avec les compliments du jury après son examen final. Commencent alors des années d'intense activité où le pianiste enchaîne les tournées et les apparitions dans les plus grands festivals. En Suisse, notamment, il se produit à Verbier et au Martha Argerich Project de Lugano. Mais un public tout aussi enthousiaste l'applaudit également dans le cadre du Festival de la Roque d'Anthéron, au Schleswig-Holstein Festival organisé chaque année dans le Nord de l'Allemagne ou encore au Sapporo Music Festival qui se tient au Japon. Certains auditeurs lausannois se rappelleront peut-être même sa brève escale dans la capitale vaudoise où il fut accompagné par Christian Zacharias dans le cadre d'un concert de l'OCI au cours duquel, avec la complicité de la pianiste Lilya Zilberstein, il interprétait déjà, comme il le fera prochainement à Montreux, le Double concerto pour deux pianos de Francis Poulenc.... Sa virtuosité extrême, sa liberté d'inspiration et son approche de la musique classique dépourvue de toute œillère le font très vite considérer comme une des valeurs montantes les plus sûres. Soledad Mais Alexander Gurning n'en reste pas là. Curieux de tous les styles musicaux, il fonde avec quelques amis (Manu Comté, accordéoniste Jean-Frédéric Molard, violoniste, Patrick De a c t u Alexander Gurning Schuyter, guitariste et Samuel Gerstmans, contrebassiste) le célébrissime groupe Soledad avec lequel il entreprend de renouveler le genre du tango en le débarrassant de toute une série de traditions qui s'avèrent aussi lourdes à porter que néfastes à la compréhension correcte de ce style musical. Là aussi, le succès est au rendezvous et suscite l'admiration des plus grands musiciens, aussi bien dans le domaine du jazz, de la musique dite 'ethnique' que dans les rangs des grands interprètes classiques. Ainsi Martha Argerich elle-même dira de ce groupe, après un concert auquel elle a assisté : « En écoutant le groupe Soledad, j'ai été frappée par leur rare intensité. Réunissant intelligence, savoir-faire et sex-appeal, ils m'ont transportée dans le monde mystérieux et tragique du tango. » Parallèlement à ses recherches sur la musique sud-américaine, le pianiste belge s'intéresse en plus activement à la musique de cinéma et plus généralement à tous les styles que l'on range sous l'étiquette 'world music' comme la pop, le rock, le jazz, le blues, la musique cubaine, le rap, la musique électronique... et qui contiennent des composantes ethniques ou traditionnelles, etc... a m u s i c a l l i t Sa courte carrière discographique, riche de plusieurs titres dont certains lui ont valu un 'Choc' de l'équipe de la rédaction du Monde de la Musique, est elle aussi d'une largeur d'horizon inhabituelle. Mais c'est peut-être avec sa gravure des Variations Goldberg de Bach qu'il a livré un de ses plus beaux disques. Dans cette œuvre immense, l'imagination de ce pianiste semble comme éperonnée par l'extrême concision de l'écriture du grand compositeur allemand. La sévérité de la structure compositionnelle de ces pièces toujours plus libres de ton incite en effet le pianiste à varier ses approches avec une aplomb qui rappelle sa fréquentation régulière des types de musique les plus variés. « Son piano n’est pas celui de la couleur mais celui de la structure : percussif, dynamique, contrasté, parfois « expérimental », c’est à prendre comme tel. Une succession de fulgurances, avec des moments d’abandon ou d’apaisement touchant à la plénitude » a écrit un critique de La Libre Belgique après un concert bruxellois. On ne saurait mieux qualifier l'art de ce pianiste qui aime à surprendre en osant faire dire aux pages les plus connues ce que l'on a pas l'habitude d'entendre sur une estrade de concert. Les esprits chagrins diront bien que tout ne lui réussit pas. Mais que lui importe ? Car ce serait lui faire injure que de considérer une de ses interprétations dans l'un ou l'autre des répertoires auxquels il aime se frotter régulièrement comme le meilleur de sa discographie. Car Alexander Gurning est d'abord un artiste qui aime la musique sous toutes ses formes lorsqu'elle lui parle et il accepte alors de prendre les risques les plus fous. Il les assume ensuite en grand musicien qu'il est, même lorsqu'il ne convainc pas entièrement. Éric Pousaz DIMANCHE 7 SEPTEMBRE, 18h00, AUDITORIUM STRAVINSKI Youth Orchestra of Bahia. Ricardo Castro, direction Martha Argerich, piano. Alexander Gurning, piano Francis Poulenc - Concerto pour deux pianos et orchestre en ré mineur Gustav Mahler - Symphonie n° 1 en ré majeur «Titan» é 53 s e p t e m b r e m u s i c a l Chostakovitch met en valeur le caractère tragique de ces deux partitions, mais la sonorité est toujours d’une pureté absolue. portrait du violoniste James Ehnes Osmose Considéré par certains à ses débuts comme un nouveau Jascha Heifetz, le violoniste canadien James Ehnes est assurément à 38 ans un des tout grands concertistes actuels. Il sera l’hôte de la dernière soirée symphonique du festival, le jeudi 11 septembre à l’Auditorium Stravinski. Il y jouera le Troisième Concerto de Camille Saint-Saëns, avec le Royal Philharmonic Orchestra conduit par Charles Dutoit. Ravel et Bartok compléteront le programme. 54 Né en 1976 à Brandon (Manitoba) dans une famille d’artistes - père trompettiste, mère danseuse – James Ehnes commence à 4 ans l’étude du violon et donne à 13 ans son premier concert avec l’Orchestre Symphonique de Montréal. Diplômé de la Juilliard School en 1997, bardé de prix et diverses distinctions, il entreprend dès lors une carrière de soliste de premier plan. Il enregistre une première fois à 19 ans les 24 Caprices de Paganini, dont il livrera une nouvelle et transcendante traduction une quinzaine d’années plus tard, sous le label Onyx. Un archet impérial Invité par toutes les grandes formations d’Amérique du Nord et d’ailleurs, hôte de grands festivals (citons Marlboro, les Nuits Blanches de Saint-Pétersbourg ou, en France, La Chaise-Dieu et La Côte-Saint-André), doté d’un magnifique instrument - le Marsick, un Stradivarius de 1715 - James Ehnes, au concert comme au disque, est reconnu unamimement comme un des meilleurs archets de sa génération. S’il n’a pas encore donné au disque sa vision des concertos de Beethoven et de Brahms (en projet), sa discographie, parue essentiellement chez Chandos et Onyx, est d’une qualité exceptionnelle. Sans doute parce qu’indépendamment de ses immenses qualités techniques et musicales, James Ehnes ne joue que les musiques qu’il aime, celles avec lesquelles il se sent à l’aise et pour lesquelles « il a quelque chose à dire », comme il l’affirme lui-même. Et même quand il se réfère aux grands violonistes du passé, ce n’est pas pour se laisser influencer par les interprétations qui ont marqué leur époque. Son enregistrement tout récent du Concerto de Britten et du Premier Concerto de Impérial, James Ehnes l’est aussi dans ses traductions des œuvres intégrales pour violon, avec orchestre et avec piano, de Tchaïkovski exempt de tout pathos - , de Prokofiev et de Bartok. Il sait aussi mettre son talent au service d’œuvres rares, comme celles de Luigi Dallapicola, de Hummel ou encore d’Ernst von Dohnanyi, dont il a livré une belle traduction du 2e Concerto pour violon. Il a fait aussi paraître un CD/DVD fort original Homage, qui met en valeur les 14 instruments de la fameuse collection de la lutherie de Crémone de David Fulton, qui recèle pas moins de sept Stradivarius, à côté de violons et d’altos de Guarneri, da Salò et Guadagnini. Il est par ailleurs le créateur de pièces contemporaines, comme la Sonate pour violon seul de Murray Adaskin ((1906-2002) et le Double Concerto pour violon et violoncelle d’Omar Daniel (né en 1960), Il donne aussi la première exécution américaine de Synapse de Philippe Manoury. Avant de faire escale sur les bords du Léman, James Ehnes aura entrepris en août une grande tournée européenne avec le Toronto Symphony Orchestra et son chef Peter Ounjian. James Ehnes recherche toujours la plus parfaite osmose artistique avec les chefs, souvent des amis, avec lesquels il collabore. C’est le cas au disque avec Vladimir Ashkenazy, Gianandrea Noseda ou Kirill Karabits. Il y a tout lieu de penser qu’il en ira de même au concert du 11 septembre à Montreux, avec Charles Dutoit au pupitre. Yves Allaz JEUDI 11 SEPTEMBRE, 19h30, AUDITORIUM STRAVINSKI Royal Philharmonic Orchestra London Charles Dutoit, direction James Ehnes, violon Maurice Ravel - Valses nobles et sentimentales Camille Saint-Saëns - Concerto pour violon et orchestre n° 3 en si mineur op. 61 Béla Bartók - Le Mandarin merveilleux, suite d'orchestre op. 19 Maurice Ravel - Daphnis et Chloé, suite n° 2 James Ehnes © Benjamin Ealovega a c t u a l i t é s e p t e m b r e m u s i c a l Samedi 30 août : Russian National Orchestra (avec Mikhail Pletnev, direction et piano) Mercredi 3 septembre au Château de Chillon : Julien Quentin (avec Alexandra Conunova, violon et Lionel Cottet, violoncelle) a c t u a l i t é 55 Ce supplément a été réalisé par scènes magazine Découvrez chaque mois dans nos pages : L’actualité culturelle d’ici et d’ailleurs Cinéma Concerts Expositions Théâtre Danse Livres Opéra Avant-Premières Entretien Critiques Mémento LES OPÉRAS RIGOLETTO EUGÈNE ONÉGUINE LA GRANDE-DUCHESSE DE GÉROLSTEIN IPHIGÉNIE EN TAURIDE PORGY AND BESS MESSA DA REQUIEM MEDEA FIDELIO LES BALLETS Le prix de l’abonnement annuel de 10 numéros de 96 pages est de CHF 80.-Abonnement France (10 numéros) à 70 euros Renseignements et abonnements : Scènes Magazine - Case postale 48 - 1211 Genève 4 Tél. (022) 346.96.43 / de France +41 22 346.96.43 www.scenesmagazine.com e-mail : [email protected] CASSE-NOISETTE WATER STAINS ON THE WALL «SALUE POUR MOI LE MONDE !» LES RÉCITALS BRYN TERFEL PATRICIA PETIBON NATALIE DESSAY & LAURENT NAOURI MICHAEL VOLLE DIANA DAMRAU OPÉRA JEUNE PUBLIC LE PETIT PRINCE CONCERTS EXCEPTIONNELS I CAPULETI E I MONTECCHI ( E L Ī N A G A R A N Č A ) ANGELA GHEORGHIU SPECTACLES LES PROCÈS D'IPHIGÉNIE ET DE MÉDÉE MON OPÉRA MON AMOUR O P É R A S B A L L E T S C O N C E R T S R É C I TA L S & S P E C TA C L E S A B O N N E Z - V O U S !! SAISON1415 ' ''' *))('&%&$#"!& $!' ''##' ' %&! '&%##''' WWW.GENEVEOPERA.CH +41(0)22 322 5050 SAISON1415 w w w. g e n e v e o p e r a . c h f e s t i v a l s fribourg, du 5 au 13 juillet Musiques sacrées Bisannuel, le Festival International de Musiques Sacrées de Fribourg propose pour sa 15e édition un large éventail d’œuvres allant du Moyen Age à l’époque contemporaine, de provenances et de styles très divers, par des interprètes de haut rang, venus d’horizons les plus variés, du Maroc à l’Estonie. Avec ses douze concerts à l’Eglise du Collège Saint-Michel, édifice doté d’un superbe intérieur de style baroque, le festival fribourgeois, fidèle à sa vocation, offrira l’occasion d’entendre quelques-unes des meilleures formations européennes interpréter des chefsd’œuvre de la musique sacrée occidentale. Il permettra aussi la découverte de musiques issues des traditions corses, iraniennes et autres, dans une série de concerts donnés à l’enseigne de « Couleurs du monde » Soirées de prestige En soirée, à 20h30, se produiront des ensembles renommés, venus de toute l’Europe, comme la Cappella Mediterranea & Chœur de Chambre de Namur (sa 5), le Huelgas Ensemble (di 6), l’Akademie für Alte Musik Berlin (lu 7) et The Choir of Saint-Pauls Cathedral London (ma 8). Les deux soirées suivantes sont des plus originales. L’une permettra d’entendre des pages baroques d’Italie et d’Espagne destinées non pas au culte mais à la dévotion privée, chantées par la soprano Raquel Andueza, accompagnée au théorbe par Jesus Fernandez Baena (me 9). L’autre, à côté de pièces de la Renaissance et contemporaines d’Arvo Pärt et d’Henrik Odegaard, verra la création d’une œuvre commandée par le festival au compositeur fribourgeois René Oberson. Les interprètes en seront les six chanteurs norvégiens de Nordic Voices (je 10). Joel Rubin Ensemble - clarinette, accordéon et cymbalum - proposera des musiques inspirées des traditions juives et roms d’Europe de l’Est et des Balkans, et du jazz (me 9). Pino de Vittorio, accompagné d’un violoncelle et d’un clavecin, sera le porte-voix de dévotions napolitaines, des Pouilles et de Campanie au 17e siècle (je 10). Aïcha Redouane & Ensemble Al-Adwâr feront entendre des pages de la Nahda (19e-20e siècles), ainsi qu’une composition originale d’Aïcha Redouane et Habib Yammine sur des poèmes soufis de Râbi’a al-Adawiyya (721-801), (ve 11). L’Ensemble Constantinople & Barbara Furtuna associeront le raffinement de la tradition musicale et poétique persane à la, tantôt austère, tantôt festive, polyphonie corse (sa 12). Venu des Pays-Bas, Tetraktys - flûtes et ensemble – confronte fragments de messes laissés par Matteo da Perugia (15e s.), premier maître de chapelle du Dôme de Milan à des pages de Guillaume Dufay (ve 11). Provenant d’Estonie, Vox Clamantis interprétera le Kanon Pokajanen (Canon de la Repentance) Emboîtement Les sept concerts de « Couleurs du monde », à 17h30 ou 20h30, constituent une sorte de « festival dans le festival » voulu par les organisateurs. Le a c Nordic Voices d’Arvo Pärt, une œuvre mûrie pendant plusieurs années qui prend sa source dans la liturgie orthodoxe russe (sa 12). Enfin, le célèbre Gabrieli Consort & Players de Paul McCreesh mettra fin au festival, une fin qui s’annonce triomphale, avec trois Odes à Sainte-Cécile, patronne des musiciens : les deux Odes d’Henry Purcell, et celle de Benjamin Britten, qui fera magistralement écho aux précédentes (di 13 à 17h). En marge En marge du festival, notons encore l’atelier de chant grégorien, du 7 au 13 juillet, ainsi que le 12e concours de composition d’une œuvre pour instruments à vent, doté de CHF 10.000.- L’œuvre primée en 2013, Asteroid Belt du Japonais Takahiro Sakuma sera créée par des étudiants de la HEMU Vaud-ValaisFribourg lors d’un concert du dimanche 6 à 17 h. Au même programme: les Symphonies d’instruments à vent de Stravinski, et la Suite op.4 de Richard Strauss. Yves Allaz Rens. sur: www.fims-fribourg.ch Raquel Andueza © Michal Novak t u a l i t é 57 f e s t i v a l s d’âge, de culture et d’origine sociale différents, tant il est vrai que la culture a besoin de s’ancrer dans le réel pour s’épanouir et irradier. avignon, du 4 au 27 juillet 2014 68e édition Olivier Py, nouveau directeur du Festival d’Avignon et metteur en scène bien connu d’œuvres lyriques et théâtrales souvent contestées mais toujours passionnantes, dévoilait le 6 juin au Palais de l’Athénée le programme in du plus connu des festivals francophones de théâtre. Après avoir cité Napoléon s’adressant à un maréchal d’Empire : « Faites court et confus ! » et prétendu à la confusion à défaut de la concision, Olivier Py a au contraire détaillé un programme touffu avec humour et clarté, en orateur brillant et passionné. Nouveautés 58 D’emblée il a évoqué son rêve de faire du théâtre une expérience politique, en l’occurrence qu’Avignon soit une horloge de la conscience et qu’y circulent l’appétit de savoir et la joie d’être ensemble. La politique est dans la culture (et non l’inverse) et le spectateur est un individu engagé. Olivier Py revendique la force dialectique du théâtre, rappelant qu’un théâtre qui ne divise pas est un théâtre mort. Citant le fondateur du Festival Jean Vilar, « Ce que nous avons réussi au festival, c’est le public », son successeur attend que les expériences vécues par les spectateurs se prolongent en dehors des lieux théâtraux et suscitent enthousiasme, adhésion mais aussi critique et rejet. Le nouveau patron a ensuite confessé une passion « inavouable » pour la tarification, lui le littéraire que ne passionnent d’ordinaire pas les chiffres. Mais puisque le métissage social passe aussi par l’accès facilité à la culture, le festival innovera donc avec deux nouveautés : un abonnement « Grand spectateur » pour les fous de théâtre et un abonnement « Jeune ». Voici qui devrait faire converger vers Avignon un public Du côté des artistes, Olivier Py et son équipe souhaitent que le Festival soit éclairé par un regard neuf. Vingt-cinq artistes invités – chorégraphes, metteurs en scène, poètes – ne sont jamais venus dans la cité des papes et ont moins de trente-cinq ans. Enfin, le nouveau directeur a souligné que s’il est aisé d’aller puiser dans les répertoires théâtraux de l’est, il a tenté d’innover en offrant une plus large place au sud, avec un focus important sur le monde arabe, mais aussi de belles incursions du côté des productions grecque, égyptienne, sud-africaine et même japonaise. Programmation Trente-six spectacles du in tenteront de rendre compte de l’universalisme du Festival, loin de tout repli identitaire, affranchis de toute culture sectaire, nationaliste et communautaire. « Suivez mon regard », semblait dire Olivier Py à la suite des succès récents d’un parti nationaliste… Le Festival ouvrira dans La Cour d’honneur avec la tragédie du Prince de Hombourg de l’Allemand Heinrich Von Kleist, mis en scène par l’Italien Giorgio Barberio Corsetti et joué par des comédiens belges et français. Trois autres spectacles se joueront dans la Cour d’honneur : I Am, de l’artiste néo-zélandais Lemi Ponifasio, La Chaste vie de Jean Genet, long poème de Lydie Dattas lu par Guillaume Gallienne, avec l’Orchestre Régional Avignon Provence et enfin en clôture, Corps de Mots, corpus de textes de grands poètes chantés, joués et récités par Têtes Raides et Jeanne Moreau. Quant à Olivier Py, désormais maître des lieux, on le verra à l’œuvre dans trois mises en scène : Orlando ou l’Impatience, une comédie dont il est l’auteur, Vitrioli de Yannis Mavritsakis et La Jeune Fille, le Diable et le Moulin d’après les Frères Grimm. Laurence Tièche-Chavier Pour le programme détaillé, se référer au site du festival : www.festival-avignon.com «La Jeune Fille, le Diable et le Moulin» © Christophe Raynaud de Lage / festival d’Avignon a c t u a l i t é f e s t i v a l s festival Avignon par la danse Déjouant les catégories abstraites et narratives, le Festival d’Avignon met ici le corps en livrets pour interroger le chorus, là en témoignages d’une actualité conflictuelle troublée. De sa musicalité émotive en passant par ses révoltes et questionnements, l’anatomie embrasse nombre d’horizons. Le chorégraphe et danseur français Thomas Lebrun a souvent pris à bras-le-corps le réel, ses images, vertiges et vestiges. De Switch explorant le travestissement et le trouble identitaire à Trois décennies d’amour cerné. Ce dernier opus marquait par sa gravité retenue et ses gestes convulsifs. Ce, pour arpenter de manière transposée les effets de la pandémie de sida sur les corps vrir sur d’infinies répétitions de plusieurs sons ramenant à certaines musique javanaises. Lebrun envisage de mobiliser les textes des lieder « comme des livrets de ballet, travailler sur ses grands fondements : la pantomime, le livret, la narration, la technicité, une variation, un pas de deux ». Se refusant à opter pour la danse théâtralisée au détriment d’une abstraction plasticienne de la plus belle eau, l’artiste souhaite une entame expressive, illustrative. Elle sera peut-être en lointain écho à ses premiers pas en danse au sein d’une école du Nord de la France mettant l’accent sur une dimension expressionniste éloignée de tout académisme, dans la lignée d’une Jacqueline Robinson. Ensuite la pièce glissera, selon son auteur, vers l’espace du dedans ourlé de pudeur «At the Same ATime We Were Pointing...» © Shush Tenin et d’intériorité. en Afrique. Des supposés « groupes à risques » associés à l’homosexualité à la culture de la peur marquant un couple de danseurs se vouant l’abstinence, jusqu’à l’incertitude et l’immobilité d’une anatomie contrainte et contrariée. Huit danseurs sont au plateau simultanément pour sa dernière création en Avignon imaginée sur des lieder de Berg, Mahler, Schönberg et Schubert. Pour Alban Berg, le chorégraphe avance que certains lieder « sont très mélodieux, très doux, immédiatement inspirants alors que d’au-tres, beaucoup plus contemporains, peuvent paraître dissonants. » L’artiste n’oublie pas que chez le compositeur autrichien les plus extrêmes violences sonores gardent le souvenir du silence qui les as vues naître. Et que le lied se dessine dans un mouvement qui va parfois de l’amorphe à l’articulé pour retrouver l’amorphe avant d’ou- a c t u Corps en affrontement Issu des rangs de la renommée Batsheva Dance Company, Arkadi Zaides conçoit des univers d’une grande physicalité, dont la puissance se pose en mémoire des tensions qui traversent la société israélienne. Quiet fut ainsi une chorégraphie réunissant quatre danseurs performeurs juifs et arabes de l’État hébreu. Pour Avignon, il créée Archive sur des séquences tournées par des Palestiniens les confrontant à des éléments de Tsahal et à des colons. Ces images ont été permises par la collaboration avec un groupement israélien (B’Tselem) fondé en 1989 et souhaitant favoriser l’émergence et l’affirmation d’une culture des droits humains en Israël. Sur ces sources, l’artiste se métamorphose en archive vivante, dont la danse est un outil et matériau d’investigation critique de l’identité de son pays. Il en relè- a l i t ve une complexité, qui va souvent à rebrousseconcepts des idées reçues et visions médiatiques traditionnelles. Passeur d’une danse âpre, violente, ventrale, sachant distiller une tension râpeuse, agressive, de quasi rébellion, Zaides avance : « Mon corps change la façon dont ces images sont perçues, il permet d’opérer des focus, de placer les choses dans une nouvelle perspective. » On retrouve dans sa démarche quelque chose de l’univers du cinéaste et trublion israélien Avi Mograbi. Zaides a ainsi cette qualité de s'extraire du flux d’images matrices venues notamment des territoires palestiniens sur le plus long conflit de l’histoire des 20 et 21e siècles. Des enfants filmés jettent des pierres sur les Palestiniens ou les menacent. Pour le chorégraphe et danseur Arkadi Zaides : « Les enfants sont comme des réceptacles, des médias à travers lesquels on peut comprendre les adultes mais aussi plus largement ce qui arrive à une société. » Le corps impensé La chorégraphe sud-africaine Robyn Orlin est devenue depuis la fin des années 90 une sorte de classique déjanté en danse contemporaine. Guerrière et ludique, Orlin est passée experte en détournements de codes culturels et chorégraphiques. Elle met en crise nombre de représentations traditionnelles à travers des œuvres joyeusement kitsch et camp, un style esthétique et culturel lié au mauvais goût, mais teinté d'ironie. Ses œuvres ont souvent pour dessein de mettre en exergue les nombreux travers et injustices de la société post-apartheid toujours profondément inégalitaire. Ses approches de sujets délicats et controversés (sida et canons de beauté en Afrique, grands mythes des ballets de la culture occidentale blanche, dont Faust) fuient une vision monolithique pour faire place à un humour, parfois malaisant, au service de la justice et de l’humaine dignité. Sa dernière création en date au titre toujours fort étendu s’interroge sur les attitudes, comportements et propos sur le corps en Afrique. Littéralement, l’intitulé signifie : « Au moment où nous pointions un doigt vers toi, nous nous apercevions que nous en pointions trois vers nous-mêmes… » Pour la chorégraphe blanche « nous avons accepté des représentations du corps africain avant tout souffrant et victime. Or, la malnutrition, les violences existent ailleurs dans le monde. Nous devons nous réapproprier le discours et les représentations. » Bertrand Tappolet Festival d’Avignon. Jusqu’au 27 juillet. Rens. : www.festival-avignon.com é 59 f e s t i v a l s victoria hall et cour de l’hôtel-de-ville cet été Musiques en été La Cour de l’Hôtel-de-Ville, lieu particulièrement chéri des Genevois, sera cette année à nouveau le théâtre d’une série d’événements musicaux, sur lesquels Jacques Ménétrey, Conseiller culturel au Département de la culture, attire notre attention. 60 C’est au Victoria Hall cependant que sera donné le coup d’envoi des concerts classiques, avec un chef exceptionnel dont la notoriété demande un lieu moins confidentiel. Jacques Ménétrey croise les doigts pour qu’aucun ennui de santé n’empêche Seiji Ozawa de venir en personne ouvrir les feux le 28 juin. Longtemps souffrant le maestro n’est plus apparu en Europe depuis 2011. Il dirigera le Divertimento pour orchestre à cordes de Bela Bartok et le Largo du concerto en ré mineur pour deux violons de Bach, avec deux musiciennes qui ont participé à toutes les sessions de la Seiji Osawa International Academy Switzerland depuis sa création, Agata Szymcewska et Alexandra Soumm. L’orchestre est constitué par les élèves et professeurs de l’Académie. Au cours de la soirée, on entendra également cinq mouvements de différents quatuors, joués aussi par les étudiants de l’Académie. Cette dernière fête ses 10 ans d’existence ; elle a pour but de compléter la formation des jeunes musiciens par la pratique de la musique de chambre et surtout du quatuor. Le 29 juin l’Orchestre de la Suisse romande sous la direction de Kazuki Yamada peaufine- Kotaro Fukuma a ra son interprétation de Pacific 231 (Honegger) et Shéhérazade (Rimski-Korsakov) avant la tournée au Japon, dont le départ est prévu le lendemain ! Le brillant violoniste Daishin Kashimoto sera le soliste du concerto de Tchaïkovski. Rappelons qu’en 2014 la Suisse et le Japon célèbrent 150 ans de relations diplomatiques. Du 8 au 12 juillet à 20h45 dans la Cour de l’Hôtel-de-Ville, un opéra bouffe peu connu de Domenico Cimarosa, I due Baroni di Rocca Azzurra, avec L’OCG sous la direction de Franco Trinca et dans une mise en scène de Francesco Bellotto nous promet de joyeuses soirées estivales. Kotaro Fukuma, virtuose impressionnant mais aussi interprète sensible, fera plus que jouer dans la Cour le 15 juillet: il s’investira à deux cents pour cent dans les Tableaux d’une exposition (Moussorgski), la Fantaisie-Impromptu de Chopin et Musica Nara de Minako Tokuyama. Le Quatuor Hermès, qui a remporté en 2011 le premier prix du Concours de Genève, continue à intéresser les responsables de la culture de la ville qui a su favoriser ses débuts. C’est pourquoi il a été invité à revenir le 17 juillet avec un programme français, Debussy, Ravel, Dutilleux. Le pianiste autrichien Markus Schirmer, que Jacques Ménétrey recommande particulièrement, interprétera le 22 juillet trois sonates de Beethoven, La Pastorale, La Tempête et La Chasse, avec l’intelligence et l’énergie qu’on lui connaît. C’est un musicien qui s’adonne aussi volontiers à l’improvisation et recherche des expériences nouvelles c t u a avec des interprètes du monde entier. Grâce aux Dominos, la musique baroque n’est pas oubliée. Cet ensemble à géométrie variable, qui excelle dans le répertoire de l’Europe des Lumières, présentera le 24 juillet un programme dédié à Bach, en formation de trio, avec en alternance comme soliste le traverso de Serge Saitta et le violon de Florence Malgoire, et à Rameau, confié au claveciniste Paolo Zanzou pour l’intégrale des Pièces de clavecin en concert. Le 29 juillet, place au pianiste suisse Gilles Vonsattel, vainqueur entre autres du Concours de Genève en 2006 et détenteur d’un diplôme en sciences politiques et économiques de l’université de Columbia. Le choix de son programme est Le Quatuor Hermès signe de son éclectisme : Beethoven, Ravel, Honegger, Janacek et Holliger. Il y en aura donc pour tous les goûts ! Le meilleur quatuor espagnol, selon Jacques Ménétrey, le Cuarteto Casals, se produira le 31. Une sonorité unique à découvrir dans des œuvres de Mozart, Brahms et Ligeti. Ils sont loin d’être des débutants : derrière eux, dix-sept ans de carrière déjà et une abondante discographie. Une voix sera la bienvenue le 7 août, celle de la jeune et belle mezzo-soprano Clémentine Margaine, accompagnée par son compatriote français Emmanuel Christien au piano. Révélation lyrique de l’année aux victoires de la musique classique en 2011, elle est certainement à l’orée d’une grande carrière internationale. Avant que ses cachets n’atteignent des sommets, allez vite l’entendre dans un florilège de mélodies françaises et espagnoles, auxquelles son timbre chaleureux et sa musicalité ne manqueront pas de donner une saveur émouvante et personnelle. Les Vents français, en formation de quatuor, rejoints par le pianiste Eric Le Sage, offriront aux amateurs deux quintettes pour vents et l i t é f e s t i v a l s piano, l’un de Mozart, l’autre de Beethoven, ainsi que des pièces de Mikhail Glinka et Georges Auric. C’est l’occasion d’entendre, le 12 août, ce répertoire servi par la fine fleur des instrumentistes à vent français. L’originalité de la soirée du 14 août ne peut que séduire : Les Quatre Saisons de Vivaldi et Cuatro Estaciones Portenas d’Astor Piazzola seront confrontées : après le Printemps de Vivaldi, celui de Piazzola et ainsi de suite. L’idée vient de l’ensemble Les Dissonances, orchestre de chambre sans chef créé en 2003 par le violoniste David Grimal. L’ennui n’est pas au programme. Il nous reste à annoncer la grande première du 4 août. C’était le désir du chef du Département de la Culture et du Sport Sami Kanaan d’offrir à partir de cette année un concert classique gratuit sur la scène Ella Fitzgerald du Parc de la Grange. L’OCG sous la baguette d’Arie van Beek, des œuvres populaires de Mozart, Bizet et Haendel, de même que des pièces mettant en avant les solistes de l’orchestre. Concert gratuit donc, vous êtes tous invités ! Il est temps de s’adresser aux amoureux du JAZZ Ils auront aussi quelques raisons de se rendre à la Cour de l’Hôtel-de-ville ! Le 7 juillet d’abord, pour retrouver le Riverside Quartet, les magnifiques Dave Douglas (trompette) et Steve Swallow (basse), ancien compagnon de route de Jimmy Giuffre, et Chet et Jim Doxas, saxophoniste et batteur. La lauréate de la prestigieuse Thelonius Monk Jazz Vocals Competition 2010, Cécile Mclorin Salvant est déjà considérée comme une digne héritière des trois grandes dames du jazz : Billie Holiday, Sarah Vaughan et Ella Fitzgerald. Les spécialistes pourront venir s’en assurer le 14 juillet. Le trio américain The Bad Plus se distingue par sa recherche d’innovation dans le domaine du son généré par leurs instruments : le piano, la contrebasse et la batterie. Ils ont même adapté à leur trio, avec des ajouts électroacoustiques, le Sacre du Printemps de Stravinsky ! Ils aiment aussi reprendre des chansons et autres morceaux populaires. (21 juillet) « L’un des plus grands musiciens de l’histoire du jazz » (New York Times), le saxophoniste Joe Lovano est annoncé le 28 juillet. Depuis trente ans il se produit avec les meilleurs jazzmen et pour l’occasion il sera entouré par Salvatore Bonafede (piano), Lars Danielsson (contrebasse) et Jukkis Uotil (batterie) On nous promet un concert « décoiffant et endiablé » le 4 août, date à laquelle le trio B.F.G. (Bex, Ferris, Goubert) fera son apparition sur scène. Un déchaînement d’orgue, de trombone et de batterie à ne pas manquer. Pour le dernier concert jazz dans la vieille ville, le fameux guitariste Peter Bernstein accompagné par Doug Weiss à la contrebasse et Bill Stewart à la batterie (11 août) Martine Duruz Plus d’informations sur : http://www.ville-ge.ch/culture/musiques/ 61 Entretien : Clémentine Margaine Après avoir remporté de multiples prix et distinctions internationales, la mezzo-soprano Clémentine Margaine explose littéralement sur les plus grandes scènes lyriques mondiales. Elle laisse toutefois, dans son agenda occupé, une place au concert et au récital. C’est ainsi qu’elle sera pour un récital à Genève le 7 août. Elle évoque sa toute jeune et florissante carrière depuis Rome, entre deux répétitions, où elle incarne à l’Opéra de ville éternelle le rôle-titre de Carmen. Vous avez été d’une certaine manière soutenue, sinon lancée, par le Festival de Beaune. Pouvez-vous en dire quelques mots ? Ils m’ont invité à plusieurs reprises, notamment pour Hippolyte et Aricie de Rameau, le rôle de Phèdre, sous la direction de Raphaël Pichon. Et j’ai également chanté Orphée et Eurydice de Gluck, en italien. La rencontre avec Beaune s’est faite tout naturellement. J’avais déjà un bon début de carrière en France, j’avais remporté un prix au Concours Reine Élisabeth entre autres… Toute cette réputation a joué pour qu’Anne Blanchard, directrice de Beaune, ait fait appel à moi et, je pense, m’apprécie. J’y e n t r Toujours dans le genre espagnol, vous faites Carmen, que vous chantiez à Rome en juin. C’est un peu votre rôle fétiche. Où allez-vous encore le porter ? Clémentine Margaine reviens du reste cette année, pour chanter dans Castor et Pollux, de Rameau toujours. Le rôle de Phébé, que je reprends à Montpellier. Et vous venez à Genève pour un récital, le 7 août prochain. Pouvez-vous nous en dire plus ? Ce sera un récital de mélodies françaises et espagnoles. Il y aura Shéhérazade de Ravel, des mélodies de Fauré, de Saint-Saëns, mais aussi de Montsalvatge, de Granados et d’autres pages espagnoles. Je serai accompagnée au piano par Emmanuel Christien. Le programme de ce récital n’est cependant pas encore fermement scellé à l’heure où je vous parle. Mais je vous ai donné les grandes lignes, et les pièces qui sont sûres. e t i e Je l’ai chanté au Deutsche Oper de Berlin, où j’étais en troupe pendant deux ans, puis à Dallas. Et je prévois l’année prochaine à Munich ; et dans les années suivantes, j’y ferai mes débuts avec ce rôle au Met de New York et à l’Opéra de Paris, la Bastille. A l’Opéra de Rome (le présent entretien est par téléphone, depuis Rome), la mise en scène était d’Emilio Sagi. Qui a beaucoup de talent. Vous avez une carrière des plus internationales. Où vivez-vous ? Je suis française, mais je réside à Berlin. Ce qui est une bonne tête de pont pour voyager dans toute la planète lyrique. Propos recueillis par Pierre-René Serna Le 7 août, Clémentine Margaine sera en récital avec le pianiste Emmanuel Christien n f e s t i v a l s festival international de piano La Roque d’Anthéron Fidèle à sa tradition d’éveilleur pour un public amoureux de musique, de poésie, de littérature pianistique en tout genre, René Martin présente à nouveau un festival foisonnant quant à la forme,(baroque, classique, contemporain, jazz), aux lieux, aux interprètes dans toute leur diversité. 62 Riche périple musical de plus de 70 concerts: piano, clavecin, orgue, orchestre, jazz. Pour le jazz, 5 concerts (concert au Parc avec Yaron Herman et ses amis, le 21 juillet) et le 11 août une Nuit de Jazz avec le Big Phat Band. Deux autres Nuits, l’une avec Abdel Rahman El Bacha (Bach, Chopin, Rachmaninov), le 22 juillet, et une autre avec Mikhaïl Platnev (programme à préciser pour la première partie, sinon Schubert et Mozart), le 5 août. A part les Nuits, d’autres grands moments musicaux, tous les soirs au Parc Florans et parallèlement sur 12 scènes différentes! Soit à l’Etang des Aulnes, à l’Abbaye de Silvacane, au Temple de Lourmarin, à l’Eglise de Cucuron, au Musée Granet, à Aixen-Provence, à Château-Bas Mimet, au Théâtre des Terrasses, à Gordes, à l’Eglise Notre-Dame de l’Assomption et Parvis, à Lambesc, à l’Eglise Saint-Jean de Malte, à Aix. La plus grande de ces scènes reste évidemment le Parc Florans ave sa conque acoustique, ses nouveaux gradins depuis 2010, plus confortables, plus spacieux! Et son charme naturel grâce à ses 365 platanes, sa bande herbeuse, où l’on peut pique-niquer avant les concerts ou pendant les longs intervalles entre les concerts Invités et résidents Le Musée imaginaire des musiciens au Musée Granet à Aix-en-Provence propose 3 rencontres thématiques qui explorent les relations entre musique et peinture. La musique baroque et ancienne sera représentée notam- du soir, si on n’a pas choisi la formule plateau repas à 16 euros! (à réserver d’avance). Les “stars“ Comme chaque été seront présents les pianistes majeurs de la scène internationale, grands fidèles de La Roque: Christian Zacharias, Boris Berezovsky, Nikolaï Lugansky, Grigory Sokolov, Marc-André Hamelin, Nelson Freire, Nicholas Angelich… Ekaterina Derzhavina © Marion Koell Leif Ove Andsnes © Ozgur Albayrak Les grands représentants du piano français, au talent prisé dans le monde entier, s’associent à cette 34e édition : JeanClaude Pennetier, Anne Queffélec, Claire Désert, Florent Boffard, Emmanuel Strosser, Abdel Rahman El Bacha, Jean-François Heisser… Pas moins de 9 orchestres sont invités, dont l’Orchestre de Chambre de Bâle avec Christian Zacharias au piano et à la direction. La musique de chambre sera aussi à l’honneur avec le trio Wanderer; Renaud Capuçon et Nicholas Angelich; Jean-Frédéric Claire-Marie Le Guay © Carole Bellaiche a Neuburger avec Augustin Dumay et le Quatuor Modigliani, mais aussi avec Bertrand Chamayou et l’Ensemble adONF. c t u a ment par Kenneth Weiss, Maude Gratton, Philippe Pierlot et le Ricercar Consort… Parmi la longue liste des interprètes invités cette année se retrouvent également l’Ensemble vocal de Lausanne avec Michel Corboz, Adam Laloum, Luis-Fernando Pérez et Momo Kodoma, Daniil Trifonov, le Chœur de Chambre Accentus… Quant aux Ensembles en résidence, ils auront lieu du 8 au 14 août et comme chaque fois le public pourra assister gratuitement aux masterclasses dans le Parc du Château de Florans, puis les jeunes talents ainsi formés proposeront des concerts gratuits au cœur de 13 villes et villages sur la route de la Durance aux Alpilles et le 15 août ils reviendront à La Roque d’Anthéron jouer en divers endroits de la petite ville et le soir régaler les estivants dans le Parc du Château de Florans avec un magnifique programme, accompagnés de leurs professeurs et ce dans une atmosphère des plus festives! Maya Schautz Festival de Piano-Parc du Château de Florans Tél. 00334 42 50 51 15 / www.festival-piano.com De La Roque d’Anthéron. Du 18 juillet au 17 août 2014 l i t é f e s t i v a l s pesaro Rossini Opera Festival Depuis 1980 l’année de sa création, le ROF aura été l’un des acteurs majeurs de la « Rossini Renaissance », défendue par les meilleurs chanteurs au monde… de génération en génération ! Pour sa 35ème édition en 2104, c’est l’un des tout derniers titres encore inédit qu’on pourra entendre dans la cité adriatique : Aureliano in Palmira. C’est cette année l’opéra seria de la période napolitaine Armida qui tient le haut de l’affiche, défendue entre autres par Carmen Romeu, Dmitry Korchak, Antonino Siragusa, dirigés par Carlo Rizzi. Plus de 20 ans après sa première mise en scène à Pesaro (avec Renée Fleming dans le rôle-titre), Luca Ronconi remet l’ouvrage sur le métier, et nous espérons pour sa « nuova produzione » plus de succès – et moins de sifflets ! – qu’en 1993. série des 4 représentations, avec l’Américain Michael Spyres dans le rôle-titre, entouré de Jessica Pratt (Zenobia), Lena Belkina (Arsace). Vient ensuite le classique Barbiere di Siviglia, dans une réalisation visuelle à la charge de l’Accademia di Belle Arti de la ville voisine Urbino, sous la baguette de Giacomo Sagripanti. Le baryton français Florian Sempey est distribué dans le rôle-titre, aux côtés de Chiara Amarù (Rosina), Juan Francisco Gatell (Almaviva), Paolo Bordogna (Bartolo), Alex Esposito (Basilio). Un concert de Duetti amorosi entre Carmen Romeu et Lena Belkina est programmé (le 17 août), ainsi qu’un récital du ténor Juan Francisco Gatell (le 18 août). Jamais encore donné au ROF, c’est donc Aureliano in Palmira qui devrait créer l’événement au Teatro Rossini, confié aux chef Will Crutchfield et metteur en scène Mario Martone. C’est l’option « ténor » qui a été retenue pour la Autre opéra comme il est de tradition depuis des années, Il Viaggio a Reims pour 2 représentations dans la production d’Emilio Sagi, qui permet de mettre le pied à l’étrier aux élèves de l’Accademia Rossiniana, suivis de près par le maestro Alberto Zedda. c t u Petite Messe Solennelle est enfin prévue la veille de clôture du festival (le 21 août), sous la direction d’Alberto Zedda, dans sa version avec orchestre. François Jestin Plus d’informations sur : http://www.rossinioperafestival.it/ Mais c’est certainement le concert du 20 août, avec l’alto – déjà mythique à Pesaro… et ailleurs ! – Ewa Podles, qui devrait amener un degré d’excitation supplémentaire. Une Florian Sempey © Jean-Pierre Ronnay a Jessica Pratt Juan Francisco Gatell © Fidelio Artist, JoanTOMÀS a l i t é 63 f e s t i v a l s Festival Berlioz 64 Année après année, le Festival Berlioz poursuit son bonhomme de chemin. À la Côte-Saint-André, le bourg natal du compositeur, entre Lyon et Grenoble, à une soixantaine de kilomètres au sud de Genève. Thème de cette édition 2014 : « Berlioz en Amérique, au temps des révolutions industrielles ». Du 21 au 31 août. Berlioz, ce grand voyageur, n’a jamais mis les pieds en Amérique ! Mais il a bien failli faire le voyage (lointain pour l’époque), et ne cessa d’en rêver. C’est un peu ce rêve que tentent de concrétiser cette édition du festival et son entreprenant directeur, Bruno Messina. Une édition éclectique, qui ne laisse cependant qu’une portion réduite aux compositions du musicien natif du lieu, en cela fidèle à la marque de la manifestation : un répertoire tous azimuts, plutôt XIXe siècle, où Berlioz reste en filigrane mais en bonne place. L’ouverture du festival, le jeudi 21 août, revient ainsi à la reconstitution du concert que Berlioz avait dirigé en 1844 au Palais de l’Industrie à Paris : un concert exceptionnel, même chez ce chef d’orchestre, qui réunit des effectifs instrumentaux et choraux imposants, avec des pages de Meyerbeer, Rossini, Gluck, Spontini, Weber, Halévy, Beethoven, Mendelssohn et Berlioz. Il prend place dans l’Usine historique de Saint-Siméon-deBressieux, à deux pas de la Côte, une usine en pisé du XIXe siècle, avec l’Orchestre de Mulhouse et celui de Savoie, des chœurs régionaux, sous la direction de Nicolas Chalvin. À la fin du concert, une montgolfière, également du XIXe siècle, s’élèvera avec le chef à bord ! Et le soir, s’ouvre un bal, comme à l’époque. Le lendemain, dans l’auditorium provisoire sis dans la cour du Château de la Côte-Saint-André (et lieu du festival), est recréé l’opéra Christophe Colomb de Félicien David, compositeur ami de Berlioz. Par l’Orchestre les Siècles, sous la direction de François-Xavier Roth. Le surlendemain, vient la Symphonie du Nouveau Monde de Dvorak, Prométhée de Liszt, ainsi que le Concerto pour piano de MacDowell, compositeur américain élève de Liszt, par l’Orchestre de Lyon sous la direction de Joana Carneiro. Le dimanche qui suit rend hommage à Olivier Messiaen, avec Des Canyons aux étoiles, par l’Orchestre Poitou-Charentes dirigé par Jean-François Heisser. Le lundi, soirée ciné-concert : le Mécano de la Générale de Buster Keaton, avec une création musicale spécifique de François Narboni, par l’European Contemporary Orchestra. Le mardi, place à la Symphonie fantastique, donnée chaque année, cette fois-ci par l’Orchestre des Jeunes de Sao Paolo (dont certains issus Kate Lindsay des favelas), dirigé par Claudio Cruz, avec aussi des musiques brésiliennes, dont VillaLobos. Mercredi : le Concerto en Sol de Ravel, avec Roger Muraro, la Sérénade de Bernstein, avec Renaud Capuçon, le Bœuf sur le toit de Darius Milhaud et Quiet City de Copland, par l’Orchestre des Pays de Savoie toujours dirigé par Chalvin. Jeudi, retour au XIXe siècle : les Créatures de Prométhée de Beethoven, la Symphonie italienne de Mendelssohn et les Nuits d’été, chantées par Kate Lindsey, avec le Cercle de l’Harmonie de Jérémie Rhorer. Vendredi, l’Orchestre de Lyon avec Leonard Slatkin, pour un clin d’œil à Roméo et Juliette : Prokofiev, Tchaïkovski, les Love Theme de Nino Rota et la Suite de West Side Story de Bernstein. Roméo revient le lendemain, mais de Berlioz, avec les extraits de sa symphonie, par le London Symphony Orchestra dirigé par Gardiner – grande première au fes- a c t tival ! S’ajoutent Mer calme et Heureux Voyage de Mendelssohn et le Concerto pour violoncelle de Schumann, par Gautier Capuçon (les frères Capuçon, originaires de la région, sont ici comme chez eux). Et le festival se termine, le dimanche 31, avec le Jeune Orchestre Hector-Berlioz, émanation de ce festival et un de ses meilleurs acquis (avec des jeunes instrumentistes venus de toute l’Europe, et cette année même des Brésiliens), dirigé par Roth, pour la Damnation de Faust avec une belle équipe de chanteurs : Anna Caterina Antonacci, Michael Spyres et Nicolas Courjal. Pour clore par un grand retour à Berlioz et en beauté. Pierre-René Serna Du 21 au 31 août / Inf. : www.festivalberlioz.com Festival de Saint-Céré Loin des foules de vacanciers pressés, le Festival de Saint-Céré offre à ses spectateurs une pause de calme bienvenue dans le stress de l'été. Fondée en 1981 déjà, la manifestation est dirigée par Olivier Desbordes, qui assure les trois mises en scène lyrique de cette saison estivale. Avec ses moyens somme toute modestes, ce Festival entend donner leurs chances à des artistes jeunes entourés de grandes pointures du chant et de la pratique instrumentale. Pour reprendre les mots de M. Desbordes : « Le festival de Saint-Céré est depuis plusieurs décennies un laboratoire de jeunes talents lyriques, il a découvert et permis à de nombreux jeunes chanteurs de faire leurs premiers pas. Cette prochaine saison poursuit cette tradition, et évolue encore. Olivier Desbordes [L'édition 2014] mixe les genres : Comédie Musicale, Opéra et Opéra Comique se côtoient. Notre fabrique de spectacles accueillera de nouveaux artistes comédiens / chanteurs et chanteurs / comédiens. La joie de créer se nourrit de nouvelles curiosités ! Quel festival va confronter Cabaret, chef-d’œuvre de la comédie musicale, avec Lucia di Lammermoor, célèbre opéra tragique de Donizetti, avec un Voyage dans la Lune du loufoque d'Offenbach, un Requiem de Mozart jumelé avec une œuvre du Chevalier de St-Georges (musicien « nègre »), des chansons des tranchées, du Péguy et du Jaurès dreyfusard ? Ragaillardis par une équipe d’artistes du Jazz au Classique, de l’Opéra à la Chanson, le Festival de Saint-Céré et son équipe respirent l’air du temps, et résistant aux effets de mode, pressentent l’alchimie qui s’établit entre les propositions artistiques, les lieux magiques et le public. Ainsi cette curiosité fabrique la tolérance, génère de la joie et positionne la création artistique comme un outil indispensable de la vie sociale. » Au programme, cette année, en plus des ouvrages précités, on trouve des soirées de piano romantique avec Dina Bensaid, une soirée où un quatuor à cordes formés des instrumentistes de l'Orchestre du Festival joueront Dvorak et Chostakovitch, une soirée de chansons de troupiers de la Première Guerre Mondiale - centenaire oblige ! -, un concert Mozart où seront exécutés deux de ses concertos pour piano, une soirée où seront interprétées des Canciones de Federico Garcia Lorca arrangées pour instruments à cordes et une soirée théâtrale mettant en présence ces deux géants que furent Jaurès et Péguy... u a l i t é f e s t i v a l s On ne peut qu'inciter les amateurs de musique curieux de satisfaire leur passion dans un cadre enchanteur à programmer un voyage dans cette région lors du prochain mois d'août... Éric Pousaz Représentations tous les soirs du 29 juillet au 16 août. Renseignements, programmes et réservations: http://festival-saint-cere.com/ Les Rencontres Musicales d’Evian Les Rencontres Musicales d’Evian, dont l’origine date de 1976, avaient pris fin en 2000, remplacées partiellement par les Escales Musicales, trois journées à la Pentecôte. Leur retour est annoncé : quinze concerts, des masterclasses, des conférences, qui se dérouleront pour la plupart dans la magnifique Grange au Lac, entièrement constituée de bois de pin et de cèdre rouge, qu’Antoine Riboud, PDG de Danone, avait fait construire en 1993 pour le plus grand plaisir de Mstistlav Rostropovitch, alors Directeur du Festival. Lieu de rêve situé au milieu des mélèzes à proximité immédiate des Hôtels Royal et Ermitage, il bénéficie d’une acoustique exceptionnelle. Plusieurs évènements sont également prévus au Théâtre du Casino. Le Quatuor Modigliani est chargé de la direction artistique : inspiré probablement par l’exemple d’autres festivals tels que Verbier, il souligne son intention « de rassembler à l’occasion d’un évènement des musiciens chambristes ou solistes pour former des ensembles ad hoc et festifs autour de la musique de chambre sous toutes ses formes. » D’autre part des formations constituées de longue date seront aussi présentes, comme le Quatuor Borodine ou la Kremerata Baltica. Les jeunes talents auront aussi leur chance de s’exprimer, de même que les « grands », le pianiste Grigory Sokolov et le violoniste Gidon Kremer. Schubert sera mis à l’honneur à chaque concert de cet été, car selon le Quatuor Modigliani, « Qui mieux que cet immense compositeur serait à même de provoquer la rencontre, le partage et les émotions ? » Le Quatuor Modigliani avec la complicité de la violoncelliste MarieElisabeth Hecker, dernière lauréate du concours Rostropovitch du vivant du maître, ouvrira les feux le 8 juillet avec deux quatuors de Haydn et le quintette à deux violoncelles de Schubert. Le 9, Chostakovitch, Borodine et La Jeune fille et la mort de Schubert par le Quatuor Borodine. Les membres fondateurs de cette formation en 1944 étaient Nina et Rudolf Barshaï, Rostislav Dubinsky et le violoncelliste Valentin Berlinsky à qui Rostropovitch avait laissé sa place quelques semaines après la création du quatuor. Les membres actuels sont Ruben Aharonian (depuis 1996) Sergueï Lomovsky (depuis 2011), Igor Naidin (1996) et Vladimir Balshin (depuis 2007). Unique occasion le 11 juillet à 11h au Théâtre du Casino d’entendre une voix féminine, celle de la soprano Julie Fuchs, qui interprétera Auf dem Strom et Hirt auf dem Felsen de Schubert. Schumann complètera le programme. A 16h Renaud Capuçon, Gérard Caussé et le jeune violoncelliste surdoué Edgar Moreau se feront apprécier dans Mozart et Schubert, et le soir à 20h la Grange accueillera Edgar Moreau © Aline Paley Grigory Sokolov, l’un des a c t u a l plus grands pianistes actuels, dans Chopin (et peut-être un bis de Schubert ?) Le 12 juillet à 15h à la Grange, l’Orchestre de Savoie sous la direction de Nicolas Chalvin jouera la Symphonie No5 de Schubert après avoir accompagné le violoncelle de Daniel Müller-Schott dans le Concerto No1 de Haydn. Puis, à 19h, le Quatuor Modigliani et ses amis se retrouveront pour taquiner La Truite de Schubert, entre autres. Le 13, signalons Le Voyage d’hiver par Christoph Prégardien et Michael Gees (16h à la Grange). Le lendemain, dernier jour à 16h, Gidon Kremer et sa Kremerata Baltica ont choisi d’interpréter Schubert surtout, mais aussi Desyatnikov et Piazzola. Pour mettre un point final au Festival, les deux pianistes Jean-Frederic Neuburger et Francesco Tristano improviseront entre classique et jazz au bord du lac à 20h. avant les feux d’artifice (concert gratuit) Martine Duruz Du 8 au 14 juillet 2014 / Inf. : http://www.rencontres-musicales-evian.fr/ A La Chaise-Dieu cet été On revient toujours dans l’abbatiale, au milieu des bois et des monts d’Auvergne. La petite ville de La Chaise-Dieu, avec son abbatiale du XIVe siècle, paraît toujours située en-dehors du temps, et c’est ce qui en fait le prix. Pourtant, une vaste campagne de travaux est en cours depuis plusieurs années, qui a permis par exemple la construction d’un très harmonieux auditorium. Et un nouveau directeur, Julien Caron, âgé de vingt-sept ans, a pris les rênes du festival il y a deux ans et signe cet été la première édition dont il est vraiment l’auteur. Le festival en est à sa quarante-huitième édition. Qu’on ne s’attende pas à des bouleversements mais, pas à pas, à des réformes qui vont peu à peu modifier sa silhouette. Trois parcours, ainsi, permettront d’aller à la rencontre de trois compositeurs qui sont au cœur de la programmation de cet été : C.P.E. Bach, l’un des fils du grand Johann Sebastian ; George Onslow, qui fut surnommé « le Beethoven français » mais qui a peut-être plus à voir avec Mendelssohn (comme nous le montreront l’Orchestre Anima Eterna et l’Orchestre de Lorraine), et qui vécut en Auvergne ; et Rameau, qui fut organiste à ClermontFerrand et composa les opéras que l’on sait. Deux grandes journées par ailleurs, les 21 et 28 août, seront consacrées au piano avec le récital de deux grands solistes dans l’abbatiale (Michel Dalberto et Philippe Cassard) qui parraineront chacun un jeune soliste, les deux journées s’achevant par un concer- Adam Laloum © Carole Bellaiche Mirare to pour piano (joué par Adam Laloum et Khatia Buniatishvili). La musique a capella avec l’Ensemble Chanticleer, le lied avec Stéphane Degout, la musique sacrée avec l’ensemble Akadémia, le King’s Consort, le Palais royal, le Jardin des délices et l’Orchestre des Champs-Élysées, sans oublier une séance de ciné-concert accompagnée au piano, entre autres rendez-vous, sont à l’affiche d’une édition qui vient célébrer aussi les vingt ans de la disparition de Georges Cziffra, qui le premier eut l’idée de faire sonner son instrument sous les voûtes de l’abbatiale. Christian Wasselin Festival de La Chaise-Dieu, du 20 au 31 août (04 71 00 01 16, www.chaise-dieu.com). i t é 65 Les 15e Rencontres Musicales de Champéry 66 Le violoniste Maxim Vengerov, le quatuor Sine Nomine et le compositeur Pierre Mariétan seront les grands animateurs de ces Rencontres. Vengerov et le Sine Nomine y tiendront des master-classes, complétées par un un concert final des jeunes musiciens ayant participé aux cours, ceux de l’International Menuhin Music Academy pour l’un (sa 2 et lu 4), ceux de l’Orchestre des Jeunes de la Suisse Romande pour l’autre (di 17). Pierre Mariétan, de retour au Val d’Illiez qui l’a vu naître, présentera ses œuvres, en compagnie de l’Ensemble Mondrian, lors d’un concert enregistré par Espace 2 (sa 16). Les Rencontres champérolaines font aussi la part belle à de brillants artistes valaisans, la pianiste Béatrice Berrut, la violoncelliste Estelle Revaz, le corniste Olivier Darbellay ou encore le groupe TRIOPS avec Karine Barman, flûtiste et chanteuse. La pianiste aura pour partenaires Francesco De Angelis au violon et Camille Thomas au violoncelle, au sein du trio Saint Exupéry (me 6). La violoncelliste jouera en duo avec la pianiste Irina Chkourindina (di 10), le corniste, avec Noelle-Anne Darbellay au violon et Michael Wendeberg au piano (ma 12). Le Sine Nomine sera en concert le jeudi 12 à 19h30. Tous les concerts ont lieu au Temple du village. Y. A. Du 2 au 17 août 2014 / [email protected] Béatrice Berrut Festival de musique des Haudères En ouverture de cette 13e édition du festival, au cœur du val d’Hérens, Romain Mayor et le Chœur Post-Scriptum proposeront un Motet de Bach, une Messa a 4 voci de Monteverdi et la Messe pour double chœur de Frank Martin (ve 1er août). Suivront neuf concerts, tous donnés à la chapelle du village. Les Hongrois Kristof Barati, violon et Gabor Farkas, piano, joueront en duo (sa 2), tout comme la soprano Sophie Graf et le pianiste Christian Chamorel (di 3), ou encore le vio- a loncelliste hongrois Istvan Vardai et le pianiste français Julien Quentin (ma 5), tandis que la pianiste Béatrice Berrut consacrera son récital à Bach, Brahms et aux Etudes baroques de Thierry Escaich. Une carte blanche est offerte à l’Académie de musique Tibor Varga (ma 5 à 17h), avant la soirée de musique ancienne du Concert Brisé (ma 5). Le retour de la Cappella Mediterranea de Leonardo Garcia Alarcon fait figure d’événement (je 7). Pour les deux dernières soirées du festival, le quatuor Terpsycordes s’entourera de partenaires de prédilection, la corniste Zara Glokar, le pianiste Jonathan Aner pour Mozart, Brahms et Schnittke (ve 8), ou encore Shirley Brill à la clarinette, Jasar Atanosov au basson et Sebastian Schick à la contrebasse pour l’Octuor de Schubert (sa 9). Y. A. Du 1er au 9 août 2014 Réservation : Evolène-Région Tourisme, 027.283.40.00 Piano à Saint-Ursanne En août, pour la 11e édition du festival, le magnifique cloître romano-gothique de la Collégiale des bords du Doubs accueillera une pléiade d’artistes « Autour de Jean-Sébastien Bach », fil rouge de la manifestation. Un hommage sera aussi rendu au compositeur jurassien Abner Sanglard, décédé en 2012. Comme il se doit, les récitals de piano se tailleront la part du lion. Pascal Godart ouvrira les feux (sa 2), suivi de Nima Sarkechik (di 3), de Marietta Petkova (ma 5), de François Chaplin (ve 8) et de Lilit Grigoryan, qui jouera les Variations Goldberg (di 12). Gabriel Wolfer donnera un récital d’orgue à la Collégiale (di 3). Le violoncelliste Henri Demarquette et le pianiste Caspar Frantz joueront des Suites de Bach en miroir (me 6), et une « Tribune de jeunes artistes » (ve 8, de 11 à 17h) précédera les deux concerts du Quintette à cordes de la Philharmonie de Berlin, avec Frédéric Rapin, clarinette, et Cathy Krier, piano (sa 9 à 16h et 20h30), ainsi que celui du duo piano-violoncelle de François-Xavier Poizat et Nadège Rochat (di 10). Une « Nuit du concerto » mettra un terme au festival, avec des solistes et l’Orchestre International de Genève conduit par Nicolas Farine (di 12). Y. A. Du 2 au 12 août 2014 / Rens. sur : www.crescendo-jura.ch Les Sommets du Classique de Crans-Montana Du 2 au 12 août, la 11e édition du Festival, dont le thème est Musique et Paix, poursuit dans la voie tracée dès l’origine par sa fondatrice et directrice artistique Christine Rey: soutenir, guider et faire jouer les jeunes virtuoses. c t u a Elina Buksa f e s t i v a l s Le Président d’honneur du Festival étant Michel Legrand, on ne s’étonnera pas de trouver en ouverture la rencontre entre classique et jazz telle que ménagée par le pianiste de jazz Yaron Herman et le pianiste et chef David Greilsammer à la tête de sa Geneva Camerata (Eglise de Crans-Montana, 2 août, 20h) S’ensuivra un concert jeunes talents avec le pianiste Sylvain Viredaz, 1er prix au Concours de Lausanne et Elina Buksa, violoniste de la chapelle Musicale Reine Elisabeth. Au programme : Ravel, Chopin, Sonates de Frank (Chapelle de Crans-Montana, 5 août, 20h). Le violoniste Andrey Baranov et l’Orchestre Les Sommets du Classique sous la direction de Sebastien Bagnoud donneront le Concerto pour violon n°5 de Mozart et la Sérénade pour corde opus 48 de Tchaïkosvski (Chapelle de Crans-Montana, 7 août, 20h). On pourra ensuite entendre le Quatuor Coryfeye, des musiciens formés à La Chapelle musicale Reine Elisabeth, en résidence avec l’orchestre du Festival, et Denis Sungho, jeune guitariste virtuose ayant récemment accompagné Nathalie Dessay (Chapelle de Crans-Montana, 9 août, 18h). Le 11 août sera une riche journée commençant par un Petit-déjeuner en musique à l’Hôtel Crans Ambassador avec Florence Angelloz, flûtiste et Alina Piechowska, pianiste (10h00) suivi d’une randonnée au restaurant de Chetzeron en compagnie de Yves Angelloz, Michel Butor, Grand prix 2013 de littérature de L’Académie française ainsi que des jeunes musiciens boursiers du Festival. Une ConférenceLecture par Michel Butor accompagné d’Alina Piechowska sera suivie d’un Dîner de gala et d’un concert de l’Orchestre Les Sommets du Classique sous la direction de Sebastien Bagnoud avec les virtuoses boursiers (Hôtel Crans-Ambassador, 11 août, 20h). Puis place aux séductions de la voix étrangement timbrée d’Aurelia Khazan. La chanteuse (et comédienne) française chante en français, en anglais et en hindi. Ce sera principalement en anglais qu’elle chantera l’amour et l’espoir accompagnée du pianiste Moncef Genoud pour un moment où le blues sera roi. (Hôtel Etrier, 12 août, 20h) C. B. l i t é f e s t i v a l s gstaad Des voix au Menuhin Festival La voix a toujours eu une place de choix à Gstaad. Cette année ne fait pas exception avec la venue, entre autres, de Simone Kermes, Vesselina Kasarova, Christine Schäfer et Diana Damrau. Simone Kermes et Vesselina Kasarova auront les honneurs du 2ème concert du Festival, le 18 juillet, intitulé Cuzzoni vs. Bordoni – deux Divas, deux rivales. On sait que depuis ses origines, l’opéra a connu le phénomène du culte du grand interprète qui atteint un premier sommet au temps du baroque. Avec l’inévitable cortège de rivalité, d’amour et de haine l’accompagnant. Ainsi au début du 18e siècle, pouvait-on assister à de véritables concerts-duels au cours desquels s’affrontaient les grandes voix du moment. C’est l’affrontement de deux primadonnas, Faustina Bordoni et Francesca Cuzzoni qui sera reconstitué par Simone Kermes, Vesselina Kasarova et la Capella Gabetta. Rappelons que Simone Kermes est une Vesselina Kasarova a c t u Thomas Hampson soprano colotura allemande, très présente sur les scènes de son pays comme à New York ou Paris. Son répertoire comprend les rôles de Gilda dans Rigoletto, les rôles titres d'Alcina, de Lucia di Lammermoor, ainsi que les rôles d'Eurydice dans Orphée et Eurydice, de Constance dans Die Entführung aus dem Serail, de Fiordiligi dans Cosi fan tutte et de Rosalinde dans Die Fledermaus. Vesselina Kasarova est une mezzo-soprano bulgare poursuivant une carrière internationale. En récital au Grand-Théâtre de Genève en juin 2010, elle a chanté, en 2012, Romeo dans I Capuleti e i Montecchi au Bayerische Staatsoper de Münich, Carmen à l’Opéra de Zürich, puis en 2013, toujours à Zürich, Venus dans Tannhäuser, Octavian dans Der Rosenkavalier, puis Rosina dans Le Barbier de Séville au Wiener Staatsoper. Outre ce prometteur duel vocal, on pourra l’entendre dans le rôle titre d’une version de concert de Carmen donnée sous la tente de Gstaad le 5 septembre en compagnie du ténor Gaston Rivero (Don José) et de l’orchestre et les chœurs de l’Opéra de Fribourg en Brisgau placés sous la baguette de Fabrice Bollon. a l i t Faut-il présenter Diana Damrau souvent entendue au Grand Théâtre de Genève et dont les débuts au Covent Garden de Londres puis au Metropolitan de New York remontent respectivement à 2003 et 2005 ? Après avoir incarné Violetta de La Traviata en ouverture de La Scala le 7 décembre 2013 pour le bicentenaire de Verdi, elle reprend le rôle cette année successivement en avril-mai à Covent Garden, en juin à Paris, en juillet à Münich. Le 22 août, elle sera à Gstaad pour un gala d’airs d’opéras italiens (mis à part deux airs de Massenet) en compagnie du ténor Joseph Calleja, du baryton Thomas Hampson et du London Symphony Orchestra dirigé par Antonio Pappano. Quant au concert de clôture du Festival, le 6 septembre, c’est une autre superbe voix de soprano qu’il mettra en valeur, celle de Christine Schäfer dans les Vier letzte Lieder de Strauss. Egalement au programme de ce concert, l’Ouverture de La Force du Destin de Verdi et la 4ème de Tchaïkovsy devraient permettre aux musiciens de La Scala de Milan de faire montre de tout leur savoir-faire sous la baguette de Daniel Harding. Christian Bernard Plus d’informations sur : http://www.menuhinfestivalgstaad.ch/site/fr/ Diana Damrau é 67 f e s t i v a l s festival de tannay, du 24 au 31 août Riches variations Les Variations musicales de Tannay voient leur programme s'étoffer d'année en année. Ainsi, fin août prochain, sept - et non plus six - concerts seront proposés aux mélomanes. Autres nouveautés : le premier engagement d'un trio de violon, violoncelle et piano et l'apparition au programme de deux orchestre constitués, en plus de la traditionnelle formation de l'Orchestre du Festival. 68 Serge Schmidt et Françoise de Courten, respectivement président et vice-présidente du comité directeur du festival, deviennent intarissables lorsqu'ils sont interrogés sur le programme de la prochaine édition de la manifestation et, plus généralement, sur le futur de celle-ci. Né de l'enthousiasme de quelques passionnés de musique classique, conscients à l'époque de l'absence de toute manifestation estivale de ce type entre Saint-Prex et Genève, le festival tend à acquérir un profil de plus en plus accusé avec l'augmentation du nombre de soirées symphoniques. Mais le principe reste en gros le même : mêler les noms de grandes vedettes du moment et ceux de jeunes artistes suisses en passe de grimper les marches de la célébrité pour attirer un public que l'on espère composite, fait à la fois de spécialistes et de gens curieux d'élargir leur horizon musical. Aussi, lors d'une rencontre informelle au début du mois de juin, ma première question a-t-elle porté sur l'établissement du programme. Comment concevez-vous les affiches des sept concerts que vous avez programmés ? Serge Schmidt : Il y a d'abord les passages obligés, comme le concert réservé aux familles avec accès gratuit pour tout le monde. Nous tenons en effet à ce que, chaque année, des amateurs en herbe déjà convaincus ou encore à convaincre, puissent venir à un concert classique en toute simplicité, car il reste patent que ce type de musique est encore trop souvent l'objet de préjugés négatifs. Et comme il n'y a ni billets d'entrée payants ni code vestimentaire particulier, toutes les barrières qui servent de prétextes pour justifier habituellement le refus d'aller à un tel type de concert tombent d'elles-mêmes! Françoise de Courten : De plus, ces rendez-vous de fin d'après-midi, traditionnellement fixés au samedi et précédés d'un goûter, sont animés par la présence d'un narrateur qui donne aux auditeurs en herbe les clefs de lecture des morceaux proposés. Cette année, ce sera Ma Mère l'Oye de Ravel qui se réfère à des contes dont on peut supposer sans grand risque de se tromper que peu de jeunes enfants les connaissent. Cette exigence est le fruit d'une expérience tentée il y a quelques années avec Les Quatre Saisons de Vivaldi: bien que cette série de concertos nous eût paru facile d'accès lors de l'établissement du programme de ce rendez-vous musical, nous nous sommes rendu compte in situ que le public 'décrochait' et commençait à s'agiter parce qu'il s'ennuyait! Depuis lors, nous nous attachons donc toujours la présence d'un acteur ou d'un orateur capable de captiver l'auditoire par la seule magie des mots avant que la musique ne prenne le relais. Rachel Kolly d’Alba compte. Mais il y a bien sûr des raisons qui nous incitent à équilibrer les ouvrages mis au programme pour éviter la saturation. Ainsi, quand nous prenons contact avec un musicien, celui-ci nous dit quel est son répertoire du moment et nous laisse généralement libres de choisir ce qui nous plaît, ou plus exactement ce qui nous convient, car il n'a souvent pas idée des autres manifestations inscrites au programme à ce moment des négociations. Nous non plus d'ailleurs, dans certains cas ! SS : Prenez le programme du Trio Wanderer, par exemple, qui jouera ici l'Opus 100 de Schubert et le Trio de Tchaïkovski. Je tenais à entendre ces trois musiciens dans le chef-d'œuvre de Schubert et leur ai demandé s'il était possible de l'inscrire au programme de la soirée. Puis l'idée du Tchaïkovski s'est imposée aux musiciens qui tenaient à faire contraste tout en conservant une tonalité particulière à ce concert. Quelle image pouvez-vous vous faire de votre public ? SS : A vrai dire, c'est difficile à dire. Dans certains cas, nous avons eu des retours en demi-teintes, par exemple lorsque La Valse de Ravel a déçu certains auditeurs qui ne s'attendaient pas à une telle accumulation de dissonances dans une pièce portant le titre de valse ! Mais cela ne va jamais jusqu'à la protestation véhémente. Même lorsque nous avons mis des pièces de John Cage au programme, je dirai que les auditeurs ont fait preuve d'une ouverture d'esprit réjouissante et se sont montrés particulièrement intéressés par le piano tel qu'il avait été préparé pour cette exécution. FdC: Comme nous l'avons dit précédemment, nous recherchons en fait à atteindre tous les publics. Et nous ne sommes pas définitivement fixés sur un répertoire musical qui se limiterait aux seules œuvres classiques. Même la pratique du 'cross over', qui juxtaposerait des titres de style fort divers allant de la musique ethnique au jazz, nous conviendrait parfaitement si un artiste se déclarait prêt à tenter l'expérience. Et comment voyez-vous le futur ? Et qu'en est-il des autres concerts ? Cherchez-vous à trouver un fil rouge qui permette de rattacher chaque soirée à un projet artistique cohérent ? SS : Il ne faut pas se cacher que la recherche de sponsors devient difficile actuellement, et nous venons d'engager quelqu'un qui va se spécialiser dans ce domaine. Mais nous sommes confiants, comme l'atteste cette année l'augmentation du nombre de concerts et l'engagement de l'Orchestre de Chambre de Genève et de la Geneva Camerata. J'aimerais même aller encore plus loin et faire venir, par exemple, l'Orchestre de Chambre de Bâle dans un futur pas trop lointain... FdC: De plus, cette année, nous allons utiliser pour la première fois une coque en bois qui permettra de mieux renvoyer le son vers le public afin d'atténuer autant que possible les inévitables aléas liés à la pratique de la musique en plein air. Si la chose est concluante, nous envisageons même de nous procurer une structure encore plus performante dans les années à venir... En attendant, un détour par Tannay à la fin de cet été semble s'imposer pour tout amateur de bonne musique heureux de satisfaire sa passion dans un cadre qui n'a rien de conventionnel. FdC: Non. Ce sont d'abord nos coups de cœur qui entrent en ligne de Propos recueillis par Eric Pousaz e n t r e t i e n f e s t i v a l s sion festival, du 14 au 31 août 50 ans ! Pour cette édition du cinquantenaire du Festival créé en 1964, le violoniste Pavel Vernikov, actuel directeur artistique de la manifestation, propose une programmation sortant résolument des sentiers battus aux artistes invités à se produire au Théâtre de Valère entre le 14 et le 31 août. Un hommage sera aussi rendu à Tibor Varga, fondateur du Festival, de l’Académie de musique de Sion, ainsi que du concours de violon qui porte son nom. Si le thème « Voix Violon » assure comme l’en dernier la cohérence de la programmation, une « fête des duos » sera aussi mise sur pied afin de susciter des rencontres fructueuses entre des violonistes, leur pianiste, et les stars du violon présentes au festival. Des étudiants de l’Académie Tibor Varga ouvriront les feux, avec le soutien de la violoncelliste Natalia Gutman, du pianiste Pascal Godart et de Pavel Vernikov (je 14). Une Suite pour 2 pianos et percussion de West Side Story de Leonard Bernstein, dans une adaptation d’Irwin Kostal, avec Katia et Marielle Labèque aux pianos, sera suivie d’une création de Kosma Bodrou, une Fantaisie sur des thèmes de Roméo et Juliette, d’après Tchaïkovski, Prokofiev et Ennio Morricone, avec Sunao Goko, lauréat du concours Varga 2013 (sa 16). Le ténor Markus Brutscher et le Klangforum Wien proposeront une « interprétation composée » (Zender dixit) du Voyage d’hiver de Schubert, retravaillé par Hans Zehner pour accordéon, guitare et percussion (di 17). La violoniste Janine Jansen et le pianiste Itamar Golan consacreront leur soirée à quatre chefs-d’œuvre du répertoire de duos : la Sonate de Janacek, celle de Ravel, la Fantaisie D. 934 de Schubert, ainsi que le Poème de Chausson (je 21). Le violoniste Gidon Kremer et sa Kremerata Baltica ont opté pour un singulier couplage américano-russe sur le thème des saisons pour leur première soirée au festival. The Russian Seasons de Leonid Desyatnikov (né en 1955) - 4 concertos pour violon, cordes et une soprano – précédera The American Four Seasons de Philip Glass, sous-titre de son Concerto pour violon no 2 (ve 22). a c t u Gidon et Lika Kremer (violon et narration), avec la Kremerata, présenteront, sur un mode ludique pour enfants, Animal Harmonies, une création de Gidon Kremer pour violon, flûte, narrateur, percussion et petit orchestre, d’après le conte d’Andersen Le rossignol et l’empereur de Chine (sa 23 à 17h). Le lendemain, la Kremerata Baltica, conduite par Jörg Birhance, offrira une soirée flamenco, avec, de Turina, La Oracion del torero, et deux œuvres de Manuel de Falla, 7 Canciones espanolas et El amor brujo (l’Amour sorcier), dans sa version originale pour orchestre de chambre, cantaora de flamenco et épisodes dansés. (di 24 à 17h) Huit anciens élèves de Tibor Varga, dont Madeleine Carruzzo et Gyula Stuller, se produiront et évoqueront leurs souvenirs du Maître au cours d’une soirée dont le modérateur sera Charles Sigel. (lu 25) Le violoniste Augustin Dumay et la soprano Aleksandra Orlowska seront accompagnés par l’Orchestre de Chambre de Lituanie dans un programme allant de Mozart à Richard Strauss, en passant par Mendelssohn, Fauré et Tzigane de Ravel (je 28). Une finale « Juniors » (8-14 ans), suivie d’une finale « Seniors » (de 15 à 88 ans…) de la compétition des duos bénéficiera de la participation de l’Orchestre lituanien et de celle des musiciens humoristes Igudesman & Joo pour des animations (me 27 et ve 29). A Monthey, au Théâtre du Crochetan, se tiendra la soirée de gala du Festival, avec la participation de la formation lituanienne et des deux compères Igudesman & Joo dans BIG Nightmare music. Les lauréats du concours des duos joueront le Double Concerto pour violon et piano que Mendelssohn composa à l’âge de 14 ans. La fin de soirée s’annonce des plus festives avec la Music for the Royal Fireworks de Haendel et un vrai feu d’artifice ! (sa 30) Gidon Kremer © Kasskara C’est à la Cathédrale de Sion que le Chœur Novantiqua, l’orchestre lituanien, sous la direction de Jan Dobrzelewski et Bernard Héritier, Brigitte Fournier et Sylviane Bourban mettront un terme au Festival, avec un Psaume de Mendelssohn, deux Concertos et le Gloria de Vivaldi, ainsi que Sept Paroles de Sofia Goubaïdulina. Une œuvre que l’on dit écrite dans un ton incantatoire d’une grande intensité, avec les sept dernières paroles du Christ en croix transfigurées dans le domaine instrumental pour violoncelle, bayan (accordéon russe) et cordes (di 31 à 17h). Yves Allaz Janine Jansen, photo Decca © Harald Hoffmann a l i t Rens. sur : www.sion-festival.ch é 69 e x p o s i t i o n s fondation van gogh Arles retrouve des couleurs C’est une véritable invasion d’Helvètes en terre provençale, à laquelle ont pu assister les Arlésiens et Arlésiennes, début avril 2014, lors de l’inauguration de la fondation Van Gogh. Un événement particulier pour cette ville, qui construit une partie de son image sur celle de cet artiste. Il n’aura vécu à Arles que quinze mois entre février 1888 et mai 1889. Une période féconde, au cours de laquelle il créera plus de deux cents tableaux mais aussi novatrice, puisque sa palette évoluera vers plus de clarté et de pureté. Triste Ironie de l’histoire pour cette ville qui ne possède cependant aucune toile de l’artiste. 70 d’Arles, la plus grande commune de France. Mais, les Hoffmann ont aussi la chance d’être les héritiers des laboratoires Hoffmann-La Roche, le groupe pharmaceutique le plus cher du monde, dont la valeur en bourse atteint plus de 250 milliards de dollars et peut se mesurer à celle des stars d’internet. Des descendants qui ont aussi hérité le goût des arts et l’engagement philanthropique de leurs aïeux. Il aura fallu trois ans de travaux et 12 millions d’investissement pour réhabiliter l’ancienne banque de France et offrir mille mètres carré de surfaces d’exposition aux dernières normes muséales. L’agence d’architecture Fluor a tiré le meilleur parti de cet hôtel particulier datant du XVe siècle, conservant d’une part certaines boiseries, cheminée et parquets, sans oublier d’apporter une touche plus contemporaine pour certains autres espaces, en créant des puits de lumière et offrant également deux terrasses s’ouvrant sur les toits de la cité. Maja Hoffmann aime les artistes contemporains et les a invités à laisser leurs traces sur l’architecture du bâtiment. Le Suisse Raphaël Hefti a créé des verres de couleurs surplombant le hall d’accueil et produisant des effets kaléidoscopes, le Français Bertrand Lavier a imaginé le portail du musée en empruntant au readymade de Marcel Duchamp et à l’intérieur, l’artiste anglais Garry Hume a choisi les couleurs des murs. C’est aussi Maja Hoffmann, qui a choisi la directrice –suisse - de sa Vincent Van Gogh «La Maison jaune (‘la rue’)» Huile sur toile, 72 x 91.5 cm. Van Gogh Museum, Amsterdam fondation-musée, Bice Une association, créée en 1983 par Yolande Clergue, l’épouse du photographe fondateur des Rencontres de la photographie d’Arles, Lucien Clergue, avait soutenu la mémoire du peintre, à travers plusieurs expositions. Mais comment faire vivre une telle association et surtout réaliser des projets artistiques, dans une ville de 54 000 habitants avec un taux de chômage de douze pour cent ? C’est alors qu’intervient en 2008 Luc Hoffmann (91 ans) qui décide de transformer l’association en fondation, de la doter d’un capital d’un million d’euros, de trouver un lieu, pour pérenniser les actions menée en faveur de la mémoire de Van Gogh. Il nomme sa fille Maja présidente. Dès les années cinquante Luc Hoffmann, écologiste avant l’heure, s’était pris d’affection pour cette région, y créant une station biologique sur la protection des zones humides. Donnant au passage le goût de cette terre de Camargue à ses enfants, qui ne sont d’ailleurs pas peu fiers d’avoir été à l’école dans cette ville a c t u a Curiger, qui appartient à cette élite internationale de l’art contemporain et trouve là un terrain de jeu à la hauteur de ses ambitions. Car, si l’argent du mécène a permis de conclure un contrat de cinq ans avec le musée Van Gogh d’Amsterdam, qui prévoit de prêter des œuvres de l’artiste le temps des trois à quatre expositions annuelles, qu’on ne s’y trompe pas, la directrice veut aussi privilégier la création contemporaine. Couleurs du Nord, couleurs du Sud et Van Gogh live s’intitule cette première exposition en deux volets. Neuf toiles de Van Gogh, dont la célèbre Maison jaune (1888), la Terrasse de café la nuit (1888), Nuit étoilée sur le Rhône (1888), La Chambre à coucher (1888), Les Alyscamps (1888) composent le noyau dur mais assez conventionnel de la présentation, auxquelles s’ajoute une vingtaine d’autres artistes qui l’ont influencé, comme Camille Corot, Claude Monet, Gustave Courbet, Eugène Delacroix ou le peintre marseillais Adolphe Monticelli. Suit un deuxième axe du parcours réunissant neuf artistes contemporains, dont les œuvres rendent hommage au maître de la couleur. Œuvres sensibles et poétiques de Bethan Huw, avec ses petits bateaux en jonc comme l’est aussi celle du percussionniste bâlois Fritz Hauser, qui a tracé des gros traits noirs sur les murs des escaliers qu’il accompagne d’une composition sonore, imitant le son de la pluie. Bel hommage personnel à Van Gogh avec les portraits de couples enlacés d’Elisabeth Peyton, les installations florales de Camille Henrot ou les dessins aux traits nerveux, saccadés, à la recherche d’une friction communicative avec la vie de Guillaume Bruères. Quant à l’incontournable Thomas Hirschhorn, il fait du Hirschhorn, noyant Van Gogh dans le carton et le ruban adhésif. Il faut espérer que la directrice fera à l’avenir une place à la collection de 200 peintures, sculptures et photographies, réunies depuis la création de son association par Yolande Clergue, signées par des noms d’artistes de réputation internationale : Hockney, Rauschenberg, Lichtenstein, Zao-Wou-Ki, et bien d’autres, tous ont créé une œuvre dédiée à van Gogh mais aucune d’elles n’était intégrée dans cette première exposition. On attend 80'000 visiteurs par an mais tout dépendra de la programmation de la directrice. A être trop audacieuse, il y a fort à parier que les visiteurs la bouderont. Arles est une ville touristique et non pas la mecque de l’art contemporain. Régine Kopp l i t é rencontres de la photographie d’arles La dernière parade Sous l’intitulé Parade, François Hébel signe son ultime édition comme directeur des Rencontres de la photographie d’Arles. Ce, avant que ne lui succède l’homme qui préside aux destinées du Musée de l’Elysée, le Français Sam Stourdzé, dont l’hommage au cinéaste italien le plus célèbre de tous les temps intitulé Fellini, la grande parade fut présenté au Musée lausannois en 2011. Convergence de transition ou lien ontologique avec l’essence de la photographie, nombre de travaux exposés ont trait à une clinique du deuil, à la perte et à des lieux de mémoires aujourd’hui oubliés, les 40'000 monuments aux morts français, réminiscences en forme de devoir d’histoire plus que de mémoire scénarisant l’une des plus grandes boucheries de l’Histoire du XXe siècle et ses 1 350 000 trépassés. Métamorphoses de la presse Présentée dans le cadre du Prix Découvertes et signée Will Steacy, Deadline (2009-2013) suit les mutations au sein de la rédaction du quotidien Philadelphia Inquirer. Cette série explore le déclin au Etats-Unis, semble-t-il irrémédiable, de certaines expressions du journalisme papier liées notamment à l’investigation. Steacy pose le constat que seule de nos jours semble privilégiée une voie dédiée au tout à l’information sans réel éclairage critique ni mise en perspective. « Lorsque nous perdons des journalistes, des éditeurs…, nous perdons la couverture, de l'information, une connexion à nos villes et notre société. Et, à la fin, nous nous perdons, relève le photographe. Sans l'investissement humain nécessaire à fournir un contenu à des nouvelles, cette évolution devient un jeu à somme nulle sur l'autoroute de l'information ne menant nulle part. Les fibres du papier et les clics de la souris sont sans valeur à moins que les mots inscrits, revêtent, eux, une valeur. Le journal est beaucoup plus qu'une entreprise, c'est une confiance civique. » Depuis 2000, l’industrie des médias imprimés a été délestée de 30 % de sa force de travail. Une tendance que le rachat de grands titres comme le Washington Post, le 5 août 2013, par le controversé géant de la vente en ligne, Amazon, ne peut qu’accentuer. « Pour Steacy, le problème de la presse écrite qui meurt progressivement par manque d’annonces notamment est un phénomène touchant l’ensemble de la société, tant le journal est vu comme lien social. a c t u Raymond Depardon. Série Présence d'une génération perdue Beaucoup de bureaux vides donc, dans une forme de disparition annoncée », souligne Hélène JoyeCagnard, directrice des Journées Photographiques de Bienne qui a présenté le travail de l’Américain. Aux morts anonymes Le philosophe allemand Walter Benjamin confie : « Honorer la mémoire des anonymes est une tache plus ardue qu’honorer celle des gens célèbres. L’idée de construction historique se consacre à cette mémoire des anonymes. » Outre une exposition recensant les monuments aux morts au sein des 36 0000 communes françaises, comment faire pour réapprendre à regarder ce qui est, mais n’est plus vu, reconnu ou perçu ? Depuis un demi-siècle, Raymond Depardon, qui fut Directeur artistique des Rencontres en 2006, se concentre sur les temps faibles face à la tyrannie de l’instant décisif, tout en évoluant dans une incertitude sans cesse reconduite. Avec Présence d’une génération perdue, l’homme d’images au temps long vise modestement à réintégrer le monument aux morts dans notre champ visuel, à permettre une relecture d’un langage qui semble d’un autre temps. Mais qui interroge notre humanité, l’examen de la mémoire nationale à travers le culte barrésien de la terre et des morts, dont la mortifère et militariste Marseillaise est la clef de voute. Un langage qui vise aussi à la non répétition de pareilles horreurs à travers certains de ces petits cimetières, cicatrices de l’inoubliable aujourd’hui largement effacées, délivrant parfois un message pacifiste. Quel est le sens d’une formule comme « A nos héros morts pour la France », présente sur les monuments aux morts de la Grande Guerre ? Ces lieux de mémoire ne témoignent-ils pas de la persistance d’une société patriarcale ne concevant souvent le sacrifice que décliné au masculin ? Les manifestations réprimées qui marquèrent la naissance du MLF à la fin des a l i t années 60 pour un lieu mémoriel dédié à la femme du soldat inconnu aux côtés de la tombe du Soldat inconnu installée sous l’arc de Triomphe le 11 novembre 1920 sont-elles effacées de l’histoire ? Les monuments aux morts de la Grande Guerre constituent aujourd’hui un élément banal dans le paysage urbain de la France. L’éloignement chronologique de la Guerre, la disparition des derniers « poilus » expliquent sans doute la banalisation de ces monuments tombés dans l’indifférence. La faible originalité de la plupart de ces lieux mémoriels que l’on dirait conçus dans un moule générique avec quelques variantes, éclaire sans doute le fait que le langage symbolique utilisé par leurs auteurs ne soient plus perçu. Ces monuments seraient devenus a-historiques. Nous ne voyons plus le monument en tant que tel. Sa fonction et le message transmis semblent portés disparus dans une écriture de pierre devenue étrangère, hors les éphémères célébrations accompagnant l’ensevelissement de soldats français morts en Afrique aujourd’hui, hier en Afghanistan ou en Irak. Pionnier de la photographie en couleur au moyen d’une technique nommée autochrome, qui produit des images positives sur plaques de verres, Léon Grimpel (1873-1948) n’a pas réalisé une série convenue sur les enfants soldats. En 1915, sous la Première Guerre Mondiale, il fait des photos de bambins qui avaient formés leur propre « armée » dans la rue Greneta à Paris et s’amusaient à jouer à la guerre contre les Allemands. Ces bamboches donnent ainsi dans la mimographie ou la pantomime à l’ère de la reproduction. Ils représentent autant la mort au détour de scènes d’exécutions de l’ « ennemi » silhouetté sur un mur que le sacrifice en postures et poses héroïques. Bertrand Tappolet Rencontres de la photographie, Arles, du 7 juillet au 21 septembre. Rens. : www.rencontres-arles.com Catalogue aux Editions Actes Sud. é 71 expositions en FRANCE Caen Aix manufacture. Jusqu’au 24 août. Musée des Beaux-Arts : «En trois temps» - 3 artistes (Mitchell, Capet, Tournières), 3 siècles (les XVIIIe, XIXe et XXe). Jusqu’au 21 septembre. Musée Granet : Chefs-d’œuvre de la collection Pearlman. Cézanne et la modernité. Du 12 juillet au 5 octobre. Cassel Ajaccio Musée départemental Palais Fesch - Musée des Beaux-Arts : La peinture en Lombardie au XVIIe siècle. Le culte du morbide et l’idéal de beauté. Jusqu’au 29 septembre. Arles Divers lieux : Les Rencontres d’Arles. Du 7 juillet au 21 septembre Avignon Musée Louis Vouland : Rêves d’un collectionneur, Tableaux et Faïences. Jusqu’au 26 octobre. Musée du Petit Palais : Acquérir, restaurer, attribuer : La Visitation. Jusqu’au 2 novembre. Prison Saint-Anne : La disparition des lucioles. Jusqu’au 25 novembre. 72 de Flandres : Dans le sillage de Rubens, Erasme Quellin. Jusqu’au 16 sept. Baux-de-Provence Carrières de lumières : Klimt et Vienne. Un siècle d’or et de couleurs. Jusqu’au 4 janvier 2015 Beauvais Galerie nationale de la Tapisserie : 350 ans. Portrait d’une Céret Musée d’art moderne : Le pein france Le Havre Nantes Musée d’Art moderne André Musée des Beaux-Arts : Fernand Malraux : Nicolas de Staël. Lumières du Nord - Lumières du Sud. Jusqu’au 9 novembre. Léger 1924-1945 - Reconstruire le réel. Jusqu’au 22 septembre. Ornans Lens Musée Courbet : Cet obscur Le Louvre : Les désastres de la objet de désirs. Autour de L’Origine guerre, 1800-2014. Jusqu’au 6 oct. du Monde. Jusqu’au 1er sept. L’Isle-Adam Thonon Musée d’art et d’histoire Louis Musée du Chablais (Châ̂teau Senlecq : Adolphe Willette (18571926), rétrospective. Jusqu’au 28 septembre. de Sonnaz) Le Léman en question. Jusqu’au 9 novembre. Toulon Hôtel des Arts : Stéphane tre et l’arène. Art et tauromachie, de Goya à Barceló. Jusqu’au 12 octobre. Lyon Musée des Valence Marseille Musée de Valence : De MuCEM : Splendeurs de Volubilis Gainsborough à Turner : l'âge d'or du Colmar Musée Bartholdi : Exquises esquisses (dessins de Bartholdi). Jusqu’au 31 décembre. Evian Maison Garibaldi : « Evian et le drame de la Grande Guerre », 500’000 civils rapatriés. Jusqu’au 16 novembre Palais Lumière : Chagall, l’œuvre imprimé. Jusqu’au 2 novembre. Giverny Musée des impressionnismes : Bruxelles, une capitale impressionniste. Du 11 juillet au 2 novembre beaux-arts : L'Invention du Passé - Histoires de cœur et d’épée en Europe. 18021850. Jusqu’au 21 juillet. Couturier "Climats de France, Fernand Pouillon, Alger", photographies. Du 12 juillet au 28 septembre. - Bronzes antiques du Maroc et de Méditerranée. Jusqu’au 25 août. Des artistes dans la cité. Jusqu’au 8 septembre. Le Monde à l’envers Carnavals et mascarades d’Europe et de Méditerranée. Jusqu’au 25 août. Metz Centre Pompidou-Metz : Hans Richter. La traversée du siècle. Jusqu’au 24 février 2015 paysage. Du 28 juin au 28 septembre. Wingen Musée Lalique : Le monde aqua tique de Lalique. Jusqu’au 11 nov. Yerres Propriété Caillebotte : Caillebotte à Yerres, au temps de l’impressionnisme. Jusqu’au 30 juillet. Musée Bonnard, Le Cannet Les Belles endormies L’exposition d’été du musée Bonnard est consacrée au rêve, au sommeil et surtout aux belles endormies sur les tableaux des artistes modernes tels que Bonnard, Vuillard, Vallotton, Matisse, Picasso, Brancusi, Manguin, Van Dongen et tant d'autres. Le rêve est un sujet de réflexion pour les artistes depuis l'antiquité. Cette « magique suspension du temps » telle que la décrite l'historienne de l'art Isabelle Monod-Fontaine est devenue au fil des siècles un sujet pictural et littéraire qui a tant fasciné qu'il a donné naissance à d'innombrables variations du modèle endormi, allégorie de l'abandon. Il s'agit de montrer à travers une cinquantaine d'œuvres majeures le parcours de ce sujet de la fin du XIXe siècle en passant par les symbolistes et les nabis jusqu'aux années 1950. De l'aspect poétique et secret du rêve à sa dimension érotique, les artistes ont su livrer leur part intérieure de ce sujet devenu un standard de la peinture comme de la sculpture. A voir du 6 juillet au 2 novembre 2014 Auguste Renoir, «Odalisque dormant» ou «Odalisque aux babouches» vers 1915-1917, huile sur toile, 50x53 cm © RMN-Grand Palais (musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski a g e n d a expositions en europe Courtauld Gallery, Londres De Brueghel à Freud : les gravures du Courtauld Institute Cette exposition spéciale a pour but d’introduire le visiteur dans la partie la plus grande mais la moins connue de la collection de la Galerie, sa sélection d’estampes. Il est important de souligner que la Courtlaud Gallery possède l’une des plus importantes collections de travaux sur papier de Grande-Bretagne, soit environ 7000 dessins et aquarelles, et 20’000 estampes allant de la Renaissance au XXe siècle. Pieter Brueghel l’Ancien (1525-1569) «La chasse au lapin», 1560 gravure, 22.2 x 29.1 cm. The Courtauld Gallery, London L’exposition présente une trentaine d’exemples particulièrement remarquables et intrigants, qui couvre plus de 500 ans et englobe une grande variété de techniques de gravure. Parmi les œuvres exposées figurent des travaux de Mantegna, Bruegel, Canaletto, Picasso, Matisse et Freud. Elle s’ouvre sur une gravure d’Andrea Mantegna intitulée «La Flagellation du Christ» (vers 1465-70) dans laquelle l’artiste de la Renaissance réinvente de manière grandiose cette scène de la Passion. Par contraste, le grand format d'une gravure en dix parties, réalisée par le graveur français Nicolas Béatrizet d’après le célèbre «Jugement dernier» de Michelangelo, donne un exemple de la capacité d'une gravure à reproduire de façon spectaculaire une œuvre d'art monumentale. Les sujets dominants des XVe et XVIe siècles sont bien évidemment liés à l’iconographie religieuse, mais dès le début ils ont été complétés par des sujets laïcs. Un superbe exemple est l’œuvre de Pieter Brueghel l’Ancien intitulée «La chasse au lapin» (1560), la seule que l’artiste ait exécutée lui-même ; pour cette pièce, Bruehel a choisi la technique de la gravure : sa relative liberté est comparable au dessin, permettant à l’artiste de rendre la scène avec un naturalisme remarquable. L’exposition de la galerie Courtauld offre de nombreux exemples remarquables attestant du talent exprimé par les artistes et de la qualité de leur travail. Le visiteur a ainsi la possibilité de découvrir des impressions uniques, dont la date est certifiée, d’artistes du XVIe s. tels que Jacques Bellange et Johannes Stradanus. A voir jusqu’au 21 septembre 2014 AILLEURS Barcelone Museu Nacional d’Art de Catalunya : Josep Tapiró, peintre de Tanger. Jusqu’au 14 sept. Le peintre Antoni Viladomat i Manalt (1678-1755). Jusqu’au 31 déc. Berlin Bode-Museum (Am Kupfergraben) Andreas Schlüter et le Berlin baroque. Jusqu’au 13 juillet Bilbao Musée Guggenheim : Georges Braque. Jusqu’au 21 septembre. Bruxelles Palais des Beaux-Arts : Michaël Borremans. Jusqu’au 3 août Florence CCC Strozzina : Contexte familial. Portaits et expériences de familles d’aujourd'hui. Jusqu’au 20 juillet Musée du Bargello : Baccio Bandinelli (1493-1560). Jusqu’au 13 juillet. Palazzo Strozzi : Pontormo et Rosso. Des chemins divergents du Maniérisme. Jusqu’au 20 juillet. a g Francfort Städelmuseum : Hendrick Goltzius et son cercle. Gravures maniéristes du Stadelmuseum. Jusqu’au 14 septembre. Munich Kunsthalle der Hypo-Kulturstif- papiers découpés. Jusqu’au 7 sept. Victoria & Albert Museum : Le Glamour de la mode italienne, 19452014 & M. F. Husain - peinture indienne moderne. Jusqu’au 27 juill. Turin La Veneria Reale : Splendeurs des Madrid Venise Musée du Prado : El Greco et la Ca’ Foscari Esposizioni : Mikhail tung : Rembrandt, Titien, Bellotto - coll. Gemäldegalerie de Dresde. Du 22 août au 23 nov. peinture moderne. Jusqu’au 5 oct. Musée Thyssen-Bornemisza : Peintures victoriennes de la collection Pérez-Simón. Jusqu’au 5 oct. Mayence Londres Landesmuseum : Max Slevogt. En British Museum : L’Allemagne divisée - Baselitz et sa génération. Jusqu’au 31 août. Huit momies, huit vies, huit histoires. Jusqu’au 30 nov. Courtauld Gallery : De Brueghel à Freud - les gravures du Courtauld Institute. Jusqu’au 21 septembre. National Gallery : Construire l’image - l’architecture dans la peinture de la Renaissance italienne. Jusqu’au 21 septembre. Couleur. Jusqu’au 7 septembre. Sir John Soane’s Museum : «Amusements and Luxurious Gratification». Les Britanniques à Paris en 1814. Jusqu’au 13 sept. Tate Britain : Kenneth Clark. Jusqu’au 10 août. Tate Modern : Malevich. Du 16 juillet au 26 oct. Henri Matisse - les e n cours italiennes - les Este. Jusqu’au 6 juillet. route vers l’Impressionnisme. Jusqu’au 12 octobre. Reggio Emilia Palazzo Magnani : Un siècle de grande photographie - les chefsd’œuvre Fotografis, Bank Austria. Jusqu’au 13 juillet Rome Musei Capitolini : Michel-Ange artiste universel. Jusqu’au 14 sept. Museo Fondazione Roma : Hogarth, Reynolds, Turner. La peinture anglaise à l’aube de la modernité. Jusqu’au 20 juillet Scuderie del Quirinal : Frida Kahlo. Jusqu’au 13 juillet. d a Roginsky - Derrière la porte rouge. Jusqu’au 28 septembre. Fondation Querini Stampalia : Sur les traces de l’architecte et designer Carlo Scarpa Jusqu‘au 29 septembre. Palazzo Fortuny : Les amazones de la photographie. De la collection de Mario Trevisan. Jusqu’au 14 juillet. Palazzo Grassi : Irving Penn & L’illusion des lumières. Jusqu’au 31 décembre. Peggy Guggenheim Collection: Seulement pour vos yeux. Une collection privée, du maniérisme au surréalisme. Jusqu’au 31 août Vienne Albertina Museum (Albertinapl.) Alex Katz, œuvres coll. Albertina. Jusqu’au 14 sept. «Blow-Up». Le grand classique de la photographie. Jusqu’au 24 août. Osterr. Galerie Belvedere : L’Âge d’argent. L’art russe à Vienne autour de 1900. Jusqu’au 28 sept. 73 expositions Genève Blancpain Art Contemporain 74 (Maraîchers 63) Joachim Koester. Jusqu’au 17 août. Blondeau & Cie (Muse 5) Martin Szekely. Jusqu’au 25 juillet. Cabinet d’Arts graphiques (Promenade du Pin 5) Satires ! Caricatures genevoises et anglaises du XVIIIe siècle. Jusqu’au 31 août Centre d'Art Contemporain (Vieux-Grenadiers 10) Joachim Koester. Jusqu’au 17 août. Centre de la Photographie (Bains 28) Against the grain - La photographie à contre-courant. Jusqu’au 3 août. Espace Jörg Brockmann (Noirettes 32) Nicolas Guiraud. Jusqu’au 29 août. Espace L (rte des Jeunes 43) Pointillisme brésilien - Edgard Soares. Jusqu’au 15 juillet. Ferme de la Chapelle, GrandLancy (39, rte de la Chapelle) "Raconte-moi...", parcours photographique à Lancy et Plan-lesOuates sur les panneaux SGA. Du 3 juillet au 17 août. Fondation Baur (Munier-Romilly 8) Textiles bouddhiques japonais. Jusqu’au 10 août. en Fondation Bodmer (Cologny) Alexandrie la Divine. Jusqu’au 31 août. Galerie de la Béraudière (E.Dumont 2) Après-Guerre - couleurs et expressions. Jusqu’au 25 juillet Galerie Bernard Ceysson (7, Vieux-Billard) Wallace Whitney. Jusqu’au 26 juillet Galerie Patrick Cramer (VieuxBillard 2) Charles Weber. Jusqu’au 12 juillet. Galerie Anton Meier (Athénée 2) Franklin Chow. Jusqu’au 5 juillet. Galerie Skopia (Vieux-Grenadiers 9) Jean Crotti. Jusqu’au 5 juillet. Interart (33, Grand-Rue) Óscar Domínguez. Jusqu’au 4 juillet. Mamco (Vieux-Granadiers 10) Cycle Des Histoires sans fin, séquence été 2014. Jusqu’au 21 septembre. Musée Ariana (Av. Paix 10) Terres d’Islam - L’Ariana sort de ses réverves II. Jusqu’au 31 août. Création contemporaine et mécenat, une alliance durable. Jusqu’au 16 nov. Musée d’art et d’histoire (Ch.Galland 2) Rodin. L’accident et l’aléatoire. Jusqu’au 28 sept. Musée Barbier-Mueller (J.-Calvin 10) Nudités insolites. Jusqu’au 30 novembre. suisse Musée de Carouge (pl. Sardaigne) Plaisirs de bouche - ballade gastronomique et historique. Jusqu’au 14 septembre. Musée Rath (pl. Neuve) Humaniser la guerre ? CICR - 150 ans d'action humanitaire. Jusqu’au 20 juillet. Xippas Art Contemporain (Sablons 6) Pablo Reinoso. Jusqu’au 31 juillet. Lausanne Collection de l’Art brut (Bergières 11) L’Art brut dans le monde. Jusqu’au 2 novembre. Démons et merveilles : Josep Baqué. Du 6 juillet au 26 octobre. Fondation de l’Hermitage (2, rte Signal) Peindre l’Amérique - Les artistes du Nouveau Monde (18301900). Jusqu’au 26 octobre. Forma (r. Genève 21) Florence Aellen. Jusqu’au 19 juillet. Galerie Alice Pauli (Port-Franc 9) Giuseppe Penone, sculptures et dessins. Jusqu’au 19 juillet. Mudac (pl. Cathédrale 6) Le verre vivant. Acquisitions récentes de la collection d'art verrier. Jusqu’au 16 novembre. Musée cantonal des beaux-arts (pl. Riponne) Magie du paysage russe. Chefs-d’œuvre de la Galerie nationale Trétiakov, Moscou. Jusqu’au 5 octobre Musée de l’Elysée (Elysée 18) Luc Chessex, “Castro, Coca, Che, Cherchez la femme“ & Matthieu Gafsou, “Only God can Judge Me“. Jusqu’au 24 août Musée de la main (r. Bugnon 21) Anatomies. De Vésale au virtuel. Jusqu’au 17 août. Musée de Pully : Francine Simonin. Jusqu’au 17 août. Vidy (plein air) Expo 64, le printemps de l'architecture suisse. Jusqu’au 29 juillet. Fribourg Espace Jean Tinguely-Niki de Saint Phalle : Corps en jeu / la collection du MAHF. Jusqu’au 24 août. Musée d’art et d’histoire : «Le pinceau, le taureau, la femme», Picasso graveur. Jusqu’au 17 août. Lens / Crans Fondation Pierre Arnaud : Surréalisme et Arts primitifs - un air de famille. Jusqu’au 5 octobre. Martigny Fondation Pierre Gianadda : Revoir Renoir. Jusqu’au 30 nov. Fondation Baur, Genève Textiles bouddhiques japonais Pour célébrer le trentième anniversaire de l’ouverture de son musée, la Fondation Baur a choisi de “mettre en scène“ la collection de textiles bouddhiques japonais acquise par Alfred Baur (1865-1951) en 1927. Les visiteurs ont ainsi la possibilité de découvrir cent vingt et une nappes d’autel (ou “uchishiki“), datant pour la plupart des XVIIIe et XIXe siècles, des tissus de petites dimensions et de format carré destinés à recouvrir les tables latérales placées devant l’autel principal d’une salle de temple. Toutes ces pièces témoignent de l’extraordinaire habileté des tisserands de Kyôto à l’époque d’Edo (1603-1868). La collection d’Alfred Baur est constituée essentiellement de tissus façonnés en soie, classifiés au Japon sous les noms de “nishiki“ et de “kinran“ (souvent traduits par « brocart »). Avec leur riche décor polychrome, rehaussé de fils d’or ou d’argent, elles représentent les formes de tissage les plus complexes et les plus somptueuses de l’époque. Médaillons de phénix, tigres et dragons. Soie, lampas, base sergé avec lamelles de papier doré́. 66 x 65.5 cm, Fin époque d’Edo, XIXe siècle © Fondation Baur, musée des Arts d’Extrême-Orient, Genève a A noter encore que les textiles présentés sont majoritairement ornés de motifs issus du répertoire traditionnel sino-japonais : dragon et phénix, souvent accompagnés de motifs de bon augure et de symboles de bonheur connus collectivement sous le nom de “takara-zukushi“. Le phénix est en outre souvent combiné à un arbre particulier, le paulownia (“kiri“) car, selon une ancienne croyance chinoise, cette plante serait la seule sur laquelle l’oiseau fabuleux viendrait se poser. Les fleurs occupent elles aussi une place importante dans l’ornementation des textiles, notamment les fleurs symboliques des quatre saisons : la pivoine (printemps), le lotus (été), le chrysanthème (automne) et le prunus (hiver). A voir jusqu’au 10 août 2014 g e n d a expositions en suisse Centre Paul Klee, Berne Taking a Line for a Walk La manière dont Paul Klee imprimait du mouvement à des points ou «emmenait les lignes en promenade» et créait ainsi des signes d’écriture ou des signes symboliques très particuliers est le point de départ de cette exposition. Le but de celle-ci est de construire un pont vers les artistes contemporains avec des œuvres de nombreux représentants des courants américains et européens, des pionniers de l’expressionnisme abstrait. Les spectateurs pourront ainsi admirer des chefs-d’œuvre de Cy Twombly ou Brice Marden, mais aussi des travaux inédits comme les séries de dessins provenant des fonds Henri Michaux, qui montrent l’écriture en action dans l’image et ses particularités abstraites, mais aussi le processus de conduite de la ligne, entre contrôle et spontanéité. L’exposition se concentre sur l’importance de l’écriture – et les signes qui s’y apparentent – dans la création artistique. À partir de l’intérêt de Paul Klee pour le graphisme et la calligraphie, ce sont les propriétés de l’écriture qui sont examinées ici. Pour que l’écrit puisse être décrypté, l’écriture obéit à un certain code; elle est en même temps l’expression d’une sensibilité individuelle. Le graphisme réunit donc un concept et un geste spontané. Aussi sert-il souvent de modèle au processus artistique. Les artistes choisis pour cette exposition n’utilisent pas seulement l’écriture comme élément picturale; ils développent leur œuvre entre ces deux pôles que sont le concept et la spontanéité. Parlant de leur création, ils soulignent à maintes reprises l’importance du processus et du mouvement. Mark Tobey (1890 - 1976) «The Promenaders (Written in the Air)», 1945 Détrempe sur carton, 49,5 x 34,3 cm. Collection privée, Allemagne du Sud Fondation Louis Moret (Barrières 33) Valentin Carron - Triennale 2014. Jusqu’au 24 août. Le Manoir de la Ville : Fabrice Gygi - Triennale 2014. Jusqu’au 31 août. Neuchâtel Centre Dürrenmatt (Pertuis du Saut 74) Le labyrinthe poétique d'Armand Schulthess. Jusqu’au 3 août. Musée d'art et d'histoire (espl. Léopold-Robert 1) Argent - Jeux Enjeux. Jusqu’au 31 août. Prangins Musée national suisse : «Papiers découpés. Scherenschnitte. Silhouette. Paper cuts». Jusqu’au 28 sept. Vevey Musée Jenisch : Markus Raetz. Jusqu’au 5 octobre Musée suisse de l’Appareil photographique (Grand Place) Bernard Dubuis, Tant et temps de passages. Jusqu’au 30 août. A voir jusqu’au 17 août 2014 né vers l'Ouest. Du 4 juillet au 2 novembre. Fondation Beyeler (Riehen) Gerhard Richter. Jusqu’au 7 sept. Kunstmuseum (St. Alban-Graben 16) Charles Ray. Sculptures 19972014. Jusqu’au 28 septembre. Le monde de Paul-Martial : les choses ordinaires. Nouvelles acquisitions photos coll. Herzog. Du 5 juillet au 19 octobre. Musée des Cultures (Münsterpl. 20) La malle aux perroquets. Art populaire d'Amérique latine. Jusqu’au 20 juillet. Museum für Gegenwartskunst (St. Alban-Rheinweg 60) Le Corbeau et le Renard. Révolte de la langue avec Marcel Broodthaers. Jusqu’au 17 août. Charles Ray. Sculptures 1997-2014. Jusqu’au 28 septembre. Musée Tinguely (Paul SacherAnlage 1) Krištof Kintera - “I am not you“. Jusqu’au 29 sept. Schaulager (Ruchfeldstr. 19, Münchenstein) Paul Chan - Selected Works. Jusqu’au 19 octobre. OUTRE SARINE Berne Bâle Cartoon Museum (St. Alban Vorstadt 28) Going West. Le regard de la bande dessinée tour- a g Bienne CentrePasqu’Art (fbg Lac 71-75) Andreas Eriksson. Du 6 juillet au 17 août PhotoforumPasqu’Art : Haus am Gern – Know The Knoll. Du 6 juillet au 17 août n Surfaces. Nouvelle photographie de la Suisse. Jusqu’au 24 août. Fotostiftung Schweiz (Grüzenstr. 45) 1914/18 - Images de la frontière. Jusqu’au 12 octobre. Kunstmuseum (Museumstr. 52) Gerhard Richter - Travaux sur papier. Jusqu’au 27 juillet. Museum Oskar Reinhart (Stadthausstr. 6) Johann et Friedrich Aberli, médailleurs de Winterthour. Jusqu’au 30 nov. Rancate Pinacothèque Giovanni Züst : Zurich Beauté fragile - céramique d’art italienne. Jusqu’au 17 août. Riggisberg Abegg-Stiftung : Les tissus du Moyen Âge dans le culte des reliques. Jusqu’au 9 novembre. Warth Kunstmuseum Thurgau : Joseph Kosuth. L’existence et le monde. Jusqu’au 24 août. Weil / Rhein Vitra Design Museum : Konstantin Centre Paul Klee (Monument im Fruchtland 3) «Taking a Line for a Walk». Jusqu’au 17 août Musée des Beaux-Arts (Hodlerstr. 8-12) Bill Viola - Passions. Jusqu’au e 20 juillet. Anker, Hodler, Vallotton... Chefs-d’œuvre de la Fondation pour l’art, la culture. Jusqu’au 24 août. Grcic - Panorama. Jusqu’au 14 sept. Alvaro Siza - The Alhambra Project. Jusqu’au 31 août Winterthur Fotomuseum (Grüzenstr. 44) d a Haus Konstruktiv : Delphine Chapuis-Schmitz. Jusqu’au 7 sept. Kunsthalle : Haim Steinbach. Jusqu’au 17 août. Kunsthaus (Heimpl.1) Cindy Shermann. Jusqu’au 14 sept. Les Torches de Prométhée. Jusqu’au 12 octobre. Landesmuseum : 1900-1914. Expédition Bonheur. Jusqu’au 13 juillet. Museum für Gestaltung (Austellungsstr. 60) Weingart Typography. Jusqu’au 28 sept. Museum Rietberg (Gablerstr. 15) L’univers du Maître Zen Sengai (1750-1837). Jusqu’au 10 août. Cargo ! - L’art contemporain suisse au Musée Rietberg. Du 12 juillet au 9 novembre. 75 exposition bex Les possibilités d’îles artistiques La triennale de sculptures en plein air Bex & Arts est toujours une belle promenade dans un site jardinier ceint d’un imposant cirque montagneux. 76 Sous la thématique problématique, non discutée et guère explicitée d’ « Emergences », la présente édition apparait un brin lacunaire dans un dialogue critique à mener avec notre contemporain et entre les œuvres. Des pièces ou installations parfois convenues, tel cet entrepôt de feuilles de tabac qui sèchent, clin d’œil à la culture vernaculaire du produit au 19e siècle. Pour certaines, elles n’ouvrent guère sur un vertige sensoriel et une déstabilisation perceptive du site et l’on pourrait aisément les voir transposées en d’autres lieux. Les travaux dus à Beat Lippert et Alexandre Joly, plasticiens déjà sollicités pour la précédente édition, constituent néanmoins d’heureuses propositions « insulaires » confirmant la qualité de leurs interventions in situ en 2011. Soit le cimetière de la propriétaire des lieux, Lady Louise Hope, reproduit en résine à l’échelle et interrogeant rituels et habitudes funéraires pour Lippert. Et une cacahuète géante dorée pris dans une gangue de givre ou de poussière pierreuse et voit ses flancs colonisés par de petits conifères factices. Il est cerné d’offrandes, créant de facto un champ de profondeur chromatique aux couleurs pop et flashy, au fil d’une vision sous psychotropes. Cette forme de paysage transvasé d’une culture à l’autre et jouant des coutures et raccords entre paysages d’ici et d’ailleurs à l’ère de la mondialisation est aussi une déclinaison d’un monde miniature imaginaire. Ce dernier mêle le pastiche, la copie, l’artificiel et le factice, marquant à leur tour l’environnement dans lequel vient s’inscrire ce microsite sacralisé et cultuel, modifiant notre rapport au monde et à la géographie, au temps et à l’histoire, aux notions d’original et de copie, d’art et de non art. « Le travail préparatoire d’installation s’est réalisé à l’image d’une maison de poupées ou à la manière d’un jeu enfantin avançant dans la mise en place des offrandes, fruits et fleurs. Je me suis amusé à construire l’asymétrie grâce aux pyramides de fruits artificiels. Mais aussi par les petits objets d’ornementation tels que les losanges en miroir ou les vaches en plastique peintes façon modèle réduit », explique l’artiste. Monolithes aux formes douces A l’image de Ma première et dernière pièce exposée à Bex, le travail de Beat Lippert est tissé de réactivations de l’antique ou de formes primitives, tel ce binôme de faux monolithes de 250 cm de hauteur semblant inachevés et fichés face à la Dent de Morcles. Ces monuments protohistoriques peuvent évoquent des vaisseaux dérivant sur la terre, en se remémorant que, pour les civilisations antiques, la mort n’était que passage, et l’ensevelissement au tombeau, le premier acte d’un long périple. « Ma réalisation reprend une des plus anciennes architectures, ainsi qu’une stratégie qui est utilisée en muséologie à des fins de conservation : la duplication. L’objet est mis question dans son existence même par sa duplication, le projetant dans temps contemporain », détaille le jeune homme. Il ajoute : « La culture mégalithique est l’un des socles fondateurs tant de la sculpture que de l’architecture. La thématique de l’émergence est suffisamment floue pour que cette réalisation puisse s’y rattacher. Le fait que j’ai moi-même peint ces fausses pierres permet un redéploiement vers le vrai menhir au caractère souvent lisse, témoignage de l’usure temporelle. » Ere des concepts Claudia Comte «HAHAHA» 2014 chez Joly, qui insuffle au site une narration singulière, comme un parc à thèmes reflétant l’histoire du colonialisme et de ses produits dérivés dont la cacahuète. A en croire l’un des textes génériques du catalogue, chaque œuvre cristalliserait l’émergence d’une « île » poétique et artistique. L’écrit est sous-tendu par des théories philosophiques passe-partout remixées pour l’occasion : rhizome deleuzien, bulles et sphères chez Sloterdijk, hétérotopie foucaldienne. Issue de « ce terreau mental magmatique et mycélique, ou encore prolifératoire », l’œuvre d’art émergerait par sa tonalité imaginaire et poétique, au cœur d’un « laboratoire infini de possibilités », en se plaçant notamment dans le sillage de Gaston Bachelard et sa Poétique de l’Espace. Cela, on pourrait le dire, plus simplement, de nombreuses pièces présentées au sein d’expositions collectives. Temple importé et réinterprété Bertrand Tappolet Au sein de la cabane du chasseur du Parc Szilassy, Alexandre Joly a installé aujourd’hui une vache couchée sur le flanc et taxidermisée, comme au cœur d’un lieu cultuel indien. Symbole maternel, la vache est sacrée en Inde, et encore plus au Rajasthan, où Krishna, dieu populaire, est son protecteur, d’où le respect qui l’entoure. Sauf que l’animal est comme a c t Bex & Arts. Parc de Szilassy, Bex, jusqu’au 5 octobre. Rens.: www.bexarts.ch u a l i t é SAISON 2014-15 UNE PLUIE D’ÉTOILES BILLETTERIE WWW.OPERA-LAUSANNE.CH T 021 315 40 20 SUIVEZ-NOUS SUR exposition Marie-Antoinette Gorret ; à Sion La Ferme-Asile présente une installation du Collectif-fact sur la Place Maurice Zermatten ; à Brig la Kunstverien Oberwallis présente au Stockalperschloss une installation de Daniel Bräg. On conseille vivement aux intéressés de consulter le site de la manifestation pour en découvrir toutes les facettes et, pourquoi pas, les associer à une belle course en plaine ou en altitude. en valais L’Art au cœur des Alpes Valaisannes Triennale 2014 Valais, jusqu’au 31 août 2014 / www.triennale2014.ch Au Centre d’art de Lens, Surréalisme et Arts primitifs Cet été les arts sont à l’honneur en Valais. Une série de manifestations démarre à la mi-juin ; de Monthey à Brig, en passant par Sierre, Lens, Sion, le Val de Bagne, Fully ou Saxon, la mobilisation est générale, révélant l’intérêt croissant des organisateurs culturels et du public pour l’art Triennale d’art contemporain 78 La troisième triennale d’art contemporain du valais se déroule du 14 juin au 31 août. Elle constitue, depuis sa création en 2007 par l’association Label’Art, un événement phare dont le but est de promouvoir l’art contemporain en Valais. Le projet se compose de deux volets, le premier repose sur un format d’exposition associant quatre sites d’exception et quatre curateurs extérieurs réputés qui proposent des interventions artistiques d’envergure nationale et internationale : Raffael Dörig, directeur du Kunsthaus Langenthal, est le curateur de la Belle Usine de Fully ; Jean-Paul Felley et Olivier Kaeser, co-directeurs du Centre culturel suisse à Paris, investissent le Barrage de Mauvoisin et le Musée de Bagnes; Heinrich Gartentor, président de Visarte Suisse et artiste, a carte blanche pour le site de Tourtemagne (aérodrome et village) ; Helen Hirsch, directrice du Musée des beaux-arts de Thoune, prend en charge l’ancien Pénitencier de Sion. Pour le second volet, une quinzaine de lieux et d’espaces partenaires situés à travers le canton offre expositions, débats, performances ou projections. Parmi eux signalons notamment : Olivier Estopey à la Galerie du Crochetan à Monthey; à la Fondation Louis Moret de Martigny se tient une exposition consacrée à Valentin Carron ; toujours à Martigny, au Manoir de la Ville, sont exposés des travaux de Fabrice Gygi, Anaïs Defago, Marine Julié, Agnès Ferla ; à Saxon, l’EPAC, organise une installation lumière et son de Innyang E.H. Low; au Château Pascal Seiler, Sans Titre, 2012 de Réchy Les Arts Pluriels Polyester, 180 x 110 x 80 cm. Musée d’art, Sion, inv. BA 3324 © Musées cantonaux du montent une installation de Valais, Sion, Michel Martinez a c t Implanté depuis décembre 2013 sur le site du Plateau de MontanaCran, le nouveau Centre d’art de Lens, Fondation Pierre Arnaud, s’intègre idéalement au panorama du lac voisin et des Alpes environnantes. Conçu et construit en hommage à l’entrepreneur et collectionneur Pierre Arnaud, le bâtiment est doté d’une architecture résolument contemporaine et développe quelque 1000 m2 de surface d’exposition. La programmation est établie pour cinq ans par un comité de pilotage artistique et scientifique, elle développe une série d’expositions d’hiver et d’été qui entendent mettre en relief la peinture suisse dans un contexte européen ou de faire dialoguer l’art occidental avec des cultures non-européennes. Après les deux premières expositions consacrées au divisionnisme et au réalisme, l’exposition de l’été 2014 aborde l’univers surréaliste en lien avec les arts primitifs. Les œuvres d’une cinquantaine d’artiste surréalistes seront confrontées à des pièces et objets provenant notamment de peuples et civilisations d’Alaska, du Canada, du Mexique, d’Afrique, d’Océanie ou Yves Laloy (1920-1999) «Les petits pois sont verts … les petits poissons rouges», 1959 © Musée des beaux-arts de Rennes; 2014, Prolitteris Zurich d’Insulinde. L’intérêt des surréalistes pour les arts extra-européens constitue un thème connu et déjà traité dans de nombreuses expositions, aussi les commissaires seront-ils, eux aussi, confrontés au défi de proposer un angle critique et muséographique original à cette problématique récurrente. Ils devront aussi jouer finement avec les cimaises modulables qui caractérisent l’espace, un système d’accrochage labyrinthique et peu apte à valoriser les spécificités esthétiques et thématiques des œuvres mises en regard. Pour ceux qui ne connaissent pas encore ce lieu, on conseillera de compléter la visite par une pause gastronomique à L’Indigo, le restaurant du musée, pour déguster les spécialités du jeune Chef Mathieu Moreau, tout en contemplant le majestueux paysage alpestre. Surréalisme et Arts primitifs, Centre d’art de Lens, jusqu’au 5 octobre 2014 u a l i t é exposition Le Musée d’art de Sion Situé au cœur de la vieille ville, l’institution entièrement restructurée et modernisée a fêté sa réouverture au public en 2007. Les collections ont été augmentées et redéployées dans les deux châteaux du Vidomnat et de la Majorie qui bénéficient d’une vue spectaculaire sur la cité sédunoise. La présentation des œuvres s’organise désormais au fil d’une quinzaine de salles, selon la chronologie artistique et les grandes orientations de la collection. Les premières accueillent des œuvres majeures de peintres qui, comme Caspar Wolf, François Diday, Raphy Dallève, Edouard Vallet, Ernest Biéler, Marguerite Burnat-Provins, René Auberjonois, ou Oskar Kokoschka, ont représenté le Valais et ses habitants entre les 18ème et 20ème siècle. Un second cycle illustre l’épanouissement de l’abstraction avec des artistes actifs dans la seconde moitié du 20ème siècle tels Charles Rollier, Angel Duarte, Léo Andenmatten, Gustave Cerutti, Suzanne Auber, Gottfried Tritten, Bernard Luginbuhl. Enfin, la dernière étape du parcours muséal célèbre l’art contemporain de ces vingt dernières années avec des artistes suisses liés au Valais mais aussi des créateurs de l’extérieur explorant et revisitant le genre du paysage alpestre, parmi eux Olivier Estopey, PierreAlain Zuber, Marina Abramovic, Balthasar Burkhard, Tomas Ruff, Yan Duyvendack, Gilles Porret, Maria Ceppi, Thomas Flechtner. L’ouverture à la création récente permet d’établir une belle continuité de la collection comme de souligner la permanence et l’universalité du thème de la montagne. Le relookage du musée lui fournit désormais une totale fonctionnalité et une indéniable touche contemporaine tout en préservant ses caractéristiques de forteresse moyenâgeuse. A signaler que dans le cadre de la Triennale 2014 Valais, le Musée d’art présente du 14 juin au 23 novembre 2014, un accrochage intitulé Métamorphismes réunissant une sélection d’œuvres signées notamment par Anne Blanchet, Latifa Echakhch, Daniel Frank, Martina Gmür, Yann Gross, Gilles Porret, Pascal Seiler et Andrea Wolfensberger. Ici le concept géologique de « métamorphisme » se voit transposé dans un musée d’art, permettant d’ironiser sur l’ajout d’un nouveau « isme » à l’histoire de l’art. Musée d’art de Sion, Place de la Majorie. Ouverture ma-di :11h-17h Françoise-Hélène Brou Édouard Vallet (1876-1929) «Procession de pénitents blancs à Ayent», 1911 huile sur toile, 171x166 cm. Musée d’art du Valais, Sion © Musées cantonaux du Valais, Sion, H. Preisig a c t u a l Daniela Schönbächler, Installation (Enigma), 2014 Kunsthalle, Luzern. Photo: Lorenz Ehrismann Kunsthalle de Lucerne : « Obscure Transparency » Daniela Schönbächler et Maya Vonmoos La Kunsthalle de Lucerne accueille deux artistes suisses, Daniela Schönbächler et Maya Vonmoos, dont les univers visuel et plastique se fondent sur des médiums aussi différents que le verre et l’art numérique. A cette occasion, les créatrices soulèvent une série d’interrogations paradoxales sur le concept très discuté actuellement de la transparence. Dans le domaine des idées, la question de la transparence a exprimé pendant longtemps des valeurs positives, comme celles de qualité, de vérité, de confiance, le moyen de faire barrage à toutes sortes d’abus et de corruptions. Or l’affaire Edward Snowden (ancien consultant de l'agence américaine de sécurité nationale (NSA), a montré qu’elle s’était transformée en un instrument de contrôle économique, social et politique. Ce scandale s'inscrit d’ailleurs dans un contexte où des révélations de même nature à propos de groupes high-tech tels que Google, Facebook, Yayoo, Microsoft, pour ne citer qu’eux, se succèdent à un rythme rapide. Nous avons donc acquis la certitude que nous vivons dans une société de cybersurveillance, de capture, de stockage et de commercialisation frauduleuse de données, brouillant dangereusement les frontières entre sphère publique et privée. Pour illustrer ces dérives, Daniela Schönbächler a créé une installation de panneaux de verre qui circonscrit un vaste espace clos où le spectateur ne peut accéder que par le regard. Composé de trois « chambres », le dispositif architectonique souligne l’ambivalence du concept de transparence par le fait qu’il se révèle à la fois obstacle, mur ou frontière matérielle, tout en laissant la vision et l’imagination se projeter librement dans ces espaces. Trois textes brefs inscrits sur les murs, intitulés OBSERVE / SURVEY / CONTROL, connotent le propos de l’exposition via le code linguistique. Une bande son complète le processus, celle-ci fait résonner dans ces cloisons vitrées une voix féminine qui scande et vocalise les écritures murales, bruits de pas, chants d’oiseaux ajoutent quelques accents corporels et naturalistes dans cet environnement dématérialisé. Maya Vonmoos s’exprime avec l’art numérique pour relayer la duplicité du discours de la « transparence ». Des images digitales de grand format et une installation vidéo 3D créent un espace d’immersion virtuel qui nous plonge dans l’ambivalence des manipulations technologiques où l’homme devient tour à tour spectateur et acteur, contrôleur et contrôlé, perméable à toutes les métamorphoses. Au gré d’incessants réagencements, le tourbillon vertigineux d’images organisé par l’artiste compose un univers mosaïque où couleurs et motifs géométriques pixélisés électrisent la vision, déjouent sans cesse la saisie du temps et des cohérences formelles. Françoise-Hélène Brou Kunsthalle de Lucerne, jusqu’au 20 juillet 2014. i t é 79 exposition musée de l’élysée, lausanne Luc Chessex CCCC, comme Castro, Coca, Che, Cherchez la femme. On se souvient peut-être que le photographe vaudois Luc Chessex, né en 1936 à Lausanne, partit pour Cuba en 1961, deux ans après avoir terminé son école de photographie. Captivé par l'expérience révolutionnaire, mais tentant de garder une distance critique, il vécut 9 ans dans l'île, puis 5 ans en Amérique latine, comme membre de Prensa Latina, et éditeur de photo pour la revue Cuba International, entre autres. 80 L'exposition présente de nombreux tirages originaux en noir et blanc et quelques publications. Castro d'abord : en juxtaposant d'immenses portraits du Lider Maximo, portés par des foules de travailleurs, surplombant les clients d'une gargote, Chessex suggère que la hauteur des idéaux n'a peut-être pas autant transformé la vie quotidienne du peuple que le slogan Peuple, révolution et Fidel sont une même chose l'annonçait. Coca et Che ensuite. A la mort du Che, le gouvernement cubain tenta de retrouver sa dépouille. Chessex entreprit une enquête photographique sur la présence iconique du Che, la retrouvant régulièrement confrontée, ironie du sort, à des publicités pour la boisson brune symbole de l'impérialisme américain. Cherchez la femme enfin: la femme cubaine bien entendu; l'exposition fut présentée à La Havanne en 1966. Elle souligne et met en cause des images souvent sous-exposées afin que la peau des femmes paraisse plus blanche, photos des studios, portraits conformistes colorisés à la main, la femme artificielle de l'esthétique des studios, en regard de femmes travailleuses, de femmes aux rondeurs joyeusement soulignées par leurs habits. Cette série questionnant l'image culturelle de la femme, dénonçant le photomensonge, n'a malheureusement rien perdu de son actualité malgré quelques variantes aujourd'hui. filer dans la salle du sous-sol pour découvrir le film que Claude Champion a créé avec les 1325 clichés du thème Quand il n'y a plus d'Eldorado. En 1980, plusieurs pays d'Amérique latine ont succombé à la dictature, l'époque est noire et semble sans espoir pour les mineurs de Bolivie, les paysans sans titre de propriété, les travailleurs, les responsables syndicaux assassinés... Avec respect, empathie, soutenu par un texte de Jacques Pilet autour des nombreux témoignages recueillis, débutant par l'évocation historique de la vie de Toussaint Louverture, avec une temporalité propre à l'époque, le film permet un vertigineux retour en arrière sur ces années-là. Si Chessex fut réexpédié de Cuba en 1975 en tant que personne indésirable, une réconciliation vint en 2011: la photothèque de La Havanne exposa alors une quarantaine de ses photos d'Amérique Latine, lui reconnaissant une influence sur toute une génération de photographes cubains. Anonymes En parallèle, les anonymes : le Musée donne à voir un certain nombre de photos de sa collection dont on ne connaît pas l'auteur, insistant sur l'importance de la photographie vernaculaire déjà relevée par les Surréalistes. Luc Chessex, La Havane, 1963 © Luc Chessex/Collection Musée de l’Elysée Une photo sans indication stimule notre imagination, la poussant à échafauder des possibles et construire des histoires. Ainsi cette photo pourrait être présentée comme celle de l'actrice Selma Simpson, sur le tournage All about Eve de Cukor ; ou encore celle de l'actrice Lana Yellow, sur le tournage de... ; ou encore celle de l'épouse du milliardaire Josué Thomson, juste avant sa mystérieuse disparition" L'absence de commentaire fait s'ouvrir un champ de possibles. Enfin, le Musée expose le travail de Mathieu Gafsou à propos de la scène de la drogue à Lausanne. Catherine Graf Luc Chessex, CCCC, Anonymes, Musée de l'Elysée, Lausanne, jusqu'au 24 août 2014 Retour en arrière Toujours à propos du travail de Chessex, il serait sans doute judicieux, après les photos autour de Castro, de Luc Chessex, Guayaquil, Equateur, 1971 © Luc Chessex/Collection Fondation A Stichting a c t u a l i t é fo rum - m eyrin.c h forum-meyrin.ch Théâtre Forum Meyrin, Place des Cinq-Continents Meyrin, Genève T h é â tre F orum M ey r i n , P lace d es C in q- C o ntin e nts 11,, 11217 2 17 M ey r i n , G e n ève Photo P hoto © F Francis ra n c i s T Traunig ra u n i g a r maison européenne de la photographie Diversité Les expositions proposées par la Maison européenne de la photographie invitent à la réflexion, en nous dévoilant des clichés d’un monde ‘d’ailleurs’ qui se révèle au visiteur dans toute sa diversité, sans pathos ou romantisme. Françoise Huguier : « Pince-moi, je rêve » Les appartements communautaires. Nus dans la cuisine, Saint Pétersbourg, Russie, 2005 © Françoise Huguier / Agence VU’ 82 L’exposition consacrée à Françoise Huguier nous montre avant tout le travail d’une grande voyageuse qui nous entraîne dans une collection d’images glanées lors de ses différents reportages : traversée de l’Afrique, la Sibérie polaire, la mode et la haute couture, les nonnes en Colombie, l’Asie du Sud-Est et sa jeunesse d’aujourd’hui. L’ accrochage qui en résulte est hétéroclite par la différence des mondes dans lesquels la photographe s’implique. Le parcours commence par “J’avais 8 ans”, évocation de l’histoire de la fin de la colonisation en Indochine par l’intermédiaire de l’enfance de la photographe, fille de planteur au Cambodge, enlevée en 1950 et prisonnière du Viet-Minh pendant plusieurs mois. Elle décrit décrit cet épisode de sa vie d’enfant comme élément moteur de sa carrière de reporter. Une autre salle nous montre un premier travail en noir et blanc réalisé en Afrique où, en 1989, elle voyage de Dakar à Djibouti sur les pas de Michel Leiris, et publie un premier ouvrage Sur les traces de L’Afrique fantôme. Plus tard, toujours passionnée par l’ Afrique, elle s’introduit dans les chambres de femmes au Burkina et au Mali dans une recherche intimiste sur leur sort (“Secrètes”). En 2001, elle décide de passer plusieurs années à Saint-Pétersbourg pour travailler sur les appartements communautaires. Un livre sur ce travail intitulé Kommounalki sort chez Actes Sud en 2008, de même qu’un film dans lequel les habitants de ces lieux parlent de leurs destins passés, actuels et futurs… malheureusement l’accrochage avec quelques images seulement est terriblement réducteur par rapport à l’ensemble de ce travail. Même remarque pour la suite de l’exposition: après quelques photos de mode et de haute couture, une série sur des nonnes en Colombie, on entre dans salle intitulée “Asie du Sud-Est”, qui, en dépit d’ une présentation à l’entrée fort pédagogique, ne présente au visiteur que deux séries, certes spectaculaires par leurs couleurs kitsch. L’une, un alignement de portraits frontaux et posés de femmes musulmanes, montrant les Hijab”chics à Bangkok, Singapour, Kuala Lumpur et Bandung. L’autre, lui faisant face, réalisée au Japon, portraits de jeunes posant dans des lieux préposés au sexe a c t i s et son commerce, mettant en évidence l’extravagance de l’apparence, indispensable à cette fonction. Si cette exposition se veut une rétrospective du travail de Françoise Huguier on s’attend à une ligne et une constante visuelle qui malheureusement ne se trouvent pas dans la succession des thèmes. Dans ses reportages, comme si l’auteur faisait primer le sujet et sa démonstration sur l’originalité de l’image, celle-ci, prise hors de son contexte, ne se suffit pas à elle-même. En conclusion, l’accrochage ne met pas en évidence l’importance du travail réalisé. Marie-Paule Nègre : « Mine de rien » Inscrite dans la vraie et grande traditions du reportage, Marie-Paule Nègre se situe parmi les photographes pratiquant le « moment décisif » , images prises sur le vif pour mieux saisir la vie de ses sujets. Ses propos s’attaquent aux problèmes de société et sa démarche est celle d’une « photographe concernée » Dans cette ligne, elle s’est attelée de façon très approfondie, mais sans pathos ou misérabilisme, au problème des « nouveaux pauvres ». Ce travail, s’échelonnant sur plus de dix ans, lui permet de s’insérer au milieu de « ces gens ordinaires », frappés par la perte de leur emploi et subissant la déchéance matérielle qui s’ensuit et dans laquelle il tombent petit à petit. Les images qui décrivent ce schème, d’apparence Corps et âmes, festival du vent, Calvi, 1995 © Marie-Paule Nègre p banales, sont très riches en détails qui en disent long sur un univers dont la photographe a su passer la porte : celui des logis précaires. L’accrochage de cette série nous présente de façon très convaincante la quête de sa vision : cadres plus parlants que les mots qui pourraient les décrire. Même démarche et mêmes résultats avec ses documents déplorant l’excision (Burkina Faso), ou encore suivant la vie de petites filles interdites d’école (Rajasthan). Un autre secteur nous montre une démarche purement visuelle, sur plus de trente ans, une exploration d’images aquatiques, prises sous l’eau : abstractions créée par les jeux de lumière, les reflets, perte de la réalité des perceptions. Dans une autre salle, nous sommes confrontés à un autre travail, lui aussi sur un grand laps de temps et avec consistance : portraits d’artistes contemporains dans leurs ateliers, commandes de l’Hôtel Drouot pour ses catalogues. Sur plus de 150 prises de vues, présentées en vidéo pour la plupart, on réalise la démarche chaque fois réfléchie de montrer en un seul cadre, l’atelier, le travail et le portrait de l’artiste. Cela aussi sur un grand laps de temps, mais avec consistance. En définitive, cette exposition, à travers ses différentes facettes, montre à quel point la poursuite d’une ligne droite dans sa démarche sert le message du photographe. Christine Pictet Jusqu’au 31 août 2014 u a l i t é p a r i s comédie française Lucrèce Borgia « Le masque d’une femme est sacré comme la face d’un homme », s’exclame Gennaro en défendant à ses camarades de démasquer la femme qui s’intéresse à lui. « Il faut d’abord que la femme soit une femme, Gennaro ! » Cette femme est Lucrèce Borgia, un monstre donc, ayant commis crime sur crime, inceste et adultère ; mais cette femme est également un homme dans la mise en scène de Denis Podalydès, car c’est Guillaume Gallienne qui l’interprète. Le choix de Guillaume Gallienne pour interpréter l’héroïne du drame ne semble pas dicté uniquement par la volonté abstraite de revisiter la pièce de Victor Hugo en faisant du travestissement, thème important de la pièce, un principe de mise en scène. Ce qui frappe d’abord, c’est moins le succès d’une telle décision en termes d’intelligibilité que, tout simplement, la crédibilité parfaite du comédien, qui parvient à incarner Lucrèce merveilleusement. La métamorphose est magistrale et modeste en même temps ; disons qu’elle est magistrale précisément parce qu’elle semble naturelle, et ne relève aucunement d’une performance d’acteur dont l’excellence serait complaisamment signalée par une couverture à soi tirée. Il y a là, loin de toute forme d’esbroufe, un geste audacieux et original de la part de Denis Podalydès, une hypothèse stimulante selon laquelle un rôle masculin ou féminin pourrait être confié à un ou une interprète, indépendamment de son sexe ; seule ferait loi sa capacité à entrer dans la peau du personnage de manière suffisamment convaincante. Dona Lucrezia en clair-obscur De manière didactique, on voit Guillaume Gallienne lors de sa première apparition enfiler un à un les vêtements de Lucrèce ; c’est pourtant à son maintien, empreint de dignité et de royale langueur, et à sa voix grave et veloutée qu’il doit d’entrer dans la peau de son personnage, dont il sait faire affleurer la monstruosité, vociférant alors d’une voix rauque et menaçante lors des scènes où Lucrèce s’emporte et fulmine, oubliant sa résolution de s’amender. Est-ce alors la nature profonde de l’héroïne qui parle lorsqu’elle s’oublie ainsi, le monstre qu’elle est restée ? Ou est-ce la volonté de se repentir pour mériter l’amour de son fils qui est monstrueuse chez une femme vouée au crime, comme le prétend son complice Gubetta ? Ne menace-t-elle pas elle-même son mari en lui disant : « Vous oubliez qui je suis » ? Lucrèce Borgia a beau déclarer n’être « pas née pour faire le mal » et avoir été entraînée par « l’exemple de sa famille », elle est sans cesse rattrapée, malgré son intention de racheter ses méfaits, par l’habitude du crime, finissant par mettre à mort les camarades de son fils après avoir sauvé de l’empoisonnement celui-ci dans un élan d’amour maternel. Le mal est à l’image du manteau de Jean Borgia, assassiné et jeté dans le Tibre, que l’on essaie d’enfoncer à coups de pierres lorsqu’il refait surface. C’est ce mélange, cette fondamentale impureté que Gallienne rend sensible. On regrettera toutefois qu’il s’arrête en chemin et n’ose pas s’aventurer dans les sentiers du sublime hugolien : Lucrèce Borgia est un monstre et une mère, et sans tomber dans le pathos on pouvait rendre l’amour de celleci plus expressif, plus vibrant. Hugo n’écrit-il pas dans sa préface : « dans votre monstre mettez une mère ; et le monstre intéressera, et le monstre fera a c t u a l «Lucrèce Borgia» © Christophe Raynaud de Lage pleurer, et cette créature qui faisait peur fera pitié, et cette âme difforme deviendra presque belle à vos yeux. » Le jeu de Gallienne, qui fait merveille lors des scènes où Lucrèce étincelle d’une noire clarté, se révèle un peu terne, trop retenu, trop détaché lorsqu’elle est confrontée à son fils. On objectera qu’elle se contient et craint de se dévoiler ; il n’empêche, on aimerait parfois voir à Gallienne plus d’allant, d’élan et d’émoi. Un bémol Il faut dire à ce propos qu’entre Gallienne et Suliane Brahim, la comédienne interprétant Gennaro, l’alchimie rechigne à se produire. Le duo qu’ils forment fonctionne dans l’ensemble, mais la sauce ne prend jamais vraiment. L’explication en est aisée. Ce qui apparaissait, dans le cas de Gallienne, comme un choix pleinement justifié, par le prodige d’une incarnation saisissante et par les effets de sens ainsi générés, en parfaite conformité avec le texte et le personnage, semble dans le cas de Suliane Brahim relever du procédé, ou d’une soumission à un principe de symétrie que la pièce ne justifie pas. Si Lucrèce est impure, Gennaro est l’incarnation de la pureté ; tout juste pourrait-on soutenir qu’il ne sait pas qui il est, méconnaissant son origine, laquelle l’emplira d’horreur lorsqu’elle lui sera révélée. Il n’en reste pas moins que tout au long du drame, Gennaro est un personnage tout d’une pièce, sans double fond et dépourvu d’ambiguïté. Si l’on ajoute à cela que c’est un capitaine de vingt ans, on comprendra facilement que Suliane Brahim, petit bout de femme à la voix flutée, ne fasse pas vraiment l’affaire. Son jeu n’est pas en cause, et la comédienne s’en sort même très bien, bombant le torse et haussant la voix, mais c’est la décision même de confier le rôle de Gennaro à une femme qui paraît gratuite et injustifiée. La pièce n’en demeure pas moins d’excellente tenue, et il faut mentionner la distribution remarquable, de Christian Hecq campant un Gubetta maléfique et grotesque à Georgia Scalliet dans un petit rôle de princesse frivole qui lui va à ravir, en passant par Éric Ruf en souverain s’efforçant de contenir fébrilement sa jalousie avant de triompher de sa femme en se vengeant, inflexible. Ce dernier signe également la scénographie, élégante au même titre que les costumes de Christian Lacroix, tout cela étant plongé dans un éclairage subtil recréant l’atmosphère d’ombre et de lumière voulue par Hugo pour son drame. Enlevée et élégante, intelligente et claire, la mise en scène de Denis Podalydès est une vraie réussite ! Julien Roche Lucrèce Borgia. Comédie-Française, Paris. Jusqu’au 20 juillet 2014 i t é 83 p a r i s opéra Poppée paupérisée Le Couronnement de Poppée s’installe à Garnier, dans la conception de Robert Wilson en provenance de la Scala de Milan. Une esthétique habituelle au metteur en scène, entre magnifiques images et nudité du plateau, avec une distribution vocale de choix. 84 Opéra Garnier : «Le couronnement de Poppée» avec Karine Deshayes (Poppea) et Jeremy Ovenden (Nerone). Crédit : Opéra national de Paris / Andrea Messana Wilson fait donc du Wilson. C’est un peu une déception… Même si l’on goûte toujours la précision des gestes hiératiques, les postures allégoriques et les lumières savantes. Ce qui serait presque en contradiction avec l’opéra de Monteverdi et consorts (Cavalli, Sacrati, Mannelli, Ferrari…), qui tiendrait plutôt du spectacle de tréteaux. Mais l’adaptation à une grande scène (Scala et Garnier) induit ses conséquences… Qui paradoxalement conduisent à gommer l’anecdote au profit du symbole. La réalisation musicale n’en est pas moins de circonstance, avec la poignée d’instruments du Concerto Italiano sous la direction appliquée de son chef titulaire, Rinaldo Alessandrini. Les voix pareillement, qui réunissent un beau bouquet baroqueux. Jeremy Ovenden remporte le meilleur, Néron éminemment parlant à travers des notes joliment filées. Mais Karine Deshayes (Poppea), Gaëlle Arquez, Amel Brahim-Djelloul, Manuel Nuñez Camelino, Monica Baceli, lui donnent une fière réplique. Pour une soirée lissée et sans accrocs, musique et mise en scène associées. a Traviata traditionnelle La nouvelle production de La Traviata à la Bastille est neuve surtout pour sa signature, celle de Benoît Jacquot, cinéaste reconnu, davantage que pour sa conception. Mais l’en- semble peut séduire, à en juger notamment par la réception du public. Il s’agit donc d’une vision attendue en quelque sorte, avec décors et costumes dans le style parisien du XIXe siècle, comme le veut la trame et comme il est de tradition habituelle pour l’opéra le plus fameux de Verdi. La différence viendrait de la dimension des éléments de décor : un immense lit à baldaquin d’apparat et une gigantesque cour d’hôtel particulier, avec escalier monumental et balustres, plantés sur plateau vide pour le reste et à l’échelle de son ampleur. De ce fait, les situations intimes se retrouvent quelque peu perdues, quand celles de foules profitent de cette magnitude. Comme dans le cas du second tableau du deuxième acte, avec son ballet de gitanes (en travestis !) et toreros (de théâtre, et prescrits par le livret) savoureusement décalés. Bien joué sur ce plan ! Côté chant, les conditions sont du même ordre, qui nécessitent de s’adapter à l’espace (la dernière Traviata de l’Opéra de Paris, en 2007, prenait place à Garnier, plus approprié à tous égards pour cet opéra). Diana Dalmau incarne une Violetta expressive et de beau legato, mais doit parfois forcer son émission. Ce n’est pas exactement le problème de Francesco Demuro, qui pour sa part n’hésite pas à transmettre un Alfredo à pleine voix (mais pas toujours nuancé). Ni non plus de Ludovic Tézier, qui ajoute, lui, la sécurité de sa projection pour un Giorgio de prestige. L’orchestre distille néanmoins des raffinements, en sus d’un équilibre impeccable (particulièrement dans son dialogue avec les chœurs), sachant que la direction revient à Daniel Oren, spécialiste comme peu du réper- Opéra Bastille : «La Traviata» © Opéra national de Paris / Elisa Haberer c t u a l i t é p a r i s toire lyrique italien. Au final, plutôt une bonne soirée, en dépit du fait qu’elle révolutionne rien. Tanti Tancredi Tancredi clôt la série des représentations d’opéras de Rossini au Théâtre des ChampsÉlysées. Une réussite partagée. Tout repose, on l’imagine, sur les deux rôles principaux, Tancredi (personnage masculin travesti) et Amenaide, le contralto et la soprano rivalisant de volutes belcantistes. La seconde échoit à Patrizia Ciofi, au sommet de sa forme vocale, avec un legato sans fin… mais aussi un petit microphone en forme de perle au coin de l’oreille (comme, au reste, pour son ténor de partenaire). Ce qui explique qu’après l’entracte, le nez sur une table et perdue dans ses cheveux, elle n’en continue pas moins à dispenser la même aisée projection vocale ! Nos louanges seront donc mieux sans réserve pour l’autre diva en compétition, Marie-Nicole Lemieux, son alto et sa dextérité éblouissants. Excellente intervention, comme toujours (décidément !), du Chœur du Théâtre des Champs-Élysées. L’Orchestre philharmonique de Radio France n’est pas en reste d’expression, sous la baguette méticuleusement attentive d’Enrique Mazzola. Quant à la mise en scène de Jacques Osinski, elle se contente d’une réactualisation à notre époque (pourquoi pas ? mais déjà vue mille fois), assez bien réglée, malgré des moments à vide où les participants restent bras ballants en attendant la fin d’air à colorature de l’une des deux héroïnes Italienne conquérante Autre Rossini au Théâtre des Champs-Élysées. L’Italienne à Alger, mais de concert cette Théâtre des Champs-Elysées : «Tancredi» Tancrède. ©Vincent Pontet-Wikispectacle fois, provoque un délire d’applaudissements. Marie-Nicole Lemieux est toujours au mieux de ses éclats, Isabella pétulante, y compris dans ses minauderies (parfois excessives) et son décolleté plongeant, dispensée à travers une ornementation sans faille, un alto profond et une parfaite égalité de tessiture. Ses partenaires vocaux ne partagent pas la même renommée, mais s’acquittent avec justesse et parfois brio de leurs parties. D’Antonino Siragusa, Lindoro qui met une belle énergie à défaut de toujours subtilité, à Nicolas Cavallier, Mustafà bien campé sans être nécessairement dextre, à Omo Bello, juvénile et fraîche Elvira, jusqu’aux crédibles Nigel Smith, Nicolas Rigas ou Sophie van Woestyne. Sans surprise, finalement. La raison de l’impact saisissant de la soirée est à rechercher ailleurs ! Dans la verve irrésistible de l’opéra de Rossini, quand elle est comme ici transmise magistrale- ment. Un opéra de chanteurs ? Non, un opéra de chef ! Nous parlons de Roger Norrington. Il ne faut pas se fier à sa gestique économe, si peu effet d’estrade, sinon au résultat : la franchise des attaques, les équilibres impeccables, la dynamique impressionnante entre pianissimi imperceptibles et forte explosifs. Mais aussi les détails ciselés, comme ces pizzicatos fluides et néanmoins nets, ou cette flûte délicieusement à découvert, ou ces cors lisses (dans les airs d’entrée du ténor et de l’héroïne)… Il y a un son Norrington, immédiatement caractéristique, en l’espèce sans vibrato. Et l’Orchestre de chambre de Paris s’y plie avec aisance, comme les meilleures formations baroqueuses. Le Chœur Aedes répond d’une même voix, unitaire et percussif. Et dans ce bel élan d’ensemble, on n’omettra Ronald Schneider (omis par le programme de salle), expressif pianofortiste et complice régulier de Sir Roger. Ali Baba de luxe On pensait Lecocq (Charles) un sousOffenbach, un pâle faiseur d’opérettes à la chaîne. Il convient de reconsidérer nos avis, avec la résurrection d’Ali Baba (1887). L’œuvre est un divertissement, certes (d’après les Mille et une Nuits), mais bien tourné, avec souvent de belles inspirations musicales. Le style verserait plutôt du côté de l’opéra-comique que de l’opérette, et dans un traitement musical supérieur à Offenbach (dont Lecocq fut pourtant un suiveur, et pour reprendre notre référence). Il est vrai qu’à l’Opéra-Comique, le meilleur est mis au service de l’œuvre. À commencer par une louable reconstitution musicologique. Le plateau vocal réuni, quant à lui, n’appelle que des élo- Opéra Comique : «Ali Baba» © DR Pierre Grosbois a c t u a l i t é 85 p 86 a r i s trame d’une noirceur sans éclaircies, en l’occurrence celle de dissidents d’un pays totalitaire (imaginaire) qui dans leur tentative de trouver refuge sur un sol plus hospitalier se heurtent à une bureaucratie implacable et inhumaine. Il y a ainsi deux décors, se succédant : un intérieur de modeste logis, parmi des meubles de cuisine ; et la salle d’attente du consulat, dans l’espoir vain du visa Théâtre Roger-Barat d’Herblay : «Le Consul» espéré, avec son luxe froid ges dans sa parfaite adéquation, et tout particu- et ses pau-vres hères qui s’agglutinent sur des lièrement Tassis Christoyannis, Sophie Marin- sièges bien ordonnés. S’adjoignent quelques Degor, François Rougier et Philippe Talbot. Le projections de toile de fond, des lumières justes, chœur Accentus conjugue dextérité et subtilité, des costumes de tous les jours, des gestes et efficacement préparé qu’il est par Christophe mimiques d’une circonstance précise. Simple et Grapperon. L’Orchestre de l’Opéra de Rouen immédiatement parlant ! Le drame peut alors (qui coproduit le spectacle) est pareillement prendre corps, et la musique lui prêter son intensans reproche, sous la direction de Jean-Pierre sité. Menotti élit ici des atmosphères changeanHaeck. Magnifique réussite musicale d’ensem- tes, entre une orchestration qui se fait heurtée ou ble ! à mettre au compte d’un travail préparatoi- suave, et un chant qui de la déclamation évolue re léché. La mise en scène d’Alain Meunier en moments de véritable lyrisme. Une réussite, reste pour sa part dans l’esprit du divertisse- mais que l’on peut toutefois penser moins inspiment, en situation, plantant l’action dans un rée que Le Medium ou Le Téléphone du même émirat actuel du Golfe (et sa « grande surface », compositeur. Les douze (pas moins !) chanteurs avec sa société de consommation spécifique). solistes sont quasi idéalement distribués. On déplorera toutefois les baissers de rideaux à Signalons Valérie MacCarthy, d’un magnifique répétition, pour des changements de décors qui épanchement lyrique pour le rôle principal de n’ont pourtant rien d’imposants. Faiblesse Magda ; ou Philippe Brocard, baryton assuré, (manque de professionnalisme ? quand Béatrice Dupuy, mezzo de style et impayable quelques manipulations à vue auraient suffi) qui bureaucrate revêche, Ainhoa Zuazua Rubira, irrite, puis finit par alourdir une soirée toute de soprano épanouie, tout comme Louise Pingeot ; légèreté. ou Artavazd Sargsyan, qui ajoute à ses vertus de ténor ceux de prestidigitateur ; ou Nicolas Rigas, Agent de la police secrète plus vrai que nature. L’équilibre est parfait avec la fosse, presque à même le plateau, et un Orchestre Pasdeloup aux timbres aguerris, en dépit de la battue de meneur de chœur du jeune chef Iñaki Encina Oyón. Balcon et Matelot L’autre salle lyrique parisienne, à savoir le Théâtre de l’Athénée, propose le Balcon. Il s’agit d’un opéra de Peter Eötvös, d’après la pièce éponyme de Genet (qui aurait, au demeurant, plus ou moins renié son ouvrage), créé en 2002 et quelque peu révisé en 2009. À l’Athénée, on peut parler d’une autre révision, puisque s’adjoint une sonorisation non prévue par le compositeur (mais certainement avec son accord). Une spécialité, en quelque sorte, de l’ensemble le Balcon – la formation instrumentale, au nom en la circonstance tout indiqué ! Il en résulte un son indéterminé, global, dont on ne sait qui, des instrumentistes ou des chanteurs, le produit. Reconnaissons toutefois une balance sonore équilibrée. Les chanteurs sont donc, forcément, parfaits, de Rodrigo Ferreira, contreténor dans le rôle travesti d’Irma, à Shigeko Hata, Élise Chauvin, Laura Holm ou Jean-Claude Saragosse. Et les musiciens du Balcon, tout autant, sous direction de leur mentor Maxime Pascal. La mise en scène verse, elle, dans le joyeux délire, pour cette histoire située dans un bordel, avec profusion de fouets, cuirs, cagoules (y compris pour les musiciens !) et comportements sado-masochistes. Dans des lumières crues au sein de rares éléments de décor. Beau Consul exemplaire Le Théâtre Roger-Barat d’Herblay, en lointaine banlieue ouest de Paris, poursuit saison après saison un original parcours lyrique. Après Vanessa de Samuel Barber, création absolue en région parisienne il y a deux ans, puis l’an passé Zanetto et Abu Hassan, deux petits bijoux tout aussi méconnus de Mascagni et Weber, vient donc le tour du Consul, opéra des plus rares de Gian-Carlo Menotti. Ou plutôt The Consul, puisque l’opéra, créé en 1950 à Philadelphie puis New York, est ici présenté dans son livret original anglais de main même du compositeur. La mise en scène revient à Bérénice Collet, habituée du théâtre, qui avait déjà signé les précédentes productions lyriques mentionnées. Avec un égal talent. Mais dans ce cas pour une a Théâtre de l’Athénée : «Le Balcon» c t u a l i t é p travail de Damien Bigourdan ! Autre style, autre répertoire, toujours à L’Athénée : la Colombe de Gounod et le Pauvre Matelot de Milhaud. C’est un spectacle venu de l’Opéra du Rhin et de son Studio. Autant dire qu’il confronte de jeunes chanteurs, dont on ne peut qu’être ébahi par la maîtrise et l’aisance d’une Gaëlle Aix, d’une Kristina Bitenc et d’un Sunggoo Lee. La dizaine d’instrumentistes, puisés à l’Orchestre Lamoureux, aurait mérité quelques répétitions supplémentaires, que la direction vigilante de Claude Schnitzler ne parvient pas toujours à palier et qui ne saurait rendre pleine justice à l’inspiration complexe de Milhaud. D’où un sentiment d’inachevé, qui se corrigera certainement après la première. La mise en scène de Stéphane Vérité se fait un peu laborieuse, elle aussi, pour l’opéra-comique de première partie, difficile à défendre il est vrai a r i s Théâtre de l’Athénée : «La Colombe» © Stéphane Vérité avec son comique qui se fait attendre ; et mieux en phase avec l’humour noir du livret de Cocteau pour la seconde pièce (une femme dans l’attente de son époux de marin parti depuis quinze ans, et qui finit par le trucider quand il réapparaît enfin, sans l’avoir reconnu), avec ses personnages soudainement habités devant des projections cubistes (d’époque !). Mozart éternel La Messe en ut de Mozart, est restée inachevée. Jusqu’à ce qu’un musicologue s’avise, il y a dix ans, d’en reconstituer hypothétiquement les parties manquantes. C’est la version présentée par Roger Norrington à NotreDame de Paris. Confessons que les passages complétés n’atteignent pas au sublime des pages authentiquement de la plume du compositeur. N’est pas Mozart qui veut ! Mais avec un tel chef d’orchestre d’exception, le souffle galvanise l’Orchestre de chambre de Paris, la Maîtrise Notre-Dame et de bons chanteurs (dont la soprano Christina Landshamer). Théâtre de l’Athénée : «Le pauvre Matelot» © Stéphane Vérité À Caen : Rameau maître à danser C’est l’intitulé du spectacle réunissant Daphnis et Églé et la Naissance d’Osiris, deux brefs opéras-ballets de Rameau. Spectacle inauguré à Caen – en marge des commémorations du Débarquement ? – dans le tout neuf Manège de la Guérinière (un ancien manège équestre du XIXe siècle, restauré à usage de salle de spectacles et pourvu d’une prodigieuse acoustique), avant une tournée française et internationale. Le premier des deux ouvrages est ressuscité pour l’occasion, qui n’atteint toutefois a c t Pierre-René Serna pas l’inspiration musicale du second. C’est William Christie qui officie, grand retour de ce chef après quelques temps d’absence pour raisons de santé. Ses Arts Florissants, chœur et orchestre, sont à la fête, ainsi qu’une distribution vocale appropriée, dont Reinoud van Mechelen, Élodie Fonnard, Magali Léger et Arnaud Richard. La mise en scène revient à Sophie Daneman et la chorégraphie à Françoise Denieau, qui savent trouver un ton juste, entre reconstitution d’époque et tréteaux, sur un plateau vide sans autre décor qu’un petit rideau et deux caisses en bois. En phase avec les œuvres, et avec la destination itinérante de ce joli spectacle. P.-R. S. A Caen : «Rameau maître à danser» © Théâtre de Caen / Philippe Delval u a l i t é 87 p a r i s théâtre des gémeaux, sceaux opéra de paris Cendrillon Le Ballet de l’Opéra de Lyon présentait, du 22 au 25 mai sur la scène des Gémeaux, Cendrillon de Maguy Marin. Créée en 1985, c’est l’une des premières œuvres de la chorégraphe et l’un des fleurons de cette compagnie, excellente dans le répertoire du vingtième siècle. 88 Balanchine / Millepied Le programme proposé du 10 mai au 8 juin rassemblait Palais de Cristal de George Balanchine, fondateur du New York City Ballet, et Daphnis et Chloé de Benjamin Millepied, ancien principal dancer de cette compagnie et directeur de la danse de l’Opéra de Paris à partir de la saison prochaine. Si Maguy Marin suit le déroulé du conte de Charles Perrault et utilise la musique composée par Serge Prokoviev dans les années 40 pour le ballet du Kirov, elle place l’histoire dans le monde des jouets. Palais de Cristal a été créé par Chorégraphe et scénographe à la fois, elle dissimule les George Balanchine pour le Ballet de traits des danseurs derrière des masques de poupées en l’Opéra de Paris en 1947. Danseur mais celluloïd et leurs corps, dans des costumes rembourrés. aussi musicien, il chorégraphie la symLoin de désincarner les personnages, le principe leur phonie en ut majeur de George Bizet, donne une nouvelle identité et concentre l’expression - et redécouverte à l’époque, avec la volonté notre attention - dans les mouvements du corps. La gesque la danse épouse les mouvements tuelle est un mélange de réalisme et de mouvements acamusicaux afin que ce qui se passe sur démiques et contemporains. Il y a beaucoup de clins d’œil scène soit le miroir de la fosse. A l’origiaux grands classiques telle la scène où l’héroïne se languit ne, les décors conçus par la peintre pendue à son balai. Maguy Marin émaille sa chorégraphie Léonor Fini figurait un palais baroque, des gestes du quotidien et fait montre d’un talent de carisorte d’écrin pour la danse. Dans cette caturiste dans l’art de mettre en exergue la mesquinerie version, les décors ont disparu et les humaine, ici sur un ton drolatique même si angoissant parcostumes, somptueux, ont été dessinés fois, pour notre plus grand bonheur. Les décors et les par Christian Lacroix. Le ballet est comcostumes sont une véritable féerie, rappelant les jouets posé de quatre mouvements durant lesanciens en bois – carrousel, marionnette - mais aussi les quels solos, pas de deux et ensembles mannequins plus modernes avec épée lazer et guirlande s’enchaînent, et d’un final qui rassemble lumineuse. Si le fait de masquer les danseurs crée une tous les danseurs. Dans le premier, le sorte d’aA. Dupont et H. Moreau dans «Daphnis et Chloé», photo A Poupeney deuxième et le quatrième mouvements, nonymat, cela n’empêche pas de saluer Amandine Albisson, récemment nommée étoile, Marie-Agnès Gillot, très la performance d’Aurélie lyrique, et Nolwenn Daniel se distinguent par leur élégance et leur maîtriGaillard qui assure brillam- se, toutes trois lumineuses. Leurs partenaires, Mathieu Ganio, Karl ment le rôle-titre ainsi que Paquette et Emmanuel Thibault sont au diapason. Le troisième mouvecelle Mathieu Rouvière, son ment ne se joue pas dans la même cour avec Valentine Colasante et Pierreprince charmant. Les autres Arthur Raveau qui abordent leur rôle en force, sans nuance. Daphnis et Chloé est une commande de l’Opéra de Paris à Benjamin interprètes sont dans la même veine, totalement Millepied avec pour point de départ la musique de Maurice Ravel, cominvestis dans cette œuvre. Si posée en 1909 pour un ballet de Michel Fokine. Cette nouvelle version Cendrillon est un conte de conserve la structure narrative de la légende grecque : la découverte de l’afées pour enfants, Maguy mour par les deux héros et les épreuves qui s’ensuivent. La chorégraphie Marin en fait un ballet pour de Benjamin Millepied, néoclassique, se caractérise par une recherche de les petits mais aussi les la fluidité dans les mouvements et les portés. Ce style convient à merveille à la musique impressionniste de Maurice Ravel. Porté par Aurélie Dupont grands. «Cendrillon», photo J Roque de la Cruz Stéphanie Nègre et Hervé Moreau, les héros tout en retenue, le ballet est un rêve, émaillé des interventions piquantes d’Eleonora Abbagnato et Alessio Carbone, les La danse en juillet : La saison de l’Opéra de Paris s’achève avec Notre tentateurs. Les décors abstraits de Daniel Buren et les costumes de Holly Dame de Paris de Roland Petit, du 30 juin au 16 juillet. Cette série sera mar- Hones donnent une lumière contemporaine à l’histoire, la détachant de quée par les adieux à la scène du danseur étoile Nicolas Le Riche. Grand tout repère antique. Il ne reste que la force de l’amour des héros qui s’insrendez-vous annuel, les Étés de la danse se tiendront du 10 au 26 juillet au crit dans l’éternité. Stéphanie Nègre Théâtre du Chatelet et accueilleront le San Francisco Ballet. a c t u a l i t é p chronique des concerts Génies du romantisme Soirée de tous les superlatifs à la Salle Pleyel… Le pianiste Krystian Zimerman propose comme unique programme les redoutables trois dernières sonates de Beethoven. Il n'est pas donné au premier venu d'affronter par la face nord les opus 109, 110 et 111. Cette pierre angulaire du répertoire pour piano exige de l'interprète une dimension physique et mentale sans faille. A l'écoute, nul doute que Zimerman conjugue les deux paramètres avec une maestria prodigieuse. On est ici aux antipodes d'un Pollini ou d'un Richter et ceux qui chercheraient un Beethoven avec des lignes de force animées et des fulgurances athlétiques en seront pour leurs frais. L'élément percussif est mis au second plan, ce qui a pour tendance d'effacer le jeu des lignes et de l'architecture. On y gagne une attention accrue aux couleurs et aux timbres, un peu comme si le dernier Beethoven avait davantage à voir avec le Chopin ou le Debussy de la maturité. Jouant partition ouverte, Zimerman se pose en lecteur de musique plutôt qu'en interprète péremptoire. La salle ne lui tient pas rigueur pour ce détail peu spectaculaire qui le contraint à tourner les pages à des moments parfois délicats. les climats. L'ultime opus 111 déborde d'invention et de prouesse. A-t-on jamais entendu un allegro con brio aussi débridé et souverain ? On Krystian Zimerman A marquer d’une pierre blanche La sonate opus 109 est une merveille de sonorité et de timbres. L'adagio espressivo évolue dans une extraordinaire souplesse et liberté de tempo. Le traitement des notes de passage dans le prestissimo fournit une densité remarquable au mouvement. Rien d'inutilement débordant ou exagéré mais un équilibre serein et qui sait parler directement au cœur. L'opus 110 ne cherche pas à dissimuler les références à Bach et au contrepoint classique. L'austérité un peu feinte de ce toucher rectiligne dans le final ne doit pas rebuter car il appuie les contrastes et a c t u Joshua Bell frise la sortie de route à chaque tournant mais la barque file à bon port et le public exulte. L'absence de bis ne sera en rien une déception. Il faut savoir ne pas surajouter à un corpus déjà très riche pour une seule soirée. Ce récital est un moment à marquer d'une pierre blanche, un des derniers récitals de la saison avant le change- a l i t a r i s ment de salle et le grand déménagement vers la nouvelle Philharmonie de Paris. Moment-phare On célèbre au Théâtre des ChampsElysées le concert donné par Daniele Gatti à la tête du National de France. Pour l'occasion, les petits plats sont dans les grands, tant du côté de la programmation que des interprètes. La Musique funèbre de Witold Lutoslawski est l'occasion pour les pupitres de cordes de faire valoir leurs qualités de legato et la sensibilité des nuances dynamiques. Les couleurs naturelles de l'orchestre ne tirent pas artificiellement la pièce dans une direction trop romantisante, ce qui permet de conserver une justesse d'expression et une qualité d'émotion intactes. Moment-phare de cette première partie, le concerto pour violon de Sibelius trouve en Joshua Bell un interprète de haut rang, capable de faire oublier cette célébrissime partition et nous la faire découvrir comme au premier jour. L'introduction pianissimo ne verse jamais dans l'histrionisme pour souligner le caractère aérien de l'archet. Son Stradivarius a toute la puissance requise pour projeter les attaques du final et les multiplier en une série d'accents rebondissants. Le public se lève comme un seul homme pour offrir au violoniste américain le triomphe qu'il mérite. Mention spéciale à la 6e symphonie « Pathétique » de Tchaikovski qui occupe à elle seule toute la seconde partie. Daniele Gatti est ici pleinement dans son élément, refusant toute sensiblerie en optant pour une vision franche et décidée. Point de fatalité dans cette allégorie du destin qui frappe à la porte, les phrases ont l'aspérité des grands sentiments, exprimées dans un style parfait. Quel beau démenti aux tenants d'une interprétation authentiquement russe… L'Orchestre National de France était ce soir-là dans une forme éclatante ! David Verdier é 89 p r ATELIER (loc. 01.46.06.49.24) L’aide-mémoire de Jean-Claude Carrière - m.e.s. Ladislas Chollat avec Sandrine Bonnaire, Pascal Greggory - jusqu’au 5 juillet Reprise exceptionnelle : Savannah Bay & Le Square de Marguerite Duras - m.e.s. Didier Bezace - jusqu’au 5 juillet BOUFFES DU NORD (loc. 01.46.07.34.50) L'Annonce faite à Marie de Paul Claudel - m.e.s. Yves Beaunesne jusqu’au 19 juillet CARTOUCHERIE - THÉÂTRE DU SOLEIL (loc. 01.43.74.24.08) Macbeth de Shakespeare - m.e.s. Ariane Mnouchkine - jusqu’au 13 juillet COMÉDIE FRANÇAISE SALLE RICHELIEU (01.44.58.15.15) Phèdre de Racine - m.e.s. Michael Marmarinos - jusqu’au 15 juillet Le Misanthrope de Molière - m.e.s. Clément Hervieu-Léger - jusqu’au 17 juillet Le Malade imaginaire de Molière m.e.s. Claude Stratz - jusqu’au 20 juillet 90 a i s Lucrèce Borgia de Victor Hugo m.e.s. Denis Podalydès - jusqu’au 20 juillet. STUDIO-THÉÂTRE (01.44.58.98.98) Les Trois petits cochons de et m.e.s. Thomas Quillardet - jusqu’au 6 juillet VIEUX-COLOMBIER (01.44.39.87.00) Hernani de Victor Hugo - m.e.s. Nicolas Lormeau - jusqu’au 6 juillet FEUX DE LA RAMPE (01.42.46.26.19) Le Bel Indifférent de Jean Cocteau - m.e..s Raphaël Beauville - jusqu’au 29 septembre. GRANDE HALLE DE LA VILLETTE (rés. en ligne) L'Oublié(e) de et par Raphaëlle Boitel - du 6 juillet au 24 août HÉBERTOT (01.43.87.23.23) Les Cartes du pouvoir d’après Beau Willimon - m.e.s. Ladislas Chollat - Avec Raphaël Personnaz, Thierry Frémont - dès le 29 août La contrebasse de LUCERNAIRE (rés. 01.45.44.57.34) Les Amnésiques n'ont rien vécu d'inoubliable de Hervé Le Tellier m.e.s. Frédéric Cherboeuf - jusqu’au 30 août Délire à deux… À tant qu'on veut de Ionesco - m.e.s. Rachel André jusqu’au 27 septembre. Histoires d’hommes de Xavier Durringer - m.e.s. Christophe Luthringer - jusqu’au 6 septembre. MANUFACTURE DES ABBESSES (01.42.33.42.03) Marcelle et Marcel de et m.e.s. Marc Delaruelle - jusqu’au 27 juillet MATHURINS (rés. 01.42.65.90.00) Dernier coup de ciseaux de Marilyn Abrams, Bruce Jordan - m.e.s. Sébastien Azzopardi - jusqu’au 31 août POCHE-MONTPARNASSE (01.45.48.92.97) Voltaire Rousseau de JeanFrançois Prévand - m.e.s. Jean-Luc Moreau et Jean-François Prévand jusqu’au 13 juillet Le Legs de Marivaux - m.e.s. Marion Bierry - jusqu’au 13 juillet RIVE GAUCHE (01.43.35.32.31) L’affrontement de Bill C. Davis m.e.s. Steve Suissa - avec Francis Huster, Davy Sardou - jusqu’au 20 juillet ROND-POINT (0.892.701.603) Journal d'un corps de Daniel Pennac - m.e.s. Clara Bauer - jusqu’au 5 juillet Marilyn, intime de Claire Borotra m.e.s. Sally Micaleff - jusqu’au 5 juillet SAINT-GEORGES (01.48.78.63.47) À gauche en sortant de l'ascenseur de Géard Lauzier - m.e.s. Arthur Jugnot - jusqu’au 13 sept. THÉÂTRE 13/JARDIN (rés. www.theatre13.com/) Mazùt par la compagnie Baro d’evel cirk - du 15 au 20 juillet. THÉÂTRE CLAVEL (06.03.23.32.15) Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit de Fabrice Melquiot - m.e.s. Sébastian Bonnabel THÉÂTRE DE PARIS (01.48.74.25.37) Big Apple d’Isabelle Le Nouvel m.e.s. Niels Arestrup - Avec Marianne Basler, Christophe Malavoy - jusqu’au 8 juillet Festival Paris Quartier d’été - 24ème édition Mazùt Dans le cadre du festival Paris Quartier d’été, le Théâtre 13/Seine accueille la compagnie franco-catalane Baro d’evel cirk avec le spectacle « Mazùt » qui allie danse et cirque contemporain. La compagnie Baro d’evel cirk est constituée de Camille et Blaï : Elle vient du milieu des chevaux. Elle était sportive, gymnaste, ses parents étaient un temps partis en roulotte, elle avait envie de vivre comme ça. Lui est le fils d’un célèbre clown catalan, et a été pris très vite par le goût de la performance. Ils se sont rencontrés au Centre national des Arts du Cirque, en sont sortis à 20 ans, et ont fait le choix d’aller jouer dans les rues. Ils ont réalisé un rêve de vie nomade, de cirque, la vie commune avec les enfants sur les routes, le voyage, le chapiteau qu’on monte. Quand ils ne sont pas à cheval sur des chevaux, ils sont à la recherche de chevaux imaginaires et humains qui ne sont pas moins réels. Ou alors ils sont à cheval entre les disciplines, et peu leur importe qu’on appelle cela du cirque, ou une aventure plastique, ou une chorégraphie, ou un rêve. Ils s’inspirent autant de Jacques Tati et de Jerry Lewis que d’Antoni Tapies ou de Juan Miro, trouvent une ligne directrice en regardant une goutte d’eau, ou une vieille carte du désert… Et puis, ils ont eu envie de trouver quelque chose de nouveau – à moins que ce ne soit quelque chose de nouveau qui les ait trouvés ! Allez découvrir ce qu’ils ont imaginé... Dans «Mazùt», il y a de la peinture et de nombreuses autres choses peuplent la scène. Laissez-vous surprendre par la saveur du spectacle. du 15 au 20 juillet 2014 au Théâtre 13/ Seine puis en tournée : 22 juillet à Gennevilliers, 23 juillet à Auvervilliers, 24 juillet à Nanterre et 25 juillet à Pantin A noter que le festival Paris Quartier d’été aura lieu du 14 juillet au 15 août, offrant musique, danse, cirque... « Mazùt » © Alexandra Fleurantin a g e n d a b e a u x - a r t s Musée du Louvre Masques, mascarades, mascarons L’exposition évoque, à travers une centaine d’œuvres, la fonction paradoxale du masque, emblème de l’illusion, qui consiste à « dérober et produire un double ». En Occident, depuis la haute Antiquité, il existe des hommes masqués. Le masque cache le visage au profit de son double et cette occultation révèle quelque chose. Il donne forme au mystère. Il appartient au registre sacré comme à celui du profane, à la vérité comme à la vanité, à la réalité comme à la fiction. Il épouvante et séduit, imite et trompe. Dessins, sculptures, peintures, gravures montreront son rôle religieux dans le théâtre grec, sa force expressive, ludique et quelque peu diabolique dans la fête, le bal ou la comédie italienne, son empreinte funèbre au lit de mort et sa force pérenne et protectrice au tombeau. Seront aussi abordées la duplicité du masque dans le monde de l’allégorie, sa présence dans l’ornement sous la forme du mascaron qui ne semble rien d’autre qu’un avatar de la tête de la Gorgone coupée par Persée et placée sur les armes d’Athéna pour y conserver son pouvoir sidérant. à voir jusqu’au 22 Septembre 2014 «Figure masquée de profil vers la droite», Plume, encre brune, lavis gris et beige, aquarelle. Découpé suivant les contours de la silhouette. Collé n plein sur une feuille de doublage. Paris, Musée du Louvre, département des Arts graphiques, collection Edmond de Rothschild, 1638 DR Bibliothèque-Musée de l’Opéra Palais Garnier LES BALLETS SUÉDOIS 1920-1925. UNE COMPAGNIE D’AVANT-GARDE – jusqu’au 28 septembre. Bibliothèque Nationale ÉTÉ 1914. LES DERNIERS JOURS DE L’ANCIEN MONDE – jusqu’au 3 août SUR LES PAS DE LOUIS BARTHAS (1914-1918). Photos de JeanPierre Bonfort – jusqu’au 24 août Centre Pompidou BERNARD TSCHUMI, RÉTROSPECTIVE – jusqu’au 28 juillet Compiègne, Château CARRIER-BELLEUSE. LE MAÎTRE DE RODIN – jusqu’au 27 octobre. Cinémathèque française LE MUSÉE IMAGINAIRE D’HENRI LANGLOIS – jusqu’au 3 août Château de Versailles LA CHINE À VERSAILLES. ART ET DIPLOMATIE AU XVIIIE SIÈCLE – jusqu’au 26 octobre Cité de la Musique GREAT BLACK MUSIC – jusqu’au 24 août Fondation Cartier pour l’art contemporain MÉMOIRES VIVES – jusqu’au 21 septembre Galerie des Gobelins LES GOBELINS AU SIÈCLE DES a g LUMIÈRES, un âge d’or de la Manufacture royale – jusqu’au 27 juillet Grand Palais BILL VIOLA – jusqu’au 21 juillet MOI, AUGUSTE, EMPEREUR DE ROME – jusqu’au 13 juillet ROBERT MAPPLETHORPE – jusqu’au 13 juillet MOI, AUGUSTE, EMPEREUR DE ROME... – jusqu’au 13 juillet Institut du Monde arabe IL ÉTAIT UNE FOIS L'ORIENT EXPRESS – jusqu’au 31 août SOIERIES D'AL-ANDALUS, avec la Fondation Lázaro Galdiano, Madrid – jusqu’au 21 septembre Jeu de Paume KATZI HORNA & OSCAR MUÑOZ – jusqu’au 18 septembre KAPWANI KIWANGA. MAJI-MAJI – jusqu’au 18 septembre Maison du Danemark JEAN RENÉ GAUGUIN 1881-1961. SCULPTEUR ET CÉRAMISTE – jusqu’au 12 juillet Maison de Victor Hugo L’ÂME A-T-ELLE UN VISAGE ? L’Homme qui rit, de Gwynplaine au Joker – jusqu’au 31 août Maison de la Photographie FRANÇOISE HUGUIER / MARIE-PAUL NÈGRE / KATIA MACIEL / ADRIEN LÉVY- e n CARIÈS – jusqu’au 31 août Musée des arts décoratifs DRIES VAN NOTEN - Inspirations – jusqu’au 31 août RECTO VERSO - 8 pièces graphiques – jusqu’au 9 novembre Musée d’art moderne LUCIANO FONTANA, rétrospective – jusqu’au 24 août UNEDITED HISTORY, Iran 19602014 – jusqu’au 24 août Musée Carnavalet PARIS LIBÉRÉ, PARIS PHOTOGRAPHIÉ, PARIS EXPOSÉ – jusqu’au 8 février Musée Cernuschi BAI MING, peintre-céramiste – jusqu’au 4 août Musée Dapper INITIÉS, BASSIN DU CONGO & MASQUES DE ROMUALD HAZOUMÈ – jusqu’au 6 juillet Musée Jacquemart-André DE WATTEAU À FRAGONARD, LES FÊTES GALANTES – jusqu’au 21 juillet Musée du Louvre NAISSANCE D’UN MUSÉE / LOUVRE ABU DHABI – jusqu’au 28 juillet MASQUES, MASCARADES, MASCARONS - jusqu’au 22 septembre Musée Maillol LE TRÉSOR DE SAN GENNARO – jusqu’au 20 juillet d a Musée Marmottan-Monet LES IMPRESSIONNISTES EN PRIVE. 100 chefs-d’œuvre de collectionneurs – jusqu’au 6 juillet Musée de Montmartre PICASSO À MONTMARTRE. La BD Pablo de Julie Birmant & Clément Oubrerie – jusqu’au 31 août Musée d’Orsay VINCENT VAN GOGH / ANTONIN ARTAUD. LE SUICIDÉ DE LA SOCIÉTÉ – jusqu’au 6 juillet CARPEAUX (1827-1875), UN SCULPTEUR POUR L'EMPIRE – jusqu’au 28 septembre. Musée Rodin MAPPLETHORPE / RODIN – jusqu’au 21 septembre Petit Palais PARIS 1900, LA VILLE SPECTACLE – jusqu’au 17 août Palais de Tokyo L’ÉTAT DU CIEL [partie 1] – jusqu’au 7 septembre. ED ATKINS - BASTARDS – jusqu’au 7 septembre HIROSHI SUGIMOTO - AUJOURD’HUI LE MONDE EST MORT – jusqu’au 7 septembre Pinacothèque LE MYTHE CLÉOPÂTRE – jusqu’au 7 septembre. 91 m é m e n t o GENEVE concerts 6.7. : CANADIAN AMBASSADOR CHOIR (Canada), NEWCASTLE UNIVERSITY CHOIR (Australie), KEARNSEY COLLEGE CHOIR (Afrique du Sud), SIGNAL HILL ALUMNI CHOIR (Trinidad et Tobago), THE SINGING ANGELS (USA), dir. Gary Fry. Victoria Hall à 18h (loc. Espace Ville de Genève, Grütli, Genève Tourisme, Cité Seniors, Centrale Billetterie T 0800 418 418) danse 92 Du 4 au 6.7. : OPÉRA III, chorégraphie et danse Giuseppe Bucci, performance chorégraphique. Le Galpon, ven et sam à 20h, dim à 18h (rés. au 022/321.21.76 au plus tard 2 heures avant le début de l’événement - mail : [email protected]) Du 29.8. au 1.9. : EL TRIUNFO DE LA LIBERTAD, conçu par la chorégraphe et performeuse La Ribot. La Comdéie de Genève, mar-mer-jeusam à 19h, ven à 20h, dim à 17h classique MUSIQUES EN ÉTÉ CLASSIQUE (rens. 0800.418.418 / loc. Maison des arts du Grütli / Espace Ville de Genève / Cité Seniors / Genève Tourisme) Victoria Hall à 20h : 4.7. : OSR, dir. Cour de l’Hôtel de Ville : 8, 9, 11, 12.7. à 20h45 : I DUE BARONI DI ROCCA AZZURA, de Domenico Cimarosa. Opéra de Chambre de Genève & Orchestre de Chambre de Genève, dir. Franco Trinca. Solistes : LAURENCE GUILLOD (Sandra), CARINE SÉCHAYE (mme Laura), ROGER PADULLÈS (Franchetto), FRANCESCO SALVADORI (Totaro), MICHELE GOVI (Demofonte). 15.7. à 20h30 : KOTARO FUKUMA, piano (Tokuyama, Chopin, Moussorgsky) 17.7. à 20h30 : QUATUOR HERMÈS (Debussy, Dutilleux, Ravel) 22.7. à 20h30 : MARKUS SCHIRMER, piano (Beethoven) 24.7. à 20h30 : LES DOMINONS avec Florence Malgoire, Serge Saitta, Emmanuel Salssa et Paolo Zanzu (Rameau, JS Bach) 29.7. à 20h30 : GILLES VONSATTEL, piano (Beethoven, Holliger, Janacek, Ravel, Honegger) 31.7. à 20h30 : CUARTETO CASALS (Mozart, Ligeti, Brahms) 7.8. à 20h30 : CLÉMENTINE MARGAINE, mezzo & EMMANUEL CHRISTIEN, piano (Fauré, Saint-Saëns, Ravel, Granados et Montsalvatge...) 12.8. à 20h30 : LES VENTS FRANÇAIS, avec François Meyer, Paul Meyer, Gilbert Audin et Bruno Schneider & ERIC LE SAGE, piano (Mozart, Beethoven) 14.8. à 20h30 : LES DISSONANCES, avec DAVID GRIMAL, dir. & violon, JONATHAN BROWN, alto, ARNAUD TOMÀS, violoncelle (Vivaldi, Piazzolla) Scène Ella Fitzgerald à 20h30 : 5.8. : L’ORCHESTRE DE CHAMBRE DE GENÈVE, dir. Arie van Beek (œuvres orchestrales et pièces pour solistes) jazz MUSIQUES EN ÉTÉ (rens. 0800.418.418 / loc. Maison des arts du Grütli / Espace Ville de Genève / Cité Seniors / Genève Tourisme) Cour de l’Hôtel de Ville à 20h30 : 7.7. : RIVERSIDE QUARTET, avec Dave Douglas, Chet Doxas, Steve Swallow et Jim Doxas. 14.7. : CÉCILE MCLORIN SALVANT QUARTET, avec Cécile McLorin Salvant, Aaron Diehl, Paul Sikivie, Jamison Ross 21.7. : THE BAD PLUS, avec Reid Anderson, Ethan Iverson, David King 28.7. : LOVANO EUROPA QUARTET, avec Joe Lovano, Salvatore Bonafede, Lars Danielsson, Jukkis Uotil 4.8. : B.F.G., avec Emmanuel Bex, Glenn Ferris, Simon Goubert 11.8. : PETER BERNSTEIN TRIO, avec Peter Bernstein, Doug Weiss, Bill Stewart musiques colorées MUSIQUES EN ÉTÉ (rens. 0800.418.418 / loc. Maison des arts du Grütli / Espace Ville de Genève / Genève Tourisme) Scène Ella Fitzgerald à 20h30 (sauf mention contraire) : 2.7. : PARADISE BANGKOK MOLAM INTERNATIONAL BAND 9.7. : CHARLELIE COUTURE, chanson 11.7. : DEOLINDA, fado-fada 16.7. : CHARLES BRADLEY AND HIS EXTRAORDINAIRES, soul a g 18.7. : PIERS FACCINI, folk indie 23.7. : JUDITH HOLOFERNES, pop 25.7. : PALENQUE feat. RAMON BENITEZ, fanfare colombienne 30.7. : BALKAN BEAT BOX, mediterranean dancehall 1.8. à 16h45 : LES PETITS CHANTEURS À LA GUEULE DE BOIS, chanson 1.8. : ORCHESTRE TOUT PUISSANT MARCEL DUCHAMP, afro dada 1.8. à 22h45 : RENAN LUCE, chanson 6.8. : CHAMBER SOUL & KALEIDOSCOPE, soul 8.8. : TAMIKREST, rock touareg 13.8. : STEVE EARLE & THE DUKES, country / folk 15.8. : MORIARTY meets MAMA ROSIN, folk / combat cajun 20.8. : EBO TAYLOR, highlife théâtre THÉÂTRE DE L’ORANGERIE Rés. : 022 700 93 63 (répondeur) ou www.theatreorangerie.ch ATTENTION: les réservations on line sont clôturées 24H avant la date de représentation / prévente Service culturel Migros Jusqu’au 13.7. : LA SECONDE SURPRISE DE L’AMOUR de Marivaux, m.e.s. Valentin Rossier Du 16 au 26.7. : DERNIERS REMORDS AVANT L’OUBLI de Jean-Luc Lagarce, m.e.s. Michel Kacenelenbogen Du 29.7. au 10.8. : HOT HOUSE de Harold Pinter, m.e.s. Pietro Musillo Du 5 au 23.8. : LE RÊVE PENCHÉ de et avec Myriam Bucris et Denis Correvon (jeune public) Du 13 au 23.8. : DOUTE de John Patrick Shanley, m.e.s. Robert Bouvier Du 26.8. au 6.9. : IPHIGÉNIE EN TAURIDE de Goethe, m.e.s. Didier Nkebereza Du 9 au 19.9. : LES MÉFAITS DU TABAC de Tchekhov, m.e.s. Denis Podalydès Du 23 au 26.9. : DANSEHABILE / 1ère partie : SOI-MÊME COMME UN AUTRE, chor. Foofwa d’Imobilité / 2ème partie : DES MOTS EN CORPS, chor. Uma Arnese 27.7. dès 22h : GRAND BAL DE avec Gypsy Sound L’ORANGERIE System / Dj Olga FESTIVAL DE LA BÂTIE Du 29 août au 13 septembre. Théâtre, danse, concerts, performances, expositions, ateliers, projections, soirées "waoww", ... e n LAUSANNE concerts 15.7. : Concert Jazz Onze+. SIGA VOLANDO. théâtre de Verdure (Casino de Montbenon) à 21h / en cas de mauvais temps, repli au Casino de Montbenon, salle Paderewski 18.7. : ROMAN PERUCKI, directeur de la Philharmonie de la Baltique à Gdansk, orgue et MARIA PERUCKA, violon (Rheinberger, JS Bach, Bielecki, CPE Bach, Surzynski, Kruczek et Borowski). Cathédrale à 20h 1.8. : JÜRGEN WOLF, cantor de la Nikolaikirche de Leipzig (J.A. Reincken, N. de Grigny, D. Buxtehude et J.S. Bach). Cathédrale à 20h 2.8. : Concert exceptionnel. ACADÉMIE DE MUSIQUE DE LAUSANNE, avec Pierre Amoyal, violon, et Robert Levin (Janacek, Mozart, Frank). Casino de Montbenon - Salle Paderewski à 19h. Entrée libre 8.8. : ANDRZEJ CHOROSINSKI, de l'académie Chopin de Varsovie (Bach, Chopin, Widor). Cathédrale à 20h. Entrée libre 28.8. : L'Europe musicale de la fin du 19e siècle. QUATUOR SINE NOMINE (Debussy, Wolf, Schubert, Dvorak). Place Arlaud à 19h30 / En cas de pluie, repli à l'Eglise Saint-Laurent (Rens.: 078 748 31 91). Entrée libre FESTIVAL DE MUSIQUE IMPROVISÉE Du 15 au 22 août, à 20h, dim à 17h entrée libre Dimanche 17.8. : ALEXANDRE CELLIER (multi-instrumentiste) ET ANTOINE Auberson (saxophone). Grotte-2 (Conservatoire) Lundi 18.8. : FREDDY EICHELBERGER ET JEAN-LUC HO (orgues). Église Saint-Laurent Mardi 19.8. : PAUL GOUSSOT ET BENJAMIN RIGHETTI (orgues). Église de Villamont Mercredi 20.8. : DIRK BÖRNER (clavecin) et MATTHIEU CAMILLERI (violon). Église de Villamont Jeudi 21.8. : LA TRIVIATA (opéra improvisé). Grotte-2 (Conservatoire) Vendredi 22.8. : THOMAS OSPITAL (orgue) sur "The Pleasure Garden" premier film d'Alfred Hitchcock, 1925 - Église Saint-François d a m é m e Nyon far°, festival des arts vivants Le far° festival des arts vivants reviendra “perturber“ agréablement la ville de Nyon en août durant deux semaines, transformant la cité en lieu de rencontre majeur pour les amateurs d’arts scéniques. En effet, le far° occupe une place à part dans le paysage helvétique du théâtre, de la danse et de la performance. Seule manifestation estivale de cet ordre dans la région, elle explore les nouveaux territoires des arts vivants et réunit les conditions propices à une véritable émulation artistique. Elle maintient depuis ses débuts une programmation suisse et internationale qui allie exigence et originalité et poursuit sa volonté de sensibiliser le public romand aux esthétiques contemporaines les plus radicales. Parmi les artistes associés pour 20132014, citons Anne Delahaye et Nicolas Exemple de performance accueillie au FAR, celle de Philippe Quesne lors de l’édition 2008 © Pierre Grosbois Leresche qui poursuivent leurs recherches autour de la notion de débordement. En mai dernier, ils ont présenté une nouvelle une étape de travail de leur projet «Parc National». La programmation du festival fera à nouveau la part belle aux performances de toutes sortes, théâtre, musique ou danse, et, comme les autres années, plusieurs lieux de la ville accueilleront les spectacles invités. Du 13 au 23 août 2014 théâtre Du 1er au 2.7. : CARNET DE ROUTE I par Les arTpenteurs. Jardin du petit théâtre (yourte), pl. Cathédrale 12, à 19h30 Du 3 au 4.7. : CARNET DE ROUTE II par Les arTpenteurs. Jardin du petit théâtre (yourte), pl. Cathédrale 12, à 19h30 Du 5 au 6.7. : CARNET DE ROUTE III par Les arTpenteurs. Jardin du petit théâtre (yourte), pl. Cathédrale 12, à 19h30 divers 5.7. : LE VENT DANS LES SAULES, conte musical par l’Harmonie Lausannoise et Christophe Balissat. Parc de Mon-Repos à 17h / cas de mauvais temps, repli au Casino de Montbenon, salle Paderewski (Rens. 079 277 70 42) 5.7. : CORRESPONDANCE DES ROUTES CROISÉES II, par Le Collectif Fin de Moi. Parc de l’Hermitage - sous le hêtre pleureur, à 20h 12.7. : PAROLES ESTIVALES – TINTAMARRE AUX PAYS DES LIVRES, par Deirdre Foster. Jardins du Musée historique de Lausanne à 11h / en cas de mauvais temps, repli à l’intérieur du Musée. a g e 20.7. : PAROLES ESTIVALES – CONTES D’ÉCUME, par Stella Lo Pinto. Jardins du Musée Olympique, Quai d’Ouchy 1, à 11h FESTIVAL DE LA CITÉ Du 8 au 13 juillet Théâtre, danse, concerts, performances, expositions, ateliers, projections, soirées "waoww", ... Programme sur : http://www.festivalcite.ch/ opéra 8 et 9.7. : La Route Lyrique. PHIPHI, de Henri Christiné, dir. Jacques Blanc, m.e.s. Gérard Demierre. Parc de Mont-Repos à 21h15 / En cas de mauvais temps, repli à l'Opéra de Lausanne. Entrée libre AILLEURS mézières THÉÂTRE DU JORAT à 20h, dim à 17h, sauf mention contraire (rés. : www.theatredujorat.ch/) 3, 4, 6.7. : BÉJART BALLET LAUSANNE - «Là où sont les oiseaux» et «Brel et Barbara» n d a n t o tannay LES VARIATIONS MUSICALES Du 24 au 31 août dim. 24.8., 17h : RENAUD CAPUÇON, violon, et l'ORCHESTRE DU FESTIVAL (Rossini, Mozart, Bach, Beethoven) lun 25.8., 20h : ADAM LALOUM, piano (Schumann, Chopin, Prokofiev) jeu 28.8., 20h : EDGAR MOREAU, violoncelle et PIERRE-YVES HODIQUE, piano (Beethoven, Brahms, Prokofiev, Chopin, Paganini) ve 29.8., 20.00 : LOUIS SCHWITZGEBEL-WANG, piano, RACHEL KOLLY D'ALBA, violon, avec l'ORCHESTRE DE CHAMBRE DE GENÈVE (Mendelssohn, Haydn, Bartok) sa 30.8., 16.30 : ENSEMBLE INTERMEZZO (concert pour familles )Ma Mère l'Oye, Ravel sa 30.8., 20h : TRIO WANDERER (Schubert, Tchaïkovski) di 31.8., 17h : AVI AVIVAL, mandoline, avec la GENEVA CAMERATA (Bach et famille) 93 m é m e n t o Cour de l’Hôtel de Ville Il Due Baroni di Rocca Azzura Divertissement garanti, en juillet dans la Cour de l’Hôtel de Ville, avec les représentations de cet “opera buffa“ en deux actes de Domenico Cimarosa, un des plus populaires du compositeur, ici servi par l’Opéra de Chambre de Genève. Au clavecin : Riccardo Mascia. Dans une mise en scène de Francesco Bellotto, avec un Orchestre de Chambre de Genève placé sous la direction de Franco Trinca, un habitué du festival Musiques en été, les chanteurs conviés pour l’occasion vous offriront une soirée riche en situations comiques. Parmi la distribution, signalons la présence de la soprano italo-suisse Laurence Guillod (ici dans le rôle de Sandra) et de la mezzo-soprano genevoise Carine Séchaye (Madame Laura). Le ténor Roger Padullés (Franchetto) et les barytons Francesco Salvadori (Totaro) et Michele Govi (Demofonte) complètent la distribution. L’intrigue tourne autour d'une série d'erreurs d'identité, qui à un moment donné dans l'opéra débouche sur une confusion incroyable du fait des deux dames principales qui endossent quatre personnalités différentes chacune, se déguisant pour ajouter à la confusion de leurs amants. Cela implique des intrigues d'amour élaborées et des situations comiques. Toutes ces complications ont fourni à Cimarosa de nombreuses d'occasions pour créer de la musique bouffe comique et imaginative Carine Séchaye © Barbara de Preux en faisant intervenir de l'humour de grosse farce. Le librettiste, par les situations qu’il décrit, a aussi permis au compositeur d’utiliser des sons inhabituels divers, tels que l'utilisation de voix de fausset, le braiement d'ânes et l’usage théâtral de la trompette pour annoncer des fanfares et des entrées. 94 Les 8, 9, 11, 12 juillet à 20h45 Billetterie : Maison des arts du Grütli, Espace Ville de Genève, Genève Tourisme ou en ligne sur http://billetterie-culture.ville-ge.ch Place du Château, Nyon LunaClassic Le St-Prex Classics change de nom et de ville pour son édition 2014. En effet, il se fait désormais connaître sous le nom de LunaClassic et se déroulera sur la place du Château de Nyon. Le concert inaugural du mardi 19 août réunira Nelson Goerner, Paul Meyer, Menuhin Academy Soloists & Jeunes Talents 2013, avec au programme des œuvres de Schubert, Mendelssohn-Bartoldy et Chopin. Par la suite, de nombreux artistes de renommée internationale se succéderont sous “Luna“ : Maxim Vengerov le mercredi 20 août (Frank, Prokofiev, Brahms, Dvorak/Kreisler, Wieniawsky...) ; John Malkovich & Julian Rachlin le jeudi 21 août (avec un nouveau projet imaginé par l’acteur autour d’une œuvre subversive de Roberto Bolaño, auteur sud-américain) ; Dee Dee Bridgewater & Ruggero Raimondi les vendredi 22 et samedi 23 août sous l’intitulé «Broadway meets Italy» ; Gary Burton & Dizzy Gillespie le dimanche 24 août pour un concert 100% jazz ; Steven McRae, Yuja Wang & Martin Grubinger les lundi 25 août et mardi 26 août pour vous faire goûter «L’Empire du Rythme» ; Fazil Say le mercredi 27 août qui jouera Moussorgski, les Tableaux d’une exposition, et Fazil Say, Ballades et Jazz Fantaisies ; une soirée musique & danse avec Hervé Moreau, Stéphane Bullion & Gautier Capuçon, Jorge Viladoms ; un récital d’un pianiste qu’on ne présente plus, Menahem Pressler le vendredi 29 août ; Nigel Kennedy & Jean-Luc Ponty, deux prestigieux violonistes, les samedi 30 & dimanche 31 août ; À signaler toutefois que certains artistes se produiront au Temple de Nyon à 19h : Christian Chamorel & Felix Froschhammer le vendredi 22 août ; Olivier Cavé & Amelia Scicolone le samedi 23 août (Haydn, Bellini, Donizetti, …) ; Yuja Wang, Gautier Capuçon & Liya Petrova le mercredi 27 août (Chostaklovitch, Mendelssohn). Les Jeunes Talents 2014, soit Lorenzo Soulès, piano, Liya Petrova, violon, Amelia Scicolone, soprano se produiront le dimanche 24 août. Comme on le voit, Luna Classics ne connaît pas les frontières entre les disciplines artistiques ni les cloisonnements. La preuve ? Ambitionnant l’éclectisme et l’ouverture, mais toujours soucieux de viser l‘excellence, le festival propose plusieurs soirées “mixtes“ réunissant par exemple chanteurs de jazz et d’opéra, ou danseur et percussionniste... Du 19 au 31 août 2014 Gautier Capuçon © Aline Paley a g e n d a tm g marionnettes saison 2014 2015 THÉÂTRE DES MARIONNETTES DE GENÈVE Rue Rodo 3 1205 Genève 022 807 31 07 www.marionnettes.ch Des histoires palpitantes et poétiques qui font voir le monde autrement ! LA LEÇON DU MONTREUR Du 20 au 21 septembre 2014 Dès 5 ans Une initiation ludique et poétique à la marionnette. MATHILDE Du 24 au 28 septembre 2014 Adultes, ados Attente et ironie dramatique au pays des aînés. LA LIGNE DE CHANCE Du 3 au 21 décembre 2014 Dès 4 ans Une courageuse héroïne silhouettée dans le monde des contes suisses. BARTLEBY Du 8 au 20 janvier 2015 Adultes, ados La résistance violemment comique dun petit employé. TOI DU MONDE LE DÉRATISEUR DE HAMELIN TURLUTUTU MAMZELLE CHAPEAU WUNDERKAMMER LES CHAISES SOUCIS DE PLUME LOULOU Du 4 au 19 octobre 2014 Dès 4 ans Les difficultés de la vie enfantine vues depuis les toits. Du 20 au 30 octobre 2014 De 1 à 3 ans Des comptines sortent de lhabit de Monsieur Turlututu. Du 31 octobre au 5 novembre 2014 Adultes, ados Un étonnant cabinet aux merveilles marionnettiques. Du 8 au 26 novembre 2014 Dès 4 ans Les extraordinaires aventures de Monsieur Petitmonde dans des univers parallèles. Du 24 janvier au 8 février 2015 Dès 7 ans Un artiste justicier face au règne de largent. Du 12 février au 1er mars 2015 De 1 à 3 ans Une demoiselle travaille du chapeau pour de merveilleux récits. Du 19 février au 1er mars 2015 Adultes, ados Jouer et rejouer sa vie au cur dune farce tragique. Du 7 au 25 mars 2015 Dès 4 ans Loup et lapin deviennent amis, ignorant quils doivent être ennemis intimes. LE VILAIN PETIT MOUTON Du 15 avril au 3 mai 2015 Dès 6 ans La désobéissance dun jeune mouton qui rêve de nouveaux horizons et dun monde plus juste. RIFIFI RUE RODO Du 19 mai au 7 juin 2015 Adultes, ados Petits crimes entre amis au fil dune déambulation marionnettique et policière. Illustration : Albertine Réservations dès le 19 août au 022 807 31 07 ou sur www.marionnettes.ch CLASSIQUE AU VICTORIA HALL Concerts d’ouverture 28 JUIN À 20H SEIJI OZAWA INTERNATIONAL ACADEMY SWITZERLAND / SEIJI OZAWA Beethoven, Schubert, Brahms, Debussy, Bach, Bartòk 29 JUIN À 17H ORCHESTRE DE LA SUISSE ROMANDE / KAZUKI YAMADA / DAISHIN KASHIMOTO Honegger, Tchaïkovski, Rimski-Korsakov À LA SCÈNE ELLA FITZGERALD Concert gratuit 5 AOÛT À 20H30 L’ORCHESTRE DE CHAMBRE DE GENÈVE / ARIE VAN BEEK / SOLISTES DE L’OCG Mozart, Rodrigo, Händel, Kreisler, Casals, Bach, Bizet À LA COUR DE L’HÔTEL DE VILLE À 20H30 15 JUILLET KOTARO FUKUMA Tokuyama, Chopin, Moussorgski 17 JUILLET QUATUOR HERMÈS Debussy, Dutilleux, Ravel 22 JUILLET MARKUS SCHIRMER Beethoven 24 JUILLET LES DOMINOS / FLORENCE MALGOIRE Rameau, Bach 29 JUILLET GILLES VONSATTEL Beethoven, Holliger, Janáček, Ravel, Honegger 31 JUILLET CUARTETO CASALS Mozart, Ligeti, Brahms 7 AOÛT CLÉMENTINE MARGAINE / EMMANUEL CHRISTIEN Fauré, Granados, Saint-Saëns, Ravel, Montsalvatge 12 AOÛT LES VENTS FRANÇAIS / ÉRIC LE SAGE Glinka, Mozart, Auric, Beethoven 14 AOÛT LES DISSONANCES / DAVID GRIMAL Vivaldi, Piazzolla OPÉRA À LA COUR DE L’HÔTEL DE VILLE À 20H45 8, 9, 11&12 JUILLET OPÉRA DE CHAMBRE DE GENÈVE / FRANCO TRINCA / L’OCG Cimarosa « I Due Baroni Di Rocca Azzurra » JAZZ À LA COUR DE L’HÔTEL DE VILLE À 20H30 7 JUILLET RIVERSIDE Dave Douglas, Chet Doxas, Steve Swallow, Jim Doxas 14 JUILLET CÉCILE McLORIN SALVANT QUARTET « Woman Child » 21 JUILLET THE BAD PLUS 28 JUILLET LOVANO EUROPA QUARTET 4 AOÛT B.F.G. Bex–Ferris–Goubert 11 AOÛT PETER BERNSTEIN TRIO COLORÉES À LA SCÈNE ELLA FITZGERALD À 20H30 2 JUILLET PARADISE BANGKOK MOLAM INTERNATIONAL BAND Molam 9 JUILLET CHARLELIE COUTURE Chanson 11 JUILLET DEOLINDA Fado-fada 16 JUILLET CHARLES BRADLEY AND HIS EXTRAORDINAIRES Soul 18 JUILLET PIERS FACCINI Folk indie 23 JUILLET JUDITH HOLOFERNES Pop 25 JUILLET PALENQUE FEAT. RAMÓN BENÍTEZ Fanfare colombienne 30 JUILLET BALKAN BEAT BOX Mediterranean dancehall 1ER AOÛT dès 16H45 LES PETITS CHANTEURS À LA GUEULE DE BOIS Chanson jeune public / ORCHESTRE TOUT PUISSANT MARCEL DUCHAMP Afro-dada / RENAN LUCE Chanson 6 AOÛT CHAMBER SOUL & KALEIDOSCOPE Soul 8 AOÛT TAMIKREST Rock touareg 13 AOÛT STEVE EARLE & THE DUKES Country – Folk 15 AOÛT MORIARTY MEETS MAMA ROSIN Folk – Combat cajun 20 AOÛT EBO TAYLOR Highlife LOCATION CLASSIQUE OPÉRA JAZZ Maison des arts du Grütli—Espace Ville de Genève— Genève Tourisme—Cité Seniors—Billetterie en ligne COLORÉES Concerts gratuits WWW.MUSIQUESENETE.CH