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L’Egyptien Mémoire d’éternité 1 Chapitre 1. Le départ. Nous étions fin novembre 2010, et comme chaque année, dans notre petite famille de trois personnes, nous nous posions la question de notre lieu de vacances des fêtes de fin d’année. Où les passerions-nous et avec qui ? Pendant vingt ans cela avait été le même rituel. Il avait permis de préserver notre petit noyau familial. Mais voilà, comme toute cellule moderne, les trois étaient devenus trois fois un. Nous, les parents, avions traversé la tempête du divorce. Le fils, lui était devenu un jeune homme et avait pris son indépendance. Pourtant, avec sérénité et évidence, nous convenions que la soirée de Noël se déroulerait à Paris, et que nous partirions, nous, les ex- époux, ensemble, au soleil. Trois semaines avant la date de départ, la destination était arrêtée. Ce serait l’Egypte. Après toutes les expériences partagées, pourquoi pas. L’un comme l’autre avions déjà visité ce pays, mais pas la même année et pas dans le même 2 contexte. L’un connaissait la Haute Egypte, l’autre la Basse Egypte. Nous décidions d’aller en Moyenne Egypte. Il nous restait à acheter le billet et à préciser dans quelle partie de cette Moyenne Egypte, relevant de ce vaste pays de plus de quatre-vingt millions d’âmes, nous irions. Les offres des tours opérateurs étaient nombreuses et variées. Hurghadha pouvait faire l’affaire. C’était une banale station balnéaire, mais elle convenait à notre objectif. Un mixte entre farniente, lâcher prise entre Noël et jour de l’an, plongée sous-marine et tourisme. Louxor était situé à deux cents kilomètres et satisferait notre soif culturelle. La destination, au moins, était arrêtée. Quinze jours avant le départ, alors que j’allais faire un traditionnel bilan médical, subitement je me ravisai. Quelle était cette stupide idée de partir en vacances avec son ex-mari ? Pourquoi un projet de cette nature alors que nous n’étions pas parvenus pendant vingt ans à apaiser nos relations ? Certes notre histoire de couple était terminée et étions redevenus des amis. Le divorce était prononcé depuis quatre ans. La phase de deuil était dépassée. La situation émotionnelle était limpide. Je me demandais brutalement quel pouvait bien 3 être le sens à donner à ce voyage entre ex-époux. Oui, me disais-je en traversant le pont de St Cloud, c’est une idée saugrenue. J’avais très peur de l’avion. Depuis quelques temps, je ne répondais plus à mes désirs toujours inassouvis de voyage par crainte de mourir en avion. A chaque fois je devais contrôler cette phobie. Pendant toute la durée du vol ma respiration se paralysait à chaque décollage et à chaque atterrissage, une peur panique m’envahissait à la limite de l’évanouissement. Oui me répétais-je, c’est un mauvais choix. Et puis pourquoi l’Egypte ? Cette terre d’esclavage n’était-elle pas maudite ? Cette Egypte moderne qui cachait, derrière les pyramides, un système corrompu et des pauvretés sociales insoupçonnables, était-elle si accueillante ? Je réalisais que partir en vacances dans un pays musulman n’allait pas être une sinécure. Toutes ces pensées traversaient mon esprit alors que je me rendais à ce rendez-vous chez un médecin étiopathe. 4 Je me décidais alors à téléphoner à mon ex-époux pour partager avec lui mes craintes soudaines. Il comprendrait. Avec un peu de dialogue il se rangerait derrière mon avis. Je ne lui cachais rien de mes doutes et avec sincérité et calme je parvins à partager avec lui mes pensées négatives. Il me répondit avec douceur et sagesse et finit par me convaincre qu’il n’y avait pas de raison de s’inquiéter. Il me rassura. Enfin, un instant. Car les questions continuèrent à me tarauder. Fallait il réellement partir avec lui en vacances et fallait-il partir en Egypte à cette période de l’année ? Nous risquions de rentrer sur des pistes d’aéroport enneigées ce qui continuait de me préoccuper et je savais que je me priverais de la fête de mon anniversaire avec mes amis, entre Noël et le jour de l’an. Face à des pensées aussi torturées et aussi alambiquées, une réponse s’imposait. C’était non. J’arrivais à mon rendez-vous et contre toute attente, je décidais de révéler cette histoire à l’étiopathe. Après tout il pourrait sûrement me poser les bonnes questions avec sa sérénité et sa sagesse habituelles, sans émettre de point de vue ou de jugement. Il me guiderait à la source de mes inquiétudes. 5 Il écouta mes tourments car il s’agissait bien de tourment de l’âme. Superficiels certes, mais des tourments quand même ! Une heure après, je quittais son bureau. Il n’était pas revenu sur le sujet. Il l’avait ignoré. Enfin pas tout à fait. En m’accompagnant sur le seuil de sa porte et en me saluant, il me dit, tout en dirigeant sa main au-dessus de sa porte : « N’oubliez pas que les Egyptiens nous ont amené ceci». Je reconnus la Clé de Vie égyptienne. La clé portée à la main de chacun des pharaons. Voilà sa réponse à mes interrogations pensais-je. Je le regardai. En silence. Ne connaissant pas le sens qu’il pouvait bien vouloir donner à cette notion de Clé de Vie, j’accueillis cette remarque en souriant, tout en cherchant à comprendre la joie qui m’envahissait intérieurement. Une émotion intense, comme une ouverture d’esprit. Et s’il y avait un message dans sa réponse. Ai-je une énigme à découvrir dans cette partie de ma vie me demandais-je ? Je ne croyais jamais au hasard. Je savais être attentive à chaque instant, chaque parole livrée ainsi, au dépourvu. En effet, après tout, pourquoi aurais-je peur de ce voyage ? N’avais-je pas uniquement à faire confiance à cet ici et maintenant qui se présentait à moi ? 6 Tout de même il fallait prendre l’avion et de toute façon la Clé de Vie, je n’en connaissais pas le sens. C’était trop cabalistique pour moi. Animée néanmoins d’un enthousiasme soudain, je quittais ce lieu pour me diriger aussitôt dans une agence de voyage. J’achetai deux billets pour l’Egypte, destination le Pyramisa Beach à Hurghadha, un quatre étoiles « couleur » locale. Je n’avais plus de doutes. Nous partîmes à l’aube du 26 décembre. La Clé de Vie, j’ignorais que ce symbole aurait pour moi un sens complètement initiatique. 7