recours du délégué du gouvernement exerçant les fonctions de

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recours du délégué du gouvernement exerçant les fonctions de
RECOURS DU DÉLÉGUÉ DU GOUVERNEMENT EXERÇANT LES FONCTIONS DE COMMISSAIRE DE GOUVERNEMENT PRÈS LE F.R.S.-­‐FNRS ET SES FONDS ASSOCIÉS Vu la notification de la décision du Conseil d’administration du 21 décembre 2009 portéee à la connaissance du Délégué du Gouvernement par courrier électronique ce même jour ; Que ladite notification contient “l’approbation (14 voix sur 14 votants) des principes de la réforme tels que détaillés dans les PV du CA depuis octobre 2009 moyennant les amendements suivants (...)” et “la décision (13 voix sur 14 votants, 1 abstention) de mise en application immédiate dès 2010 avec recul de la date de clôture de l’appel à candidature (...)” ; Que les décisions dont fait état la notification susmentionnée, c’est-­‐à-­‐dire celles prévues dans les “procès –verbaux du Conseil d’administration depuis octobre 2009”, n’ont jamais été notifiées au Délégué du Gouvernement ; Qu’il y a donc lieu de considérer la notification du 21 décembre 2009 comme la seule notification de la réforme du F.R.S.-­‐FNRS, notification à partir de laquelle le délai de recours de 5 jours francs mis à disposition du Délégué du Gouvernement commence à courir conformément à l’article 5, alinéa 6, de l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 3 avril 1998 relatif au financement du Fonds national de la Recherche scientifique, au renforcement du potentiel scientifique universitaire et au financement de programmes de recherche fondamentale collective ; Que le recours du Délégué du Gouvernement doit s’exercer à l’encontre de toute décision contraire aux lois, décrets, arrêtés ou à l’intérêt général conformément à l’article 5, alinéa 4, de l’arrêté susmentionné ; Que la décision dont question contient plusieurs éléments de forme et de fond qui ne la rendent pas conforme aux lois, décrets, arrêtés ni à l’intérêt général ; Sur la forme, Vu que les documents préparatoires relatifs aux réunions des conseils d’administration d’octobre, novembre et décembre 2009 n’ont jamais été fournis au Délégué du Gouvernement 10 jours avant la date de la séance conformément à l’article 5, alinéa 2, de l’arrêté susmentionné, lequel invoque une procédure d’urgence à l’acceptation du Délégué qui n’a jamais été utilisée ; que l’accord du Délégué n’a jamais été requis afin d’abréger à l’une ou l’autre occasion ce délai ; Qu’en l’occurrence les documents relatifs à la réunion du 21 décembre 2009 sont parvenus par courriel au Délégué le 14 décembre à 9 heures du soir ; que des documents complémentaires lui ont été envoyé le lendemain ; que le délai de 10 jours n’a en l’espèce pas été respecté ; Que les procès-­‐verbaux des réunions d’octobre, de novembre et de décembre n’ont toujours pas été approuvés par le Conseil d’Administration du F.R.S.-­‐FNRS ; qu’il y a donc lieu de considérer les documents qui circulent comme des projets de procès-­‐verbaux ; Qu’en l’espèce la décision du 21 décembre 2009 en ce qu’elle ne fait qu’amender des décisions antérieures repose ainsi sur des décisions prises lors de réunions dont les procès-­‐verbaux n’ont pas été approuvés ; Que les récents débats au sein du Conseil d’Administration et les échanges de courriels entre ses membres montrent clairement que l’approbation des procès-­‐
verbaux n’est pas un acte de pure forme ; qu’il y a contestation sur la teneur même des procès verbaux, certains membres du Conseil d’Administration ayant rédigé plusieurs pages de correctifs des projets de procès-­‐verbaux ; Vu que le Conseil d’Administration n’a pas encore approuvé à ce jour de document clair et coordonné de la réforme du F.R.S.-­‐FNRS ; Vu l’ampleur de la réforme qui vise à modifier la procédure d’évaluation, de sélection, de recrutement et de promotion des mandataires du F.R.S-­‐FNRS ; Que les éléments qui précèdent montrent à suffisance l’approximation administrative dans lequel a été élaborée cette réforme ; Qu’en conséquence, sur ces seuls éléments de forme, le risque d’incompréhension existe aujourd’hui et partant le risque d’actions judiciaires devant les tribunaux compétents de la part de tout qui se sentirait lésé par l’application de la réforme ; Sur le fond, Attendu que la convention collective de travail numéro 9 du 9 mars 1972 impose en son article 9 aux entreprises d’informer et de consulter le conseil d’entreprise “au sujet des projets et mesures susceptibles de modifier un ou plusieurs éléments de la politique du personnel”. Que cette convention collective a été rendue obligatoire par Arrêté Royal ; Qu’elle émane du Conseil National du Travail et s’applique donc à tous les travailleurs indistinctement, en ce compris les salariés du F.R.S.-­‐FNRS ; Que le commentaire de l’article 9 précise que la “politique du personnel“ comprend notamment “les règles suivies en matière de recrutement, sélection, mutation et promotion professionnelle”. Que l’article 3 de ladite convention collective de travail précise par ailleurs que ”les informations et consultations prévues par la présente convention doivent être préalables aux décisions et permettre au conseil d'entreprise de procéder, en connaissance de cause, à des échanges de vues au cours desquels les membres pourront formuler leurs avis, suggestions ou objections. ” ; Attendu que le 24 novembre 2009 le Secrétaire général du FRS-­‐FNRS a rendu publique un document qui expliquait certains éléments de la réforme modifiant le mode de recrutement, de sélection et de promotion professionnelle de l’ensemble de ses chercheurs ; Que ce faisant, et par la signature de ce document, le Secrétaire général du F.R.S.-­‐
FNRS s’est non seulement de droit, mais également de fait, comporté en tant qu’employeur des salariés du Fonds ; Que pour le surplus il n’y a pas d’hésitation possible sur la qualité juridique d’employeur du Fonds, celui-­‐ci rémunérant directement les mandataires et contractant avec ceux-­‐ci ; Attendu qu’il y a lieu de considérer que cette réforme affecte directement des caractéristiques essentielles de la “carrière”1 des chercheurs au sein du F.R.S.-­‐
FNRS et qu’elle en modifie structurellement la politique du personnel du Fonds et de ses Fonds associés ; Attendu qu’en dépit des remarques formulées en séance par le Délégué du Gouvernement et des demandes répétées, formulées notamment par lettre recommandée des représentants des chercheurs au Secrétaire général, le F.R.S.-­‐
FNRS a refusé d’informer et de consulter préalablement ses propres chercheurs sur la réforme litigieuse ; Que ce refus constitue une violation l’article 9 de la convention collective de travail susmentionnée et peut être pénalement sanctionné2 ; 1
Le site du FRS-FNRS présente précisément l’engagement au FRS-FNRS comme une carrière :
« Le F.R.S.-FNRS a mis en place un véritable “plan de carrière” pour les chercheurs, couvrant les 3
premières étapes de la carrière du chercheur, et propose différents instruments destinés à les
accompagner tout au long de leur carrière :
pour les scientifiques désireux de défendre leur projet de thèse : les postes de doctorants (étape 1:
aspirants FNRS ou boursiers FRIA)
pour les chercheurs postdoctoraux en début de carrière : les postes de post-doctorants
(étape 2: chargés de recherches)
pour les chercheurs confirmés : les postes de permanents (étape 3: chercheurs qualifiés)
La quatrième étape de la carrière du chercheur peut se construire au F.R.S.-FNRS, le chercheur
permanent pouvant alors postuler pour un poste de chercheur expérimenté (Maître de recherches, puis
Directeur de recherches). Cependant, dans la plupart des cas le chercheur continue sa carrière au sein
de l'université en tant qu'enseignant-chercheur, libérant ainsi un poste de chercheur permanent au sein
du F.R.S.-FNRS ».
2 Loi du 5 décembre 1968, art. 56, sur les conventions collectives et les conventions paritaires : « Sans préjudice des dispositions des articles 269 à 274 du Code pénal, sont punis d'un emprisonnement de huit jours à un mois et d'une amende de 26 à 500 F ou d'une de ces peines seulement : 1. l'employeur, ses préposés ou mandataires coupables d'infraction à une convention rendue obligatoire… ». Qu’en défense de son absence de consultation, le F.R.S.-­‐FNRS se prévaudra sans doute de la loi du 3 mai 2003 sur base de laquelle il n’est pas tenu d’instituer un conseil d’entreprise ; Que cette disposition ne le dispense en aucun cas d’organiser la concertation requise ; Attendu que subsidiairement, si l’argument devait être retenu, la consultation préalable aurait dû être organisée dans l’ensemble des conseils d’entreprise ou des instances de concertation sociales ad hoc des universités qui accueillent des chercheurs du F.R.S.-­‐FNRS quod non ; Que pour le surplus, cette législation méconnaît gravement les spécificités du personnel du F.R.S.-­‐FNRS dont la vie professionnelle est tantôt influencée par les décisions du Conseil d’Administration du F.R.S.-­‐FNRS (politique salariale, de recrutement, etc.) preuve en est la réforme en cours, tantôt par l’établissement scientifique qui les accueille (conditions de travail, discipline, etc.) ; Attendu que in concreto cette disposition légale ne peut avoir pour effet de délier le F.R.S.-­‐FNRS de son obligation de concertation sociale à l’égard de son personnel de recherche ; Attendu que priver les seuls salariés du F.R.S-­‐FNRS de la concertation précitée serait une violation de l’article 10 de la Constitution qui postule l’égalité des Belges devant la loi ; Attendu que des questions sérieuses ont été soulevées, par une organisation syndicale reconnue, ainsi que par un collectif de chercheurs et également par voie de presse concernant la mise à disposition des travailleurs du F.R.S.-­‐FNRS auprès des institutions universitaires et des établissements scientifiques d’accueil ; Attendu qu’en tant que Délégué du Gouvernement, il y a lieu de veiller à l’intérêt général en ce compris la sécurité juridique du F.R.S.-­‐FNRS ; que celui-­‐ci commande la plus grande prudence sur la question de mise à disposition de travailleurs, principalement lorsque la politique du personnel est modifiée ; Sur les délais, Vu que la décision finale de la réforme du F.R.S.-­‐FNRS a été prise très tardivement au regard des dates limites de dépôt de dossier ; Que préalablement à la notification susmentionnée, le F.R.S.-­‐FNRS a largement communiqué sur la mise en oeuvre de la réforme ; Que le F.R.S.-­‐FNRS lui-­‐même a décidé de retarder d’un mois ledites dates limites ; Vu que l’intérêt général et celui des chercheurs eux-­‐mêmes ne pourrait conduire à prolonger l’état d’incertitude des postulants sur la méthode d’évaluation qui leur sera appliquée, celle-­‐ci ayant des effets en terme de recrutement, sélection et de promotion ; Que la réforme soulève une vive inquiétude auprès de chercheurs et d’organisations syndicales reconnues ; Qu’il n’appartient pas au Délégué du Gouvernement d’entrer dans cette discussion; En Conclusion, Attendu qu’il y a lieu de considérer qu’aucune décision n’a été prise définitivement avant le 21 décembre, suivant en cela les éléments développés dans la première partie de la motivation ; Qu’en tout état de cause aucune notification d’une décision prise autre que la notification relative aux décisions du Conseil d’Administration du 21 décembre n’a été portée à la connaissance du Délégué du Gouvernement ; Attendu que, même s’il fallait considérer qu’une décision avait été régulièrement prise avant le 21 décembre, celle-­‐ci n’a pas été précédée d’une concertation des chercheurs émargeant au F.R.S-­‐FNRS ; Qu’en conséquence une telle décision aurait été prise en infraction avec la loi ; Attendu qu’une communication proactive du Fonds a donné lieu à croire que la réforme avait été adoptée régulièrement créant en cela une apparence de droit et des attentes légitimes dans le chef des chercheurs ; Qu’il y a lieu de regretter cette communication maladroite sans pour autant pouvoir en supprimer les effets ; Qu’en l’espèce il ne serait pas opportun que l’effet du recours soit de suspendre une réforme déjà en application dans les faits ; Attendu qu’en conséquence, la décision du recours ne porterait que sur les exercices 2011 et suivants, suspendant pour ces exercice-­‐là les décisions prises par le Conseil d’Administration du F.R.S.-­‐FNRS ; que l’application de la réforme en 2010 ne serait pas entravée par la portée du recours ; Que la conséquence concrète du recours est d’amener le Conseil d’Administration a reprendre une décision dans les formes requises pour les exercices 2011 et suivants ; Qu’en conséquence, cela laisse largement le temps au Fonds de réaliser la concertation requise et de pourvoir à sa sécurité juridique ; LE DÉLÉGUÉ DU GOUVERNEMENT EXERÇANT LES FONCTIONS DE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT PRÈS LE F.RS.-­‐FNRS ET SES FONDS ASSOCIÉS DÉCIDE : Article 1. Un recours est introduit auprès du Ministre qui a la Recherche scientifique dans ses attributions concernant l’ensemble des décisions prises par le Conseil d’Administration du F.R.S-­‐FNRS relatives à la réforme du F.R.S.-­‐FNRS telles que notifiées de manière globale et par courrier électronique le 21 décembre 2009. Article 2. Par dérogation à l’article 1er, le recours ne porte que sur les années d’application 2011 et ultérieures. Article 3. Le recours est suspensif de la décision visée aux article 1 et 2, et prend effet immédiatement. Bruxelles, le 26 décembre 2009. LE DÉLÉGUÉ DU GOUVERNEMENT EXERÇANT LES FONCTIONS DE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT PRÈS LE F.RS.-­‐FNRS ET SES FONDS ASSOCIÉS, Dr. Fabrizio BUCELLA