JONAS ET LE POISSON 1 Jonas, le prophète, dans la Bible

Transcription

JONAS ET LE POISSON 1 Jonas, le prophète, dans la Bible
JONAS ET LE POISSON
1
Jonas, le prophète, dans la Bible, apprend difficilement que faire sans réserve la volonté de Dieu et croire en
acte à son infinie et universelle miséricorde sont en quelque sorte les deux faces conjointes du même acte de
foi. Le dialogue que voici (et qui nous vient d’Allemagne) brode sur ce thème essentiel. Son humour cocasse
et familier rejoint la pédagogie ironique du fameux petit livre de l’Ancien Testament (Jonas et les farces de
Dieu) pour nous faire nous interroger en profondeur : quel « instrument uni à Dieu » sommes-nous en vue de
l’annonce de l’Evangile ?
Le poisson : Jonas, tiens-toi un peu tranquille, sinon je vais avoir des nausées !
Jonas : C’est qu’il fait tout noir ici, et c’est tout gluant ! Je n’arrête pas de glisser.
Poisson : Tu es stupide ! Accompagne un peu mes mouvements de nage et çà ira. Je ne suis pas un bateau de
luxe !
Jonas : Je m’en étais aperçu, figure-toi ! Mais qu’est-ce que tu es donc ?
P : Je suis un poisson.
J : Cà, je le sais depuis longtemps ! Quand tu m’as englouti, je me suis dit tout de suite : « Voilà un poisson
qui m’avale ! » Bien. Mais qu’est-ce que c’est que ce poisson, de quelle race, de quelle espèce ?
P : Je suis unique en mon genre !
J : ???
P : Absolument unique, te dis-je. C’est que tu es un prophète désobéissant, et qu’un prophète désobéissant,
çà mérite un châtiment hors du commun.
J : Arrête là tes remarques désagréables. Ma conduite et ma mission ne te regardent pas.
P : Que tu crois ! Alors, dis-moi pourquoi, à ton avis, j’ai nagé en rond autour du bateau malgré la tempête et
la mer démontée ?
J : Eh bien, parce que tu es gourmand et que tu aimes la chair de matelot !
P : Oh, que tu es vulgaire ! Si je n’étais pas chargé de te sauver, je te recracherais immédiatement à la mer.
J : Ah, bon ? Parce que tu veux me sauver ?
P : Eh oui, bien sûr ! Pourquoi crois-tu que je t’ai fait passer au travers de ma mâchoire avec autant de
précautions et avalé tout rond dans mon estomac ?
J : Et tu vas me digérer maintenant ?
P : Les prophètes désobéissants sont tout-à-fait indigestes !
J : Mais je t’ai déjà dit… Comment sais-tu exactement que je… que je suis un prophète et…
P : Et moi, je t’ai dit que je suis unique en mon genre. J’ai été spécialement inventé pour toi. Quand « IL »
m’a fait, « IL » m’a glissé à l’oreille : « Quel travail cela me donne un prophète récalcitrant ! Pour pouvoir
sauver ce Jonas et l’acheminer là où il aura à faire, me voilà forcé de fabriquer un poisson spécial ! »
Voilà ce qu’« IL » m’a dit quand « IL » m’a créé. Je l’ai entendu de mes propres oreilles !
J : Mon Dieu, mon Dieu, mon Dieu…
P : Ah, enfin !
J : Qu’est-ce que cela veut dire « Ah, enfin » ?
P : Enfin, tu te décides à prier ! Il était temps ! Cela s’est fait attendre, dis donc, que tu veuilles bien entrer
en conversation avec LUI !
J : Mais c’est qu’on n’a rien à se dire, LUI et moi ! IL a déjà fait ce qu’IL veut avec moi. IL vient dans la
tempête. Après, IL vient comme un poisson. Et puis, maintenant, çà va être Ninive.
P : Mais çà, c’est pour dans deux jours !
J : Pas avant ?
P : Cela me fait plaisir de t’entendre dire que tu voudrais arriver à Ninive plus vite. Jusqu’à maintenant, tu
n’étais pas pressé d’y aller, non ?
J : Je ne le suis toujours pas davantage. Je ne veux pas y aller, à Ninive.
P : Peut-être, mais LUI, IL veut que tu y ailles.
J : Ecoute, mon cher poisson, essaie un peu de comprendre, tu as l’esprit ouvert.
P : Ah, tu as remarqué çà aussi !
JONAS ET LE POISSON
2
J : Oui, excuse-moi, j’avais oublié que tu es un poisson. Donc, s’il te plaît, comprends-moi. Je ne peux
vraiment pas y aller à Ninive, je ne peux pas aller dire à tous ces pécheurs : « Convertissez-vous, croyez au
vrai Dieu, sinon le châtiment divin vous tombera dessus. » Non, je ne peux pas, car je sais déjà…
P : … Que Dieu est miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour.
J : Poisson, tu es vraiment unique !
P : Merci d’en convenir ! Et je sais ce qui te contrarie : c’est que, par la miséricorde de Dieu, les Ninivites
vont se convertir.
J : Evidemment ! Si vraiment ils se convertissent, moi j’aurai l’air de quoi, avec mes discours sur le
châtiment de Dieu ?
P : Cela t’arrangerait bien que Dieu soit sans pitié et que les Ninivites soient anéantis, réduits à zéro,
ratatinés juqu’au trognon !
J : Exactement : ils ont péché, ils ont adoré les idoles, ils n’ont pas cru en Dieu, ils ont transgressé ses
commandements, ils se sont opposés à Lui, ils ont…
P : … désobéi. Ils n’ont pas fait ce que Dieu voulait.
J : Là, poisson, tu as dit juste. Ce sont des désobéissants.
P : Comme Jonas.
J : Quoi ?
P : Je répète : ils ont désobéi, comme Jonas, le prophète.
J : C’est…
P : … la vérité ! Regarde-toi un peu : tu n’es pas meilleur que les gens de Ninive. Tu n’es qu’un malheureux
petit prophète qui ne respecte pas la parole de son Dieu et qui essaie d’échapper à sa mission. Jonas sait
beaucoup mieux que Dieu ce que Dieu a à faire avec Ninive. Et ce Jonas-là…
J : Eh là ! Eh là ! Poisson, écoute-moi.
P : Silence, Jonas ! Ne proteste pas, sinon je connais au moins douze manières de faire des culbutes dans
l’eau et ce serait pour toi très désagréable. Donc, ce Jonas-là, disais-je, ne vit qu’en profitant de la
miséricorde de Dieu, parce que Dieu ne l’a pas tué, ce prophète désobéissant. Pourtant, il l’aurait mérité,
alors qu’au contraire…
J : IL m’a donné un bateau, IL m’a donné un poisson, IL m’a sauvé la vie.
P : Tiens, tiens. Peu à peu, Jonas se met à comprendre. C’est pour cela que moi, pauvre poisson, il faut non
seulement que je nage et que je nage, mais il faut aussi que je parle et que je parle, afin que…
J : … afin qu’un stupide petit prophète se décide à comprendre l’immensité de la miséricorde divine. Mon
cher poisson, merci. A présent, tais-toi un peu, je vais LUI parler à LUI qui nous a envoyés, toi et moi.
« Seigneur, écoute ma voix. Tu m’as jeté au sein de l’abîme, en pleine mer. Les flots m’environnaient et je
pensais que j’étais abandonné, que jamais plus je ne Te verrais. Les eaux m’avaient cerné et, perdu dans les
profondeurs, je me disais à moi-même : Jamais plus tu ne verras le Seigneur ton Dieu. Mais, Toi, mon Dieu,
Tu as sauvé ma vie de la perdition. Par Ta seule miséricorde, Tu as délivré mon âme qui Te reniait. C’est
pourquoi je Te rends grâce de m’avoir ainsi secouru. Merci pour tout ce que Tu as envoyé pour me
sauver. Amen. »
P : Qu’est-ce que tu veux que j’ajoute à çà ? Voilà une très belle prière, Jonas ! Et c’est une bien bonne
pensée de m’avoir inclus dedans.
J : Eh oui ! C’est que, peu à peu, vois-tu, tu as pris de la place dans mon cœur.
P : Et toi, dans mon estomac ! Mais çà n’est pas grave, le moment est venu de te recracher.
J : Déjà ! On est déjà arrivés ?
P : Oui, Ninive est juste en vue. J’ai la consigne de te déposer sur ce rivage. Attention, Jonas, étends-toi bien
en direction de mon gosier. Je vais compter jusqu’à trois, alors tu prendras une bonne respiration et moi, ma
mission sera finie.
J : Vraiment, poisson, tu es unique ! Merci à toi d’avoir été obéissant à la place du désobéissant prophète.
P : Cà va, çà va. Adieu. Réjouis-toi de la miséricorde de Dieu. Attention, un, deux, trois… !
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Documents pareils