La Lettre de la franchise

Transcription

La Lettre de la franchise
La Lettre du Cabinet
n 4/2010
Editorial
Sommaire
Libre propos
2
matière sont l’occasion de faire le point sur cette clause
Corporate et Droit des sociétés
4
essentielle dont le régime est encore trop souvent méconnu.
Droit fiscal
5
Entreprises en difficulté
6
Contrats commerciaux
7
Concurrence et Distribution
8
Personnes et Patrimoine
9
Social et Ressources humaines
10
difficulté, il est le siège de décisions importantes relatives à
Immobilier
11
la prescription de l’action en nullité des actes accomplis en
Procédure civile et voies d’exécution
12
période suspecte et au principe de proportionnalité en
Propriété intellectuelle
13
Actualité du Cabinet
14
Notre « libre propos » de ce mois est consacré à la clause
pénale. Les applications jurisprudentielles récentes en la
En droit des sociétés, la Cour de cassation apporte des
précisions intéressantes sur le délit d’initié et sur
l’application à une EURL, après sa dissolution, du principe
processuel selon lequel nul ne peut être jugé sans avoir été
entendu ou appelé. Quant au droit des entreprises en
matière de sanctions personnelles du dirigeant.
En droit des contrats, notre attention s’est portée sur le
projet de loi instituant « l’acte contresigné par avocat » et
sur un arrêt de la Cour de cassation qui pose clairement les
principes en matière de preuve de l’existence du prêt.
D’autres
L’actualité du droit de la concurrence et de la distribution est
notamment en propriété intellectuelle (la protection des
décisions
intéressantes
ont
été
rendues,
marquée par le nouveau règlement d’exemption d’accords
titres d’œuvres), en droit social (principe de non cumul des
verticaux adopté le 20 avril dernier par la Commission
sanction et clause de non concurrence) et en droit des
européenne et par une décision riche d’enseignements de
personnes (théorie du mandat apparent entre époux).
l’Autorité de la concurrence relative aux pratiques dans le
secteur du lavage automobile.
Bonne lecture.
En droit immobilier, on retiendra la parution de l’arrêté sur
les honoraires des syndics et deux arrêts de la Haute
juridiction concernant le droit de repentir et la question de
Jean-Charles Simon
François-Luc Simon
la validité de la renonciation à la commercialité.
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LIBRE PROPOS
Clauses pénales et pouvoir modérateur du juge :
le point sur les applications récentes
Le second alinéa de l’article 1152 du code civil fait couler
l’indemnité d’immobilisation et l’astreinte conventionnelle.
beaucoup d’encre depuis son insertion dans le code civil par
Cette différentiation est réalisée par référence aux deux
la loi du 9 juillet 1975 (loi n 75-597). Exemple le plus
fonctions
manifeste du pouvoir d’ingérence du juge dans le contrat,
considérées comme étant qualificatives de la clause pénale :
cette disposition fait exception à l’article 1134 alinéa 1 du
la fonction d’indemnisation (a) et la fonction comminatoire
même code, qui consacre la force obligatoire de la volonté
(b). La Cour de cassation, dans son arrêt du 12 janvier 2010
des parties.
(pourvoi n 09-11.856), a rappelé clairement ces principes
qui,
en
droit
positif,
sont
classiquement
classiques en sanctionnant une cour d’appel qui avait
En vertu de l’article 1152 alinéa 2 du code civil en effet, le
juge dispose du pouvoir de modifier le montant des
qualifié une stipulation de clause pénale, sans établir son
caractère comminatoire et indemnitaire.
dommages-intérêts convenu entre les parties pour le cas où
l’une d’entre elles manquerait à l’une de ses obligations.
a/ Fonction indemnitaire
Comme l’affirme expressément le texte, le juge peut user de
son pouvoir d’office, sans que l’une des parties en fasse la
demande, et le pouvoir du juge ne peut être écarté par le
contrat. Bien que l’alinéa 2 de l’article 1152 du code civil
envisage tant l’augmentation que la modération du montant
stipulé, l’usage du second de ces pouvoirs est très largement
supérieur à celui du premier, si bien que, dans la grande
majorité des hypothèses, c’est le pouvoir modérateur du
juge qui est évoqué.
C’est bien au sujet de ce pouvoir modérateur que la Cour de
cassation a été amenée à se prononcer à plusieurs reprises
au cours du premier trimestre de cette année. Quatre arrêts
rendus en la matière depuis le début de l’année offrent
l’occasion de faire le point sur plusieurs aspects du pouvoir
modérateur du juge, s’agissant tant du champ d’application
de l’article 1152 alinéa 2 du code civil (1) que de l’exercice
du pouvoir modérateur du juge (2).
1/ Le champ d’application de l’article 1152 du code
civil
La clause pénale est « la compensation des dommages et
intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de
l'obligation principale » (C. civ. Art. 1229). Cette fonction
indemnitaire est rappelée par deux décisions récentes.
L’affaire ayant donné lieu à l’arrêt précité du 12 janvier 2010
était la suivante : à la suite de l’échec d’une vente, faute pour
les acheteurs d’avoir obtenu le prêt érigé en condition
suspensive, le mandataire du vendeur avait demandé le
paiement du montant de sa commission. La cour d’appel
avait qualifié cette commission de clause pénale, et l’avait
réduite à un euro symbolique sur le fondement de l’article
1152 alinéa 2 du code civil. Cette décision est cassée, faute
pour la cour d’appel d’avoir caractérisé, notamment, le
caractère indemnitaire de la somme litigieuse.
La chambre sociale de la Cour de cassation a également
souligné le caractère indemnitaire de la clause pénale, dans
son arrêt du 24 mars 2010 (pourvoi n 08-41.861) :
« l’indemnité contractuellement prévue à la charge de
l’employeur, qui met fin au contrat de travail, constituant
Le pouvoir modérateur du juge est source d’incertitude pour
la réparation forfaitaire d’un préjudice résultant de la
les parties, dont les prévisions risquent d’être écartées.
cessation de l’exécution du contrat, peut être modérée ou
Certes, il est possible de tenter de fixer, au stade de la
augmentée en application [de l’article 1152 du code civil] ».
rédaction du contrat, un montant dont il est raisonnable de
C’est ce caractère indemnitaire qui a motivé la décision de la
penser qu’il correspondra peu ou prou au préjudice subi,
Cour d’appel de Paris du 10 septembre 2008 (Juris-Data
mais les parties peuvent préférer placer la clause en dehors
n 371740)
du champ d’application de l’article 1152 du code civil. Aussi,
d’indemnisation : en l’espèce, la clause avait pour unique but
un abondant contentieux concerne-t-il la différentiation de
de contraindre le débiteur à remplir son obligation, et non
la clause pénale, terrain d’application dudit article, de
de réparer le préjudice du créancier ; aussi ne pouvait-elle,
clauses plus ou moins voisines, telles que la clause de dédit,
selon la Cour, être qualifiée de clause pénale.
distinguant
clause
d’astreinte
et
clause
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 2
b/ Fonction comminatoire
La chambre commerciale de la Cour de cassation, dans son
arrêt du 16 février 2010 (pourvoi n 09-13.380), a rappelé
La clause pénale a pour fonction de contraindre le débiteur
que de tels motifs ne pouvaient à eux seuls déterminer le
d’exécuter son obligation, ou, autrement dit, de le dissuader
caractère manifestement excessif de la clause considérée : la
d’y manquer. La clause pénale partage ce caractère
disproportion manifeste doit s’apprécier au regard de
comminatoire avec l’astreinte conventionnelle évoquée ci-
l’importance du préjudice effectivement subi. Par suite, le
dessus.
juge modérant le montant alloué au créancier ne peut
descendre en dessous du préjudice effectivement subi (Cass.
Dans la mesure où le caractère comminatoire implique que
civ. 1ère, 24 juillet 1978, Bull. civ. I, n 280).
la clause pénale garantisse l’exécution d’une obligation, ne
peut être qualifiée de clause pénale une clause prévoyant le
Rappelons en outre que le juge doit se placer au jour où il
versement d’une somme d’argent par l’une des parties à
statue pour apprécier le caractère manifestement excessif de
l’autre en cas de survenance d’un évènement
la clause pénale (Cass. civ. 1ère , 19 mars 1980, Bull. civ. I,
qui ne
constitue pas une faute contractuelle.
n 95).
Aussi la solution rappelée par la chambre sociale de la Cour
b/ Pouvoir souverain du juge
de cassation dans son arrêt du 24 mars 2010 – application
de l’article 1152 alinéa 2 du code civil à l’indemnité
conventionnelle de licenciement – ne fait-elle pas l’objet
d’une approbation unanime par la doctrine lorsqu’elle
concerne une indemnité conventionnelle prévue par un
contrat à durée indéterminée, compte tenu du droit, certes
encadré, de l’employeur de rompre un tel contrat. Cette
solution est cependant conforme au droit positif, la
jurisprudence qualifiant de clauses pénales les indemnités
conventionnelles de licenciement, qu’elles soient contenues
dans les contrats à durée déterminée (Cass. soc., 9 févr.
1989, pourvoi n 86-45.042) ou à durée indéterminée (Cass.
soc., 18 nov. 2009, pourvoi n 08-42.830).
2/ Exercice du pouvoir modérateur du juge
A l’intérieur des limites ci-dessus rappelées, le juge exerce
un pouvoir souverain dans la fixation du montant alloué au
créancier. Ainsi, le pourvoi ayant donné lieu à l’arrêt rendu
le 5 janvier 2010 par la troisième chambre civile de la Cour
de cassation (pourvoi n 08-21.569) reprochait à la Cour
d’appel d’avoir modéré le montant de la clause pénale au
montant de l’intérêt légal. La Cour de cassation estime que
ce moyen n’est pas de nature à permettre l’admission du
pourvoi.
Dans le cadre de son pouvoir modérateur, le juge du fond est
en effet libre de fixer le montant de la somme allouée au
créancier dans la double limite du montant de la clause et du
préjudice effectivement subi : il peut choisir de réduire ce
montant à celui du préjudice effectif (Cass. com., 13
Les arrêts rendus par la Cour de cassation au cours du
novembre 2002, pourvoi n 99-14.494), ou fixer un montant
premier trimestre 2010 rappellent deux aspects essentiels
supérieur à ce préjudice, afin de conserver à la clause son
de l’exercice du pouvoir du juge : le pouvoir modérateur du
caractère comminatoire (Cass. civ. 1ère, 8 juin 2004, pourvoi
juge est encadré par des principes tenant tant à
n 00-15.497).
l’appréciation du caractère manifestement excessif de la
clause pénale qu’à la fixation du montant de la somme
allouée au créancier (a) ; ce cadre lui laisse cependant une
marge de liberté où s’exerce son pouvoir souverain
d’appréciation (b).
Les décisions précitées rappellent certains des aspects
essentiels du pouvoir modérateur attribué aux juges du fond,
qu’il convient de prendre en considération tant lors de la
rédaction du contrat qu’en cas de contentieux.
a/ Encadrement du pouvoir du juge
Les juridictions appelées à statuer sur le caractère
manifestement excessif d’une clause pénale se sont fondées
sur divers critères, incluant notamment le comportement
des parties, ou le bénéfice susceptible d’être tiré de
l’opération par le créancier.
Flore SERGENT
Avocat au Barreau de Paris
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 3
CORPORATE ET DROIT DES SOCIÉTÉS
Tempérament au délit d’initié
(Cass. com., 23 mars 2010, pourvoi n 09-11.366)
En vertu de l’article 622-1 du Règlement général de l’AMF,
a été sanctionné pour délit d’initié. Les juges du fond saisis
toute personne doit s’abstenir d’utiliser une information
de l’affaire ont donné droit à l’AMF. Leur position a été
privilégiée qu’elle détient, en acquérant ou en cédant des
entérinée par la chambre commerciale de la Cour de
instruments financiers concernés par cette information. La
cassation. Selon la Haute Juridiction, le délit d’initié est
chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé, le
constitué dès lors que la matérialité de ses éléments
23 mars dernier, que cette interdiction n’était pas absolue,
constitutifs est établie, à savoir la détention d’une
confirmant ainsi la position, déjà affirmée, de l’AMF. Dans
information privilégiée suivie de la cession ou l’acquisition
l’affaire portée devant la Cour de cassation, les dirigeants
des titres concernés par cette information, sauf à établir que
d’une société cotée (la société A), ayant subi des pertes,
l’opération (vente ou achat) était justifiée par un motif
avaient envisagé de procéder à une augmentation de capital
impérieux. Le délit d’initié n’est donc plus systématique et
réservée à une société actionnaire de la société (la société
absolu. Encore faut-il réussir à établir le motif impérieux
B). Compte tenu de la situation, la souscription des actions
qui a rendu nécessaire la cession ou selon le cas, l’achat des
devait se faire à un prix plus de deux fois inférieur au cours
titres concernés par l’information privilégiée. Ce que n’avait
de bourse du moment. Quelques jours avant que cette
pas fait, selon l’AMF et les juges du fond, le gérant mis en
opération soit rendue publique par un communiqué de
cause en l’espèce. Ce dernier s’était en effet borné à
presse, le gérant et également associé unique de la société B
invoquer que la cession des actions de la société A se
a cédé, pour le compte de cette dernière, une partie des
justifiait par la nécessité de réunir les fonds suffisant pour
actions de la société A, réalisant ainsi une plus-value. Suite
souscrire
à une enquête diligentée par l’AMF, le gérant de la société B
d’améliorer en conséquence la situation de la société A.
à
l’augmentation
de
capital
envisagée
et
Procédure : le droit d’être entendu de l’associé unique d’une EURL après sa dissolution
(Cass. com., 7 avril 2010, pourvoi n 09-11.002)
Par un arrêt en date du 7 avril dernier, la chambre
morale et d’existence de leur auteur» (Aix-en-Provence,
commerciale de la Cour de cassation vient d’apporter
16.12.2008). Cette décision a été censurée par la Cour de
certaines précisions quant à l’application à une EURL, après
cassation sous le double visa de l’article 14 du code de
sa dissolution, du principe selon lequel nul ne peut être jugé
procédure civile et de l’article 1844-5 du code civil, sous sa
sans avoir été entendu ou appelé (CPC. Art. 14). En l’espèce,
rédaction antérieure à la loi NRE. En vertu de ces deux
une EURL, représentée par son gérant, avait poursuivi l’un
textes dont le second prévoyait que la dissolution d’une
de ses clients en paiement d’un marché de travaux réalisé
société unipersonnelle opérait transmission universelle du
pour ce dernier. Au cours de la procédure, l’EURL a été
patrimoine (TUP) de celle-ci à l’associé unique, personne
dissoute et son associé unique a été désigné liquidateur.
physique ou morale, les juges d’appel ne pouvaient annuler
Postérieurement à la clôture de la liquidation, ce dernier a
les
obtenu la condamnation du débiteur, a signifié à ce dernier
condamnation (signification…), sans avoir fait appeler à
le jugement de condamnation et a fait inscrire une
l’instance l’EURL ou, si la personne morale avait disparu,
hypothèque judiciaire sur les biens du débiteur. Le
son associé unique ayant recueilli ses droits et obligations.
liquidateur a ensuite cédé la créance de condamnation à une
Cette solution a le mérite de combiner un principe général
autre société. Cette dernière, souhaitant recouvrer la
de la procédure (CPC. Art. 14) et les spécificités du droit des
créance cédée, a saisi les juges qui l’ont déboutée de ses
sociétés. Toutefois, cette décision se fonde sur l’article 1844-
demandes. Le jugement des premiers juges a été confirmé
5 du code civil dans sa rédaction antérieure à la NRE.
par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence. Selon cette dernière,
Aujourd’hui, la dissolution d’une EURL n’entraîne une TUP
« tous les actes réalisés par l’EURL, représentée par son
que si l’associé unique est une personne morale. Qui
gérant en exécution du jugement [de condamnation]
faudrait-il donc attraire en justice en cas de disparition
doivent être annulés en raison de l’absence de personnalité
d’une EURL dont l’associé est une personne physique ?
actes
réalisés
postérieurement
au
jugement
de
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 4
DROIT FISCAL
Réseau commercial et propriété de la clientèle
(Conseil d’Etat, 17 février 2010, n 311953)
En conformité avec la jurisprudence de la Cour de cassation,
doit donc avoir une contrepartie. L’absence de contrepartie
le Conseil d’Etat confirme qu’une entreprise, membre d’un
constitue fiscalement un acte anormal de gestion et
réseau
services
l’administration est alors en droit de réintégrer la valeur du
d’assistance à la gestion fournis par la société mère, est
fonds de commerce transféré dans les résultats imposables
propriétaire d’une clientèle propre dès lors qu’elle gère son
de la société apporteuse.
commercial
et
bénéficiant
de
seuls
activité de façon autonome. Au cas d’espèce, la société mère
agissait seulement comme centrale de réservation pour les
clients de sa filiale.
En l’espèce, les juges suprêmes ont considéré que la filiale,
qui avait transféré gratuitement la clientèle gérée de façon
autonome à une autre société du groupe, avait réalisé un
Une telle position a des conséquences sur le plan fiscal, en
acte anormal de gestion et devait être taxée sur la valeur de
cas de transfert d’activité qui est assimilé à une cession, et
cette clientèle.
Publication et opposabilité des projets d’instructions fiscales
(Communiqué de presse du Ministère de l’Economie du 16 avril 2010)
Le Ministre de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi a
de réseaux (IFER), institué par la Loi de Finances pour 2010
annoncé deux séries de mesures destinées à renforcer la
au profit des collectivités territoriales.
sécurité
juridique
des
contribuables.
Désormais,
les
principaux projets d’instructions fiscales seront accessibles
Cette nouveauté, si elle s’avère indéniablement favorable
sur Internet. De plus, les contribuables pourront s’en
aux contribuables, met également en évidence la place
prévaloir immédiatement, c’est-à-dire avant même que le
primordiale
texte définitif ne soit publié.
instructions, dans la compréhension de notre système fiscal.
Cette innovation s’applique dès à présent au projet
Encore faudra-t-il être vigilant à ce qu’elles soient bien
d’instruction relatif à l’impôt forfaitaire sur les entreprises
conformes au texte de loi.
qu’occupent,
pour
l’administration,
les
Cession de participation au sein du groupe familial
(Instruction du 16 mars 2010, 5-C-4-10)
Les cessions de participation détenues dans une société
L’article 29 de la loi de Finances pour 2010 (n 2009-1673
soumise à l’impôt sur les sociétés ayant son siège social en
du 30 décembre 2009) a élargi le champ d’application de ce
France au sein du groupe familial sont exonérées sous
dispositif en incluant au sein du groupe familial les frères et
certaines conditions.
sœurs du cédant ainsi que les frères et sœurs de son
conjoint.
Ainsi, le groupe familial doit notamment avoir détenu au
moins 25% du capital à un moment quelconque au cours
En revanche, l’instruction du 16 mars 2010 commentant ces
des cinq années précédant la cession. La notion de « groupe
nouvelles dispositions est venue préciser que les titres
familial » du cédant s’entendait traditionnellement de son
appartenant en propre au conjoint des frères et sœurs du
conjoint, ses ascendants et descendants ainsi que des
cédant ou de son conjoint n’étaient pas retenus pour
ascendants et descendants de son conjoint.
l’appréciation du seuil de participation de 25%.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 5
ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ
De la naissance régulière d’une créance postérieure
(Cass. com., 30 mars 2010, pourvoi n 09-10729)
Nonobstant les droits propres de l’administrateur judiciaire
En l’espèce, il s’agissait de déterminer le sort de la créance
(option sur la continuation des contrats en cours,
d’honoraires de l’avocat mandaté par le seul débiteur. Au vu
acquiescement de revendication…), la répartition des
de la nature de la mission (examen du montant du passif,
pouvoirs entre celui-ci et le débiteur résulte des dispositions
préparation d’un plan de redressement), celle-ci aurait dû
du jugement d’ouverture.
être autorisée par l’administrateur judiciaire. Aussi, la
créance d’honoraires ne peut bénéficier d’un paiement
La répartition des pouvoirs influe sur la détermination des
créances postérieures éligibles au traitement préférentiel de
l’article L.622-17
prioritaire. Cette décision prolonge un précédent arrêt de la
Cour de cassation (Cass. com., 19 mai 2004, n 01-13515).
du code de commerce (ancien article
L.621-32 du code de commerce). Seules les créances nées
Répondant au moyen du créancier, la Cour suprême a
régulièrement après le jugement d’ouverture peuvent
considéré en tout état de cause que le mandat accordé en
bénéficier de ce traitement préférentiel. Or, une créance ne
l’espèce par le débiteur n’était pas un acte de gestion
peut naître régulièrement si elle résulte d’un engagement
courante qui resterait valable même lorsque celui-ci l’a
que le débiteur ne pouvait consentir sans l’assistance de
accompli seul (article L.622-3 du code de commerce –
l’administrateur (Cass. com., 4 février 1992, n 90-15977).
ancien article L.621-23 du code de commerce).
(désormais
Nouvelle illustration du principe de proportionnalité en matière de sanction
(Cass. com., 30 mars 2010, pourvoi n 08-22.140)
Cette décision rendue en matière de comblement de passif
Cette technique consiste pour les organes de la procédure à
vient conforter une solution prétorienne récente adoptée
retenir à l’encontre du dirigeant plusieurs fautes aux fins de
par la Cour de cassation en matière de sanctions
favoriser le succès des poursuites initiées par eux.
extrapatrimoniales (Cass. com., 1er décembre 2009, n 0817187) et patrimoniales (Cass. com., 15 décembre 2009,
La Cour rappelle que si les juridictions du fond apprécient
n 08-21906). Sous couvert du principe de proportionnalité,
souverainement le quantum de la sanction, y compris en
jadis apanage du droit pénal, la Cour vient une nouvelle fois
présence d’une faute unique, elles doivent néanmoins, si
condamner la technique dite de « l’arrosage ».
plusieurs fautes sont retenues, établir chacune d’entre elles.
Nullités de la période suspecte : prescription de l’action
(Cass. com., 30 mars 2010, pourvoi n 08-17.556)
L’arrêt rendu le 30 mars 2010 par la Cour de cassation
La Cour approuve le rejet de la fin de non-recevoir tirée de
énonce clairement que l’action en nullité des actes
la prescription, précisant que les règles de prescription de
accomplis en période suspecte (article L.632-1 du code de
droit commun n’ont pas lieu de s’appliquer aux actions en
commerce) n’est pas soumise à la prescription de droit
nullité de l’article L.632-1 du code de commerce, lesquelles
commun.
ne sauraient être prescrites à partir du moment où l’acte
argué de nullité a été accompli en période suspecte.
En l’espèce, était soulevée la nullité de deux cessions de
créances consenties en 1990 et 1991 par une société placée
La seule limite à l’action en nullité de la période suspecte
en redressement judiciaire en 1991. L’action en nullité
semble donc résulter de la durée de la mission des organes
n’avait cependant été introduite qu’en 2004.
de la procédure habilités à l’intenter.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 6
CONTRATS COMMERCIAUX
La création de « l’acte contresigné par avocat »
(Projet de loi, Ass. Nat., n 2383, déposé le 17 mars 2010)
Un projet de loi de modernisation des professions judiciaires
L’acte contresigné par avocat offre donc une sécurité
et juridiques réglementées a été présenté par le Garde des
juridique renforcée : d’une part, il atteste de l’exécution de
Sceaux et déposé à l’Assemblée nationale le 17 mars dernier.
son obligation de conseil par l’avocat, de sorte qu’il
deviendra plus difficile pour l’une des parties d’affirmer
L’article 1er crée l’acte contresigné par avocat et prévoit que :
qu’elle n’avait pas conscience de la portée de l’acte au
moment où elle s’est engagée ; d’autre part, il fait pleine foi
de l’écriture et de la signature des parties et ne pourra donc
« En contresignant un acte sous seing privé, l’avocat atteste
plus faire l’objet d’une contestation par la procédure dite de
avoir éclairé pleinement la ou les parties qu’il conseille sur
vérification d’écriture prévue aux articles 287 et suivants du
les conséquences juridiques de cet acte.
code de procédure civile. Néanmoins, la preuve d’une fraude
L’acte sous seing privé contresigné par les avocats de
pourra permettre de remettre en cause l’origine de l’acte :
chacune des parties ou par l’avocat de toutes les parties fait
une personne arguant de ce que sa signature ou son écriture
pleine foi de l’écriture et de la signature de celles-ci tant à
aurait été contrefaite ou de ce que son identité aurait été
leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayant cause. La
procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui
usurpée demeurera recevable à agir contre l’acte sur ce
fondement.
est applicable.
L’acte contresigné par avocat est, sauf disposition
dérogeant expressément au présent article, dispensé de
toute mention manuscrite exigée par la loi ».
La portée de la réforme demeure limitée. L’ordonnancement
juridique entre actes sous seing privé et actes authentiques
n’est pas bouleversé : les actes authentiques demeurent les
seuls à même d’avoir force exécutoire et date certaine et de
conférer à un acte une force probante renforcée quant à son
Il est ainsi proposé de reconnaître une portée juridique au
contenu. A ce propos, le Garde des Sceaux, interrogé sur les
contreseing, par l’avocat, de l’acte sous seing privé afin,
garanties pouvant être apportées aux notaires dans le cadre
d’une part, de manifester l’engagement par l’avocat de sa
de la création de l’acte d’avocat, a précisé, dans une réponse
responsabilité
ministérielle du 16 mars 2010, qu’il ne doit pas avoir pour
et,
d’autre
part,
de
décourager
des
effet de porter atteinte à l’autorité de l’acte authentique.
contestations ultérieures.
La preuve de l’existence d’un prêt
(Cass. civ. 1ère, 8 avril 2010, pourvoi n 09-10.977)
« La preuve de la remise de fonds à une personne ne suffit
L’arrêt est cassé au visa des articles 1315, 1341 et 1892 du
pas à justifier l’obligation pour celle-ci de les restituer ». Tel
code civil : « la cour d’appel, qui n’a pas constaté que la
est l’enseignement de l’arrêt commenté.
preuve du prêt litigieux était apportée conformément aux
règles qui gouvernent la preuve des actes juridiques, a
En l’espèce, un homme avait assigné son ex-compagne en
violé les textes susvisés ».
remboursement d’une somme qu’il prétendait lui avoir
prêtée et non donnée.
La décision est logique : 1/ il appartient à celui qui invoque
un prêt d’en prouver l’existence et non au prétendu débiteur
Pour considérer que la preuve d’un prêt était rapportée et
de prouver qu’il a reçu une donation (C.civ. art. 1315) ; 2/ un
faire droit à sa demande, les juges du fond ont relevé que la
écrit était nécessaire puisque la somme « prêtée » était
matérialité du transfert des fonds en cause était établie,
supérieure à 1.500 € (C.civ. art. 1341) ; or, les juges du fond
qu’aucun acte de donation n’avait été signé, et se sont
n’avaient
appuyés sur deux attestations émanant de tiers.
reconnaissance de dette.
pas constaté
l’existence d’un écrit
valant
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 7
CONCURRENCE ET DISTRIBUTION
L'exemption par catégorie des « restrictions verticales » : nouvelle réglementation
(Règlement de la Commission européenne du 20 avril 2010, n 330/2010)
Le Règlement (UE) nº330/2010 de la Commission du 20
Une nouvelle définition de propriété intellectuelle.
avril 2010 concernant l’application de l’article 101 3, du
La nouvelle définition des droits de propriété intellectuelle
Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne à des
du nouveau Règlement intègre désormais le savoir-faire. Le
catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées
savoir-faire est par ailleurs défini comme « un ensemble
et ses nouvelles lignes directrices entreront en vigueur le 1er
secret, substantiel et identifié d'informations pratiques non
juin prochain et ce jusqu’au 31 mai 2022.
brevetées, résultant de l'expérience du fournisseur et
testées par celui-ci; dans ce contexte, «secret» signifie que
Un
nouveau
le
champ
le savoir-faire n'est pas généralement connu ou facilement
des
grandes
accessible; «substantiel» se réfère au savoir-faire qui est
nouveautés apportée par le nouveau Règlement est la prise
significatif et utile à l'acheteur aux fins de l'utilisation, de la
en compte, pour déterminer le bénéfice de l’exemption, de
vente ou de la revente des biens ou des services
la part de marché du distributeur. Désormais, l'exemption
contractuels; «identifié» signifie que le savoir-faire est
s'applique à condition que la part de marché détenue par le
décrit d'une façon suffisamment complète pour permettre
fournisseur et le distributeur ne dépasse pas 30 % du
de vérifier s'il remplit les conditions de secret et de
marché en cause (article 3 du Règlement).
substantialité ».
Les ventes en ligne. Autre élément important, la
La nouvelle réglementation communautaire renferme
Commission a rappelé qu'il est illégal pour un fournisseur
encore bien davantage d’informations, qui en implique une
d'interdire, de façon générale et absolue, aux distributeurs
lecture rigoureuse.
d’application
seuil
de
déterminant
l’exemption.
Une
membres de son réseau de pratiquer la vente en ligne. Les
distributeurs agréés doivent avoir la possibilité de vendre
On notera enfin que, sur le plan national, l’Autorité de la
par leur site internet. Cela nécessite, en ce qui concerne la
Concurrence s’est félicitée de l’entrée en vigueur de ce
distribution sélective, que les fournisseurs ne puissent pas
nouveau socle de règles et de la modernisation des règles
limiter les quantités vendues par internet ou pratiquer des
européennes relatives aux accords de distribution. Son
prix plus élevés sur des produits devant être vendus par
président, Bruno Lasserre, a ainsi déclaré : « ce nouveau
internet. En revanche, le droit de la concurrence n’interdit
cadre, qui est cohérent avec l'approche suivie par l'Autorité
pas aux fournisseurs de subordonner
l'entrée d'un
de la concurrence française, stimulera la concurrence au
distributeur dans un réseau de distribution sélective à la
bénéfice des consommateurs, tout en garantissant la
détention d'une ou plusieurs boutiques physiques, qui
prévisibilité dont les entreprises ont besoin pour construire
permet de contrôler la bonne exploitation de leur marque.
leurs réseaux de distribution ».
Examen de pratiques dans le secteur du lavage automobile
(Décision nº 10-D-12 du 15 avril 2010 de l’Autorité de la concurrence)
Une association de franchisés et anciens franchisés d’un
Une autre question portait sur le point de savoir si le
réseau de nettoyage de voitures dénonçait la mise en œuvre
franchiseur pouvait imposer à ses franchisés l’utilisation
par la tête de réseau de pratiques anticoncurrentielles. Une
d’un savon, dont l’approvisionnement était assuré via la tête
des questions soulevées par cette affaire concernait la mise
de réseau. Rappelant les règles classiques de la validité des
en œuvre de pratiques discriminatoires (sanctionnant
clauses d’approvisionnement exclusif, l’Autorité de la
différemment le non-respect de certaines clauses du contrat
Concurrence a estimé qu’il n’était pas établi que la clause
de franchise). L’Autorité de la Concurrence a débouté la
d’approvisionnement exclusif en savon imposée par la tête
demanderesse à raison du caractère marginal de telles
de réseau à ses franchisés n’était pas indispensable à la mise
pratiques et du fait que le franchiseur avait adopté plusieurs
en œuvre de l’accord de franchise « Eléphant Bleu ». C’est
mesures pour y mettre fin.
dire qu’elle présume donc de la validité de la clause…
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 8
PERSONNES ET PATRIMOINE
Limite de la théorie du mandat apparent entre époux
(Cass. civ. 1ère, 31 mars 2010, pourvoi n 08-19.649)
Un mari a donné seul son accord au protocole par lequel les
la Haute juridiction. Cette dernière, constatant que l’acte
deux époux consentaient à l'insertion de deux parcelles dans
d'aliénation avait été signé par le seul mari et que les
l'emprise d’un remembrement amiable en vue d'un projet de
terrains constituaient des biens communs, en déduit que la
lotissement. Le couple ayant finalement décidé de ne pas
société aurait dû s'assurer de l'accord de l'épouse qui ne
signer l’acte de cession fût poursuivi par la société, partie à
pouvait résulter « de l'attitude passive de celle-ci lors des
l’acte, aux fins de réalisation par eux du contrat et du
négociations ayant précédé et suivi la signature de l'acte ».
paiement de dommages-intérêts. La société dont les
Dès lors, entre époux, le mandat apparent ne peut donc se
demandes furent rejetées en appel forma un pourvoi devant
déduire de l'attitude passive de l’un d’entre eux.
Attribution du domicile conjugal en pleine propriété au titre de la prestation compensatoire
(Cass. civ. 1ère, 31 mars 2010, pourvoi n 09-13.811)
Dans cette espèce, le divorce des époux X fut prononcé aux
l’inconventionalité de l'article 274 alinéa 2 du code civil au
torts exclusifs du mari. A ce titre et prenant « en compte la
regard de l’article 1er du Protocole additionnel n 1 de la
valeur des droits dont l'épouse bénéficiera après la
Convention européenne des droits de l‘Homme, en ce qu‘il
liquidation du régime matrimonial » la Cour d’appel a
permet au juge d'attribuer à l'un des époux, à titre de
« estimé que la situation matérielle et professionnelle de
prestation compensatoire et hors de toute « utilité
chacune des parties établissait que la rupture du lien
publique», la propriété de biens qui sont propriété
conjugal entraînait une disparité au détriment de l'épouse
personnelle de l'autre. La Cour écarta cette argumentation
justifiant que lui soit allouée une prestation compensatoire
qui tendait à remettre en cause le pouvoir souverain du
prenant la forme de l'attribution en pleine propriété du
juge. En effet, aux termes de l’article 274 du code civil, le
bien immobilier constituant le domicile conjugal », en
juge décide seul des « modalités selon lesquelles s'exécutera
partie composé d'un propre au mari. L’époux forma un
la prestation compensatoire en capital » et notamment par
pourvoi
l’« attribution de biens en propriété ».
en
cassation
et
invoqua,
notamment,
Le nom patronymique et l’intérêt supérieur de l’enfant
(Cass. civ. 1ère, 17 mars 2010, pourvoi n 08-14.619)
L'intérêt supérieur de l'enfant doit, selon la Haute
seconde reconnaissance par son père biologique. La Cour
juridiction, être une considération primordiale dans toutes
d’appel ayant débouté la demande formulée par le concubin
les décisions le concernant. C’est dans la droite ligne de ce
de la mère tendant à ce que l’enfant conserve son nom,
courant de pensée que la décision du 17 mars dernier a été
celui-ci forma un pourvoi en cassation. Cette dernière
rendue. En l’espèce, un enfant né sous le nom de sa mère est
confirma la position de la Cour d’appel en déclarant que « le
reconnu, quelques mois plus tard, par le concubin de cette
seul fait d'avoir porté ce nom depuis l'âge de un an ne
dernière, dont il prend le nom. Plusieurs années après, un
pouvait permettre à l'enfant d'acquérir ce nom et qu'en
second homme, déclarant être le véritable père de l’enfant,
outre, l'enfant allait reprendre le nom de sa mère qui
conteste la première reconnaissance. L’homme à l’origine
demeurait dans sa mémoire (…) et non celui de son père
de cette contestation, se révélant, au moyen d’une expertise
qu'elle ne connaissait pas encore ». Ainsi, le nom donné à
biologique, être le véritable père de l’enfant, la première
l’enfant devient celui qui lui permet de se rattacher au
reconnaissance est annulée et l'enfant fait alors l'objet d'une
mieux à une famille et n’est plus qu’un simple patronyme.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 9
SOCIAL ET RESSOURCES HUMAINES
Le principe de non-cumul des sanctions : une conception extensive
(Cass. soc., 16 mars 2010, pourvoi n 08-43.057)
Dans cette affaire, un employeur qui avait eu connaissance
Son argumentation est rejetée. Selon la chambre sociale,
d’un ensemble de faits fautifs d’une salariée, l’avait
l’employeur, informé de l’ensemble des fais reprochés au
sanctionnée à deux reprises, par un avertissement pour les
salarié et qui a choisit de lui notifier un avertissement
faits les moins graves puis, par son licenciement concernant
seulement pour certains d’entre eux, a « épuisé son
d’autres faits antérieurs à l’avertissement. Les juges du fond
pouvoir disciplinaire » et ne pouvait plus prononcer un
ayant considéré que le licenciement était sans cause réelle
licenciement pour des faits antérieurs à la date de cet
et sérieuse, l’employeur forma un pourvoi aux termes
avertissement. Ainsi, si l’employeur a connaissance au
duquel il faisait valoir qu’il n’était pas contrevenu à la règle
même moment de faits fautifs et qu’il ne sanctionne que
du non cumul des sanctions dans la mesure où le
certains
licenciement ne concernait pas les mêmes faits que ceux
ultérieurement une autre sanction pour les faits qu’il
sanctionnés par l’avertissement.
n’avait pas initialement sanctionnés.
d’entre
eux,
il
ne
pourra
prononcer
Indemnisation du salarié en cas de circonstances vexatoires dans la prise d’acte de rupture
(Cass. soc., 16 mars 2010, pourvoi n 08-44.094)
Cet arrêt concernait une salariée qui avait pris acte de la
de la rupture du contrat de travail, la salariée ne pouvait
rupture de son contrat de travail en raison d’une mutation
faire grief à l’employeur des circonstances de celle-ci. La
géographique imposée par son employeur, et qui avait reçu
Haute juridiction a censuré la position de la Cour d’appel en
un mois auparavant une lettre de mise en demeure la
considérant que « le fait pour un salarié de prendre acte de
sommant brutalement de quitter son lieu de travail. La
la rupture de son contrat de travail n’est pas exclusif d’un
Cour d’appel, qui a jugé que la prise d’acte était justifiée et
comportement fautif de l’employeur à l’occasion de la
s’analysait donc en un licenciement sans cause réelle et
rupture ». La Cour de cassation confirme ainsi sa position
sérieuse, a néanmoins refusé d’accorder les indemnités
récente (Cass. soc. 20 mai 2009, n 07-45.407) permettant
sollicitées par la salariée au titre du caractère vexatoire
au salarié d’être indemnisé des conditions vexatoires de la
dudit licenciement, au motif qu’ayant pris seule l’initiative
rupture de son contrat même en cas de prise d’acte.
Minoration de l’indemnité de non-concurrence en cas de licenciement pour faute
(Cass. soc., 8 avril 2010, pourvoi n 08-43.056)
La Cour de cassation s’est prononcée sur le cas d’un salarié
La Cour d’appel l’a suivi dans son argumentation et a
qui, ayant démissionné, avait continué à percevoir la
également jugé que l’indemnité de non concurrence perçue
contrepartie financière d’une clause de non concurrence
par le salarié, qui avait nécessairement subi un préjudice en
tout en étant au service d’une entreprise concurrente, étant
respectant cette clause, lui restait acquise à titre de
précisé que ladite clause prévoyait une minoration de la
dommages et intérêts.
contrepartie financière en cas de licenciement pour faute
grave ou lourde.
L’arrêt fut cassé au visa du principe fondamental de libre
exercice d’une activité professionnelle et de l’article 1134 du
Assigné par l’employeur en remboursement de l’indemnité
code civil. La Cour de cassation a jugé que la clause de non
de non-concurrence, le salarié a soulevé la nullité de la
concurrence n’était pas nulle mais devait être réputée non
clause compte tenu de la minoration de la contrepartie
écrite en ses seules dispositions minorant la contrepartie en
financière en cas de licenciement pour faute.
cas de faute.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 10
IMMOBILIER
Validité de la renonciation à la commercialité dans le cadre de baux dérogatoires successifs
(Cass. civ. 3ème, 8 avril 2010, pourvoi n 08-70.338)
Un bailleur qui avait conclu trois baux dérogatoires
La Cour de cassation censure les juges du fond d’avoir ainsi
successifs avec le même locataire mais par le biais de prête-
statué aux motifs que « la fraude commise lors de la
noms, avait pris soin d’insérer dans le dernier bail une
conclusion de baux dérogatoires successifs interdit au
clause de renonciation du locataire, à se prévaloir d’une
bailleur de se prévaloir de la renonciation du preneur au
quelconque commercialité. A l’expiration du dernier bail, la
droit à la propriété commerciale ». La Cour de cassation a
société locataire s’est maintenue dans les lieux et a
en effet estimé que le bailleur qui avait conclu un premier
revendiqué le bénéfice du statut des baux commerciaux.
bail dérogatoire avec la
société, un deuxième bail
dérogatoire avec l’associée majoritaire de ladite société, puis
Les juges du fond, sur le fondement de cette renonciation,
le troisième avec ladite société, avait agi en fraude des droits
ont débouté la locataire au prétexte que la clause était
de cette dernière, de sorte qu’elle était réputée bénéficier des
expresse, non équivoque et que la locataire l’avait acceptée
dispositions des baux commerciaux depuis l’expiration du
en toute connaissance de cause en signant le dernier bail.
premier bail dérogatoire.
Repentir tardif et fautif en matière de baux commerciaux
(Cass. civ. 3ème, 10 mars 2010, pourvoi n 09-10.793)
Si en principe, le bailleur est fondé à exercer son droit de
Le locataire s’y est opposé, restituant les clés et sollicitant le
repentir jusqu’à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter
paiement d‘une indemnité d’éviction. Les juges du fond,
de la date à laquelle la décision statuant sur le montant de
approuvés par la Cour de cassation, ont déclaré le droit de
l’indemnité d’éviction est définitive, la Cour de cassation
repentir nul aux motifs qu’à la suite du refus de
vient d’apporter une nuance aux dispositions de l’article
renouvellement, le locataire en transférant l’ensemble de
L.145-58 du code de commerce qui édicte cette règle.
son stock dans un autre local et en embauchant du
En l’espèce, un bailleur avait refusé une demande de
personnel à cet effet, était ainsi entré dans « un processus
irréversible de départ des lieux, rendant impossible la
continuation de l’exploitation du fonds dans les lieux »,
renouvellement de bail pour motifs graves et légitimes et
engagé de longue date lors de la notification du droit de
avait assigné son preneur en expulsion. Au cours de
repentir. Le droit de repentir a été jugé fautif, le bailleur
l’instance, le bailleur a notifié son droit de repentir.
ayant manifestement eu à dessein de nuire à son locataire.
Parution de l’arrêté relatif aux honoraires des syndics
(Arrêté du 19 mars 2010, JO 21 mars)
Face au contentieux généré par la rémunération des syndics,
Pour mettre un terme à ces suppléments d’honoraires, les
le gouvernement n’a eu de cesse d’œuvrer pour plus de
prestations de syndics couvertes par le forfait annuel, payé
transparence. Si la liberté de fixation des honoraires de
par les copropriétaires, sont désormais listées à l’annexe de
syndic demeure la règle, la publicité des prix s’impose.
l’arrêté au titre des prestations de gestion courante. Quant
Depuis la loi du
1er
décembre 1986, les syndics doivent
aux
prestations
particulières,
elles
devront
figurer
fournir un décompte détaillé de leurs honoraires, précisant
explicitement en tant que telle dans le contrat de syndic et
notamment les honoraires de gestion et les honoraires pour
être définies dans les rubriques correspondantes. L’arrêté
prestations particulières qui appellent des suppléments
entrera en vigueur le 1er juillet 2010 et sera applicable à tout
d’honoraires, source de contentieux.
contrat de syndic conclu à compter de cette date.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 11
PROCEDURE CIVILE ET VOIES D’EXECUTION
Voies d’exécution pratiquées hors de France
(Cass. civ. 1ère, 14 avril 2010, pourvoi n 09-11.909)
Par arrêt en date du 14 avril 2010, la Cour de cassation a
M. X., estimant que la banque avait commis une faute à son
rejeté un pourvoi formé à l’encontre d’un arrêt de la cour
préjudice en organisant l'insolvabilité de sa débitrice, a
d’appel de Paris précisant que « l'article 14 du code civil, qui
décidé d’assigner la BICI-CI en responsabilité, devant le
permet au plaideur français d'attraire un étranger devant
tribunal de grande instance de Paris en invoquant l'article
les juridictions françaises, doit être exclu pour des
14 du code civil. Or, et comme l’a retenu la Cour d’appel de
demandes relatives à des voies d'exécution pratiquées hors
PARIS, l'action engagée par M. X. contre la BICI-CI
de France ». Dans cette affaire, M. X. a fait pratiquer une
découlait directement des voies d'exécution pratiquées
saisie-attribution
Banque
entre les mains de celle-ci en Côte d'Ivoire, M. X. ne pouvait
internationale pour le commerce en Côte d'Ivoire (BICI-CI)
donc se prévaloir de l’article 14 du code civil et ce, même si
dans laquelle, Mme Y., sa débitrice, avait ouvert un compte.
la régularité de la saisie litigieuse n'eût pas été contestée.
entre
les
mains
de
la
Répartition de compétence entre l’ordre judiciaire et l’ordre administratif
(Cass. civ. 1ère , 14 avril 2010, pourvoi n 09-12.417)
Comme l’a rappelé la cour de cassation, par un arrêt en date
Par un autre jugement, le tribunal administratif de Toulouse
du 14 avril 2010, « les tribunaux de l'ordre judiciaire sont
a liquidé le préjudice définitif. C’est alors que Mme. X. a
seuls compétents pour connaître d'un litige opposant deux
assigné la CPAM en remboursement du quart de la rente
personnes de droit privé à propos d'une somme d'argent
devant le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens.
perçue par l'une d'elle en exécution de la décision d'une
juridiction administrative et dont l'autre demandait le
Cependant, la cour d’appel a considéré que la demande de
remboursement, sauf, éventuellement, à poser une question
remboursement contre la CPAM, qui trouve son origine
préjudicielle en interprétation de cette décision».
dans des décisions rendues par le tribunal administratif,
suscite une difficulté d'interprétation des décisions prises
Dans cette affaire, le tribunal administratif de Toulouse,
par la juridiction administrative qu'il appartenait à cette
puis la cour administrative d’appel, ont condamné le centre
juridiction de trancher, nonobstant le fait que la CPAM soit
hospitalier de Saint-Gaudens à verser à Mme X., en sa
un organisme de droit privé.
qualité de tutrice de son fils, une rente annuelle au titre de
la réparation de l’intégrité physique et ont indiqué que les
Cet arrêt a toutefois été cassé par la cour de cassation,
sommes versées par la CPAM pour l'entretien et l'éducation
laquelle a rappelé que les litiges opposant deux personnes
en centre de rééducation devront s'imputer sur la fraction
de droit privé sont de la compétence exclusive de l’ordre
de la rente qui réparait l'atteinte à l'intégrité physique.
judiciaire.
Exception soulevée pour la première fois en appel
(Cass. civ. 1ère, 14 avril 2010, pourvoi n 09-12.477)
Selon l’article 74 du code de procédure civile, « les
Ainsi, et comme l’a rappelé la Cour de cassation par arrêt en
exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées
date du 14 avril 2010, le défendeur représenté en première
simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-
instance est irrecevable à soulever l’incompétence des
recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées
juridictions étatiques saisies pour la première fois en cause
au soutien de l'exception seraient d'ordre public ».
d’appel.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 12
PROPRIETE INTELLECTUELLE
Le système Google Adwords jugé par la CJCE
(CJCE, 23 mars 2010, aff. C-236/08, C-237/08, C-238/08 )
Depuis plusieurs années, les titulaires de marques se sont
La CJCE indique que « le titulaire d’une marque est habilité
émus de la pratique consistant, pour des concurrents voire
à interdire à un annonceur de faire, à partir d’un mot clé
même des distributeurs de produits contrefaisants, à utiliser
identique à ladite marque que cet annonceur a sans le
leur marque comme mot-clé, grâce au système de
consentement dudit titulaire sélectionné dans le cadre d’un
référencement payant Google Adwords, afin de générer un
service de référencement sur Internet, de la publicité pour
lien promotionnel lorsque l’internaute effectue une requête
des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels
sur ce mot clé.
ladite marque est enregistrée, lorsque ladite publicité ne
permet
pas
ou
permet
seulement
difficilement
à
Plusieurs décisions, condamnant Google pour contrefaçon
l’internaute moyen de savoir si les produits ou les services
ou complicité de contrefaçon, ont déjà été rendues par les
visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque
juges du fond avant que la Cour de cassation saisisse la
ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au
CJCE de questions préjudicielles. Celles-ci visaient à
contraire, d’un tiers ». En somme, l’annonceur qui génère
déterminer si un tel usage de la marque d’autrui, tant par
une publicité en utilisant comme mot clé la marque d’un
l’annonceur en réservant à titre de mot clé la marque
tiers commet une contrefaçon s’il en résulte un risque de
d’autrui afin de générer un lien commercial vers un site
confusion pour l’internaute. En revanche, la CJCE juge
proposant des produits et services identiques ou similaires à
différemment les actes commis par Google Adwords en
ceux du titulaire de la marque, que par Google Adwords en
décidant que « le prestataire d’un service de référencement
mettant à disposition des mots clés reproduisant ou imitant
sur Internet (ie, Google Adwords) qui stocke en tant que
des marques déposées, est susceptible de porter atteinte au
mot clé un signe identique à une marque et organise
droit sur la marque. Les arrêts commentés se prononcent
l’affichage d’annonces à partir de celui-ci, ne fait pas un
sur ces questions, outre celle de la qualité d’hébergeur de
usage de ce signe au sens de l’article 5
Google soumis à un régime spécial de responsabilité, qui ne
directive 89/104 ou de l’article 9
sera pas évoquée dans ces lignes.
n 40/94 ».
1 et 2, de la
1, du règlement
La protection des titres d’oeuvres
(CA Paris, 10 mars 2010, RG n 08/15683 et 08/11077)
Par deux arrêts rendus le même jour, la Cour d’appel de
En l’espèce, les auteurs de roman dans un cas, d’ouvrage
Paris rappelle les règles régissant la protection des titres
historique dans l’autre, invoquaient une violation de leurs
d’œuvres de l’esprit et fait une application de ces principes
droits en raison de la reprise des titres de leurs ouvrages. La
dans les espèces qui lui ont soumises conduisant à exclure
cour d’appel précise qu’il convient d’apprécier l’originalité
leur protection.
propre
du
recherchant
titre,
indépendamment
s’il procède d’un effort
de
l’oeuvre,
en
créatif portant
L’article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle pose
l’empreinte de la personnalité de son auteur. Pour conclure
le principe selon lequel le titre d’une œuvre de l’esprit peut
à l’absence d’originalité, les juges relèvent notamment que
faire l’objet de droit d’auteur dans la mesure où il est
la combinaison des termes ne recèle aucun caractère
original. En effet, selon ce texte « le titre d’une œuvre de
insolite, antinomique ou paradoxal, et que les titres faisant
l’esprit, dès lors qu’il présente un caractère original, est
appel aux mêmes termes sont nombreux.
protégé comme l’oeuvre elle-même. Nul ne peut, même si
l’oeuvre n’est plus protégée dans les termes des articles
La Cour rejette également les demandes fondées sur la
L.123-1 à L.123-3, utiliser ce titre pour individualiser une
concurrence déloyale (fondées sur l’article L.112-4 alinéa 2)
oeuvre du même genre, dans des conditions susceptibles de
au motif qu’aucun risque de confusion ne peut être établi
provoquer une confusion ».
dès lors que les ouvrages ne relèvent pas du même genre.
La Lettre du Cabinet SIMON ASSOCIES – Avril 2010 – Page 13
ACTUALITÉ DU CABINET
News
Simon Associés a assisté la Société Allard Pure Craft dans le cadre de sa prise de participation
majoritaire au capital de FAITH CONNEXION, groupe de prêt-à-porter présent
en France (Paris-Lyon-Megève-Cannes-Saint Tropez -Courchevel),
aux Etats-Unis, en Russie, et dans les Emirats Arabes Unis.
Publications récentes de Simon Associés
Chantal MILLIER-LEGRAND : « Promesses du bail vert : seront-elles tenues ? »
Points de vente, 19/04/2010
Danièle SIBONI et Denis DI LEONARDO : « Fiscalité et Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) »
Le Tout Lyon, 10/04/2010
Gaëlle TOUSSAINT-DAVID : « Comment faire un geste commercial ? »
Points de Vente, 06/04/2010
Danièle SIBONI et Denis DI LEONARDO : « La Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) quesa ko ? »
Les Petites Affiches Lyonnaises, 29/03/2010
Pour recevoir l’actualité du Cabinet, les numéros précédents de notre Lettre :
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