CE1 - 812 - Annexe 1 Piccolo Saxo

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CE1 - 812 - Annexe 1 Piccolo Saxo
PICCOLO, SAXO et Compagnie 1.
Il fut un temps très lointain où les instruments de musique ne se connaissaient pas entre eux. Chaque famille d’instruments vivait séparée des autres et c’était bien dommage. Ce furent les petits violons qui découvrirent qu’ils n’étaient pas les seuls instruments au royaume de la musique. Vous allez apprendre comment. Les petits violons étaient les derniers-­‐nés d’une très ancienne famille qu’on appelait la famille des cordes. Leur bavardage était bien agréable à entendre. Il y avait les petits violons qui pouvaient chanter très haut avec leur chanterelle, leurs grands frères les violons altos, qui avaient déjà une voix plus grave, leurs parents, les violoncelles, beaucoup plus gros et dont la voix se rapprochait quelques fois de celle des hommes. Il y avait aussi l’énorme grand-­‐mère contrebasse. Oh ! J’allais oublier la vieille demoiselle harpe, elle ressemblait à un grand lance-­‐pierres entre les branches duquel étaient tendues de longues cordes parallèles. Elle savait mieux que personne imiter le vent qui gémit, l’orage qui gronde, et le chant des sources. 2. Un beau soir les petits violons très excités allèrent trouver grand-­‐mère contrebasse. -­‐Devinez, grand-­‐mère contrebasse, dirent les petits violons, devinez ce qui se passe. Nous étions en train de nous promener et de l’autre côté de la rivière nous avons aperçu des petits instruments qui ne nous ressemblent pas du tout mais qui parlent une très jolie musique. Ils ne sont pas en bois verni comme nous, ils sont en cuivre et ressemblent à de grandes pipes. -­‐Comment ? demanda la harpe qui avait tout entendu, est-­‐il possible que vous disiez vrai et qu’il existe d’autres instruments que ceux de notre belle famille des cordes ? Je suis impatiente de les connaître. Dites-­‐leur de venir bien vite. Et les petits violons, fous de joie, s’en furent inviter les inconnus qui arrivèrent en grande pompe un matin. C’était la famille saxophone, étincelante au soleil qui gravissait le chemin, très flattée d’être reçue par cette honorable famille cordes. Qu’ils étaient drôles, en effet on aurait dit de grandes pipes ; les petits violons ne s’étaient pas trompés. La famille saxophone s’arrêta devant la maison des cordes et grand-­‐père saxophone fit les présentations : -­‐J’ai l’honneur d’être le grand-­‐père baryton, je suis le plus grand des saxophones enfin celui qui a la voix la plus grave. Voici mon fils aîné le saxophone ténor, mon fils cadet le saxophone alto, qui a la voix chaude et vibrante. Et enfin, permettez-­‐moi de vous présenter mon petit-­‐fils le saxophone soprano, l’enfant terrible de la famille : on l’appelle le saxo, tout simplement. -­‐
Qu’il est amusant, dirent les violons, il n’est pas en forme de pipe, on dirait une grosse carotte. Et puis il donne envie de rire, répliquèrent les violoncelles, on croirait entendre parler un clown. Saxo en eut les larmes aux yeux : -­‐voulez-­‐vous dire par là que vous ne me laisserez pas jouer avec vous ? -­‐
Mais non, mais non, crièrent les violons, au contraire ; nous te trouvons très gentil. Nous ne jouerons pas sans toi, c’est promis. Saxo était tellement heureux qu’il partit d’un grand éclat de rire. CE1 – Module 812 – Annexe 1 3. Les violons dansèrent de joie et applaudirent leur ami Saxo qui savait rire avec autant de facilité. Grand-­‐père Baryton était très fier de son petit-­‐fils, il levait son pavillon comme une trompe d’éléphant, et se secouait lourdement. Les violons alto ne se sentaient plus d’aise. La vieille demoiselle harpe faisait dégouliner des centaines de notes qui se déversaient comme des perles de cristal. Grand-­‐mère contrebasse avait bien du mal à suivre ce rythme endiablé. Les archets des petits violons sautillaient sur leurs cordes comme des oiseaux sur un fil, du plus vite qu’ils pouvaient. Ils avaient entouré Saxo et l’encourageaient : -­‐ Plus haut Saxo, plus haut, encore plus haut, criaient-­‐ils. Et Saxo monta si haut dans les gammes qu’il arriva ce qui devait arriver : un canard ! Tout le monde se tut. Grand-­‐père baryton foudroya Saxo du regard. Mais les petits violons ne laissèrent pas le temps à grand-­‐père Baryton de disputer le pauvre Saxo qui ne savait plus où se mettre. -­‐C’est de notre faute, grand-­‐père baryton, c’est nous qui l’avons poussé à mal faire, et si quelqu’un doit être puni, ce sera nous. -­‐ Vous êtes de braves petits violons dit la vieille demoiselle harpe, tout ceci n’est pas grave. Oublions cette fausse note et parlons sérieusement. -­‐ Cette découverte de votre famille, Messieurs les Saxophones me laisse rêveuse : j’ai la conviction qu’il doit y avoir d’autres familles d’instruments qui vivent cachées dans le pays. Il faut aller à leur recherche. Les violons n’en croyaient pas leurs oreilles : nous partirions en voyage tous ensemble avec Saxo ? -­‐ Je crois, en effet, que c’est de notre devoir, dit la harpe. Et sans plus attendre, la famille des cordes et celle des saxophones prirent le chemin de l’aventure. Ils marchaient depuis quelques jours quand, traversant une grande forêt, ils s’arrêtèrent saisis d’admiration. Du haut des arbres leur parvenait une musique étrange si douce, si claire et si tranquille qu’il leur semblait entendre la chanson des prairies quand elles dorment au soleil de l’été. -­‐ Chut, demanda doucement demoiselle harpe, ne les dérangeons pas, attendons qu’ils aient terminé, c’est trop joli. 4. Violons et saxos avaient beau écarquiller les yeux, ils n’arrivaient pas à distinguer ces nouveaux instruments cachés dans le feuillage des chênes. Soudain on n’entendit plus rien que le chant des oiseaux et c’est Saxo qui le premier rompit le silence et levant la tête vers les branches il dit timidement : -­‐Soyez aimables de nous excuser si nous troublons votre bavardage, mais comprenez notre émotion, nous venons de découvrir en vous une nouvelle famille d’instruments. Soyez gentils, chers nouveaux amis, montrez-­‐nous vos visages. Alors une cascade de trilles dégringola d’un arbre plus lestement qu’un écureuil. -­‐Je suis le benjamin de la famille des bois, on m’appelle Piccolo, dit le tout petit instrument, je suis aussi gai que le pinson. Et voici ma sœur, la grande flûte. Et voici mon frère, le hautbois. Voici maman, la clarinette, mon papa est le cor anglais. Voici grand-­‐mère la clarinette basse, et enfin grand-­‐père, le basson. Et ben, où est grand-­‐père ? Grand-­‐père basson ! Grand-­‐père basson ! -­‐ Pourquoi cries-­‐tu si fort Piccolo, tu sais bien que je fais ma sieste. Laisse-­‐moi dormir. -­‐ Non, non grand-­‐père Basson, venez vite, il y a des amis très gentils qui veulent jouer avec nous, venez vite ! -­‐ Pas possible ! Attendez-­‐moi, me voici ! CE1 – Module 812 – Annexe 1 -­‐
Nous sommes la famille des cordes, dit Mademoiselle harpe et nous, la famille des saxophones, dit Saxo. -­‐ Vous plairait-­‐il de vous joindre à nous pour continuer notre voyage ? -­‐ La famille des bois accepte votre invitation avec un plaisir extrême, répondit Grand-­‐père basson. Piccolo, c’est encore toi qui as fait cette bêtise. Ah reprenons, un -­‐ deux. Et nos trois familles s’en allèrent gaiement à la recherche de nouvelles familles amies. -­‐ Où allons-­‐nous ? demandait Piccolo. -­‐ Ne t’inquiète pas Piccolo, nous allons de l’autre côté. 5. Une nuit, alors qu’il y avait un beau clair de lune sur la terre endormie, les petits violons et saxos furent réveillés en sursaut par Piccolo. -­‐ Réveillez-­‐vous vite, venez vite, il y a un bel instrument qui joue sur la route. -­‐ Qui êtes-­‐vous donc jolie demoiselle, demanda Piccolo ? -­‐ On m’appelle la guitare, gentil Piccolo. J’aime vagabonder et chanter par les nuits étoilées. -­‐ Tu nous ressembles un peu, tu sais, dirent les violons. -­‐ Si vous voulez, répondit la guitare, mais je suis bien plus grande que vous et j’ai six cordes alors que vous n’en avez que quatre. -­‐ Et si tu reprenais la route avec nous demain matin ? Qu’en penses-­‐tu, demanda Piccolo. -­‐ Oh non, je vous remercie. Vous êtes très gentils, mais j’aime la solitude, je veux rester seule encore un peu, je vous rejoindrai plus tard. -­‐ Au-­‐revoir, Mademoiselle guitare. -­‐ Au-­‐revoir, à bientôt, répondit la guitare et, tout en continuant sa chanson, elle disparut dans la nuit. Quelques jours plus tard, les trois familles traversaient un village, Piccolo et Saxo marchaient devant et s’en donnaient à cœur joie. Soudain, ils virent une bande d’instruments bizarres qui sortaient de la maison d’un forgeron et leur barraient la route. -­‐ Nous sommes la famille des tambours et des marteaux. On nous a dit que vous étiez à la recherche de nouveaux instruments. Nous voulons nous joindre à vous. Je suis la grosse caisse, écoutez, ça vaut la peine de m’entendre. Et voici ma fille la batterie, spécialiste des roulements. -­‐ Oh, dit mademoiselle harpe, mais c’est épouvantable, allons-­‐nous en d’ici, vite. -­‐ Voici mes autres filles, des jumelles celles-­‐là, on les appelle les timbales. -­‐ On dirait des chaudrons à confiture, dit Piccolo. -­‐ Allons-­‐nous en, suppliait la harpe, ils m’arrachent les oreilles. -­‐ Attendez, continuait la grosse caisse, ça n’est pas fini, voici les cymbales. -­‐ Ça me rappelle les deux grands plats en cuivre qui sont pendus au mur chez ma tante, dit Saxo. -­‐ Et moi, criait le xylophone, je suis de la famille des marteaux, je voudrais bien qu’on me présente. -­‐ Tais-­‐toi, dit la grosse caisse, chacun son tour. -­‐ Bien parlé, dirent les cymbales. -­‐ Et voilà qu’ils se disputent à présent, se plaignait la harpe, qu’allons-­‐nous faire ? -­‐ N’ayez pas peur, répondit le triangle, moi je fais moins de bruit et je ne joue que quand il faut. Ecoutez. -­‐ C’est comme moi, osa timidement le célestin. 6. -­‐ Oh, les voilà qui recommencent, soupirait la harpe. Et ce fut le tour des cymbales de reprendre. La batterie ne voulut pas être en reste, ni le xylophone. On ne s’entendait plus : les cymbales roulaient comme l’orage. CE1 – Module 812 – Annexe 1 -­‐
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Messieurs, messieurs, messieurs, calmez-­‐vous ! dit grand-­‐père Basson. Je n’apprécie pas beaucoup votre tapage, mais puisqu’il est vrai que vous êtes aussi des instruments de musique, il est juste que vous veniez avec nous. Allons, en route ! Les quatre familles marchèrent pendant plusieurs semaines, on s’entendait à merveille. La famille des tambours et des marteaux scandait la marche. De temps en temps, on s’arrêtait sous les ombrages pour se reposer. Grand-­‐père Basson estimait qu’il était temps de rentrer chez soi, il devait se sentir fatigué. Non, non, non répondaient Piccolo et Saxo, il faut encore chercher. Et bien Piccolo et Saxo avaient raison, car un beau matin, alors qu’ils étaient en train de faire leur toilette en compagnie des petits violons, ils virent déboucher une magnifique fanfare qui bombait le torse d’un air majestueux. Qu’ils avaient fière allure ! Saxo restait bouche-­‐bée comme s’il venait voir tomber la lune à ses pieds. Piccolo, toujours rapide comme l’écureuil, avait déjà rejoint les arrivants et trillait comme un rossignol. -­‐C’est la famille des cuivres, hurlait la grosse caisse, en brandissant son maillet. -­‐Dieu soit loué, roulait la batterie, voilà des instruments avec lesquels nous allons nous entendre. -­‐Magnifique, claquait les cymbales, voilà de la musique comme nous l’aimons. La fanfare s’arrêta. Les trompettes s’avancèrent, claires, joyeuses, les pavillons tournés vers le ciel. Puis ce fut le tour des trombones, ensuite vinrent les cors, enfin le tuba. Voici de sérieuses recrues, dit grand-­‐père Basson, nous sommes heureux et fiers de vous avoir trouvées. Il n’avait pas fini ces mots que l’on vit arriver la guitare qui courait à toutes jambes. Messieurs, messieurs, j’ai une grande nouvelle à vous apprendre : je viens de découvrir un instrument merveilleux qui habite à quelques lieux d’ici. Je lui ai parlé de vous tous, il veut faire votre connaissance. Hourrah, crièrent les instruments. Tout le monde s’en fut emmené par la famille des cuivres, qui soufflait à pleins poumons. Piccolo et Saxo brûlaient d’impatience et de curiosité. Enfin, ils arrivèrent chez un grand Seigneur, solennel et merveilleux : c’était sa majesté le Piano. Alors, alors le piano n’eut qu’un geste à faire, et tous les instruments, sentant battre leur cœur d’une émotion profonde, ne le quittaient pas des yeux. La famille des cordes s’approcha, la famille des bois la suivit, puis ce fut le tour de celle des saxophones, les baguettes et les maillets de la famille des tambours et des marteaux s’abattirent ensemble comme un coup de canon. La famille des cuivres sonna magistral. Le grand orchestre était né. Et perdus dans la foule des instruments, Piccolo et Saxo vivaient le plus beau jour de leur vie car ils savaient qu’ils ne se quitteraient plus jamais. CE1 – Module 812 – Annexe 1 

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