Microsoft PowerPoint - Barisi, Gu\351rir le travail aujourd

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Microsoft PowerPoint - Barisi, Gu\351rir le travail aujourd
Guérir le travail aujourd’hui:
Mission impossible?
Giusto Barisi RRI
Contexte et évolutions (1)
• Dans les décennies 1960 et 1970 le Taylorisme était appliqué au travail
manuel
• Les mouvements de revendication et les pressions de syndicats ont
poussé les directions des entreprises à développer l’automation et des
nouvelles formes d’organisation du travail
• Aujourd’hui, le Taylorisme est appliqué au travail intellectuel.
NTIC, workflows et lean production, progiciels de gestion intégrée, etc.
standardisent les actions de travail et les directions disposent
d’informations détaillées en temps réel.
• Il y a donc une crise profonde du management intermédiaire. Leur
nombre diminue constamment comme leur pouvoir décisionnel, qui
s’exerce encore pour adapter le fonctionnement de l’organisation aux
changements continuels.
• Les risques dérivant d’une perte d’autonomie et d’une dégradation des
conditions de travail, souvent liée à une intensification
brutale, pourraient être traités selon des théories de l’organisation
traditionnelles (Herzberg, Sociotechnical systems…) mais aujourd’hui la
théorie néo-classique et des Shareholders sont dominantes.
Contexte et évolutions (2)
• D’autres changements, apparemment lointains des lieux de travail, ont
déterminé des contraintes nouvelles et une réduction de l’autonomie
dans le travail:
• La globalisation et la dérégulation de l’économie ont créé un haut
niveau de compétition entre les entreprises européennes et les usines
installées dans des zones où la législation est presque inexistante ou
pas appliquée. Les dumping social, écologique et fiscal ont boosté
pratiques de concurrence déloyale, et induit des fortes réductions des
coûts, des dégradations des conditions de travail en Europe
• Souvent, la seule alternative à la délocalisation est l’importation de
pratiques d’incivilité et des pires modèles d’organisation du travail.
Parfois, sont créées des enclaves où des systèmes moyenâgeux de
travail sont adoptés (Barisi, 2012)
• L’application de la théorie de la division internationale du travail
n’assure plus le développement de l’Europe, ni des niveaux acceptables
d’emploi, ni une qualité décente de la vie au travail.
Contexte et évolutions (3)
• La finance globalisée et l’application des nouvelles théories de
l’organisation ont impulsé aussi des modifications des méthodes de
management et d’organisation des entreprises:
• Centres de Profits et Economic Added Values (EVA) appliqués aux
niveaux de département ou de service, Direction par Objectifs
(DPO), évaluation de la performance individuelle (9-Box PE), priorité
à une politique de réduction permanente des coûts, etc.
• Les objectifs financiers à court terme sont devenus dominants, dans
un environnement où fusions et acquisitions d’entreprises ont
fortement augmenté. Les résultats économiques et sociaux sont
négligés.
• Alors, seulement un espace résiduel est resté pour
l’amélioration des conditions et de la qualité du
travail?
Est-il possible de modifier le projets managériaux de
réorganisation?
• Nous présentons 3 interventions réalisées dans le cadre de
missions confiées par les CHSCT à un cabinet d’expertise pour
évaluer les conséquences sur les conditions de travail d’un projet
de réorganisation.
• Méthodologie des interventions:
– Analyse du projet et de la documentation d’entreprise
– Entretiens et échanges avec des témoins clef (direction, IRP,
techniciens externes)
– Enquête par questionnaire individuel (anonymat garanti) aux
salariés concernés par la réorganisation et/ou observation
ergonomique d’activités de travail
– Entretiens individuels (et parfois aussi collectives) avec un
échantillon de salariés
– Présentation et discussion d’un rapport contenant le diagnostic de
la situation et souvent des indications pour éliminer/diminuer les
expositions aux risques
Cas 1: la réorganisation d’une plateforme téléphonique dédiée
au service clients
• La situation constatée:
– Une progressive séparation des tâches entre front et back office
– Introduction de nouveaux logiciels, méthodes de reporting et
taylorisation qui ont changé les contenus du travail (parcellisation et
standardisation de tâches, diminution de l’autonomie…)
– Mal-être au travail généralisé, absentéisme élevé, environnement
conflictuel
– Diminution de la productivité et de la satisfaction de la clientèle
•
Les indications du rapport ont été en bonne partie acceptées par la
direction:
– Recomposition de tâches (entre front et back office) et rotation (sur
base volontaire)
– Personnalisation dans le suivi de certains clients (suivi du dossier,
contacts…)
– Formation des managers de proximité
Cas 2: Introduction d’un nouveau système d’évaluation des
cadres (grille 9-box )
• La proposition de changement de la méthode d’évaluation, auparavant
basée sur l’évaluation des compétences, a rencontré une vive
opposition de cadres et des syndicats
• Le nouveau système classifiait d’une façon obligatoire le personnel
dans 9 catégories selon 2 critères: les résultats par rapport à des
objectifs fixés et les comportements professionnels
• Les enquêtes sur un site où la méthode avait été expérimentée ont
montré que ce système créait plus d’injustice, risques de classements
forcés dans les 9 catégories, une compétition et de la conflictualité
entre cadres, perte de visibilité des critères d’évaluation, augmentation
de la subjectivité dans l’évaluation
• En particulier, les « bons comportements professionnels » étaient
différemment estimés par les évaluateurs, comme certains objectifs
génériques (ex.: suivre les valeurs et les politiques générales de
l’entreprise)
• Le rapport a aussi pointé quelques illicéités de la méthode par rapport
à la législation du travail existante
Cas 2: Introduction d’un nouveau système d’évaluation des
cadres (grille 9-box )
• Mais la direction a généralisé l’application de la méthode, après
quelques changements mineurs
• Les syndicats ont eu recours à la justice pour bloquer le nouveau
système, et le jugement a déclaré illégaux quelques critères
d’évaluation, parce que insuffisamment précis ou pas clairement
transposables en comportements professionnels concrètes.
Cas 3: Réorganisation d’un service technique d’après vente
• Le projet prévoyait de modifier les zones géographiques
d’intervention des techniciens, d’introduire un logiciel permettant
de garder constamment le contact des techniciens avec des services
différents de l’entreprise, de allouer une partie de l’activité à des
petites entreprises de sous-traitance.
• Le projet avait été testé dans une zone. Les résultats avaient été
jugés positifs par la direction et négatifs par les techniciens et leurs
IRP.
• L’expertise demandée par le CHSCT a montré le manque de fiabilité
des résultats présentés par la direction, une série de
dysfonctionnements provoqués par le projet, l’augmentation du
temps de trajet des techniciens. Les coûts des prestations de la
sous-traitance restaient élevés, alors que la qualité de leurs
prestations ne satisfaisait pas toujours les clients.
• La direction a partiellement changé le projet, avec des marges
accrues d’autonomie des techniciens et une réduction de l’activité
externalisée.
Conclusion
• Dans ces cas, les projets ont rencontré l’opposition des salariés et de
leurs représentants
• Les modifications des projets et des conditions de travail sont limitées.
Nous n’avons pas rencontré des situations où d’importants projets de
réorganisation ont été abandonnés
• Dans les situations de ce type, pour obtenir des bons résultats, les
mobilisations des salariés nécessitent de l’intervention d’acteurs
externes à l’entreprise (opinions des clients, support des médias,
enquêtes d’inspecteurs du travail ou d’experts, décisions de justice
favorables…) et/ou des précises analyses coûts/ bénéfices du projet qui
invalident les calculs de la direction. Les directions souvent surestiment
les bénéfices financiers à court terme et la dimension technique des
projets, et sous-estiment leurs conséquences économiques et sociales.
• Généraliser les interventions pour « guérir le travail » et améliorer la
qualité de la vie nécessite une réduction des formes dominantes de
dumping (social, fiscal, écologique…) et des prétentions de la sphère
financière.

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