olutions - Mesures
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S olutions ÉTALONNAGE EN TEMPÉRATURE LES POINTS FIXES DESCENDENT DANS L’INDUSTRIE ■ Les mini-cellules points fixes offrent désormais aux industriels une nouvelle méthode d’étalonnage des capteurs de température, avec une meilleure exactitude que celle de la méthode classique par comparaison. Jusqu’à présent, les cellules conventionnelles, chères et encombrantes, restaient dans les laboratoires de métrologie, en haut de la chaîne métrologique. Pour se plier à l’industrie, les cellules se sont faites plus petites et plus abordables. MESURES 732 - FEVRIER 2001 BNM-LNE L es cellules points fixes conventionnelles représentent le summum de l’étalonnage en température. Ce qui se fait de mieux en incertitude. Au sein du BNM (Bureau National de Métrologie), elles représentent les étalons nationaux, conservés au BNM-INM (Institut National de Métrologie) qui sont ensuite transférés vers l’industrie par le BNM-LNE (Laboratoire National d’Essai) grâce au raccordement d’étalons qui serviront eux-même de référence… Difficiles à mettre en œuvre, encombrantes et chères, ces cellules restent en haut de la chaîne métrologique. Au-dessous, les laboratoires d’étalonnage, les services de métrologie habilités (SMH) et les industriels préfèrent des thermomètres étalons et procèdent par comparaison (les valeurs données par le capteur ou l’instrument à étalonner sont comparées aux valeurs fournies par le thermomètre étalon). Cette situation n’est pas figée. Le BNM-INM a en effet développé des mini-cellules pour l’étalonnage des couples thermoélectriques de tous types, les capteurs les plus largement utilisés. Plus petites que les grandes, plus faciles à uti- À quelques kF, les mini-cellules points fixes représentent une méthode pas trop chère pour étalonner les capteurs de température, même en milieu industriel. Elles peuvent être introduites en position horizontale ou verticale dans des fours ou des bains qui ne lui sont pas spécifiquement adaptés. 51 S olutions LES CELLULES POINT FIXES PALIER DE FUSION ET DE CONGÉLATION AVEC UN COUPLE THERMOÉLECTRIQUE Pt/Au force électro-motrice (v) 0,016090 0,016080 0,016070 fusion 0,016060 congélation 0,016050 0,016040 1 kg de métal pur surfusion 0,016030 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 Temps (min) La mesure de la force électromotrice délivrée par le couple thermoélectrique durant le palier de fusion ou de congélation de la cellule permet ainsi l’étalonnage du couple à la température considérée. Cellules conventionnelles Capteurs étalonnés Quantité de métal pur Paliers de fusion ou de congélation Diamètre du puits d’insertion du capteur Prix (ordre de grandeur) Fours Cellules commercialisées Thermocouples Sondes à résistance 500 g à 1 kg 2 heures et plus 8 mm 50 à 80 kF spécifiques (environ 100 kF) Argon (1) -189,3442 °C Mercure (1) -38,8344 °C Eau(1) 0,01 °C Gallium(2) 29,7646 °C Indium(3) 156,5985 °C Etain(3) 231,928 °C Zinc(3) 419,527 °C Aluminium(3) 660,323 °C Argent(3) 961,78 °C (1) point triple - (2) point de fusion - (3) point de congélation (ou solidification) 52 liser, moins chères, elles peuvent même être utilisées sur site. Ces mini-cellules sont aujourd’hui fabriquées et commercialisées sous licence par Pyro-Contrôle Chauvin Arnoux. Le BNMLNE en a étudié les caractéristiques métrologiques et optimisé leur raccordement. Les mini-cellules rentrent dans la chaîne métrologique reconnue par les instances métrologiques françaises. Ainsi, le BNM-LNE est accrédité par le Cofrac pour leur étalonnage. Mini-cellules Thermocouples Quelques grammes Jusqu’à 30 minutes 5 mm 5 à 10 kF fours classiques d’étalonnage Indium 156,5985 °C Etain 231,928 °C Zinc 419,527 °C Aluminium 660,323 °C Argent 961,78 °C La méthode des points fixes s’appuie sur les propriétés physiques de matières pures dont les températures de tout changement d’état sont parfaitement connues. Tout comme l’eau bout à 100 °C et gèle à 0 °C, la fusion et la congélation de certains métaux offrent des paliers stables de température. Il est alors possible d’associer la température du palier à la valeur lue par le capteur que l’on souhaite étalonner. Etalonner un capteur dans une gamme de température revient bien entendu à l’étalonner au moyen de plusieurs points fixes. Une intrapolation doit ensuite être établie entre les points. Les points fixes de température constituent les jalons de l’échelle internationale de température EIT-90, depuis les très basses températures jusqu’à plus de 1000 °C. Les points fixes correspondent à des transitions de phase de corps purs: point de congélation, de fusion, point triple. Ainsi le point de congélation de l’argent définit la température de 961,78 °C, le point de fusion du gallium définit la température de 29,7646 °C, le point triple de l’eau définit la température de 0,01 °C. En pratique, une cellule conventionnelle telle que celles qu’utilise le BNM-LNE comprend un métal pur (généralement de 500 g à 1 kg) conditionné dans un creuset en graphite (de 220 mm de hauteur et 45 mm de diamètre). Celui-ci est placé dans une cellule en quartz (matière inerte qui supporte les hautes températures) à l’intérieur de laquelle un puits est aménagé pour insérer le capteur à étalonner. L’ensemble est introduit dans un générateur de température spécialement dédié à l’utilisation des points fixes. La cellule est ainsi portée à la température de changement d’état. Cette méthode est un peu lourde à mettre en œuvre. Beaucoup de précautions pour l’utiliser, des cellules encombrantes et fragiles, des fours d’étalonnage spécifiques et un coût… conséquent. Une cellule coûte entre 50 et 80 kF, à laquelle il faut ajouter environ 100 kF pour le four. A multiplier par le nombre de points fixes que l’on souhaite réaliser. Entre 5 à 10 kF, les mini-cellules commercialisées par Pyro-Contrôle Chauvin Arnoux présentent un premier argument économique. Elles sont ausMESURES 732 - FEVRIER 2001 S olutions si beaucoup plus petites et plus maniables. Les mini-cellules peuvent être utilisées en position horizontale ou verticale dans des fours ou des bains qui ne lui sont pas spécifiquement adaptés. Et elles améliorent l’incertitude d’étalonnage des couples thermoélectriquespar rapport à un étalonnage par comparaison. Tout comme les cellules conventionnelles, les mini-cellules sont constituées d’un creuset en graphite mais plus petit qui contient une quantité de métal réduite à quelques grammes. Les paliers de transformation durent quelques minutes à quelques dizaines de minutes. Les cellules ne sont pas scellées mais peuvent être placées sous atmosphère neutre en les insérant simplement dans une gaine en quartz. Une nouvelle démarche La diffusion de cette technologie se fait tout doucement. «La plupart des laboratoires ont établi leur procédure de raccordement avec des systèmes d’étalonnage par comparaison, rap- pelle Robert Grumel, chef produit chez PyroContrôle Chauvin Arnoux. L’utilisation des mini- Qui fait quoi?… ■ Les mini-cellules “points fixes” ont été développées par le BNM-INM, qui est l’institut national français détenteur des étalons primaires en température. La société Pyro contrôle Chauvin Arnoux fabrique et commercialise sous licence ces mini-cellules. Le BNM-LNE est le laboratoire national français chargé du transfert de l’échelle de température vers l’industrie. Il est habilité à étalonner les mini-cellules, avec l’accréditation Cofrac. Une mini-cellule est étalonnée par rapport à une cellule conventionnelle de référence de BNM-LNE. Il existe en France trente et un Services de Métrologie Habilités (SMH) qui délivrent des certificats d’étalonnage en température avec le logo Cofrac. Dix-huit d’entre eux sont accrédités aux points fixes (incluant le point de glace à 0 °C) et dix au-dessus du point de gallium à 29,7646 °C (gamme de température correspondant aux mini-cellules). Trois SMH sont accrédités pour l’utilisation des mini-cellules. Ce chiffre ne reflète cependant pas exactement la réalité ; il concerne les SMH utilisant les mini-cellules comme “meilleur moyen de mise en œuvre”. En effet, certains SMH sont susceptibles d’utiliser à la fois des cellules conventionnelles (pour l’étalonnage des thermomètres à résistance de platine) et des mini-cellules (pour l’étalonnage des couples thermoélectriques) : seules les cellules conventionnelles apparaissent alors dans le tableau de raccordement puisqu’elles constituent leurs meilleurs moyens à disposition. Enfin, cinq SMH sont accrédités aux points fixes en utilisant une autre méthode d’étalonnage : la méthode du fil. Cette méthode reste assez contraignante, puisqu’elle nécessite une préparation minutieuse du couple thermoélectrique ainsi que l’insertion d’un fil (argent, or) par soudure. … et comment? ■ Quelques exemples d’incertitudes (k = 2) délivrées par le BNM-LNE ou un SMH pour l’étalonnage d’un capteur de température. Ces incertitudes sont ensuite à dégrader en fonction des caractéristiques métrologiques propres au capteur étalonné. ➤A la température du point d’argent (961,78 °C) Organisme Capteur Comparaison Méthode du fil BNM-LNE SMH BNM-LNE Couple thermoélectrique Couple thermoélectrique Thermomètre à résistance de platine ± 0,8 °C ± 1,3 °C ± 1 °C ➤A la température du point d’étain (231,928 °C) Organisme Capteur Comparaison BNM-LNE SMH BNM-LNE SMH Couple thermoélectrique Couple thermoélectrique Thermomètre à résistance de platine Thermomètre à résistance de platine ± 0,35 °C ± 0,40 °C ± 0,010 °C ± 0,030 °C Points fixes* ± 0,26 °C ± 0,6 °C ± 0,030 °C Points fixes* ± 0,19 °C ± 0,40 °C ± 0,003 °C ± 0,011 °C *Avec une cellule conventionnelle ou une mini-cellule pour les couples thermoélectriques. Avec une cellule conventionnelle pour les thermomètres à résistance de platine. MESURES 732 - FEVRIER 2001 cellules les oblige à revoir toutes ces procédures. Certains les utilisent dans le cadre d’une surveillance ou d’un contrôle de leurs instruments étalons entre deux étalonnages par comparaison». C’est principalement le critère de l’incertitude qui peut conduire à passer de l’étalonnage par comparaison à celui par mini-cellules. Tout dépend donc de la qualité de la mesure que l’on recherche. Une mesure de température de grande exactitude n’est pas toujours nécessaire. Pour suivre la régulation d’un four, certains industriels se contentent parfois d’une simple indication et recherchent avant tout des capteurs stables et robustes. Mais d’autres veulent aussi suivre de très près les caractéristiques thermiques de leur processus. Ainsi, la fabrication des carters d’automobiles impose une connaissance pointue de la distribution de la température dans les moules car celle-ci conditionne l’homogénéité du refroidissement, et par conséquent la qualité mécanique de la pièce. Autre exemple où une faible incertitude présente de l’intérêt: dans l’épaisseur du manteau neigeux des montagnes, le gradient de température est un indice pour avertir des risques d’avalanche. Ce gradient de quelques degrés seulement doit donc être caractérisé avec la plus grande minutie. Il en va de même pour les mesures de température dans les océans, lesquelles renseignent sur les courants marins et préviennent des grandes perturbations climatiques. ± 0,6 °C à 961,78 °C Lorsqu’il s’agit d’estimer la température avec une grande exactitude, les caractéristiques métrologiques des moyens de mesure doivent être en rapport. L’exactitude d’un capteur dépend bien sûr de la technique mise en œuvre (on sait qu’un thermomètre à résistance de platine est par nature plus exact qu’un termocouple), mais elle est aussi liée aussi à la méthode d’étalonnage. La méthode par comparaison génère des incertitudes d’étalonnage plus importantes que la méthode aux points fixes. Dans la première méthode, le couple thermoélectrique est placé dans un générateur de température (bain ou four) à côté d’un thermomètre étalon. Lorsque le générateur est thermiquement stable, la température donnée par le thermomètre étalon est associée au capteur en étalonnage le capteur à la température considérée. «Dans un laboratoire de type SMH (Service de métrologie habilité), l’incertitude d’étalonnage d’un couple thermoélectrique de type S au point d’argent, c’est-àdire à 961,78 °C, réalisé avec une méthode par comparaison, est de ± 1,3 °C, indique Ronan Morice, ingénieur au sein de la division thermométrie du BNM-LNE. Elle est de ± 0,6 °C avec la méthode des points fixes». Que ce soit avec 53 S olutions ➤ Etalonnage par mini-cellule point fixe ou par comparaison? Méthode par comparaison Méthode des mini-cellules points fixes Principe Etalonner un capteur par comparaison consiste à le placer dans un milieu dont la température uniforme et stable est mesurée à l’aide d’un capteur étalon, pris comme référence Principe Etalonner un capteur par la méthode des mini-cellules points fixes consiste à le placer dans un milieu dont la température uniforme et constante est définie par l’équilibre thermodynamique entre différentes phases d’un corps pur. Avantages Avantages - L’étalonnage simultané d’un grand nombre de capteurs - Etalonnage à une température connue avec une - L’étalonnage de capteurs de formes géométriques grande exactitude sans être tributaire des diverses caractéristiques d’un capteur de référence - L’étalonnage à des températures choisies Limitations Limitations - Inhomogénéité de température entre les logements - L’étalonnage ne peut être réalisé qu’en un certain dans lesquels sont insérés le capteur étalon et le nombre de points de température capteur à étalonner - Au cours d’un changement de phase, le nombre - Difficulté d’obtenir un milieu stable et uniforme, des capteurs à étalonner est limité en fonction surtout aux températures élevées de la durée du palier de température (un seul capteur avec les mini-cellules) - La géométrie des capteurs à étalonner ne peut pas être quelconque (capteurs de petite taille) des cellules conventionnelles ou des mini-cellules. Dans le cas des couples thermoélectriques, ce sont leurs caractéristiques métrologiques et non les caractéristiques des cellules qui sont déterminantes. Autrement dit, l’incertitude liée à la mini-cellule n’est pas determinante dans le bilan d’incertitude. En revanche, ce n’est pas forcément le cas avec des sondes à résistance platine, avec lesquelles il est possible d’obtenir une exactitude bien supérieure. (pour certains thermomètres à résistance de platine, l’incertitude d’étalonnage par comparaison est même inférieure à l’incertitud liée à la mini-cellule) Enfin, l’étalonnage d’un capteur au moyen des mini-cellules suppose bien entendu que ses dimensions soient compatibles avec celles du puits de la mini-cellule, de l’ordre de 5 mm pour une longueur de 55 mm. La taille des capteurs ne peut dont être supérieure et leur géométrie ne peut être quelconque. Marie-Pierre Vivarat-Perrin Sources: BNM-LNE, Pyro-Contrôle Chauvin Arnoux Et les étalonnages à hautes températures ? L 54 Les laboratoires de métrologie européens travaillent pour développer des moyens d’étalonnage des capteurs de température à plus de 1500°C BNM-LNE e point de congélation de l’or à 1064 °C est le plus haut point fixe développé en mini-cellule. Par la méthode du fil, on peut monter jusqu’à 1554 °C. Et au-delà? Qu’il s’agisse de la fabrication des freins en matrices carbone/carbone des avions ou de celle des produits nucléaires recyclés, la demande de mesures exactes entre 1500 et 2000 °C se fait pourtant de plus en plus pressante. Les couples thermoélectriques utilisés sont généralement composés de thermoéléments en alliages de tungstène et de rhénium. Ils peuvent être utilisés en continu jusqu’à 2300 °C selon les constructeurs et jusqu’à 2800 °C pendant de courtes périodes. Ces couples thermoélectriques sont placés sous atmosphère neutre, réductrice ou sous vide (leur usage dans des atmosphères oxydantes est rendu impossible par l’oxydation rapide des matériaux). Conscients des manques de moyens d’étalonnage pour ces capteurs, plusieurs laboratoires de métrologie européens planchent et collaborent sur le sujet. Le BNM-LNE, en France, a réalisé un système constitué d’un four haute température à technologie graphite fonctionnant sous vide ou sous atmosphère neutre qui permet l’étalonnage par comparaison de ces couples thermoélectriques. L’ensemble (que l’on voit sur la photo) ressemble à un véritable réacteur confiné dans le laboratoire de thermométrie du BNMLNE. Mais l’équipe thermométrie du BNM-LNE a un autre sujet de prédilection, toujours pour les hautes températures : les cellules points fixes à eutectiques métal-carbone. Partant de la constatation qu’à haute température, les métaux ultrapurs ont une fâcheuse tendance à être pollués par leur creuset en graphite, le concept consiste à “polluer” artificiellement de carbone certains métaux pour lesquels l’association des deux éléments permet la formation d’un eutectique. Confinés sous la forme d’une cellule point fixe, ces dispositifs ont des caractéristiques métrologiques tout à fait exceptionnelles. Une première cellule, composée d’un alliage platine-carbone dont le point de fusion/congélation est situé à 1 738 °C, a d’ores et déjà été développée. Ces recherches permettront à terme de développer un ensemble de points fixes dédiés aux travaux dans le domaine de la thermométrie de contact à haute température. MPVP MESURES 732 - FEVRIER 2001