Produits/Process

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Produits/Process
Par Anne marie FILLOUX, ingénieur innovation
et développement « Filière blé »,
expert INAO « commission feuilletage »,
ENILIA ENSMIC Surgères
Pâtes alimentaires :
les étapes clés à maîtriser
Mots-clés : Pâte alimentaire ; gerçures ; taux de sel ; hydratation ; extrusion ; séchage.
Résumé :
La fabrication de pâte alimentaire est une succession d’opérations simples :
• le dosage ;
• le malaxage / mélange : les différents ingrédients sont dosés et arrivent dans une cuve équipée de pâles hélicoïdales
où elles sont malaxées. Cette opération est en partie réalisée sous vide afin d’obtenir un mélange exempt de bulles d’air ;
• le pétrissage / compression ; dirigé vers la presse continue, ce mélange pâteux fait l’objet d’un pétrissage sous l’effet
d’une vis d’Archimède, qui fait avancer le produit en lui appliquant une forte pression ;
• l’extrusion/ mise en forme (tréfilage ou laminage) : en fin de parcours cette pâte est :
o soit extrudée par tréfilage :
• pour les pâtes courtes : elle passe par une filière (forme, vitesse du couteau) ;
• pour les pâtes longues ;
o soit sort sous forme de feuille large de pâte, immédiatement glissée entre deux rouleaux rotatifs lisses, ensuite
soit estampée à l’emporte pièce (papillon) soit sectionnée en lamelle (tagliatelle) ;
• le pré-séchage et séchage : les pâtes sont ensuite pré-séchées par une ventilation d’air chaud (80 °C), qui va les durcir en
surface et les empêcher de se déformer, puis progressivement séchées dans un tunnel où souffle de l’air chaud et
humide (70 à 100 °C) pour abaisser l’hygrométrie de 32 à 12.5 % (cette phase peut durer de 2 à 16h en fonction du dessin
et diagramme de séchage) ;
• l’empaquetage.
1. Le malaxage ou empâtement :
1.1. Objectif :
L’objectif de cette opération (action
mécanique) est de mélanger les différents ingrédients afin d’obtenir une
structure homogène adaptée au
procédé technologique.
La première étape consiste à pulvériser de l’eau sur les différents
ingrédients secs (objectif atteindre
une hydratation proche de 30 % sur
base humide – point à contrôler la
température de l’eau). Les granules
de céréales s’agglomèrent en boulette friable, le malaxage est assuré
par des pâles montées sur un axe
horizontal.
L’objectif est d’atteindre des grumeaux de 1 à 3 cm de diamètre. Le
malaxage à grande vitesse (60 tr/minute) d’une durée de quelques minutes permet une meilleure hydratation
et une régularité de la production.
Après le malaxage, les boulettes
tombent dans une petite cuve, par
l’intermédiaire d’une écluse, où se
fait le vide (vide partiel de 80 à 100
bars et maintien d’une température
proche de 35 °C), ce qui prévient de
l’oxydation des pigments caroténoïdes (perte de coloration jaune) et
phénoliques (responsable du développement de nuances brunes). La
désaération favorise l’osmose entre
les particules plus ou moins hydra-
tées, évite la déformation des pâtes
fraîches, ajoute à l’éclat et à la translucidité du produit sec et évite les
fissures du produit fini.
1.2. Points à maîtriser :
(cf. tableau 1, ci-dessous
2. L’extrusion :
2.1. Principe du procédé :
L’extrusion consiste à forcer un produit à s’écouler à travers un orifice de
petite dimension (filière).
La cuisson-extrusion consiste à faire
subir en continue, à des matières un
traitement mécanique (cisaillement
combiné à une compression – 150 b
Tableau 1
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- une détente, un mélange) et thermique (chauffage ou refroidissement).
Opérations unitaires réalisées dans
les différentes zones :
• zones de transport ;
• zone de compression : broyage,
mélange, cisaillement, hydratation,
dégazage, cuisson ;
• zone de formage ; texturation, à la
sortie séchage partiel par effet flash,
expansion.
Influence du traitement sur les
constituants :
Glucides :
• amidon : gélatinisation à froid (pâte
alimentaire), effet hyperglycémiant ;
• autres sucres : passage de l’état
cristallisé à l’état amorphe (problème
de collant en confiserie).
Lipides :
• peu modifié, inactivation des lipases.
Protéines :
• améliore la capacité de rétention en
eau ;
• dénaturation ;
• inactivation de certaines enzymes ;
• diminue la solubilité des protéines et
les propriétés moussantes ;
• diminue la valeur nutritionnelle.
Vitamines :
• pertes peu importantes - choix d’un
emballage approprié pour diminuer
les pertes lors du stockage.
2.2. Pâtes alimentaires :
Les boulettes sont admises dans un
cylindre d’extrusion. La vis d’extrusion
(les dessins de la vis d’extrusion sont
étudiés afin de réduire le plus possible les effets de cisaillement pouvant
se traduire par une dégradation des
macromolécules protéiques et glucidique (amidon) fait passer en force à
travers une filière, les boulettes qui en
fin de course forment une pâte (empâtage). Selon les presses, la pression
est comprise entre 80 et 100 bars, la
pâte s’échauffe et peut atteindre une
température de plus de 50 °C (l’objectif est de rester sous une température de 45-50 °C afin d’éviter la dégradation des constituants des céréales),
c’est pourquoi le cylindre d’extrusion
peut être muni d’une double paroi
dans laquelle circule de l’eau. Selon la
machine, on obtient des pâtes extrudées (tréfilage) ou des pâtes laminées
(laminage).
Cas des pâtes extrudées :
La pâte passe à travers une filière soit
en bronze (aspect rugueux) soit en téflon (aspect lisse) - réglage de la vitesse du couteau rotatif.
• Pâtes courtes :
Pour des pâtes coupées, on emploie
des moules ronds, elles sont déposées dans un panier perforé ou sur
des tapis en vue du séchage.
• Pâtes longues :
Pour les pâtes longues, telles que macaroni, spaghetti et capellini, on emploie des moules rectangulaires, elles
sont tendues à cheval sur des cannes
horizontales qui tirent la grappe de
brin de pâte fraîche vers le couteau
transversal.
Cas des pâtes laminées :
La pâte en provenance de la vis d’extrusion munie d’une filière à fente est
acheminée en feuille d’une épaisseur
de 0.6 cm vers deux cylindres, les
feuilles sont aplaties (lissage et uniformiser), les feuilles sont ensuite dirigées vers des machines munies de
couteau (nouilles) et de découpoir ou
poinçonneuse.
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Après cette chambre à vide, la pâte est
poussée dans la vis d’Archimède. A la
fin de cette vis est le moule. Les moules déterminent uniquement la forme
et l’aspect, et non pas la longueur. Les
trous dans les moules sont faits avec
du téflon, de telle façon que les pâtes
ont une surface bien lisse.
Moule pour pâtes coupées (étoiles) :
La pâte est extrudée par cette vis d’Archimède vers la tête de presse et de telle
« La cuissonextrusion,
un procédé
particulier. »
façon à travers le moule. Ceci se passe
avec une pression entre 80 et 140 bar,
c’est à dire 1 bar est égal à la force d’un
kg par cm². Lors de cette extrusion une
réaction mécanique se fasse de telle façon que la farine et les protéines avec
l’eau sont pressées sous grande pression à la forme voulue.
(cf. photo 2, page 20)
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En-dessous des moules, on obtient
donc les pâtes alimentaires. Ce produit
est parfaitement apte pour consommation, mais très périssable. Les pâtes
fraîches sont donc des pâtes qui n’ont
pas été séchées et qui doivent être
consommées dans une période d’environ 21 jours.
Remarque ; il est possible d’insérer
un mélangeur centrifuge, dont les pâles tournent à grande vitesse, entre le
doseur et le malaxeur ce qui permet
d’obtenir très rapidement une bonne
homogénéisation.
2.3. Points à maîtriser :
(cf. tableau 2, ci-dessous)
3. Le séchage :
Les pâtes à la sortie de l’extrudeur ont
une consistance molle, la teneur en humidité de la pâte destinée au séchage
est de 27 % pour les pâtes courtes et
de 30 % pour les pâtes longues.
Le séchage est techniquement vu, l’étape la plus difficile dans la production de
pâtes alimentaires. Si on séchait sans
connaissance, l’extérieur de la pâte alimentaire serait sèche, mais l’intérieur
par exemple du spaghetti aurait un
taux d’humidité trop élevé. Quand on
met un tel produit dans la température
ambiante, ce produit va gercer à cause
des tensions internes dans le produit.
Lors de la cuisson d’un tel produit, on
obtient un produit qui colle, sans surface lisse et sans forme précise.
Pour éviter les gerçures (conséquences d’une évaporation trop rapide),
on sèche dans différentes étapes, de
telle façon que l’humidité des centres
peut migrer vers la surface extérieure.
On fait cela en déterminant un climat
spécifique et on peut avoir entre 5 et
11 étapes différentes selon le produit et
la machine. Pour un climat spécifique,
on aura chaque fois une température
et une humidité relative précise. Par
format et par machine on fixe un diagramme de séchage. Ceci est donc un
suivi de climats.
Remarques : Dans le cas d’un séchage initial très rapide, il peut se
former une couche sèche superficielle se contractant.
Le séchage met en jeu deux phénomènes : l’évaporation (dont la vitesse est
liée à la tension de vapeur d’eau dans
le produit et à la disponibilité de l’eau
en périphérie) et la diffusion de l’eau à
l’intérieur du produit (varie en fonction
de la température et de l’humidité du
produit).
la température sèche et la température humide ne doit pas dépasser
5°C.
• Pré-séchage :
L’état de la pâte est pseudo élastique (cet état disparaît quand la pâte
atteint une humidité de l’ordre de
25 % sur la matière sèche pour des
températures classiques de 60 °C),
il s’agit lors de cette étape, d’enlever une proportion d’eau élevée (30
% pour les pâtes coupées et estampées, et de 40 % pour les pâtes
longues), l’opération doit se faire en
faisant circuler de l’air chaud (55 à
75 °C). L’objectif étant de minimiser
tout développement microbien (éviter les problèmes de fermentation),
de stabiliser les pâtes dans leur format (empêcher l’aplatissement des
gros formats, l’agglomération des
pâtes courtes et fines par collage,
Dans la pratique, la différence entre
Tableau 2
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l’allongement des pâtes longues),
de renforcer la structure de la pâte
en insolubilisant les protéines, d’obtenir des pâtes transparentes (pâtes humides trop longtemps sont
mates), de limiter le brunissement
non enzymatique. Séchage dans un
trabatto (châssis rectangulaire muni
de toiles métalliques disposées les
unes sur les autres et animées d’un
mouvement alternatif, pendant tout
ce va et vient, les pâtes reçoivent un
air chaud).
• Séchage :
Il s’agit de la transformation de la
pâte en un produit élastique rigide,
ayant une humidité finale de 12.5 %
(réglementation). Cas du séchage
à haute température (70 - 90 °C) ou
très haute température (95 à 105 °C)
: la pâte acquière une plus grande plasticité qu’aux températures
conventionnelles. La vitesse de l’air
est constante (2 m/s). Le séchage
à HT ou THT a une incidence sur la
valeur nutritionnelle (perte de 20 à
25 % de la disponibilité de la lysine)
mais cela facilite les processus d’élimination de l’eau en limitant l’apparition dans la pâte de phénomènes
de tension (risquant de causer des
gerçures) et permet d’accélérer la
vitesse de déshydratation.
Dans une rotante, qui tourne lentement, les pâtes sont introduites d’un
côté et par une rotation lente de la
rotante ces pâtes sont amenées
d’avant vers derrière. Dans cette rotante des lourdes batteries de chauffage sont placées et on crée une circulation d’air dans ces rotantes avec
des ventilateurs, de telle façon qu’on
peut sécher les pâtes.
Dans un séchoir à bandes, les pâtes
sont mises dans des couches jusqu’à 8 cm d’hauteur et cette bande
avance lentement. Ici aussi, à l’aide
de radiateurs et d’une circulation
d’air élaborée les pâtes sont séchées.
Le choix d’un séchoir à bandes ou
d’un séchoir rotatif est inspiré essentiellement par la structure du produit.
Des produits facilement cassables,
comme des plumes, peuvent uniquement être produits sur un séchoir
à bandes.
A la fin des séchoirs, les pâtes sont
refroidies fortement jusqu’à environ
30 °C et ont alors une humidité maximale de 12,5 %.
3.2. Le séchage de pâtes longues
(spaghetti) :
En-dessous de la presse le spaghetti est pendu sur des cannes
d’environ 2 m de largeur. Le spaghetti a alors encore une longueur
d’au-delà d’un mètre, c’est à dire 2
x 50 cm.
Ces cannes sont pendues à une
longue chaîne qui va à travers le
séchoir. Ainsi le spaghetti suit les
zones climatiques successives (11
en total).
A la fin de la chaîne on prévoit
également une zone de refroidissement. Après cette zone de refroidissement, le spaghetti est enlevé
de ces cannes et est coupé à sa
longueur.
Les pâtes sont séchées à basse
température (55 °C) en abaissant
progressivement
l’humidité relative de l’air de 92 % à 72
%, lorsque la teneur en eau des
pâtes atteint 24, 18 puis 13 %,
elles sont soumises à un traitement
thermique (90 °C) puis en fin de traitement, la température est ramenée
à 55 °C.
3.1. Le séchage de pâtes coupées :
Immédiatement après l’extrusion, les
pâtes sont coupées à leur longueur
définitive par un couteau rotatif
contre le moule. Au plus vite que le
couteau tourne, au plus courte sera
la pâte alimentaire.
Après l’extrusion, les pâtes coupées
sont séchées dans un séchoir trabatto pour une courte durée. Le but
de ce séchoir est de sécher un tout
petit peu la surface pour éviter que
les pâtes se collent. Ici on prend à
peu près 1 à 2 % d’humidité.
Par après, ces pâtes sont séchées
à leur taux d’humidité final dans ou
bien des rotantes des séchoirs à
bandes une combinaison des deux.
Tunnel de séchage
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4. L’empaquetage des pâtes
alimentaires :
Après la production des pâtes alimentaires et après un contrôle de
qualité, les pâtes sont emballées.
Eventuellement on peut encore prévoir une étape intermédiaire, c’est à
dire le mélange des pâtes coupées.
« La maîtrise
du séchage,
donne une
bonne tenue
ultérieure. »
Les empaquetages consommateur
les plus communs sont de 250 g, de
500 g et pour certaines formes aussi
1 kg. Les matériaux d’empaquetage
sont ou bien des boîtes en carton ou
bien du film polypropylène.
4.1. Le principe des différentes lignes
d’empaquetage :
Il est toujours le même :
• pesage du poids ;
• empaquetage individuel ;
• empaquetage dans des colis distributeur.
4.2. Points à maîtriser :
(cf. tableau 3, ci-dessous)
POUR CONCLURE :
Les critères de qualité des pâtes alimentaires les plus importants sont :
• le goût : le processus de séchage
détermine aussi le goût ;
• la couleur doit être ambre-jaune
(échelle de ROCHE) ; des pâtes grisâtres doivent être évitées ;
• les piqûres brunes, noires et blanches dans le produit doivent être absentes le plus que possible ;
• la résistance à la cuisson : cela détermine en quelle mesure les pâtes vont
coller en cas de sur cuisson (la sur
cuisson est donc la cuisson trop longue par rapport au temps de cuisson
prescrit).
Aspect des pâtes crues :
Quatre groupes de caractéristiques
déterminent l’aspect des pâtes : la
gerçure , les piqûres, la texture superficielle et la coloration.
• la gerçure se traduit par l’apparition
de fêlures dans la pâte sèche, la résistance lors de l’empaquetage est faible ;
• les piqûres blanches proviennent
d’une hydratation insuffisante au cours
du malaxage ;
• la coloration brune est due à des phénomènes enzymatiques (lipoxygénase,
polyphénoloxydase) ou des réactions
non enzymatiques (MAILLARD) ;
• texture superficielle : moules en
téflon : pâtes lisse et brillante moules en bronze surface rugueuse et
hétérogène.
Les formes hétérogènes sont souvent dues à un pourcentage d’incorporation d’eau et un réglage machine mal conduits.
Un manque d’eau ou manque de durée de mélange risquent de provoquer
des points blancs.
Des gerçures apparaissent quand le
séchage est mal pratiqué.
Plus la température de séchage est
élevée (90 °C au lieu de 70 °C) et appliquée en fin de séchage :
• meilleure est la tenue et la cohésion
à la cuisson ;
• moins bonne est la flaveur : pâte de
texture caoutchouteuse, odeur et goût
brûlé.
Qualité culinaire :
• Cuisson des pâtes temps minimal,
optimal et maximal de cuisson : correspondant au temps à partir duquel
l’amidon est gélatinisé, (temps nécessaire pour atteindre la texture souhaitée, au temps à partir duquel les pâtes
se délitent.)
• L’état de surface des produits cuits :
l’aptitude des pâtes à conserver leur
intégrité après la cuisson est fonction
de la capacité des protéines à former
un réseau résistant enserrant dans ces
mailles les granules d’amidon.
Tableau 3
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