Programme des concerts 2009

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Programme des concerts 2009
LE CHŒUR DE LIMOURS
Le Chœur de Limours est un chœur amateur fondé en 1971
par Pierre Bénichou. Il est dirigé depuis 1989 par Ariel
Alonso. Son répertoire est varié : il a interprété des œuvres
peu connues et souvent difficiles. Certaines œuvres ont été
données “ a cappella ” (motets de Mendelssohn,
Marienlieder de Brahms, motets de Poulenc) d’autres avec
orchestre (Requiem de Duruflé, Misa Criolla de Ramirez,
Messe en Sol de Schubert). D’autres œuvres parmi
lesquelles figurent Les sept paroles du Christ de César
Franck, Paukenmesse de Haydn, Requiem Allemand de
Brahms et Requiem de Fauré dans sa version originale ont
été interprétées avec une formation orchestrale réduite. La
Messe N°4 de Saint-Saëns avec accompagnement d’orgue
et la Petite Messe Solennelle de Rossini avec
accompagnement de piano font partie du répertoire.
Depuis 2000, le Chœur de Limours a produit avec une
formation
orchestrale
professionnelle, l’Académie
Symphonique de Paris : le Gloria de Vivaldi, la Grande
Messe en Ut mineur de Mozart, la Messe solennelle en la
bémol majeur de Schubert, la Messe du Couronnement de
Mozart, les Stabat Mater de Rossini puis de Dvořák et
enfin des psaumes de Mendelssohn et la Messa di Gloria
de Puccini.
Le Chœur de Limours a parallèlement continué sa
collaboration avec les meilleurs orchestres amateurs de la
région. Il s’est ainsi associé à l’Orchestre et au Chœur du
Campus d’Orsay pour interpréter en 2000 Israël en Égypte
de Haendel, et en 2001 le Requiem de Verdi. Ces mêmes
partenaires se sont à nouveau associés en 2005 pour
exécuter la IXe Symphonie de L. Van Beethoven pour
célébrer le 50e anniversaire de la création de la Faculté. Le
Chœur a plus récemment présenté le Requiem de Mozart
avec l’Orchestre Ut cinquième et la Messa di Gloria de
Puccini avec l’Odyssée Symphonique.
Le Chœur de Limours a participé aux concerts
d’inauguration de la cathédrale d’Évry et à de nombreux
concerts à caractère humanitaire.
CHŒUR DE LIMOURS
ACADÉMIE SYMPHONIQUE DE PARIS
Direction : Ariel ALONSO
SOLISTES :
Delphine DORIOLA, soprano
Catherine CARDIN, contralto
Jean-Louis SERRE, baryton
Johannes Brahms
(1833 - 1897)
Pl du général de Gaulle
91470 LIMOURS
www.choeurlimours.com
Samedi 6 juin 2009
Limours, église Saint-Pierre
Mardi 9 juin 2009
Paris, église ND des Blancs Manteaux
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Catherine CARDIN – alto
Première partie
Vier Gesänge für Frauenchor, 2 Hörner und Harfe
Op. 17
Quatre chants pour chœur de femmes
accompagnement de deux cors et une harpe.
avec
1. Es tönt ein voller Harfenklang
2. Lied von Shakespeare
3. Der Gärtner
4. Gesang aus Fingal
Cors : Vincent Leonard, Sylvain Delcroix
Harpe : Gudrun Hummer
Rhapsodie für Alt, Männerchor und Orchester
Op. 53
Rhapsodie pour contralto, chœur d’hommes et orchestre.
Contralto : Catherine Cardin
Seconde partie
„Ein deutsches Requiem“
Op. 45
Oratorio allemand, pour solistes chœur mixte à quatre voix
et orchestre, sur des textes tirés de la bible par J. Brahms.
1. Selig sind, die da Leid tragen
2. Denn alles Fleisch es ist wie Gras
3. Herr, lehre doch mich
Baryton : Jean-Louis Serre
4. Wie lieblich sind deine Wohnungen
5. Ihr habt nun Traurigkeit
Soprano : Delphine Doriola
6. Denn wir haben hier keine bleibende Statt
Baryton : Jean-Louis Serre
7. Selig sind, die Toten
-2-
Professeur d'Art Lyrique au Conservatoire de Courbevoie,
elle est aussi pianiste et professeur d'éducation musicale.
Encouragée dans le travail du chant par Arthur Oldham,
chef du Chœur de l'Orchestre de Paris, elle devient l'élève
de Maria Gracia Dilluvio, puis de Marguerite Pifteau,
avant de se perfectionner auprès de Gabriel Bacquier,
Andréa Guiot, Régine Crespin...
Elle débute sa carrière de soliste d'oratorio dans le cadre
des grands concerts parisiens, se distinguant dans tous les
répertoires, de Carissimi à Messiaen et donne de
remarquables interprétations du Requiem de Verdi, saluées
par la critique à Cannes. Elle incarne également Orphée,
Dalila et on a pu l'applaudir dans les « Dialogues des
Carmélites » de Francis Poulenc, avec l'Orchestre National
d'Ile de France, ainsi que dans “ la Vida Breve ” de Manuel
De Falla, et plus récemment dans « Hansel et Gretel » de
Humperdinck. Elle s'illustre par ailleurs régulièrement dans
des récitals et a participé aux émissions d'Ève Ruggieri
Musiques au cœur ainsi qu'à celle de Jean-Michel Damian
sur France Musiques consacrées toutes deux à Manuel
Rosenthal. Elle enseigne également la technique vocale au
chœur d'enfants de Créteil « Sotto Voce » et organise des
masterclass pour les plus grands.
Pour le disque, elle a enregistré notamment les Requiem de
Verdi, Mozart et Duruflé, les litanies à la Vierge de
Monteverdi, et en création mondiale, le Requiem d'Ignaz
Pleyel et des mélodies avec orchestre d'Alain Krotenberg.
Jean-Louis SERRE – baryton
Après des études universitaires en Allemagne, Jean-Louis
Serre entre au CNSM de Paris où il suit les cours de Jane
Berbié. Il y obtient un Prix de Musique de Chambre. Il a
chanté de nombreux opéras: Carmen, La Traviata, Cosi
fan Tutte, La Flûte enchantée, Les Contes d’Hoffmann, La
Femme sans ombre, Le Roi d’Ys, Iolanta, Rigoletto, Le
Téléphone, Le Voyage à Reims...
En oratorio, il a chanté tous les grands classiques avec des
orchestres et des chœurs renommés; en musique baroque, il
a travaillé avec Marc Minkowski, Christophe Rousset,
Jean-Claude Malgloire...
En 2001/2002, on a pu l’entendre dans le rôle d’Escamillo
de Carmen de Bizet, du Comte des Noces de Figaro de
Mozart, il a participé aux productions telles que Don Carlo
de Verdi au Festival d’Orange et d’Enée dans Didon et
Enée de Purcell. En 2003, il s’est produit dans Médée, une
création de M. Réverdy à l’Opéra de Lyon et dans le
Requiem de Brahms sous la direction de Michel Piquemal.
Parmi ses enregistrements, citons: Les Amours de Ragonde
de Mouret avec Les Musiciens du Louvre (Diapason d’or),
Les Cantiones de K. Huber avec « Les Jeunes Solistes », le
Requiem de Fauré avec Les Petits Chanteurs de Versailles,
des Motets de Franck avec l’Ensemble Vocal Jean Sourisse
(Choc du Monde de la Musique), le Requiem et la Missa
cum Jubilo de Duruflé (Choc du Monde de la Musique),
L’Enfance du Christ de Berlioz sous la direction de JeanPierre Loré.
- 11 -
Delphine DORIOLA – soprano
JOHANNES BRAHMS (1833 – 1897)
Delphine Doriola a découvert très tôt le plaisir de la scène
au sein du Chœur d'enfants de l'Opéra de Montpellier dans
Werther, Tosca, Carmen, La Gioconda... Elle a également
pratiqué la danse classique durant plusieurs années et
intégré une troupe de danse pour enfants.
Ses études lui ont permis d'obtenir le 1er Prix de Chant
Lyrique et le Prix d'Excellence du Conservatoire
International de Musique de Paris (1997), le Prix du
Conservatoire National de Région de Rueil-Malmaison
(2001), la Médaille d'Or à l'unanimité du Conservatoire
National de Région de Versailles, ainsi que le 1er prix du
Concours Européen de Musique de Picardie (2002).
En complément de sa formation vocale, elle a suivi un
apprentissage théâtral (Cours Charles Dullin) et pratiqué
l'escrime de théâtre auprès de maîtres d'armes enseignants
à l'ENSATT.
Elle a déjà interprété deux cents fois La Vie Parisienne de
Jacques Offenbach (mise en scène : Jérôme Savary) à
l'Opéra-comique de Paris ou encore des créations comme
Signé Vénus de Kurt Weill (Opéra de Lyon) en 2006 et
2007.
A l'instar de Denise Duval, elle chante avec bonheur les
œuvres de Francis Poulenc, des Mamelles de Tirésias au
Stabat mater.
On a pu l'entendre au Kennedy Center de Washington, à
l'Opéra de Shanghai, au Château de Compiègne, et à Paris
Salle Cortot, Salle Pleyel ou à l'Hôtel de Ville. Elle a été
invitée en tant que soliste par l'Orchestre des Hôpitaux de
Paris, l'Orchestre Eugénie, l'Orchestre Bernard Thomas,
par le Festival international de Musique du Portugal, et à
Milan pour un concert en hommage à Maria Callas.
Elle a dernièrement participé à la première session Voix
Célestes de l'Abbaye de Royaumont (95) sous la direction
de Bernard Tétu, Joris Verdin et Joël-Marie Fauquet. Elle
s'est ainsi familiarisée avec la musique sacrée française du
XIXème siècle pratiquée avec orgue ou harmonium (César
Franck, Théodore Dubois, Massenet, Gounod, SaintSaëns,…).
Actuellement élève de Christine Schweitzer, Delphine
Doriola se tourne désormais vers le répertoire d'opéras
français et italiens, ouvrages dans lesquels s'expriment
pleinement la puissance et les couleurs de sa voix.
« Aimez-vous Brahms ? »
…demande un héros de Françoise Sagan à la jeune femme
qu’il veut inviter à un concert.
Si la question nous était ainsi posée : « comment l’aimezvous ? », nous vous répondrions en chœur : léger, subtil,
fin, délicat, aérien, diaphane…
Mais encore ?
Charnel, sensuel, aux vives et longues étreintes
entrecoupées de profondes respirations…
À l’opposé de rapides analyses le faisant passer pour lourd
et jouisseur, Brahms est l’amoureux tendre et passionné de
celle qu’il idéalise : Clara Schumann quand d’autres
femmes, celles des bars de Hambourg où il gagne sa vie en
jouant du piano, initient l’adolescent aux réalités
prosaïques de la vie.
Par-delà cette personnalité singulière, Johannes Brahms est
un véritable génie de la musique, maîtrisant parfaitement
les bases théoriques de la musique chorale et celles,
diamétralement opposées, du clavier au tempérament
moderne, si représentatif du romantisme allemand. Ami
très proche et admirateur de Robert et Clara Schumann, il a
comme eux participé à porter ce style à son apogée.
Il a, comme Beethoven qu’il admirait, résisté aux modes
du temps. En créant une musique d’un extraordinaire
modernisme théorique, il ne s’est jamais compromis dans
un quelconque abandon ni dénigrement des styles du passé.
Il les a maîtrisés et fondus dans ses compositions, toujours
originales et un peu hors du temps.
- 10 -
DES ŒUVRES DE JEUNESSE
Les œuvres choisies pour le programme de ce concert sont
toutes de cette période de jeunesse, pleine de romantisme.
„Ein deutsches Requiem“
La mort de Robert, en 1856 inspire à Johannes une œuvre
sacrée qui serait un hommage, « une sorte de requiem
allemand »
à
la
mémoire de Robert.
Cette
grande
composition
est
commencée dès 1857, à
l'âge
de
24
ans.
Incomplète à cette date
et
sûrement
insatisfaisante au regard
de l'exigence extrême
du compositeur, elle a
été constamment reprise
et
complétée,
notamment après la
mort de sa mère en 1865
Clara Schumann
pour être finalement
éditée sous sa forme actuelle en décembre 1868, soit à l'âge
de 35 ans.
Il faut toutefois ne pas réduire cette œuvre à la
commémoration de deux événements douloureux
particuliers, mais au contraire la considérer comme un
- 3- 3- -
témoignage global de sa pensée construit au fil d’une
longue période.
Quatre chants pour chœur de femmes avec harpe
et cors
Entre temps, en 1860, Brahms édite
„4 Gesänge für Frauenchor, 2 Hörner und Harfe Op.17“.
Donc, à l'âge de 27 ans.
Toujours dans cette période de jeunesse, toujours chef de
chœur mais féru d’orchestration et génial assembleur de
timbres, il ose cet inédit ensemble de quatre chants pour
chœur de femmes, avec une harpe et deux cors.
Comment apprêter la polyphonie du chœur, le
tempérament égal de la harpe et les gammes naturelles des
cors ? En les faisant se répondre plutôt qu’en les
superposant, répondrez-vous fort justement. Mais quel
ravissement !
Rhapsodie pour contralto, chœur d’hommes et
orchestre
Bien plus tard, en 1870 soit à l'âge de 37 ans, il compose et
édite „Rhapsodie für Alt, Männerchor und Orchester op.
53“.
Brahms est un homme plus mûr. Il a accepté l’idée que
Clara resterait une très bonne amie et une compagne de
génie musicologique.
C’était sans compter sur la
ressemblance de sa fille Julie
avec sa mère et donc une
fatale attirance vers elle.
Espoir déçu, désespoir même.
D’où ce cri mis en musique
dans cette étrange pièce où
l’alto incarne la douleur en un
style
quasiment
avantgardiste.
Julie Schumann
Ce n’est qu’à la troisième et
dernière strophe que le chœur entre en jeu pour rasséréner
le poète dans des tonalités douces et classiques.
La période romantique est achevée.
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Ariel ALONSO
Né en Argentine, Ariel Alonso obtient ses diplômes de
piano (Médaille d'or) et de direction au Conservatoire de
Buenos Aires, sa ville natale et en France, le Diplôme
Supérieur de Direction d'Orchestre dans la classe de
Dominique Rouits. Après avoir acquis une solide
expérience, il est titulaire en 1998 du Certificat d'Aptitude
aux fonctions de professeur de chant choral, direction
d'ensembles vocaux. Il complète ensuite sa formation lors
de classes de maîtres avec Helmut Rilling (direction de
chœur), Patrick Marco (direction de chœur d'enfants),
Pierre Cao (direction d'orchestre), Marie-Claire Cottin
(technique vocale pour les chefs de chœur), Eric Ericson
(direction de chœur) et Laurence Equilbey (direction de
chœur). Ariel Alonso dirige le Chœur de Limours depuis
1989. Depuis plusieurs années, il est professeur de chant
choral au Conservatoire Maurice Ravel (Paris 13e) et
depuis 2000, titulaire de la classe de direction de chœur et
dirige les chœurs d'enfants et d'adultes au sein de l'École
Nationale de Musique de Créteil. Il dirige aussi l'orchestre
du Conservatoire de Neuilly. Cette diversité l'amène à
aborder un large répertoire pour grand chœur et orchestre,
chœur d'enfants et chœur de chambre. Il est fondateur et
chef du chœur de chambre « Mélanges ».
Ariel Alonso anime des stages de direction de chœur et de
chant choral. Il est chef invité pour la session de stages
2005-2006 et 2006-2007 de l'Association Argentine des
Chefs de Chœur (ADICORA). Ces dernières années l'ont
amené en tant que chef invité à diriger les Chœurs de
l'Université de Medellin dans le cadre du 19e Festival de
Medellin en 2000 et le Chœur Polyphonique National
d'Argentine en 2001.
L'Académie Symphonique de Paris
Cet ensemble à géométrie variable, qui peut se produire en
formation de chambre, en formation Mozart ou en
formation symphonique, a été fondé notamment par le
violoncelliste Jérôme Treille, dans le but de proposer aux
différentes chorales peu habituées à l'accompagnement
d'orchestre un outil professionnel de qualité, à la hauteur
de leurs ambitions et des chefs d’œuvre qu'elles sont
amenées à interpréter.
Sans chef permanent, il regroupe en son sein les meilleurs
instrumentistes, soucieux de mettre leur art et leur
technique au service de l'oratorio, et tous issus des plus
prestigieuses phalanges parisiennes.
Des saisons passées, on retiendra plus particulièrement la
force et la justesse d'interprétation de la Messe en si de
Bach, du Requiem de Mozart, du Messie de Haendel, du
Requiem Allemand de Brahms, des Stabat Mater de
Rossini et de Dvořák et du Gloria de Vivaldi.
Son violon solo, Valérie Beutin, a suivi ses études
musicales au Conservatoire National Supérieur de Musique
de Paris où elle a obtenu en 1988 un prix d'harmonie dans
la classe de Roger Boutry, un premier prix de violon dans
la classe de Davy Erilih et un premier prix de musique de
chambre dans la classe de Régis Pasquier en 1989.
Parallèlement, elle a été récompensée par un prix de
musique de chambre au concours international de Paris en
1989.
-9-
6. „Denn wir haben hie keine bleibende Statt“ (Hébreux
XIII)
Ce mouvement colossal proclame la victoire de la vie sur
la mort. Il est construit en progression vers la fugue finale.
La première partie rappelle l’errance de l’humanité sur
terre, sorte de marche sans but transcrite musicalement par
les pizzicati de l’orchestre qui semblent tourner en rond. La
deuxième partie dévoile quelques mystères, “Nous ne
mourrons pas tous, mais nous serons tous changés“.
Chaque intervention du baryton annonce une phase plus
tendue, plus oppressante, qui semble vouloir nous conduire
vers le mouvement rapide du trombone du jugement
dernier, „Denn es wird die Posaune schallen“ Enfin une
fugue massive et brillante éclate après des accords de plus
en plus angoissés du chœur „Herr, du bist würdig“.
7. „Selig sind die Toten“
« Heureux sont à présent les morts ». Ce mouvement très
solennel se caractérise par un langage clair, simplifié, voire
apaisé, et une orchestration allégée. Il s’inspire du premier
mouvement dont il reprend quelques phrases. La partie
centrale fait entendre un chant quasi bucolique avant que
ne revienne le climat initial de béatitude qui répond à
toutes les inquiétudes de mort et de souffrance des autres
mouvements.
(Avec la permission du Chœur du Campus d’Orsay)
Johannes Brahms vers 1853
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« UN REQUIEM ALLEMAND »
Sa genèse
En 1853 Schumann écrit ces paroles encourageantes au
sujet du jeune Brahms :
« S’il plonge sa baguette magique dans le gouffre où les
masses du chœur et de l’orchestre lui prêtent leur
puissance, nous pouvons alors nous attendre à des aperçus
plus merveilleux encore des mystères du monde et de
l’esprit ».
« Un requiem allemand » qui rayonne au cœur de l’œuvre
brahmsienne, réalise cette prédiction. S’il n’est pas au
niveau de sa forme aussi parfait que la Quatrième
symphonie, s’il n’exprime pas avec autant de force la
douleur humaine que la Rhapsodie pour alto, si sa vision
romantique du monde et de la valeur humaine n’égale pas
les Quatre chants sérieux, il domine de très haut les autres
productions du compositeur sans se prêter à aucune
comparaison pour autant.
C’est la première œuvre colossale de Brahms. La musique
pure qui l’opposera à Wagner s’impose : le canon plus
académique laisse la place au style fugué.
La genèse en fut longue, de 1854 à 1868. Dans son propre
catalogue thématique, Brahms n’indiqua que l’été 1866,
“Baden Baden et Zurich”.
On peut malgré tout distinguer deux phases de
composition :
- de 1854 à 1861 : peut-être marqué par la disparition de
« son père musical » Robert Schumann (1810-1856),
Brahms écrit la partie la plus ancienne, la marche
funèbre „Denn alles Fleisch“. Quelques semaines
avant la disparition de sa mère, il songe à la
composition d’une cantate funèbre (numéros 1, 2, et 4),
et confie à Clara Schumann “une cantate pour chœur...
sorte de requiem en allemand”.
- à la fin de l’année 1861, il ajoute le n°3. La fugue lui
pose problème. Brahms prend conseil de son ancien
professeur Marxsen. Il crée lui-même son œuvre en
1868, arrivant au bras de Clara Schumann (s’assurant
de la sorte une immense reconnaissance à l’époque).
Ce n’est qu’à la fin de l’année qu’il annonce à son
éditeur le rajout du n°5, partie avec la soprano solo.
Il ne faut cependant pas relier à une suite d’événements
tragiques et douloureux dans la vie de Brahms la genèse de
cette œuvre. Elle est le fruit, aux yeux du compositeur,
d’une longue réflexion sur la condition humaine et la
conception tragique du monde. Elle illustre sa pensée.
Alors âgé de trente ans, Brahms déclare : « Je n’ai pas
besoin de vous dire qu’intérieurement je ne ris jamais ».
L’intitulé même de cette œuvre, le « un » placé devant le
mot « requiem », la situe en dehors de la musique
religieuse allemande. Il paraît même que Brahms voulait
remplacer « allemand » par « humain ». L’homme
souffrant est en effet au centre de l’œuvre, mais le titre
« requiem » ne lui confère aucun caractère catholique. A
l’inverse d’un Berlioz ou d’un Verdi, illustres par leur
« Dies irae », Brahms livre une prière luthérienne humble
et confiante.
-5-
Sans aucun lien avec la liturgie, il se place dans la
continuité des cantates funèbres baroques, comme les
Exequien de Schütz par exemple.
Brahms accorda beaucoup de temps à la sélection des
textes, pour la plupart issus du Nouveau Testament. La
prière du Requiem catholique (supplication, jugement,
repos de l’âme) est remplacée ici par la consolation
destinée aux vivants qui sont dans la peine. A la crainte du
« Dies irae », Brahms substitue sa confiance en la bonté
divine, son attente de la résurrection. Le mode mineur
utilisé habituellement s’efface ici, laissant le mode majeur
apaiser la vision de la mort.
Brahms essuya pour ces raisons quelques controverses. Il
expliqua qu’il ne voulait pas aborder le dogme avec l’art,
et qu’il jugeait poétiques les textes de la Bible. Il dut, lors
des premières représentations, intégrer un air du Messie de
Haendel, jusqu’à l’ajout de l’air de soprano, plus porteur
du message christique.
Pourtant farouchement opposé à l’art wagnérien, Brahms
utilise un choral (sorte de leitmotiv), pour unifier son
Requiem allemand. Il s’agit du choral „Wer nur den lieben
Gott lässt walten“, déjà utilisé par Mendelssohn dans
Paulus et par Schumann dans ses Liederkreis. Mais son
caractère est moins prononcé qu’un véritable leitmotiv ; il
constitue davantage une sorte d’obsession symbolisant la
mort.
La création fut aussi une longue aventure. Le 1er décembre
1867, Un requiem allemand est créé avec les trois premiers
mouvements. La première version (sans le n°5) est dirigée
par Brahms le 10 avril 1868. Le cinquième mouvement fut
joué lors d’une audition privée le 17 septembre 1868.
Enfin, Brahms dut attendre le 18 février 1869 pour donner
la version intégrale.
Robert Schumann
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Les sept parties
1. „Selig sind, die da Leid tragen“
C’est un mouvement lent en fa majeur. Il suit un schéma en
trois parties ABA chères aux romantiques. L’orchestre est
sombre, les violons ne jouent pas. Brahms utilise le registre
grave. L’introduction sort du néant sur une pulsation
régulière des contrebasses. Les violoncelles et les altos,
divisés, font entendre un chant noble, humble et fervent. La
partie centrale (B) est, elle, plus douce et angélique. La
harpe illumine la fin de ce mouvement.
2. „Denn alles Fleisch…“ (Pierre, I-24)
C’est une marche funèbre à trois temps. Le chœur est
asservi à l’orchestre, tel un nouvel instrument. Le thème
descend, gémissant, aux couleurs glacées par les sourdines
des cordes, tandis que la timbale martèle des rythmes
incessants et parfois angoissants. La partie centrale est plus
animée, plus élégiaque. Ce mouvement se termine par une
fausse fugue, au thème bien affirmé par les basses. Cela
constitue un bel exemple de figuralisme musical, puisque
le texte annonce la joie future de la résurrection.
3. „Herr, lehre doch mich“ (psaume 39, Sagesse de
Salomon)
Ce troisième mouvement se présente comme un grand
prélude. Il exhorte à la résignation : la vie sur terre n’est
qu’un passage. Le baryton représente l’humanité, tout
comme dans la Neuvième symphonie de Beethoven. Le
chœur reprend la musique exposée par le soliste. Puis
soliste et choeur vont s’unir sur un accompagnement
d’orchestre plus pressant, avant que n’explose la fugue
finale en ré majeur (ton humaniste), entièrement écrite sur
une pédale (même note de ré tenue du début jusqu’à la fin),
qui symbolise la persévérance de la Foi solide et confiante.
4. „Wie lieblich sind deine Wohnungen“ (Psaume 94)
Ce chœur modéré en mi bémol majeur est le centre
lumineux de l’œuvre. Il chante la joie. L’orchestre y est
gracieux, l’accompagnement allègre et léger. La
construction est encore en trois parties, et l’on entend
clairement le thème principal énoncé au début par les bois,
repris en résonance à la fin par le chœur.
5. „Ihr habt nun Traurigkeit“ (St Jean, XVI-22)
Le texte reprend deux canons de la foi chrétienne : la
résurrection et la consolation. Seule “entorse” à la volonté
universelle et non “dogmatique” du message brahmsien
dans cette œuvre, “Je veux vous consoler comme une mère
console son enfant“ est confié à une voix maternelle de
soprano.
-7-

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