Cet article analyse le mouvement des Frères musulmans

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Cet article analyse le mouvement des Frères musulmans
« Printemps arabe »
le poids des Frères musulmans
leur vision de l’Etat et de la finance
islamiques
Zidane MERIBOUTE
ELKALAM.COM
Cet article analyse le mouvement des Frères musulmans (Ikhwan al-muslimin) sous ses
différentes formes. Ce mouvement islamique mondial, prosélyte, apparu dans la foulée des
deux guerres mondiales, a connu une véritable résurgence, voire une résurrection à partir des
années 1980 dans les pays musulmans. Fondé en 1928 par l’Egyptien Hassan al-Banna (19061949), le Printemps arabe lui a conféré un souffle nouveau. Le mouvement des Frères
musulmans s’est notamment imposé à la tête de l’Etat le plus peuplé du monde arabe,
l’Egypte. Là où ce mouvement s’implante, il crée ses propres syndicats, ses associations
d’étudiants, de médecins, de travailleurs, ses institutions bancaires islamiques, etc. L’auteur
examine plus particulièrement la nature de l’Etat islamique et les traits essentiels de la
doctrine politico-religieuse des Frères musulmans et des partis islamistes qui s’en inspirent au
Maghreb et ailleurs. Il décrypte leur approche économique, sociale et financière à travers les
différentes techniques de la finance islamique. Si le modèle financier musulman est motivé
par des considérations de justice sociale (‘adala ijtima’iya) et le rejet de l’usure (ribâ),
l’auteur considère néanmoins que la vision de ce modèle est essentiellement capitaliste en
visant à maximiser les profits. Il appelle à recentrer l’approche des banques islamiques et à
les adapter afin qu’elles soient aussi accessibles au financement des petits projets lancés par
des déshérités.
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1. Introduction
2. La sève vitale de l’islamisme militant mondial : les Frères musulmans
2.1. Vers un mouvement mondial
2.2. L‟emprise sociale
2.3. La doctrine politico-religieuse
2.4. Vision et fondement de l‟Etat islamique
3. Bref survol des pays d’ancrage des Frères musulmans dans le monde arabe
3.1. L‟ensemble du Levant et de la Mésopotamie (Syrie, Liban et Irak)
3.2. L‟ensemble maghrébin (Algérie, Maroc et Tunisie)
3.2.1. Le Parti de la justice et du développement (PJD) au Maroc
3.2.2. Le parti Ennahda en Tunisie
4. L’approche économique et financière des Frères musulmans et des partis qui s’en inspirent
4.1. Principes éthiques, fonctionnement et implantation de la finance islamique
4.2. Une finance essentiellement tournée vers le profit
4.2.1. La vision libérale de la finance islamique en Egypte, au Maghreb et dans le Golfe
4.2.2. La finance islamique socialisante en Syrie, au Liban et en Irak
4.2.3. La microfinance islamique
5. Conclusion
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AUTHOR'S NOTES
Cet article s‟inspire en partie de mon livre Islamisme, soufisme, évangélisme, paru chez Labor et Fides
en 2010.
1. Introduction
1A la suite de la révolte tunisienne de janvier 2011 contre le régime autoritaire du président Ben
Ali, suivie par celle des Egyptiens, des Yéménites, des Libyens et des Syriens, le monde arabomusulman est entré dans une nouvelle phase. Un vent d‟espoir souffle sur ces pays qui, sous la
pression de la rue, s‟engagent dans la voie des réformes démocratiques. Cette soif de liberté et de
démocratie est exprimée par une jeunesse éduquée, mais condamnée au chômage, à la « mal
vie » et au manque de perspectives d‟avenir. La nouvelle génération n‟est pas la seule à souffrir de
ces maux. Il n‟en reste pas moins que les sociétés arabo-musulmanes, toutes générations
confondues, ne sont désormais plus tétanisées par la peur des régimes despotiques. Elles rejettent
les idéaux obsolètes véhiculés par des idéologies anciennes, à savoir le mercantilisme libéral, le
guévarisme, le nassérisme ou l‟islamisme radical. Une révolution mentale est en cours. A première
vue, les nouveaux révolutionnaires semblent davantage se focaliser sur des thèmes consensuels,
tels que la liberté, la transition démocratique, la justice sociale et le rejet de l‟oppression, que sur
les slogans idéologiques classiques des partisans de l‟islamisme, du capitalisme, du socialisme ou
de la sécularisation de l‟Etat par opposition au pouvoir divin. Ces révolutionnaires ne croient plus à
la résolution miraculeuse de leurs problèmes par des partis traditionnels. Leur énergie paraît
désormais s‟orienter vers une nouvelle voie : celle des réseaux sociaux, des rassemblements
politiques virtuels que même les polices politiques redoutables du Tunisien Ben Ali, de l‟Egyptien
Hosni Moubarak ou du Syrien Bachar el-Assad n‟ont pas réussi à stopper. Les nouveaux
révolutionnaires semblent insaisissables, vu que leur capacité d‟organisation et de mobilisation
citoyenne s‟est appuyée essentiellement sur des supports technologiques virtuels, privilégiant
l‟anonymat via Internet, Facebook ou Twitter. Il ne faut cependant pas se leurrer sur le pouvoir des
réseaux sociaux. Même si ces derniers ont permis une réelle mobilisation, l‟action des jeunes, une
fois mobilisés, a été très concrète et efficace, grâce à l‟existence de relais constitués par la classe
moyenne et la société civile animée par des démocrates appartenant à tous les pans de la société :
syndicats, associations professionnelles, organisations non gouvernementales (ONG), partis
laïques, mouvements islamiques modérés ou d‟obédience mystique soufie.

1 Voir les déclarations de Rached Ghannouchi, le chef du parti islamiste tunisien Ennahda (Ghannouch(...)
2Les démocrates des pays occidentaux comme ceux des pays musulmans n‟ont pas tardé à
s‟inquiéter de l‟avenir de ce qu‟on appelle communément le « Printemps arabe » de 2011. Ils ont
manifesté une crainte légitime que ce mouvement soit récupéré par les islamistes salafistes et
mené vers des théocraties. Pour les rassurer, on cite systématiquement, et à juste titre, la réussite
du « modèle islamique turc » du Parti pour la justice et le développement (AKP) dirigé par Recep
Tayyip Erdoğan, dont l‟action démocratique est exemplaire pour les régimes orientaux 1. Pourtant,
et selon nos recherches, ce parti musulman turc est fortement tributaire d‟un soufisme enraciné
dans la tradition de la confrérie (tarîqa) des Naqshbandis, dominée par des mystiques très habiles
dans le domaine politique et économique.
3Les Turcs, en votant pour un parti d‟obédience islamique ayant une large base religieuse de
nature soufie orthodoxe (les Naqshbandi et les Mevlawis liés au célèbre mystique Mevlânâ
Celaleddin-i Rumi), ont encouragé une tendance qui rejette l‟extrémisme religieux et s‟accommode
des valeurs de la démocratie occidentale. Le monde musulman en révolte pour conquérir sa dignité
et des changements démocratiques bénéficiera-t-il d‟une même assise religieuse de tradition soufie
et humaniste que le « modèle turc » ? D‟emblée, nous pouvons répondre que, de par sa nature,
l‟islam turc ne peut pas être confondu avec celui prôné actuellement dans les pays arabes. En effet,
dans l‟aire arabo-islamique, ce sont des individus et des partis religieux proches des idées des
Frères musulmans, donc complètement éloignés de la mystique des ordres soufis, qui ont réussi à
se positionner à la tête des pouvoirs ayant émergé au lendemain du Printemps arabe.
4Compte tenu de ces constats, cet article s‟articule dans une première partie autour de la vision
idéologique et stratégique des Frères musulmans (Ikhwan al-Muslimin), et ce de manière globale.
Il propose notamment une synthèse de leur vision ainsi que de leur conception de l‟Etat idéal qui
devrait régir la nation islamique (oumma). Dans une deuxième partie, l‟article traite brièvement le
cas des pays qui ont été secoués par le Printemps arabe, notamment l‟Egypte, certains autres pays
du Moyen-Orient et du Maghreb, en s‟intéressant particulièrement au Parti de la justice et du
développement (PJD) au Maroc et au parti Ennahda en Tunisie. L‟article s‟arrête sur le caractère
exceptionnel de ce parti qui apparemment, tout en s‟inspirant des Frères musulmans, a su adapter
sa pensée et sa vision stratégique sociale et étatique aux exigences de la démocratie et des droits
humains. Dans un troisième temps, l‟article considère de manière parfois critique l‟influence de
l‟approche économique, sociale et financière des Frères musulmans. Aux yeux de ce mouvement,
leur démarche devrait inspirer un nouveau modèle économique basé sur l‟éthique sociétale
islamique. Il n‟en demeure pas moins que dans la majorité des pays arabes où ce modèle est en
vogue (Egypte, Maghreb et pays du Golfe), la vision est essentiellement capitaliste et vise à
maximiser les profits. Cette vision est cependant atténuée dans les pays communautaristes, à
l‟instar de la Syrie, du Liban ou de l‟Irak. En outre, des projets de microfinance islamique cherchent
à compenser les lacunes d‟une finance trop attachée au profit.
2. La sève vitale de l’islamisme militant mondial :
les Frères musulmans

2 L‟histoire des Frères musulmans a été traitée dans Meriboute (2004, 87 et suiv.).

3 Voir le site de prosélytisme (en arabe)http://www.daawa-info.net/manhaj.php (consulté le 13 sept(...)

4 Point nº 2 du programme des Frères musulmans, sur le site cité plus haut.

5 Voir les recommandations du Congrès mondial de la jeunesse islamique tenu à Borsa, en Anatolie, le (...)
5Le mouvement des Frères musulmans (désigné souvent ci-après par « Frères ») a été fondé en
1928 par l‟Egyptien Hassan al-Banna (1906-1949)2. Comme l‟a rappelé, très récemment, la
centrale égyptienne des Frères au Caire, l‟objectif premier du fondateur du mouvement était
l‟éducation des jeunes dans la tradition islamique et la propagation de la « da’wa
salafi » (« prédication salafie ») et de « l‟islam sunnite purifié » à travers le monde3. Les membres
de cette organisation travaillent souvent dans la clandestinité et ont pour instruction de ne jamais
« adhérer à des organismes ou des partis politiques traditionnels »4. Ils sont tenus de se consacrer
entièrement à leur propre mouvement religieux et de forger une identité religieuse panislamique
qui se situerait, selon leurs propres termes, aux antipodes du nationalisme arabe 5. Cette stratégie
de boycott à l‟égard des partis politiques leur a permis de devenir la première force organisée du
monde musulman. Là où le mouvement s‟implante, il crée ses propres syndicats, ses associations
d‟étudiants, de médecins, de travailleurs, d‟avocats ou d‟ingénieurs, ses banques, ses médias, ses
journaux, etc. Les Frères exhortent les régimes musulmans à rejeter la laïcité, considérée comme
un blasphème, et à appliquer la charia sous le gouvernement d‟un califat suprême. Les pères
fondateurs avaient pour principal souci de créer une sorte d‟homo islamicus au vernis moderniste.
Pour atteindre ce but, Hassan al-Banna et ses successeurs se sont inspirés des méthodes
d‟initiation prônées par des ordres soufis salafis.
2.1. Vers un mouvement mondial
6Si l‟idéologie de base et les rituels de la confrérie sont restés presque intacts depuis environ
quatre-vingts ans, ses méthodes de communication ont, elles, considérablement évolué. Celles-ci
ont incontestablement réussi à s‟adapter aux exigences de la société contemporaine.
7En 2012, le mouvement est devenu une organisation mondiale tentaculaire qui s‟impose comme
un modèle important pour le renouveau islamique en quête d‟un califat. Ses branches affiliées sont
multiples en Egypte – où désormais ils ont pris le pouvoir avec l‟élection de Mohamed Morsi –, en
Arabie saoudite, dans les pays du Levant (Syrie, Liban, Palestine), au Maghreb (Algérie, Maroc,
Tunisie, Libye), en Afrique de l‟Ouest (Mauritanie), en Afrique sahélienne et orientale, en Asie du
Sud-Est, en Asie centrale, en Occident et en Amérique latine. Mohamed Mehdi Akef, le guide
précédent des Frères musulmans, a qualifié cette confrérie de plus grande organisation
internationale du monde : « [On affirme] que les Frères musulmans sont une organisation
internationale ; oui, nous constituons la plus grande organisation au monde, et quiconque, dans
l‟arène internationale, croit en l‟approche des Frères musulmans est l‟un des nôtres – comme nous,
nous sommes un des leurs » (Akef, 2005b, notre trad.).
2.2. L’emprise sociale

6 Voir aussi la revue du Institute of Contemporary Islamic Thought,Crescent International, et plus (...)
8Dans tous les pays où les Frères musulmans opèrent, ils se montrent actifs à tous les niveaux de
la société, accordant leur soutien en priorité à des organisations caritatives, universitaires,
sportives et médiatiques. Partout où ils s‟implantent, leur premier souci est d‟établir des écoles,
des cliniques, des clubs sportifs, et de proposer des microcrédits sans riba (intérêt) aux musulmans
qui adhèrent à leurs principes idéologiques, définis par Al-Banna et perfectionnés par son gendre,
Saïd Ramadan. Pour eux, le savoir, c‟est le pouvoir. A cet égard, avec l‟aide des Frères de
la Jama’at-e-Islamiasiatique, ils ont pénétré peu à peu la plupart des institutions académiques
occidentales, tel l‟Institut islamique de Londres, dirigé par feu Kalim Siddiqui (1931-1996), citoyen
britannique d‟origine indienne qui « se bat[tait] pour que les musulmans en Angleterre puissent
appliquer les principes de la vie coranique, y compris la polygamie, le divorce immédiat, l‟abolition
de la mixité dans l‟éducation, et des écoles publiques musulmanes » (K. Siddiqui, 1990)6.

7 Au sujet de la présence des Frères musulmans sur Al-Jazeera (par exemple, le cheikh Al-Qaradaoui), (...)
9Les Frères musulmans exercent une certaine emprise et une influence sur les institutions sociales,
éducatives et médiatiques du monde musulman. Ainsi, quelques-uns d‟entre eux ont réussi à se
hisser aux postes stratégiques de la télévision de langue arabe Al-Jazeera7 au Qatar ainsi que dans
la fameuse maison d‟édition Tawhid (France), gérée par l‟Union des jeunes musulmans de France.
Le mouvement des Frères s‟attache aussi à faire sortir le monde islamique de sa léthargie
intellectuelle en proposant d‟adapter dans une certaine mesure le modèle islamique au monde
moderne. D‟après plusieurs sources, les cadres des Frères musulmans égyptiens se seraient
enrichis durant leur exil en Europe et dans les pays pétroliers (Arabie saoudite, Emirats arabes
unis, Qatar, Koweït) jusque dans les années 1980. Ensuite, profitant de la politique d‟ouverture
économique (infitah) lancée par le président égyptien Anouar el-Sadate, ils ont investi
massivement en Egypte avec la création de petites entreprises consacrées à l‟immobilier, à
l‟import-export et au commerce. De plus, il convient de garder à l‟esprit que les membres de cette
organisation doivent obligatoirement verser de 3 % à 5 % (voire à 7 %, en Jordanie) de leurs
revenus ou salaires à cette dernière. Les Frères, en tant que mouvement islamique mondial, ne
limitent pas leurs activités économiques à l‟Egypte. Ils investissent aussi, par le biais des banques
islamiques, à Dubaï, dans le golfe Persique et en Europe. Leurs investissements financiers sont
soumis aux règles strictes de la charia. Les Frères musulmans sont, effectivement, les premiers à
avoir lancé et concrétisé le mouvement mondial de la finance islamique, ce que nous examinerons
plus loin.
2.3. La doctrine politico-religieuse

8 La pensée d‟Ibn Taymiyya et des dirigeants islamistes qui l‟ont développée a été traitée en profon(...)
10Afin de mieux comprendre la vision du développement et des institutions étatiques des Frères
musulmans, il est utile de connaître leur doctrine fondamentale, qui s‟articule autour de la pensée
d‟Ibn Taymiyya, un théologien musulman sunnite du XIIIe siècle. Celle-ci a été reprise et
développée par deux grands penseurs de l‟islamisme, à savoir le cheikh Hassan al-Banna,
fondateur des Frères musulmans, et Sayyed Qutb (qutbisme)8. La doctrine des Frères musulmans
s‟appuie en particulier sur quelques thèses principales ici résumées :
11– La connaissance et le pouvoir politique sont exclusivement des dons de Dieu et ne s‟exercent
qu‟à travers le Coran et la charia.

9 Voir le texte d‟Ibn Taymiyya, « Siy’asa Shar’iyya », repris et commenté dans Laoust (1939)
12– Les musulmans ne doivent obéissance qu‟à l‟ordre divin (charia) régi par le califat, qui
demeure un objectif stratégique. Par conséquent, ils sont tenus de rejeter la laïcité et la démocratie
sous leurs formes occidentales. « Soixante ans sous l‟autorité d‟un imam pieux ou d‟un chef
religieux injuste valent mieux qu‟une seule nuit d‟anarchie », déclarait Ibn Taymiyya9.
13– Le bon musulman doit tendre au tawhid (unicité de Dieu), rejeter toute relation avec d‟autres
divinités (shirk) et s‟abstenir de pratiquer le culte des saints (présent chez les soufis) ou de
s‟adonner à la danse, à la musique, au chant et aux arts.
14– Le musulman doit éviter de s‟écarter d‟une interprétation littérale des textes sacrés.
15– Enfin, ces courants doctrinaux placent le djihad au sommet des commandements donnés aux
croyants. Pour Ibn Taymiyya et les penseurs islamistes, « la défense des terres musulmanes est la
première obligation après la foi ». Tous les mouvements islamistes considèrent que le premier
commandement après la foi est de repousser l‟envahisseur ennemi qui agresse la religion
musulmane. Mais les minorités chrétiennes et juives qui vivent en terre d‟islam sont légalement
protégées par le statut de ladhimma des ahl al-kitab (ou gens du Livre).
2.4. Vision et fondement de l’Etat islamique

10 Plus précisément, pour Al-Mawdoudi, lahakimiyya nécessite l‟édification d‟un Etat islamique divin. (...)

11 Sur la vie et l‟œuvre de M. Nahnah, voir Ayachi (1992, 206 et suiv.).
16Inspirés également par l‟islamiste pakistanais Al-Mawdoudi, les Frères musulmans invitent
préalablement les musulmans à suivre quatre commandements obligatoires : 1º s‟en remettre à
Allah (Dieu) au moyen de l‟iman (foi), 2º reconnaître la souveraineté d‟Allah (rouboubiya), 3º se
conformer à sa religion (din) à travers un culte codifié et 4º être fidèle aux rituels (ibadat) prescrits
par le prophète Mahomet. Ces points cardinaux sont censés, selon les Frères, mener le musulman
sur le droit chemin de la hakimiyya(souveraineté/arbitrage suprême appartenant à Allah et non au
peuple) et lui éviter d‟emprunter les pistes sans issue de la mécréance (kufr) et de
l‟ignorance (jahiliyya). Lajahiliyya comme le kufr sont, aux yeux des Frères, essentiellement
alimentés par la culture gréco-romaine occidentale dont la philosophie, la démocratie et le
libéralisme ne sont pas guidés par l‟inspiration divine. Pour le mouvement des Frères musulmans,
lahakimiyya doit soumettre la oumma (nation islamique) à des lois politiques, sociales et
économiques fondamentales, à la fois théocratiques et démocratiques (dites théo-démocratiques),
légitimées par le sacré et la consultation obligatoire des représentants du peuple (choura)10.
Mahfoud
Nahnah,
père
des
Frères
musulmans
algériens,
nomme
ce
processus
la « chouracratie »11.
17Les notions d‟institution étatique et d‟autorité représentative qui en découlent sont observées
dans la perspective divine par les Frères musulmans. Elles puisent ainsi leurs racines « éthiques »
non seulement dans la société civile – la famille, le clan, la tribu ou la corporation – mais aussi
dans celle du guide (imam) ou du gardien de la loi sur terre (calife). S‟inspirant d‟Ibn Taymiyya, les
Frères considèrent que les affaires de l‟Etat et de la religion devraient être concentrées entre les
mains de chefs, dits « serviteurs d‟Allah ». Ils sont aussi d‟avis que les musulmans devraient être
régis essentiellement par la charia islamique et que l‟Etat qui ne tient pas compte des lois révélées
devient tyrannique (Laoust, 1971). Aux yeux des Frères musulmans, l‟Etat a également pour but
d‟améliorer les conditions matérielles de vie des musulmans. A cet effet, il a l‟obligation d‟organiser
une économie et un mode de développement islamiques, fondés principalement sur la technique de
la « finance islamique » et le rejet systématique de l‟usure et des investissements dit « impurs »
(liés à l‟alcool, au porc, au jeu, etc.).
3. Bref survol des pays d’ancrage des Frères
musulmans dans le monde arabe

12 Les critiques de ce théoricien des Frères musulmans sont développées dans Al-Ghazali (1997).
18Après s‟être imposés en Egypte et grâce aux pétrodollars générés par le néowahhabisme, les
Frères musulmans ont organisé la réislamisation de l‟Algérie, de la Syrie, de la Tunisie, du Maroc et
de la Jordanie et ont fait basculer le Soudan dans un régime théocratique géré par la charia
islamique. A partir de Khartoum, l‟organisation est partie à la conquête de l‟Afrique et du Maghreb,
où elle a endigué l‟évangélisme protestant, soutenu – selon l‟idéologue des Frères musulmans, le
cheikh Al-Ghazali – par certains orientalistes12.
19La confrérie a très vite suscité l‟adhésion populaire grâce à son travail de proximité dans les
domaines social, médical, économique et éducatif en faveur des plus démunis, souvent abandonnés
à leur triste sort par les gouvernements arabes en place. En Egypte, par exemple, une enquête de
Tangi Salaün révèle que la Gamia Charia, la plus importante société de bienfaisance égyptienne,
est contrôlée par les Frères musulmans. La chercheuse Sarah Ben Néfissa précise à ce sujet
qu‟« avec ses 450 filiales, ses 6000 mosquées et ses 2 millions de membres, la Gamia Charia est
un véritable Etat dans l‟Etat » (Salaün, 2006). Ces filiales et ces mosquées constituent le socle de
l‟aide sociale de l‟organisation. Les Frères musulmans gèrent aussi « une vingtaine d‟hôpitaux, sans
compter les dispensaires ou les orphelinats » et « contrôleraient environ 20 % des organisations
non gouvernementales (caritatives) égyptiennes » (Salaün, 2006). Toutes ces données confirment
la montée en puissance des Frères musulmans, qui ont été majoritairement élus au parlement
égyptien au mois de mai 2012.

13 Voir le site des Frères musulmans en Jordanie (en arabe),http://www.ikhwan-jor.com (consulté le(...)
20En Jordanie, dès les années 1940, les Frères musulmans ont été soutenus pour des raisons
stratégiques par le roi Abdallah13. Ensuite, son fils, le roi Hussein, a utilisé ce mouvement contre le
régime révolutionnaire nassérien. En 1989, avec l‟introduction du multipartisme dans le royaume
hachémite, les Frères devinrent la première force politique, sous le nom de « Front islamique
d‟action ». Si les Frères musulmans de l‟ensemble jordano-palestinien sont animés par une
idéologie de combat forgée dans la lutte contre l‟immixtion extérieure et l‟occupation, nous verrons
que ceux du Levant et de la Mésopotamie (Syrie, Liban et Irak) sont plutôt portés sur des
idéologies internationalistes, de type socialisant.
3.1. L’ensemble du Levant et de la Mésopotamie (Syrie,
Liban et Irak)
21Dans l‟ensemble syro-libanais et irakien, les Frères musulmans devaient relever des défis
particuliers, imposés notamment par leur situation interne dans les domaines politique, sectaire et
religieux. En effet, le pouvoir était dominé, dans ces pays, soit par des féodalités chrétiennes et
chiites liées aux puissances étrangères, soit par le courant nationaliste baasiste, ce qui n‟était pas
du goût des Frères.

14 Hassan Houidi, numéro deux des Frères musulmans en Syrie, a longuement commenté l‟histoire de ce m (...)
22La proposition d‟un contre-projet de nature islamiste ne se fit pas attendre. Les Frères
musulmans essayèrent de contrecarrer le baasisme et le féodalisme par un programme de
socialisme islamique. Leur proposition s‟articulait autour du principe suivant : Dieu est l‟unique
propriétaire des biens terrestres ; les propriétaires ne possèdent que la jouissance usufruitière de
ces biens et ont le devoir d‟en faire profiter la communauté islamique. Si l‟on prend le cas de
laSyrie, les Frères musulmans furent dirigés spirituellement dès 1945 par un brillant intellectuel
nommé Mustafa al-Siba‟i, qui avait fait ses armes chez Al-Banna et qui, selon Hassan Houidi14,
avait réussi à mobiliser les masses hostiles à la présence française ainsi qu‟aux grands
propriétaires agraires syriens de l‟époque. Al-Siba‟i prônait l‟application des principes égalitaires de
l‟islam.
23Les Frères syriens n‟ont jamais toléré que l‟islam non sunnite des alaouites chiites et des
baasistes laïques domine le cœur de la Syrie, puissance régionale et ancien bastion du califat
omeyyade. Après la mort du charismatique Al-Siba‟i, les leaders du mouvement des Frères en Syrie
et en Irak ont été affaiblis par le régime baasiste omniprésent dans la région, et ils ont été divisés
et exilés de ces pays. Ainsi, Issam el-Attar s‟est réfugié en Europe (Aziz, 1983, 269) et Adnane
Saadeddine a été contraint à l‟errance dans les pays arabes.
24Aujourd‟hui, ce mouvement lutte contre les autorités syriennes alaouites. Ali Sadr ad-din AlBayanouni, al-Mourakib al-’Am (« contrôleur général ») des Frères musulmans en Syrie, en exil à
Londres, affirme que la direction des Frères syriens vit toujours à l‟étranger (Al-Bayanouni, (2004).
25Il faut préciser qu‟Al-Bayanouni s‟est allié récemment à l‟ancien premier ministre A. Khaddam
afin de coordonner l‟opposition au régime baasiste syrien, jugé corrompu et répressif. Mais la
situation a changé depuis l‟avènement du Printemps arabe en 2011. Les Frères musulmans
influencent considérablement l‟opposition au sein du Conseil national syrien (CNS). Ils livrent une
lutte acharnée contre le régime de Bachar el-Assad, avec la bénédiction de la Turquie et le
parrainage du Qatar et de l‟Arabie saoudite. Ils ne cachent pas leur intention d‟œuvrer pour
l‟édification d‟un Etat islamique démocratique en Syrie.

15 Voir les informations fournies sur les sites Internet des Frères musulmans,http://www.ikhwanonlin(...)
26Au Liban, les Frères musulmans se sont plutôt attachés à la théologie moderniste du D rFathi
Yakan, qui travaille en particulier avec la mouvance islamique syro-irakienne15.

16 Voir à ce sujet le site Internet (en anglais)http://www.iraqi.com(consulté le 13 septembre 2012).
27Enfin, en Mésopotamie irakienne, l‟idéologie socialisante de ces Frères ne diffère pas de celle du
Levant syro-libanais. Il existe deux tendances des Frères musulmans en Irak. L‟une,
prosoudanaise, est représentée par le Parti islamique irakien, Hizb al-Islami al-’Iraqi, dirigé par
Iyad al-Samarra‟i. Elle s‟est alliée au parti Da’wa chiite (formant ainsi l‟Union des forces
islamiques). L‟autre, prosaoudienne et idéologiquement de type socialo-communautariste, est
constituée par le Bloc islamique (Kutla al-Islamiya) fondé par le cheikh Mohammed al-Aloussi
(Luizard, 2002, 212). Aujourd‟hui, en Irak, les Frères musulmans sont surtout représentés dans les
régions sunnites, avec le Parti islamique irakien16. Ils ont également infiltré d‟autres organismes
tels Hayât al-Ulema(l‟organisme des oulémas en Irak) et le Haut Organisme pour la da’wa et
la fatwa(représenté par Zakariya al-Tamimi). Selon l‟intellectuel islamiste Hisham al-Badrani
(2005), le partage des rôles entre les institutions islamiques irakiennes est clair. SiHayât alUlema et le Haut Organisme pour la Da’wa et la fatwa, dotés d‟un conseil consultatif
reconnu (choura), se limitent à des rôles d‟orientation religieuse (ilmi wa fikri), le Parti islamique
irakien des Frères musulmans joue, quant à lui, un rôle politique et pèse puissamment sur toutes
les institutions sociales et économiques dans les régions sunnites irakiennes.
3.2. L’ensemble maghrébin (Algérie, Maroc et Tunisie)
28Au Maghreb, la stratégie des Frères musulmans se caractérise par une aptitude d‟adaptation aux
particularités sociologiques locales. Le mouvement a par exemple octroyé certaines libertés aux
femmes et s‟est plié aux usages parlementaires(« chouracratie »). Mais il n‟a rien cédé de sa
stratégie de réislamisation de la société, du respect des dogmes musulmans, du rejet de la mixité
et de l‟obligation pour les femmes de porter le voile.
29En Algérie, les Frères musulmans ont été introduits par la filière des « coopérants » égyptiens et
moyen-orientaux venus arabiser le pays dans les années qui ont suivi l‟indépendance (Azine et
Boumezbar, 2002). Aujourd‟hui, plusieurs partis islamiques représentés à l‟Assemblée nationale
(parlement) se réclament de l‟idéologie des Frères musulmans. Il s‟agit de l‟Alliance de l‟Algérie
verte (AAV), formée principalement de trois partis, El Islah, le Mouvement de la société pour la
paix (MSP/Hamas) et Ennahda (Algérie), qui ont obtenu 58 sièges aux élections législatives en mai
2012.
3.2.1. Le Parti de la justice et du développement (PJD) au Maroc

17 Voir l‟entretien de Mostafa al Khalfi, membre du PJD, avec O. Ben Elmostafa (Ben Elmostafa, 2007, 7 (...)
30A la suite du Printemps arabe, les islamistes ont dominé la scène politique marocaine avec le
très sérieux PJD, qui s‟est rapidement adapté au jeu parlementaire. Lors des élections législatives
de novembre 2011, il a remporté 107 sièges sur 395. Même si le PJD n‟entretient pas de relations
avec les Frères musulmans, il s‟en inspire considérablement. Comme dans la confrérie égyptienne
de Hassan al-Banna, les membres du PJD adoptent l‟attitude piétiste et conservatrice de l‟islam
sunnite. Ils sont tenus d‟obéir strictement à la hiérarchie du parti. Le recrutement des membres est
également soumis à une procédure rigoureuse et conforme aux principes de l‟éthique islamique. Le
PJD milite pour que la charia soit la source essentielle de la législation marocaine et défend
« toutes les formes et les moyens possibles pour aboutir [au] califat »17. A l‟image des Frères, les
membres du PJD ont aussi une vision littéraliste des textes sacrés et s‟opposent à la mystique
islamique et à la vénération des saints soufis. Enfin, le parti rejette la violence et prône
la da’wa (prêche religieux) ; à tous égards, sa politique ne s‟éloigne pas de celle des Frères
musulmans, dans la mesure où il soutient fermement le parti islamique Hamas de Palestine, tout
en rejetant l‟« Autorité palestinienne », jugée trop laïque (Ben Elmostafa, 2007, 75 et suiv.). Au
niveau international, il est incontestable que la victoire du PJD au Maroc a marqué un nouveau
tournant pour le Maghreb et le Moyen-Orient après celle du parti d‟Ennadha en Tunisie.
3.2.2. Le parti Ennahda en Tunisie
31En Tunisie, avant le Printemps arabe, les membres de la tendance islamique (proche des Frères)
avaient réitéré leur choix en faveur de la voie légale (parlementaire) (Frégosi, 2003). Nonobstant
cette attitude raisonnable, la répression s‟abattit sur eux et ils furent rapidement exilés à l‟étranger
avec leurs principaux dirigeants, dont Rached Ghannouchi. Ce dernier a su donner une image de
parti réformiste et progressiste au parti tunisien Ennahda, en se démarquant légèrement de la
vision traditionnelle et idéologique des Frères musulmans. Ainsi, ce parti adopte un discours plus
affiné et complexe. En voici les traits essentiels : pour Ennahda, l‟autorité doit émaner du
consentement exprimé librement par le peuple, mais en conformité avec les principes et les valeurs
de l‟islam. Elle doit s‟inspirer des valeurs de l‟islam et s‟écarter des modèles imposés par les
Occidentaux, à l‟instar du sécularisme et du laïcisme. Le parti a une vision dynamique et évolutive
de l‟Etat. Selon lui, la notion d‟Etat ne peut pas être figée dans une idéologie islamique précise. Elle
s‟adapte au contexte social et économique du moment et doit rencontrer le consentement
démocratique de la société, où seul le peuple est souverain. En somme, pour Ennahda, l‟Etat ne
devrait en aucun cas être théocratique. Il doit favoriser l‟émergence d‟un Etat de droit, se baser sur
les notions de justice sociale, de liberté et de solidarité tout en reposant sur les fondements de la
pensée et de la culture islamiques. Pour parvenir à cet Etat idéal, le peuple souverain devrait se
doter d‟un parlement, élu par le biais des partis politiques et surveillé par un collège d‟experts
désignés à raison de leurs compétences. Enfin, R. Ghannouchi et le parti Ennahda (à l‟exception du
président Hamadi Jebali) sont d‟avis que la Tunisie devrait exclure provisoirement l‟idée d‟un califat
et s‟appuyer fermement sur une approche démocratique des institutions étatiques.
32S‟agissant des thèmes du djihad, du rôle de la femme, du voile, de l‟apostasie et de la
polygamie, Ennahda s‟écarte totalement des interprétations conservatrices des Frères musulmans
et des salafistes. Enfin, le parti et ses chefs rejettent toute action qui contredit explicitement les
droits humains, de même que celles qui vont à l‟encontre de l‟égalité entre les femmes et les
hommes.
4. L’approche économique et financière des
Frères musulmans et des partis qui s’en inspirent

18 La liste des 57 Etats membres de l‟OCI est disponible sur http://www.oic-oci.org/member_states.asp(...)

19 Voir également le site Islamic Banking Information (en anglais),http://islamicbanking.info, et CG (...)
33Durant ces dernières décennies, notamment depuis les années 1970, sous la pression des Frères
musulmans, les pays membres de l‟Organisation de la coopération islamique (OCI) 18, dont le siège
est à Djeddah, en Arabie saoudite, ont progressivement construit un nouveau modèle de
développement économique, basé sur l‟éthique sociétale islamique. Les pays de la péninsule arabe,
puis l‟Egypte du président Sadate (avec sa politique d‟ouverture économique des années
1970, infitah en arabe), relayés par le mouvement mondial des Frères musulmans, ont mis en
place une économie privée reposant sur la finance islamique. Les théologiens musulmans ont
rapidement suivi le mouvement en adoubant l‟idée que l‟islam protège désormais la propriété
privée et encourage l‟entreprise individuelle, à condition qu‟elles respectent les principes éthiques
religieux établis par la charia. Aujourd‟hui, le secteur de la finance islamique est présent dans la
plupart des pays musulmans et occidentaux, parmi lesquels le Royaume-Uni (départements de la
finance islamique à la Citibank et chez HSBC), le Luxembourg, l‟Allemagne et la France. Les actifs
financiers islamiques représentaient 5 milliards USD à la fin des années 1980. Ils sont passés à 230
milliards USD en 2001 et à près de 1200 milliards USD en 2011 (Mohieldin, 2012)19.
4.1. Principes éthiques, fonctionnement et implantation de
la finance islamique
34La finance islamique met des barrières éthiques très strictes pour les placements et réglemente
la relation entre les investisseurs, les gérants et les créanciers.
35Le premier principe de la finance islamique est l‟interdictionde verser un quelconque intérêt ou
de pratiquer l‟usure (riba). Il découle de la Sourate 2, verset 275 du Coran qui dit : « Allah a
permis la vente, Il a interdit l‟usure. » Deuxième principe : l‟interdiction de spéculer
(maysir ou ihtikar). Les investissements spéculatifs ou incertains (gharar) sont donc illicites.
Troisièmement, il est interdit d‟investir dans certains secteurs économiques liés au commerce de
l‟alcool, des cigarettes, de la consommation de porc, des jeux d‟argent, de la prostitution, de la
mafia et de la drogue. Il va sans dire que les investissements islamiques sont tous contrôlés par
des imams (sharia boards).
36Ces principes éthiques sont accompagnés d‟une réglementation économique basée sur le
principe de solidarité et de justice sociale. Plus précisément, l‟élément-clé de cette économie
islamique est l‟idée du partage des risques, des profits et des pertes entre les associés ou autres
partenaires économiques. Il existe plusieurs types d‟opérations commerciales et d‟investissement.
Parmi les principales pratiques ou techniques de la finance islamique, on trouve les accords dits de
la moucharaka (association), de lamoudaraba et de la mourabaha(vente à bénéfices). Dans le
système de la moucharaka, une banque peut, par exemple, s‟associer à un entrepreneur en
finançant son projet. Les profits et les pertes que génère ledit projet sont équitablement partagés
entre les deux associés. Dans les accords de la moudaraba, la banque injecte entièrement le capital
et le promoteur du projet fournit son travail afin de faire fructifier les sommes investies. Le partage
des bénéfices est convenu entre les parties. Mais les pertes, s‟il y en a, sont supportées
uniquement par la banque, sauf s‟il est prouvé que le promoteur a commis une faute ou une
négligence ou qu‟il a violé les conditions bancaires. Enfin, dans le cas de figure de la mourabaha,
une institution bancaire achète, par exemple, des marchandises ou des équipements à des
fournisseurs sur instruction d‟un client pour les revendre à ce dernier avec une marge bénéficiaire
convenue à l‟avance.
37Deux remarques supplémentaires peuvent être faites sur le système financier islamique : d‟une
part, il soumet les titres (actions, obligations, bons de trésor, etc.) à certaines conditions
préalables, puisqu‟il exige que les titres soient adossés à des actifs tangibles et non virtuels. Cette
dépendance des titres vis-à-vis des actifs a l‟avantage de garantir le lien direct entre les
transactions financières et les activités financières économiques réelles. D‟autre part, il se veut, en
principe, non discriminatoire, dans la mesure où il bénéficie à toute personne physique ou morale
qui en fait la demande, et ce indépendamment des convictions religieuses ou confessionnelles.
Toutefois, dans la réalité, cette pratique semble discriminatoire : on ne prête qu‟aux musulmans
piétistes.
38La finance islamique, jusqu‟ici concentrée dans les pays duProche et du Moyen-Orient, gagne
progressivement les pays du Maghreb et de l‟Afrique de l‟Ouest qui ont subi l‟influence du
Printemps arabe, accompagné d‟un souffle islamique.

20 Voir le dossier complet sur la finance islamique en 2012 élaboré par le magazine marocainFinanc (...)
39Au Maroc, le PJD à la tête de la coalition gouvernementale tente d‟accélérer le mouvement en
faveur des banques islamiques. Il a déposé au début de 2012 un projet de loi relatif à la finance
islamique, projet en cours d‟étude au niveau de Bank Al-Maghrib, la banque centrale
marocaine20.En Tunisie, le parti Ennahda a fait recours au Conseil supérieur des banques
islamiques (CSBI), qui supervise plus de 27 banques islamiques, dont la Banque islamique de
développement (BID) et Dubaï Islamic Bank ; « le président du CSBI, Husseïn Hamid, s‟est dit prêt
à financer les grands projets d‟infrastructure prévus en Tunisie » (Chedly, 2012).En Algérie, les
banques El-Baraka et al-Salam Bank, soutenues par les partis islamistes au pouvoir et les pays du
Golfe, ont réussi une pénétration sociale des milieux conservateurs. Enfin, en Afrique de l‟Ouest,
les pays de l‟Union économique et monétaire ouest-africaine ont désormais recours au marché de
la finance islamique, qui offre des opportunités intéressantes pour financer de grands projets au
Sénégal, au Mali, au Niger, en Mauritanie et surtout au Nigéria.
4.2. Une finance essentiellement tournée vers le profit
40Dans le monde musulman, les institutions financières islamiques commencent à acquérir des
parts importantes du marché local et ambitionnent de s‟imposer comme alternative à l‟ensemble du
système financier conventionnel. Ces institutions peinent cependant à remplir leur objectif social et
économique de soutien aux personnes vulnérables et aux très petites entreprises familiales. Cette
imperfection est due au fait que les banques islamiques financent essentiellement soit des
mégaprojets dans l‟immobilier, le commerce, l‟industrie ou les services, soit des projets pour la
petite industrie, l‟artisanat ou les corporations professionnelles. Ainsi, les projets plus petits des
particuliers ou des familles pauvres sont complètement négligés.
41La finance islamique pratiquée en Egypte, au Maghreb et dans les pays du Golfe, empreinte
d‟une vision capitaliste libérale, doit cependant être distinguée de la finance religieuse en vigueur
dans des pays comme la Syrie, le Liban ou l‟Irak, plus socialisante et moins centrée sur le profit.
4.2.1. La vision libérale de la finance islamique en Egypte, au
Maghreb et dans le Golfe
42En adoptant l‟approche libérale, la finance islamique en Egypte, comme au Maghreb, soutenue
par les capitaux de pays du golfe Persique (Arabie saoudite et Qatar), a abouti à l‟enrichissement
d‟une caste d‟islamo-affairistes et à des disparités économiques et sociales dans ces pays. Comme
le dit Michel Galloux, sa « logique de fonctionnement obéit aux lois du marché » (et à la
concurrence). Dans ce sens, la finance islamique de ces pays diffère peu de la finance
conventionnelle, puisque les « déposants espèrent tout naturellement une rémunération correcte
de leurs fonds tout en sachant qu‟elle ne sera pas garantie à l‟avance, selon le principe islamique »
(Galloux, 1993, 60). Tout comme les banques conventionnelle, les banques islamiques cherchent le
profit à court ou à long terme. Sous l‟instigation des banques arabes du Golfe, les banques
égyptiennes et maghrébines multiplient ainsi leurs activités dans des domaines où elles espèrent
obtenir des profits et des rémunérations avantageuses. C‟est pour ces raisons que dans ces pays et
particulièrement en Egypte, la finance islamique s‟intéresse non seulement aux grands projets
économiques, mais aussi « au secteur de l‟artisanat, des petites industries (des ateliers de
production privés) ou des syndicats professionnels » (Galloux, 1993, 60) qui, lui, échappe aux
banques conventionnelles.
4.2.2. La finance islamique socialisante en Syrie, au Liban et en Irak

21 Mustafa al-Siba‟i,Ishtiräkiyat al-islam, Mu’assassat al-matbü’at al-’arabiya(Damas, 1960 (...)
43Dans le Levant syro-libanais et en Irak, le système financier semble plus fraternel(ikhwani) que
dans les pays cités plus haut. L‟islam de cette région est davantage centré sur la communauté
d‟appartenance, la solidarité et la propriété collective. Selon Mustafa al-Siba‟i, l‟approche de
l‟économie et de la finance islamiques doit être davantage socialisante et viser à « l‟élimination de
la pauvreté dans la société [mahw al-faqr min al-mugtamâ] »21. « C‟est un socialisme populiste
analogue à ce que „Abd al-Nâsir nomme le “socialisme arabe” » (Finianos, 2006, 67). En somme,
dans ces systèmes financiers islamiques communautarisés du Levant et de l‟Irak, les investisseurs
semblent vouloir tirer davantage une satisfaction religieuse que des profits immédiats de leurs
placements en capitaux. Ils cherchent surtout à plaire à Dieu et à leur communauté en utilisant
leurs capitaux pour le bien de tous.
4.2.3. La microfinance islamique

22 Le Groupe consultatif d‟assistance aux pauvres (CGAP, 2012) donne un exemple de fonctionnement de(...)

23 Site de la Banque islamique de développement,http://thatswhy.isdb.org(consulté le 13 septembre 2 (...)
44Pour pallier le manque d‟intérêt de la finance islamique envers les investissements dans des
petits projets qui améliorent l‟existence des plus démunis, certaines institutions de microfinance
islamique sont apparues dans des pays musulmans. Ellesoffrent des crédits de faible montant 22 à
des particuliers ou à de petites entreprises pour les aider à conduire des activités productives et
génératrices de revenus. La pratique de ces microcrédits est déjà très répandue dans des pays
comme l‟Indonésie, le Bangladesh et l‟Afghanistan (Wampfler, 2002). Elle commence à être connue
dans les pays du Moyen-Orient, au Maghreb et en Afrique de l‟Ouest. La BID, sous l‟égide de l‟OCI,
a récemment accéléré le mouvement du microcrédit en faveur des individus et des populations
pauvres afin de les aider à développer des projets, notamment de petites unités agricoles,
d‟approvisionnement en eau (irrigation et stockage), de dispensaires ou encore d‟écoles privées23.

24 Nous avons tous en tête les effets néfastes de la bulle spéculative immobilière à Dubaï, en novemb (...)
45Pourtant, et malgré les efforts louables de la BID, ni la finance ni le microcrédit islamiques n‟ont
jusqu‟à présent réussi à faire décoller les économies des pays musulmans. Il est nécessaire que
des groupes pluridisciplinaires d‟économistes, de juristes, de religieux et de politiciens se penchent
sur la réforme de ce système et mettent à contribution les fondations de biens wakf,dits
aussi habous (biens d‟utilité publique à caractère inaliénable). Une nouvelle réflexion, avec une
approche critique, est aujourd‟hui impérative pour « humaniser » la finance islamique, enplaçant
l‟être humain au cœur du processus, de même que pour toute activité
économique. La finance islamique ne présente pour le moment pas de vraie alternative à la
finance globale sécularisée. Pour le devenir, elle devrait sortir de sa course effrénée à la
maximisation des profits, actuellement menée au nom de l‟islam, s‟adapter pour devenir accessible
aux petits projets lancés par les déshérités, et atténuer son penchant quasi spéculatif dans le
domaine immobilier24.
5. Conclusion
46L‟emprise politique des Frères musulmans sur la société arabo-islamique ne cesse de croître.
Partout, leur stratégie d‟approche se fait simultanément sur les plans social, éducatif et politique.
47La nouvelle politique des Frères s‟appuie simultanément sur trois axes : le respect à l‟égard de
tous les groupes religieux et politiques des pays musulmans ; la lutte contre la corruption et
l‟amorce d‟une réforme économique et sociale ; et l‟action en vue d‟une renaissance (nahda) du
monde musulman sur la base des valeurs (qiyyam) qui sous-tendent la société et la religion (Akef,
2005a, 24).

25 Voir le site des Frères musulmans (en anglais),http://www.ikhwanweb.com(consulté le 13 septembre (...)
48Pour les Frères musulmans, les décisions stratégiques des gouvernements arabes d‟avant le
Printemps arabe et de ceux toujours en place sont essentiellement dictées par Washington 25. Ce
défi les contraint à adopter une nouvelle vision de la superpuissance, ce qui passe par des
discussions secrètes avec les Américains. Il a fallu convaincre Washington que parmi la kyrielle de
mouvements islamistes, les Frères musulmans étaient incontournables, étant donné leur poids
social et politique dans tout le monde islamique. Les Frères musulmans ont aussi changé leurs
méthodes de formation militante en s‟écartant des discours extrémistes d‟inspiration salafiste. Ils
ont adopté un comportement plus quiétiste et tolérant et paraissent déterminés à se débarrasser
de la « maladie infantile » de l‟islam, développée par le radicalisme destakfiris (excommunicateurs
de musulmans) et des dirigeants d‟Al-Qaida, auxquels ils reprochent « d‟avoir créé un état d‟esprit
et une ambiance de violence anti-occidentale », qui n‟a pas manqué de se retourner « contre les
musulmans, en Palestine et en Irak » (Al-Tourabi, 2006).
49Les Frères tentent, à leur manière, de s‟ouvrir et d‟accepter de participer au jeu démocratique,
en vue d‟intégrer leur mouvement aux institutions étatiques des pays sécularisés. L‟accusation de
mécréance (kufr) a ainsi disparu de leur vocabulaire. Selon la nouvelle doctrine, la conquête du
pouvoir par les Frères doit, comme l‟a dit Mohamed Mehdi Akef, se faire par étapes et sans
violence. A cet égard, les avancées de cette confrérie tant au Parlement égyptien qu‟avec le Hamas
en Palestine, avec le PJD au Maroc ou même avec Ennahda en Tunisie, en tant qu‟avatar des
Frères, s‟inscrivent dans cette logique inspirée par les partisans de la nouvelle théo-démocratie (ou
théocratie démocratique évoquée par Al-Mawdoudi).

26 On songe au cas préoccupant des immigrés du Pakistan, du Bangladesh, des Philippines venus travail (...)
50Malgré cette tentative d‟ouverture, les Frères musulmans créent des espaces communautaires
strictement démarqués des milieux laïques, chrétiens, juifs ou autres, ce qui conduit ce
mouvement et ses avatars vers une forme de sectarisme monoculturel. Ce constat est vrai dans le
monde musulman, mais aussi en Europe et en Asie. Sur le plan économique, leur système de
banques islamiques est discriminatoire envers les investisseurs non musulmans et a abouti à la
création d‟une caste d‟islamo-affairistes. Ces banquiers, comme les entrepreneurs « islamiques »,
semblent gérer leur relation de travail avec les employés sur un mode patriarcal et paternaliste. La
protection sociale et l‟éthique du travail sont aléatoires et ne respectent pas les normes
internationales du travail, notamment envers la main-d‟œuvre en provenance d‟Asie26.
51Enfin, par leur attitude, les Frères musulmans se rendent imperméables à un véritable dialogue
interreligieux, interculturel et même économique. Ainsi, ce n‟est qu‟au travers des urnes et par le
biais d‟un futur sursaut du Printemps arabe que les forces modernistes et les puissants ordres
mystiques soufis du monde arabe pourront contraindre les Frères musulmans à choisir une voie
nouvelle, dépouillée des contraintes strictes de la religion, tout en gardant leur identité, et ce dans
le respect des droits humains.
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septembre 2012).
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NOTES
1 Voir les déclarations de Rached Ghannouchi, le chef du parti islamiste tunisien Ennahda (Ghannouchi,
2012).
2 L‟histoire des Frères musulmans a été traitée dans Meriboute (2004, 87 et suiv.).
3 Voir le site de prosélytisme (en arabe) http://www.daawa-info.net/manhaj.php (consulté le 13
septembre 2012).
4 Point nº 2 du programme des Frères musulmans, sur le site cité plus haut.
5 Voir les recommandations du Congrès mondial de la jeunesse islamique tenu à Borsa, en Anatolie, le
11 août 2005, également consultables sur le site cité plus haut.
6 Voir aussi la revue du Institute of Contemporary Islamic Thought, Crescent International, et plus
particulièrement un article de son directeur, Zafar Bangash (2009), ainsi que le blog d‟Iqbal Siddiqui
(2012), qui reprend les idées de Kalim Siddiqui.
7 Au sujet de la présence des Frères musulmans sur Al-Jazeera (par exemple, le cheikh Al-Qaradaoui),
se référer à l‟enquête faite sur cette chaîne de télévision satellitaire arabe par Lahsen Oulhadj (2005).
8 La pensée d‟Ibn Taymiyya et des dirigeants islamistes qui l‟ont développée a été traitée en profondeur
dans Meriboute (2004).
9 Voir le texte d‟Ibn Taymiyya, « Siy’asa Shar’iyya », repris et commenté dans Laoust (1939).
10 Plus précisément, pour Al-Mawdoudi, la hakimiyya nécessite l‟édification d‟un Etat islamique divin.
Elle s‟oppose à tout ordre souverain, constitutionnel ou légal conçu en dehors du divin.
11 Sur la vie et l‟œuvre de M. Nahnah, voir Ayachi (1992, 206 et suiv.).
12 Les critiques de ce théoricien des Frères musulmans sont développées dans Al-Ghazali (1997).
13 Voir le site des Frères musulmans en Jordanie (en arabe), http://www.ikhwan-jor.com (consulté le
11 septembre 2012).
14 Hassan Houidi, numéro deux des Frères musulmans en Syrie, a longuement commenté l‟histoire de
ce mouvement dans une série d‟articles-interviews en arabe (Houidi, 2007).
15 Voir
les
informations
fournies
musulmans,http://www.ikhwanonline.com (en
sur
arabe)
les
sites
Internet
des
et http://www.ikhwanweb.com (en
Frères
anglais)
(consultés le 13 septembre 2012).
16 Voir à ce sujet le site Internet (en anglais) http://www.iraqi.com(consulté le 13 septembre 2012).
17 Voir l‟entretien de Mostafa al Khalfi, membre du PJD, avec O. Ben Elmostafa (Ben Elmostafa, 2007,
76-80).
18 La
liste
des
57
Etats
membres
de
l‟OCI
est
disponible
sur http://www.oic-
oci.org/member_states.asp (consulté le 13 septembre 2012).
19 Voir également le site Islamic Banking Information (en anglais),http://islamicbanking.info, et CGAP
(2012).
20 Voir le dossier complet sur la finance islamique en 2012 élaboré par le magazine marocain Finance
News Hebdo (Mellouck et Zeroual, 2012).
21 Mustafa al-Siba‟i, Ishtiräkiyat al-islam, Mu’assassat al-matbü’at al-’arabiya (Damas, 1960), p. 364,
cité et traduit de l‟arabe dans Finianos (2006, 64).
22 Le Groupe consultatif d‟assistance aux pauvres (CGAP, 2012) donne un exemple de fonctionnement
de la microfinance : « Un microentrepreneur d‟une institution de microfinance (IMF) veut acheter un
bien. Il approche une IMF islamique qui va acheter le bien à un prix P qui va être connu du client. L‟IMF
va revendre le bien au client à un prix P+M où M représentera le profit de la transaction. Le client va
rembourser ce prix en une seule fois ou par tranches dans le futur. »
23 Site de la Banque islamique de développement, http://thatswhy.isdb.org (consulté le 13 septembre
2012).
24 Nous avons tous en tête les effets néfastes de la bulle spéculative immobilière à Dubaï, en novembre
2009. Voir à cet égard l‟analyse intéressante de Guy Gweth (2009).
25 Voir le site des Frères musulmans (en anglais), http://www.ikhwanweb.com(consulté le 13
septembre 2012).
26 On songe au cas préoccupant des immigrés du Pakistan, du Bangladesh, des Philippines venus
travailler dans les pays du Golfe.
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REFERENCES
Electronic reference
Zidane MERIBOUTE, « « Printemps arabe » : le poids des Frères musulmans – leur vision de l‟Etat et de
la finance islamiques », International Development Policy | Revue internationale de politique de
développement [Online], 4.1 | 2013, Online since 21 March 2013, connection on 19 July 2015. URL :
http://poldev.revues.org/1322 ; DOI : 10.4000/poldev.1322
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ABOUT THE AUTHOR
Zidane MERIBOUTE
Chercheur au Centre for International Studies and Diplomacy (CISD) de la School of Oriental and African
Studies (SOAS) de l‟Université de Londres et consultant pour les organisations internationales,
notamment en ce qui concerne leurs relations avec les leaders religieux. Il est aussi l‟auteur d‟Islamisme,
soufisme, évangélisme : la guerre ou la paix (Genève : Editions Labor et Fides, 2010) et de Une nouvelle
« Vie » du prophète Muhammad (Paris : Encre d‟Orient, 2012).