BILAN KARL VALENTIN
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BILAN KARL VALENTIN
BILAN KARL VALENTIN « Kunst ist schön, macht aber viel Arbeit. » LA PERSONNE - Karl Valentin (pseudonyme de Valentin Ludwig Fey), 1882-1948, originaire de Munich (mort à 66 ans) - formation de menuisier - personnage filiforme, corps extrêmement marqué : figure du clown - pas de prise de position politique : théâtre du quotidien mais il aura affaire au régime nazi qui le censurera pour « apologie du misérabilisme », le renouveau de l’Allemagne et la régénérescence de la race sont peu compatible avec la description d’une petite bourgeoisie terne - il est à la fois auteur, comédien, metteur en scène, créateur d’accessoires, réalisateur de films : « c’est un touche à tout d’un éclectisme débordant » - Karl Valentin ne sera pas reconnu comme réalisateur : il souhaitait par ses films explorer différemment cette esthétique du quotidien, il souhaitait aussi toucher un public plus large que celui des cabarets et des brasseries - on trouve des petites films muets dont on ignore l’utilisation, des sketches filmés et de vrais longs métrages LE PERSONNAGE - Karl Valentin s’est inspiré d’une bande dessinée de l’époque pour construite son personnage - figure du clown : maigreur, chaussure disproportionnées, nez long et pointu - utilisation d’accessoire qui soulignent sa minceur (mètre, parapluie, épée…) > comique du maigre qui se bat contre des objets filiformes - contrairement à certains comiques de l’époque (Charlot, Laurel et Hardy, Marx Brothers…) il ne se cantonne pas dans un type déterminé - « Il est impossible de comprendre pourquoi on ne mettrait pas Karl Valentin sur le même plan que Charlot. » Brecht - confusion entre la personne et le personnage - Karl Valentin est le héros de ses propres sketches FORME THEATRALE - « cabarets enfumés de Munich » - mais aussi les brasseries où on présentait des spectacles (rappel historique : Hitler a commencé son action politique dans une brasserie de Munich !) - pas de pièce conventionnelle : plusieurs sketches (définition du sketch par Le Robert : Courte scène, généralement comique et rapide, parfois improvisée, interprétée par un nombre restreint d'acteurs.) - le jeu prime : l’écriture est sans cesse renouvelée à partir de l’expérience de la scène - écriture d’un comédien : l’écriture chez Karl Valentin n’est pas dissociable du jeu - réécriture permanente émanant des différents passages sur scène : soucis d’efficacité scénique - réécriture avec une grande minutie dans le choix des mots et des effets comiques - il existe plusieurs versions pour certains sketches - en conséquence il fallut une génération pour que le souvenir de l’acteur s’efface et qu’on reprenne Karl Valentin en tant qu’auteur KARL ET LIESL - Liesl Karlstadt (de son vrai nom Elisabeth Wellano) > compagne de vie et sur scène - présence forte du personnage de Liesl Karlstadt dans les sketches - « Le grand maigre et la petite boulotte » - Don Quichotte et Sancho Pansa (cf. figure comique de Laurel et Hardy) - Liesl n’est ni le double, ni le faire-valoir de Karl : elle est la promesse de la contagion DU BURLESQUE AU NON-SENS - pas de conscience politique ou morale dans les textes de Karl Valentin : il ne juge rien, tout est burlesque - personnages excessifs, beaucoup de parole mais une parole asociale - les personnages se perdent dans d’interminables explications : ils sont décalés et désaccordés - l’acte s’évanouit dans la somme des préparatifs - Karl Valentin est un virtuose de la complication, destructeur de logique - le langage n’est plus utilisé comme un moyen de communication - absurde des situations, du langage qui émane d’un non-sens et nous fait réfléchir sur les codes sociaux, les conventions qui structurent notre vie quotidienne LE CLOWN DU QUOTIDIEN - Karl Valentin prend appui sur le public munichois qui vient le voir - on peut parler d’un certain naturalisme quand il décrit cette société : une petite bourgeoisie jusqu’alors peu représentée au théâtre - mais aussi quand il décrit les petites habitudes humaines - on notera la présence d’objets du quotidien à la fois dans son jeu mais aussi dans les différentes mises en scène (cf. affiches) - on peut parler de Karl Valentin comme d’un clown satirique : il se moque du public qui rit de lui-même - par son humour il déjoue la rigidité du théâtre à travers des situations grotesques KARL VALENTIN ET DANIIL HARMS - Harms, auteur russe sous l’ère soviétique, 1905-1942 (mort à 36 ans) - le monde de Harms est imprévisible et désordonné (alors que le monde de Karl Valentin est plus ancré dans le réel) - les personnages de Harms, comme ceux de Karl Valentin, répétent sans fin les mêmes actions ou se comportant de façon irrationnelle - chez Harms, des histoires linéaires commençant à se développer étant brutalement interrompues par des incidents qui les font rebondir dans des directions totalement inattendues ; on retrouve un peu cela aussi chez Karl Valentin même si l’action a plus tendance à se diluer - le travail de Harms est plus profond qu'il n'y paraît et doit être replacé dans le contexte de l'Obériou (Union de l'unique Art réel), un courant littéraire et philosophique du modernisme russe dont il a été l'un des fondateurs - tous les deux ont été mal reçus par des régimes autoritaires qui ont vu en ces artistes des opposants : Harms fut accusé d’activités anti-soviétiques, exilé, arrêté une seconde fois et enfin interné dans un asile psychiatrique où il mourut