L`appréciation renouvelé du critère organique en matière de

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L`appréciation renouvelé du critère organique en matière de
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L'appréciation renouvelé du critère
organique en matière de qualification des
contrats administratifs (CE, 21/03/2007,
Commune de Boulogne-Billancourt)
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Table des matières
Table des matières .................................................................................................................................. 2
Introduction............................................................................................................................................. 3
I – Une appréciation renouvelée du critère organique ........................................................................... 4
A – Une personne publique est partie au contrat ............................................................................... 4
1 – Deux personnes publiques sont parties au contrat ................................................................... 4
2 - Une personne publique est partie au contrat ............................................................................ 4
B – Aucune personne publique n’est partie au contrat ...................................................................... 5
1 – L’action « pour le compte de » .................................................................................................. 5
2 – La théorie de la personne privée transparente ......................................................................... 5
II – Les critères alternatifs ....................................................................................................................... 6
A – Les éléments exorbitants du contrat ............................................................................................ 6
1 – Les clauses exorbitantes du droit commun ............................................................................... 6
2 – Le régime exorbitant du droit commun .................................................................................... 6
B – La participation à l’exécution du service public ............................................................................ 7
1 - Définition .................................................................................................................................... 7
2 – La solution du 21mars 2007 ...................................................................................................... 7
CE, 21/03/2007, Commune de Boulogne-Billancourt ............................................................................. 8
L'appréciation renouvelée du critère organique
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Introduction
Dans son action, l’Administration utilise deux types de procédés : l’acte unilatéral et le
contrat. Le premier lui permet de prendre des mesures sans le consentement d’autrui, autrement dit
la volonté de l’Administration s’impose aux tiers. Dans le cas du contrat, en revanche, il y a accord de
volontés. Cependant, tous les contrats passés par l’Administration ne sont pas des contrats
administratifs. Il importe, dès lors, d’analyser la nature du contrat pour déterminer le droit applicable
et le juge compétent. C’est ce type de problème qui oppose la société Mayday et la commune de
Boulogne-Billancourt.
Cette dernière a créé une association pour la gestion de la patinoire et de la piscine de la
ville. Cette association conclue le 10 août 1989 un contrat avec la société Mayday dont l’objet est le
contrôle et la sécurité de la patinoire. Le 28 juillet 1996, l’association est mise en règlement
judiciaire. La société demande alors à la commune le paiement des prestations impayés par
l’association. Ne trouvant pas d’accord, la société saisit le tribunal administratif de Paris qui, le 9 avril
2002, condamne la commune à verser les sommes demandées à la société. La commune de
Boulogne-Billancourt fait appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Paris qui, le
20 avril 2005, confirme le jugement rendu en premier ressort. Un pourvoi en cassation est intenté
par la commune. Pour statuer sur le montant du par la commune à la société, encore faut-il
déterminer la nature du contrat pour savoir si le juge est compétent pour juger cette affaire. En
l’espèce, le Conseil d’Etat considère qu’il s’agit d’un contrat administratif et fait droit à la demande
de la société le 21 mars 2007.
La qualification d’un contrat est parfois simple du fait que le législateur détermine si le
contrat est administratif ou privé, on parle, alors, de contrats administratifs en vertu de la loi. Mais,
le plus souvent, cette qualification législative n’existe pas. Il faut donc se tourner vers .les critères
dégagés par la jurisprudence. Le premier critère exige qu’une personne publique soit partie au
contrat. En l’espèce, aucune personne publique n’est partie au contrat. Mais, le juge admet parfois
l’administrativité d’un contrat conclu entre deux personnes privées à partir du moment ou l’une des
personnes privées a agit pour le compte de la commune. L’affaire qui nous est présenté offre une
hypothèse proche de celle-ci. Il s’agit des contrats passés par une personne privée transparente.
Dans cette affaire, l’association est créé et contrôlé directement par la ville. Le juge considère, alors,
qu’elle en est l’un des services. Le critère organique est donc satisfait de cette façon là. Une personne
publique étant indirectement partie au contrat il convient, alors, de se demander si l’un des critères
alternatifs est remplis. En effet, pour être administratif, le contrat doit, de plus, faire participer le cocontractant à l’exécution même du service public, contenir des clauses exorbitantes du droit
commun, ou être soumis à un régime exorbitant du droit commun. En l’espèce, il s’agit de la
surveillance de la patinoire et de la piscine. Il ne fait aucun doute que le contrat fait participer la
société Mayday à la mission de service public
Il est, ainsi, possible d’étudier, dans une première partie, le critère organique (I), et
d’analyser, dans une seconde partie, les trois principaux critères alternatifs (II).
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I – Une appréciation renouvelée
du critère organique
Ce contrat est passé entre deux personnes privées. C’est, alors l’occasion de s’interroger plus
généralement sur l’appréciation du critère organique. Soit, une personne publique est partie au
contrat (A), soit aucune personne publique n’est signataire du contrat, mais un lien spécial unie une
des personnes privées à une personne publique (B). C’est l’hypothèse présente en l’espèce.
A – Une personne publique est partie au contrat
Deux situations peuvent se présenter : un contrat peut être conclu entre deux personnes
publiques (1), ou être passé entre une personne publique et une personne privée (2).
1 – Deux personnes publiques sont parties au contrat
La première situation concerne les contrats conclus entre deux personnes publiques.
Jusqu’en 1983, ces contrats étaient régis par les mêmes règles que celles s’appliquant aux contrats
entre une personne publique et une personne privée. L’un des critères alternatifs devait être rempli.
Depuis cette date, ces contrats bénéficient d’une présomption d’administrativité (TC, 21/03/1983,
Union des Assurances de Paris). Cette présomption peut, cependant, être renversée lorsque le
contrat fait naître entre les parties des rapports qui ne sont pas différents de ceux existant entre
deux personnes privées. C’est le cas, par exemple, des contrats d’abonnement à l’électricité signés
entre les communes et Electricité de France : ces contrats, en effet, ne font pas naître des rapports
différents de ceux existant entre ce service public industriel et commercial et ses usagers privés (par
exemple, une grande entreprise).
Qu’en est-il lorsque une seule personne publique est partie au contrat ?
2 - Une personne publique est partie au contrat
Cette hypothèse est la plus répandue. La personne publique peut avoir signé elle-même le
contrat, ou s’être fait représentée. C’est l’hypothèse du mandat : la personne publique délègue à un
mandataire le soin de signer le contrat à sa place (C.E., sect., 2/06/1961, Leduc). Dans cette
hypothèse, le contrat est matériellement signé par une autre personne, mais juridiquement c’est la
personne publique qui est considérée comme partie au contrat. C’est exactement la même chose
que lorsqu’une personne donne mandat à une autre pour aller voter à sa place en cas
d’empêchement. Cette hypothèse de l’action « au nom de » doit, cependant, être bien distinguée de
l’action « pour le compte de » dans le cas de contrats conclus entre deux personnes privés.
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B – Aucune personne publique n’est partie au contrat
L’hypothèse la plus classique est celle ou une personne privée a agit pour le compte d’une
autre personne publique (1). Le présent arrêt développe la théorie de la personne privée
transparente (2).
1 – L’action « pour le compte de »
Les contrats entre deux personnes privées sont normalement de droit privé, mais la
jurisprudence admet que, lorsque l’une des personnes privées a agit « pour le compte » d’une
personne publique, le contrat est administratif. Il faut bien sûr en plus que l’un des critères
alternatifs soit remplis. Cette solution s’explique par le fait que la personne publique est
indirectement présente par le biais de la personne privée. Cette dernière ne fait que servir
d’intermédiaire. L’action de la personne privée se fait au profit de la personne publique. De fait, le
critère organique est indirectement rempli.
Consacrée a propos d’un contrat portant sur des travaux autoroutiers (TC, 8/07/1963,
Société Entreprise Peyrot), cette jurisprudence fut, par la suite, appliquée à de multiples hypothèses.
Ce qui caractérise la jurisprudence Société Entreprise Peyrot est le fait que, lorsque le contrat porte
sur la construction des routes et des autoroutes, le contrat est toujours considéré comme conclu
« pour le compte » d’une personne publique, car ce domaine appartient, par nature, à l’Etat. En
revanche, dans les autres hypothèses, il y a lieu de rechercher concrètement en quoi l’une des deux
personnes privées a agit « pour le compte » d’une personne publique.
Dans cette affaire, il s’agit d’une autre hypothèse.
2 – La théorie de la personne privée transparente
Son fondement est simple : lorsqu’une personne privée est créée à l’initiative d’une
personne publique et que cette dernière en contrôle l’organisation et le fonctionnement, tout en lui
procurant l’essentiel de ces ressources, la personne privée doit être regardée comme transparente.
En d’autres termes, tout indique que la personne privée fonctionne comme n’importe quel service
interne de la personne publique. C’est donc cette dernière qui est réputée avoir signé le contrat.
Cette solution doit être rapprochée de celle rendu en section le 6 avril 2007 dans l’affaire
Commune d’Aix-en-Provence. Dans cette affaire, le Conseil d’Etat juge que les personnes publiques
doivent être regardées comme gérant le service public si elles créent à cette fin un organisme dont
l’objet statutaire exclusif st de gérer ce service et si elles exercent sur cet organisme un contrôle
comparable à celui qu’elles exercent sur leur propre service.
En l’espèce, l’association n’a aucune autonomie par rapport à la commune de BoulogneBillancourt. Cette dernière exerce un contrôle strict sur ses modalités d’organisation et de
fonctionnement. Elle lui procure, de plus, l’essentiel de ses ressources. Il s’agit donc d’une personne
privée transparente. Une personne publique est donc indirectement partie au contrat.
Encore faut-il que l’un des critères alternatifs soit rempli.
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II – Les critères alternatifs
Pour parfaire la qualification des contrats, il faut se demander si l’un des critères alternatifs
est remplie. C’est, alors, l’occasion de revenir sur les critères relatifs aux éléments exorbitants du
contrat (A), puis d’en venir à celui relatif à la délégation de service public (B).
A – Les éléments exorbitants du contrat
Il peut s’agir de clauses (1), ou plus généralement du régime particulier s’appliquant au
contrat (2).
1 – Les clauses exorbitantes du droit commun
C’est par un arrêt célèbre que le Conseil d’Etat érige la clause exorbitante au rand de critère
contrat administratif (CE, 31/07/1912, Société des granits porphyroïdes des Vosges). La clause
exorbitante du droit commun se différencie du régime exorbitant du droit commun en ce qu’il s’agit
de dispositions contenues dans le contrat et non hors du contrat. Elle peut se définir comme la
« clause ayant pour objet de conférer aux parties des droits ou de mettre à leur charge des
obligations étrangers par leur nature à ceux qui sont susceptibles d’être librement consentis par
quiconque dans le cadre des lois civiles et commerciales » (C.E., sect., 20/10/1950, Sieur Stein). Au
terme des analyses du professeur Chapus, il faut, cependant, considérer qu’à côté des ces clauses qui
ne se retrouvent pas dans les relations de droit privé, existent des clauses simplement inégalitaires
qui confèrent « à la personne publique, une position de supériorité par rapport au cocontractant » :
par exemple, la clause qui prévoit le contrôle par un syndicat intercommunal du personnel et des
tarifs d’un restaurant, ou encore celle qui prévoit l’obligation pour ce dernier de lui communiquer ses
résultats financiers, … Il faut, enfin, préciser que ce principe ne s’applique pas s’agissant des contrats
conclus entre les S.P.I.C. et leurs usagers.
2 – Le régime exorbitant du droit commun
Que faut-il entendre par régime exorbitant du droit commun ? De façon simple, il s’agit d’un
régime auquel les contrats de droit privé ne sont pas soumis. La jurisprudence admet, en effet, qu’un
contrat soumis à un régime exorbitant est un contrat administratif (C.E., sect., 19/01/1973, Société
d’exploitation électrique de la rivière du Sant). Ce critère se différencie de celui des clauses
exorbitantes du droit commun par le fait qu’il s’agit de dispositions contenues dans les textes
régissant le contrat, les lois ou les règlements, par exemple, alors que les clauses sont des
dispositions de nature contractuelle.
Venons-en, à présent, à la participation à l’exécution d’une mission de service public.
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B – La participation à l’exécution du service public
Il faut d’abord s’attacher à définir ce qu’il faut entendre par participation à l’exécution
d’une mission de service public (1), puis en venir à l’arrêt étudié (2).
1 - Définition
C’est en 1956 que le Conseil d’Etat érige au rand de critère du contrat administratif la
participation à l’exécution même du service public (C.E., sect., 20/04/1956, Epx. Bertin). Il peut s’agir
d’un SPA (service public administratif) ou d’un SPIC. Cette participation doit être réelle, directe et
immédiate. Par le contrat, la personne publique doit déléguer tout ou partie de l’exécution du
service public. Cela ne sera pas le cas d’un contrat portant sur la fourniture de trombones. Dans cette
hypothèse, la personne privée n’apporte aucune contribution réelle eu service public. Celui-ci reste à
la charge de la personne publique. Le lien entre le contrat et le service public doit donc être
suffisamment étroit. Ce critère laisse, ainsi, au juge administratif une certaine liberté d’appréciation.
Plusieurs hypothèses doivent maintenant être relevées.
La première hypothèse concerne les contrats d’engagements des personnels employés dans les SPA
gérés par une personne publique. Par le passé, la jurisprudence appliquait le critère vu
précédemment. N’étaient qualifiés d’administratifs que les contrats ayant pour objet de faire
participer le cocontractant à l’exécution même du service public (C.E., sect., 4/06/1954, Vingtain et
Affortit). En raison de ses difficultés d’application, ce critère fut abandonné au profit d’une position
de principe en vertu de laquelle les contrats d’engagements des personnels employés dans les S.P.A.,
gérés par une personne publique, sont toujours des contrats administratifs (T.C., 25/03/1996,
Berkani c/ C.R.O.U.S. de Lyon-Saint-Etienne).
C’est la même solution qu’a retenu le Conseil d’Etat au sujet des contrats conclus par une
personne publique gestionnaire d’un S.P.A. et ses usagers. Ces contrats sont toujours des contrats
administratifs, car ils constituent une modalité de l’exécution même du service public (C.E., sect.,
20/04/1956, Cons. Grimouard).
Par ces deux derniers arrêts, le juge a posé une véritable présomption irréfragable
d’administrativité, alors qu’en matière de délégation, il faut déterminer au cas par cas si le critère est
rempli.
2 – La solution du 21mars 2007
Dans cette affaire, il fait pas de doute que le contrat conclu entre l’association et la société
Mayday fait participer cette dernière à l’exécution d’une mission de service public. En effet, le
contrat a pour objet le contrôle et la sécurité de la patinoire de Boulogne-Billancourt. Le lien entre le
service public et l’objet du contrat est donc très étroit.
Il y a donc participation à l’exécution d’une mission de service public. Le contrat est donc
administratif et le juge administratif est compétent. Le Conseil d’Etat peut, alors, procéder à la
détermination du montant de l’indemnité due par la commune.
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CE, 21/03/2007, Commune de
Boulogne-Billancourt
Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 22 juin et 24 octobre 2005
et 16 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE
BOULOGNE-BILLANCOURT, représentée par son maire ; la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT
demande
au
Conseil
d'Etat
:
1°) d'annuler l'arrêt du 20 avril 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa
requête tendant à l'annulation du jugement du 9 avril 2002 par lequel le tribunal administratif de
Paris l'a condamnée à verser à la Société Mayday Sécurité une somme de 244 057 francs (37 206,35
euros), avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 1996, en règlement de factures non
payées par l'association pour la gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt ;
2°) de mettre à la charge de la Société Mayday Sécurité le versement de la somme de 3 500 euros au
titre
de
l'article
L.
761-1
du
code
de
justice
administrative
;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association pour la
gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt a confié à la société Mayday Sécurité,
par un contrat conclu le 10 août 1989, une mission de contrôle et de sécurité pour la patinoire de
Boulogne-Billancourt ; qu'à la suite de la mise en règlement judiciaire de l'association le 28 juillet
1996, la société Mayday Sécurité a demandé à la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT le
paiement de prestations impayées par l'association pour un montant de 244 057 francs (37 206
euros) ; que, par un jugement en date du 9 avril 2002, le tribunal administratif de Paris a condamné
la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT à verser la somme demandée à la société Mayday
Sécurité ; que la cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt en date du 20 avril 2005, a rejeté
l'appel formé contre ce jugement par la commune ; que cette dernière se pourvoit en cassation
contre
cet
arrêt
;
Sur l'arrêt de la cour en tant qu'il statue sur la qualification du contrat conclu entre l'association pour
la gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt et la société Mayday Sécurité :
Considérant que lorsqu'une personne privée est créée à l'initiative d'une personne publique qui en
contrôle l'organisation et le fonctionnement et qui lui procure l'essentiel de ses ressources, cette
personne privée doit être regardée comme transparente et les contrats qu'elle conclut pour
l'exécution de la mission de service public qui lui est confiée sont des contrats administratifs ; que,
pour qualifier le contrat conclu le 10 août 1989 entre l'association pour la gestion de la patinoire et
de la piscine de Boulogne-Billancourt et la société Mayday Sécurité de contrat administratif, la cour
administrative d'appel de Paris a, par une appréciation souveraine qui n'est pas susceptible, sauf
dénaturation non soulevée en l'espèce, d'être contestée devant le juge de cassation, et sans
commettre d'erreur de droit, jugé que les circonstances de la création de l'association, les modalités
de son organisation et de son fonctionnement , l'origine de ses ressources ainsi que le contrôle
exercé sur elle par la commune conduisaient à la regarder comme un service de cette dernière; que
sur le fondement de ces constations souveraines, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit et
par une décision suffisamment motivée dès lors qu'elle n'avait pas à répondre à tous les arguments
de la commune, juger que le contrat conclu par l'association avec la société Mayday Sécurité pour
assurer la sécurité de la patinoire de la ville de Boulogne-Billancourt avait un caractère administratif ;
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Considérant que dès lors que la cour a jugé que l'association pour la gestion de la patinoire et de la
piscine de Boulogne-Billancourt devait être regardée comme un service de la COMMUNE DE
BOULOGNE-BILLANCOURT, elle n'a pas commis d'erreur de droit en qualifiant le contrat conclu avec
la société Mayday Sécurité, eu égard à son objet, de marché public de services ;
Sur l'arrêt de la cour en tant qu'il statue sur les fondements de la responsabilité de la COMMUNE DE
BOULOGNE-BILLANCOURT
:
Considérant que le cocontractant de l'administration dont le contrat est entaché de nullité est fondé
à réclamer le remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers
laquelle il s'était engagé ; que, dans le cas où la nullité du contrat résulte d'une faute de
l'administration, il peut en outre prétendre à la réparation du dommage imputable à cette faute et le
cas échéant, demander à ce titre, le paiement du bénéfice dont il a été privé par la nullité du contrat
si toutefois le remboursement de ses dépenses utiles ne lui assure pas une rémunération supérieure
à celle que l'exécution du contrat lui aurait procurée ; que, par ailleurs, lorsque le juge, saisi d'un
litige engagé sur le terrain de la responsabilité contractuelle, est conduit à constater, le cas échéant
d'office, la nullité du contrat, les cocontractants peuvent poursuivre le litige qui les oppose en
invoquant, y compris pour la première fois en appel, des moyens tirés de l'enrichissement sans cause
que l'application du contrat frappé de nullité a apporté à l'un d'eux ou de la faute consistant, pour
l'un d'eux, à avoir passé un contrat nul, bien que ces moyens, qui ne sont pas d'ordre public,
reposent
sur
des
causes
juridiques
nouvelles
;
Considérant qu'après avoir constaté la nullité du contrat conclu le 10 août 1989 entre l'association
pour la gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt et la société Mayday Sécurité,
la cour a jugé que la société était en droit d'obtenir de la commune le remboursement des dépenses
utilement exposées à son profit ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la commune, la cour a
limité le droit à indemnisation de la société aux seules dépenses utiles ; qu'elle n'a dès lors pas
commis d'erreur de droit dans l'application des règles de l'indemnisation sur le fondement de
l'enrichissement
sans
cause
;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si devant le tribunal
administratif de Paris, la société Mayday Sécurité avait fondé sa demande d'indemnisation sur le
contrat du 10 août 1989, devant la cour, elle a invoqué, ainsi qu'elle était recevable à le faire du fait
de la nullité du contrat, à la fois le moyen tiré de l'enrichissement sans cause et celui tiré de la faute
commise par l'association pour la gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt à
avoir conclu un contrat nul ; qu'ainsi, en statuant sur la demande de la société Mayday Sécurité sur le
terrain de l'enrichissement sans cause mais aussi sur celui de la responsabilité quasi-délictuelle de la
commune, la cour n'a pas statué au delà des conclusions dont elle était saisie ;
Sur l'arrêt de la cour en tant qu'il statue sur le préjudice de la société Mayday Sécurité :
Sans
qu'il
soit
besoin
d'examiner
les
autres
moyens
de
la
requête
;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que pour demander la
condamnation de la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT à lui payer les prestations d'un maître
chien intervenu pour le gardiennage de la patinoire au cours des mois d'avril, mai et juin 1996, la
société Mayday Sécurité s'est bornée à produire un courrier qu'elle avait adressé à l'association pour
la gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt le 6 décembre 1993 lui proposant
ce service supplémentaire sans fournir aucun élément justifiant de l'accord de cette dernière ;
qu'ainsi en jugeant que ces prestations avaient été réalisées, avec l'assentiment de l'association, par
la société Mayday Sécurité, la cour a dénaturé les pièces du dossier ; que par suite, la COMMUNE DE
BOULOGNE-BILLANCOURT est fondée à contester l'intégralité du montant de la condamnation mise à
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sa charge par la cour et à demander, en conséquence, l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il
statue
sur
le
montant
du
préjudice
de
la
société
Mayday
Sécurité
;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il
prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort
peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans
les circonstances de l'espèce, il y a lieu, dans la mesure de l'annulation prononcée, de régler l'affaire
au
fond
;
Sur
l'évaluation
du
préjudice
subi
par
la
société
Mayday
Sécurité
:
Considérant qu'eu égard à la nullité du contrat conclu le 10 août 1989 et à la faute de l'association
pour la gestion de la patinoire et de la piscine de Boulogne-Billancourt à l'origine de cette nullité, la
société Mayday Sécurité est en droit d'obtenir le remboursement des dépenses utiles qu'elle a
exposées ainsi que le paiement du bénéfice dont elle a été privée ;
Considérant d'une part, que la société Mayday Sécurité demande le remboursement des prestations
de sécurité assurées au cours des mois d'avril à août 1996 à la patinoire de Boulogne-Billancourt ;
que, contrairement à ce que soutient la commune, il résulte de l'instruction, et notamment d'une
attestation du président de l'association pour la gestion de la patinoire et de la piscine de BoulogneBillancourt en date du 24 avril 1997, que la société Mayday Sécurité a bien assuré les prestations de
sécurité qui lui étaient confiées depuis le 1er septembre 1989 ; qu'elle a ainsi droit au
remboursement de ces dépenses utiles ainsi que du bénéfice dont elle a été privé, soit la somme non
contestée
de
18
293,88
euros
hors
taxe
;
Considérant d'autre part, que la société Mayday Sécurité demande aussi le paiement de prestations
supplémentaires réalisées au cours de l'année 1996 ; que toutefois, si elle produit des factures
portant sur l'intervention d'un maître chien au cours des mois d'avril à juin 1996 et sur des services
de télésurveillance assurés en 1996, elle n'établit pas que ces prestations auraient été effectuées à la
demande de l'association ou aurait été indispensables notamment pour des motifs de sécurité ;
qu'ainsi, elle ne peut demander d'indemnisation du fait de leur exécution ; qu'en revanche, elle
produit une lettre de l'association lui demandant des prestations complémentaires pendant les
vacances scolaires ; qu'elle a ainsi droit au remboursement des dépenses utiles afférentes à ces
prestations réalisées en 1996 ainsi qu'au paiement du bénéfice dont elle a été privée à raison de la
nullité
du
contrat,
soit
la
somme
de
4
970,79
euros
hors
taxe
;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'indemnisation accordée à la société Mayday
Sécurité par le jugement attaqué du tribunal administratif de Paris doit être ramenée à la somme de
23
264,67
euros
hors
taxe
;
Sur
la
taxe
sur
la
valeur
ajoutée
:
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : I. Sont soumises à la taxe sur
la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par
un assujetti agissant en tant que tel ; qu'en vertu de ces dispositions, la TVA doit être établie sur
l'ensemble des sommes facturées à un client pour prix d'une livraison ou d'une prestation effectuée
par une entreprise assujettie ; que la circonstance que, lorsque la livraison ou la prestation de service
a été faite à une collectivité publique en application d'un contrat déclaré ensuite entaché de nullité,
ce prix ne peut excéder le montant des dépenses supportées par l'entreprise et qui ont été utiles à la
personne publique est sans incidence sur l'applicabilité de la TVA aux sommes ainsi facturées ; qu'il
en va également ainsi dans le cas où, par suite d'un litige entre le fournisseur et la personne
publique, les sommes dues par cette dernière en rémunération du service ou du bien obtenu
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prennent la forme d'une indemnité fixée par un tribunal ; que, dès lors, la COMMUNE DE
BOULOGNE-BILLANCOURT n'est pas fondée à soutenir que la condamnation mise à sa charge doit
être
calculée
hors
taxe
;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT est
seulement fondée à demander à ce que la condamnation mise à sa charge par le jugement attaqué
du tribunal administratif de Paris soit ramenée à la somme de 28 057,19 euros toutes taxes
comprises
;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative
:
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des
dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la
société Mayday Sécurité et de la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT les sommes qu'elles
demandent
sur
le
fondement
de
ces
dispositions
;
D
E
C
I
D
E
:
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 20 avril 2005 est annulé en
tant qu'il a statué sur le montant de l'indemnité mise à la charge de la COMMUNE DE BOULOGNEBILLANCOURT.
Article 2 : La somme que la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT a été condamnée à verser à la
société Mayday Sécurité par le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 9 avril 2002 est
ramenée
à
la
somme
de
28
057,19
euros
toutes
taxes
comprises.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 9 avril 2002 est réformé en ce
qu'il
a
de
contraire
à
la
présente
décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT et de la société
Mayday
Sécurité
est
rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT et à la
société Mayday Sécurité.
L'appréciation renouvelée du critère organique
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