LE CONTROLE MEDICAL DES DOSSIERS D`ATMP
Transcription
LE CONTROLE MEDICAL DES DOSSIERS D`ATMP
Caisse Nationale de Prévoyance Sociale CYCLE DES CADRES SUPERIEURS DE SECURITE SOCIALE IM2S-CIFOCSS/EN3S RAPPORT DE STAGE PRESENTE PAR : RESPONSABLE DE STAGE : ESSIS FELIX AGNERO CHANTAL POLLIANI RESPONSABLE DU SECTEUR PRESTATIONS EN ESPECES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES CPAM PUY-DE-DOME IM2S-CIFOCSS/EN3S 14ème promotion des cadres supérieurs de sécurité sociale 2012-2013 Caisse Nationale de Prévoyance Sociale RAPPORT DE STAGE AUTEUR : Essis Félix AGNERO "Conformément à la décision du Directeur de la CPAM du Puy-de-Dôme, le présent rapport peut faire l’objet d’une diffusion ou d’une publication extérieure" "Les opinions exprimées dans cette étude n’engagent que leur auteur" Fait à Clermont-Ferrand, le 27 Novembre 2013 REMERCIEMENTS « Nul n’est en mesure, si robuste soit-il, de tendre seul une peau sur un tambour : c’est avec le concours de l’alêne que l’on parvient à réaliser ce travail patient et délicat »1. Ainsi, si j’assume à titre personnel la conception et la réalisation de ce rapport, je ne saurais ignorer les nombreuses contributions qui ont guidé mes pas et sans l’apport desquelles la confection de ce document n’aurait été qu’hypothétique. C’est pourquoi je tiens à remercier : M. Christian FABRE- Directeur CPAM Puy-de-Dôme M. Arnaud TISSOT – Directeur adjoint, Directeur des prestations M. Lassad Ben KHALIFA – Sous-Directeur des Ressources Humaines Mme Chantal POLLIANI–Responsable du secteur prestations en espèces accidents du travail et maladies professionnelles CPAM Puy-de-Dôme Dr LAUBIGNAT– Médecin-chef conseil de l’échelon local du service médical du Puy-de-Dôme M. Xavier Jocteur MONTROSIER – Manager de secteur Gestion du risque CPAM Mme Mireille MORNAND–Gestionnaire de production ELSM Puy-de-Dôme Mme Dominique MALFAND- Responsable du service Tarification de la Carsat d’Auvergne Mme Anne-Sylvie CUOCQ – Responsable du service juridique CPAM Mme Françoise SABY–Responsable adjointe service AT/MP CPAM Mme Laure Bodin BATTUT – Responsable du service de lutte contre les Fraudes CPAM 1 Mme Sylvia CARDENAS- Technicienne AT CPAM Niangoran BOUAH, introduction à la drummologie, IES, Abidjan, 1980, P 16 RESUME Les organismes de sécurité sociale évoluent aujourd’hui dans un environnement contraint marqué par la raréfaction des ressources et l’explosion des besoins. De plus, la pérennité financière de certaines branches semble être mise à rude épreuve par des pratiques frauduleuses ou abusives. Tel semble être le cas de la branche des AT/MP à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale de Côte d’Ivoire (CNPS), qui a défrayé récemment la chronique. En fait, la prise en charge médicale des victimes d’AT/MP, surtout au niveau des prestations en nature, représente pour l’Institution un risque majeur de payer plus qu’il n’en faut, en matière de remboursement de soins et de médicaments. A ce risque lié à des pratiques souvent intentionnelles des assurés sociaux, s’ajoute la problématique de la gestion des relations avec les professionnels de santé conventionnés par la CNPS, au regard du contrôle et de l’accompagnement de leur activité. La présente étude a eu pour ambition de relever et d’analyser les bonnes pratiques de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie et de l’échelon local du service médical du Puy-de-Dôme, relativement à cette problématique en vue d’en faire des pistes de réflexion pour la CNPS. L’analyse dont la teneur s’est articulée autour de la cartographie et de l’analyse des risques ainsi que des moyens permettant leur maîtrise a permis, par comparaison avec la CPAM, de faire plusieurs suggestions. En outre, elle a permis de mener une réflexion sur leurs conditions de faisabilité dans le contexte propre à la CNPS. Ces recommandations portent entre sur : La révision du conventionnement avec les professionnels de santé ; L’implication des professionnels de santé dans l’atteinte des objectifs de maîtrise médicalisée des dépenses de soins ; La mise en place d’un système d’alerte fiable ; Le renforcement de l’action contentieuse. Les conditions de mise en œuvre de ces recommandations portent sur : La mise en place d’une politique de gestion des risques à la Cnps ; L’intégration des prestations en nature dans le management de la qualité. Sommaire INTRODUCTION……………………………………………………………………………………………………………………………..2 PREMIERE PARTIE : LA GESTION DES AT/MP A LA CNPS : DESCRIPTION ET ANALYSE CRITIQUE……….4 1. DESCRIPTION : LA CENTRALITE DE LA DEMARCHE QUALITE DANS LA PRISE EN CHARGE DES PRESTATIONS EN ESPECES ..................................................................................................................4 1.1.Descriptif du processus de prise en charge administrative des AT/MP ................................4 1.2 Le rôle du contrôle médical et du médecin conseil ..............................................................5 2. ANALYSE CRITIQUE DE LA PRISE EN CHARGE DES AT/MP A LA CNPS ...................................5 2.1 La maitrise des risques de contrôle par le processus qualité .................................................6 2.2 Les risques inhérents aux prestations en nature peu maitrisés..............................................7 2.2.1 L’imprécision des textes organisant les relations avec les professionnels de santé .............7 2.2.2. La dépendance aux assurés quant à la détection des cas de fraude ...................................8 2.2.3. Les modalités peu explicites de règlement des conflits avec les professionnels de santé ...8 2.2.4. L’action peu visible de la CNPS relativement aux actions contentieuses ............................8 2.2.5. L’incomplète analyse statistique des bilans d’activité du contrôle médical ........................9 DEUXIEME PARTIE : LES PROPOSITIONS D’UNE MEILLEURE MAITRISE MEDICALISEE DES DEPENSES DE SOINS ET LES CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE…………………………………………………………………………15 1. PROPOSITIONS POUR UNE MEILLEURE MAITRISE MEDICALISEE DES DEPENSES………………….15 1.1. la revision du conventionnement avec les professionnels de santé ................................... 12 1.1.1 Les modalités du conventionnement .............................................................................. 12 1.1.2 Le suivi et l’évaluation des conventions .......................................................................... 13 1.1.3 La clarification de certaines dispositions conventionnelles ............................................. 14 1.2. L’implication des professionnels de santé dans l’atteinte des objectifs de maitrise médicalisée des dépenses de soins en AT/MP. .......................................................................... 15 1.3.La mise en place d’un système d’alerte fiable .................................................................... 16 1.4 Le renforcement de l’action contentieuse .......................................................................... 17 2. Les conditions de mise en œuvre des propositions...............................................................19 2.1. La mise en place d’une politique de gestion des risques à la Cnps ....................................... 19 2.2. Le nécessaire prolongement du management de la qualité à la gestion des prestations en nature au titre des AT/MP ......................................................................................................... 20 CONCLUSION……………………………………………………………………………………………………………………………………21 1 INTRODUCTION Le management des organismes de sécurité sociale fait de la rationalisation des charges, à la fois techniques et de fonctionnement, une priorité. Cette exigence est née de la nécessité qu’ils ont de garantir la viabilité et la pérennité financière de leurs différentes branches. En effet, dans le contexte actuel de difficultés financières, les paramètres susceptibles d’impacter positivement la recherche de l’équilibre et de la stabilité des branches sont à rechercher. C’est en cela que dans sa politique globale, la recherche de l’optimisation de ses recettes et de ses dépenses constitue un point d’ancrage fort de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (Cnps) de Côte d’Ivoire. C’est qu’elle est consciente que, dans un contexte économique contraint et fragile d’après-crise, une surveillance particulière des charges techniques en matière de retraite, de maternité, de prestations familiales et d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT/MP) s’impose. Mais l’atteinte de cet objectif, dans la branche des AT/MP, semble quelque fois mise à mal par l’action d’assurés sociaux en liaison avec des professionnels de santé partenaires de la Cnps, tendant à fragiliser le système par des pratiques frauduleuses. D’ailleurs, dans sa parution du 23 juillet 2013, le quotidien gouvernemental « Fraternité Matin » se faisait l’écho de ces pratiques en portant à sa une le titre suivant : « accidentés du travail, fraudes à outrance : la branche AT/MP de la CNPS est durement éprouvée par les faussaires ». Au demeurant, l’Etat de Côte d’Ivoire, à invité la Cnps à réduire les indus au titre des AT/MP à un taux 5%, et cela au travers du contrat-programme 2013-2015 < le liant l’Institution de prévoyance sociale. Cependant, la problématique de la lutte contre la fraude pose en filigrane la question essentielle des méthodes et des moyens. Comment la lutte doit-elle s’organiser ? Sur quelles bases managériales et organisationnelles peut-on envisager d’appuyer l’action du service du contrôle médical qui est à la pointe de ce combat à la Cnps ? C’est la raison pour laquelle la première ambition que nourrit la présente étude est de faire du benchmarking afin de comprendre les mécanismes de contrôle mis en place dans la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (Cpam) du Puy-de-Dôme, afin de 2 sécuriser les dépenses faites au titre des AT/MP, car la question de la fraude y est aussi une préoccupation. La seconde quant à elle consiste à identifier des solutions en vue de constituer des pistes de réflexion afin de trouver des approches en phase avec les réalités de la Caisse Nationales de Prévoyance Sociale. Pour ce faire, ce travail se base sur une démarche comparative et porte dans une première partie sur la problématique de la description et de l’analyse critique de la problématique du traitement des dossiers AT/MP à la Cnps et dans une seconde partie met en relief certaines propositions et leur modalités de mise en œuvre afin de garantir la maitrise médicalisée des dépenses de soins en AT/MP. 3 PREMIERE PARTIE : LA GESTION DES AT/MP A LA CNPS : DESCRIPTION ET ANALYSE CRITIQUE De façon générale, l’activité de prise en charge des AT/MP à la Cnps est marquée par la démarche qualité au niveau des prestations en espèces mais une analyse critique laisse entrevoir des points d’amélioration au niveau des prestations en nature. 1. DESCRIPTION : LA CENTRALITE DE LA DEMARCHE QUALITE DANS LA PRISE EN CHARGE DES PRESTATIONS EN ESPECES L’approche par processus se mesure ici à l’aune du descriptif du processus de prise en charge administrative des AT/MP et des attributions du contrôle médical. 1.1. Descriptif du processus de prise en charge administrative des AT/MP Le traitement d’un dossier d’AT/MP est organisé en processus et fait intervenir des acteurs différents. Les acteurs et leurs interactions se combinent pour assurer une prise en charge optimum du dossier d’AT/MP tel que le décrit le schéma décrit en annexe1. La description de la prise en charge médico-administrative du dossier d’AT/MP enseigne que c’est un : Processus interactif de contrôle qui fait intervenir différentes niveaux de contrôle de conformité, de la déclaration au paiement des indemnités journalières en passant par la création des droits. Processus formalisé qui impose à toutes les agences de traiter de la même façon les dossiers d’AT/MP afin de garantir la sincérité de la décision de prise en charge des prestations en espèces. Dans la description du processus, le contrôle médical est un acteur et est souvent en première ligne dans la gestion des AT/MP. Quelles sont ses attributions ? 4 1.2 Le rôle du contrôle médical et du médecin conseil A la Cnps, les mandats du contrôle médical et du médecin conseil sont fixés par l’article 159 de la loi n° 99-447 du 2 août 1999 portant modification du code de prévoyance sociale (cps), ainsi que par la loi n°62-248 du 31 juillet 1962 instituant le code de déontologie médicale en ses articles 51,52 et 53. De plus, cette base légale est complétée par la note de service n° 207/CNPS/DG/2011 portant réorganisation du contrôle médical. De ce fondement légal et réglementaire, il ressort que le contrôle médical a pour rôle : de mettre en œuvre et de contrôler le système légal de gratuité des soins en matière de gestion des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles (AT/MP) comme en matière d’assurance maternité et d’invalidité ; de donner des avis médicaux et de contrôler tous les éléments d’ordre médical susceptibles de commander l’attribution de prestations ; d’effectuer le contrôle des prescriptions médicales, des frais pharmaceutiques, de la tarification des actes etc.… d’évaluer la mise en application des conventions signées entre la CNPS d’une part et les établissements de santé et les pharmacies d’autre part. Le processus décrit ci-dessus et le modèle d’organisation du contrôle médical susmentionné sont, semble t-il, de nature à permettre à la Cnps de payer le juste soin au juste coût. Cependant quelle analyse peut-on en faire ? 2. ANALYSE CRITIQUE DE LA PRISE EN CHARGE DES AT/MP A LA CNPS Nous baserons cette analyse sur la méthode de gestion des risques. Le risque représente, en matière de gestion, la possibilité qu’un évènement survienne et dont les conséquences seraient susceptibles d’affecter les personnes, les actifs, l’environnement, les objectifs de la société ou sa réputation1. Il est à constater que les risques de contrôle relatifs aux prestations en espèces sont relativement maitrisés, tandis que ceux inhérents aux prestations en nature paraissent ne pas être pris en compte. 1 Guy Audibert en3s cifocss 2013 : cours de maitrise des risques et qualité comptable 5 2.1 La maitrise des risques de contrôle par le processus qualité Les risques de contrôle sont relatifs à un dysfonctionnement du dispositif de contrôle interne qui fait qu’une erreur significative n’est ni détectée, ni corrigée. Dans le cas de la Cnps, les risques de contrôle de l’activité de gestion administrative des dossiers d’AT/MP concernent par exemple2 : la validation de droits irréguliers ou l’acceptation de faux dossiers, la mauvaise qualité de saisie des informations employeurs et assurés le retard dans la validation des droits le rejet de dossiers AT/MP complets Avec le processus décrit plus haut, il semble que la Cnps se donne les moyens de les minimiser et réduire ainsi leur incidence financière et maintenir l’équilibre de cette branche. Pour ce faire, les modalités de surveillance de ces risques incluent certaines activités telles que3 : l’audit, les revues de processus, le contrôle hiérarchique (suivi de contrôle des pièces, suivi de validation), le suivi des clôtures de journée, le suivi et l’analyse des statistiques, le suivi des contrôles de validation des droits, la tenue de la commission AT/MP. Comme on le voit, le déploiement de ces modalités de surveillance a, a priori, pour cible essentielle la sécurisation des prestations en espèces au titre des AT/MP. Cependant, qu’en est-il des prestations en nature ? 2 Cartographie des risques issus de la fiche processus gestion des dossiers d’accident de travail / maladies professionnelles , version 04, 2012, CNPS 3 Fiche processus gestion des dossiers d’accidents de travail / maladies professionnelles, version 04, novembre 2012 6 2.2 Les risques inhérents aux prestations en nature peu maitrisés Il est des risques dont la nature oblige soit à les accepter, soit à les réduire étant entendu que leur suppression semble difficile, voire utopique. Les prestations en nature, en tant que l’autre versant important de la prise en charge des AT/MP, en font partie. Ces risques sont dits inhérents car intrinsèquement liés à l’environnement externe de la Cnps. En ce domaine, ces risques sont principalement relatifs aux modalités de prise en charge médicale des victimes d’AT/MP et des relations avec les professionnels de santé partenaires de la Cnps. De façon pratique, les points que l’on peut répertorier sont relatifs à une imprécision des textes organisant la relation avec les professionnels de santé, la dépendance aux assurés quant à la détection des cas de fraude, les modalités non explicites de règlement des conflits avec les professionnels de santé, les actions peu visibles relativement aux sanctions, l’incomplète analyse statistique des bilans d’activité. 2.2.1 L’imprécision des textes organisant les relations avec les professionnels de santé Le canevas de la collaboration de la Cnps avec les professionnels de santé est matérialisé par une convention négociée et signée entre la Cnps et chaque entité concernée. Cette méthode a, certes, l’avantage de favoriser la responsabilisation de chacune des parties contractantes dans la gestion des AT/MP. Cependant certaines de ses dispositions paraissent imprécises et ne servent pas suffisamment l’objectif de maîtrise médicalisée des dépenses de soins qui en est le fondement. Pour s’en convaincre, considérons l’article 8 in fine de la convention qui stipule que « en cas d’anomalies constatées dans les prestations et produits pharmaceutiques fournis, la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale se réserve le droit de suspendre le paiement pour contrôle ». Ici, les termes de la convention ne semblent pas très précis sur les anomalies susceptibles de déclencher la procédure de contrôle. De ce fait, les anomalies non constatées risquent de grever les charges financières relatives à la prise en charge des victimes d’AT/MP au détriment de la santé financière de cette branche. 7 2.2.2. La dépendance aux assurés quant à la détection des cas de fraude L’article 4 de la convention dispose que : « les patients s’engagent à informer sans délai de toute pratique qui pourrait leur paraître anormale (…) En cas de fraude commis par un tiers, la Caisse Nationales de Prévoyance Sociale se charge d’effectuer toute poursuite ». De ce qui précède, il est à inférer que le dispositif d’alerte mis en place pour les prestations en nature est basé essentiellement sur la pleine collaboration de l’accidenté et sur l’imprécision de ce que peut être une pratique anormale. Cette disposition induit un risque certain quant à l’efficacité de ce dispositif, puisque la Cnps semble ne pas disposer en la matière de mécanismes autonomes, fiables et maîtrisables d’alerte. Le risque pour la Cnps étant la probabilité de payer pour des pratiques « anormales » non signalées. 2.2.3. Les modalités peu explicites de règlement des conflits avec les professionnels de santé Les modalités de règlement des conflits entre la Cnps et ses cocontractants semblent n’indiquer en rien les mesures susceptibles d’être appliquées. En effet, l’article 9 de la convention se contente d’indiquer que « les litiges qui surviendront à l’occasion ou au cours de l’exécution de la présente convention feront l’objet d’un règlement amiable dans le cadre d’une commission mixte de 4 membres dont 2 représentants de l’établissement privé et 2 représentants de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale ». La question qui peut être posée à l’analyse de cette disposition est la suivante : tous les litiges peuvent-ils faire l’objet de règlement amiable ? La certitude du recours amiable préalable n’est-elle pas de nature à favoriser la multiplication des actes frauduleux ? Ces interrogations sont renforcées par l’action peu visible de la Cnps en matière d’action contentieuse. 2.2.4. L’action peu visible de la CNPS relativement aux actions contentieuses A ces "faiblesses" de la convention se rajoute l’action peu visible de la Cnps sur la question de l’application de l’article 137 du code de prévoyance sociale. En effet, 8 celui-ci stipule que « est puni des peines prévues à l’article 416 du code pénal 4 quiconque, à quelque titre que ce soit, par fausse déclaration obtient ou tente d’obtenir le paiement de prestations qui ne lui sont pas dues ». Sur cette question, il semble que les auteurs de fraudes aux prestations d’accidents du travail et de maladies professionnelles font peu l’objet de poursuites judiciaires ou alors les actions pénales intentées par la CNPS ne sont pas suffisamment vulgarisées afin de servir de facteurs de dissuasion. 2.2.5. L’incomplète analyse statistique des bilans d’activité du contrôle médical Le bilan des activités de remboursement effectuées par le contrôle médical s’établissait comme suit en 2012 : 4 Article 416 du code pénal de Côte d’Ivoire « Est puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 100 000 à 1 000 000 de francs, quiconque, de l’une des manières exprimées aux articles 281 et 282, commet ou tente de commettre, un faux en écriture privée, de commerce ou de banque Est puni de la même peine, celui qui sciemment fait usage ou tente de faire usage de la pièce fausse. » 9 Tableau 1 : tableau récapitulatif des remboursements annuels 2012 MONTANTS EXPOSE EN FCA C M Yopougon 314 794 384 C M Treichville 433 387 841 C M National 8 541 965 C M SanPédro 9 761 884 MONTANTS ACCORDES 68 478 804 91 161 102 4 026 394 246 315 580 342 226 739 4 515 571 5 166 996 4 594 888 766 486 074 168 833 296 597 652 778 13 720 985 32 683 910 4 904 611 13 696 985 23 307 054 3 693 615 24000 9 376 856 1 210 996 3 164 550 2 577 550 587 000 54 474 056 43 275 204 11 198 852 18 301 316 13 284 013 5 017 303 51 743 668 10 083 546 23 376 667 8 445 052 28 367 001 1 638 494 407 196 190 885 216 311 80 535 726 45 296 617 35 239 109 C M Yopougon Chaussures (Prothèse C M Treichville C M National orthopédique) C M SanPédro 327 500 144 000 450000 262 500 114 000 450000 65 000 30000 0 30 000 30 000 0 Sous total 951 500 856 500 95 000 58 400 85 500 0 58 400 52 500 0 0 33 000 0 129 500 129 500 0 273 400 240 400 33 000 507 356 034 469 059 907 38 296 127 544 272 479 61 146 933 464 802 709 53 222 558 79 469 770 7 924 375 77 140 732 72 713 740 4 426 992 1 189 916 178 1 059 798 914 130 117 264 0 2 688 413 0 0 237 638 0 0 2 450 775 0 0 0 0 2 688 413 2 095 325 347 237 638 1 318 385 569 2 450 775 776 786 778 REMBOURSEMENTS STRUCTURES Frais médicaux femmes en couches Sous total Transport / séjour C M Yopougon C M Treichville C M National C M SanPédro Sous total Frais médicaux AT/MP CM Yopougon CM Treichville C M National C M SanPédro Sous total Lunetterie C M Yopougon C M Treichville C M National C M SanPédro Sous total CM Yopougon CM Bordereaux, Factures cliniques et Treichville pharmacies C M National C M SanPédro Sous total Frais funéraires Sous total TOTAL GENERAL C M Yopougon C M Treichville C M National C M SanPédro Source : contrôle médical de la CNPS ECARTS 10 Ainsi aurions-nous Lorsque l’on considère la ligne relative aux frais médicaux AT/MP, l’écart entre les montants exposés (80 535 726 F Cfa soit environ 123 000 euros) et les sommes accordées (45 296 617F Cfa soit 69 000 euros), s’élève à 35 239 109 F Cfa soit environ 54 000 euros. Quelle analyse fait-on de cet écart ? Ce montant a t-il été refusé en remboursement pour cause de fraudes détectées ? Quelle est la part due aux professionnels de santé ? Quelle est la responsabilité des victimes d’AT/MP ? Quelle est la part refusée aux médecins et aux pharmaciens ? Ou alors, est ce la correction de la tarification des actes par le médecin conseil qui abouti à établir cet écart ? L’analyse complète des données statistiques dans toute organisation est le préalable à toute décision stratégique. Ce bilan d’activité semble muet sur ces questions. Dans ce contexte, il est difficile de situer l’importance des actes de surconsommation de médicaments, de prescription de princeps, de facturation d’actes fictifs, de surprescription d’actes, de falsification, de fabrication, de photocopie d’ordonnances aux fins de se faire délivrer indument des médicaments, de nomadisme médical. En somme, il apparait de ce qui précède que les risques inhérents à l’activité de prise en charge médicale des victimes d’AT/MP semble ne pas faire l’objet d’une politique de totale maitrise tant du point de vue de la législation que de celle de l’organisation. L’ensemble de ces facteurs appelle à envisager des pistes de réflexion afin de parvenir à une plus grande maîtise du versant prestations en nature dans la prise en charge des victimes d’AT/MP. 11 DEUXIEME PARTIE : PROPOSITIONS D’UNE MEILLEURE MAITRISE MEDICALISEE DES DEPENSES DE SOINS EN MATIERE DE RISQUES PROFESSIONNELS A LA CNPS ET LEURS CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE Enumérons d’abord les propositions avant d’envisager leurs conditions de mise en œuvre. 1. LES PROPOSITIONS D’UNE MEILLEURE MEDICALISEE DES DEPENSES DE SOINS MAITRISE La prévention et la gestion des risques inhérents au versement des prestations en nature par la Cnps nécessitent une conjonction d’actions tenant à la révision de la convention avec les professionnels de santé, l’organisation de l’encadrement des professionnels de santé, la mise en place d’un système d’alerte fiable et le renforcement de l’action contentieuse 1.1. la révision du conventionnement avec les professionnels de santé Cette réforme devra porter sur les modalités du conventionnement, le suivi et l’évaluation des conventions et une plus grande clarification de certaines dispositions. 1.1.1 Les modalités du conventionnement L’un des points à améliorer au niveau du système de gestion des relations avec les professionnels de santé à la Cnps semble être le caractère personnel, la négociation et la signature de conventions intuitu personae avec les professionnels de santé. En effet, au contraire de l’assurance maladie en France, où les conventions avec les professionnels de santé sont négociées et signées entre leurs représentants syndicaux et l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie (Uncam), en Côte d’Ivoire, les conventions sont négociées et signées avec chaque établissement de santé individuellement. Certes, cette méthode a l’avantage de permettre à la Cnps de faire un choix éclairé des professionnels de santé qui répondent à l’impératif de la qualité des soins au juste coût. Cependant, face à des interlocuteurs divers et disparates, elle ne peut 12 adopter une ligne d’action opposable à tous, sans un interlocuteur commun. Pour cela, il serait d’une utilité certaine d’avoir un interlocuteur unique pour chaque groupe de professionnels de santé. Ici, la Cnps devra privilégier le conventionnement collectif plus souple et plus adaptable au caractère évolutif de ses objectifs de réduction des dépenses indues en matière de risques professionnels. De la sorte, la CNPS se donnerait les moyens d’avoir une plus grande capacité de régulation et d’adaptation des pratiques médicales à ses objectifs de réduction des indus en AT/MP. En s’appuyant sur les organisations représentatives des professionnels de santé, la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale s’allierait à des partenaires qui serviraient de relais à la diffusion des messages pour l’adoption de bonnes pratiques à l’intention des médecins, pharmaciens, kinésithérapeutes… libéraux. L’autre intérêt de cette approche est de permettre à la Cnps de négocier régulièrement des avenants aux conventions afin de les adapter aux objectifs des contrats-programmes triennaux qui rythment désormais la vie de l’Institution. 1.1.2 Le suivi et l’évaluation des conventions A la Cnps, le suivi et l’évaluation de l’application des conventions signées avec les professionnels de santé fait partie des attributions du médecin-conseil. A l’analyse, cette attribution apparaît plus comme une tâche administrative que médicale. De plus, la convention reste muette sur la périodicité de l’évaluation. Ici deux facteurs essentiels rendent le suivi et l’évaluation des conventions avec les professionnels de santé délicats : Le nombre réduit de médecins-conseil : ils sont au nombre de 4 pour une population d’établissements de santé et de pharmacies estimée à 125. Même si la gestion de ces professionnels de santé s’effectue par zone et que les densités dépendent de la localisation géographique, il n’en demeure pas moins que le suivi et l’évaluation de ces conventions relève d’un contact permanent avec eux. La raison est que le mode de conventionnement individuel fait que chaque cas est unique. 13 De ce fait et à l’instar de la pratique en France, la Cnps devra, pour épauler les médecins conseil, mettre en place une unité d’agents chargés des relations avec les professionnels de santé. En effet, à la Cpam, les délégués de l’assurance maladie, sous la supervision des médecins-conseil, jouent le rôle d’interface entre l’assurance maladie et les professionnels de santé dans le cadre du suivi des dispositions conventionnelles contractuelles. Cette organisation aura l’avantage de permettre aux médecins-conseil de ne se consacrer qu’aux tâches médicales qui constituent le cœur de leur métier. La difficulté d’établissement d’un référentiel d’évaluation : peut-on concevoir un référentiel unique d’évaluation à destination d’une population disparate avec des droits individuels ? et que doit-il contenir ? A la Cpam, les référentiels d’évaluation des activités des professionnels de santé contiennent des indicateurs précis. La surveillance de ces indicateurs est rendue possible par la diffusion auprès des professionnels de santé des objectifs de l’assurance maladie en termes de maîtrise médicalisée des dépenses de soins. Ces indicateurs qui peuvent évoluer ou changer d’une année à une autre, portent généralement sur le taux de prescription en dehors de la liste des médicaments préconisés par l’assurance maladie, le nombre de prescriptions d’arrêts de travail, le taux de prescription de transports sanitaires… Le suivi de ces indicateurs a pour effet d’améliorer la qualité des soins et d’homogénéiser les pratiques. L’objectif, in fine, est de prévenir les actes de surprescription, de prescription de princeps substituables… Il serait donc souhaitable que la Cnps rédige un référentiel d’évaluation et de suivi des conventions avec ses professionnels de santé afin de rendre plus aisée la tâche des praticiens-conseil. 1.1.3 La clarification de certaines dispositions conventionnelles La convention entre la Cnps et les professionnels de santé se doit d’être précise sur les cas d’anomalies susceptibles de déclencher la procédure de règlement des conflits. A ce niveau, les dispositions de la convention liant l’assurance maladie en France et les médecins libéraux peut servir d’exemple. En effet, cette convention énumère de façon exhaustive les cas de manquements de part et d’autre qui peuvent déclencher l’action contentieuse de l’une ou l’autre partie. 14 De la sorte, les relations entre les différents partenaires sont axées sur la connaissance partagée des droits et des devoirs des uns et des autres. La formulation évasive de la convention telle que libellée entre la Cnps et ses partenaires-santé sur la question des pratiques à surveiller rend donc la convention peu efficace sur la saisine des instances d’arbitrage ou de jugement. Il convient donc d’énumérer clairement les faits générateurs du contentieux. 1.1.4 L’implication des professionnels de santé dans l’atteinte des objectifs de maitrise médicalisée des dépenses de soins en AT/MP. Ici la Cnps devra établir des relations très étroites avec ses professionnels de santé. Le maillon essentiel de cette activité est la fixation d’objectifs de santé. Il paraît primordial en effet d’axer les relations avec les professionnels de santé sur l’item de la coresponsabilité dans l’atteinte d’objectifs communs. Cette technique est utilisée par l’assurance maladie en France. En fait, Les contrats d’objectifs et de gestion (COG) ainsi que les contrats pluriannuels de gestion (CPG) établissent entre l’Etat et la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS) d’une part et entre la CNAMTS et les CPAM d’autre part, des objectifs à atteindre ainsi que les moyens pour y arriver. Les objectifs de santé publique font partie de la stratégie globale de maîtrise médicalisée des soins. Ces objectifs spécifiques sont apparus dans les COG, les CPG et dans les conventions liant l’assurance maladie aux professionnels de santé depuis une dizaine d’années. Ces objectifs, assortis d’indicateurs mesurables et contrôlables (taux de prescription de génériques en lieu et place des princeps, l’observation du tableau indicatif du nombre d’actes à prescrire en fonction de la pathologie, le nombre de prescriptions d’arrêts de travail…), ont pour ambition de changer les pratiques "à risque" des professionnels de santé. Ceci s’opère par la promotion de bonnes pratiques, édictées par la Haute Autorité en Santé (HAS) et par la CNAMTS. La rémunération sur Objectifs de Santé Publique (ROSP) des professionnels de santé dans l’atteinte de ces objectifs est une composante essentielle dans ce dispositif. 15 Certaines actions, telles que l’encouragement à la prescription systématique de médicaments substituables aux princeps, sont emblématiques de ce programme. Tout comme à l’assurance maladie, la Cnps pourrait envisager de rémunérer ceux des professionnels de santé qui observeraient ses indicateurs et qui lui permettraient d’atteindre ses objectifs de maitrise médicalisée des dépenses de soin en matière d’AT/MP. Le contact permanent de la sécurité sociale avec les professionnels de santé peut constituer un moyen efficace à terme de réduire les abus ou les fraudes émanant d’eux. 1.1.4 La mise en place d’un système d’alerte fiable Le système d’alerte tel que disposé à l’article 4 de la convention liant la Cnps aux professionnels de santé semble aléatoire. En effet, il est essentiellement basé sur le signalement par les patients et non sur une stratégie d’analyse systématique de l’activité des professionnels de santé. Il est sans doute vrai que ce système d’alerte a l’avantage de cibler particulièrement des établissements hospitaliers et de réduire ainsi le champ d’investigation. Cependant le caractère incertain, hypothétique du signalement fait que cette méthode peut ne pas conduire à une alerte systématique. A la Cpam, quoique les conventions avec les professionnels de santé prescrivent aussi le signalement par les patients des pratiques frauduleuses, il existe par ailleurs une activité systématique de contrôle et de détection des fraudes. Ce dispositif implique l’action conjuguée de l’échelon local du service médical (ELSM) et les délégués de l’assurance maladie. Ainsi à l’ELSM du Puy-de-Dôme, deux praticiens-conseil ont pour tâche principale de contrôler l’activité des professionnels de santé en se basant sur l’analyse statistique de leurs prescriptions médicamenteuses ou des actes médicaux qu’ils posent. Cette observation de la pratique médicale des professionnels de santé conventionnés, permet de relever automatiquement les cas de non-conformité aux objectifs de santé publique et met en lumière les situations de non-observation des indicateurs définis par la CNAMTS. Ce système a l’avantage d’instaurer un contrôle a posteriori très proche du temps de l’acte posé par le praticien-traitant. Il est bien entendu compris qu’un tel système 16 reste performant en raison de l’obligation de transmission électronique (télétransmission) des feuilles de soins entre les professionnels de santé et la Cpam. Il semble donc que la qualité du système d’information reste déterminante. Les délégués de l’assurance maladie également, en dehors de leur rôle d’accompagnement des professionnels de santé, agissent comme des donneurs d’alerte, à l’occasion de leurs interactions quotidiennes avec les professionnels de santé. A la Cnps, bien que le développement ou l’amélioration du système d’information reste une priorité, il n’en demeure pas moins que l’atteinte du niveau actuel de dématérialisation des échanges entre l’assurance maladie et ses partenaires s’analyser comme un enjeu de taille. C’est la raison pour laquelle il paraît opportun, en attendant, de renforcer la politique de contrôle systématique des professionnels de santé avec du personnel dédié. Il faudra par ailleurs définir des normes, des référentiels de prise en charge des victimes d’AT/MP à soumettre aux professionnels de santé. Le soubassement de cette stratégie reste la définition, à l’échelle nationale, d’objectifs clairs de maîtrise médicalisée des dépenses de soins. De la sorte, le renforcement de l’encadrement de l’activité des professionnels de santé aura pour résultat de réduire les abus ou les faits de fraudes aux dépens de la Cnps. 1.1.5 Le renforcement de l’action contentieuse Le renforcement de l’action contentieuse s’appréciera par : L’institution du contentieux ordinal : L’organisation du conventionnement des professionnels de santé, comme soulignée plus haut, semble être l’une des insuffisances du système de gestion des professionnels de santé de la Cnps. La pratique de l’assurance maladie en la matière est toute autre. Ici, le conventionnement est collectif et cela ouvre le champ aux ordres professionnels de s’impliquer et d’être partie à la gestion des conventions. Ainsi, le conseil de l’ordre des médecins, des pharmaciens ou des kinésithérapeutes constituent de véritables juridictions professionnelles "d’exception", dont la saisine 17 est laissée aussi bien aux professionnels de santé pour contester les décisions de la CNAMTS, qu’à la Cpam en cas de découverte de fraudes. L’action ordinale rend le contentieux moins lourd pour le service juridique, car traitant de toutes les affaires dans lesquelles le secret médical reste à protéger. C’est en cela qu’elle ne peut être menée que par le contrôle médical. « Bien que les sanctions qui y sont prononcées ne soient pas, quelques fois à la hauteur des faits reprochés (interdiction temporaire d’exercer avec ou sans sursis), l’existence de cette instance joue énormément dans la prévention des fraudes »5. En Côte d’ivoire, la constitution d’un ordre de juridiction ordinale et le développement du contentieux médical aura certainement pour avantage de prévenir les actes frauduleux émanant des professionnels de santé, quelques fois avec la complicité des assurés sociaux et particulièrement des victimes d’AT/MP. En retirant ce contentieux du contentieux général des prestations en raison de sa particularité, la Cnps réduirait ainsi les risques que les procès contre les professionnels de santé trainent en longueur et lui éviterait de faire l’arbitrage entre les sommes à récupérer et les frais à engager pour le faire. La systématisation du contentieux civil et/ou pénal : parallèlement à ce dispositif entièrement piloté par le contrôle médical, il existe aussi un contentieux géré par la Cpam et qui concerne les dossiers non couverts par le secret médical. Lorsque la Caisse Primaire d’Assurance Maladie constate une fraude de masse, elle peut saisir directement les autorités judiciaires compétentes afin de voir les fautifs poursuivis pénalement. Comme on le constate, le contentieux à l’assurance maladie diffère selon les instances saisies et selon les cas à traiter. Ce type de contentieux doit être systématisé à la Cnps afin de dissuader les volontés de fraudes aux prestations en nature aux AT/MP. Cependant quelles sont les conditions de mise en œuvre de toutes ces propositions ? 5 Entretien avec Dr. LAUBIGNAT, médecin-chef conseil de l’ELSM du Puy-de-Dôme 18 2. Les conditions de mise en œuvre des propositions La mise en œuvre des propositions à la CNPS est conditionnée par la mise en place d’une véritable politique de gestion des risques à la CNPS avec un service dédié, le prolongement de l’approche par processus à la gestion des prestations en nature. 2.1. La mise en place d’une politique de gestion des risques à la Cnps Les organisations modernes font de la gestion du risque un pan important de leur activité. Repérer les poches de vulnérabilité et y apporter des solutions durables semble être une activité non à différer pour toute entreprise. Transversale à l’ensemble des processus de l’entreprise, la gestion des risques est une activité à part entière avec ses référentiels et ses méthodes. Pour cela, la Cnps devra mettre en place, et de façon autonome, un service chargé de la gestion des risques. Le faisant, l’Institution de prévoyance sociale se donnera les moyens d’avoir une claire visibilité de l’ensemble des zones sensibles de ses processus à travers une cartographie redynamisée des risques. De plus, l’identification des risques liés aux activités est le meilleur moyen d’apporter des réponses adaptées et efficaces. De la bonne maîtrise des risques découle inéluctablement la qualité des services et la préservation des comptes de l’entreprise quant à la problématique de la réduction des indus. C’est pour cette raison qu’à la Cpam du Puy-de-Dôme, la gestion des risques est traitée comme une priorité. En effet, toute la politique de gestion des prestations en nature et en espèces de l’assurance maladie est bâtie autour de la politique stratégique de gestion des risques. A cette fin, une sous direction chargée de la gestion des risques et de la prévention coordonne l’activité d’un certain nombre de services. Ce sont : le service juridique, le secteur gestion des professions de santé qui regroupe le service professions de santé et le service des Dam. Elle comprend également un secteur régulation qui rassemble le service gestion du risque (SGDR) et le service contrôle contentieux et lutte contre la fraude. Toutes ces entités administratives combinent leurs efforts dans la lutte contre les fraudes aux prestations de l’assurance maladie. Sur ce modèle, la Cnps devra mettre 19 aussi en place un service de lutte contre les fraudes qui sera transversale à toutes les branches. Cependant, la mise en place d’une politique de gestion des risques ne peut pas se faire sans la généralisation du management de la qualité à tous les secteurs d’activité. 2.2. Le nécessaire prolongement du management de la qualité à la gestion des prestations en nature au titre des AT/MP Le service du contrôle médical qui est au cœur du processus de gestion des prestations en nature en matière d’AT/MP se trouve, à juste titre, englobé dans le processus de gestion des prestations en espèces. Cette configuration laisse pourtant entrevoir un vide de procédures dans la gestion des relations avec les professionnels de santé conventionnés. Sur ce point, la Cnps devra s’atteler à décrire des processus complets, des référentiels de prise en charge des pathologies liées au travail intégrant les professionnels de santé. Cette approche est d’ailleurs largement adoptée en France. En fait, l’encadrement des professionnels de santé par la CNAMTS à travers le service médical consiste aussi à intégrer les professionnels de santé dans la gestion des processus. Ainsi, la commission paritaire nationale (CPN), la commission paritaire régionale (CPR), et la commission paritaire locale (CPL) sont des instances de régulation et de revue des processus avec les professionnels de santé .Ces différents niveaux d’actions jouent des rôles de régulation différente. Composée d’une section professionnelle et d’une section sociale, les commissions paritaires offrent un cadre de concertation permanente entre l’assurance maladie et les professionnels de santé. 20 CONCLUSION La maîtrise des risques et la lutte contre les fraudes constituent aujourd’hui, un challenge pour les organismes de sécurité sociale. En effet, face à la précarisation des ressources financières engendrée par les crises économiques et financières, une rationalisation des processus et moyens de gestion des branches se donne comme un impératif non à différer. La vocation du contrôle médical dans cette quête apparaît ainsi primordiale en ce qu’elle est en première ligne dans la sécurisation des dépenses techniques au titre des AT/MP. C’est dans cette logique que cette étude s’est penchée sur les risques encourus dans la gestion de la maîtrise médicalisée des dépenses de soins relativement aux professionnels de santé conventionnés et aux assurés sociaux. De la cartographie des risques de la CPAM du Puy-de-Dôme et de la Cnps, il est apparu que tout processus de gestion des relations avec les professionnels de santé conventionnés ainsi qu’avec les victimes d’AT/MP, laisse transparaître des failles quant à l’objectif de payer le juste soin au juste coût. Cependant, l’expérience de la CPAM nous a inspiré des propositions adaptables à la Cnps, en tenant certainement compte de ses spécificités. On peut donc retenir entre autre : La révision du conventionnement avec les professionnels de santé ; L’organisation de l’encadrement des professionnels de santé ; La mise en place d’un système d’alerte fiable ; Le renforcement de l’action contentieuse. Mais toutes ces propositions ne peuvent être viables que dans une stratégie générale de gestion des risques et d’un prolongement de la démarche qualité aux relations avec les professionnels de santé. De ce qui précède, il est donc à inférer que la maîtrise des risques inhérents à l’activité de prise en charge des victimes d’AT/MP et de gestion des relations avec les professionnels de santé constitue un gage de fiabilité dans la sécurisation des dépenses de remboursement au titre de la prise en charge médicale des AT/MP. C’est aussi le meilleur moyen de réaliser l’objectif de payer le juste soin au juste coût. Il en va de la pérennité financière de la branche AT/MP et de la préservation de l’image d’entreprise modèle de la Cnps. 21 SIGLES ET ABREVIATIONS AT/MP : Accident du Travail et Maladies Professionnelles CARF : Centre d’Appareillage et de Rééducation Fonctionnelle CIS : Conseillers Informatique Service CMN : Contrôle Médical National CNAMTS : Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés CNPS : Caisse Nationale de Prévoyance Sociale COG : Convention d’Objectifs et de Gestion CPAM : Caisse Primaire d’Assurance Maladie CPG : Contrat Pluriannuel de Gestion CPL : Commission Paritaire Local CPN : Commission Paritaire Nationale CPR : Commission Paritaire Régionale CRA : Commission de Recours Amiable DAM : Délégué de l’Assurance Maladie DCF : Direction Financière et Comptable ELSM : Echelon Local du Service Médical HAS : Haute Autorité en Santé IPP : Incapacité Permanente Partielle LM2A : Liaison Médico-Administrative Automatisée PS : Professionnel de Santé ROSP : Rémunération sur Objectif de Santé Publique SPT : Service de Préparation Technique UNCAM : Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie 22 BIBLIOGRAPHIE Manuels et supports de cours Cours de contrôle médical / Dr TOURE Abou. – Abidjan, cifocss 2013. Cours de maîtrise des risques et qualité comptable/ Guy AUDIBERT.- Saint-Etienne, EN3S 2013. Rapports d’activité Assurance Maladie/ compte rendu d’activité, 2012 Assurance Maladie Caisse Nationale/ fraude à la reconnaissance des accidents de travail/trajet, réunion régionale, juillet, 2012 Assurance Maladie Puy-de-Dôme, les indicateurs de suivi des pratiques des médecins libéraux, juillet 2013 Assurance Maladie, Puy-de-Dôme, présentation des Délégués de l’Assurance Maladie, DAM/JM/2013 Assurance maladie, convention nationale entre le syndicat des médecins libéraux et la l’Uncam, 2011. 23 ANNEXES I ANNEXE I : CIRCUIT DE TRAITEMENT DES PRESTATIONS EN ESPECES AT/MP CNPS Réception et contrôle de la déclaration AT/MP Vérification de la déclaration Chef de section AT/MP Non Déclaration conforme ? Correction Oui Création du numéro sinistre Commission AT/MP Tenue de la commission AT/MP Non Commission AT/MP, Contrôleur d’exploitation, Médecin conseil AT/MP avéré ? Vérification/Contrôle/Avis médecin conseil Chef de service prestations Oui Non AT/MP Gestionnaire Rejet AT/MP lésion ? avéré ? Non avec Classement du dossier Oui Rejet AT/MP avec arrêt de travail? Directeur d’agence Oui Commission AT/MP Chef de section AT/MP Réception des factures du contrôle médicale 1 Saisie des factures du contrôle médical Vérification des saisies Gestionnaires Non Correction Saisie conformes ? Oui Création des droits Vérification des droits Chef de service Chef de section Droits conformes ? Validation des droits Edition du bordereau Transmission du bordereau à la comptabilité II ANNEXE II : CIRCUIT AUTOMATISE DE TRAITEMENT D’UN DOSSIER AT/MP A LA Cpam PUY DE DOME Entreprise ou assuré résidant dans le Puy-deDôme dépôt de dossier physique SPT reçoit et dématérialise le dossier physique d’AT/MP de l’assuré Diadème applicatif de réception des flux dématérialisés Net entreprise e-Dat (déclaration de l’accident par l’employeur via internet) Orphée applicatif de traitement administratif des dossiers AT/MP Si matérialité établie : prise en charge d’emblée Paiement des IJ si arrêt de travail et présence du dernier bulletin de salaire de l’assuré Hippocrate, applicatif de gestion des demandes d’avis médical venant de la matérialité et du paiement LM2A applicatif de gestion des flux entre le contrôle médical, la matérialité et le paiement en cas d’avis médical concernant les rechutes, les CMI, les protocoles de soin post consolidation, nouvelles lésions, la consolidation, IPP Après avis du contrôle Médical, prise en charge explicite ou rejet En cas d’IPP sup ou égal à 10% Eurydice applicatif de gestion et de paiement des 3 rentes ANNEXE RISQUES III: MATRICE DE GESTION DES CARTOGRAPHIE DES RISQUES processus activités tâches risques identifiés DISPOSITIFS DE MAITRISE conséquences moyens de maitrise dispositifs de contrôle et de surveillance moyens de traçabilité ANNEXE IV : PRESENTATION DE LA CNPS DE COTE D’IVOIRE 1: HISTORIQUE 15/12/1955 : Création de la branche famille 10/12/1958 : Création de la branche des Risques professionn els 21/09/1960 : Création de la branche Vieillesse 20 /12/1968 : loi N°68.595 portant création de la CNPS 02/09/1999 : Loi 99-476 et 477 instituant l’IPS CNPS 11/01/2012 : ordonnance 2012-03 modifiant l’âge de départ à la retraite 2: MISSIONS Les missions de CNPS se déclinent en trois axes : La gestion du régime obligatoire de prévoyance sociale des travailleurs du secteur privé et assimilé qui comprend les branches suivantes : IV o Les prestations familiales ; o Les Accidents du Travail et Maladies Professionnelles ; o L’assurance vieillesse ; o La maternité ; La gestion des régimes complémentaires spéciaux, obligatoires ou volontaires ; Le recouvrement des cotisations sociales et le service des prestations afférentes à ces différents régimes 3 : GOUVERNANCE MINISTERE CHARGE DES AFFAIRES SOCIALES DOUBLE TUTELLE MINISTERE CHARGE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES CONTRAT PROGRAMME TRIENNAL DIRECTION GENERALE DE LA SECURITE SOCIALE CONSEIL D’ADMINISTRATION TRIPARTITE CONSEIL D’ADMINISTRATION TRIPARTITE Etat Etat Employeurs Employeurs Travailleurs 4 : TYPOLOGIE DES PRESTAIONS VERSEES Travailleurs CNPS DIRECTION GENERALE DIRECTION GENERALE V BRANCHES PRESTATIONS OBJECTIFS Pension normale Allocation unique Remboursement des cotisations personnelles Pension d’invalidité VIEILLESSE Allocation de solidarité Pension de réversion Allocations prénatales Allocation de maternité PRESTATIONS FAMILIALES Allocations au foyer du travailleur Allocations familiales Prise en charge des soins Assurer un revenu de remplacement selon la durée d’assurance Prendre en compte le travailleur reconnu inapte au travail Assister les travailleurs ayant exercé avant l’instauration de la sécurité sociale Verser un revenu au conjoint survivant et à l’orphelin de père et de mère Encourager le suivi médical de la grossesse Encourager l’accouchement sous contrôle médical et le suivi médical de l’enfant Encourager la natalité et la cohésion du foyer pour l’enfant Participer aux charges de famille engendrées par l’enfant Réparer les conséquences des accidents et maladies survenues en raison ou à l’occasion du travail AT/MP Indemnités journalières Assurer un revenu de remplacement pendant l’arrêt de travail Rentes Compenser l’incapacité permanente par un revenu VI Remboursement des frais médicaux et d’accouchement Maternité Encourager le travail des femmes Indemnités journalières 5 : FINANCEMENT SOURCE DE FINANCEMENT OBSERVATIONS Cotisations Sociales employeur (7,7%) AT/MP : 2 à 5%; Retraite : 7,7%; Prestations Familiales : 5%; Système déclaratif – Obligation de versement incombant à l’employeur – système par répartition à prestations définies – salaire plafonné Assurance Maternité : 0,75%) salarié (Retraite : 6,3%) VII