Le Soir - Culture-Enseignement - Fédération Wallonie

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Le Soir - Culture-Enseignement - Fédération Wallonie
Le Soir Mardi 31 mars 2015
LACULTURE 33
Donner le goût de la lecture aux ados
Lire n’est pas une priorité, mais les rencontres d’auteurs motivent
leurs romans ou lors de ren- Damien a dévoré Les Aventures invite un auteur à venir s’expriLe Prix des lycéens
contres en classe (lire ci-contre). d’Alex Rider, la série d’espion- mer en classe, l’intérêt des élèves « Les jeunes sont cash
permet à 3.000 jeunes
Tous l’avouent, ils n’auraient sans nage d’Anthony Horowitz. « Par- est décuplé. Chaque début d’ande découvrir
doute pas pensé à ouvrir ces fois, je lis en anglais. Je viens de née, elle convie ses classes à “un avec leurs questions »
livres de leur propre initiative. finir Life of Pi par exemple. »
état des lieux de la lecture”. En-
LITTERATURE
des auteurs belges.
Que lisent-ils
d’habitude ? Comment
les intéresser
autrement ?
O
rganisé tous les deux
ans, le Prix des lycéens
de Littérature donne
l’occasion à des élèves de 5e et
6e secondaire de lire cinq romans
d’auteurs belges francophones.
Cette année, Derrière la haine de
Barbara Abel, Tout ce silence de
Véronique Gallo, Géronimo a
mal au dos de Guy Gofette, Histoire d’un bonheur de Geneviève
Damas et Manuel de survie à
l’usage des incapables de Thomas Gunzig sont nominés. Depuis la rentrée en septembre
2014, 3.000 ados ont
découvert ces écrivains à travers
« Géronimo a mal au dos n’est
pas du tout mon style à la base »,
reconnaît Edouard, 17 ans, inscrit à l’Institut de la Vallée Bailly
à Braine-l’Alleud. « Je l’ai lu pour
le Prix. Les récits de vie dramatiques me touchent moins. »
Pour les quelques jeunes embarqués dans l’aventure, la lecture n’est en général pas une de
leurs priorités. Sébastien, 16 ans,
aussi élève à Braine-l’Alleud, ne
trouve pas le temps. « Depuis que
j’ai une tablette, je lis moins. Le
soir, avant de me coucher, je préfère surfer sur des sites d’information ou regarder des séries. »
Ou alors ce sont les livres en plusieurs tomes, les sagas qui retiennent leur attention. « L’été
passé pendant les vacances, j’ai
lu les romans fantastiques Night
Word de L.J.Smith », explique
Paulina, 18 ans en sixième
secondaire à l’Institut
Notre-Dame
de
Lourdes à Laeken.
Quand on leur parle d’écrivains belges, peu sont capables
de citer des noms. 55 % des
2.200 élèves qui participaient au
Prix des lycéens en 2013 ont découvert les auteurs grâce à l’événement. Pourtant, deux tiers
d’entre eux estiment que leur
façon de lire n’a pas évolué.
« C’est vrai qu’ils ne lisent pas
beaucoup, constate la professeure de français Sylvie Van der
Veken. C’est une question d’habitude familiale je pense. C’est pour
ça que les activités comme le Prix
des lycéens permettent de les mobiliser autrement. Les années où
le prix n’a pas lieu, je leur impose
six ou sept romans dans l’année.
Quand on enseigne le français, il
faut trouver le juste milieu entre
obliger les élèves à lire et leur apprendre le plaisir de la lecture. Je
ne leur ai pas demandé leur avis
pour participer au prix. Finalement, je n’ai pas eu de problème à
trouver des volontaires à envoyer
pour les délibérations. »
Chantal Thibaut, qui enseigne
le français en secondaire à l’Institut Saint-Louis à Bruxelles, fait le
même constat. Lorsqu’elle
seignante depuis trente ans, elle
relativise. « Le fait qu’ils ne
soient pas de grands lecteurs,
n’est pas dramatique. Ça a toujours été comme ça. Par contre, je
remarque maintenant qu’ils
adorent les mangas, les chroniques ou les fanfictions sur internet (N.D.L.R : des récits qui
reprennent des personnages issus de jeux vidéo, films, ou romans dans une nouvelle histoire). La lecture n’est pas un obstacle en classe. Je ne me dis pas
que les élèves ne lisent plus. C’est
à nous de leur donner envie. »
La professeure est persuadée
que le plaisir de lire ne passe pas
forcément par une liste de romans à avaler. Pour elle, ce ne
sont pas des programmes renforcés en français, comme l’annonce
le Plan Lecture de Joëlle Milquet
(lire ci-dessous), qui résoudront
ces problèmes mais un travail de
terrain sur le long terme. « Il faut
nous faire confiance. Donnezleur le goût et non des obligations. Du temps et non des
échéances, aux profs comme aux
élèves. » ■
FLAVIE GAUTHIER
TOP 3
Les livres
qu’ils aiment
Oubliez Twilight et Hunger
Games, voici trois exemples
de romans lus et dévorés
avec passion par les participants au Prix des lycéens.
Les Aventures
d'Alex Rider
ANTHONY HOROWITZ
Traduit de l’anglais
Dix tomes
Livre de Poche Jeunesse
Night World
LISA LANE SMITH
Traduit de l’anglais
Neuf tomes
Michel Lafon
Je reviens te chercher
GUILLAUME MUSSO
XO Editions
336 p., 19,90 €
© REPORTERS.
RÉFORME
Le Plan lecture de Joëlle Milquet
La ministre de la Culture en Fédération Wallonie-Bruxelles a promis des référentiels (programme) de lecture pour les élèves de maternelle accompagnés d’un guide pédagogique.
En primaire, les nouveaux référentiels seront exigeants et précis.
Concernant l’enseignement secondaire, le programme renforcera la pratique de la lecture et
l’écriture. Il faudra attendre la rentrée 2017 pour qu’il entre en vigueur.
L’auteure du thriller « Derrière la haine » entourée d’élèves
de l’Institut Notre-Dame de Lourdes à Laeken. © BRUNO D’ALIMONTE
REPORTAGE
omme les quatre autres auteurs nominés au Prix des lycéens, Barbara Abel a eu l’occasion de discuter avec les élèves de
son roman. Ce mercredi, trois
classes de 5e et 6e secondaire
technique de l’Institut NotreDame de Lourdes à Laeken, vont
l’interroger sur son thriller Derrière la haine (Fleuve noir, 2012).
« J’aime bien car les jeunes sont
cash avec leurs questions. C’est
très différent des lecteurs habituels. »
Les premières élèves qui
rentrent dans la salle ont apprécié l’ouvrage. « C’est même notre
préféré », confient Audrey et Déborah, 19 ans. « Ça nous a donné
envie de lire la suite. » Leur professeure de français Sylvie Van
der Veken les a aidés à préparer
une série de questions. Ils ont
prévu d’interpeller l’auteure à
tour de rôle.
Sophie se lance : « Depuis
combien de temps écrivezvous ? » « Ça fait 14 ans que
j’écris de manière professionnelle. J’aime lire depuis longtemps. Quand j’étais ado, je
n’avais pas internet et très peu de
chaînes télévisées chez moi. J’ai
eu mon premier ordinateur après
20 ans. Vous imaginez ? Pour
m’occuper, j’ai reporté mon attention sur les livres et les poèmes.
Très tôt, je me suis mise à l’écriture. Aujourd’hui je me suis donné des horaires réguliers. J’écris
entre 9 et 16 heures, quand mes
enfants sont à l’école. »
Les élèves, impressionnés ou
timides, n’osent décoller les yeux
de leur feuille. Peu prennent
spontanément la parole. « Y a-til une recette pour écrire un bon
thriller ? », demande un garçon.
« Pas du tout. Il faut essayer de
prendre le maximum de plaisir.
Plus on prend du plaisir, plus on
a des chances d’attirer les lecteurs. Si je peux donner un
conseil, ce serait peut-être celui de
beaucoup lire, des classiques, des
auteurs vivants ou morts, etc. »
La scène finale les a tous mar-
C
qués. Intrigués, plusieurs comme
Paulina restent sur leur faim.
« Avez-vous écrit cette fin tragique pour écrire une suite ? »
« J’ai d’abord eu directement
l’idée de la fin avant d’écrire. Si je
n’avais pas eu cette idée, je n’aurais pas écrit ce roman. Après j’ai
voulu utiliser le procédé du flashback pour donner envie au lecteur de poursuivre sa lecture. Je
réponds aussi aux attentes des
lecteurs de thriller. »
Après quelques questions pratiques sur sa manière de travailler, les jeunes s’attardent sur
la fiction. Ils sont impatients de
savoir si Derrière la haine s’inspire de faits réels. « Il y a des éléments personnels. Mon fils est
ami avec celui des voisins depuis
qu’il est petit. Une fois, je l’ai vu
se pencher à sa fenêtre pour me
faire signe. J’ai eu très peur qu’il
tombe. Heureusement, j’ai prévenu sa mère à temps et l’accident
ne s’est pas passé comme dans le
livre. » Lorsque celle-ci aborde
son vécu, la classe est suspendue
à ses lèvres. « Mais est-ce que vos
voisins ont lu le livre ? », demande spontanément une fille
au premier rang. « Ça, je ne sais
pas. »
Les questions se poursuivent
sur les détails de l’intrigue. Après
plus d’une heure d’échange, la
professeure clôt la rencontre.
« Ceux qui doivent partir
peuvent quitter la salle, les autres
peuvent encore discuter avec
l’auteure. » Pendant que certains
se précipitent vers la sortie, un
jeune homme s’approche de l’auteure, plus à l’aise pour poser sa
question en privé. « Quand est-ce
que le tome 2 sort en format de
poche ? Dès qu’il sort, je l’achète
direct ! Franchement Madame
vous écrivez vraiment trop
bien », s’exclame-il en sortant.
« C’est le genre de commentaires
qui va droit au cœur », remercie
Barbara Abel en souriant avant
de se faire attraper pour une photo-souvenir avec les moins pressés. ■
FLAVIE GAUTHIER
LESBRÈVES
Un opéra « blasphématoire »
es autorités russes ont limogé le directeur d’un théâtre
ayant mis en scène une version controversée de Tannhäuser
de Wagner. Version qui avait provoqué le courroux de
l’Église orthodoxe. La version originale de l’œuvre conte l’histoire
d’un poète déchiré entre ses désirs charnels envers la déesse de
l’amour Vénus et sa recherche du Salut au sein de l’Église. Le
scandale avait éclaté en février. L’insulte envers les sentiments
religieux des croyants est un délit en Russie. (afp)
L
CINÉMA
PEINTURE
Deux documentaires
belges primés
Le Festival Cinéma du réel,
consacré au documentaire de
création et qui s’est achevé à Paris vendredi, a récompensé entre
autres deux films belges Killing
Time – Entre deux fronts de Lydie
Wisshaupt-Claudel et Noche herida (Nuit blessée) de Nicolás
Rincón Gille. (b)
Deux tableaux de Bonnard
frôlent chacun le million
d’euros aux enchères
La promenade (1900) adjugée à
970.000 euros, et un Autoportrait (1889), vendu 960.000 euros ainsi qu’une centaine de
pièces signées de l’artiste Pierre
Bonnard (1867-1947) étaient
réunies pour cette vente dont le
total s’est élevé à 5,5 millions
d’euros, selon Osenat. (afp)
MUSÉE DU
MALGRÉ-TOUT
Les
ercredis
de a
cu ture
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