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himmler et son « héritage des ancêtres » germaniques et
mémoire
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LE PATRIOTE RÉSISTANT
N° 904 - janvier 2016
Himmler et son « héritage des
ancêtres » germaniques et nordiques
Convaincu de la supériorité d’une « race germanique » aux origines « exceptionnelles », le Reichsführer SS Himmler s’évertua à donner
une base « scientifique » à ses divagations. Dans ce but il créa un organisme dénommé « Héritage des ancêtres », un outil idéologique et de
propagande qui servit aussi les visées expansionnistes du régime nazi. Ne rêvait-il pas de réunir notamment les populations du nord et du
nord-ouest de l’Europe, censées descendre d’un même « peuple » germanique ?
Un organisme
rattaché à la SS
C’est dans cet esprit qu’il décida la fondation d’une institution culturelle appelée à
l’origine « Héritage allemand des ancêtres,
société d’études pour l’histoire originelle de
l’esprit », un organisme totalement rattaché
à la SS. Avec six personnalités, en général
peu connues du public, il en signa les statuts le 1er juillet 1935. Le programme était :
« Etudier l’expansion, l’esprit et les actes de
l’indogermanisme, faire vivre les résultats
de ces recherches en les faisant connaître au
peuple allemand, et appeler chaque membre
du peuple à y contribuer ». Bizarrement,
le principal responsable et seul dirigeant
légal du nouvel organisme de recherche,
Wolfram Sievers, avait pour seule formation une acti­vité dans l’édition, et ne possédait aucun diplôme universitaire. Il avait
par contre des relations influentes et utiles
dans les milieux du « germanisme ». Il resta
en place à la tête du « Ahnenerbe » (Héritage
des ancêtres) selon son titre officiel depuis
1937, jusqu’à la fin de la guerre.
Dans les premières années, les travaux au
sein de cet organisme « culturel » furent divers, touchant aussi bien à la transmission
des contes germaniques qu’à la linguistique.
Mais le terme, vague, de « Germanistique »
(Germanenkunde), était courant dans de
nombreux milieux. La notion de « nordique »
comme facteur unificateur de populations
séparées fut peu à peu rejetée au profit, justement, de « germanique ». Des discussions
sans fin avaient lieu autour des notions de
« peuple », de « chef » (Führer), d’« action »,
de « détermination » (Entschiedenheit),
d’« Empire » (Reich).
Un des éléments fondamentaux à ­l’origine
de ces discussions n’avait pourtant rien de
scientifique : il s’agissait de rivalités ­féroces
entre organismes et personnalités du ­régime.
On retrouve ce phénomène à toutes les
étapes de l’évolution de l’« Héritage des ancêtres ». À sa création, on trouvait aux côtés
d’Himmler un autre nazi éminent, Richard
Walther Darré, ministre de l’Agriculture et
de l’Alimentation et « Führer » de la paysannerie allemande. Darré avait soutenu
ce projet d’Himmler dès le départ, entre
autres en mettant à sa disposition un certain nombre de ses propres collaborateurs.
Pourtant une brouille intervint entre les
deux hommes en 1937, ce qui renforça finalement la position d’Himmler. Disons de
suite que ce type de luttes pour le pouvoir
entre partisans d’idées voisines a accompagné le fonctionnement du régime nazi du
début à la fin, et l’« Héritage » en particulier, émanation directe d’Himmler et de la
SS, n’a pas fait exception, surtout après le
début de la guerre.
En effet, les premières années d’existence
de cet organisme un peu flou n’ont pas entraîné une activité débordante, mais elles ont
donné des indications sur les pistes que souhaitaient suivre les participants à cet « effort
culturel » de la SS. En particulier, l’activité
dans le domaine de la « Germanistique »
n’était pas seulement l’ébauche d’une discipline scientifique, mais avant tout un programme idéologique et un domaine idéal de
propagande. Ce n’était pas la notion d’un
Etat-Nation, qu’il fallait faire entrer dans
les esprits, mais d’un peuple « germanique
et allemand », réunissant des populations
du nord et du nord-ouest de l’Europe, descendants de peuples germaniques et donc
membres « organiques » d’un même peuple.
Ce n’est pas un hasard si la notion d’un héritage « indoeuropéen », tel qu’on l’étudie
dans de nombreux pays, dont le nôtre, était
connu en Allemagne comme « indogermanique ». En 1937 Himmler avait ainsi voulu la création au sein de l’« Héritage » d’une
section chargée d’étudier l’existence de
liens entre l’Italie et la Grèce et des ­facteurs
« indo­germaniques et aryens »…
vivant à travers le monde, et concernant
les questions de langue, les chansons traditionnelles, les usages, des données sur la
construction des logements, l’habitat et les
types d’agglomération.
Des champs d’action
en Scandinavie,
aux Pays-Bas et en Belgique
La Seconde Guerre mondiale offrit, avec
l’invasion nazie des pays de l’ouest et du
nord de l’Europe, l’occupation de la Norvège
et du Danemark, puis des Pays-Bas et de
la Belgique, un nouveau champ d’action
pour l’« Héritage ». Le 1er août 1940, Hans
Ernst Schneider, qui connaissait bien la
Hollande et avait souhaité y travailler pour
l’« Héritage », prenait ses fonctions à La Haye.
Le régime d’occupation du pays différait du
© Bundesarchiv
O
n sait qu’Himmler, maître de toutes
les polices nazies (Reichsführer),
était imbu d’une supériorité de la
« race » germanique, à laquelle des puissances tutélaires auraient prévu de confier
la maîtrise sur le monde et rêvait constamment aux moyens d’y parvenir. Il était
membre de plusieurs sociétés, secrètes ou
non, comme les « Artamans » et cultivait
constamment l’idée de faire progresser l’influence et le pouvoir germaniques. À peine
arrivé au pouvoir avec Hitler, on le voit ainsi
visiter un château mythique, Wewelsburg,
qui l’impressionne, et où il rêve aussitôt de
créer une « Ecole du Reichsführer pour la
SS », où ses troupes préférées seraient éduquées dans l’esprit d’un « Ordre militaire
d’hommes à l’esprit nordique », à travers
une « idéologie proprement allemande »
et par l’« enseignement des valeurs germaniques ». Il voulait pour cela situer ces buts
éducatifs racistes, pseudo-religieux, sur une
base « scientifique ». Donc on rassembla des
« chercheurs », des « scientifiques » tous
nazis et SS, un groupe très éclectique, archéologues, ethnographes, historiens, généa­
logistes, etc. (1) Le Centre de Wewelsburg
n’eut aucun avenir, ses recrues étant laissées à elles-mêmes, sans direction, plan de
­travail ni directives concrètes.
Himmler avait constamment de nouvelles idées, se posait de nouvelles questions, et ses moyens lui permettaient dans
chaque cas de lancer un favori du moment
à la recherche d’une réponse à la question
soulevée. En particulier, ouvert à toutes les
divagations para-scientifiques, il était profondément convaincu d’une origine « exceptionnelle » des Germains. Comme d’ailleurs
Hitler lui-même ou Goering, il était persuadé que ce « peuple supérieur » ne dépendait
pas, comme les autres humains, des lois de
l’évolution, mais d’un phénomène particulier dans lequel des particules de glace extraterrestres auraient contribué à la création
d’une « race » exceptionnelle. Bizarrement,
il en résultait chez lui un intérêt pour la recherche scientifique, dont la raison d’être,
à ses yeux, devait être de confirmer ses intuitions. C’est pourquoi, dans les faits, les
résultats de recherches qu’il avait ordonnées restèrent souvent dans les cartons, s’ils
ne confirmaient pas ses idées préconçues.
L’une des cautions scientifiques d’Himmler au sein de l’« Héritage des
ancêtres » fut l’indogermaniste Walther Wüst de l’Université de Munich. On le
voit ici en uniforme SS faire un exposé sur le thème « Le Mein Kampf d’Hitler
- miroir d’une conception aryenne du monde » devant une assemblée de SS à
Munich en 1937.
D’autres travaux furent entrepris ou plus
souvent envisagés. Ainsi un Dictionnaire
de Germanistique devait rassembler sur
une base interdisciplinaire des éléments
de linguistique, de recherches culturelles,
d’histoire du droit et de l’implantation des
populations, décrivant dans le détail tout ce
qui concernait la vie, l’histoire, les croyances,
la langue, l’habitation, le regroupement,
le cadre juridique, les usages et l’idéologie des Germains. Un autre grand projet
de l’« Héritage » était un Atlas de l’Ethnographie allemande, qui avait atteint un certain développement. Au printemps 1939,
les responsables se trouvaient déjà à la tête
de 120 cartes, établies sur la base de questionnaires remplis par 23 000 Allemands
reste de l’Europe, dans la mesure où l’autorité était civile, avec un Commissaire du
Reich, Seyss-Inquart, dont les collaborateurs
firent tous leurs efforts pour éviter de laisser trop de pouvoir à la SS et à Schneider.
Malgré des instructions claires d’Himmler
pour une coopération, c’est seulement à l’été
1942 qu’un accord finit par être conclu par
Schneider avec la « Direction des Volontaires
germaniques » (Germanische Freiwilligen
Leitstelle), dont le recrutement de volontaires pour la Waffen SS n’était pas le seul
rôle. À cette époque, on commence à employer un terme nouveau, celui d’« Action
scientifique germanique » (Germanischer
Wissenschaftseinsatz), autour duquel finira
par se construire l’activité de l’« Héritage ».
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À Himmler (donc à la SS) était réservée l’autorité suprême sur cette activité de « négociations avec tous les groupes populaires
germaniques au Danemark, en Norvège, en
Belgique et aux Pays-Bas ».
Les Pays-Bas étaient un terrain favorable,
très loin au-dessus des autres régions visées par ces prétentions, comptant quelque
1 800 militants locaux. Plusieurs associations nationales existaient, ainsi que des
groupements régionaux, rassemblant par
exemple des représentants des communautés frisonne, saxonne ou franque, présentes
respectivement au nord-ouest, au nord-est
et au sud du pays. Une activité culturelle
existait entre ces groupements, et une revue, Hamer (Marteau) connut une existence
assez longue, et fut également diffusée dans
d’autres pays visés par l’appétit germanique.
C’est seulement au début de l’été 1942 que
Schneider se rendit à Bruxelles en vue de
mettre en route une activité « germanisante »
en Flandre. Contrairement aux Pays-Bas, les
autorités d’occupation nazies en Belgique (et
conjointement dans le nord de la France)
appartenaient à la Wehrmacht, et les rapports entre celle-ci et les SS n’étaient pas, là
comme ailleurs, au beau fixe. Fin 1942 fut
créé un « Groupe de travail germanique de
Flandre », accepté par la Wehrmacht. Des
fouilles archéologiques furent préparées,
entre autres, par un chercheur suédois, Eric
Oxenstierna, qui prévoyait par ailleurs des
travaux pour démontrer une origine « préromaine » des Flamands. L’avance des troupes
alliées à l’été 1944 mit fin à ces efforts, qui
avaient été accueillis avec d’autant plus de
réticences par les groupes visés, qu’il était
devenu clair que leur but final était une
sorte de vassalisation. Quant à la « Flandre
française », une notion datant de CharlesQuint et de l’occupation espagnole, elle resta
marginale dans les préoccupations nazies.
La population frisonne aux Pays-Bas et en
Allemagne posait un autre problème, dans
la mesure où on y trouvait constamment un
arrière-fond indépendantiste, incompatible
avec l’idée fédératrice du germanisme. La
société du « Paysage de Frise orientale » fut
pourtant admise à fréquenter l’« Héritage »
et l’« Action scientifique » en mai 1943, mais
une méfiance systématique bloqua toute
coopération durable.
C’est au printemps 1942 que les responsables de l’« Héritage », Schneider et Sievers,
cherchèrent à étendre l’activité de l’« Action
scientifique germanique » aux pays scandinaves. Le Danemark, étant donné sa situation spéciale, resta un peu à l’écart [voir
encadré], mais la Norvège était directement
visée, et un bureau de l’« Héritage » fut ouvert à Oslo en septembre 1942. Les perspectives étaient moins bonnes qu’aux Pays-Bas.
La Norvège était déjà occupée depuis deux
ans, et les autorités nazies ne souhaitaient
pas voir intervenir des instances nouvelles.
Contrairement aux Pays-Bas, il n’existait
pas de contacts anciens avec des partisans
de l’idée « germanique », et les services du
nazi norvégien Quisling voulaient maintenir l’indépendance de leur pays et le caractère national et indépendant de la Norvège.
Même un groupe publiant un mensuel favorable aux nazis et à la notion de « germanité » rejetait l’idée d’une allégeance
aux Allemands, tout en détestant Quisling.
Wallons, Bretons,
Finlandais… tous germains !
L’« Action scientifique germanique » de
l’« Héritage » ne se contentait pas des grands
domaines ethniques classiques pour l’imaginaire germanique. L’exemple le plus farfelu étant sans doute illustré par les visées
sur la partie francophone de la Belgique, les
Wallons. Un historien de Cologne, Petri,
avait construit en 1937 sa thèse de doctorat
sur « la migration de branches franques au
début du Moyen-Age ». Il arrivait à la conclusion que l’espace compris entre la Seine et le
cours moyen du Rhin était « le noyau de la
culture franque », et présentait un caractère
« germanique ». C’est sur cette base que le chef
du mouvement fasciste belge Léon Degrelle
avait, dans un discours de janvier 1943, parlé
du « caractère germanique de la population
wallonne ». L’« Héritage » n’eut pourtant qu’en
mars 1944 l’autorisation d’impliquer cette
région dans ses programmes. Etant donné
l’évolution de la guerre, c’était un peu tard…
Un autre groupe attirait depuis longtemps
les militants du germanisme : les Bretons.
Aux 17e et 18e siècles, une « parenté celtogermanique » était une évidence. L’idée
fut largement rejetée au 19e. Elle réapparut en Allemagne après la Première guerre.
Bretons, Irlandais et Ecossais étaient considérés comme descendants directs des Celtes.
L’« Héritage » avait lancé des « études celtes »
dès 1937, les Bretons en étant pour eux des
descendants directs. En 1940, des contacts
s’établirent entre nazis et séparatistes bretons, les « recherches scientifiques » se doublant de missions de la police politique (SD),
et de préoccupation stratégiques. Pour un
des responsables de « recherches », les études
celtes « offraient la possibilité de mettre aussi
la science directement au service de la guerre
et par là, du peuple allemand ». L’idée de
favoriser un « soulèvement » breton et la
création d’une région autonome a motivé
en partie les efforts nazis sur ce plan.
Troisième groupe ethnique visé par les
« chercheurs » nazis : les Finlandais. Leur
origine un peu mystérieuse autorisait bien
des divagations. La guerre qu’ils menaient
contre l’Union Soviétique ajoutait pour les
nazis un caractère positif supplémentaire
à cette population, bien qu’il soit difficile
de les assimiler aux Germains, quoi qu’en
ait pensé Himmler. Finalement les responsables semblèrent se mettre d’accord sur la
notion de « Germaniques par la culture »
(Kulturgermanen), sur laquelle devait travailler l’« Héritage ». Des efforts auxquels
l’armistice entre Finlande et URSS de septembre 1944 mit fin brutalement.
L’« Héritage des ancêtres »
affecté à la recherche
médicale de guerre
Jusqu’à 1942, les « travaux » de l’« Héritage
des ancêtres » ont donc essentiellement porté sur des questions de parenté supposée
de populations réparties dans une grande
partie de l’Europe. Il fallut la guerre et son
évolution inattendue pour les nazis, avant
que des préoccupations médicales se fassent
jour. C’est en janvier 1942 que Wolfram
Sievers reçut l’ordre d’Himmler de créer
un premier « Institut » de recherche médicale, consacré à la lutte contre les parasites, cela dans le contexte d’épidémies
ravageuses, le typhus par exemple, ou la
malaria. Ce fut aussi l’occasion de lancer
dans les camps de concentration des expérimentations sur l’homme, coûtant la vie à
de nombreux détenus (2). Début juillet 1942,
c’est un vaste ensemble, un « Institut de recherches scientifiques appliquées à la guerre »
(Wehrwissenschaftliche Zweckforschung) qui
devra être mis sur pied par l’« Héritage des
ancêtres » et Sievers.
On ne peut ici que résumer les tâches de
la dizaine de groupes de travail prévus,
dont plusieurs ne purent jamais commencer leur activité avant l’effondrement hitlérien. Connus d’après l’initiale de leur chef,
on trouve la Section R (Rascher), célèbre par
les expériences sur des concentrationnaires,
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se consacrer aux problèmes stratégiques et
tactiques particuliers, adaptés aux régions
calcaires truffées de grottes et de cavernes
présentes dans certaines zones du monde.
Deux autres sections auraient dû se consacrer, l’une aux régions frontalières, l’autre à
la génétique des plantes. Le temps manqua…
Pourtant Schneider (3) et Sievers continuèrent à faire des plans pour l’avenir
jusqu’en 1945, imaginant sans fin des tâches
nouvelles pour les intellectuels nazis sous
l’égide SS. Par ailleurs, de nombreux universitaires s’étaient engagés dans des activités comparables, par exemple l’« Action
Ritterbusch », définie comme « Contribution
des sciences de l’esprit à la guerre », soutenue par 730 professeurs d’université de 18
L’ « Action germanique » au Danemark
Le cas du Danemark est particulier. Son
gouvernement avait décidé le 9 avril
1940 d’accepter sans opposition une
occupation nazie, et c’est un responsable
du ministère allemand des Affaires
étrangères qui représentait l’occupant. En
octobre 1942, il fut remplacé par un nazi
de haut rang, Werner Best, qui avait fait
ses preuves en Pologne en participant aux
atrocités des « Groupes d’intervention »,
et avait ensuite eu un rôle dirigeant au
sein de l’occupation en France, entre
autres dans les mesures contre les juifs. Le
ministre Ribbentrop tenant à conserver
l’autorité sur le Danemark, Himmler dut
attendre son accord, en juillet 1943, pour
y lancer l’« Action germanique ». Jusquelà, un « Institut scientifique allemand »
(DWI) existait depuis mai 1941, mais c’est
seulement un nouveau directeur nommé
en juin 1943, Kersten, qui put mettre
touchant aux questions importantes pour
l’aviation du manque d’oxygène en vol à
haute altitude, ou de la survie dans une eau
glacée. Des travaux portaient aussi sur un
produit anticoagulant (et accessoirement,
découlant de cette dernière recherche, sur la
production de flocons de pommes de terre).
La Section P (Plötner) travaillait sur un autre
anticoagulant et sur les gaz de combat. La
Section H (Hirt) étudiait les dégâts causés
par le gaz asphyxiant Lost (gaz moutarde),
et travaillait également de façon nouvelle
sur l’utilisation de la microscopie par fluorescence. L’Institut entomologique (May)
travaillait sur les parasites et recherchait
en particulier la possibilité de tirer parti de
maladies capables de les détruire naturellement. Enfin une Section mathématiques
(Boseck) était au service de tous ceux parmi les chercheurs qui avaient à effectuer des
calculs hors normes pour le Conseil de la
recherche du Reich, l’armée ou l’industrie.
D’autres « Sections » étaient prévues, mais
ne purent entrer en fonctions avant la fin
de la guerre. Il s’agissait par exemple d’une
Section Recherches sur l’élevage (Schäfer),
visant essentiellement des chevaux valables
pour l’armée, mais aussi de race résistante
à l’effort et au froid, en vue de les mettre au
service des « colons » qui iraient peupler
les territoires conquis dans l’est. Une autre
Section de Recherches scientifique militaire
sur les régions karstiques (Brand) aurait dû
en train une activité « scientifique ».
L’« Héritage » n’avait pas droit de cité
officiellement dans le pays, mais quelques
travaux furent entrepris sous son
égide, travail linguistique sur les runes,
archéologie préhistorique, et finalement
un de ses rôles consista à organiser,
autant que possible, la protection de
restes importants de fortifications
préhistoriques dans le Jutland. La
Wehrmacht, craignant des attaques alliées
à cette frontière germano-danoise et sur
la côte ouest, avait en effet entrepris des
terrassements qui menaçaient gravement
ces témoins du passé. Les mauvaises
langues ont prétendu que ces efforts de
Kersten soutenus par l’« Héritage », et
son « Action germanique » au Danemark,
avaient pour but essentiel de le rendre
« indispensable » et de lui éviter d’aller au
front…
­ isciplines. Il fallut la capitulation nazie pour
d
mettre fin à ces gesticulations dangereuses.
Mettre fin momentanément, il faut le dire,
car on trouve encore aujourd’hui, ici ou là,
des partisans d’un germanisme dont il n’est
pas certain qu’il soit toujours envisagé de
façon purement scientifique.
Jean-Luc Bellanger
(1) Un article du PR a été consacré à « Himmler
et le château de Wewelsburg » en mars 2007.
(2) Sievers, pour son implications dans les essais
« médicaux » entre autres sur des détenus des KZ
a été jugé dans le cadre du « Procès des médecins » à Nuremberg (voir le PR de janvier 2014
sur les « autres » procès de Nuremberg). Sievers,
condamné à mort, a été exécuté en juin 1948.
(3) Schneider réussit après la guerre à suivre une
carrière universitaire brillante sous un faux nom.
Sa vraie identité ne fut découverte qu’en avril 1995.
n Julien REITZENSTEIN, Himmlers Forscher,
Wehrwissenschaft und Medizinverbrechen im
« Ahnenerbe » der SS, (Les Chercheurs d’Himmler,
Science de guerre et médecine criminelle au sein
de l’« Héritage des ancêtres » de la SS), Ed.
Ferdinand Schöningh, Paderborn, 2014.
n Malte GASCHE, Der « germanische
Wissenschaftseinsatz » des « Ahnenerbes »
der SS 1942-1945, (L’« Action scientifique
germanique » de l’« Héritage des ancêtres »
de la SS 1942-1945), Ed. Habelt, Bonn, 2014.
(Les deux ouvrages ne sont pas traduits).