Comment mener campagne depuis l`hôpital

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Comment mener campagne depuis l`hôpital
LE TEMPS
MERCREDI 7 SEPTEMBRE 2016
10 Suisse
Un marathon électoral en mille miettes
FRIBOURG L
e président du PLR fribourgeois, Didier Castella, a eu un grave accident de quad cet été au Canada. Il livre son récit
depuis la Clinique de réadaptation de Sion, où il recolle les morceaux et pense aux élections cantonales
ne s’en émeut pas autrement et
assure qu’actuellement l’ambiance est très bonne, bien meilleure qu’à gauche. Et alors que
tous les candidats se pressent aux
multiples manifestations populaires des fins de semaine, il ne
MAGALIE GOUMAZ
t @magaliegoumaz
L’image restera encore longtemps gravée dans sa mémoire:
celle d’un quad qui lui retombe
dessus. Président du Parti libéral-radical fribourgeois, Didier
Castella est un miraculé. Parce
que ce fameux 23 juillet, quelque
part dans l’Ouest canadien, en
Colombie-Britannique, il a cru
vivre son dernier jour. Il s’en sort
avec un total de 18 fractures, au
bassin, aux côtes et aux vertèbres, et les ligaments d’une
épaule déchirés. Le 16 août, il a
été transféré à la Clinique
romande de réadaptation à Sion
où, après une énième séance de
physiothérapie, il raconte son
accident et explique comment il
gère un parti à la veille des élections cantonales de cet automne.
«Je passais mes vacances en
famille et, un matin, je suis parti
faire du quad avec deux amis.
Nous étions sur le chemin du
retour, heureux, car nous avions
franchi des rivières, grimpé sur
des rochers. On revenait donc
tranquillement en roulant sur
l’herbe, en droite ligne, et j’en
profitais pour regarder le paysage. Si bien que je n’ai pas vu
qu’il y avait un trou. J’ai été éjecté
du quad. Et je me souviens
encore de mon soulagement,
j’étais juste étalé dans l’herbe.»
Sauf qu’à la même seconde, il voit
le quad, un engin de près de 400
kilos, qui va l’écraser avant de
faire plusieurs tonneaux et de
s’immobiliser.
Au milieu des ours
Didier Castella reste conscient.
«Je pouvais bouger. Ça m’a rassuré sur l’état de ma colonne
vertébrale. Par contre, j’ai immédiatement senti que mes jambes
n’étaient plus tenues au bassin.»
Par chance, le trio est bien
équipé et a emporté un téléphone satellitaire pour appeler
les secours. Sauf qu’en pleine
nature, loin de tout, ses deux
compagnons de galère doivent le
laisser seul pour accueillir et
guider les ambulanciers. «Ils
n’avaient pas le choix étant
donné qu’ils devaient franchir
un passage en s’assurant»,
explique-t-il.
«Il y avait des ours
dans cette région.
Et le soleil a
commencé à taper.
Je comptais les
minutes, j’essayais
de me distraire
en pensant à
une bonne bière
sur une terrasse»
DIDIER CASTELLA
Didier Castella à Sion, dans son centre de réhabilitation. (OLIVIER MAIRE/PHOTO-GENIC.CH)
Le blessé passe les heures les
plus longues de sa vie. «Il y avait
des ours dans cette région. Et le
soleil a commencé à taper. Je
sentais aussi qu’une poche de
sang se formait, près du bassin.
J’étais inquiet à l’idée d’une
hémorragie interne. Je comptais
les minutes, j’essayais de me distraire en pensant à une bonne
bière sur une terrasse.» L’arrivée
des ambulanciers n’y changera
rien: il faut encore attendre l’hélicoptère. Lequel arrivera plus
de quatre heures après l’accident. «Les distances ne sont pas
les mêmes qu’en Suisse. L’hôpital le plus proche est à Kelowna,
à près de 400 kilomètres du site
où nous nous trouvions.» Didier
Castella n’est pas au bout de ses
peines. L’appareil ne pouvant
pas se poser à proximité, il doit
être déplacé en pick-up.
Passons sur les problèmes
d’assurance, qu’il doit régler
malgré son état, sur les douleurs
que même la morphine n’atténue pas, sur l’impossibilité de
dormir, sur la prise en charge
canadienne. «Après une première opération du bassin à
Kelowna, je me suis battu pour
rentrer. Mon anglais étant
moyen, la communication était
difficile. Au Canada, les soins
coûtent aussi très cher, près de
trois fois plus qu’en Suisse. Et
puis ce n’était que des fractures.
Aucun organe n’était touché.»
Un diagnostic qui lui a très vite
remonté le moral. «Au début, à
l’hôpital de Kelowna, j’étais
content d’être seul, qu’on ne me
voie pas dans cet état. Mais, dès
que le médecin m’a annoncé que
seuls les os étaient touchés et
que les os, ça se réparait, j’ai
retrouvé le moral et j’ai eu envie
de rentrer le plus vite possible.»
Le Fribourgeois est alors transporté de Kelowna à Vancouver,
puis de Vancouver à Zurich, sur
un vol de ligne. «J’étais attaché
sur un brancard mais j’ai passé la
douane comme tout le monde.
Une fois les passagers assis, on
m’a soulevé pour m’installer
au-dessus des sièges, collé au plafond.» Trente heures de voyage et
il arrive en Suisse le 5 août pour
être hospitalisé à Fribourg.
A Fribourg, justement, où il est
très attendu. Par ses proches,
mais aussi par son parti. Président du PLR, Didier Castella est
au front depuis 2013. Depuis la
conclusion d’une entente entre
les partis de droite en vue des
élections cantonales, qui auront
lieu au mois de novembre. UDC,
PDC et PLR unis? Du jamais-vu
pour un objectif commun: faire
barrage à la gauche unie et décrocher une confortable majorité au
gouvernement avec cinq élus de
droite pour sept sièges. Ce qui,
pour le président fribourgeois du
PLR, serait conforme au poids
politique des trois partis à l’issue
des élections fédérales de cet
automne. La Convention de 2013
stipule qu’en fonction des résult at s d u p r e m i e r t o u r, l e
6 novembre, cinq candidats au
maximum se lancent pour le
second tour, chaque parti ayant
la garantie de présenter au moins
une personne le 27 novembre.
Le secret: déléguer
Rien n’est fait. Cette entente est
sous le feu des projecteurs. Elle a
déjà connu des ratés que chacun
s’empresse de commenter. Sur sa
chaise roulante, Didier Castella
PANORAMA
La LAT empoisonne le parlement
VALAIS Pour appliquer la loi sur
l’aménagement du territoire, le
Grand Conseil soutient le projet
du gouvernement, «moins mauvaise solution possible». L’UDC
dénonce un projet «précipité et
rigide»
Les débats tournent au bras de
fer entre l’UDC et le ministre
démocrate-chrétien Jean-Michel
Cina. Pour le conseiller d’Etat,
«l’UDC veut rejouer un combat
que le Valais a perdu devant le
peuple Suisse». En mars 2013,
seuls les Valaisans avaient refusé
la révision de la loi sur l’aménagement du territoire (LAT), à près
de 80% des votants. Aujourd’hui,
le parlement doit donc élaborer
une loi d’application, alors que
ses députés n’en ont aucune
envie. En Valais, deux tiers des
3300 hectares de zones à bâtir
encore vierges devraient redevenir des terrains agricoles, perdant plus de 90% de leur valeur
marchande. Un vent de panique
souffle dans les quelque 90 communes concernées.
Pour concilier exigences fédérales et sensibilités locales, le
ministre Jean-Michel Cina a élaboré une sorte d’exception valaisanne. Alors que la LAT définit les
zones constructibles sur la base
des projections démographiques
pour les quinze prochaines
années, le gouvernement espère
définir des périmètres d’urbanisation calculés sur trente ans. Il
espère ainsi limiter les dézonages,
en classant 1200 hectares en
«zones réservées». Ces terrains
ne seraient ni équipés, ni
construits, mais ils ne redeviendraient pas non plus agricoles.
Leur sort futur dépendrait des
besoins de chaque commune,
régulièrement redéfinis.
Pour l’Office du développement
territorial, cette démarche paraît
conforme au droit fédéral: «Il est
compréhensible que le canton
opte pour un horizon de deux
périodes de planification.» Mais
les fonctionnaires fédéraux préviennent: si les adaptations législatives ne vont pas «dans le sens
proposé», l’approbation du plan
directeur «serait pour le moins
remise en question». Et si celui-ci
n’était pas homologué par la
Confédération d’ici au 1er mai
2019, «il en résulterait une interdiction absolue de mise en zone»,
selon un avis de droit produit par
l’Etat du Valais.
La LAT, «responsable de la
hausse du taux de suicides»
Dans les jours qui ont précédé
la session parlementaire, le débat
s’est enflammé. Le Groupement
des populations de montagne a
exigé davantage de souplesse dans
le projet, et la Chambre de commerce et d’industrie a estimé que
son application générerait une
perte économique de 4,8 milliards de francs dans le canton.
Pour l’UDC, «nous assistons à des
exigences dignes de l’ancienne
URSS». Selon le député Patrick
Fournier, cette «loi absolument
toxique» serait même responsable de l’augmentation des suicides en Valais: «Tous ceux qui
collaborent savent à présent qu’ils
auront du sang sur les mains.»
Mardi, le parlement a voté son
soutien au projet du gouvernement malgré tout. Au micro, une
députée résume: «C’est la moins
mauvaise solution possible.» Le
Grand Conseil a aussi rejeté la
plupart des nombreuses propositions de l’UDC, qui avait
demandé et obtenu un débat spécial. Selon Grégory Logean, qui
mène la fronde, le gouvernement
«précipite» une application
rigide de la LAT. Jean-Michel
Cina réfute: «Il nous demande de
ne pas respecter la loi.» Le parlement se prononcera vendredi
sur une septantaine d’amendements à ce projet sur lequel les
Valaisans voteront. n
XAVIER LAMBIEL
t @XavierLambiel
compte rien manquer. Ces deux
derniers week-ends, il a pu rentrer à Fribourg. «Et je teste avec
succès ce que nous avons mis en
place en 2012 déjà: la délégation
des tâches.» Il relève également
que les décisions les plus importantes ont été prises. «Les candidats sont nommés, notre programme est sous toit, ainsi que le
budget et notre politique de communication», explique-t-il. Ordinateur sur les genoux, téléphone
portable à portée de main, il coordonne la campagne à distance.
«Et ça fonctionne très bien»,
assure-t-il. Lui-même sollicite un
nouveau mandat de député au
Grand Conseil. Et, professionnellement, il garde également un œil
sur ce qui se passe du côté de
Berne, où il travaille pour le
Département de la défense, de la
protection de la population et des
sports.
Ses médecins se prononceront
le 30 septembre sur la suite du
traitement. Didier Castella
espère pouvoir bientôt remiser
sa chaise roulante et se déplacer
avec des cannes. On peut parier
qu’il ne manquera pas la Bénichon. n
Famille kurde arrêtée
MAIS ENCORE
Egalité
Les efforts doivent
être poursuivis
pour assurer
l’égalité salariale.
La Confédération
et 25 cantons et
communes de
Suisse ont signé
une charte mardi
à Berne en
présence du
ministre de
l’Intérieur, Alain
Berset. L’égalité
des salaires reste
un thème de
politique
communale,
cantonale et
fédérale, a
souligné Alain
Berset. ATS
A Genève, une fratrie de Kurdes de Syrie a
été arrêtée par la police mardi matin, alors
qu’elle se rendait à l’Office cantonal de la
population pour une formalité
administrative. La gauche dénonce un
nouveau cas d’application inhumaine des
Accords de Dublin. Le jeune homme et ses
deux sœurs, âgés de 22 à 25 ans, allaient
obtenir le renouvellement provisoire d’un
document. «Ils ont été arrêtés par la police
sur un parking», a indiqué la conseillère
nationale écologiste Lisa Mazzone,
confirmant une information de Tdg.ch. ATS
Promouvoir
le don d’organes
La Suisse continue de manquer d’organes à
transplanter. Davantage de Suisses devraient
dire s’ils acceptent ou non d’être donneurs.
Une nouvelle campagne a été lancée mardi à
Berne. La carte est désormais distribuée avec
un double qui sert à informer ses proches.
La Suisse connaît depuis longtemps une
pénurie d’organes, a relevé le ministre de la
Santé, Alain Berset. ATS