« L`éternité et un jour » à Naplouse

Transcription

« L`éternité et un jour » à Naplouse
Témoignage
Témoignage
particulière, les différents marchands
criant pour vendre leurs produits et les
klaxons résonnant sur des airs d’Oum
Koulthoum, de Fairouz ou, plus récemment, de Mohammed Assaf, le vainqueur
d’Arab Idol originaire de la bande de
Gaza, extrêmement apprécié dans toute
la Palestine. On aperçoit également sur
OD SOXSDUW GHV SRUWHV GHV DIÀFKHV PDO
réalisées, souvent décolorées, des différents « martyrs » originaires de Naplouse.
D’un coup, on décide de s’arrêter au coin
d’une ruelle pour déguster un kanafeh,
dessert local composé de fromage de
chèvre doux et fondu et parsemé de sucre
d’un orange vif présenté dans un énorme
plat rond typique.
« L’éternité et un jour »
à Naplouse
Laissez-moi vous conter la Palestine telle que je la vis : Une journée démarre chouay chouay lentement,
agréablement réveillée par le soleil dardant déjà ses rayons brûlants quelques heures seulement après
son apparition. On prépare son petit-déjeuner, souvent composé de khoubs, le pain pita local, d’œufs
et de fruits, que l’on prendra sur la terrasse. On regarde la ville de Naplouse se réveiller peu à peu au
son des klaxons et du premier appel à la prière, le temps s’arrête et on en se dit que la journée sera
encore choop alyaoum, chaude aujourd’hui.
Après que vous ayez répondu ila Bureen,
à Bureen, les chauffeurs vous indiquent
du doigt l’endroit où le taxi devrait
normalement se trouver ou demandent
à leurs collègues. Parfois on le trouve
directement, parfois on tourne un peu en
rond ; les uns et les autres vous renvoyant
à différents emplacements, jusqu’à ce
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tin, heureux, d’avoir trouvé le bon taxi,
on s’installe et on patiente. Le taxi ne
démarrera qu’une fois qu’il sera rempli.
L’attente peut durer de cinq minutes à
une demi-heure, une heure. Tout dépend
de l’heure et de la destination. En attendant, on peut prendre le temps de discuter avec les différentes personnes qui
se rendent au même village ou boire un
qahwa, café, ou un FKDL, un thé, acheté
au marchand ambulant qui marche en
rythme de ses cris et des verres qu’il fait
claquer entre ses doigts.
Une fois le taxi rempli, le chauffeur s’installe, on fait coulisser la grande porte
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jaune et on démarre. Durant le trajet,
les shekels, l’argent local, passent de
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DX FKDXIIHXU /HV SD\VDJHV GpÀOHQW GH
nombreuses collines arides, parsemées
de roche, de rocailles, d’oliviers et autres
plantes. Il est (trop) courant d’apercevoir,
perchées au sommet de celles-ci, entourant les villages palestiniens, des colonies
israéliennes, sises là par idéologie ou par
attrait économique. Il n’est pas toujours
évident de voir ces deux réalités s’affronter quotidiennement – l’une aisée vivant
un style de vie purement occidental,
l’autre vivant tant bien que mal avec ce
qu’on lui accorde.
Une fois arrivé, le chauffeur nous dépose,
souvent devant la mosquée, en balbutiant
un taffadal, voici, à quoi il sera correct
de répondre shoukran, merci. Dans le village, on gravit les quelques escaliers de
pierre, souvent détériorés par le temps,
qui mènent au centre où les enfants attendent patiemment notre arrivée. Il est
alors agréable de voir leur enthousiasme
lorsque, en franchissant la porte, on
leur envoie un salam aleykoum et qu’ils
répondent en cœur wa aleykoum salam
arborant des sourires indescriptibles.
Il est d’autant plus agréable de voir leur
intérêt pour toutes les activités proposées, que ce soit du français, de l’anglais,
des jeux, du coloriage, ils y répondent
chaque fois avec entrain. Il est vrai que
les activités n’aboutissent pas toujours
aux résultats escomptés, mais cela n’a
pas réellement d’importance. La réalité
est que, même s’ils ne prennent pas note,
leur intérêt leur permet de retenir une
grande partie des mots appris pendant la
leçon.
Le kanafeh terminé, on quitte alors le
souq pour remonter vers l’association,
en cherchant tant bien que mal l’ombre
dans les rues cette fois beaucoup plus
larges. Arrivé, on salue les différents
membres – locaux et autres volontaires
internationaux – puis on se rend au cours
d’arabe, au « one-to-one », échange de
cours de langues, ou on se prépare pour
la leçon de l’après-midi ou du lendemain.
L’ambiance mixte de l’association est
particulièrement agréable.
Durant nos quelques heures sur place,
l’hospitalité bien connue des Arabes se
fait ressentir. Une personne du village
nous apportera aimablement un FKDL,
un qahwa ou encore un a3ssir, un jus,
accompagné d’une friandise à grignoter
ou d’un pain garni de falafels ou de houmous.
Une fois la leçon terminée, vers midi, les
enfants partent en nous lançant PD·VD
lama, au revoir, accompagné d’un geste
de la main. Ils partent en dévalant les
escaliers et les pentes qui les ramèneront
au centre du village. Alors, les membres
de l’association seront toujours heureux
de prendre le temps de discuter avec
vous, de vous apprendre quelques mots
G·DUDEH HW GH ÀQDOHPHQW YRXV LQYLWHU j
partager un repas en leur compagnie, le
jour-même ou un autre jour. Lorsqu’il est
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un de leurs amis qui nous ramènera
aimablement au ELODG, au « pays », qui
désigne ici la ville de Naplouse.
Arrivé en ville, on prend le temps de
s’asseoir, de manger un pain pita falafel.
Ensuite, on se dirige vers Project Hope
– le partenaire du SCI - en déambulant
tranquillement dans les étroites ruelles
du souq désormais bondées d’hommes et
de femmes vaquant à leurs occupations,
colorées par les fruits, légumes et autres
matériels nécessaires au quotidien, parfumées par des nombreuses odeurs telles
que la na3na3, la menthe, ou la mere
miya, la sauge. La musicalité y est toute
Le soir, les activités sont très variées. Les
invitations à partager le repas sont nombreuses – quatre invitations familiales
en deux semaines - et il est également
courant de se faire inviter à un mariage.
PROJ ET
INTE RNAT IONA L
Le SCI recherche des
coordinateurs pour ses projets
internationaux en Belgique
Mohamed Namane, 2012 ©
A
près avoir préparé le matériel nécessaire pour les heures de cours
qui s’annoncent, on déambule au
travers des nombreux escaliers et des
rues étroites et sales du souq, marché,
encore vide à cette heure, pour se rendre
au parking où se trouvent les VHUYLFHV, les
taxis collectifs, qui nous amèneront aux
villages – Assera, Bureen - des alentours
ou au camp de réfugiés de Balata. Les
chauffeurs crient le nom des nombreux
villages où ils se rendent ou demandent
ZHLQ", où ?. Dans ce tohu-bohu, il faudra
trouver celui qui se dirigera vers la destination souhaitée.
leur vie quotidienne. Néanmoins, malgré
leur situation, à aucun moment, des discours de haine à l’égard des colons ou des
israéliens n’ont fait surface. Lorsque les
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se révèle un peu plus ardue, mais voulant tellement partager, ils font preuve
d’imagination et réussissent toujours
à trouver les gestes, les quelques mots
d’anglais qu’ils connaissent, les photos
ou autres pour faire passer leur message.
Ils seront aussi très intéressés, qu’à votre
tour, vous racontiez votre histoire, votre
pays, votre famille… Ils ne vous laisseront
Les rencontres sont quotidiennes et plus jamais partir sans avoir pris votre numéro
enrichissantes les unes que les autres. Il de téléphone, votre compte Facebook ou
VXIÀWELHQVRXYHQWGHSDVVHUGHYDQWXQH sans vous inviter amicalement à repasser
échoppe pour que le commerçant vous pour partager un moment auprès d’eux.
sourie en vous disant ahlan wa sahlan,
bienvenue, et vous invite à partager un /D MRXUQpH ÀQLH RQ UHQWUH j O·DSSDUWHchai en sa compagnie. Parfois de jeunes ment des volontaires – où je suis heureuse
ÀOOHV FRXUHQW DSUqV YRXV GDQV OD UXH HW de vivre dans les mêmes conditions que
insistent pour vous inviter à rencontrer les Palestiniens. On se pose, on prend le
leur mère et à, encore une fois, partager WHPSVGHYpULÀHUQRVPDLOVQRVPHVVDJHV
un café ou un thé. Accepter sera toujours et d’éventuellement discuter sur Skype
synonyme d’une bonne discussion. La avec les gens que l’on aime. On entend
première question sera toujours min wein alors le dernier appel à la prière émanant
des différentes lumières vertes des mosLQWL", « d’où viens-tu ? ».
quées, illuminant ici et là la ville…
Les conversations sont variées, mais il y
Anne-Sophie Fayt,
aura toujours un moment pour parler de
volontaire au SCI
politique. Les Naplousis vous raconteront
leur histoire, la vie durant la seconde
intifada, les années passées en prison,
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l’armée israélienne, les check points,
Il y a aussi pas mal d’activités culturelles,
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de documentaires, des concerts, des
rencontres d’organisations politiques,
une petite virée à Ramallah, la capitale
administrative de la Palestine, des piqueQLTXHVj6DPD1DEOXVHQGURLWVXUOHÁDQF
d’une colline d’où l’on a une vue sur
toute la ville… Sinon, on se rend simplement boire un a3ssir tamarin, un jus de
datte, en ville et il y aura toujours bien
quelqu’un qui sera heureux et curieux de
discuter avec vous.
Monter un spectacle de théâtre forum avec des demandeurs d’asile,
apporter une aide logistique au festival Esperanzah, faire des travaux
de sauvegarde la biodiversité avec
Natagora, encadrer des groupes
d’enfants dans une ferme d’animation qui travaille avec les ânes … Cet
été, nous organisons une quinzaine
de projets pour lesquels nous cherchons des coordinateurs. Votre rôle
est de faciliter la communication
au sein du groupe de volontaires
internationaux et avec l’association
d’accueil, l’organisation des temps
libres et de la vie sociale du groupe,
etc.
Si vous êtes intéressés, contactez
Marjorie : [email protected]
– 02/649.07.38
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