Consulter le compte rendu de Coussi Coussa 2010
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Consulter le compte rendu de Coussi Coussa 2010
Coussi-Coussa en 2010 Ca fait combien de temps déjà Coussi-Coussa ? Ah, quand même ! Et pourtant j’ai la curieuse impression que l’on vient juste de commencer, ou presque. Il faut dire qu’un duo « Coussi-Coussa clown à l’hôpital » c’est très particulier dans une démarche artistique et professionnelle. Ce n’est ni un spectacle, ni une intervention, ni une improvisation. Et c’est tout cela en même temps. Plus, tout ce qui vient s’ajouter tant au niveau de l’investissement que du ressenti ou de l’analyse. Le scénario de nos prestations est forcément toujours un peu le même : arrivée, prise de contact avec Elise et avec les gens éventuellement présent dans la grande salle, habillage /maquillage, travail dans la salle de jeu, puis passages en chambres. Le même déroulement donc mais, à chaque fois, une découverte demandant -exigeant- une totale écoute et une disponibilité permettant de comprendre l’instant et de coller au présent de l’enfant et de la famille, à l’évolution de la maladie. On trouve donc à la fois comme une habitude qui se pose du fait de la continuité, et un renouveau permanent du fait de la variété des situations. De l’habitude parfois naît la lassitude. Et nous n’y avons pas échappé. Il y a eu, et probablement y aura-t-il encore, des moments difficiles où le problème s’est posé ainsi : faut-il continuer ou s’arrêter ? Mais en réfléchissant à la question l’on (re)prend vite conscience que ce travail est bien plus qu’un boulot. Il va au-delà. Il est exigeant et épuisant, il nous questionne, il demande d’affronter et d’accepter des moments difficiles des départs injustes/ injustifiables (si tant est 1 qu’il y en ait de justes), mais il offre des instants rares, des échanges ô combien privilégiés, des rires fous inattendus profonds comme des bienfaits réciproques. Et puis cette conviction que le clown a indéniablement sa place en hémato, qu’il peut apporter des émotions, des provocations, des réactions, des décalages, des évasions qui, même si elles restent difficilement quantifiables, sont forcément bénéfiques. Donc continuer. Donc discuter. Donc se remettre en cause. Donc proposer et avancer. Avancer mais pas seuls. L’ambiance du service- et la manière dont nous nous sentons, ou pas, considérés par le personnel hospitalier- est importante pour nous. Il y a eu des critiques et des mises en garde plus ou moins voilées. « Faites attention à l’hygiène, au vocabulaire, au bruit que vous faites, à la discrétion… »Toutes choses effectivement cruciales auxquelles nous nous appliquons et vers lesquelles il est essentiel de nous ramener si nous nous en éloignons mais à tous ces niveaux, comme pour toutes les personnes travaillant dans ce milieu, au-delà de la critique, c’est d’accompagnement et d’échange dont nous avons le plus besoin. Au-delà de l’assistance c’est aussi la reconnaissance de notre travail qui nous permet de progresser. Il y a un moment où nous avons un peu douté, où nous avions parfois l’impression de ne pas répondre vraiment à un besoin, d’être sinon inutiles du moins perturbants. Cela tenait essentiellement à un relationnel pas toujours évident avec des membres du personnel qui s’arrêtaient parfois notre manière clownesque et semblaient ne pas comprendre ni notre fonction ni nos raisons essentielles d’être là . Aujourd’hui les choses vont mieux, très nettement. L’arrivé d’Elise a permis de fluidifier les rapports. La communication est à présent plus simple et pour nous c’est crucial. Cela, par exemple, ouvre la porte à des retours autres que critiques. Nous reviennent par son intermédiaire des mots de parents- dits ou écritset des réactions de malades. Réactions banales piochées dans le quotidien qui suit notre départ. 2 Rappels de nos clowneries et des rires engendrés qui reprennent de l’importance dans le fait d’en reparler, de les partager. Petites phrases « Kevin n’a accepté de revenir pour des soins que parce qu’il allait voir les clowns ». Ces retours nous nourrissent. Ils nous sont un baume pour les moments difficiles. Au-delà ils nous permettent de nous sentir inscrits dans la vie de l’hôpital. Nous n’y sommes pas indispensables et pourrions être remplacés mais la fonction du clown a pris racine dans le service, au-delà de l’animation. Nous aussi nous avons évolué. Nous avons gagné en maturité, en expérience. L’acte théâtral dans son sens spectaculaire a pris sa dimension. L’émotion est mieux canalisée. Le rapport au service mieux géré. Cela nous libère encore un peu et permet à d’autres rapports de s’établir. Le contact avec les parents s’est un peu modifié, il n’est pas rare qu’en dehors des interventions en chambre nous retrouvions des membres de la famille dans la salle de jeu. Nous avons alors un autre type de rapport qui peut déboucher sur une discussion soit sur l’enfant et les plaisirs clownesques que nous partageons, soit sur des généralités, soit sur l’aide et les prestations diverses que propose Myosotis. En corollaire bien sûr cela peut étirer notre temps de présence dans le service et il n’est pas rare d’être encore présents après 19h30 /20h00. Il est d’ailleurs notable que l’ambiance est très différente selon les heures. L’après-midi et jusqu’à 15h00 il y a la sieste, les soins l’instite, la blouse rose, Elise, pas mal de visites, tout cela un peu feutré à cause des petits qui dorment. Puis progressivement tout s’agite entre 14h30 et 17h30, pour à nouveau lentement s’apaiser. Beaucoup de parents doivent s’éloigner, les intervenants ont terminé leurs journées, les soins sont moins nombreux, passe le temps du repas. Vers 18h30 s’en vient déjà la préparation à la nuit. C’est un instant spécial. Encore actif mais plus calme, plus propice justement à certaines rencontres, certains échanges qui ne se font pas dans le tumulte (très relatif) de la journée et naissent dans l’apaisement (lui aussi relatif) et dans la séparation. Tout cela n’est pas coulé dans le béton, il ne s’agit que de ressenti, de choses difficiles à décrire. Parfois il n’y a pas de mots exprimés ou peu, c’est juste un regard, un jus de raisin partagé, ou simplement le fait d’être là en un temps inattendu. 3 Voilà pour les interventions. Pour ce qui est des rapports avec l’asso Myosotis je dois avouer que pour moi (Loïc) ils sont un peu distendus. Il est vrai que je ne suis pas adhérent de l’asso et en même temps je lui suis très attaché. Cette position un peu contradictoire entraîne une vision particulière. Je ne peux m’empêcher d’être un peu inquiet. Il me semble que tout cela est fragile parce que reposant sur bien peu de têtes et de bras. Il y a peu d’adhérents, peu de membres actifs, tout repose sur une poignée de gens. Que quelques uns se retirent et que restera-il ? Pourtant il faut que l’asso existe ! Au-delà des individus qui la compose son travail et trop important. Bien sûr c’est comme tout, les choses les meilleurs peuvent disparaître sans que personne ne se plaigne (surtout en ces années égocentriques) mais ce serait vraiment une perte énorme. Nous parlons de cela entre nous et sommes assez d’accord pour dire qu’il y a un déficit de communication et de recherche de nouveaux membres. Mais cela dit nous n’avons pas grand-chose à proposer. Il doit être possible de se rapprocher d’autres assos plus importantes médiatiquement ou en individus. Il doit y avoir moyen de communiquer mieux sur les actions entreprises. Peut-être faut-il trouver un professionnel pour aider le bureau dans cette optique. A voir. Enfin et pour en finir : Nous avons changé de producteur pour les contrats et les fiches de paye. André Clérot a accepté ce travail parce qu’il s’agissait de Myosotis et qu’il est sensible à nos préoccupations. Toutefois la somme qui lui reste après règlements est insuffisante (autour de 30 euros) pour l’ensemble du travail. Je crois qu’il serait souhaitable de bien discuter de cela afin que chacun y trouve son compte. La question se pose aussi pour le duo qui travaille sur les mêmes bases depuis le début de la collaboration. Cette question mérite que l’on s’y penche ou que, du moins, l’on y pense. Bien, voilà, il y a sûrement des oublis dans tout ça mais j’ai tenté de faire le tour en quelques lignes et cela « sérieusement » sans blagues ni jeux de mots laids ce qui quand même reste un exploit ! 4