Services à la personne : la plus-value coopérative
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Services à la personne : la plus-value coopérative
Rencontres Services à la personne : la plus-value coopérative Scop, coopératives d’artisans, banques coopératives... C’est l’ensemble du mouvement coopératif qui se mobilise pour relever le défi du développement des services à la personne. Laurent Hénart est député UMP et président de l’Agence nationale des services à la personne. ■ Un peu plus d’un an après le vote de la loi sur les services à la personne, comment jugez-vous l’état d’avancement de la filière ? Laurent Hénart. La loi vise à doubler le rythme de créations d’emplois durables dans un secteur déjà dynamique qui compte 1,3 million de postes et qui en a créé 70 000 de plus en 2004. Depuis janvier, le chiffre d’affaires enregistré avec le Chèque emploi service universel (Cesu) est chaque mois supérieur de 10 % à celui du mois équivalent de l’année précédente, avant sa création. Nous avions prévu 6 millions de Cesu préfinancés pour 2006. L’objectif est déjà atteint en neuf mois. Côté offre, on comptait 11 000 structures agréées au 30 septembre 2006, alors qu’il n’y en avait que 5 500 un an plus tôt. ■ Outre le nombre d’emplois, y a-t-il des indicateurs pour mesurer la qualification et la stabilisation des emplois ? Laurent Hénart. Il faut le reconnaître, nous manquons d’indicateurs pour éva28 • novembre / décembre 2006 Participer 620 luer l’évolution de la professionnalisation des emplois. Pour favoriser cette professionnalisation, nous allons mettre à jour des références d’emploi, de diplôme, de formation, et en débattre région par région. Ces débats se termineront le 13 décembre lors des Assises de la professionnalisation à Paris. Nous travaillons aussi à la manière de collecter et de structurer les données pour faire émerger des indicateurs clairs. ■ Quelle valeur ajoutée voyez-vous à l’exercice en Scop de services à la personne ? Laurent Hénart. C’est un système excellent pour favoriser l’initiative individuelle tout en mutualisant les frais de fonctionnement et l’administration. La Scop répond à l’attente de beaucoup de concilier indépendance et sécurité, dans le cadre d’une entreprise collective. ■ A ce stade de développement, avezvous identifié des freins inattendus ? Laurent Hénart. Beaucoup d’associations et de particuliers employeurs ont du mal à recruter car il n’est pas facile d’assurer la mise en lien entre les salariés disponibles et les employeurs qui manquent de personnel. Nous avons engagé un travail sur ce sujet avec l’ANPE, mais nous sommes confrontés au problème de l’emploi émietté et clandestin. Celuici devrait néanmoins se résorber en raison du facteur prix. En moyenne, le tarif d’une heure de prestation est de 18 €. Après déduction fiscale, il passe à 9 €, soit en dessous du prix pratiqué de la main à la main, généralement compris entre 12 € et 15 €. Si, en plus, le Cesu est en partie préfinancé par l’employeur, le tarif descend entre 5 € et 8 €. « Les artisans ne veulent pas rester en dehors de ce marché » FFCGA ANSP « 70 000 emplois créés » Alain Bonamy est secrétaire général de la Fédération française des coopératives et groupements d’artisans (FFCGA), qui représente 800 coopératives et groupements, soit 80 000 entreprises réunissant 183 000 salariés. ■ Les prestations de services à la personne sont assurées par des structures publiques, des associations, des particuliers, quelques entreprises privées. Quelle est la meilleure voie ? ■ Comment les artisans ont-ils perçu la politique engagée pour développer la filière des services à la personne ? Laurent Hénart. Les pouvoirs publics assurent une égalité de traitement entre les différents opérateurs privés et publics. Ce n’est donc pas l’Etat qui choisira, mais le particulier. Alain Bonamy. Au départ, avec une grande défiance. Les pouvoirs publics appuient le développement d’un marché spécifique, mais avec des frontières floues et finalement interdit d’accès aux Rencontres artisans. Je connais ainsi un boucher qui a dû interrompre son activité de livraison à domicile car ses anciens clients ont fait appel à une association qui bénéficie des avantages sociaux et fiscaux mis en place par le gouvernement. Même chose pour les esthéticiennes qui ne peuvent pas faire de prestations à domicile en bénéficiant du dispositif. Sur le bâtiment, la concurrence est moindre, car le champ est limité au petit bricolage. Les artisans ne veulent pas rester en dehors de ce marché. ■ Quelles sont vos propositions pour intégrer les artisans dans cette filière ? Alain Bonamy. Les artisans en tant que tels ne peuvent pas s’inscrire dans le dispositif. Mais il serait tout à fait possible de créer des sociétés coopératives artisanales dédiées, agréées, et dont les membres seraient les artisans qui apporteraient le service à la personne et respecteraient les règles liées à l’agrément. ■ Au-delà de la filière des services à la personne, quelle est pour un artisan la valeur ajoutée du modèle coopératif ? Alain Bonamy. Il s’agit de créer un instrument commun dans lequel il n’y a que des artisans, et qui est géré par et pour les artisans. On évite ainsi le risque de dépendance à l’égard d’un grand groupe. On mutualise nos moyens pour les achats, la gestion d’outils, la passation de marchés ou la commercialisation. Et le système coopératif assure l’égalité de traitement de chacun des membres. Il n’y a pas mieux pour assurer l’indépendance des artisans. « Un marché porteur » Hugues Sibille est adjoint du président du Crédit Coopératif et directeur délégué en charge de l’économie sociale et des collectivités territoriales. ■ Pourquoi le Crédit Coopératif a-t-il signé un partenariat avec la CG Scop pour le développement des coopératives de services à la personne ? Hugues Sibille. En tant que banquier de l’économie sociale, le Crédit Coopératif est soucieux du développement des entreprises du secteur, notamment sur les marchés porteurs. Ce qui est le cas des services à la personne. Les coopératives de production ont montré leur pertinence dans les services aux entreprises. Elles peuvent apporter également une bonne réponse dans les services à la personne. En tant que sociétés de personnes justement, elles misent sur la formation et la qualification de leur personnel. ■ Le Crédit Coopératif travaille-t-il déjà dans le secteur des services à la personne ? Hugues Sibille. Le Crédit Coopératif est le banquier de beaucoup d’associations d’aide à domicile. Par ailleurs, le Crédit Coopératif est actionnaire de Chèque Domicile. Plus récemment, la Fédération française des coopératives et groupements d’artisans a souhaité s’engager dans cette filière avec l’appui du Crédit Coopératif. Enfin, nous avons soutenu dès le début la création et le développement des coopératives d’activités et d’emploi en participant à la création d’un fonds de mutualisation auprès du réseau Coopérer pour entreprendre. ■ Cette filière justifie-t-elle une expertise particulière en matière de financement et des services spécifiques ? « Affirmer le savoir-faire coopératif » Pascal Dorival est directeur de Chèque Domicile, la filiale du Groupe Chèque Déjeuner qui participe à la diffusion du Cesu. ■ Quels sont les enjeux des services à la personne pour le mouvement coopératif ? Pascal Dorival. Culturellement, les services à la personne se sont surtout organisés dans le secteur public et associatif. Mais le contexte change. Avec la volonté des pouvoirs publics de créer une vraie filière, avec des emplois stabilisés et qualifiés, et les énormes besoins qui vont apparaître sur l’aide à domicile avec le vieillissement de la population et le manque de temps croissant des familles, il y a un enjeu tout à fait stratégique pour l’économie sociale et solidaire. ■ Comment le réseau Scop Entreprises peut-il contribuer à relever ce défi ? Pascal Dorival. La première étape est d’être à l’écoute. D’abord du monde associatif pour identifier les problèmes qui se posent à lui. Le mouvement coopératif doit aussi être à l’écoute des entreprises qui se créent, de leurs besoins en termes d’accompagnement et il doit affirmer son savoir-faire. Le réseau Scop Entreprises peut se prévaloir d’une réelle expertise entrepreneuriale et il y a un vrai besoin de mutualisation des fonctions gestionnaires et administratives sur la filière des services à la personne. Hugues Sibille. Le Crédit Coopératif souhaite faire du secteur des services à la personne un axe fort de développement, et pour ce faire, apporter sa CES PROPOS ONT ÉTÉ RECUEILLIS PAR PIERRE LIRET contribution sur l’ensemble de la chaîne des besoins, en termes de produits bancaires, Un colloque à Paris le 29 novembre d’appui à la constituAprès la signature d’une convention le 24 juillet dernier avec le ministre de l’Emploi et de la Cohésion sociale, Jean-Louis tion de fonds propres Borloo, les atouts de la forme coopérative et des groupements et de conseil. Le Crédit feront l’objet d’un colloque le 29 novembre à Paris. Il sera intiCoopératif dispose déjà tulé « De l’émergence des projets à la structuration du marché d’une palette d’outils des services à la personne », et organisé par l’Agence nationale adaptés aux porteurs des services à la personne, le Crédit Coopératif et ses partenaide projet et il déveres, la CG Scop, la FFCGA et France initiatives réseau. loppera le cas échéant Inscription et information auprès de des prestations spé[email protected] fiques. Participer 620 novembre / décembre 2006 • 29