congres-coeur-cardio.. - Club des Cardiologues du Sport

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Recommandations
Congrès 2010 de
la Société Européenne
de Cardiologie
La cardiologie du sport…
Dr Jean Gauthier*,
Pr François Carré**
Les communications dédiées aux effets cardiovasculaires de l’exercice physique ont
encore été nombreuses à Stockolm lors du Congrès 2010 de la Société Européenne de
Cardiologie.
> Cœur d’athlète
La bradycardie de repos et la courbe
de récupération cardiaque des athlètes d’élite dépendent du type
d’entraînement et non du volume
annuel d’activité. Chez les cyclistes
elle paraît dépendre d’une baisse
intrinsèque du rythme cardiaque,
avec faible intervention vagale, alors
que l’implication vagale est importante chez les coureurs à pied et les
rameurs (LF. Azevedo, Brésil).
Une activité physique de loisir régulière chez une population de jeunes
en bonne santé augmente modérément la masse ventriculaire gauche,
la fonction diastolique et le nombre
de fuites valvulaires physiologiques
(LK. Lukas, Pologne et HE. Moelmen,
Norvège). Une étude par Doppler
tissulaire pulsé chez des footballeurs professionnels s’entraînant
plus de quinze heures par semaine
confirme l’augmentation du volume
télédiastolique du ventricule gauche
>>> *Arles
**Hôpital Pontchaillou, Rennes
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ainsi que celle du diamètre, de la
surface et du volume atrial gauche
(F. D’ascenzi, Italie). Au niveau du
ventricule droit, au repos le volume
et la fonction ventriculaire sont augmentés sans élévation de la pression
artérielle pulmonaire chez des athlètes (GF. Gjerdalen, Norvège). Les
métalloprotéinases pourraient jouer
un rôle dans l’hypertrophie-dilatation d’adaptation du cœur d’athlète.
Il n’a pas été constaté de lien avec
une éventuelle fibrose myocardique
(B. Sax, Hongrie).
Chez le marathonien, l’épaisseur
pariétale artérielle est augmentée
en relation avec l’intensité de l’entraînement, mais la vitesse de l’onde
de pouls carotido-fémoral n’est pas
modifiée (D. Kardara, Grèce).
Chez la femme athlète, les méta-analyses retiennent une augmentation modérée de l’épaisseur
pariétale (15 % pour la paroi postérieure et 10 % pour le septum) et du
diamètre de la cavité ventriculaire
gauche (7 %). Les limites hautes
retiennent 11 mm pour les parois.
Seulement 1 % des sujets a un diamètre télédiastolique > 60 mm et
8 % > 54 mm. L’adaptation dépend
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de l’âge, de l’ethnie, du sport pratiqué. Les adaptations, pariétales et
cavitaires les plus marquées s’observent dans le cyclisme, l’aviron
les sports d’équipe et l’endurance.
Comme chez les hommes, les athlètes noires ont des épaisseurs pariétales plus marquées (3 % > 13 mm).
De même, la proportion d’ECG normaux est de 71 % chez les femmes
blanches et seulement 49 % chez les
femmes noires (A. Pellicia, Italie).
> Cœur et dopage
La prise régulière de stéroïdes anabolisants provoquent des lésions
cellulaires secondairement responsables d’une collagénose avec, au
Doppler tissulaire pulsé, une dysfonction myocardique systolique
et diastolique régionale chez des
culturistes (R. Montisci, Italie). De
manière surprenante, la prise d’anabolisants par des athlètes de force
induit une hypertrophie ventriculaire gauche sans trouble de la fonction systolique et chez des athlètes
endurants n’altère pas les adaptations de la fonction diastolique (V.
Djordjevic, Serbie).
Recommandations
> Ultra-endurance
Les conséquences cardiaques d’un
exercice intense en ultraendurance
prédominent sur le ventricule droit
avec augmentation du diamètre
télédiastolique et la fonction systolique est diminuée. Le niveau d’entraînement n’intervient pas sur ce
paramètre (A. La Gerche, Australie).
Cependant le Doppler tissulaire du
ventricule droit est normal. Le rapport E/E’, paramètre de la pression
de remplissage et de la fonction
diastolique, augmente légèrement.
Le retour à la normale est total au
bout de deux semaines (F. Knebel,
Allemagne).
C’est l’intensité de l’exercice
plus que sa durée qui est responsable des signes de “fatigue cardiaque” (CM. Mattson, Suède).
L’électrocardiogramme
présente
pas ou peu (discrète surélévation
de ST et augmentation d’amplitude
de l’onde T en antérieur) de modifications. Les biomarqueurs (troponines I et T ; BNP ; nT-proBNP)
s’élèvent modérément chez 60 %
des participants à une compétition
intense de longue durée. Ces modifications ne sont pas corrélées
aux anomalies biologiques (JD.
Somauro, Angleterre). Ces réponses
s’observent aussi chez la femme endurante (PL. Massoure, France).
Avec un entraînement adapté, le
risque cardiaque n’augmente pas
avec l’âge chez le sujet sain mais les
bilans cardiovasculaires doivent être
plus fréquents. Les bénéfices sont
indépendants de l’âge, ainsi les sujets âgés pratiquant un sport d’endurance ont une pression artérielle
plus basse, un volume d’éjection
systolique et une fonction diastolique améliorés par rapport aux sédentaires. Ils ont toutefois un risque
majoré de fibrillation atriale (H.
Bjornstad, Norvège).
En 2009, 467 000 sportifs ont terminé un marathon. Au marathon de
© julos - iStockphoto
Londres au cours des 30 dernières
années, seulement 8 décès d’origine
cardiaque pour 750 000 participants
ont été rapportés. Avant 35 ans, le
bilan médical devrait comporter un
interrogatoire, un examen physique
et un ECG. Tout symptôme suspect
et/ou antécédent familial de mort
subite réclame un bilan cardiologique complet. Après 35 ans, un bilan
cardiologique complet est justifié à
partir de deux facteurs de risque. Les
sportifs sans facteur de risque ni aucun symptôme et qui peuvent courir
20 kilomètres sans difficulté ne sont
pas plus exposés que les moins de
35 ans (S. Sharma, Angleterre).
> Nouveaux
développements en
cardiologie du sport
L’analyse du strain bidimensionnel devient un outil essentiel pour
étudier la normalité de l’hypertrophie ventriculaire gauche chez le
sportif. Contrairement à ce qui est
observé dans les cardiomyopathies
hypertrophiques, le strain n’est pas
altéré dans l’hypertrophie ventriculaire gauche d’adaptation. Cette
méthode couplée à l’analyse par
Doppler tissulaire a une sensibilité
et une spécificité proche de 100 %
(T. Butz, Allemagne).
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Les mêmes méthodes utilisées
chez des athlètes endurants et des
athlètes de force montrent un index de masse ventriculaire gauche,
une fraction d’éjection et des index de déformation myocardique
identiques dans les deux groupes.
L’épaisseur pariétale est un peu
plus importante chez les athlètes de
force, le volume d’éjection et le diamètre télédiastolique du ventricule
gauche un peu plus élevés chez les
endurants (A. D’Andréa, Italie).
Sur 256 sportifs de haut niveau d’entraînement, 2 % ont une hypertrabéculation, qui peut être prémonitoire de l’hypertrophie ventriculaire
gauche et de sa non-compaction
isolée. Ils étaient tous de type afrocaribéen et présentaient des anomalies électriques de type hypertrophie ventriculaire gauche et une
inversion de l’onde T dans les dérivations standards. Les fonctions systolique et diastolique étaient normales dans tous les cas (N. Chandra,
Angleterre).
> Pratique sportive en
environnement hostile
Les morts subites sont nombreuses
au cours des sports d’hiver. La plupart des accidents cardiovasculaires
au cours des séjours sportifs en alti-
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Recommandations
tude surviennent au cours des deux
premiers jours. Les accidents cardiaques surviennent à une altitude
moyenne de 1 350 mètres. La symptomatologie se déclenche 2 heures
environ après le début de l’activité.
La plupart des patients séjournaient
habituellement à basse altitude
et la moitié de ces accidents ont
concerné des sujets qui n’avaient
pas le niveau physique minimum
préalable (au moins 2 heures par semaine) recommandé par la Société
Européenne de Cardiologie. Au
moins deux facteurs de risque ont
été retrouvés chez 70 % des patients
victimes d’un infarctus du myocarde et moins de 20 % avaient eu
un bilan cardiovasculaire préalable.
Pour diminuer les risques, un programme de préparation physique
préalable est recommandé et l’activité des deux premiers jours de
séjour doit être très progressive (G.
Klug, Autriche).
Le mal des montagnes chronique
est caractérisé par une importante
hypertension artérielle pulmonaire
à l’exercice, par production exagérée de fluides. Une dysfonction
ventriculaire droite est associée. Les
patients ont une limitation de performance, et une morbi-mortalité
plus importante (L. Pratali, Bolivie).
Pour la plongée sous-marine de
loisir, la table de décompression
de Buhlmann est très utilisée. Sa
fiabilité aux valeurs limites est cependant faible avec une production
imprévisible de bulles dans le cœur
droit, même en cas de décompression prolongée, et augmentation
du risque d’accident (D. Glavas,
Norvège).
> Activité physique et
pathologies
La prévalence de la fibrillation
atriale est de 5 % tous les 10 ans
après 30 ans. Elle est augmentée
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chez les sportifs vétérans endurants Plusieurs études chez le coronarien
(plus de 10 heures d’activité spor- adulte ont montré que ces cellules
tive). Le mécanisme classiquement progénitrices sont un des princimis en cause associe l’augmentation paux facteurs de prédiction de morde la réponse au tonus vagal et la di- bi-mortalité. Elles sont impliquées
latation avec fibrose de l’oreillette dans l’angiogénèse et la réparation
gauche. Chez le rat entraîné les des zones lésées. Il en est de même
marqueurs protéiques de la fibrose avec la libération de cellules progésont plus élevés et l’exploration nitrices endothéliales qui ont un rôle
électrophysiologique induit plus fa- déterminant dans les phénomènes
cilement des arythmies que chez les de protection et de réparation de
témoins sédentaires. Chez l’homme, l’endothélium vasculaire (C. Walther,
vers 60 ans, 15 à 18 % des sportifs Allemagne).
Chez les coendurants
ont
ronariens,
un
un remodelage
programme de
de
l’oreillette
Le ré-entraînement diminue
réadaptation
gauche. La file NT-pro-BNP, améliore la
précoce,
combrillation atriale
tolérance à l’exercice, la
mençant le jour
est le plus soufonction endothéliale et la
suivant une anvent de type vaqualité du sommeil.
gioplastie,
n’a
gal. On constate
pas
provoqué
une réversibilité,
en particulier de la fibrose, par le de modification du segment ST
déconditionnement. Un conseil de pendant les deux semaines d’actidiminution de leur activité en en- vité. Pendant l’année qui a suivi, la
durance peut donc être donné à ces survenue de crises angineuses et
sportifs. A noter qu’après ablation la d’évènements cardiovasculaires a
reprise d’activité n’est pas significa- été significativement moins importante dans le groupe réadaptation
tivement gênée (L. Mont, Espagne).
Aux Etats-Unis, la proportion d’en- que dans le groupe exempt d’acfants obèses est passée depuis 1970 tivité physique précoce (Y. Soga,
de 5 % à près de 20 % et 50 à 80 % Japon). Le travail aérobie par interd’entre eux le resteront à l’âge adulte ! valle, sur tapis roulant, est plus efLe phénomène se propage en Europe ficace qu’un entraînement aérobie
(P. Leeson, Angleterre). La com- classique pour augmenter le pic de
pliance des artères brachiales est di- VO2 chez les patients coronariens.
minuée chez les adolescents obèses Le résultat persiste 30 mois après la
et la maladie athéroscléreuse sera fin du programme d’entraînement
plus précoce chez eux (P. Whincup, (T. Moholdt, Norvège). Une métaAngleterre). L’activité physique dans analyse a évalué l’effet de la durée
cette population est mieux acceptée du programme de réadaptation carque la diététique et elle est particu- diaque sur la récidive de l’infarctus
lièrement efficace en milieu scolaire du myocarde, la mort subite et la
(C. Walther, Allemagne). Le rôle des mortalité toute cause. Les résultats
parents est essentiel lorsque toute sont les mêmes quelle que soit la
la famille participe au programme durée du programme (P.R. Lawler,
d’activité physique et à la diététique Canada).
(Y. Latzer, Israël). L’activité physique Chez les insuffisants cardiaques porfacilite la libération de cellules pro- teurs d’un défibrillateur automagénitrices (détectable dans le sang tique implantable, un programme
périphérique) de la moelle osseuse. de réadaptation cardiaque n’en-
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Recommandations
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traîne pas de trouble rythmique par
rapport à un groupe sans entraînement (S. Weretka, Allemagne). Le
réentraînement diminue le NT-proBNP, améliore la tolérance à l’exercice, la fonction endothéliale et la
qualité du sommeil (F. Tarro, Italie).
L’électrostimulation peut être utile
dans les programmes de réhabilitation chez les patients au stade III-IV
NYHA, en facilitant leur adhésion.
Elle améliore la tolérance à l’exercice et la fonction endothéliale (A.
Karavidas, Grèce). Un réentraînement aérobie intense (fréquence
cardiaque à 95 % du maximum) est
plus efficace sur le remodelage ventriculaire gauche, la fonction endothéliale, la capacité aérobie et la qualité de vie d’insuffisants cardiaques
post-infarctus qu’un entraînement
à intensité modérée (fréquence cardiaque à 70 % du maximum) ou
que l’absence d’entraînement. Les
patients âgés avec insuffisance cardiaque ont montré une bonne capacité d’adaptation à l’entraînement
(U. Wisloff, Norvège).
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Mots clés
Congrès 2010, Société
Européenne de Cardiologie du
Sport, Recommandations
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