Sans titre - Michel Rivard
Transcription
Sans titre - Michel Rivard
la beauté du diable (une légende moderne) cette histoire se passe dans une salle de danse sur l’avenue du parc, où les mystères commencent quand les chiens de l’automne hurlent à la lune et que les chanteurs de pomme cruisent la fortune imaginez la belle comme un char volé ou un rêve de cul dans la nuit d’un curé un corps de femme à faire frémir le ciel à jouer du saxophone, tout nu dans la ruelle personne dans le bar, l’a jamais vue elle est à peine entrée, que tout le monde a les yeux dessus on oublie de boire, on oublie de s’asseoir on oublie qu’on voulait rentrer plus tôt ce soir lui là-bas dans l’coin tout le monde le connaît comme le p’tit frère achalant collant derrière ses verres épais qui salue à grandes claques le dos tourné des gars toujours quelque chose à dire même si on l’écoute pas imaginez le platte comme un char loué pensez à toutes les femmes qui même sans le regarder lui disent plutôt non et cherchent au-dessus de sa tête quelqu’un à l’horizon qu’elles connaîtraient peutêtre personne dans le bar, pour lui faire attention oublié comme un détail de trop dans un scénario trop long appuyé au mur, il étire sa bière et songe à retourner dans les jupes de sa mère… de sa mère il y a des messages qu’on découvre trop tard écrits au rouge à lèvres au milieu d’un miroir la beauté du diable est cachée dans le manteau de la nuit la fille du début va tout de suite retrouver le gars dans son coin, dont j’viens juste de vous parler elle le prend par la main, le regarde en silence et lui ouvre un chemin vers la piste de danse imaginez-les je sais, je sais, je sais c’est difficile dans le cercle des danseurs soudainement immobiles elle qui danse même mieux que la musique lui qui bouge avec la grâce d’un ourson mécanique tout le monde dans le bar les suit des yeux quand la musique s’arrête, ils sortent tous les deux on entend le cri d’une auto qui s’éloigne et s’enfuit en riant sur le chemin de la… de la montagne il y a des messages qu’on découvre trop tard délavés par la pluie sur l’asphalte noir la beauté du diable est cachée dans le manteau de la nuit