Untitled - Commission africaine de l`aviation civile
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–– 1 Un système de transport aérien sûr, sécurisé, abordable et efficace avec une bonne connectivité est indispensable à l’économie africaine, voire à l’économie mondiale parce qu’il facilite les affaires, le tourisme et le transport des marchandises en plus de créer des emplois, pour ne citer que ces avantages. En moyenne, un Africain prend l’avion une fois tous les 15 ans, alors que l’Américain voyage par avion 1,8 fois par an et l’Européen environ 1,1 fois. En rendant le coût du transport aérien plus abordable, le nombre des quelque 60 millions d’Africains qui ont emprunté l’avion en 2011 serait sensiblement accru en un temps record. En dépit du rôle capital que joue le transport aérien et son immense contribution aux économies des pays africains, les décideurs africains continuent de le considérer comme un service de luxe pour l’élite. Directement ou indirectement, le transport aérien a généré 6,7 millions d’emplois en Afrique et contribue pour 67,8 milliards de dollars EU au PIB selon l’ATAG. Malgré cela, nombre de gouvernements africains et les prestataires de services aéroportuaires ont tendance à imposer de lourdes taxes et redevances aux compagnies aériennes et à leurs usagers. Cet état de choses ne tient pas du tout compte du fait que les compagnies aériennes de tout le continent africain connaissent des périodes difficiles et une crise financière aigue et se battent pour leur survie. Dispositions de l’OACI en matière de taxes et redevances Selon l’OACI, le carburant utilisé pour le transport aérien international ne doit être assujetti à aucune taxe. L’OACI interdit également de taxer le carburant arrivant et se trouvant dans un aéronef venant d’un autre pays. Il est également courant dans BASA d’interdire l’imposition de taxes sur le carburant des vols internationaux. Voici le distinguo que l’OACI fait entre redevances et taxes : Les redevances se fondent sur le coût des services et la recette est retenue par le secteur aéronautique. Les taxes servent à accroître les recettes gouvernementales et sont imposées à des fins non aéronautiques. La Résolution du Conseil de l’OACI sur les redevances et les taxes dispose comme suit : Il ne doit pas y avoir un objectif fiscal sous-tendant les redevances. Les redevances doivent être liées aux coûts. Les redevances prélevées sur le transport aérien ne doivent pas être discriminatoires, comparées aux autres modes de transport. Lourdes redevances et taxes sur le carburant D’une manière générale, le carburant d’aviation en Afrique est surtaxé. La gamme des taxes sur le carburant emprunte divers noms et descriptions comme suit : Redevances Taxe d’aéroport Droits d’exploitation Taxe d’aérodrome Taxe de pont Taxe de capacité de production 2 Taxe aéroportuaire gouvernementale Taxe de concession Redevances Redevance de carburant ISC Redevance ASECNA Taxe d’accise Les divers droits, taxes et redevances sur le carburant vont à l’encontre des normes au plan mondial et constituent un handicap pour l’industrie aéronautique africaine. Globalement, le carburant représente environ 36% des coûts d’exploitation d’une compagnie aérienne. Par contre en Afrique, les coûts de carburant représentent entre 45 et 55 % desdits coûts. Dans certains endroits en Afrique, les coûts de carburant sont plus du double de la moyenne mondiale. Cette situation a une incidence très néfaste sur la compétitivité des compagnies africaines. Souvent, les fonctionnaires des ministères de l’aviation civile le comprennent. Toutefois, leurs homologues aux Ministères des Finances n’appréhendent pas l’impact très négatif de ces taxes et redevances, non seulement sur l’aviation, mais aussi sur le développement économique en général de leurs Etats qu’un secteur aéronautique efficace et bien géré pourrait booster. Il faudrait des efforts concertés pour assurer la croissance. Les taxes – particulièrement celles inopportunes imposées sur le carburant – doivent être supprimées pour obtenir de bons avantages économiques. Souvent, les compagnies imposent une taxe sur les billets d’avion pour compenser les prix de carburant sans cesse croissants. L’on estime que la plupart des compagnies vont recouvrer environ 40 à 70% de leur coût de carburant supplémentaire grâce à cette taxe. Malheureusement, cela fait en sorte que le prix du billet d’avion est hors de portée pour la plupart des Africains qui, généralement, n’ont jamais visité un aéroport. Taxes et redevances passagers élevées Outre les taxes sur le carburant, d’autres taxes sont aussi plus élevées en Afrique comparées aux autres régions, sans rapport avec la qualité, la disponibilité des services et des installations pour les transporteurs et les usagers du transport aérien. Les tableaux 1 et 2 montrent les diverses taxes et redevances passagers (en 2011), ainsi que les redevances d’atterrissage des aéronefs en vigueur dans certains aéroports africains. On a essayé de comparer ces taxes et redevances entre destinations africaines avec les taxes et redevances aux aéroports de certains pays choisis hors d’Afrique. Tableau 1 : Taxes et redevances passagers (en $EU) à 36 aéroports africains, des plus élevées au plus petites taxes N° 1 2 3 4 5 Aéroport Ambouli (Djibouti) Accra Malabo Abidjan Ouagadougou 1 Int 85,89 Rég 68,71 N° 13 Aéroport Entebbe Int 40,00 Rég 20,00 N° 25 Aéroport Durban Int 26,18 Rég 19,82 75,00 68,02 64,73 58,24 50,00 46,86 25,89 38,83 14 15 16 17 Kinshasa Dakar Lagos Harare 30,46 38,84 35,00 35,00 30,46 38,84 35,00 35,00 26 27 28 29 Conakry Johannesburg Antananarivo Bujumbura 30,00 26,18 25,84 25,00 19,82 25,84 25,00 25,00 1 Régional (Rég) : Désigne le passager, en fonction du pays, qui voyage à l’intérieur du continent ou d’une Communauté économique sous-régionale. 3 6 52,89 11,50 18 Bamako 32,37 32,37 30 Addis-Abeba 25,00 25,00 50,00 50,00 19 Monrovia 30,00 30,00 31 Lusaka 25,00 25,00 8 9 10 MoroniHahaya (Arrivée et Départ) Mahe Seychelles International Windhoek Bangui Libreville 48,17 43,17 43,14 24,57 21,59 21,57 20 21 22 30,00 30,00 30,00 30,00 30,00 30,00 32 33 34 Cotonou Yaoundé Douala 23,74 22,66 22,65 14,03 12,95 12,94 11 12 Nairobi Freetown 40,00 40,00 40,00 40,00 23 24 Maputo Kigali Dar-EsSalam Brazzaville Le Cap 26,43 26,18 26,43 19,82 35 36 Saint-Denis Niamey 22,41 21,58 15,88 21,58 7 Les chiffres ci-dessus sont tirés de IATA Airport ATC and Fuel Chargers Monitor (2001) Une taxe oscillant entre 40 et 85 $EU est imposée aux passagers internationaux au départ de 13 aéroports africains. Les principales destinations telles qu’Accra, Abidjan, Ouagadougou, Nairobi et Entebbe rentrent dans ce groupe. Les redevances de Djibouti sont les plus élevées, soit 89 $EU par passager au départ et à l’arrivée. Dans 9 autres aéroports, une redevance de 30 à 40 $EU est imposée aux passagers. A partir de ces chiffres, il est difficile de voir une corrélation logique entre le niveau de redevance d’une part et d’autre part, la qualité des services, des installations et infrastructures disponibles à certaines destinations, pour justifier un tel niveau élevé de redevances. Pour illustrer la position des aéroports africains, par rapport aux autres régions, le tableau 2 donne les redevances et taxes à des destinations choisies dans diverses sous-régions par rapport aux aéroports choisis hors région Afrique. Quatre pays de chacune des quatre sousrégions africaines sont retenus et comparés aux pays choisis de trois autres régions (MoyenOrient, Asie/Pacifique et Europe). Hormis les pays d’Afrique du Nord, les redevances des aéroports africains choisis sont sensiblement plus élevées par rapport aux aéroports choisis d’autres régions. Tableau 2 : Comparaison entre taxes et redevances passagers à des aéroports choisis Afrique australe Aéroport Taxe/ Redevance Luanda 20 Afrique occidentale Aéroport Taxe/ Redevance Kinshasa 30,46 Maputo Johannesburg Lusaka Accra Lagos Dakar 30 26,18 25 75 35 38,84 Afrique orientale Aéroport Taxe/ Redevance Addsi25 Abeba Nairobi 40 Kigali 30 Entebbe 40 Moyen-Orient Aéroport Taxe/ Redevance Muscat 13,2 Dubaï 5,45 Beyrouth 34 Asie/Pacifique Aéroport Taxe/ Redevance Mumbai 5,7 Singapour 11,16 Guangzhou 10,72 Lusaka Dakar 25 38,84 Afrique du Nord Aéroport Taxe/ Redevance Le Caire 15 Tripoli Casablanca Khartoum 4,89 15,18 12,54 Europe Aéroport Taxe/ Redevance Paris-CDG 13,53 Frankfurt 29,81 Rome10,95 Fiumicino Entebbe 40 4 Les redevances des aéroports de la région Afrique occidentale sont les plus élevées, avec une redevance passagers la plus élevée de 73 $EU à Accra ; alors que certains aéroports d’Afrique orientale ne réclament que 40 $EU. Les passagers des aéroports d’Afrique du Nord bénéficient des redevances passagers les moins élevées. Par exemple, Tripoli impose une redevance de 5 $EU suivie de Khartoum, Casablanca et Le Caire entre 12 et 15 $EU. Toutefois, d’une manière générale, les passagers au départ de certains aéroports africains choisis payent des taxes passagers plus élevées par rapport à ceux qui partent d’aéroports choisis du Moyen-Orient et d’Europe, Beyrouth non compris. Taxes destinées à réduire la demande Certains gouvernements ont justifié l’imposition de redevances élevées sur le carburant sous prétexte que les redevances ou taxes sur le carburant promeuvent l’efficacité du carburant tout en réduisant la demande. Un tel argument ne saurait prospérer en Afrique du fait qu’il existe très peu de moyens de transport de substitution pour les longues distances. Le transport aérien demeure le moyen de transport le plus efficace et le plus économique capable de contribuer au développement socioéconomique des régions, des pays, voire du continent africain dans son entièreté. L’Aviation à l’échelle nationale L’OACI ne traite pas des politiques d’imposition des Etats contractants pour l’aviation à l’échelle nationale. Les Etats-Unis imposent une taxe sur le carburant pour les transporteurs aériens intérieurs et les aéronefs de l’aviation générale ; les recettes sont versées dans un fonds en fidéicommis et la loi interdit que ces sommes servent à des fins non aéronautiques. En Europe, le carburant utilisé pour les vols intérieurs est déjà taxé. Les redevances des émissions de l’UE Les redevances des émissions de l’UE, condamnées par tous, représentent un autre élément de coût préjudiciable à l’industrie aéronautique. Selon une analyse de Thomson Reuters, le coût de carbone pour les compagnies qui adhèrent au projet d’émission de l’UE en 2012 avoisinera 1,1 milliard d’euros (1,5 milliard $Eu) sur la base du prix de carbone de 12 € la tonne, soit un total de 10,4 milliards € d’ici la fin de 2020. Les chiffres des compagnies africaines ne sont pas disponibles, mais force est de reconnaître que cela constituera un autre fardeau pour ces compagnies. Il y a une appréhension, à savoir une telle mesure unilatérale incitera les gouvernements africains à élaborer leurs propres projets pour accroître les recettes gouvernementales, ce qui sera préjudiciable à l’industrie aéronautique. Un pays d’Afrique orientale a eu l’idée d’imposer une taxe pour le sida sur tous les billets d’avion, qui servirait à réunir les fonds pour lutter contre cette pandémie. 5 Taxes élevées dans l’industrie aéronautique Selon une enquête effectuée par A4A, le montant des taxes aéronautiques était supérieur à 14 milliards de $ EU, correspondant à 25% d’un tarif aérien type. Le chiffre équivalent pour l’UE est de 7,3 milliards $ EU, soit l’équivalent de 14-15 % des revenus passagers en Europe. Les chiffres équivalents pour l’Afrique ne sont pas disponibles pour pouvoir évaluer la portée des taxes et revenus en Afrique. Effets des taxes et redevances sur le coût de billet d’avion Quelque soit le type de redevances ou de taxes, qu’elles soient prélevées directement sur le passager ou la compagnie aérienne, elles augmentent le coût du voyage aérien qui sera finalement supporté par le passager du fait que les compagnies aériennes reflètent ce coût sur le billet d’avion. Les compagnies aériennes utilisent diverses méthodes pour répartir les coûts sur les prix des billets sur certaines routes, mais en fin de compte, c’est le passager aérien qui paye la note. Afin de tirer parti des énormes potentialités que recèle le continent africain, toutes les parties prenantes doivent travailler la main dans la main pour réduire le coût du voyage aérien afin qu’il soit abordable à un plus large secteur de la population africaine privé pour l’instant de voyager par avion en raison des tarifs élevés, entre autres raisons. Conclusions Il est manifeste qu’avec l’actuelle structure des coûts des transporteurs africains, il est très difficile de soutenir la concurrence de plus en plus féroce et de vaincre les forces néfastes. Ces forces marginalisent nos compagnies aériennes sur les routes internationales. Cela n’est qu’un avant-goût jusqu’au moment où le continent sera chassé de l’industrie aéronautique, les routes interafricaines y comprises. Il est de l’intérêt de toutes les parties prenantes, notamment les aéroports, les administrations publiques, les Autorités chargées de la règlementation, les Communautés économiques régionales (CER) et les organisations continentales telles que l’UA, la CAFAC, l’AFRAA et l’ACI Afrique de soutenir la croissance des transporteurs aériens nationaux. Ce faisant, les compagnies aériennes vont se battre pour reconquérir la part de marché qui leur revient. Les gouvernements et les aéroports d’Afrique gagneraient à adopter des stratégies à long terme. Nombre de transporteurs aériens qui font la concurrence aux compagnies africaines ont une base d’exploitation caractérisée par des coûts sensiblement bas, ce qui leur permet de damer le pion aux compagnies africaines. Cela profite également aux transporteurs aériens étrangers. ---------------------------- 6