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AIa i n SOUChOft CCSans compositeur, interprète artistes, fini I Pour ce poète indémodable et modeste, passionné de peinture, notre civilisation en mal de repères n'existerait plus sans Matisse, Delacroix ou Rimbaud. qui font peur. LIle des nxort1pat exem- lain Souchon est l'un des AX{g ÀSqë44inË dranteurs les plus solidementancrés dans lecæur des Français depuis trois Baudelaire, Verlaine... Que diriez-vous de la peinture de cette époque ?Voustou- ple, dArnold Bôc1din, est un tableau waiment troublant. Mais 1e xx" siède, c'est aussi la peinture de batailles, la peinture militaire, qui reproduit la réaLité avec une minutie étonnante. Sans parler de tous ces artistes fascinés par les couleurs et les atmosphères dAfriclue du Nord. Deiacroix a peint 1à-bas che-t-elle autant des choses merveilleuses décennies. Ses fidèles ap- : On vous sait passionné par la littérature du xrx" siècle, Nerval, ? précient sa poésie, son humanité, son humilité. Il nous liwe ici ses réflexions sur lart, Iorigine de ses émotions artis- Alqlp S*uqhcn: Beaucoup... f 'adore le côté rêve qu a apporté le ruC siède en peinture. Les artistes peignaient la na- tiques, la quête que le chanteur effectue face à la toile et les peintres ou 1es écrivains qui nourrissent son imaginaire. ture de manière exagérée, avec des arbres trop touffus, des précipices trop profonds... et des choses mystérieuses, AI&in Sæ:chom en href Alain Kienast naît le z7 mai lç,44au Maroc. Son père y est ptof d'anglais. Des dtÊhuts ! i ll n'est pas le seul. Les peintres dits orientalistes aussi. Vous qui êtes Âfu1 né au Maroc, vous devez apprécier... ê., §. 1 Oui. f 'ai même connu un peintre orientaliste, Henri Sené (décédé en 196r). 11a réalisé des rues de Fès et de Marrakech, au Maroc. Ses toiles ont le charme de Ïexotisme de cette époque : des gens sur des chamearx, avec des fusils, des tentes... Cette lumière très particulière, des couleurs chaudes, de la poussière, et les formes cubiques des maisons daires... Ici, on ne connaissait pas ces images avant que les artistes n en fassent des tableaux. AIVT r Dans votre dernier album La Vie Théodore,vous rendez hommage à Théodore Monod...5i notre époque a besoin de spiritualité, l'art vous semble-t-il un moyen d'y parvenir? d'autod.idacte A.§. ; Aujourd'hui, nous, Occidentaux, r97r, il signe son rer contrat chez Pathé Marconi... et son ter succès t LAmour û3o, ll rencontre Laurent Voulzy en 1974. nous éloignons beaucoup de Dieu et des préceptes de la religion dans notre Trente arnées ëe succès Plus de t5o chansons, et beaucoup de tubes: Bidon,Allô mamon bobo,Rome, Foule sentimentole, Le Baiser... §on actualité ll vient de sortir son onzième album: La Vie Théodore. vie quotidienne. Notre civilisation tient grâce aux prouesses techniques que nous avons accomplies, mais aussi et surtout grâce arx artistes qui, depuis des siècles, produisent des æuvres extraordinaires. Leur talent « divinise » en quelque sorte notre civilisation. Tous les grands ont participé à ce pro- cessus: Shakespeare, Bach, Monet, David... ou Maüsse ! Matisse est mon préféré. Son travail est universel. 11 rejoint même 1a technique extrêmeorientale. Pour dessiner un homme ou une femme, Matisse part d'un point, trace une courbe - on sent qu'i1 s'est bien concentré avant - et son trait ne s'arête pas : il dessine tout d'ua même ivilisation D) geste. Qu il soit heureux ou mélanco- lique, l'état d'esprit du Personnage transparaît dans ce simple trait. La peinture chinoise ou japonaise est faite àe la même façon : une grande concen' traüon surle sujet, puis une exécution tès rapide qui dévoile son âme. les églises et les cathédrales... Pourquoi ? A.S,: Parce clue la notion de sacré est AM: Vous aimez importante. Les peintres et les sculpteurs qui travaillaient dans les églises n'essayaient pas d'être les rois du monde ni d'imposer leur vision des cfroses. Ils voulaient seulement clue I'on s'imprègne de ces descentes de croix, ces mises autombeau, ces pietà, afln c1u on ressente profondément la douleur de ce Christ mort Pour l'humanité. Ces æuwes m'émeuvent Parce quelles servaient une canse radicalement opposée à l'égocentrisme et à Iambition personnelle. Voyez la beauté bouleversante de la cathédrale de Chartres... Mais i'aime aussiles vieilles églises poussiéreuses qui n ont jamais éié restaurées. 11 y a, en France, beau- coup de chapelles, un Peu abandonnéei mais si toudrantes, qui possèdent d'immenses descentes de croix. Aiÿ! r Vous avez passé une Partie de votie enfance au bord de la Loire... châteaux vous ont'ils marqué Beaucoup. Chambord, où je suis retoumé récemment avec un immense plaisir, Chenonceau, Azay'le-Rideau, Àmboise... Ce sont des endroits tellement chargés d'histoire qu on croit y sentirla présence des << gens d'avant '>, comme si leurs fantômes étaient toujours 1à. Une sensation bouleversante. La Pyramide du Louvre a d'ailleurs cassé cette sensation dans llancien palais des rois : quand on était dans la cour, avant que la Pyramide soit constnrite, on quittait 1e Paris contemporain pour être transporté des siècles en arrière. Ce rêve était fabuleux! Les architectes qui nous ont précédés ont laissé des choses magnifiques pour que nous Ses A§: ? les admirions et que nous pensions à eux avec émotion. On n a Pas le droit de briser ce rêve sous prétexte de modernité ! Et créer une véritable harmonie par-delà 1es sièdes est très diffidle : mettez une sculpture de Niki de Saint Phalle au milieu de Notre-Dame de Paris et vous énerverez les gens' En tout cas, moi, AM: ça m'énerverait [a légende des fils de Clovis Il Punis pour sêtre rebellés contre leur père, les fils du roi Clwis ll auraient été déposés sur un radeau descendant la Seine, avec les tendons coupés... dbù le terme « énervés ».Troublé par ce tableau, Alain Souchon I'a reproduit dans s on album,C'æt déià ça (1993), avec ce commentaire : « Plus de nerf, la belle vie'.. » tts ÉNtBvÉs ot tuuLÈors, Évantsre-vtraL LUMINAIS (r880), MUsÉE DES BEAUx-ARTS, RouEN. I Dans la chanson Rivegouche, voüi évoquiez Saint-Germain-desPrés, le Paris de l'après-guerre...Vous êtes-vous intéressé à la production artistique de cette Période ? «LES IMAGES QUE JE GII.'RDE EN NTTÉNAOIRE " Ce clui est fraPPant, c'est qu'à l'époque, on ne se rendait Pas bien compte de f importance des artistes A- §, i qui étaient là. Balthus, par exemple, é1ait considéré comme un minable. C'est le fascisme des critiques d'art : il était estampillé figuratif, donc pas intéressant. Or il est bien plus présent que beaucouP d'autres dans nos mémoires ! I- évolution de l'art pose I- abstraction totale on a Pensé : « Les déroutés, nous a artistes d'avant-garde intellectuali' sent tTop, on ne comPrend rien à ce trait jaune au milieu de ce tableau bleu ! Et, en même temPs, on trou" vait ça indéniablement beau, pur... alors pourquoi pas ) Tout ce qui fait réfléchir est intéressant. T{',i if _lcrr',1 mille questions. lesenvolées de Marc €hagall tableau a inspiré la chanson Au ras du pâq-uerettes, dans laquelle Alàin Souchon dit que l'amour fait voler' « J'avaistoujours dans la tête cette image d'amoureux quiflottentâans le ciel ensemble... C'est le bonheur! » Ce AU-DEiiUS DE LAVlLiE, DE MARC CHAGALL h915), COLL PRIVEE' AM : Vous avez dit un jour : « l-'artiste iàit avancer l'humanité, nous, les chanteurs, nous nous contentons de rassurer. » Ne vous considérez'vous pas comme un artiste? La chanson n'autajamais le même poids clue les arts véritables. À !,: Entre u-n grand Poète comme Arthur Rimbaud et un chanteur, il Y a une différence considérable : Rimbaud, comme Van Gogh, était au bord d'un précipice, au bord du gouflre en permanence. Nous, les chanteurs, nous sommes en arrière:nous accomPagnonslhumanité. Nous ne faisons que Iaccompagner, sans rien bousculer. x PROPOS RECUEILLIS PAR G.JEANMONOD Le trait continu de llltatisse gracieuses et des Quelques traits à peine, des courbes càuleurs intenses..' cette farandole incarnait, selon l'artiste lui-même,la « religion du bonheur ». Un génie quifait de Matisse le peintre préféré dAlain Souchon' iA DANsE, D'HENRI MATlssE h909{91o), MoMA. FÉvRtER 2006 ARTS MAGAZTNE