Zeugma - Clemi

Transcription

Zeugma - Clemi
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Edito
« Je me presse de rire de tout de peur d’être
obligé d’en pleurer. » écrit Beaumarchais.
Cette citation fait douloureusement écho
à l’esprit de certains dessins satiriques de
Charlie Hebdo. La satire, c’est d’abord rire.
Rire de l’actualité, rire du drame, rire même
de l’horreur. Car si l’on nous ressasse que
la satire « a pour but de dénoncer par le
ridicule en accentuant les traits grotesques
de certains sujets », elle est aussi une arme
contre le désespoir. Le désespoir ça tue et ça
gangrène la lutte. En se moquant de ces sujets qui font pleurer, ceux là même qui te balancent au fond du trou parce que plus rien
ne semble compréhensible, comme si rien
n’avait jamais eu de sens, Charlie se battait
– et se bat toujours – contre le désespoir. En
refusant d’abandonner face à l’accablement,
le remplaçant par une insolence farouche,
il affirme notre capacité à nous relever de
tout et de pouvoir s’en moquer ; parce que
c’est cela l’espoir, c’est croire que l’on pourra
toujours rire, trouver de la joie même dans
l’horreur, tourner en dérision les pires situations. Puis la satire, c’est le propre de la
démocratie : l’acide – amer des caricatures,
ça choque, et par là même fait réfléchir, se
poser des questions et contester. Ça titille
notre conscience politique et ça l’entretient.
Charlie Hebdo a défendu à plusieurs reprises la presse jeune, certains membres de
sa rédaction ont même rencontré des journalistes lycéens, débattu avec eux, dessiné
pour nous, pour défendre nos droits. Charb
et Pelloux auraient d’ailleurs approuvé la
remarque d’un journaliste jeune, qui disait
que « En fait, Charlie Hebdo, c’est un gros
journal lycéen. ». Alors nous, même si on
n’était pas encore là lors de ces rencontres,
on veut leur rendre hommage. Avec notre
tirage à 800 exemplaires, on ne pèse pas
bien lourd, mais on est animés par la même
volonté de s’exprimer. Alors voici un numéro spécial sur l’actualité désastreuse de ces
dernières semaines, de l’attentat à l’islamophobie, en passant par les diverses réactions,
sublimes ou ridicules, et par notre mobilisation à tous au lycée Michelet. Quelques
dessins aussi, quelques coups de crayons. Le
meilleur hommage aurait été le rire, mais la
précipitation dans laquelle nous avons fait
ce numéro nous a peut-être rendu un peu
trop sérieux sur certaines choses, alors nous
nous en excusons. Nous espérons que vous
apprécierez ce numéro. Parce que nous, on
est en colère, comme vous tous. Et que si la
seule chose qu’on puisse faire à notre échelle
c’est de publier notre petit journal lycéen,
de s’exprimer comme on peut, comme on
veut, alors nous le faisons. Parce que nous
sommes Charlie.
Florine HAUSFATER
P.S. : Certains rédacteurs et dessinateurs ont souhaité signer « Charlie », suivi de leur nom
de famille pour pouvoir identifier les auteurs. D’autres ont préféré signer comme d’habitude, pour des raisons et convictions différentes.
D’ailleurs, certains articles ne reflètent parfois pas du tout l’avis de toute la rédaction. Mais
c’est ça aussi la liberté d’expression.
1
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Sophia Papon
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30
Sommaire
Le massacre de Charlie Hebdo
Nous en avons tous été informé et
avons tous subi ce même deuil du symbole
de la liberté d’expression en France lors de
l’attentat au sein même de la rédaction de
l’hebdomadaire Charlie Hebdo.
12 morts au total, toutes victimes de la folie
des terroristes pensant agir sous la protection d’Allah.
Parmi celles-ci nous pourrons retrouver deux policiers tués avant l’entrée
des frères Kouachi dans l’immeuble. L’un
d’entre eux, Ahmed Merabet, avait été blessé avant d’être achevé d’une balle dans la tête
alors que celui ci était filmé par les habitants
de l’immeuble face à la rédaction. Ils sont
morts en tentant de sauver leurs prochains
et ne seront pas oubliés. Les autres victimes,
tous rédacteurs, dessinateurs, correcteurs,
chroniqueurs ou encore journalistes de
Charlie hebdo ont ainsi été abattus sans
pitié sous les tirs des armes lourdes apportées par les terroristes. Parmi les plus reconnus de la rédaction, Jean Cabu et Stéphane
Charbonnier, respectivement surnommés
Cabu et Charb, ou encore le génial Georges
Wolinsky et enfin Tignous, de son vrai nom
Bernard Verlhac. Tous ces hommes étaient
des piliers du journal, des chroniqueurs courageux, des dessinateurs au culot ravageur,
tous prêt à défendre leur prochain sans jamais renâcler à la tâche. C’étaient des chics
types, toujours prêt à se marrer entre potes
29
et ils étaient ouverts à tous les nouveaux qui
entraient dans la rédaction ! Il est vrai que
nombre de leur satires et moqueries avaient
pour sujet Al Qaida et l’islamisme radical
pendant un temps mais la quantité d’articles
et de dessins défendant l’égalité des sexe,
des droits, des classes sociales mais aussi dénonçant une économie libérale ou encore
des politiques nationales et internationales
corrompues, des droits humains bafoués et
l’augmentation des injustices sociales étaient
des sujets largement abordés. Moins dangereux que ceux que l’on pourrait qualifier de
«trop plein d’audace» mais néanmoins totalement justifiés. J’aimerais aussi finir mon
article par une demande à tous ceux qui
liront ce journal ; ne confondez pas musulmans et islamistes extrémistes, ne créez pas
d’amalgames car c’est exactement ce qu’AQMI souhaite.
L’histoire de Charlie Hebdo p.3-4
FN et Charlie p.15
Besoin d’argent ? Achetez Charlie p.4
Fusillade de Montrouge p.17
Lassitude p.5
Le fanatisme au cours du temps p.18
Un pour tous, tous pour un p.6
La théorie du complot p.19
« C’est l’encre qui doit couler, pas
le sang ! » p.8-10
« Peut-on rire de tout ? » p.21-22
Au regard de cette phrase, sommes
nous véritablement tous des Charlie ? Aurions-nous tous eu ce même courage pour
défendre la liberté d’expression ?
Charlie Redolfi
L’islamophobie p.24-25
Recyclez-vous en ordure : faites de la
récup’ politique p13-14
Rédactrices et rédacteurs :
«Je n’ai pas peur des représailles. Je n’ai pas
de gosses, pas de femme, pas de voiture, pas
de crédit, ça fait sûrement un peu pompeux,
mais je préfère mourir debout que vivre à
genoux «, Charb.
« C’est bien fait pour leurs gueules » p.23
Prises d’otages : ça arrive aussi
en France p.12
Julien SIMON
Pauline LE BOZEC
Corentin JAN
Sofia PAPON
Nicolas SBRAIRE
Juliette CALORI
Boris DUFFAL
Naomi KUKANSAMI
Félix DESMARETZ
Camille MORIN
Tristan VARTANIAN
Sandrine OGE
Arthur BOLDRON
Kevin DAY
Simon SALOMON
Valentin DESVEAUX
Florine HAUSFATER
Merci aussi à Gaël COPIN
Le massacre de Charlie Hebdo p.29
Annonce de Lycéen p.30
Ours
Dessinateurs et dessinatrices :
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Malo DOUCET
Kenza DJERIRI
Eva GUESBA
Mattis CEBRON
Violette DELMAS
KevinDAY
&WB(6&4#"
Correcteurs et correctrice :
Félix DESMARETZ
Léo TURQUIS
Florine HAUSFATER
Maquettiste : Léo BEAUVAIS GELY
Rédactrice en chef et directrice de publication : Florine
HAUSFATER
Pour CHARLIE, pour les policiers tués, les juifs assassinés, et les mosquées attaquées.
2
L’histoire de Charlie Hebdo
Charlie Hebdo tire son origine
du journal Hara-kiri. Ce dernier est fondé en 1960 par Georges Bernier et François Cavanna qui décrivent ce journal
mensuel comme « bête et méchant ».
Il sera plusieurs fois interdit de publication.
En 1969 est créée la version
hebdomadaire du journal : L’Hebdo
Hara-kiri. Lors de la mort de Charles
de Gaulle en novembre 1970, L’Hebdo Hara-kiri titre « Bal tragique à Colombey - un mort » ; dix jours avant, un
incendie dans une discothèque tuait 146
personnes. L’hebdomadaire est frappé
d’interdiction de parution. Pour contrer
cette sanction, le journal est renommé
Charlie Hebdo.
Le journal satirique est un des
seuls journaux à ne pas contenir de publicité ; alors en 1981, quand les ventes
de l’hebdomadaire baissent, le journal
est contraint d’arrêter de paraître. Le
dernier numéro sort le 23 décembre
1981.
Le journal renaît en 1992 suite à la démission de Philippe Val et de Cabu de la
Grosse Bertha. Cabu, Gébé, le chanteur
Renaud, et Val financent le premier numéro.
L’affaire « des caricatures » commence le 30 septembre 2005 quand le
journal danois Jyllands-Posten publie
12 caricatures de Mahomet. Suite au re-
3
fus du gouvernement danois de rencontrer certains diplomates de pays musulmans, certains imams danois sont allés
dans les pays arabes pour attiser l’intérêt
sur le sujet. Ces imams ont diffusé un
faux dossier contenant, certes, les caricatures du Jyllands-Posten, mais aussi des
images manipulées ainsi que des fausses
informations pouvant inciter à la haine.
Cette tournée donne à l’affaire une ampleur internationale.
Charlie Hebdo entre dans l’affaire lorsque, le 8 février 2006, il publie
ces caricatures « par solidarité et par principe » explique Philippe Val. Le numéro
les contenant est publié et vendu à 160
000 exemplaires (contre 140 000). Ces
caricatures associées à la une de Cabu : «
Mahomet débordé par les intégristes »,
avec le prophète disant « C’est dur d’être
aimé par des cons » provoquera la colère
chez nombre de musulmans. Ainsi, le
Conseil Français du Culte Musulman
demandera l’interdiction de ce numéro
auprès de la justice. Finalement, Charlie
Hebdo sera relaxé par la justice.
Charlie est de nouveau confronté
à la baisse de ses ventes en 2010 (48 000
exemplaires dont un quart d’abonnés)
; il augmente ses prix pour la première
fois depuis 9 ans. Charb justifie alors «
En pleine crise de la presse, nous n’avons
pas et nous ne voulons pas d’industriels
fortunés comme actionnaires. .
..
28
Un grand bravo à tous les lycéens pour leur magnifiques et émouvants hommages. Leur participation
spontanée est un véritable gage d’espoir et d’humanité.
rédacteur en chef » avec la victoire d’Ennahdha (le parti islamiste) en Tunisie.
Le journal aux sensibilités clairement de gauche, a également eu des problèmes avec certaines personnalités politiques. Ainsi en 2012 l’hebdomadaire
publie une fausse affiche de Marine le
Pen qui portera plainte.
Globalement, les plaintes se sont
raréfiées dans les années 2000 mais l’opposition contre Charlie Hebdo prend de
plus en plus la forme du terrorisme…
Voilà donc l’histoire de Charlie Hebdo, un journal qui n’a jamais cessé de
dire dans ses numéros ce qu’il pensait
réellement ; sans autocensure mais avec
humour et ironie. Charlie Boldron
Pas plus que nous ne voulons dépendre
de la publicité. Nous ne touchons donc
pas les aides de l’État dont bénéficient
les journaux dits «à faibles ressources publicitaires», puisque, de publicité, nous
n’en avons pas. L’indépendance, l’indépendance totale, a un prix. La presse
gratuite coûte des millions de compromis éditoriaux, la presse libre coûte, elle,
2,50 euros. Et son existence ne repose
que sur vous. »
Un incendie criminel détruit le
siège de Charlie Hebdo alors situé dans
le 20ème arrondissement de la capitale
parisienne dans la nuit du 1er au 2 novembre 2011. Il fait suite à l’annonce de
la parution d’un numéro spécial, intitulé
« Charia Hebdo, avec Mahomet comme
Besoin d’argent ? Achetez Charlie
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27
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Ou plutôt, revendez-le. La vague de
soutien à Charlie Hebdo a également entraîné
un business autour de tout ce qui est Charlie.
Vous pouvez depuis plusieurs jours trouver
n’importe quel numéro de Charlie Hebdo sur
Ebay.... pour une centaine d’euros généralement. D’ailleurs, le numéro post-attentat, rapidement en rupture de stock, a envahi le site
de vente. Certains vendeurs très optimistes
tentent de les vendre à des prix exorbitants.
Ce n’est pas stupide de dépenser 2 euros pour
en récolter 150 après tout, c’est comme gagner
au loto. Mais Ebay a tenu à mettre les choses
au point : ceux qui vendent des produits liés à
Charlie Hebdo se doivent de donner une partie des bénéfices pour soutenir le journal.
la marche républicaine du 11 janvier, vous
avez peut-être croisé des personnes profitant
de l’occasion pour vendre des hauts «Je suis
Charlie». Si ce n’est pas le cas, ne vous inquiétez pas : vous pouvez trouver tout ce que vous
voulez sur internet, du mug à la coque Iphone.
Evidemment, les internautes ont réagi rapidement face à ces récupérations commerciales
et les sites ont, pour la plupart, fermé sous la
pression. Cependant certains de ces vendeurs
se sont exprimés sur leurs raisons : récolter des
fonds pour aider Charlie Hebdo. Est-ce une
simple excuse ? Ce n’est pas important.
Dans quelques mois vous pourrez
sûrement trouver en librairie des livres sur le
07 janvier 2015, des soi-disant hommages aux
morts... On ne va pas cesser de voir défiler des
produits «Charlie», mais il ne tient qu’à vous
d’encourager ces ventes.
Petit Charlie
Il y en a qui revendent, il y en a
d’autres qui préfèrent créer. «Je suis Charlie» est devenu en quelques jours un logo. A
4
Lassitude
Charlie hebdo, le drame survenu
le mercredi 7 janvier nous affecte tous,
de n’importe quel horizon, de n’importe
quelle nationalité. Certains voient en cet
acte de « barbarie » une sorte de vengeance
par rapport à certaines unes publiées par
Charlie. Certains ne s’en préoccupent pas
et, pire, d’autres s’emplissent d’une lassitude par rapport à ce qu’il s’est passé il y a
à peine quelques jours.
Comment des citoyens français,
certains même dans notre lycée, peuvent
se lasser d’un tel acte … Cette lassitude
est due aux médias, au bouche-à-oreille
continu de nous lycéens ; mais à ce point !
Ces infos en continu qui se perpétuent
dans les cours des lycées, dans les cafés et
qui agacent certains. Des hommes, des
femmes, qui, devant leur poste de télévision, changent de chaîne lassés d’écouter Jean-Pierre Pernaud nous détailler les
deux prises d’otages de vendredi, ce qui
est inacceptable. Ces personnes ont bien
sûr formé en eux une sorte de compassion
envers les membres de la famille des défunts mais qui s’estompe au fil des jours,
des heures... Ces lycéens qui ne s’arrêtent
plus devant les affiches « Je suis Charlie »,
qui ne sont plus émus devant certaines
vidéos d’union nationale, devraient se
taire, garder leur ressenti. Ces «lassés» qui
envahissent et contaminent notre lycée
avec leur arguments provocateurs sont,
excusez-moi du terme, d’énormes idiots
! Qu’ils ne viennent pas détruire le mo-
ral de républicains qui soutiennent et défendent Charlie ! Ces «lassés» ne le sont
pas lorsqu’un événement leur rapporte
du profit ou de la joie, mais le deuil national leur est incompréhensible. Alors à
quoi bon fêter le 14 Juillet ou Noël ! Ces
mêmes personnes ne sont derrière Charlie
que pour un effet de «mode» éphémère
qui une fois pompé jusqu’au sang ne sert
plus à rien à leurs yeux et n’est plus qu’un
prétexte de conversation lors d’interminables heures de perm’ ou d’un des rares
débats familiaux ! Ces gars qu’on devrait
plaindre par leur modeste cortex cingulaire postérieur qui leur empêche de compatir devant ce drame national ! L’abruti
savant qui dénonce l’acte de barbarie des
Kouachi et qui vient se plaindre que toutes
les unes de Libé en ce moment sont sur
Charlie devrait juste un moment penser à
ses paroles et ses actes. Toi, l’abruti savant,
crois-tu que les américains ne pleurent
plus les morts du 11 septembre ? Crois-tu
que les mères des 237 lycéennes enlevées
par Boko Haram ne pleurent plus leur(s)
fille(s) ?
Saches que tes arguments, quels
qu’ils soient ne changeront pas ma façon de penser et resteront dans le vague,
comme un murmure incompréhensible.
Parler, discuter, chanter telle est ma devise
de liberté. Mais sachez bien que je ne suis
pas obligé de vous écouter...
Merci
Charlie Day
5
26
Un pour tous, tous pour un
Et quelles sont les conséquences religion ou couleur de peau ne compte
de l’islamophobie, de celle manifestée pas, c’est pas du jeu de dire que parce
récemment par bon nombre de Français que Machin est Blanc et catholique, il
? Rappelons que l’islamophobie, me dit est plus Français que Truc qui est d’une
mon pote Wiki « peut se définir comme autre couleur que lui et bouddhiste, juif,
la peur ou une vision péjorative de l’is- musulman, ou témoin de Jéhovah ou
lam, des musulmans». Ici c’est une peur athée ou que sais-je ; c’est juste raciste)
qui entraîne une cinquan«Les hommes (note «les hommes (note persontaine d’actes anti-musulpersonnelle : et les nelle : et les femmes) naissent
mans depuis l’attentat à
femmes) naissent et et demeurent libres et égaux
Charlie Hebdo. Graffitis
demeurent libres et en droits.» Dans ces droits,
insultants sur des moségaux en droits.» vous savez ce qu’il y a. La
quées, des têtes de porcs
liberté d’expression, d’assoou de sangliers devant les
ciation, le droit de travailler,
mêmes bâtiments religieux, coups de d’habiter sur le sol français, de pratifeux, incendies... La liste des horreurs quer sa religion sans tenter de l’imposer
continue, et je ne peux même pas dire à autrui... La liberté d’expression est ici
«on ne les compte plus» parce qu’on les le problème. Parce que le racisme n’est
compte, parce que ça blesse, parce que ça pas une opinion. C’est juste inhumain.
tue.
Le racisme et l’extrémisme sont des couJe ne suis pas spécialiste en sins proches, et croyez-moi, vu la masse
sciences, vous l’aurez compris, ni même de Charlie armés de leurs plus beau styen droit, mais Wiki à ma droite me dit lo-billes en promo chez Liddle (au même
qu’un être humain est une «créature vi- rayon que les punchlines de Booba), à
vante membre de l’espèce humaine». votre place, ça me gênerait d’être dans la
Jusqu’à preuve du contraire, c’est ce que même famille que ces deux-là.
les hommes et femmes sont ici en France.
Et en France (test : si vous avez une vraie
Pauline Le Bozec
carte d’identité française produite par
l’Etat français, vous êtes français. Votre
25
Le 7 Janvier 2015, Charlie Hebdo, un journal satirique, est victime d’un
attentat ; la France est touchée. La France
est en deuil. Alors qu’elle connaît son plus
grand attentat depuis 50 ans environ, elle
reçoit le soutien des ses alliés européens et
bien plus encore.
Charlie Hebdo reçoit premièrement le soutien de millions de Français
qui dessinent pour rendre hommage aux
dessinateurs et journalistes tués durant
l’assaut. Le dessin de Plantu « De tout
cœur avec Charlie Hebdo » écrit à l’encre
rouge, pour symboliser le sang, est réutilisé et partagé sur plusieurs surfaces tels que
Facebook, Twitter... « Je suis Charlie. » est
la phrase utilisée comme slogan et hashtag sur Twitter (5 millions de tweets) pour
montrer son soutien pour cette cause.
Un brassard noir est porté sur plusieurs
chaînes françaises, toutes les chaînes d’informations soutiennent Charlie Hebdo
et diffusent en direct les informations
acquises. Plusieurs marches et rassemblements sont alors mis en place devant les
ambassades française de différents pays
tels que l’Allemagne, la Belgique, l ‘Angleterre, l’Italie, les U.S.A., certains pays
d’Afrique et tant d’autres. En soutenant
cette cause, ces pays défendent la liberté
d’expression qui est de plus en plus menacée ces derniers temps. Le journal Charlie
Hebdo trouve du soutien chez des collègues de Libération, et s’installent dans
leurs bureaux pour produire le prochain
Charlie Hebdo, qui est sorti le mercredi 14/01/15, soit une semaine après le
drame, tiré à 5 millions d’exemplaires.
Beaucoup de célébrités tels que Madonna, Justin Timberlake, George Clooney et
d’autres se montrent choqués par ces actes
monstrueux qui ont touché la France ;
Madonna dit : « Tuer au nom de Dieu
est une idée de l’homme et pas celle de
Dieu. L’ignorance engendre l’intolérance
et la peur ». Des millions de messages et
dessins du monde entier, des caricatures
de Charb, Cabu et Wolinski sont reprises,
d’autres sont transformées, des premières
de couvertures retransmises à travers le
monde. Toutes ces formes de soutien sont
envoyées à l’équipe de Charlie Hebdo et
aux proches des personnes décédées.
Le nombre d’abonnements à
Charlie Hebdo a doublé. Les Français se
mobilisent, environ 1 million d’euros de
dons sont envoyés au site « JaideCharlie.
fr ». L’association Presse et Pluralisme
débloque 200 000 d’euros de dons, 100
000 euros qu’elle puise dans ses réserves
et l’autre partie est une sorte d’avance
sur les dons à venir. Ils reçoivent également un don de 250 000 euros effectué
par Google pour l’innovation numérique.
La banque publique d’investissement
s’est engagée à prendre une cinquantaine
d’abonnements à Charlie Hebdo.
Des représentants européens,
américains, africains et asiatiques se sont
déplacés pour soutenir la marche historique du 11 janvier, une marche qui symbolise la bataille contre les actes terroristes
et l’atteinte à la liberté d’expression. C’est
dans des moments difficiles comme celui-ci que l’on doit être soudé, effectivement, l’Union fait la force. Percy Pig
6
L’islamophobie, Booba et vos grands-mères
Ce mois-ci, je n’ai pas envie
d’écrire un truc joli, avec des tournures
de phrases pour vous faire rire, même si
c’est ce que je suis censée faire parce que
le rire est l’arme de ceux qui se battent
à la loyale (par exemple Booba : ses punchlines à deux euros en promo chez
Liddle vous font rire, et il s’est auto-proclamé «duc de Boulogne». CQFD.). Je
n’ai pas envie de rire mais il le faut. Chacun a son avis sur la liberté d’expression,
l’importance de rire de tout et surtout
de tous ; moi je pense que c’est essentiel. Alors on a tous nos propres limites,
et les caricatures du prophète Mahomet
étaient celles des frères Kouachi – mais
vous ne me lisez pas pour que je vous
parle d’eux.
Moi, je veux vous parler d’un
mot que vous entendez depuis des jours,
sans savoir, peut-être, sa signification :
l’amalgame. «L’amalgame, dans son sens
figuré de procédé de langage, consiste à
associer abusivement des personnes, des
groupes ou des idées.» nous dit Wikipédia, qui reste une valeur sûre. Depuis
quelques jours, « amalgame » rime avec «
musulman » («Ne faites pas d’amalgames,
les musulmans ne sont pas islamistes !»,
ce qui est totalement vrai. Je sais que ça
vous semble basique mais ça me semble
important de justement rappeler la base
7
du respect de l’autre) qui lui-même ne
rime pas avec islamiste (oui, voilà ce que
l’on nous apprend en L).Des imbéciles
essayent malheureusement d’imbriquer
ces deux notions ensemble, comme un
enfant qui tente de coller un Lego à un
Playmobil.
Qui sont-ils ? Qu’est ce que j’en
sais ? Ce serait faire des généralités ou
du prosélytisme que de les montrer du
doigt. Ça peut être la copine de votre
grand-mère, votre prof de maths, votre
voisin du 3ème étage, votre grande sœur,
c’est peut-être vous. C’est dû à quoi ? Là
encore, c’est délicat de définir ce qui
a foiré chez quelqu’un au point qu’il
confonde une religion prônant l’amour
et la paix, et un groupe d’intégristes extrémistes et terroristes (les mots en -iste
c’est toujours mauvais signe).
J’espère ne pas me tromper
quand je dis que c’est l’éducation qui a
un peu dérivé et s’est finie en banderoles
insultantes, racistes, rejoignant étrangement quelques réflexions islamistes (éliminer ceux qui te font chier, en bref ).
La tolérance on ne naît pas sans, ni avec.
La stupidité, c’est pareil. Ce sont deux
choses qui s’acquièrent ou s’évitent pendant la vie, et particulièrement durant
l’enfance et l’adolescence, où l’on forme
son esprit..
..
24
« C’est bien fait pour leurs gueules »
Alors oui, on a entendu des gens
réagir comme ça en parlant de journalistes
lâchement assassinés. Pas énormément, mais
l’embêtant c’est que les cons, ça fait du bruit.
Je vais ici m’adresser directement à ceux qui
ont tenu, ou qui tiennent encore de tels propos. Alors, est-ce juste de dire qu’ils l’ont
mérité ? Non, c’est juste que vous n’avez rien
compris.
Le seul tort de ces gars, c’est d’avoir
utilisé un crayon, et ils ont reçu des balles ;
vous appelez ça de la justice équitable vous ?
Certes, vous avez le droit d’être choqué par
les caricatures du prophète qui ont été publiées dans Charlie Hebdo (c’est d’ailleurs le
but d’un journal dit satirique). Mais aucune
personne saine d’esprit ne peut se réjouir
de leur mort. Par exemple, est ce que tu vas
aller planter ton prof parce que tu n’aimes
pas son cours et qu’il te fait tout le temps
des remarques ? Non. On est en France, on
est en 2015, et il faut se mettre dans la tête
qu’on ne tue pas des gens parce que l’on
n’est pas d’accord avec leurs idées, d’autant
plus qu’elles ne font de mal à personne ! Je
dis « on est en France » parce que cette idée
de liberté d’expression, le pays a eu le temps
d’en connaître le prix depuis la Révolution
et l’époque des Lumières. Je sais que l’on a
tous ou presque vu ou entendu cette phrase
de Evelyn Hall (et non pas Voltaire, on vous
a menti) ces derniers jours, mais je la réécris
ici parce qu’elle résume bien cette valeur de la
République française qui a été attaquée : « Je
ne suis pas d’accord avec ce que vous dites,
mais je défendrais jusqu’à ma mort votre
droit de le dire ». C’est juste ça : vous pouvez
désapprouver des mots, mais vous ne pouvez
pas coudre la bouche de celui qui les dit.
Charlie Simon
Ah mais ce n’est pas fini ? Attendez,
que vois-je arriver au loin ? Des défenseurs
de Dieudonné ! Faut dire qu’on les attendait
un peu. Cela dit c’est vrai, pourquoi parler
de liberté d’expression dans le cas des caricatures de Mahomet alors qu’on a tout bonnement interdit ce cher Dieudo de représentation ? Bon, déjà on va clarifier quelque
chose : Charlie Hebdo n’est pas et n’a jamais
été anti-islam. À la limite anticlérical, mais
la seule chose qu’ils condamnent, c’est la
connerie et l’usage abusif que certains, en
particulier les grands de ce monde, font
23
des religions. Dieudonné, lui, se déclarait
ouvertement antisémite. Ses propos sur les
chambres à gaz et sur la communauté juive,
on appelle ça « apologie de crime contre
l’humanité » et « incitation à la haine raciale ».
Et aller jusqu’à nier l’existence même de la
Shoah dans certaines de ses interventions ça
s’appelle le négationnisme. Donc voilà. Les
trois choses qu’on lui reproche principalement sont clairement interdites par le code
pénal français. Le blasphème, c’est pas illégal. Pourquoi ? Parce qu’on est dans un pays
laïc. Fin du débat.
« C’est l’encre qui doit couler, pas le sang ! »
Bonjour à tous chers lecteurs !
du Lycée Michelet
Dès 7h, nombreux sont les élèves
venus manifester leur soutien au journal CHARLIE HEBDO. L’atmosphère
est pesante, la foule est très calme mais
encore choquée par les évènements de
la veille. On remarque la crispation sur
les visages. Au fi du temps, les langues se
délient et les élèves expriment leurs sentiments. Les seuls mots et paroles échangés à cette heure si matinale étaient : «
Quelle horreur » ou encore « J’en reviens
pas ».
Aucune pensée négative envers
les autres lycéens, tout le monde s’était
rassemblés pour la même chose : faire
entendre sa voix !
A la grille d’entrée, pancartes,
slogans, dessins, sont suspendus afin
de manifester l’indignation commune.
On peut lire des slogans tels que « C’est
l’encre qui doit couler, pas le sang », « Ils
voulaient nous mettre à genoux, ils nous
ont mis debout », « Le terrorisme n’a pas
de religion » et bien sûr « Je suis Charlie
».
Tant d’élèves regroupés de leur plein gré
de si bonne heure, c’était inespéré ! .
Hommage aujourd’hui dans ce
numéro spécial dédié à Charlie Hebdo.
En règle générale, j’aime bien le mercredi, c’est une journée agréable. Pas de lycée l’après-midi, un moment de détente
entre les cours qui se densifient en ce milieu d’année. Ce 7 janvier, il faisait trop
froid pour rester longtemps devant l’établissement après la classe, nous étions
nombreux à rentrer rapidement chez
nous. Je franchis le seuil de ma porte ; la
nouvelle était tombée.
Je ne veux pas relater les faits.
Vous avez tous suivi cette terrifiante affaire avec une attention remarquable,
par la télé, les journaux ou même les réseaux sociaux, cela ne nous mènerait pas
à grand-chose.
La conscience politique de Michelet était active dès lors que nous
avons décidé de nous rassembler jeudi
matin (sur une superbe initiative de la
TES2).
Jeudi 8 janvier 2015 : journée de
deuil national, l’une des journées les plus
émouvantes et éprouvantes de l’histoire
..
8
Plus tard, tout le monde rentre
en cours. Car pour les lycéens, ne pas
aller en cours serait contradictoire
sachant que c’est l’éducation scolaire
qui nous permet d’écrire, de dessiner
et d’avoir des opinions... Bref, de raisonner au lieu d’agir sans réfléchir.
La peur a commencé à se diffuser plus tard dans la matinée. Peu
après huit heures, on apprend qu’une
nouvelle fusillade a éclaté à Montrouge. Le préfet a ordonné de confiner le
lycée. L’enfer continue...
À l’intérieur des classes, on
sentait une sorte de flottement général. Les cours se déroulaient, mais
comment se concentrer ? Les élèves
tentaient de suivre l’actualité, beaucoup de professeurs essayaient de
masquer leur bouleversement. Je me
demandais sincèrement ce qu’une
simple leçon, quelle que soit la matière, était, comparée à ce qu’il se passait alors.
Puis, juste avant midi, les
élèves se rassemblent pour observer
une minute de silence. Le Proviseur
s’exprime : « La cause en vaut la peine
! Il est midi et dans toutes les écoles
de France, les élèves, les enseignants
et les adultes qui travaillent dans les
établissements sont regroupés. Je
vous transmets quelques mots de la
part du ministre de l’Education Nationale, mais plus simplement de la
part d’un être humain, qui comme
vous, est horrifié par ce qu’il s’est
passé : « L’attentat meurtrier contre
l’hebdomadaire CHARLIE HEBDO a atteint notre République au
cœur. La liberté d’expression est au
fondement de toutes les libertés : la
liberté de conscience et le respect des
opinions individuelles sont les principes qui nous permettent de vivre
ensemble. »
Je voudrais vous lire quelques
strophes d’un magnifique poème de
Louis ARAGON, écrit pendant l’occupation allemande alors qu’il était
résistant. Ecoutez et réfléchissez-y.
La Rose et le Réséda
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Qu’importe comment s’appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l’un fut de la chapelle
Et l’autre s’y dérobât
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du cœur des bras
Et tous les deux disaient qu’elle
Vive et qui vivra verra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au cœur du commun combat
.
..
9
« …Et pas n’importe comment. ». La
manière de rire d’une chose ne doit pas
avoir pour but de diffamer et de faire
mal. Cela est par ailleurs répressible !
La justice est prédisposée à sévir tout
propos diffamatoires. Mais, et c’est là
que les choses se compliquent : est-ce
que dire, comme Charlie Hebdo, que
« le coran c’est de la merde…» dans
un journal satirique est diffamatoire
? Cela dépend du contexte et s’il y a
une argumentation derrière qui ne
l’est pas. En effet, comme vu dans le
premier paragraphe, un propos peut
être mal interprété, donc au premier
degré et provoquer un tollé.
Mais il faut savoir que ce
journal est satirique donc sous couvert explicite du 2nd degré, seuls des
idiots ne pourraient pas s’en rendre
compte. Enfin, il s’agit de la pensée
cachée. La suite de cet extrait est « …,
ça n’arrête pas les balles ! ». Cela fait
référence au massacre de plus de 700
personnes le 13 Août 2013 lors d’une
manifestation en Égypte, pays dont
la majeure population est de confession musulmane, par les militaires,
aussi de confession musulmane, qui
ont renversé Mohamed Morsi, premier président Égyptien élu par le
peuple. Sous la satire voulant rendre
cet évènement comique, il se cache
donc une réalité ironique et tragique
qui dénonce une hypocrisie humaine
chez les bourreaux se disant faire partie d’un culte mais sans en respecter
les règles. De cela en pâtissent le reste
des croyants se pensant protégés des «
leurs » par ces mêmes règles élémentaires soit, dans le cas présent : « tu ne
tueras point ». De plus, il faut se rappeler qu’une image est associée à ces
termes accentuant le comique et le
ridicule des personnes visées qui sont
ici les militaires et non réellement le
Coran. Le comique ne fait pas toujours rire mais il n’est en aucun cas
inculpable et diffamatoire.
Il faut donc faire attention
lorsque l’on rit d’une chose. Selon le
milieu dans lequel nous nous trouvons, nous n’avons pas les mêmes
sources de rire, les mêmes tabous, que
nous pouvons tout de même tourner
en dérision au risque que cela paraisse
déplacé. Car nous n’avons pas tous la
même sensibilité, il faut savoir choisir ses partenaires de joie car comme
le dit Bergson : « Le comique naîtra
quand les hommes réunis en groupe
dirigeront leur attention sur l’un
d’entre eux en faisant taire leur sensibilité et exerçant leur seule intelligence
». Sans oublier que le rire commence
par celui de soi.
La Patate Flamboyante
22
« Peut-on rire de tout ? »
À cela, Pierre Desproges, Mi- blancs, les noirs, les asiatiques, les
chel Colucci (Coluche), Spinoza, petits, les grands, les handicapés…
Bergson, et tant d’autres ont répondu Tout peut prêter à rire ! Néanmoins,
« Oui ». On peut même ajouter que pas avec certaines personnes en notre
« Le rire est le propre de l’homme » compagnie ou écoute. Pour le citer
(Rabelais). En effet, après les récents encore une fois : « Il vaut mieux riévènements dont toute la France a goler d’Auschwitz avec un juif que
entendu parler, on pouvait se deman- de jouer au scrabble avec Klaus Barder encore une fois si,
bie. ». Rigoler d’une
«
On
peut
rire
de
oui ou non, on peut rire
chose, donc la tourtout
mais
pas
avec
de tout. Car c’est bien à
ner en dérision, c’est
cause d’une volonté de
n’importe qui. » souvent parler au sefaire rire, par la caricacond degré. En comture et la satire, que ces drames ont eu pagnie d’une personne qui n’est pas
lieu. Du moins des réactions à cette ouverte d’esprit c’est voir le risque
volonté. Bien sûr ce débat a déjà été d’une interprétation primaire et une
résolu, bien que toujours en cours, mécompréhension qui peut aboutir à
par de nombreux intellectuels ouverts une réaction déplacée : soit, dans un
d’esprit.
cas extrême, ces attentats de la part
Selon P. Desproges : « On peut de personnes fermées d’esprit n’ayant
rire de tout mais pas avec n’importe aucun sens de l’autodérision, soit
qui. ». Ce que signifie cette phrase est voir apparaître des partisans de l’idée
que tout comportement humain est transmise par une transcription litrisible. On peut rire de tout ce qui térale de notre plaisanterie et qui est
nous entoure et on peut même rire de donc contraire au message que l’on
personnes ou groupes distincts tels les voulait faire passer. Il faut donc faire
homosexuels, les chrétiens, les juifs, attention à la portée de nos plaisante.
les musulmans, les hétérosexuels, les ries.
..
Ce combat commun, c’est celui que
nous sommes en train de mener aujourd’hui,
tous ensembles contre la barbarie. Hier, l’ancien directeur de CHARLIE HEBDO a dit :
« Ayons le courage de ne pas avoir peur ».
Soyons courageux ensemble ! Continuez à
être vigilants ! En mémoire de celles et ceux
qui sont tombés, je vous demande d’observer quelques instants de silence. »
On entendait déjà certains élèves et
professeurs pleurer. Un silence pesant planait au-dessus de nombreuses têtes. Seuls la
pluie et le glas des églises se font entendre.
Certains stylos se sont élevés droit vers le ciel
en signe de contestation à la violence face
aux dessins qui, jusqu’à preuve du contraire,
n’ont jamais tué. C’est lorsque l’on observait ces simples stylos levés devant l’entrée
du CDI que l’on avait le droit d’être fier de
notre action, aussi minime soit-elle.
« Encore un mot ...vous avez affiché à la porte du lycée un slogan que je
vous propose de vous approprier « C’est
l’encre qui doit couler, pas le sang ». Alors
cette encre, faites la couler sans modération
! Vous avez, sans doute, remarqué que dans
les pays totalitaires, la première mesure que
prennent les dictateurs, est de fermer les
écoles. Ca n’est pas un hasard ! La science, le
savoir, la culture et la réflexion sont les plus
beaux ennemis du totalitarisme. Alors, soyez
à votre façon, les ennemis du totalitarisme :
apprenez, écrivez, lisez des poèmes, imprégnez-vous de cette culture qui fait notre fierté collective. »
Cet événement n’a fait qu’intensifier l’émotion omniprésente pendant la minute de
silence suivie d’une Marseillaise inattendue
mais plus que bienvenue.
Puis, cette phrase que nous n’avions
presque tous jamais entendu avant mercredi dernier : « Je préfère mourir debout que
vivre à genoux », disait Charb. La marche
qui s’est déroulée le dimanche suivant nous
a donné la preuve que ces mots ne sont pas
des paroles en l’air. Le beau moment de ces
derniers jours, ce fut de rentrer en cours
lundi matin pour entendre un peu partout qu’une majorité d’entre nous s’étaient
rendue à la grande marche la veille, criant
à l’unisson pour les victimes de Charlie et
pour un monde libre.
Et si vous vous demandez toujours où est
Charlie ? Regardez autour de vous… Nous
sommes Charlie !
Juliette CALORI, Camille MORIN et Tristan VARTANIAN
P.S. : Une dernière chose : vendredi soir, les membres du Zeugma se sont
réunis pour préparer au mieux ce numéro. Nous nous sommes entendus pour
nous répartir les articles autour de ce sujet. Je devais écrire à propos du recrutement des djihadistes. J’ai essayé, mais je n’en étais pas du tout satisfaite. L’article
que j’ai écrit pour cet article commun n’était certes pas grandiose, mais il vient
du cœur et c’est ce dont je voulais parler. N’est-ce pas cela, la liberté d’expression ?
Juliette CALORI
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La théorie du complot
A chaque attentat sa théorie du
complot ! Et celui qui s’est produit le 7 janvier au siège du tristement célèbre journal
satirique ne déroge pas à la règle...
Depuis quelques jours, l’affaire Charlie Hebdo a divisé l’opinion publique, notamment
sur les réseaux sociaux où certains pensent
qu’il s’agirait en fait d’un complot sioniste
visant à salir l’image de l’Islam.
Ils pointent du doigt l’amateurisme
des terroristes qui ont oublié une de leurs
cartes d’identité ainsi que plusieurs chargeurs de kalashnikov portant leur empreinte
ADN dans leur voiture. Cette voiture a
d’ailleurs soulevé quelques doutes sur les
réseaux sociaux où certains affirmaient que
la couleur des rétroviseurs serait passée de
blanc à noir entre le moment de l’attentat
et celui où les policiers ont retrouvé le véhicule. Mais il s’agissait en réalité du reflet
du soleil sur les rétroviseurs chromés de la
Citroën !
Autre fait troublant pour les complotistes : la vidéo enregistrée par l’un des
témoins, où l’ont voit des personnes équipées de gilets pare-balles sur le toit de l’immeuble, comme s’ils savaient qu’une attaque
aurait lieu. Ce qui n’est pas si choquant que
cela puisque l’équipe de Charlie Hebdo bénéficiait de ces gilets grâce à leur protection
policière mise en place depuis l’incendie de
2011.
Sur cette même vidéo, on voit
l’exécution d’un policier par l’un des frères
19
Kouachi. Même si le fait qu’il n’y ait pas eu
d’effusion de sang au moment de l’acte est
étrange, cela ne prouve pas que le policier ait
survécu...
S’agissant de la prise d’otages ayant
eu lieue à Hyper Cacher, une vidéo sur YouTube nous montre que Amedy Coulibaly
avait les mains jointes quelques secondes
avant de mourir. Ce qui est surprenant
puisqu’il avait aussi deux kalashs dans les
bras ! Alors la vidéo a t-elle été truquée ? Ou
avait-il les mains attachées, comme s’il avait
été forcé de commettre cette prise d’otage ?
Quoi qu’il en soit la qualité de la
vidéo et la distance de prise de vue ne nous
permettent pas de le vérifier !
Pour ceux qui croient en un coup
monté, l’attentat qui a eu lieu à Charlie Hebdo et la prise d’otage à Porte de Vincennes,
auraient été l’œuvre de sionistes qui auraient
missionné Coulibaly et les frères Kouachi
pour tenter d’accroître l’islamophobie dans
les pays occidentaux.
Selon moi, les arguments avancés
par les complotistes sont très contestables,
aucun des faits cités ci-dessus ne permet
d’affirmer avec certitude que cette théorie du complot est vraie... Pourquoi croire
en des arguments infondés ? Ça n’a pas de
sens...
Alors levons nos stylos et arrêtons de voir
des complots partout !
Charlie Jan
Prises d’otages : ça arrive aussi en France
C’est vendredi 9 janvier, tôt le matin. Après que l’un d’eux ait été touché par
la police, les frères Kouachi se réfugient dans
une imprimerie à Dammartin-en-Goële,
près de l’aéroport de Roissy, et prennent
en otage le patron de l’entreprise. Vers 13h
à Porte de Vincennes, dans l’est de Paris,
le supermarché HyperCacher est pris d’assaut par Amedy Coulibaly. De nombreuses
personnes étaient parties faire leurs courses
dans ce magasin pour préparer le shabbat,
une vingtaine d’entre elles sont retenues en
otage. Trois otages sont assassinés dans les
premières minutes de la prise d’otage et un
quatrième l’est plus tard, après avoir courageusement tenté de prendre une des armes
de Coulibaly pour la retourner contre lui.
tant en Seine-et-Marne qu’à Paris pour sécuriser les habitations voisines et les lieux
publics. Peu après 17h l’ordre est donné
par le Président de la République de lancer
l’assaut. L’action, quasi-simultanée sur les
deux sites, ne dure que quelques instants.
Les trois terroristes sont abattus à leur sortie
des deux bâtiments par les forces d’intervention de la gendarmerie et de la police
qui travaillaient (en situation réelle) pour la
première fois ensemble.
De cette double prise d’otage,
s’ajoutent finalement quatre nouvelles
victimes aux treize victimes de Charlie
Hebdo et de Montrouge. Il a été possible
d’entendre quelques instants d’un dialogue
entre Amedy Coulibaly et un de ses otages
grâce aux équipes de RTL qui ont appelé
l’hypermarché lorsqu’elles ont appris ce
qu’il s’y passait. Ses arguments, lorsqu’il
essaie de justifier ses actes, ne tiennent évidemment aucunement la route et sont caractéristiques de l’endoctrinement dont il a
fait l’objet. Cette double prise d’otage qui
a frappé la France à la suite des horreurs de
Charlie Hebdo est non seulement inédite
mais est aussi le signe d’une résurgence de
l’antisémitisme et du repli identitaire et
entraînera sans aucun doute de nombreux
amalgames contre les Français musulmans
et les musulmans en général, qu’il faudra
combattre par l’expression et l’éducation.
Il y a donc quatre personnes qui
sont tuées lors de cette prise d’otage qui
visait ouvertement la communauté juive.
À Dammartin, après s’être fait soignés, les
frères Saïf et Chérif Kouachi laissent partir
le patron afin de se retrouver seuls. En réalité, un employé a réussi à se cacher sous
un évier à l’étage supérieur au moment de
leur arrivée. Pendant huit heures, ce jeune
graphiste communique par messages avec
les troupes spéciales des forces de l’ordre
afin de les tenir au courant des diverses
informations qu’il arrive à obtenir depuis
l’intérieur. Malgré le terrible manque de
discrétion et de professionnalisme des journalistes, les deux frères n’en ont rien su et il
a survécu. Des périmètres et des mesures de
sécurité importants sont mis en place par le
GIGN et le RAID durant toute la journée
Simon Salomon
12
Le fanatisme au cours du temps
Recyclez-vous en ordure : faites de la récup’
politique
La récupération politique,
qu’est-ce donc ? Imaginons un événement. Il se produit et devient un sujet
médiatique. Les personnalités politiques
sont alors interrogées dessus, et l’utilisent pour mettre en valeur leurs arguments politiques, descendre leurs adversaires ou plus communément valoriser
leur image. Dans le cas dramatique de
l’attentat à Charlie Hebdo, certains espéraient qu’un minimum de décence
retarderait cet inévitable phénomène.
Hélas, la décence a fui certains paysages
politiques depuis bien longtemps. Aussi,
voici une liste (absolument pas exhaustive) des récupérations politiques les plus
dégueulasses de ces dernières semaines.
Commençons joliment par un
tweet de Yves de Kerdrel, Directeur Général de Valeurs Actuelles : « La seule
personnalité qui ne s’est pas exprimée sur
le drame que nous vivons est #Taubira,
dont la politique pénale met la France
en danger. » (9 janvier ) Vous noterez
la (presque) subtile subordonnée relative
expliquant que bon, les terroristes, c’est
lié à l’insécurité, donc à la politique pénale de Taubira. Cette récupération est
d’un niveau relativement bas comparée
à celle – un tantinet xénophobe – de
Florian Philippot, N°2 du FN : « Les
Français attendent des solutions, nous
13
allons expliquer les nôtres. Il n’y aura pas
de mesures nouvelles, notre analyse est
ancienne sur le sujet. Nos thèses sont validées depuis longtemps, tous les français
le savent. » Ou comment accuser ouvertement l’immigration d’être responsable
du terrorisme au lendemain de l’attentat. Hormis la demande de référendum
sur la peine de mort de Marine Lepen,
on peut noter quelques remarques proprement aberrantes concernant l’autorisation du port d’armes. La plus médiatisée reste celle du milliardaire américain
Donald Trump, qui nous explique que
si les journalistes avaient eu des pistolets,
« ils auraient eu au moins la chance de
résister. » avant de préciser que c’était «
intéressant » de voir que ce drame se produisait « dans un des pays les plus stricts
au monde sur les contrôles d’armes ».
Il n’a malheureusement fait qu’illustrer
l’opinion de nombreuses personnes, révélant un manque certain de mémoire
collective et une logique à pleurer. En effet, le port d’armes, même s’il est « tempéré » par quelques réformes, multiplie
les massacres plus qu’il ne les empêche
; ce ne serait pas un, exceptionnel, mais
de fréquents massacres qui auraient lieu
chaque année, comme il y en a – surprise – aux Etats Unis. La récupération
politique, en plus d’être ignoble, est rarement intelligente, c’est à déplorer. .
..
Cette affaire a bouleversé tout le
monde et moi en premier. Je pensais que l’extrémisme religieux régresserait avec le temps
mais il faut croire qu’il persiste toujours.
Néanmoins, je pense qu’il serait trop
simple de se contenter de dire que les responsables de ces actes, je veux bien sûr parler des
trois terroristes, sont des fous ou des barbares.
Je trouve ce genre de réflexion trop rapide et
cela empêche d’étudier le phénomène en profondeur. Je m’explique : ces individus sont
effectivement des fous mais il faut aller plus
loin en se demandant ce qui a bien pu les
amener à faire cela. Qu’est-ce qui, au nom
de la religion, pousse certaines personnes
à user de violences et agir ainsi ? C’est lors
d’un cours de philosophie que la professeure
a donné naissance à cette réflexion.
Si l’on fait un retour dans l’histoire,
on peut constater que l’extrémisme religieux
est monnaie courante. Plusieurs religions ont
eu ces moments de honte. Cela commence
ainsi en l’Antiquité quand les païens tuaient
les premiers chrétiens avant qu’eux-mêmes
ne leur rendent la pareille. On a ensuite le
Moyen-Age au temps des croisades (11e au
13e siècle) où la barbarie fut utilisée à maintes
reprises par les chrétiens au Moyen-Orient.
On peut observer aussi les actions des espagnols sur les indiens d’Amérique vers le 16e
siècle ou certains prétendaient les tuer pour
sauver leurs âmes au nom de la religion. Ou
encore les conflits européens entre catholiques
et protestants durant la Renaissance, toujours
très meurtriers. Et aujourd’hui encore, la religion crée des conflits dans certaines parties
du monde où elle devient un argument pour
provoquer la mort.
Je précise que l’athéisme (qui est finalement une sorte de croyance car l’on croit
en la non-existence) a tout autant déclenché
ces types de conflits, spécialement dans le
monde communiste comme en Chine où la
religion bouddhiste est également stigmatisée
au Tibet.
Lorsque les religions donnent leurs avis sur
la question. On entend parler de radicalisme
et de fanatisme. L’objectif est souvent de
chercher à séparer ces individus de la vraie
religion. C’est une très bonne chose, mais il
conviendrait de se demander d’où peuvent
venir ces fanatiques. Voltaire disait d’ailleurs
que le fanatisme est à la superstition ce que la
rage est à la colère, un enthousiasme qui possède l’individu et lui fait prendre ses songes
pour des réalités. Ainsi celui-ci accomplirait
actes improbables selon ce à quoi il croit
aveuglément.
En fin de compte cet extrémisme
religieux existe depuis très longtemps déjà. Il
serait peu judicieux de ne retenir de l’affaire
d’aujourd’hui que la folie de ces terroristes. Il
faut comprendre ce phénomène qui concerne
toutes les religions et qui semble incurable.
Pour nous débarrasser définitivement de ce
problème qui semble humain, il faut chercher plus loin et se poser plus de questions.
« D’où vient cet extrémisme ? »
« Certaines personnes ayant un point de vue
religieux seraient-elles trop sûres d’elles et refuseraient-elles d’admettre l’existence d’une
autre croyance que la leur ? »
« La défense d’une croyance peut-elle justifier
de tels actes ? »
« Peut-il y avoir un remède ? »
Marx disait « la religion est l’opium
du peuple ! ». Je ne crois pas vraiment en
cette phrase qui devient elle-même extrême
car Marx semble refuser l’objet réel de la religion. Mais il faut tout de même reconnaitre
que dans certains cas, cette dernière peut
aveugler les individus lorsqu’elle est mal interprétée.
Cela ne vise en aucun cas à critiquer la religion et chacun est libre d’adhérer
à toute croyance. Je tiens à le préciser. Et la
laïcité est là pour permettre la cohabitation.
18
Charlie DUFFAL
Fusillade de Montrouge, ou quand le terrorisme
s’amuse près de chez toi
Une fusillade à Montrouge. Des
blessés, peut-être des morts : à cet instant,
la confusion mêlée à l’inquiétude s’installe.
Les quelques élèves réunis devant le lycée
Michelet, en hommage au massacre ayant
eu lieu la veille à la rédaction de Charlie
Hebdo, sont alors rapatriés vers l’arrière :
le tireur serait dans la nature, très dangereux.
C’est ainsi que certains lycéens de
Michelet ont appris ce qui avait eu lieu à
Montrouge. Il est environ 7h55, au carrefour entre l’avenue Pierre Brosselette et
l’avenue du 12 février 1934, ce matin du
8 janvier 2015. On notera la proximité
surprenante avec la synagogue et l’école
juive Yaguel Yaakov, située un carrefour
plus loin, en permanence sous surveillance
d’un car de CRS, auquel un autre avait été
ajouté avec la fusillade de la veille.
Un banal accident de la route, une
collision sans gravité, a eu lieu. Deux policiers municipaux Montrougiens sont là
pour faire le constat. Survient alors Amedy
Coulibaly. Son action est préméditée, synchronisée avec celle des frères Kouachi. Il
a dit « Les frères ont fait Charlie Hebdo,
moi j’ai fait la police ». De fait, à la vue des
agents, celui-ci tire à bout-portant.
Odieux. Barbare.
La policière, non-armée, est touchée de dos, entre 4 et 6 fois. Son gilet
pare-balles fût inutile.
Elle décédera de ses blessures près de deux
heures plus tard, vers 10 heures du matin.
Un agent de la voirie est lui aussi touché :
il s’en tirera avec de graves blessures.
17
Coulibaly, son meurtre accompli,
prendra la fuite vers Arcueil. Plus tard, il
revendiquera ses actes dans une vidéo. Le
lendemain, vers 13h, il prendra en otage
les clients d’une supérette cacher près de la
Porte de Vincennes où il tuera froidement
4 innocents.
Au début, la police a exclu tout
lien entre les deux affaires. Elle a même
procédé à l’arrestation d’un homme, qui
s’est avéré être innocent. Finalement, elle
se ravise, interpelle des proches, jusqu’au
dénouement à Vincennes ou il se fait finalement abattre par les agents du RAID.
La policière s’appelait Clarissa
Jean-Philippe. Elle était encore en formation, et aurait dû être titularisée le 12 janvier. Elle était originaire de Sainte-Marie,
à la Martinique.
Le 13 janvier, à la Préfecture,
François Hollande lui a rendu hommage
ainsi qu’aux deux autres policiers tués dans
la tuerie de Charlie Hebdo. Il leur a remis,
à titre posthume, la médaille de la Légion
d’Honneur. L’ironie du sort fait que sur les
trois policiers, l’un était musulman, l’autre
blanc, la dernière créole. Finalement, en
assassinant sans pitié, froidement, à terre
ou de dos des policiers aux origines aussi hétéroclites, c’est toute la République,
dans sa diversité, qui est en deuil après la
mort de ces trois agents de la paix. Le président dira même « Clarissa, Franck, Ahmed sont morts pour que nous puissions
vivre libres. »
La récupération politique s’est
faite de divers côtés : juste après le
drame, les commentaires ont afflué sur
le bénéfice électoral que tirerait le FN de
ces évènements, la plupart interpellant la
présidente du parti en lui demandant si
elle « se frottait les mains ». Il faut noter que, bien que plus courantes, ces remarques étaient aussi une belle action de
récup’ politique, qui même si l’on n’adhère pas aux idées du parti, restent insultantes alors que les évènements venaient
de se produire. Demander à quelqu’un
s’il est heureux d’un tel attentat grâce au
bénéfice indirect que cela lui procure, ce
n’est pas propre du tout.
Enfin, une petite dernière : la
Manif pour Tous. Ben oui, ça faisait
longtemps que l’on en avait pas entendu
parler de ceux là. Et si l’on pensait que
la grande marche du 11 janvier (vous
savez, celle censée être marquée par
l’union nationale) serait par cette union
immunisée du fléau de la récupération
politique, c’était sans compter les tweets
comparant le comptage de la Manif pour
Tous à celui de la Marche Républicaine,
certains allègrement relayés par Christine Boutin. Profiter de la magnifique
mobilisation de millions de personnes
pour contester les chiffres officiels de sa
propre manifestation, rabaissant ainsi inconsciemment peut-être - la Marche
Républicaine, c’est plutôt dégoûtant.
Cette marche, parlons-en : vous
aurez tous noté la flagrante ironie de la
liste des pays représentés, liste qui aurait
bien fait marrer les gars de Charlie Hebdo. Certains états venant crier face aux
caméras leur indignation quant à cette atteinte à la liberté de la presse et marchant
contre le terrorisme, alors qu’eux-mêmes
assassinent gentiment les journalistes à
domicile, pratiquant alors une forme de
terrorisme intérieur ; cela pourrait être
très rigolo si ce n’était à pleurer d’hypocrisie. Soit ces états ont un sacré sens de
l’autodérision, soit ils tentent aimablement de berner le monde entier, faisant
alors preuve d’une naïveté presque touchante dans cette tentative désespérée de
récupération diplomatique.
En conclusion, la récupération, qu’elle
soit d’ordre politique ou diplomatique,
semble être une conséquence inévitable
de l’actualité. La notion de respect, à
laquelle beaucoup se vantent d’adhérer,
semble être un concept plutôt malléable
dans certaines situations. La recherche
du bénéfice, toujours, quelqu’il soit. A
rire ou à pleurer ? Quitte à réagir, je propose de nous moquer.
« C’est dur d’être récupérés par des
cons ! »
Florine HAUSFATER
Charlie F. Charlie
14
FN et Charlie
Dès les premiers instants après l’effroyable attentat à la rédaction de Charlie
Hebdo, l’ensemble de la classe politique
s’est unie. Certains parlaient même d’une
« Union sacrée » pour reprendre l’expression utilisée pendant la Première Guerre
mondiale. Marine Le Pen s’était efforcée de
parler d’unité, et de rejeter toute confusion
entre « nos compatriotes musulmans attachés à notre nation et à ses valeurs » et « ceux
qui croient pouvoir tuer au nom de l’islam
». Le vice-président du FN, Florian Philippot, défendait l’idée d’une « unité nationale
» et d’une « marche d’union entre tous ».
Mais l’euphorie fût de courte durée : l’autre
vice-président du parti, Louis Aliot, a remis
en cause sur LCI un concept qui « ne veut
rien dire ». Jean-Marie Le Pen, le président
d’honneur du FN, a lui clairement refusé
dans le Figaro « de soutenir l’action gouvernementale impuissante et incohérente »,
tout en ironisant sur « les limites de cette
union nationale ».
Ainsi déjà apparaissaient les premières fissures de cette union nationale.
Comme si le FN, en allant bouder dans son
coin, voulait rappeler combien d’électeurs il
avait, et le poids que cela aurait s’il ne se joignait pas aux manifestations. « Qui m’aime
me suive ! » aurait-on dit. Et puis c’est gênant de défiler à côté de celui que l’on passe
l’année à critiquer. Alors, au lieu de reconnaître qu’on peut être d’accord avec son adversaire politique, on reste cohérent...
Du côté des organisateurs, « chacun est libre ou non d’y participer ». Seuls
15
quelques cadres du PS ont estimé, comme
Harlem Désir, que le FN n’avait pas sa place
à la marche républicaine. S’estimant exclue
de la manifestation de dimanche, Marine Le
Pen s’est mise à dénoncer « une manœuvre
politicienne minable » et a expliqué ne pas
vouloir « être intégrée à l’union nationale »
qui n’est « pas un chantage où l’on peut venir à condition de la fermer ». Samedi, elle a
fustigé un cortège parisien « récupéré par des
partis qui représentent ce que les Français
détestent : l’esprit partisan, l’électoralisme
et la polémique indécente ». Seulement, madame Le Pen a l’air d’oublier quelque chose :
la mobilisation incroyable du 11 janvier,
avec plus de 3,7 Millions de manifestants,
n’était pas une manifestation politicienne
suivie par le peuple, mais une manifestations
des peuples, suivie par les politiciens.
Marine Le Pen est donc allée bouder en province, « là où le sectarisme est le
moins fort, avec le peuple français ». Qu’elle
y reste.
De toute façon, si le FN s’intéressait vraiment à la défense de la liberté de la
presse, motif réel des manifestations, ça se
saurait depuis longtemps. A leur congrès , ils
ont interdit l’accès aux journalistes de Mediapart et du Petit journal de Canal +...
Enfin, on notera le calembour d’un
goût douteux de Jean-Marie Le Pen : « Je suis
Charlie Martel » - allusion à Charles Martel,
qui stoppa les invasions arabes à Poitiers en
732. On s’en serait volontiers passé.
Charlie F. Charlie
16
FN et Charlie
Dès les premiers instants après l’effroyable attentat à la rédaction de Charlie
Hebdo, l’ensemble de la classe politique
s’est unie. Certains parlaient même d’une
« Union sacrée » pour reprendre l’expression utilisée pendant la Première Guerre
mondiale. Marine Le Pen s’était efforcée de
parler d’unité, et de rejeter toute confusion
entre « nos compatriotes musulmans attachés à notre nation et à ses valeurs » et « ceux
qui croient pouvoir tuer au nom de l’islam
». Le vice-président du FN, Florian Philippot, défendait l’idée d’une « unité nationale
» et d’une « marche d’union entre tous ».
Mais l’euphorie fût de courte durée : l’autre
vice-président du parti, Louis Aliot, a remis
en cause sur LCI un concept qui « ne veut
rien dire ». Jean-Marie Le Pen, le président
d’honneur du FN, a lui clairement refusé
dans le Figaro « de soutenir l’action gouvernementale impuissante et incohérente »,
tout en ironisant sur « les limites de cette
union nationale ».
Ainsi déjà apparaissaient les premières fissures de cette union nationale.
Comme si le FN, en allant bouder dans son
coin, voulait rappeler combien d’électeurs il
avait, et le poids que cela aurait s’il ne se joignait pas aux manifestations. « Qui m’aime
me suive ! » aurait-on dit. Et puis c’est gênant de défiler à côté de celui que l’on passe
l’année à critiquer. Alors, au lieu de reconnaître qu’on peut être d’accord avec son adversaire politique, on reste cohérent...
Du côté des organisateurs, « chacun est libre ou non d’y participer ». Seuls
15
quelques cadres du PS ont estimé, comme
Harlem Désir, que le FN n’avait pas sa place
à la marche républicaine. S’estimant exclue
de la manifestation de dimanche, Marine Le
Pen s’est mise à dénoncer « une manœuvre
politicienne minable » et a expliqué ne pas
vouloir « être intégrée à l’union nationale »
qui n’est « pas un chantage où l’on peut venir à condition de la fermer ». Samedi, elle a
fustigé un cortège parisien « récupéré par des
partis qui représentent ce que les Français
détestent : l’esprit partisan, l’électoralisme
et la polémique indécente ». Seulement, madame Le Pen a l’air d’oublier quelque chose :
la mobilisation incroyable du 11 janvier,
avec plus de 3,7 Millions de manifestants,
n’était pas une manifestation politicienne
suivie par le peuple, mais une manifestations
des peuples, suivie par les politiciens.
Marine Le Pen est donc allée bouder en province, « là où le sectarisme est le
moins fort, avec le peuple français ». Qu’elle
y reste.
De toute façon, si le FN s’intéressait vraiment à la défense de la liberté de la
presse, motif réel des manifestations, ça se
saurait depuis longtemps. A leur congrès , ils
ont interdit l’accès aux journalistes de Mediapart et du Petit journal de Canal +...
Enfin, on notera le calembour d’un
goût douteux de Jean-Marie Le Pen : « Je suis
Charlie Martel » - allusion à Charles Martel,
qui stoppa les invasions arabes à Poitiers en
732. On s’en serait volontiers passé.
Charlie F. Charlie
16
Fusillade de Montrouge, ou quand le terrorisme
s’amuse près de chez toi
Une fusillade à Montrouge. Des
blessés, peut-être des morts : à cet instant,
la confusion mêlée à l’inquiétude s’installe.
Les quelques élèves réunis devant le lycée
Michelet, en hommage au massacre ayant
eu lieu la veille à la rédaction de Charlie
Hebdo, sont alors rapatriés vers l’arrière :
le tireur serait dans la nature, très dangereux.
C’est ainsi que certains lycéens de
Michelet ont appris ce qui avait eu lieu à
Montrouge. Il est environ 7h55, au carrefour entre l’avenue Pierre Brosselette et
l’avenue du 12 février 1934, ce matin du
8 janvier 2015. On notera la proximité
surprenante avec la synagogue et l’école
juive Yaguel Yaakov, située un carrefour
plus loin, en permanence sous surveillance
d’un car de CRS, auquel un autre avait été
ajouté avec la fusillade de la veille.
Un banal accident de la route, une
collision sans gravité, a eu lieu. Deux policiers municipaux Montrougiens sont là
pour faire le constat. Survient alors Amedy
Coulibaly. Son action est préméditée, synchronisée avec celle des frères Kouachi. Il
a dit « Les frères ont fait Charlie Hebdo,
moi j’ai fait la police ». De fait, à la vue des
agents, celui-ci tire à bout-portant.
Odieux. Barbare.
La policière, non-armée, est touchée de dos, entre 4 et 6 fois. Son gilet
pare-balles fût inutile.
Elle décédera de ses blessures près de deux
heures plus tard, vers 10 heures du matin.
Un agent de la voirie est lui aussi touché :
il s’en tirera avec de graves blessures.
17
Coulibaly, son meurtre accompli,
prendra la fuite vers Arcueil. Plus tard, il
revendiquera ses actes dans une vidéo. Le
lendemain, vers 13h, il prendra en otage
les clients d’une supérette cacher près de la
Porte de Vincennes où il tuera froidement
4 innocents.
Au début, la police a exclu tout
lien entre les deux affaires. Elle a même
procédé à l’arrestation d’un homme, qui
s’est avéré être innocent. Finalement, elle
se ravise, interpelle des proches, jusqu’au
dénouement à Vincennes ou il se fait finalement abattre par les agents du RAID.
La policière s’appelait Clarissa
Jean-Philippe. Elle était encore en formation, et aurait dû être titularisée le 12 janvier. Elle était originaire de Sainte-Marie,
à la Martinique.
Le 13 janvier, à la Préfecture,
François Hollande lui a rendu hommage
ainsi qu’aux deux autres policiers tués dans
la tuerie de Charlie Hebdo. Il leur a remis,
à titre posthume, la médaille de la Légion
d’Honneur. L’ironie du sort fait que sur les
trois policiers, l’un était musulman, l’autre
blanc, la dernière créole. Finalement, en
assassinant sans pitié, froidement, à terre
ou de dos des policiers aux origines aussi hétéroclites, c’est toute la République,
dans sa diversité, qui est en deuil après la
mort de ces trois agents de la paix. Le président dira même « Clarissa, Franck, Ahmed sont morts pour que nous puissions
vivre libres. »
La récupération politique s’est
faite de divers côtés : juste après le
drame, les commentaires ont afflué sur
le bénéfice électoral que tirerait le FN de
ces évènements, la plupart interpellant la
présidente du parti en lui demandant si
elle « se frottait les mains ». Il faut noter que, bien que plus courantes, ces remarques étaient aussi une belle action de
récup’ politique, qui même si l’on n’adhère pas aux idées du parti, restent insultantes alors que les évènements venaient
de se produire. Demander à quelqu’un
s’il est heureux d’un tel attentat grâce au
bénéfice indirect que cela lui procure, ce
n’est pas propre du tout.
Enfin, une petite dernière : la
Manif pour Tous. Ben oui, ça faisait
longtemps que l’on en avait pas entendu
parler de ceux là. Et si l’on pensait que
la grande marche du 11 janvier (vous
savez, celle censée être marquée par
l’union nationale) serait par cette union
immunisée du fléau de la récupération
politique, c’était sans compter les tweets
comparant le comptage de la Manif pour
Tous à celui de la Marche Républicaine,
certains allègrement relayés par Christine Boutin. Profiter de la magnifique
mobilisation de millions de personnes
pour contester les chiffres officiels de sa
propre manifestation, rabaissant ainsi inconsciemment peut-être - la Marche
Républicaine, c’est plutôt dégoûtant.
Cette marche, parlons-en : vous
aurez tous noté la flagrante ironie de la
liste des pays représentés, liste qui aurait
bien fait marrer les gars de Charlie Hebdo. Certains états venant crier face aux
caméras leur indignation quant à cette atteinte à la liberté de la presse et marchant
contre le terrorisme, alors qu’eux-mêmes
assassinent gentiment les journalistes à
domicile, pratiquant alors une forme de
terrorisme intérieur ; cela pourrait être
très rigolo si ce n’était à pleurer d’hypocrisie. Soit ces états ont un sacré sens de
l’autodérision, soit ils tentent aimablement de berner le monde entier, faisant
alors preuve d’une naïveté presque touchante dans cette tentative désespérée de
récupération diplomatique.
En conclusion, la récupération, qu’elle
soit d’ordre politique ou diplomatique,
semble être une conséquence inévitable
de l’actualité. La notion de respect, à
laquelle beaucoup se vantent d’adhérer,
semble être un concept plutôt malléable
dans certaines situations. La recherche
du bénéfice, toujours, quelqu’il soit. A
rire ou à pleurer ? Quitte à réagir, je propose de nous moquer.
« C’est dur d’être récupérés par des
cons ! »
Florine HAUSFATER
Charlie F. Charlie
14
Le fanatisme au cours du temps
Recyclez-vous en ordure : faites de la récup’
politique
La récupération politique,
qu’est-ce donc ? Imaginons un événement. Il se produit et devient un sujet
médiatique. Les personnalités politiques
sont alors interrogées dessus, et l’utilisent pour mettre en valeur leurs arguments politiques, descendre leurs adversaires ou plus communément valoriser
leur image. Dans le cas dramatique de
l’attentat à Charlie Hebdo, certains espéraient qu’un minimum de décence
retarderait cet inévitable phénomène.
Hélas, la décence a fui certains paysages
politiques depuis bien longtemps. Aussi,
voici une liste (absolument pas exhaustive) des récupérations politiques les plus
dégueulasses de ces dernières semaines.
Commençons joliment par un
tweet de Yves de Kerdrel, Directeur Général de Valeurs Actuelles : « La seule
personnalité qui ne s’est pas exprimée sur
le drame que nous vivons est #Taubira,
dont la politique pénale met la France
en danger. » (9 janvier ) Vous noterez
la (presque) subtile subordonnée relative
expliquant que bon, les terroristes, c’est
lié à l’insécurité, donc à la politique pénale de Taubira. Cette récupération est
d’un niveau relativement bas comparée
à celle – un tantinet xénophobe – de
Florian Philippot, N°2 du FN : « Les
Français attendent des solutions, nous
13
allons expliquer les nôtres. Il n’y aura pas
de mesures nouvelles, notre analyse est
ancienne sur le sujet. Nos thèses sont validées depuis longtemps, tous les français
le savent. » Ou comment accuser ouvertement l’immigration d’être responsable
du terrorisme au lendemain de l’attentat. Hormis la demande de référendum
sur la peine de mort de Marine Lepen,
on peut noter quelques remarques proprement aberrantes concernant l’autorisation du port d’armes. La plus médiatisée reste celle du milliardaire américain
Donald Trump, qui nous explique que
si les journalistes avaient eu des pistolets,
« ils auraient eu au moins la chance de
résister. » avant de préciser que c’était «
intéressant » de voir que ce drame se produisait « dans un des pays les plus stricts
au monde sur les contrôles d’armes ».
Il n’a malheureusement fait qu’illustrer
l’opinion de nombreuses personnes, révélant un manque certain de mémoire
collective et une logique à pleurer. En effet, le port d’armes, même s’il est « tempéré » par quelques réformes, multiplie
les massacres plus qu’il ne les empêche
; ce ne serait pas un, exceptionnel, mais
de fréquents massacres qui auraient lieu
chaque année, comme il y en a – surprise – aux Etats Unis. La récupération
politique, en plus d’être ignoble, est rarement intelligente, c’est à déplorer. .
..
Cette affaire a bouleversé tout le
monde et moi en premier. Je pensais que l’extrémisme religieux régresserait avec le temps
mais il faut croire qu’il persiste toujours.
Néanmoins, je pense qu’il serait trop
simple de se contenter de dire que les responsables de ces actes, je veux bien sûr parler des
trois terroristes, sont des fous ou des barbares.
Je trouve ce genre de réflexion trop rapide et
cela empêche d’étudier le phénomène en profondeur. Je m’explique : ces individus sont
effectivement des fous mais il faut aller plus
loin en se demandant ce qui a bien pu les
amener à faire cela. Qu’est-ce qui, au nom
de la religion, pousse certaines personnes
à user de violences et agir ainsi ? C’est lors
d’un cours de philosophie que la professeure
a donné naissance à cette réflexion.
Si l’on fait un retour dans l’histoire,
on peut constater que l’extrémisme religieux
est monnaie courante. Plusieurs religions ont
eu ces moments de honte. Cela commence
ainsi en l’Antiquité quand les païens tuaient
les premiers chrétiens avant qu’eux-mêmes
ne leur rendent la pareille. On a ensuite le
Moyen-Age au temps des croisades (11e au
13e siècle) où la barbarie fut utilisée à maintes
reprises par les chrétiens au Moyen-Orient.
On peut observer aussi les actions des espagnols sur les indiens d’Amérique vers le 16e
siècle ou certains prétendaient les tuer pour
sauver leurs âmes au nom de la religion. Ou
encore les conflits européens entre catholiques
et protestants durant la Renaissance, toujours
très meurtriers. Et aujourd’hui encore, la religion crée des conflits dans certaines parties
du monde où elle devient un argument pour
provoquer la mort.
Je précise que l’athéisme (qui est finalement une sorte de croyance car l’on croit
en la non-existence) a tout autant déclenché
ces types de conflits, spécialement dans le
monde communiste comme en Chine où la
religion bouddhiste est également stigmatisée
au Tibet.
Lorsque les religions donnent leurs avis sur
la question. On entend parler de radicalisme
et de fanatisme. L’objectif est souvent de
chercher à séparer ces individus de la vraie
religion. C’est une très bonne chose, mais il
conviendrait de se demander d’où peuvent
venir ces fanatiques. Voltaire disait d’ailleurs
que le fanatisme est à la superstition ce que la
rage est à la colère, un enthousiasme qui possède l’individu et lui fait prendre ses songes
pour des réalités. Ainsi celui-ci accomplirait
actes improbables selon ce à quoi il croit
aveuglément.
En fin de compte cet extrémisme
religieux existe depuis très longtemps déjà. Il
serait peu judicieux de ne retenir de l’affaire
d’aujourd’hui que la folie de ces terroristes. Il
faut comprendre ce phénomène qui concerne
toutes les religions et qui semble incurable.
Pour nous débarrasser définitivement de ce
problème qui semble humain, il faut chercher plus loin et se poser plus de questions.
« D’où vient cet extrémisme ? »
« Certaines personnes ayant un point de vue
religieux seraient-elles trop sûres d’elles et refuseraient-elles d’admettre l’existence d’une
autre croyance que la leur ? »
« La défense d’une croyance peut-elle justifier
de tels actes ? »
« Peut-il y avoir un remède ? »
Marx disait « la religion est l’opium
du peuple ! ». Je ne crois pas vraiment en
cette phrase qui devient elle-même extrême
car Marx semble refuser l’objet réel de la religion. Mais il faut tout de même reconnaitre
que dans certains cas, cette dernière peut
aveugler les individus lorsqu’elle est mal interprétée.
Cela ne vise en aucun cas à critiquer la religion et chacun est libre d’adhérer
à toute croyance. Je tiens à le préciser. Et la
laïcité est là pour permettre la cohabitation.
18
Charlie DUFFAL
La théorie du complot
A chaque attentat sa théorie du
complot ! Et celui qui s’est produit le 7 janvier au siège du tristement célèbre journal
satirique ne déroge pas à la règle...
Depuis quelques jours, l’affaire Charlie Hebdo a divisé l’opinion publique, notamment
sur les réseaux sociaux où certains pensent
qu’il s’agirait en fait d’un complot sioniste
visant à salir l’image de l’Islam.
Ils pointent du doigt l’amateurisme
des terroristes qui ont oublié une de leurs
cartes d’identité ainsi que plusieurs chargeurs de kalashnikov portant leur empreinte
ADN dans leur voiture. Cette voiture a
d’ailleurs soulevé quelques doutes sur les
réseaux sociaux où certains affirmaient que
la couleur des rétroviseurs serait passée de
blanc à noir entre le moment de l’attentat
et celui où les policiers ont retrouvé le véhicule. Mais il s’agissait en réalité du reflet
du soleil sur les rétroviseurs chromés de la
Citroën !
Autre fait troublant pour les complotistes : la vidéo enregistrée par l’un des
témoins, où l’ont voit des personnes équipées de gilets pare-balles sur le toit de l’immeuble, comme s’ils savaient qu’une attaque
aurait lieu. Ce qui n’est pas si choquant que
cela puisque l’équipe de Charlie Hebdo bénéficiait de ces gilets grâce à leur protection
policière mise en place depuis l’incendie de
2011.
Sur cette même vidéo, on voit
l’exécution d’un policier par l’un des frères
19
Kouachi. Même si le fait qu’il n’y ait pas eu
d’effusion de sang au moment de l’acte est
étrange, cela ne prouve pas que le policier ait
survécu...
S’agissant de la prise d’otages ayant
eu lieue à Hyper Cacher, une vidéo sur YouTube nous montre que Amedy Coulibaly
avait les mains jointes quelques secondes
avant de mourir. Ce qui est surprenant
puisqu’il avait aussi deux kalashs dans les
bras ! Alors la vidéo a t-elle été truquée ? Ou
avait-il les mains attachées, comme s’il avait
été forcé de commettre cette prise d’otage ?
Quoi qu’il en soit la qualité de la
vidéo et la distance de prise de vue ne nous
permettent pas de le vérifier !
Pour ceux qui croient en un coup
monté, l’attentat qui a eu lieu à Charlie Hebdo et la prise d’otage à Porte de Vincennes,
auraient été l’œuvre de sionistes qui auraient
missionné Coulibaly et les frères Kouachi
pour tenter d’accroître l’islamophobie dans
les pays occidentaux.
Selon moi, les arguments avancés
par les complotistes sont très contestables,
aucun des faits cités ci-dessus ne permet
d’affirmer avec certitude que cette théorie du complot est vraie... Pourquoi croire
en des arguments infondés ? Ça n’a pas de
sens...
Alors levons nos stylos et arrêtons de voir
des complots partout !
Charlie Jan
Prises d’otages : ça arrive aussi en France
C’est vendredi 9 janvier, tôt le matin. Après que l’un d’eux ait été touché par
la police, les frères Kouachi se réfugient dans
une imprimerie à Dammartin-en-Goële,
près de l’aéroport de Roissy, et prennent
en otage le patron de l’entreprise. Vers 13h
à Porte de Vincennes, dans l’est de Paris,
le supermarché HyperCacher est pris d’assaut par Amedy Coulibaly. De nombreuses
personnes étaient parties faire leurs courses
dans ce magasin pour préparer le shabbat,
une vingtaine d’entre elles sont retenues en
otage. Trois otages sont assassinés dans les
premières minutes de la prise d’otage et un
quatrième l’est plus tard, après avoir courageusement tenté de prendre une des armes
de Coulibaly pour la retourner contre lui.
tant en Seine-et-Marne qu’à Paris pour sécuriser les habitations voisines et les lieux
publics. Peu après 17h l’ordre est donné
par le Président de la République de lancer
l’assaut. L’action, quasi-simultanée sur les
deux sites, ne dure que quelques instants.
Les trois terroristes sont abattus à leur sortie
des deux bâtiments par les forces d’intervention de la gendarmerie et de la police
qui travaillaient (en situation réelle) pour la
première fois ensemble.
De cette double prise d’otage,
s’ajoutent finalement quatre nouvelles
victimes aux treize victimes de Charlie
Hebdo et de Montrouge. Il a été possible
d’entendre quelques instants d’un dialogue
entre Amedy Coulibaly et un de ses otages
grâce aux équipes de RTL qui ont appelé
l’hypermarché lorsqu’elles ont appris ce
qu’il s’y passait. Ses arguments, lorsqu’il
essaie de justifier ses actes, ne tiennent évidemment aucunement la route et sont caractéristiques de l’endoctrinement dont il a
fait l’objet. Cette double prise d’otage qui
a frappé la France à la suite des horreurs de
Charlie Hebdo est non seulement inédite
mais est aussi le signe d’une résurgence de
l’antisémitisme et du repli identitaire et
entraînera sans aucun doute de nombreux
amalgames contre les Français musulmans
et les musulmans en général, qu’il faudra
combattre par l’expression et l’éducation.
Il y a donc quatre personnes qui
sont tuées lors de cette prise d’otage qui
visait ouvertement la communauté juive.
À Dammartin, après s’être fait soignés, les
frères Saïf et Chérif Kouachi laissent partir
le patron afin de se retrouver seuls. En réalité, un employé a réussi à se cacher sous
un évier à l’étage supérieur au moment de
leur arrivée. Pendant huit heures, ce jeune
graphiste communique par messages avec
les troupes spéciales des forces de l’ordre
afin de les tenir au courant des diverses
informations qu’il arrive à obtenir depuis
l’intérieur. Malgré le terrible manque de
discrétion et de professionnalisme des journalistes, les deux frères n’en ont rien su et il
a survécu. Des périmètres et des mesures de
sécurité importants sont mis en place par le
GIGN et le RAID durant toute la journée
Simon Salomon
12
11
20
« Peut-on rire de tout ? »
À cela, Pierre Desproges, Mi- blancs, les noirs, les asiatiques, les
chel Colucci (Coluche), Spinoza, petits, les grands, les handicapés…
Bergson, et tant d’autres ont répondu Tout peut prêter à rire ! Néanmoins,
« Oui ». On peut même ajouter que pas avec certaines personnes en notre
« Le rire est le propre de l’homme » compagnie ou écoute. Pour le citer
(Rabelais). En effet, après les récents encore une fois : « Il vaut mieux riévènements dont toute la France a goler d’Auschwitz avec un juif que
entendu parler, on pouvait se deman- de jouer au scrabble avec Klaus Barder encore une fois si,
bie. ». Rigoler d’une
«
On
peut
rire
de
oui ou non, on peut rire
chose, donc la tourtout
mais
pas
avec
de tout. Car c’est bien à
ner en dérision, c’est
cause d’une volonté de
n’importe qui. » souvent parler au sefaire rire, par la caricacond degré. En comture et la satire, que ces drames ont eu pagnie d’une personne qui n’est pas
lieu. Du moins des réactions à cette ouverte d’esprit c’est voir le risque
volonté. Bien sûr ce débat a déjà été d’une interprétation primaire et une
résolu, bien que toujours en cours, mécompréhension qui peut aboutir à
par de nombreux intellectuels ouverts une réaction déplacée : soit, dans un
d’esprit.
cas extrême, ces attentats de la part
Selon P. Desproges : « On peut de personnes fermées d’esprit n’ayant
rire de tout mais pas avec n’importe aucun sens de l’autodérision, soit
qui. ». Ce que signifie cette phrase est voir apparaître des partisans de l’idée
que tout comportement humain est transmise par une transcription litrisible. On peut rire de tout ce qui térale de notre plaisanterie et qui est
nous entoure et on peut même rire de donc contraire au message que l’on
personnes ou groupes distincts tels les voulait faire passer. Il faut donc faire
homosexuels, les chrétiens, les juifs, attention à la portée de nos plaisante.
les musulmans, les hétérosexuels, les ries.
..
Ce combat commun, c’est celui que
nous sommes en train de mener aujourd’hui,
tous ensembles contre la barbarie. Hier, l’ancien directeur de CHARLIE HEBDO a dit :
« Ayons le courage de ne pas avoir peur ».
Soyons courageux ensemble ! Continuez à
être vigilants ! En mémoire de celles et ceux
qui sont tombés, je vous demande d’observer quelques instants de silence. »
On entendait déjà certains élèves et
professeurs pleurer. Un silence pesant planait au-dessus de nombreuses têtes. Seuls la
pluie et le glas des églises se font entendre.
Certains stylos se sont élevés droit vers le ciel
en signe de contestation à la violence face
aux dessins qui, jusqu’à preuve du contraire,
n’ont jamais tué. C’est lorsque l’on observait ces simples stylos levés devant l’entrée
du CDI que l’on avait le droit d’être fier de
notre action, aussi minime soit-elle.
« Encore un mot ...vous avez affiché à la porte du lycée un slogan que je
vous propose de vous approprier « C’est
l’encre qui doit couler, pas le sang ». Alors
cette encre, faites la couler sans modération
! Vous avez, sans doute, remarqué que dans
les pays totalitaires, la première mesure que
prennent les dictateurs, est de fermer les
écoles. Ca n’est pas un hasard ! La science, le
savoir, la culture et la réflexion sont les plus
beaux ennemis du totalitarisme. Alors, soyez
à votre façon, les ennemis du totalitarisme :
apprenez, écrivez, lisez des poèmes, imprégnez-vous de cette culture qui fait notre fierté collective. »
Cet événement n’a fait qu’intensifier l’émotion omniprésente pendant la minute de
silence suivie d’une Marseillaise inattendue
mais plus que bienvenue.
Puis, cette phrase que nous n’avions
presque tous jamais entendu avant mercredi dernier : « Je préfère mourir debout que
vivre à genoux », disait Charb. La marche
qui s’est déroulée le dimanche suivant nous
a donné la preuve que ces mots ne sont pas
des paroles en l’air. Le beau moment de ces
derniers jours, ce fut de rentrer en cours
lundi matin pour entendre un peu partout qu’une majorité d’entre nous s’étaient
rendue à la grande marche la veille, criant
à l’unisson pour les victimes de Charlie et
pour un monde libre.
Et si vous vous demandez toujours où est
Charlie ? Regardez autour de vous… Nous
sommes Charlie !
Juliette CALORI, Camille MORIN et Tristan VARTANIAN
P.S. : Une dernière chose : vendredi soir, les membres du Zeugma se sont
réunis pour préparer au mieux ce numéro. Nous nous sommes entendus pour
nous répartir les articles autour de ce sujet. Je devais écrire à propos du recrutement des djihadistes. J’ai essayé, mais je n’en étais pas du tout satisfaite. L’article
que j’ai écrit pour cet article commun n’était certes pas grandiose, mais il vient
du cœur et c’est ce dont je voulais parler. N’est-ce pas cela, la liberté d’expression ?
Juliette CALORI
21
10
Plus tard, tout le monde rentre
en cours. Car pour les lycéens, ne pas
aller en cours serait contradictoire
sachant que c’est l’éducation scolaire
qui nous permet d’écrire, de dessiner
et d’avoir des opinions... Bref, de raisonner au lieu d’agir sans réfléchir.
La peur a commencé à se diffuser plus tard dans la matinée. Peu
après huit heures, on apprend qu’une
nouvelle fusillade a éclaté à Montrouge. Le préfet a ordonné de confiner le
lycée. L’enfer continue...
À l’intérieur des classes, on
sentait une sorte de flottement général. Les cours se déroulaient, mais
comment se concentrer ? Les élèves
tentaient de suivre l’actualité, beaucoup de professeurs essayaient de
masquer leur bouleversement. Je me
demandais sincèrement ce qu’une
simple leçon, quelle que soit la matière, était, comparée à ce qu’il se passait alors.
Puis, juste avant midi, les
élèves se rassemblent pour observer
une minute de silence. Le Proviseur
s’exprime : « La cause en vaut la peine
! Il est midi et dans toutes les écoles
de France, les élèves, les enseignants
et les adultes qui travaillent dans les
établissements sont regroupés. Je
vous transmets quelques mots de la
part du ministre de l’Education Nationale, mais plus simplement de la
part d’un être humain, qui comme
vous, est horrifié par ce qu’il s’est
passé : « L’attentat meurtrier contre
l’hebdomadaire CHARLIE HEBDO a atteint notre République au
cœur. La liberté d’expression est au
fondement de toutes les libertés : la
liberté de conscience et le respect des
opinions individuelles sont les principes qui nous permettent de vivre
ensemble. »
Je voudrais vous lire quelques
strophes d’un magnifique poème de
Louis ARAGON, écrit pendant l’occupation allemande alors qu’il était
résistant. Ecoutez et réfléchissez-y.
La Rose et le Réséda
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Qu’importe comment s’appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l’un fut de la chapelle
Et l’autre s’y dérobât
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du cœur des bras
Et tous les deux disaient qu’elle
Vive et qui vivra verra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au cœur du commun combat
.
..
9
« …Et pas n’importe comment. ». La
manière de rire d’une chose ne doit pas
avoir pour but de diffamer et de faire
mal. Cela est par ailleurs répressible !
La justice est prédisposée à sévir tout
propos diffamatoires. Mais, et c’est là
que les choses se compliquent : est-ce
que dire, comme Charlie Hebdo, que
« le coran c’est de la merde…» dans
un journal satirique est diffamatoire
? Cela dépend du contexte et s’il y a
une argumentation derrière qui ne
l’est pas. En effet, comme vu dans le
premier paragraphe, un propos peut
être mal interprété, donc au premier
degré et provoquer un tollé.
Mais il faut savoir que ce
journal est satirique donc sous couvert explicite du 2nd degré, seuls des
idiots ne pourraient pas s’en rendre
compte. Enfin, il s’agit de la pensée
cachée. La suite de cet extrait est « …,
ça n’arrête pas les balles ! ». Cela fait
référence au massacre de plus de 700
personnes le 13 Août 2013 lors d’une
manifestation en Égypte, pays dont
la majeure population est de confession musulmane, par les militaires,
aussi de confession musulmane, qui
ont renversé Mohamed Morsi, premier président Égyptien élu par le
peuple. Sous la satire voulant rendre
cet évènement comique, il se cache
donc une réalité ironique et tragique
qui dénonce une hypocrisie humaine
chez les bourreaux se disant faire partie d’un culte mais sans en respecter
les règles. De cela en pâtissent le reste
des croyants se pensant protégés des «
leurs » par ces mêmes règles élémentaires soit, dans le cas présent : « tu ne
tueras point ». De plus, il faut se rappeler qu’une image est associée à ces
termes accentuant le comique et le
ridicule des personnes visées qui sont
ici les militaires et non réellement le
Coran. Le comique ne fait pas toujours rire mais il n’est en aucun cas
inculpable et diffamatoire.
Il faut donc faire attention
lorsque l’on rit d’une chose. Selon le
milieu dans lequel nous nous trouvons, nous n’avons pas les mêmes
sources de rire, les mêmes tabous, que
nous pouvons tout de même tourner
en dérision au risque que cela paraisse
déplacé. Car nous n’avons pas tous la
même sensibilité, il faut savoir choisir ses partenaires de joie car comme
le dit Bergson : « Le comique naîtra
quand les hommes réunis en groupe
dirigeront leur attention sur l’un
d’entre eux en faisant taire leur sensibilité et exerçant leur seule intelligence
». Sans oublier que le rire commence
par celui de soi.
La Patate Flamboyante
22
« C’est bien fait pour leurs gueules »
Alors oui, on a entendu des gens
réagir comme ça en parlant de journalistes
lâchement assassinés. Pas énormément, mais
l’embêtant c’est que les cons, ça fait du bruit.
Je vais ici m’adresser directement à ceux qui
ont tenu, ou qui tiennent encore de tels propos. Alors, est-ce juste de dire qu’ils l’ont
mérité ? Non, c’est juste que vous n’avez rien
compris.
Le seul tort de ces gars, c’est d’avoir
utilisé un crayon, et ils ont reçu des balles ;
vous appelez ça de la justice équitable vous ?
Certes, vous avez le droit d’être choqué par
les caricatures du prophète qui ont été publiées dans Charlie Hebdo (c’est d’ailleurs le
but d’un journal dit satirique). Mais aucune
personne saine d’esprit ne peut se réjouir
de leur mort. Par exemple, est ce que tu vas
aller planter ton prof parce que tu n’aimes
pas son cours et qu’il te fait tout le temps
des remarques ? Non. On est en France, on
est en 2015, et il faut se mettre dans la tête
qu’on ne tue pas des gens parce que l’on
n’est pas d’accord avec leurs idées, d’autant
plus qu’elles ne font de mal à personne ! Je
dis « on est en France » parce que cette idée
de liberté d’expression, le pays a eu le temps
d’en connaître le prix depuis la Révolution
et l’époque des Lumières. Je sais que l’on a
tous ou presque vu ou entendu cette phrase
de Evelyn Hall (et non pas Voltaire, on vous
a menti) ces derniers jours, mais je la réécris
ici parce qu’elle résume bien cette valeur de la
République française qui a été attaquée : « Je
ne suis pas d’accord avec ce que vous dites,
mais je défendrais jusqu’à ma mort votre
droit de le dire ». C’est juste ça : vous pouvez
désapprouver des mots, mais vous ne pouvez
pas coudre la bouche de celui qui les dit.
Charlie Simon
Ah mais ce n’est pas fini ? Attendez,
que vois-je arriver au loin ? Des défenseurs
de Dieudonné ! Faut dire qu’on les attendait
un peu. Cela dit c’est vrai, pourquoi parler
de liberté d’expression dans le cas des caricatures de Mahomet alors qu’on a tout bonnement interdit ce cher Dieudo de représentation ? Bon, déjà on va clarifier quelque
chose : Charlie Hebdo n’est pas et n’a jamais
été anti-islam. À la limite anticlérical, mais
la seule chose qu’ils condamnent, c’est la
connerie et l’usage abusif que certains, en
particulier les grands de ce monde, font
23
des religions. Dieudonné, lui, se déclarait
ouvertement antisémite. Ses propos sur les
chambres à gaz et sur la communauté juive,
on appelle ça « apologie de crime contre
l’humanité » et « incitation à la haine raciale ».
Et aller jusqu’à nier l’existence même de la
Shoah dans certaines de ses interventions ça
s’appelle le négationnisme. Donc voilà. Les
trois choses qu’on lui reproche principalement sont clairement interdites par le code
pénal français. Le blasphème, c’est pas illégal. Pourquoi ? Parce qu’on est dans un pays
laïc. Fin du débat.
« C’est l’encre qui doit couler, pas le sang ! »
Bonjour à tous chers lecteurs !
du Lycée Michelet
Dès 7h, nombreux sont les élèves
venus manifester leur soutien au journal CHARLIE HEBDO. L’atmosphère
est pesante, la foule est très calme mais
encore choquée par les évènements de
la veille. On remarque la crispation sur
les visages. Au fi du temps, les langues se
délient et les élèves expriment leurs sentiments. Les seuls mots et paroles échangés à cette heure si matinale étaient : «
Quelle horreur » ou encore « J’en reviens
pas ».
Aucune pensée négative envers
les autres lycéens, tout le monde s’était
rassemblés pour la même chose : faire
entendre sa voix !
A la grille d’entrée, pancartes,
slogans, dessins, sont suspendus afin
de manifester l’indignation commune.
On peut lire des slogans tels que « C’est
l’encre qui doit couler, pas le sang », « Ils
voulaient nous mettre à genoux, ils nous
ont mis debout », « Le terrorisme n’a pas
de religion » et bien sûr « Je suis Charlie
».
Tant d’élèves regroupés de leur plein gré
de si bonne heure, c’était inespéré ! .
Hommage aujourd’hui dans ce
numéro spécial dédié à Charlie Hebdo.
En règle générale, j’aime bien le mercredi, c’est une journée agréable. Pas de lycée l’après-midi, un moment de détente
entre les cours qui se densifient en ce milieu d’année. Ce 7 janvier, il faisait trop
froid pour rester longtemps devant l’établissement après la classe, nous étions
nombreux à rentrer rapidement chez
nous. Je franchis le seuil de ma porte ; la
nouvelle était tombée.
Je ne veux pas relater les faits.
Vous avez tous suivi cette terrifiante affaire avec une attention remarquable,
par la télé, les journaux ou même les réseaux sociaux, cela ne nous mènerait pas
à grand-chose.
La conscience politique de Michelet était active dès lors que nous
avons décidé de nous rassembler jeudi
matin (sur une superbe initiative de la
TES2).
Jeudi 8 janvier 2015 : journée de
deuil national, l’une des journées les plus
émouvantes et éprouvantes de l’histoire
..
8
L’islamophobie, Booba et vos grands-mères
Ce mois-ci, je n’ai pas envie
d’écrire un truc joli, avec des tournures
de phrases pour vous faire rire, même si
c’est ce que je suis censée faire parce que
le rire est l’arme de ceux qui se battent
à la loyale (par exemple Booba : ses punchlines à deux euros en promo chez
Liddle vous font rire, et il s’est auto-proclamé «duc de Boulogne». CQFD.). Je
n’ai pas envie de rire mais il le faut. Chacun a son avis sur la liberté d’expression,
l’importance de rire de tout et surtout
de tous ; moi je pense que c’est essentiel. Alors on a tous nos propres limites,
et les caricatures du prophète Mahomet
étaient celles des frères Kouachi – mais
vous ne me lisez pas pour que je vous
parle d’eux.
Moi, je veux vous parler d’un
mot que vous entendez depuis des jours,
sans savoir, peut-être, sa signification :
l’amalgame. «L’amalgame, dans son sens
figuré de procédé de langage, consiste à
associer abusivement des personnes, des
groupes ou des idées.» nous dit Wikipédia, qui reste une valeur sûre. Depuis
quelques jours, « amalgame » rime avec «
musulman » («Ne faites pas d’amalgames,
les musulmans ne sont pas islamistes !»,
ce qui est totalement vrai. Je sais que ça
vous semble basique mais ça me semble
important de justement rappeler la base
7
du respect de l’autre) qui lui-même ne
rime pas avec islamiste (oui, voilà ce que
l’on nous apprend en L).Des imbéciles
essayent malheureusement d’imbriquer
ces deux notions ensemble, comme un
enfant qui tente de coller un Lego à un
Playmobil.
Qui sont-ils ? Qu’est ce que j’en
sais ? Ce serait faire des généralités ou
du prosélytisme que de les montrer du
doigt. Ça peut être la copine de votre
grand-mère, votre prof de maths, votre
voisin du 3ème étage, votre grande sœur,
c’est peut-être vous. C’est dû à quoi ? Là
encore, c’est délicat de définir ce qui
a foiré chez quelqu’un au point qu’il
confonde une religion prônant l’amour
et la paix, et un groupe d’intégristes extrémistes et terroristes (les mots en -iste
c’est toujours mauvais signe).
J’espère ne pas me tromper
quand je dis que c’est l’éducation qui a
un peu dérivé et s’est finie en banderoles
insultantes, racistes, rejoignant étrangement quelques réflexions islamistes (éliminer ceux qui te font chier, en bref ).
La tolérance on ne naît pas sans, ni avec.
La stupidité, c’est pareil. Ce sont deux
choses qui s’acquièrent ou s’évitent pendant la vie, et particulièrement durant
l’enfance et l’adolescence, où l’on forme
son esprit..
..
24
Un pour tous, tous pour un
Et quelles sont les conséquences religion ou couleur de peau ne compte
de l’islamophobie, de celle manifestée pas, c’est pas du jeu de dire que parce
récemment par bon nombre de Français que Machin est Blanc et catholique, il
? Rappelons que l’islamophobie, me dit est plus Français que Truc qui est d’une
mon pote Wiki « peut se définir comme autre couleur que lui et bouddhiste, juif,
la peur ou une vision péjorative de l’is- musulman, ou témoin de Jéhovah ou
lam, des musulmans». Ici c’est une peur athée ou que sais-je ; c’est juste raciste)
qui entraîne une cinquan«Les hommes (note «les hommes (note persontaine d’actes anti-musulpersonnelle : et les nelle : et les femmes) naissent
mans depuis l’attentat à
femmes) naissent et et demeurent libres et égaux
Charlie Hebdo. Graffitis
demeurent libres et en droits.» Dans ces droits,
insultants sur des moségaux en droits.» vous savez ce qu’il y a. La
quées, des têtes de porcs
liberté d’expression, d’assoou de sangliers devant les
ciation, le droit de travailler,
mêmes bâtiments religieux, coups de d’habiter sur le sol français, de pratifeux, incendies... La liste des horreurs quer sa religion sans tenter de l’imposer
continue, et je ne peux même pas dire à autrui... La liberté d’expression est ici
«on ne les compte plus» parce qu’on les le problème. Parce que le racisme n’est
compte, parce que ça blesse, parce que ça pas une opinion. C’est juste inhumain.
tue.
Le racisme et l’extrémisme sont des couJe ne suis pas spécialiste en sins proches, et croyez-moi, vu la masse
sciences, vous l’aurez compris, ni même de Charlie armés de leurs plus beau styen droit, mais Wiki à ma droite me dit lo-billes en promo chez Liddle (au même
qu’un être humain est une «créature vi- rayon que les punchlines de Booba), à
vante membre de l’espèce humaine». votre place, ça me gênerait d’être dans la
Jusqu’à preuve du contraire, c’est ce que même famille que ces deux-là.
les hommes et femmes sont ici en France.
Et en France (test : si vous avez une vraie
Pauline Le Bozec
carte d’identité française produite par
l’Etat français, vous êtes français. Votre
25
Le 7 Janvier 2015, Charlie Hebdo, un journal satirique, est victime d’un
attentat ; la France est touchée. La France
est en deuil. Alors qu’elle connaît son plus
grand attentat depuis 50 ans environ, elle
reçoit le soutien des ses alliés européens et
bien plus encore.
Charlie Hebdo reçoit premièrement le soutien de millions de Français
qui dessinent pour rendre hommage aux
dessinateurs et journalistes tués durant
l’assaut. Le dessin de Plantu « De tout
cœur avec Charlie Hebdo » écrit à l’encre
rouge, pour symboliser le sang, est réutilisé et partagé sur plusieurs surfaces tels que
Facebook, Twitter... « Je suis Charlie. » est
la phrase utilisée comme slogan et hashtag sur Twitter (5 millions de tweets) pour
montrer son soutien pour cette cause.
Un brassard noir est porté sur plusieurs
chaînes françaises, toutes les chaînes d’informations soutiennent Charlie Hebdo
et diffusent en direct les informations
acquises. Plusieurs marches et rassemblements sont alors mis en place devant les
ambassades française de différents pays
tels que l’Allemagne, la Belgique, l ‘Angleterre, l’Italie, les U.S.A., certains pays
d’Afrique et tant d’autres. En soutenant
cette cause, ces pays défendent la liberté
d’expression qui est de plus en plus menacée ces derniers temps. Le journal Charlie
Hebdo trouve du soutien chez des collègues de Libération, et s’installent dans
leurs bureaux pour produire le prochain
Charlie Hebdo, qui est sorti le mercredi 14/01/15, soit une semaine après le
drame, tiré à 5 millions d’exemplaires.
Beaucoup de célébrités tels que Madonna, Justin Timberlake, George Clooney et
d’autres se montrent choqués par ces actes
monstrueux qui ont touché la France ;
Madonna dit : « Tuer au nom de Dieu
est une idée de l’homme et pas celle de
Dieu. L’ignorance engendre l’intolérance
et la peur ». Des millions de messages et
dessins du monde entier, des caricatures
de Charb, Cabu et Wolinski sont reprises,
d’autres sont transformées, des premières
de couvertures retransmises à travers le
monde. Toutes ces formes de soutien sont
envoyées à l’équipe de Charlie Hebdo et
aux proches des personnes décédées.
Le nombre d’abonnements à
Charlie Hebdo a doublé. Les Français se
mobilisent, environ 1 million d’euros de
dons sont envoyés au site « JaideCharlie.
fr ». L’association Presse et Pluralisme
débloque 200 000 d’euros de dons, 100
000 euros qu’elle puise dans ses réserves
et l’autre partie est une sorte d’avance
sur les dons à venir. Ils reçoivent également un don de 250 000 euros effectué
par Google pour l’innovation numérique.
La banque publique d’investissement
s’est engagée à prendre une cinquantaine
d’abonnements à Charlie Hebdo.
Des représentants européens,
américains, africains et asiatiques se sont
déplacés pour soutenir la marche historique du 11 janvier, une marche qui symbolise la bataille contre les actes terroristes
et l’atteinte à la liberté d’expression. C’est
dans des moments difficiles comme celui-ci que l’on doit être soudé, effectivement, l’Union fait la force. Percy Pig
6
Lassitude
Charlie hebdo, le drame survenu
le mercredi 7 janvier nous affecte tous,
de n’importe quel horizon, de n’importe
quelle nationalité. Certains voient en cet
acte de « barbarie » une sorte de vengeance
par rapport à certaines unes publiées par
Charlie. Certains ne s’en préoccupent pas
et, pire, d’autres s’emplissent d’une lassitude par rapport à ce qu’il s’est passé il y a
à peine quelques jours.
Comment des citoyens français,
certains même dans notre lycée, peuvent
se lasser d’un tel acte … Cette lassitude
est due aux médias, au bouche-à-oreille
continu de nous lycéens ; mais à ce point !
Ces infos en continu qui se perpétuent
dans les cours des lycées, dans les cafés et
qui agacent certains. Des hommes, des
femmes, qui, devant leur poste de télévision, changent de chaîne lassés d’écouter Jean-Pierre Pernaud nous détailler les
deux prises d’otages de vendredi, ce qui
est inacceptable. Ces personnes ont bien
sûr formé en eux une sorte de compassion
envers les membres de la famille des défunts mais qui s’estompe au fil des jours,
des heures... Ces lycéens qui ne s’arrêtent
plus devant les affiches « Je suis Charlie »,
qui ne sont plus émus devant certaines
vidéos d’union nationale, devraient se
taire, garder leur ressenti. Ces «lassés» qui
envahissent et contaminent notre lycée
avec leur arguments provocateurs sont,
excusez-moi du terme, d’énormes idiots
! Qu’ils ne viennent pas détruire le mo-
ral de républicains qui soutiennent et défendent Charlie ! Ces «lassés» ne le sont
pas lorsqu’un événement leur rapporte
du profit ou de la joie, mais le deuil national leur est incompréhensible. Alors à
quoi bon fêter le 14 Juillet ou Noël ! Ces
mêmes personnes ne sont derrière Charlie
que pour un effet de «mode» éphémère
qui une fois pompé jusqu’au sang ne sert
plus à rien à leurs yeux et n’est plus qu’un
prétexte de conversation lors d’interminables heures de perm’ ou d’un des rares
débats familiaux ! Ces gars qu’on devrait
plaindre par leur modeste cortex cingulaire postérieur qui leur empêche de compatir devant ce drame national ! L’abruti
savant qui dénonce l’acte de barbarie des
Kouachi et qui vient se plaindre que toutes
les unes de Libé en ce moment sont sur
Charlie devrait juste un moment penser à
ses paroles et ses actes. Toi, l’abruti savant,
crois-tu que les américains ne pleurent
plus les morts du 11 septembre ? Crois-tu
que les mères des 237 lycéennes enlevées
par Boko Haram ne pleurent plus leur(s)
fille(s) ?
Saches que tes arguments, quels
qu’ils soient ne changeront pas ma façon de penser et resteront dans le vague,
comme un murmure incompréhensible.
Parler, discuter, chanter telle est ma devise
de liberté. Mais sachez bien que je ne suis
pas obligé de vous écouter...
Merci
Charlie Day
5
26
Un grand bravo à tous les lycéens pour leur magnifiques et émouvants hommages. Leur participation
spontanée est un véritable gage d’espoir et d’humanité.
rédacteur en chef » avec la victoire d’Ennahdha (le parti islamiste) en Tunisie.
Le journal aux sensibilités clairement de gauche, a également eu des problèmes avec certaines personnalités politiques. Ainsi en 2012 l’hebdomadaire
publie une fausse affiche de Marine le
Pen qui portera plainte.
Globalement, les plaintes se sont
raréfiées dans les années 2000 mais l’opposition contre Charlie Hebdo prend de
plus en plus la forme du terrorisme…
Voilà donc l’histoire de Charlie Hebdo, un journal qui n’a jamais cessé de
dire dans ses numéros ce qu’il pensait
réellement ; sans autocensure mais avec
humour et ironie. Charlie Boldron
Pas plus que nous ne voulons dépendre
de la publicité. Nous ne touchons donc
pas les aides de l’État dont bénéficient
les journaux dits «à faibles ressources publicitaires», puisque, de publicité, nous
n’en avons pas. L’indépendance, l’indépendance totale, a un prix. La presse
gratuite coûte des millions de compromis éditoriaux, la presse libre coûte, elle,
2,50 euros. Et son existence ne repose
que sur vous. »
Un incendie criminel détruit le
siège de Charlie Hebdo alors situé dans
le 20ème arrondissement de la capitale
parisienne dans la nuit du 1er au 2 novembre 2011. Il fait suite à l’annonce de
la parution d’un numéro spécial, intitulé
« Charia Hebdo, avec Mahomet comme
Besoin d’argent ? Achetez Charlie
e
i
l
r
a
h
c
s
i
#Char #jesu
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#a t t e n t a
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#not bu #
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d
#wol
insk
i
27
o
Ou plutôt, revendez-le. La vague de
soutien à Charlie Hebdo a également entraîné
un business autour de tout ce qui est Charlie.
Vous pouvez depuis plusieurs jours trouver
n’importe quel numéro de Charlie Hebdo sur
Ebay.... pour une centaine d’euros généralement. D’ailleurs, le numéro post-attentat, rapidement en rupture de stock, a envahi le site
de vente. Certains vendeurs très optimistes
tentent de les vendre à des prix exorbitants.
Ce n’est pas stupide de dépenser 2 euros pour
en récolter 150 après tout, c’est comme gagner
au loto. Mais Ebay a tenu à mettre les choses
au point : ceux qui vendent des produits liés à
Charlie Hebdo se doivent de donner une partie des bénéfices pour soutenir le journal.
la marche républicaine du 11 janvier, vous
avez peut-être croisé des personnes profitant
de l’occasion pour vendre des hauts «Je suis
Charlie». Si ce n’est pas le cas, ne vous inquiétez pas : vous pouvez trouver tout ce que vous
voulez sur internet, du mug à la coque Iphone.
Evidemment, les internautes ont réagi rapidement face à ces récupérations commerciales
et les sites ont, pour la plupart, fermé sous la
pression. Cependant certains de ces vendeurs
se sont exprimés sur leurs raisons : récolter des
fonds pour aider Charlie Hebdo. Est-ce une
simple excuse ? Ce n’est pas important.
Dans quelques mois vous pourrez
sûrement trouver en librairie des livres sur le
07 janvier 2015, des soi-disant hommages aux
morts... On ne va pas cesser de voir défiler des
produits «Charlie», mais il ne tient qu’à vous
d’encourager ces ventes.
Petit Charlie
Il y en a qui revendent, il y en a
d’autres qui préfèrent créer. «Je suis Charlie» est devenu en quelques jours un logo. A
4
L’histoire de Charlie Hebdo
Charlie Hebdo tire son origine
du journal Hara-kiri. Ce dernier est fondé en 1960 par Georges Bernier et François Cavanna qui décrivent ce journal
mensuel comme « bête et méchant ».
Il sera plusieurs fois interdit de publication.
En 1969 est créée la version
hebdomadaire du journal : L’Hebdo
Hara-kiri. Lors de la mort de Charles
de Gaulle en novembre 1970, L’Hebdo Hara-kiri titre « Bal tragique à Colombey - un mort » ; dix jours avant, un
incendie dans une discothèque tuait 146
personnes. L’hebdomadaire est frappé
d’interdiction de parution. Pour contrer
cette sanction, le journal est renommé
Charlie Hebdo.
Le journal satirique est un des
seuls journaux à ne pas contenir de publicité ; alors en 1981, quand les ventes
de l’hebdomadaire baissent, le journal
est contraint d’arrêter de paraître. Le
dernier numéro sort le 23 décembre
1981.
Le journal renaît en 1992 suite à la démission de Philippe Val et de Cabu de la
Grosse Bertha. Cabu, Gébé, le chanteur
Renaud, et Val financent le premier numéro.
L’affaire « des caricatures » commence le 30 septembre 2005 quand le
journal danois Jyllands-Posten publie
12 caricatures de Mahomet. Suite au re-
3
fus du gouvernement danois de rencontrer certains diplomates de pays musulmans, certains imams danois sont allés
dans les pays arabes pour attiser l’intérêt
sur le sujet. Ces imams ont diffusé un
faux dossier contenant, certes, les caricatures du Jyllands-Posten, mais aussi des
images manipulées ainsi que des fausses
informations pouvant inciter à la haine.
Cette tournée donne à l’affaire une ampleur internationale.
Charlie Hebdo entre dans l’affaire lorsque, le 8 février 2006, il publie
ces caricatures « par solidarité et par principe » explique Philippe Val. Le numéro
les contenant est publié et vendu à 160
000 exemplaires (contre 140 000). Ces
caricatures associées à la une de Cabu : «
Mahomet débordé par les intégristes »,
avec le prophète disant « C’est dur d’être
aimé par des cons » provoquera la colère
chez nombre de musulmans. Ainsi, le
Conseil Français du Culte Musulman
demandera l’interdiction de ce numéro
auprès de la justice. Finalement, Charlie
Hebdo sera relaxé par la justice.
Charlie est de nouveau confronté
à la baisse de ses ventes en 2010 (48 000
exemplaires dont un quart d’abonnés)
; il augmente ses prix pour la première
fois depuis 9 ans. Charb justifie alors «
En pleine crise de la presse, nous n’avons
pas et nous ne voulons pas d’industriels
fortunés comme actionnaires. .
..
28
Sommaire
Le massacre de Charlie Hebdo
Nous en avons tous été informé et
avons tous subi ce même deuil du symbole
de la liberté d’expression en France lors de
l’attentat au sein même de la rédaction de
l’hebdomadaire Charlie Hebdo.
12 morts au total, toutes victimes de la folie
des terroristes pensant agir sous la protection d’Allah.
Parmi celles-ci nous pourrons retrouver deux policiers tués avant l’entrée
des frères Kouachi dans l’immeuble. L’un
d’entre eux, Ahmed Merabet, avait été blessé avant d’être achevé d’une balle dans la tête
alors que celui ci était filmé par les habitants
de l’immeuble face à la rédaction. Ils sont
morts en tentant de sauver leurs prochains
et ne seront pas oubliés. Les autres victimes,
tous rédacteurs, dessinateurs, correcteurs,
chroniqueurs ou encore journalistes de
Charlie hebdo ont ainsi été abattus sans
pitié sous les tirs des armes lourdes apportées par les terroristes. Parmi les plus reconnus de la rédaction, Jean Cabu et Stéphane
Charbonnier, respectivement surnommés
Cabu et Charb, ou encore le génial Georges
Wolinsky et enfin Tignous, de son vrai nom
Bernard Verlhac. Tous ces hommes étaient
des piliers du journal, des chroniqueurs courageux, des dessinateurs au culot ravageur,
tous prêt à défendre leur prochain sans jamais renâcler à la tâche. C’étaient des chics
types, toujours prêt à se marrer entre potes
29
et ils étaient ouverts à tous les nouveaux qui
entraient dans la rédaction ! Il est vrai que
nombre de leur satires et moqueries avaient
pour sujet Al Qaida et l’islamisme radical
pendant un temps mais la quantité d’articles
et de dessins défendant l’égalité des sexe,
des droits, des classes sociales mais aussi dénonçant une économie libérale ou encore
des politiques nationales et internationales
corrompues, des droits humains bafoués et
l’augmentation des injustices sociales étaient
des sujets largement abordés. Moins dangereux que ceux que l’on pourrait qualifier de
«trop plein d’audace» mais néanmoins totalement justifiés. J’aimerais aussi finir mon
article par une demande à tous ceux qui
liront ce journal ; ne confondez pas musulmans et islamistes extrémistes, ne créez pas
d’amalgames car c’est exactement ce qu’AQMI souhaite.
L’histoire de Charlie Hebdo p.3-4
FN et Charlie p.15
Besoin d’argent ? Achetez Charlie p.4
Fusillade de Montrouge p.17
Lassitude p.5
Le fanatisme au cours du temps p.18
Un pour tous, tous pour un p.6
La théorie du complot p.19
« C’est l’encre qui doit couler, pas
le sang ! » p.8-10
« Peut-on rire de tout ? » p.21-22
Au regard de cette phrase, sommes
nous véritablement tous des Charlie ? Aurions-nous tous eu ce même courage pour
défendre la liberté d’expression ?
Charlie Redolfi
L’islamophobie p.24-25
Recyclez-vous en ordure : faites de la
récup’ politique p13-14
Rédactrices et rédacteurs :
«Je n’ai pas peur des représailles. Je n’ai pas
de gosses, pas de femme, pas de voiture, pas
de crédit, ça fait sûrement un peu pompeux,
mais je préfère mourir debout que vivre à
genoux «, Charb.
« C’est bien fait pour leurs gueules » p.23
Prises d’otages : ça arrive aussi
en France p.12
Julien SIMON
Pauline LE BOZEC
Corentin JAN
Sofia PAPON
Nicolas SBRAIRE
Juliette CALORI
Boris DUFFAL
Naomi KUKANSAMI
Félix DESMARETZ
Camille MORIN
Tristan VARTANIAN
Sandrine OGE
Arthur BOLDRON
Kevin DAY
Simon SALOMON
Valentin DESVEAUX
Florine HAUSFATER
Merci aussi à Gaël COPIN
Le massacre de Charlie Hebdo p.29
Annonce de Lycéen p.30
Ours
Dessinateurs et dessinatrices :
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Malo DOUCET
Kenza DJERIRI
Eva GUESBA
Mattis CEBRON
Violette DELMAS
KevinDAY
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Correcteurs et correctrice :
Félix DESMARETZ
Léo TURQUIS
Florine HAUSFATER
Maquettiste : Léo BEAUVAIS GELY
Rédactrice en chef et directrice de publication : Florine
HAUSFATER
Pour CHARLIE, pour les policiers tués, les juifs assassinés, et les mosquées attaquées.
2
Edito
« Je me presse de rire de tout de peur d’être
obligé d’en pleurer. » écrit Beaumarchais.
Cette citation fait douloureusement écho
à l’esprit de certains dessins satiriques de
Charlie Hebdo. La satire, c’est d’abord rire.
Rire de l’actualité, rire du drame, rire même
de l’horreur. Car si l’on nous ressasse que
la satire « a pour but de dénoncer par le
ridicule en accentuant les traits grotesques
de certains sujets », elle est aussi une arme
contre le désespoir. Le désespoir ça tue et ça
gangrène la lutte. En se moquant de ces sujets qui font pleurer, ceux là même qui te balancent au fond du trou parce que plus rien
ne semble compréhensible, comme si rien
n’avait jamais eu de sens, Charlie se battait
– et se bat toujours – contre le désespoir. En
refusant d’abandonner face à l’accablement,
le remplaçant par une insolence farouche,
il affirme notre capacité à nous relever de
tout et de pouvoir s’en moquer ; parce que
c’est cela l’espoir, c’est croire que l’on pourra
toujours rire, trouver de la joie même dans
l’horreur, tourner en dérision les pires situations. Puis la satire, c’est le propre de la
démocratie : l’acide – amer des caricatures,
ça choque, et par là même fait réfléchir, se
poser des questions et contester. Ça titille
notre conscience politique et ça l’entretient.
Charlie Hebdo a défendu à plusieurs reprises la presse jeune, certains membres de
sa rédaction ont même rencontré des journalistes lycéens, débattu avec eux, dessiné
pour nous, pour défendre nos droits. Charb
et Pelloux auraient d’ailleurs approuvé la
remarque d’un journaliste jeune, qui disait
que « En fait, Charlie Hebdo, c’est un gros
journal lycéen. ». Alors nous, même si on
n’était pas encore là lors de ces rencontres,
on veut leur rendre hommage. Avec notre
tirage à 800 exemplaires, on ne pèse pas
bien lourd, mais on est animés par la même
volonté de s’exprimer. Alors voici un numéro spécial sur l’actualité désastreuse de ces
dernières semaines, de l’attentat à l’islamophobie, en passant par les diverses réactions,
sublimes ou ridicules, et par notre mobilisation à tous au lycée Michelet. Quelques
dessins aussi, quelques coups de crayons. Le
meilleur hommage aurait été le rire, mais la
précipitation dans laquelle nous avons fait
ce numéro nous a peut-être rendu un peu
trop sérieux sur certaines choses, alors nous
nous en excusons. Nous espérons que vous
apprécierez ce numéro. Parce que nous, on
est en colère, comme vous tous. Et que si la
seule chose qu’on puisse faire à notre échelle
c’est de publier notre petit journal lycéen,
de s’exprimer comme on peut, comme on
veut, alors nous le faisons. Parce que nous
sommes Charlie.
Florine HAUSFATER
P.S. : Certains rédacteurs et dessinateurs ont souhaité signer « Charlie », suivi de leur nom
de famille pour pouvoir identifier les auteurs. D’autres ont préféré signer comme d’habitude, pour des raisons et convictions différentes.
D’ailleurs, certains articles ne reflètent parfois pas du tout l’avis de toute la rédaction. Mais
c’est ça aussi la liberté d’expression.
1
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