Déclaration de l`Union Générale des Étudiants Musulmans

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Déclaration de l`Union Générale des Étudiants Musulmans
Tribune Socialiste n° 74 – 4 novembre 1961
Dans la cour de la Sorbonne, étudiants et
professeurs, Africains et Français manifestent leur
solidarité avec le Peuple Algérien. (Elie Kagan)
Déclaration de l'Union Générale
des Étudiants Musulmans
Algériens et des Étudiants du Parti
Socialiste Unifié
L
A guerre d'Algérie dure depuis 7 ans : —
Sept ans qui ont vu l'élargissement de la
lutte à tout un peuple, et
l'approfondissement d'un combat tourné tout
entier vers la liberté, la justice sociale et la
promotion collective de millions d'Algériens
opprimés et humiliés par le colonialisme ;
— Sept ans qui ont vu la dégradation
progressive de la vie publique française, les
atteintes répétées aux libertés syndicales et
politiques, la légalisation des mesures
arbitraires et des sévices, la fascisation des
forces d'un « ordre » qui chancelle.
Ce huitième anniversaire de la Révolution
Algérienne est encore plus dramatique que les
précédents : la haine raciale se déchaîne en
Algérie et en France, cependant qu'à Paris
même, les mesures discriminatoires, la
répression féroce, la terreur policière justifient
les
manifestations
(pacifiques,
mais
sauvagement réprimées) des travailleurs
algériens.
Face à cette situation, il importe d'affirmer
hautement la solidarité de nos deux jeunesses.
Cette solidarité se fonde avant tout sur la
convergence de nos luttes :
— Les adversaires du peuple algérien sont les
mêmes que les adversaires du peuple français
dans sa lutte contre un régime dont les deux
piliers sont le capitalisme et le colonialisme, dont
la seule politique est le maintien de ses privilèges
sur l'ensemble de l'Algérie.
— Le peuple algérien, en réclamant son droit
Les manifestations algériennes
à la liberté et à la dignité, ne combat pas les
travailleurs français, mais un type de rapports
fondés sur l'oppression et l'exploitation de tout
un pays au profit de castes étrangères.
— Les travailleurs français, à plusieurs
reprises (27 octobre - communiqué
U.G.T.A./Centrales ouvrières et étudiant...) ont
marqué leur volonté de ne pas être les complices
de l'exploitation du peuple algérien, et de voir
s'ouvrir une ère nouvelle dans les relations entre
la France et l'Algérie.
C'est en affirmant cette solidarité qui devient
chaque jour plus effective, au fur et à mesure
que se poursuit la fascisation du régime
français, que les représentants de l'UNION
GENERALE des ETUDIANTS MUSULMANS
ALGERIENS et des ETUDIANTS du PARTI
SOCIALISTE UNIFIE :
• saluent le courage des manifestants
algériens, hommes, femmes, unis pour affirmer
leur dignité.
• se félicitent de tous les gestes de solidarité
qui sauvegardent l'avenir des travailleurs et des
étudiants algériens en France.
• affirment que seuls le retrait des mesures
racistes et l'ouverture de négociations fondées
sur les principes intangibles suivants :
— l'unité et l'intégrité du territoire algérien ;
— la représentativité du G.P.R.A. et la
participation effective des cinq ministres
algériens détenus en France aux négociations ;
— le droit pour le peuple algérien, de gérer son
pays comme il l'entend et d'y procéder à toutes
les réformes de structures qu'il juge utiles, sans
que soit imposée une quelconque « coopération
» qui ne serait qu'un colonialisme déguisé ;
peuvent ramener l'apaisement et permettre
l'instauration de rapports fraternels, assurant
les garanties d'ordre personnel aux minorités,
rapports dont les milliers d'ouvriers algériens
en France sont le gage.
• déclarent vouloir traduire, dans les formes et par
les moyens qui leur sont propres, cette solidarité
dans la lutte.
• exigent que les libertés d'organisation, de
défense syndicale, d'expression et de réunion soient
rendues aux travailleurs algériens et que soient
rapportées les mesures racistes.
• appellent en ce 1° novembre, huitième
anniversaire de la Révolution algérienne, les forces
démocratiques françaises à s'unir et à affirmer
concrètement leur solidarité avec la lutte du peuple
algérien.
Cette déclaration commune veut faire connaître
à l'opinion publique qu'au-delà des guerres qui
ensanglantent et affaiblissent les nations, les
peuples, et parmi eux la jeunesse française et la
jeunesse algérienne, s'emploient dès aujourd'hui à
préparer un avenir de coopération et de sympathie
mutuelle, un avenir de luttes communes.