La voiture électrique Annales des Mines POSTEL

Transcription

La voiture électrique Annales des Mines POSTEL
La voiture électrique, un nouvel axe des politiques industrielles
Grégoire Postel-Vinay
DGCIS-MinEIE
Entre 1895 et 1914, une effervescence inventive agite l’industrie naissante de l’automobile. A
plusieurs égards il ressemble à celui qui agite aujourd’hui le monde automobile, en pleine crise. En
revanche, les gagnants de cette compétition pourraient être différents, en l’espace d’une vingtaine
d’années.
D’un côté, les véhicules électriques : partis longtemps avant les moteurs thermiques (1840) ils
connaissent en fin de siècle des progrès fulgurants : Chasseloup Laubat, atteint les 63km/h le 18
décembre 1898, aussitôt dépassé, le 17 janvier, par Jenatzy, à 66,66 km/h. Le jour même, il reprend
la main, à 70,3km/h. Le 27 janvier, Jenatzy est à 80 km/h, le 4 mars, Chasseloup Laubat reprend
l’avantage à 92,78km/h, sur une Jeantaud profilée, le 1er mai, Jenatzy pulvérise le record précédent,
est le premier au monde à passer avec un véhicule automobile les 100km/h, atteignant 105,88km/h
sur un km lancé en 34 secondes, environ 120km/h en pointe, (près du double du record atteint cinq
mois plus tôt) et un km départ arrêté en 47 secondes et quatre cinquièmes ; en 1904, on dépasse aux
Etats-Unis les 100miles/h. Simultanément, les métros et tramways, les taxis électriques se
développent, réduisant la pollution urbaine, et en 1914, un tiers de la production américaine de
voitures est électrique.
La Jamais contente – 106km/h en 1899
En face, les voitures à moteurs thermiques ne sont pas en reste : dès 1895, Panhard, Benz, Peugeot,
créent parmi l’aristocratie des adeptes de ce transport. Et en Europe d’abord, puis aux Etats-Unis, le
moteur à explosion supplantera le moteur électrique pour la propulsion automobile, et c’est à des
Nikolaus Otto, Etienne Lenoir, et Rudolf Diesel, Conrad Schlumberger, qu’on devra l’essentiel de
l’expansion de ce mode de transport. Le motif en est simple : le pétrole devient abondant et peu
cher, alors que les batteries ne progressent guère, limitant l’autonomie comme la puissance des
véhicules électriques par rapport à l’essence, dont la densité d’énergie est de deux ordres de
grandeurs plus élevée. Ceci se traduit dans la courbe de production de ces véhicules :
(in Midler et Beaume, actes du Gerpisa, op cit)
Le rêve du véhicule électrique se poursuit, cependant, avec des soubresauts : au début de la seconde
guerre mondiale, la pénurie de carburants donne, un bref instant, un regain d’intérêt aux véhicules
électriques, vite supplantés par des voitures à gazogène. En 1968 on songe à un véhicule électrique
pour une personne et avec une autonomie de 200kms :
A la fin des années 80 et surtout après la première guerre d’Irak, le véhicule électrique recommence
à faire l’objet d’un intérêt, certes distant, de la puissance publique en France. Quelques prises de
recharge sont installées dans les parkings publics, condition nécessaire de leur développement. Celuici commencera à partir de 1995. En Europe, fin 2006, 11.000 véhicules électriques circulent dont
8000 en France, dont 5 000 voitures (principalement dans les flottes d’EDF, la Poste, mais aussi avec
un début d’usage des particuliers) PSA a conçu la « Tulip » comme démonstrateur.
Mais quatre déclencheurs presque simultanés vont conduire à changer de dimension dans les
ambitions, dans la seconde moitié de la décennie 2000 :
-
-
-
1
2
La seconde guerre d’Irak et le choc pétrolier qui s’ensuit, qui montre le risque
d’insuffisante sécurité des approvisionnements, obère le pouvoir d’achat des ménages,
et fait plonger le déficit commercial (pour la France, la facture de pétrolière de 2008
atteint 59,4G€1, dépassant notre déficit commercial ; 45% est liée à la consommation de
transports routiers ; si 2008 avec une croissance d’un tiers de cette facture, apparaît
atypique, en revanche sur longue période la tendance est à une croissance forte2).
Mutatis mutandis, des problèmes comparables se posent à un grand nombre de pays de
l’OCDE.
La sensibilité accrue des populations aux risques liés à l’effet de serre : 13% des émissions
de GES à l’échelle mondiale liés aux transports, qui doublent en une génération, 22% à
l’échelle de l’Union, un tiers en France (du fait du parc nucléaire qui réduit les émissions
des autres modes de consommation). Avec environ 130Mt CO², le secteur routier est
ainsi en France le secteur le plus important en émissions de gaz à effet de serre. Les
engagements du conseil européen du 12 décembre 2008 de réduire de 20% les émissions
de l’Union d’ici 2020 sont hors d’atteinte sans agir sur cette composante, ce qui passe à
la fois par l’amélioration des performances des véhicules thermiques, mais aussi par le
développement des usages électriques (pur ou hybride), tout en développant les sources
d’électricité peu génératrices d’effet de serre, tant en France qu’au sein de l’Union. Il
faudrait réduire de 40% les émissions de véhicules neufs, en moyenne, d’ici 2020, pour
tenir les objectifs du conseil européen, compte tenu de l’inertie du parc existant. S’il est
trop tôt, à l’heure où est écrit cet article, pour prévoir les résultats du sommet de
Copenhague, on peut s’attendre à ce que tant en Chine qu’aux Etats-Unis il implique des
actions volontaristes pour réduire les émissions de GES liées à l’automobile : une
croissance 0 des émissions en Chine, dans un contexte de croissance historique sur 20
ans de l’ordre de 6% (sans revenir à la croissance à deux chiffres connue récemment),
implique d’ici 2020 des moyens considérables. Et l’annonce des Etats-Unis en mai 2009
au sommet des 17 économies majeures sur l’énergie et le climat d’une réduction de
l’ordre de 5% par rapport à 1997, même si elle paraît insuffisante aux Européens, conduit
cependant à une très réelle inflexion de la politique suivie jusqu’alors.
La crise de l’automobile, suivant la crise financière, conduit les constructeurs à chercher
des soutiens auprès des pouvoirs publics, lesquels vont, aux Etats-Unis, en Allemagne, en
http://lekiosque.finances.gouv.fr/APPCHIFFRE/Etudes/thematiques/A2008_energie.pdf
http://www.industrie.gouv.fr/energie/statisti/bilans-factures.htm
-
France, réagir positivement en particulier pour les investissements jugés porteurs
d’avenir, donc répondant aux deux enjeux ci-dessus ; simultanément, l’affaiblissement du
pouvoir d’achat des populations les plus directement frappées par la crise, en particulier
dans les banlieues lointaines non desservies par des transports en commun, conduit à
rendre plus attractifs des véhicules dont les coûts d’exploitation soient jugés
relativement peu dépendants du coût du pétrole.
Les pays émergents notamment d’Asie conduit à ce que la croissance de la demande
automobile vienne désormais essentiellement d’eux. Or, le gouvernement chinois par
exemple affiche une claire volonté de faire du véhicule électrique une part importante à
moyen-long terme de son parc installé. Ne pas traiter cet enjeu est, pour les grands
constructeurs, se condamner au déclin.
Ainsi Dassault, Heuliez et le Ministère des Science and Technology (MoST) ont signé un premier
accord de coopération dans le domaine du véhicule électrique dès janvier 2004. Bolloré se lance
dans un projet. Aux Etats-Unis, l’EV1 de General Motors a connu des déboires (relatés par le film de
fin 2006 « who killed the electric car). Au Japon, en revanche, Toyota réussit la percée d’un véhicule
hybride.
A partir de 2007, et surtout en 2008 et 2009, se multiplient les rapports et propositions3, engageant
les principaux constructeurs et les gouvernements.
Ces rapports sont accompagnés de réalisations concrètes :
Véhicule
Constructeur
Date de distribution
Electrique
Tesla (Californie, haut de 2008
gamme)
Mitsubishi (et coopération 2009 à 2011 selon les Etats4
PSA)
Renault-Nissan
2010 à 2012 selon les Etats5
Bolloré
2010
Dassault
Heuliez
Fin 2010 si reprise
Subaru
2010
3
Sans être exhaustif : « From technology competition to reinventing individual mobility for a ssustainable
future : challenges for new design strategies for electric vehicle” Christophe Midler et Romain Beaume, Ecole
Polytechnique, actes du Gerpisa ; “Le véhicule grand public d’ici 2030”, Jean Syrota, Romain Beaume, Jean
Loup Loyer, Hervé Pouliquent, Denise Ravet, Philippe Rossinot, Centre d’analyse stratégique (septembre 2008)
« De la voiture à la mobilité dans le futur », Gabriel Plassat, ADEME 2009 ;
«Développer les éco-industries en France » rapport du BCG pour le MinEIE, sous la direction de G Postel-Vinay
et Ivan Faucheux, décembre 2008, volet véhicule décarboné.
http://www.minefe.gouv.fr/presse/dossiers_de_presse/081202ecotech2012/som_081202ecotech2012.php
Travaux en cours sur la prospective automobile, BIPE pour DGCIS, mai 2009, et sur la mobilité économe, CAS.
http://wiki.admi.net/cgi-bin/wiki?ElectricCar
4
5
http://www.challenges.fr/entreprises/20090302.CHA1598/mitsubishi_et_psa_se_lancent_dans_lelectrique.html
http://www.leparisien.fr/automobile/l-irlande-roulera-electrique-avec-renault-nissan-03-04-2009465937.php http://www.leparisien.fr/economie/des-2011-on-pourra-rouler-en-renault-electrique-21-05-2009520280.php
Mercedes & Smart
2010
Hybride rechargeable (VE à Toyota
complément thermique)
Volkswagen
2010
Hybride (V Thermique à BMW
complément électrique)
Mercedes
2010
2010
2010
Tout en ayant à résoudre les problèmes de longue date identifiés, et y apporter des réponses
innovantes. Ces problèmes concernent principalement :
a) Les batteries : capacité, rareté des matières premières nécessaires pour certaines d’entre
elles, puissance de pointe, nombre de cycles avant obsolescence, coûts, rapidité de recharge
ou d’échanges, températures de fonctionnement, et y apporter des réponses innovantes. On
trouvera ci-après un tableau résumant les principales caractéristiques qui ont fait jusqu’ici
privilégier les Li-ion. A noter qu’une équipe du MIT a tout récemment réalisé une percée sur
la durée de charge.
b) Les équipements publics et privés permettant la recharge des batteries dans des conditions
sûres. Il s’agit de passer à un niveau sensiblement supérieur aux quelques prises dans des
parkings qui étaient pour le moment réservées à des marchés de niche. L’investissement
peut être considérable, et requiert un modèle économique qui dépend du coût du CO², et
des externalités positives à attendre de ce type de développement (réduction des cancers
liés aux particules fines, commerce extérieur, pouvoir d’achat des ménages, indépendance
géo-politique, réduction de la pollution par le bruit dans une certaine mesure, résilience par
rapport à des chocs énergétiques ou économiques)
c) Problèmes de normalisation (notamment pour les recharges, et alors même qu’on est dans
une phase d’explosion de solutions diverses, à échelle mondiale).
d) Compétitivité par rapport aux autres solutions à partir des véhicules thermiques (qui
conservent des marges de progrès importants)
e) Taille critique des marchés, permettant de lancer une capacité de production qui soit de taille
compatible avec la contrainte de compétitivité avec d’autres véhicules.
f) Evolution vers des modèles différents d’usage des véhicules, avec le développement de
véhicules urbains
g) Constitution de chaînes de valeur où une part suffisamment significative de la valeur ajoutée
et des emplois se trouvent localisés sur le territoire (ce qui suppose d’être réactif et
innovants), en alternative partielle aux véhicules thermiques (lesquels resteront dominants à
échéance 2030, eu égard à la lenteur de renouvellement du parc automobile).
h) Optimisation de la politique énergétique, en tenant compte de l’évolution de la demande si
le véhicule électrique émerge.
-
-
Sur le premier point, on trouvera ci-après un tableau résumant les principales caractéristiques qui
ont fait jusqu’ici privilégier les Li-ion (la performance en nombre de cycles s’est accrue depuis
l’élaboration de ce tableau). A noter qu’une équipe du MIT a tout récemment réalisé une percée sur
la durée de charge. S’agissant de l’accès au lithium, les ressources sont de deux ordres :
d’une part des pegmatites à minéraux de lithium, qui, à l’exception des pegmatites de Tanco
(Canada) ou SoG (Australie), sont de petits gisements. Ces minéraux servent à l’industrie du verre ou
de la céramique, mais pas à faire du LiCO destiné aux batteries.
D’autre part des salars à saumures, qu’on trouve dans de rares régions arides( au Chili, en Argentine,
en Bolivie, aux Etats-Unis, au Tibet). Ils servent à produire le carbonate de lithium. Quatre salars
sont exploités dans le monde, et de nouveaux projets surgissent au Chili, en Argentine, en Chine. Ce
dernier pays annonce une capacité importante, de l’ordre de 45000t /an de LiCO en 2010, au Tibet.
Un opérateur français s’est récemment intéressé à la Bolivie.
Sur le second et troisième points, les Etats Généraux de l’automobile réunis le 20 janvier ont conduit
à installer le 17 février un groupe de travail devant élaborer la stratégie nationale de développement
des infrastructures de recharge pour véhicules électriques et hybrides d'ici 2012, et donc de
déterminer les conditions de mise en place de bornes de recharge ou de stations d'échange de
batteries tant sur les espaces publics que privés.
Ceci s’inscrit en cohérence avec le plan de développement de véhicules dé-carbonés, doté de 400M€
de financements publics d’ici 2012 pour la R&D des véhicules électriques et hybrides rechargeables,
et avec les activités des pôles de compétitivité « mobilité et transports avancés », « véhicule du
futur ».
Ce plan prévoit également des mesures pour mettre en place l'infrastructure nécessaire à la recharge
des véhicules : les nouvelles constructions pourraient ainsi intégrer d'emblée des prises électriques.
Participent à ce travail les principales parties prenantes : distributeurs d'énergie, constructeurs
automobiles, élus locaux, entreprises du BTP, gestionnaires de parkings, supermarchés.
Le même groupe doit traiter le point relatif aux normes et des standards pour l'ensemble du réseau,
et à un plan de développement économiquement viable. Ses conclusions sont attendues en juin 2009
pour que les textes réglementaires requis soient en vigueur dès le 1er janvier 20106.
Les quatrième et cinquième points sont au premier chef l’affaire des constructeurs eux-mêmes,
mais, compte tenu de l’interférence avec la gestion de l’espace public, il faut une vision partagée
avec l’Etat et nombre de collectivités régionales ou locales : en pratique,
6
-
La Chine compte environ 40 M de véhicules, chiffre qu’elle envisage de quintupler d’ici
2020, et, compte tenu de la ponction sur les ressources énergétiques mondiales que cela
représenterait, elle souhaite que la moitié de son parc en 2020 fonctionne avec des
énergies nouvelles : cela fait d’elle le marché en croissance du véhicule électrique
potentiellement le plus dynamique. L’investissement dans les batteries date d’au moins
1990, surtout dans le cadre des technologies de l’information, mais est en train d’évoluer
vers la demande de véhicules, au travers du plan quinquennal 2006-2010. L’achat de
véhicules électriques est subventionné, leur promotion a été faite à l’occasion des JO de
Pékin. Parmi les moteurs industriels on trouve la Shanghai Automobile Industry
Corporation, la Shanghai Fuel Celle Vehicle Powertrain Corporation Ltd, l’Université de
Tongji.
-
Le gouvernement allemand a réuni fin 2008 quelques 400 experts pour définir des
objectifs, et est parvenu à un chiffre de l’ordre du million de véhicules électriques en
circulation en 2020 et 5 M en 2030, avec un objectif de leadership mondial de
l’électromobilité. Le plan associe plusieurs ministères avec un pilotage du BMWi, et
soutient des projets pilotes.
-
Renault est sur un chiffre analogue pour la France, et les groupes de travail précités
doivent permettre d’affiner ce chiffre. PSA a relancé en 2007 son activité dans les
véhicules électriques, où il était leader en Europe, et par ailleurs prévoit un million de
véhicules à hybridation légère en 2020 (stop and start).
-
Une mission, confiée à Jean Paul Bailly, président de La Poste, conduit à donner de la
visibilité à la filière. Ceci passe par de la commande d’ici la fin de l’année par de grandes
entreprises (dont la Poste, EDF, France Télécom et GDF Suez, concernant une flotte de
100 000 véhicules tout électrique dans les cinq ans à venir).
-
La ville de Paris quant à elle développe l’Autolib, qui doit d’ici 2010 mettre à
disposition des usagers 4000 véhicules, dont la moitié dans Paris intra-muros, avec 1400
stations, un abonnement compris entre 15 et 20 €/mois, et un coût de 4 à 5€ par demiheure d’utilisation.
http://www.actu-environnement.com/ae/news/jouanno_chatel_groupe_travail_recharge_vehicules_decarbones_6754.php4
-
A côté de ces grands opérateurs, d’autres entreprises se lancent : Heuliez, avec
l’Heuliez friendly dont la mise sur le marché est prévue pour 2010, si la solidité financière
de l’entreprise est assurée, ou la WILL, en partenariat avec Michelin et son concept de
moteur-roue. Bolloré avec la Bluecar. Matra sport commercialise les véhicules
électriques de Chrysler en France (GEM), et des vélos à assistance électrique. Venturi et
PSA développent une version électrique de la Berlingo, Venturi développe aussi l’Eclectic,
quadricycle lourd urbain, et la Fetish, voiture de sport dans le même esprit que la Tesla.
Fam automobile, Ligier, Microcar, ont aussi des projets, et la liste n’est pas exhaustive, ce
qui traduit le caractère bouillonnant du sujet.
-
S’agissant des batteries, Saft et Jonhson Controls ont créé une JV : elle fournit, avec
l’usine de Nersac (Charente) la première ligne de production au monde de batteries Liion, et a noué un partenariat avec BMW.
-
Le gouvernement enfin s’est fondé sur une mission d’analyse stratégique qui, en
décembre 2008, donnait les principaux résultats suivants, dans un scénario médian :
Filière Véhicule décarboné
Ce rapport est fondé sur des données et des hypothèses retenues en accord avec la DGE. Toute modification de ces données et hypothèses aurait un impact sur le résultat
des analyses et les conclusions de ce rapport. Le BCG ne garantit ni l'exactitude ni l'exhaustivité des données contenues dans ce rapport.
Synthèse Véhicule Décarboné
Marché européen
(Véhicules électriques et très hybridés)
Emplois bruts en France
(Marché Français + export)
Marché (Md€)
Min
150
Max
Estimations fondées sur des hypothèses de travail
Emplois bruts
~10%
80 000
Part de marché
de l'électrique
40 000
20 – 50
50
0
~1%
~0
0
2008
2020
2030
~0%
7 – 15%
15 – 25%
Scénario de développement de la filière en France
Ventes annuelles de véhicules électriques en France
300 000
300 000
150 000
40 000
0
Part de marché
de l'électrique
65 000
50 – 90
0
2008
2015
2020
~0%
~2%
~12%
Développer les éco-industries-consolidation des analyses marchés filières
benchmarks-document de référence-dec08.ppt
~0
2008
Emplois nets de
la substitution
8 800
2015
2020
~800
~5 000
Principales mesures
Amorçage 2009 – 2015 : créer les conditions du
développement de 100 000 VE en France d'ici 2015
• Cibles prioritaires : autopartage et véhicules utilitaires
urbains
• Participation à l'effort de recherche, infrastructures de
charge adaptées, soutien de la demande, partage du risque
Développement 2015 – 2020 : accompagner le
développement du VE pour atteindre 1M de VE en 2020
• Cible prioritaires : véhicules particuliers urbains/péri-urbains
• Infrastructures, soutien de la demande adapté, partage du
risque
© Copyright BCG 2008
100
2
-
Au Japon, Toyota, leader mondial, développe principalement des hybrides. Nissan
envisage d’en commercialiser en 2010, Fuji Heavy Industries, Takeoka, Matsushita sont
très actifs, le dernier avec un partenariat avec PSA (sur l’i-Miev). Le gouvernement
subventionne le développement des batteries à hauteur de 42M€/an, sur un programme
allant jusqu’en 2020. Le METI regroupe également un consortium de 13 entreprises et
11 laboratoires de recherche pour travailler sur le sujet, de façon comparable, mutatis
mutandis, à ce que font les pôles de compétitivité français.
-
Aux Etats-Unis, la loi « corporate average fuel economy » prise fin 2007 prévoit des
sanctions financières à l’encontre des industriels de l’automobile produisant des
véhicules gros consommateurs de carburant à compter de 2020. Des subventions d’un
montant de 90M$ du département de l’énergie sont accordées dans le cadre de la
recherche sur les hybrides rechargeables, et sur les électriques entre 2008 et 2012. Des
garanties de prêts sont données pour l’élaboration d’infrastructures servant aux
véhicules électriques, ou à la fabrication de batteries Li-ion. La Californie fait un effort
réglementaire particulier, via le California Air Resource board. Le salon de Detroit début
2009 était principalement axé sur le développement de voitures hybrides et électriques
parmi les grandes marques américaines. La restructuration de Chrysler avec Fiat
correspond à un choix stratégique de voitures plus petites. Elle ne préjuge pas a priori de
la motorisation, mais pourrait conduire à une part de véhicules électriques. Enfin, 3
sociétés nouvelles sont dédiées à ces véhicules : Fisker Automotive, Phoenix Motors et
Venture Vehicles. Les fabricants de batteries se regroupent.
Plus généralement, une frénésie d’annonces a saisi les constructeurs et les gouvernements, qui tous
veulent prendre date dans un marché potentiellement porteur : on en trouvera un résumé ci-après :
Filière Véhicule décarboné
Ce rapport est fondé sur des données et des hypothèses retenues en accord avec la DGE. Toute modification de ces données et hypothèses aurait un impact sur le résultat
des analyses et les conclusions de ce rapport. Le BCG ne garantit ni l'exactitude ni l'exhaustivité des données contenues dans ce rapport.
Le secteur automobile connaît une transformation profonde
La réduction de la consommation de carburant et des émissions est au centre des préoccupations
… qui se traduisent par une abondance
de projets sur les véhicules décarbonés
2007
De la part des constructeurs
2008
2009
Toyota FT-HS
• “Nous ne vendrons plus que des véhicules
hybrides d’ici 2020" (Masatami Takimoto, VP
powertrain development de Toyota, Mai 2007)
Hybrid X
Toyota A-BAT
Lexus LF-Xh
FCHV-adv
Plug–in Hybrid, tba.
Lexus RX400h next gen.
Toyota FT-HS Sportscar
Honda compact hybrid-tba
Honda Fit
FCX Clarity
CRX Hybrid
Land Rover-Diesel-H.
Airstream
Ford Fusion H.
Mixim
Pivo II
Mazda T ribute HEV
Opel Flextreme
Corsa Micro H.
Saturn AURA
Chevy Malibu
Cadillac
Provoq
Chevy Volt
A1 Metroproject quattro
Passat Lingyu
Soutenus par les annonces des
politiciens
Mercury Montego, Ford Five Hundred,
Ford Edge, Lincoln MKX
HySeries Edge
Altima H.
• “Dans 15 ans, il n’y aura plus que des
véhicules hybrides" (prof. Ferdinand
Dudenhöffer, Sep. 2007)
Touran EcoPower II
Electric small car
F 700
Volt E-Flex
Chevrolet Silverado H.
GMC Sierra H., Yukon H.
Silverado H.
Q7 Hybrid
T iguan HyMotion
Hyundai IBlue
Hyundai Accent, Kia Rio
Citröen C-Cactus Hybride
Golf Micro H.
Audi version of
VW UP! (rumour)
Touareg H.
X6 Active H
GLK Bluetec H.
7 series H
ML 450 H.
Smart ForT wo H.
S350 Direct H.
Suzuki SX4-FCV
PSA H2Origin delivery van
S400 Hybrid
B-class F-Cell
Electric Smart, add. model Mercedes
Cayenne Hybrid
Subaru R1e
Hyundai Avante hybrid
Mitsubishi iMiEV
PSA Diesel HDI bybride
Renault Mégane électrique
Renault Scenic FCV H2
Aujourd'hui
Ruptures technologiques au niveau des carburants (biocarburants,
H2…) et des modes de propulsion (électricité…)
Développer les éco-industries-consolidation des analyses marchés filières
benchmarks-document de référence-dec08.ppt
VW Up!
Jetta H.
Golf TDI H.
EcoVoyager
Autres
Equinox Fuel Cell
Saturn Vue Green Line
Yukon, Sierra H.
Chevy T ahoe
Panamera Hybrid
• “La technologie H2 pourrait réduire les
émissions de CO2 de 80% en 2050 " (Wolfgang
Tiefensee , Ministre des transports allemand, Juin
2008)
Electric midsize car
further introduction
planned already
RX-8 Renesis
Cadillac Escalade
1series, micro hybrid
• “Mon programme énergétique : 150Md$ sur
dix ans pour mettre en place le secteur de
l’énergie verte" (Barack Obama, candidat à
l’élection présidentielle, Fév. 2008)
Camry Hybrid,
3 rd gen
new Lexus and T oyota model, tba.
CR-Z
Small Hybrid Sports
FCX Clarity
Appuyés par les experts
2011
Prius variants (A, B, C)
T oyota Sienna
Lexus LS 600 h
• "15-20% du marché automobile global pourrait
être composé de véhicules électriques d’ici
2020" (Serge Yoccoz, directeur de projets
véhicules électriques de Renault, Juin 2008)
2010
3rd generation Prius
Concept car/prototype
Début de production
VE
Hybride
Fuel cell
© Copyright BCG 2008
Nombreux effets d'annonces des
constructeurs, experts et politiques
4
Simultanément, certains Etats, au-delà des politiques d’incitation par les normes d’émission ou le
coût d u CO², agissent par des politiques spécifiques pour faciliter des innovations de rupture vers
les véhicules électriques :
•
Politique ZEV en Californie (1994-2017)
–
quotas de production de véhicules zéro-émissions ou à basses émissions
pour les constructeurs et pénalités, + développement d'infrastructures (cf.
hydrogen highway)
–
Les résultats sont mitigés : des objectifs fortement revus à la baisse pour
2008-2012
•
•
Israël et Better Place (2012-2015)
–
politique de "cause nationale" : investissements massifs sur le réseau
d'infrastructure et politique fiscale significative
–
politique qui fait des émules (Danemark, Portugal, Japon, Californie,
Australie…)
Low Carbon Vehicle Innovation Platform et Low Carbon Vehicle public
procurement en Angleterre (2007-2014)
–
partenariats privés/publics : R&D, démonstrateurs et commandes publiques
Au-delà de ces éléments, l’équation à résoudre est relativement simple : un véhicule thermique
coûte à son usager son prix d’achat, sa maintenance, l’essence (incluant la TIPP), et dans le futur une
taxe sur le CO². Un véhicule électrique comporte son prix (plus élevé à ce stade que le véhicule
thermique dans beaucoup de configurations), prix réduit au besoin par une aide publique tenant
compte des externalités positives pour la collectivité, de la maintenance, du coût de l’électricité, de
la location des batteries. Les principales questions sont donc de réduire le coût des batteries,
d’allonger leur longévité, de revenir sur la tendance à l’alourdissement des voitures constatée depuis
le contre-choc pétrolier des années 80 et à la multiplication des appareils électriques à bord, (au
moins pour le début de gamme), d’avoir une taxation CO² à un niveau suffisant à partir du moment
où le marché décolle, de s’assurer que les gouvernements ne chercheront pas à compenser la perte
de la TIPP par une taxation sur l’énergie électrique non génératrice de GES (une des premières
justifications de la TIPP étant précisément de donner un signal sur la rareté d’une ressource non
renouvelable et génératrice de GES, il n’y aurait pas grand sens à taxer surabondamment des
ressources plus pérennes, nonobstant l’état des finances publiques ). Dans ces conditions, le
développement de la filière peut s’effectuer grosso modo en deux temps : une période 2010-2015 où
sont utilisées les méthodes d’auto-partage, de flottes d’entreprises, de livraisons en ville, et
marginalement de quelques afficionados ; puis une période 2015-2020 où se développent les
véhicules particuliers (2è voitures urbaines et péri-urbaines, hors vacances) ; au-delà, une croissance
de véhicules purement urbains et péri-urbains de type « city cars »."
Le sixième point a été longtemps considéré comme une option non-viable par les constructeurs : les
usagers préfèrent un véhicule « couteau suisse ». Cependant, des solutions mixtes sont en cours
d’expérimentation : location d’un véhicule à plus grande capacité pour les quelques jours par an où il
est requis, amélioration des services de location à l’arrivée et de logistique pour les voyages
ferroviaires de longue distance, développement de formes d’éco-tourisme sans voiture sur les lieux
résidentiels... D’autre part, l’élargissement des grandes métropoles accroît de toutes façons l’utilité
de véhicules pour des usages quotidiens dont les trajets sont relativement courts, sont largement
dans les limites d’autonomie d’un véhicule électrique, et qui correspondent, de loin, à l’essentiel des
kms parcourus. A horizon 2030, s’agissant de l’Ile de France où l’on comptera environ 21M de
trajets par jour, la part de la voiture pourrait être de 68% contre 32% pour les transports en
commun. Si la proportion est inverse pour les trajets internes à Paris, où la couverture de transports
en communs est très dense, la part de la voiture croît au fur et à mesure qu’on va vers la grande
banlieue. Et, en Ile de France, 98% des trajets font moins de 30kms7 L’alternative, simultanément
développée (dans des gammes plus hautes) consiste à produire des véhicules hybrides, pour lesquels
il y aura également un marché. A noter toutefois que leur contribution à la réduction de l’effet de
serre est moindre, tout en restant positif.
7
Enquête globale des transports, 2005, selon BCG.
distance au travail - source INSEE Première N° 767 - avril 2001
Distance kilométrage
Nombre
catégorie
moyenne quotidien
d'actifs
au travail
total
ne changent pas de commune pour
9.012.614
7 63.088.298
aller travailler
changent de commune
14.042.588
15,1 212.043.079
changent de département
2.550.650
26,7 68.102.355
changent de région
719.847
56,9 40.959.294
changent de pays
280.896
40 11.235.840
Ensemble
26.606.595
14,9 395428866
Le septième point, le plus complexe dans un contexte essentiellement mouvant, dépend
fondamentalement de la réactivité des opérateurs, comme à la fin du XIXè. Le tableau suivant
esquisse cependant une estimation de la valeur créée en France, selon deux scénarios contrastés, un
de type « fil de l’eau », l’autre plus volontariste.
Filière Véhicule décarboné
Ce rapport est fondé sur des données et des hypothèses retenues en accord avec la DGE. Toute modification de ces données et hypothèses aurait un impact sur le résultat
des analyses et les conclusions de ce rapport. Le BCG ne garantit ni l'exactitude ni l'exhaustivité des données contenues dans ce rapport.
Véhicule électrique
Détail de l'impact sur la valeur ajoutée en France
selon le scénario en 2020
Ordres de grandeur sur la base des hypothèses des scénarios
Détail
S1A
Détail
20% de la production VE exportée
20% des GMP électriques produits en France
S2B
50% de la production VE exportée
50% des GMP électriques produits en France
M€
M€
4 000
4 000
3 547
1 044
720
3 000
3 000
2 000
2 000
980
1 000
720
418
678
0
0
Ventes de VE à Perte de prod.
de GMP2
l’export1
Prod. batterie
+mot.élec.3
TOTAL
Ventes de VE à Perte de prod.
l’export1
de GMP2
Prod. batterie
+mot.élec.3
TOTAL
Hypothèses :
• 100% de valeur ajoutée des VE exportés hors groupe batterie+moteur électrique est considérée comme française
• 75% de la production de GMP des VT produits en France est considérée comme française
1. Valeur de la production réalisée en France pour les VE exportés
des batteries et moteurs électriques en France
Développer les éco-industries-consolidation des analyses marchés filières
benchmarks-document de référence-dec08.ppt
2. Perte de valeur de la production de GMP pour les VT (hypothèse : produits en France à 100%)
3. Valeur de la production
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1 000
3 871
34
Le huitième point est souvent oublié, alors qu’il est important : il s’agit de l’inflexion de la politique
énergétique qui peut être liée au développement du véhicule électrique. Si, à horizon 2020, le parc
installé était de 3.33% en tout électrique et de 15% en 2030 (scénario à 1M de véhicules électriques
en 2020, volontariste mais modeste au regard de certains concurrents, et poursuite d’une croissance
lente par rapport à la part de marché 2020 ensuite, compatible avec les caractéristiques de la
demande alors) ce seraient environ 30M*15%*25kWh/100kms*10.000kms/an soit 11,25TWh qui
seraient économisés en autres combustibles. En supposant que ces véhicules soient majoritairement
rechargés la nuit (soit par les loueurs de batteries, soit par les particuliers eux-mêmes chez eux), cela
justifierait la construction d’un équipement « en base « d’électricité non productrice d’effet de serre
supplémentaire. Celui-ci, à son tour, permettrait d’éviter les consommations des heures de pointe
produites à partir principalement d’hydrocarbures ou de charbon, réduisant d’autant la dépendance
énergétique de la France, et son déficit commercial. Il y a mieux : si le conducteur utilise la batterie
de sa voiture en rentrant le soir pour des usages électroménagers (elle n’est en général pas
totalement vidée à ce moment là) évitant ainsi aux producteurs d’avoir à mettre en œuvre des
moyens de production coûteux lors de la pointe de consommation, quitte à la recharger la nuit
lorsque seuls les moyens « en base » fonctionnent, à un coût du kWh beaucoup plus réduit, il est
imaginable alors d’avoir une tarification qui permette des économies sur sa facture d’électricité
domestique à l’usager du véhicule électrique, tout en diminuant également les besoins de pointe (à
condition d’avoir mis en œuvre les liaisons informatisées nécessaires avec le réseau pour recharger
en période utile. Ceci, est vrai pour la France, compte tenu de son parc nucléaire et hydroélectrique,
et, à terme, d’autres ressources non génératrices d’effet de serre. Mais c’est vrai aussi, dans une
moindre mesure, pour l’Europe, où 17 pays disposent déjà d’un parc nucléaire, et où ceux qui ont mis
en œuvre des programmes de développement d’énergies renouvelables et non génératrices d’effet
de serre sont nombreux. Cela rendrait ainsi le système européen dans son ensemble plus résilient
aux crises énergétiques, de la nature de celle que nous avons connue en 2008.
De ce qui précède, ressortent au moins trois points : le premier, est que le véhicule électrique n’a pas
dit son dernier mot, et que le temps travaille pour lui ; le second, est que l’activisme développé par
les principaux pays disposant d’une industrie automobile doit conduire à une grande vigilance et
réactivité, tant des constructeurs que des puissances publiques ; le troisième, est que le système
automobile a néanmoins une grande inertie, et que la crise actuelle ne sera pas résolue, en termes
d’emplois à court terme, par le développement du véhicule électrique, même s’il peut y contribuer,
notamment par les emplois induits dans les infrastructures nouvelles, et par une intensification de
l’innovation. En revanche, apporter une attention à ce type de véhicules est, pour l’avenir, crucial, si
nous désirons jouer quelque rôle, positif autant qu’il se pourra, dans un des grands déterminants de
l’avenir du monde : maintenir la liberté de déplacement incomparable qu’a apporté la voiture, en
réduisant, désormais drastiquement, ses nuisances.
Nb : les propos rapportés dans cet article n’engagent que leur auteur, et non pas son institution.