La Chine et ses problèmes économiques et politiques. La Chine et

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La Chine et ses problèmes économiques et politiques. La Chine et
02/04/2013
La Chine et ses problèmes économiques et politiques.
par Alain Collas, Proviseur, chargé de cours à l’Université de
Bretagne Sud et chercheur associé au CERHIO (Centre de
Recherches Historiques de l’Ouest)..
Sommaire
La Chine et ses problèmes économiques et politiques................................................................................................................ 1
I.
Introduction : .................................................................................................................................................................... 1
II.
Rappels historiques :.................................................................................................................................................... 2
A.
Aspects économiques et sociaux :........................................................................................................................... 2
B.
L’ancienne marine chinoise : .................................................................................................................................. 3
III.
L’état économique de la Chine : .................................................................................................................................. 3
IV.
Le contexte social : ...................................................................................................................................................... 5
V.
Les choix de gouvernement : ....................................................................................................................................... 6
VI.
Conclusion :................................................................................................................................................................. 7
La Chine vient de se choisir un nouveau président Xi Jinping et un nouveau premier ministre
Li Yuanchao, ce jeudi 14 mars. Bien que le président ait été élu par 2 952 voix pour, une contre, et 3
abstentions, et le premier ministre par 2 839 voix pour, 80 contre, et 37 abstentions, les « débats
politiques » pré-électoraux ont été plus animés que ne l’imaginaient les observateurs1.
I.
Introduction :
La Chine est un sujet particulièrement sensible en ce moment. On en parle beaucoup, souvent
mal, ou de manière tronquée.
La Chine impressionne depuis longtemps. « Quand la Chine s’éveillera, le monde
tremblera » : cette affirmation prophétique est attribuée à Napoléon. L’empereur l'aurait prononcée en
1816, après avoir lu « La relation du voyage en Chine et en Tartarie » de Lord Macartney, premier
ambassadeur du roi d'Angleterre en Chine, ou à une autre occasion à Sainte-Hélène.
En 1973, Alain Peyrefitte, homme politique et écrivain français, en a fait le titre d’un livre.
Les hommes politiques sont impressionnés par le gigantisme de la Chine. On rapporte qu’une
foule de Chinois peut à la main, aplanir le sommet d’une colline. Les pays dans le monde, craignent
une hégémonie mondiale de la Chine ; or, dans la réalité, c’est plus compliqué.
1
Pour la petite histoire, les cinq autres candidats malheureux au poste de premier ministre, n’ont obtenu que 2 à
3 voix. Les internautes chinois se demandent qui est la personne courageuse qui a voté contre, pour l’élection du
président ; certains ironisent en disant que, grâce à cette voix contre, la démocratie avance en Chine.
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II. Rappels historiques :
Sur la carte ci-contre, la Chine se trouve au centre ; pour les Chinois, les voisins importants
sont la Russie et l’Amérique du Nord. La France, par
exemple, est « invisible » pour eux. Ce que les dirigeants
français peuvent leur dire sur les « droits de l’homme » n’a
finalement que peu d’importance pour eux.
C’est Deng Xiaoping qui, vers 1977, a modelé la
Chine d’aujourd’hui. Il est aussi un membre fondateur du parti
communiste chinois. Pendant la Révolution culturelle (1966 –1976),
il a été emprisonné, insulté, molesté.
En 1979, revenu au
gouvernement depuis deux
ans, il cherche avec d’autres
ministres, à faire des
réformes. On lui attribue
cette citation : « peu importe
que le chat soit noir ou gris,
pourvu qu’il attrape les
souris ».
Les dirigeants chinois vont faire une entorse aux théories de Mao et créer une économie de
marché dans quelques ports du sud-est. Suite au succès de l’expérience, celle-ci va être étendue à
d’autres régions, c’est ce qu’on appellera la « libéralisation économique ».
1989 : Une révolte étudiante, un peu soutenue au début par quelques dirigeants, se développe
entre le 15 avril et le 4 juin. A la fin, elle se termine dans le sang et restera connue sous le nom de :
« massacre de la place Tien an men ». Le gouvernement refuse la libération du pays, et renforce le
pouvoir du parti communiste.
A. Aspects économiques et sociaux :
La Chine a une économie socialiste de marché, et un système politique verrouillé.
Les cadres d’un certain niveau n’ont toujours pas, ou peu, le droit de se rendre à l’étranger.
Pour la Chine, le développement économique actuel n’est pas une émergence, mais une
renaissance ; elle veut retrouver le rayonnement qu’elle avait vers les années 1770 – 1780 où elle était
la première puissance mondiale. En ce moment, elle représente 17% du P.I.B. mondial.
Au XVIIème siècle, en France, la compagnie de Lorient débarquait des marchandises venant
de Chine. Puis, au milieu du XIXème siècle, la Chine se ferma aux influences étrangères : cela
contribua sans doute, dans un contexte d'internationalisation des échanges et de colonialisme, à son
déclin économique et technique. Pendant ce temps, l’Europe vivait sa révolution industrielle et se
développait.
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À la suite des guerres de l'opium, vers 1842, les Traités inégaux forcèrent l'empire Qing à
diviser son territoire en zones d'influence attribuées aux Huit armées étrangères alliées, ouvertes sans
conditions au commerce étranger : l'Allemagne, par exemple, dominait le Shandong, la France le
Yunnan. Une partie de son littoral sera contrôlé par des pays occidentaux qui vont y installer des
« comptoirs » ; les Chinois vont très mal le supporter.
D’après Confucius, le pays, il n’y en a qu’un : la Chine.
À partir de cette vision, les Chinois dessinent deux cercles ; dans le premier se trouvent les
pays qui doivent être vassalisés (Taiwan, Corée …) et dans le deuxième se trouvent les « barbares », le
reste du monde dont l’Europe.
Cette vision est encore très ancrée dans leur quotidien. Les Chinois se croient très supérieurs
au reste du monde, et sont très condescendants envers ce dernier.
B. L’ancienne marine chinoise :
Avant l’époque des grandes découvertes, à la fin du XIVème et début du XVème siècle, les
Chinois disposaient d’une flotte très importante. Vers 1400-1420, leurs navires étaient allés sur les
côtes arabiques, et africaines. En 1633, l’empereur fait détruire la flotte et interdit ces expéditions ;
pour les Chinois, il n’y avait rien d’intéressant à découvrir au loin. Ils avaient tout, d’après eux, sur
place.
Deux colonels de l’armée chinoise actuelle, également commissaires politiques, ont écrit un
livre sur la manière dont ils entrevoient le développement de l’armée et de la politique chinoise. On y
retrouve la position centrale de la Chine et le mépris pour les autres peuples. Confucius est
constamment cité.
III. L’état économique de la Chine :
En 2012, elle est devenue la deuxième puissance économique du monde, et la première dans
certaines productions industrielles, en association avec un ou deux autres pays.
Il existe actuellement quelques centaines de milliardaires chinois ; ils étaient deux en 2002.
Sur les trente dernières années, on assiste à la montée au premier rang des grands ports
chinois, au détriment d’Anvers, Rotterdam et Marseille.
Le Trésor chinois possède une grande masse de monnaie américaine.
Dans l’avant-port de Shangaï, sur une île, on a construit un port pour les porte containers.
L’année dernière, ce port a vu passer 15 millions de containers (contenant de l’électronique et autres
choses). Les plus grandes progressions du commerce portuaire mondial, sont chinoises avec plus de
130 % ; Canton et Quang Xu sont particulièrement distinguées.
Quelle réalité se cache derrière cette expansion ?
Il y a des quartiers modernes,
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et derrière…
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Le grand barrage des Trois Gorges
et le paysan dans son champ.
Entre 2000 et 2008, un petit cordon littoral de 200 km de large, au bord du Pacifique, a connu
12 à 13 % d’expansion, mais la réalité est très différente dès que l’on rentre dans l’intérieur des terres.
L’immense territoire chinois n’est pas concerné par cette expansion, on vit comme au XIX°
siècle ou à peu près.
Les canaux,
la Chine du nord-ouest.
La part de la population qui profite de la prospérité est estimée à 200 millions d’habitants ; le
problème du gouvernement, est de savoir que faire pour le milliard 200 millions qui reste, afin qu’il ne
se révolte pas.
D’après les spécialistes, si l’économie du pays descend au-dessous de 8% d’expansion, la
situation deviendra très grave.
C’est un pays où il n’y a pas de pension de retraite. La politique de Mao a provoqué des
massacres et des famines. La politique de natalité qui imposait un seul enfant par famille, et plutôt de
sexe masculin, a entraîné une raréfaction de la population féminine et un vieillissement de la
population en général. Le gouvernement n’impose plus aux familles de n’avoir qu’un seul enfant, et il
cherche à mettre sur pied un système de retraite qu’il pense financer par l’expansion.
Il va falloir moderniser tout le reste de la Chine, tout en continuant de contrôler la situation, et
en particulier tout mécontentement éventuel.
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Toute l’expansion de la Chine repose sur l’exportation ; donc, il faut aider les autres pays
« clients », et pallier à la baisse de la consommation dans les pays sous-développés victimes de la
crise.
Les Chinois vont aussi essayer de développer leur consommation intérieure, en injectant des
financements.
On voit donc bien que pour réaliser tout cela, la Chine a absolument besoin de 8% de
croissance.
IV. Le contexte social :
Première difficulté : sur la bande littorale développée, depuis trois à quatre ans, on assiste à
des manifestations sociales.
Les syndicats « maison » ont été débordés, et des entreprises ont dû faire des concessions non
négligeables. Le coût de la main d’œuvre a doublé. Certaines entreprises européennes sont parties et se
sont réinstallées dans d’autres pays, comme au Vietnam par exemple.
Une grosse tension se développe entre cette bande développée et le reste du pays. À l’occasion
des jeux olympiques il y a eu des déplacements de population ; on a fait appel à des Chinois de
l’intérieur pour venir participer aux travaux. Cette main d’œuvre a été intégrée, mais néanmoins, on
assiste à une montée du chômage. Des populations arrivent en flots continus (des dizaines de millions
d’hommes) vers le littoral.
Pendant les J. O., il y a eu un grand tremblement de terre en Chine intérieure ; la situation des
populations sinistrées a suscité un profond mécontentement face à l’opulence des J. O.
Le débat de l’année électorale 2012 a tourné sur ces problèmes, ces enjeux : prise en charge
des retraites, adaptation à la mondialisation.
Toute personne ayant une responsabilité en Chine est obligatoirement inscrite au parti
communiste chinois. C’est le cas en particulier pour les cadres des entreprises et de l’armée.
La population est ainsi contrôlée.
Il y trois fonctions clé, à la tête de l’État ;
Président
1er Ministre
Chef de l’armée
Deng Xiaoping avait cumulé les fonctions de Président et de chef des armées.
Xi Jinping va très prochainement prendre ses fonctions.
Neuf
personnes
dirigent
véritablement la Chine ;
au-dessous du président, il y a
Li Keqiang, le chef du gouvernement.
Ils sont assistés par sept autres
personnes, dont cinq sont d’anciens cadres du parti, déjà en fonction sous
Mao. Tous âgés de plus de 85 ans, on peut, de leur part, s’attendre à un certain
conservatisme
Les observateurs pensent que dans les cinq ans, il pourrait y avoir des changements, mais d’ici
là, c’est la ligne conservatrice qui va se poursuivre.
Le gouvernement semble hésiter entre deux politiques :
Des personnes dont fait partie Xi Jinping, souhaitent maintenir les orientations
actuelles et continuer à faire reposer l’expansion sur l’exportation par tous les
moyens,
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D’autres penchent pour une expansion plus modérée et mettre tous les efforts au
service du développement intérieur.
Bo Xilai a été membre du comité central du parti communiste chinois,
et en 2002 il est devenu ministre du commerce de la République Populaire de
Chine. C’est un Chinois « de l’intérieur » qui prône un retour à la révolution
culturelle. Il a lutté contre le crime organisé, pour le rétablissement des
programmes sociaux égalitaires pour la classe ouvrière de la ville. Il est
devenu le champion de la nouvelle gauche chinoise déçue par les réformes du
marché économique du pays et par l'écart de richesse croissant.
En 2012, il se positionne pour entrer dans le collège des neuf. Or pendant ces dernières
élections, il a connu des déboires ; il est déchu de ses fonctions à la suite du scandale autour de sa
femme Gu Kailai, accusée du meurtre par empoisonnement d'un consultant britannique, Neil
Heywood, en novembre 2011.
Sa rapide ascension jusqu’au poste de ministre montre que la voie qu’il représentait était très
forte au sein du parti communiste, et qu’il a fallu employer des méthodes décisives pour l’éliminer.
V. Les choix de gouvernement :
Quelles voies vont choisir les dirigeants pour contenir l’explosion sociale ?
On cherche à favoriser un certain développement de la Chine, comme par exemple
la construction du barrage des Trois Gorges qui va permettre à certaines villes
d’être approvisionnées par bateaux. Mais d’autres opérations connaissent peu de
succès ; pour moderniser, on a arasé des montagnes, détruit des villages, mais en
prenant bien soin de regrouper les populations dans des cités modernes, où il est
plus facile de les contrôler.
Et parallèlement, on assiste à une militarisation de la Chine. Actuellement la
Chine construit trois porte-avions, dont le
Shi Lang ci-contre. Elle participe à des
manœuvres en partenariat avec la Russie
en Mer de Chine.
Les Chinois ont des prétentions sur certaines zones
maritimes où le fond de la mer recèle du pétrole, des métaux
précieux recherchés dans l’industrie.
Cela explique l’effort de militarisation et les récentes
manœuvres.
Or ces zones sont aussi revendiquées par le Vietnam,
les Philippines, le Japon, etc.
Dans son discours d’investiture, le président a parlé
d’une grande renaissance de la nation chinoise, du
patriotisme, des réformes à faire, de la recherche
d’innovations. Il a souhaité une armée forte pour contrôler les mers convoitées.
Les nouveaux dirigeants cherchent à donner des signes de libéralisation, sans rien céder de
leur autorité.
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Doit-on supprimer les centres de rééducation ? (actuellement près de 100 000 personnes y sont
enfermées) ?
Doit-on instaurer la propriété privée ?
Lorsqu’on déplace des populations, actuellement, il n’y a aucune entrave juridique ; doit-on
modifier cela, pour atténuer les protestations des habitants ?
Que faire de la pollution qui entraîne de nombreuses maladies et des malformations chez les
enfants ? (à Pékin et dans d’autres grandes villes).
Ce sont toutes ces questions qui en ce moment animent les débats politiques.
VI. Conclusion :
On se trouve, d’un point de vue économique à un endroit très important. Mais il y a des
fragilités politiques et économiques.
Pour alimenter l’expansion, il faut que l’Occident consomme ; or si dans ces pays on
développe des politiques de ré-industrialisation, c’est mal parti.
Jusqu’à quand 200 millions de Chinois pèseront plus que 1 milliard 200 000 habitants ?
Va t-on continuer à entretenir des écarts entre la bande littorale et la Chine intérieure ?
Au niveau international, quelles vont être les orientations des dirigeants dans les années à
venir ?
Fuite en avant, expansion vers son « pré carré », vers des zones riches en
minerai ?…
Ou va t-on seulement renforcer la marine ?
La Chine pratique une politique de partenariat qui lui permet d’acquérir des biens : avec l’Iran
pour le gaz et le pétrole, avec l’Afrique pour acheter des terres, y installer des entreprises pétrolières
chinoises, sous une forme de colonialisme déguisé.
Il y a aussi la question du jeu monétaire avec les États Unis. Il y a beaucoup d’avoirs
américains en Chine ce qui lui donne beaucoup de pouvoir. Les Chinois vont-ils s’en servir pour
écrouler l’économie américaine, ou négocier des avantages importants ?
Actuellement, les Américains repositionnent leur marine et leurs bases, en les rapprochant de
la Chine (positions en Mer de Chine en particulier).
L’économie chinoise est fragile et ne concerne qu’une petite partie de la Chine côtière : va telle menacer ses voisins avec sa marine ?
Il existe d’autre part une diaspora chinoise ; des industries, des populations sont installées un
peu partout dans les pays développés et en France en particulier. Il existe ainsi un institut Confucius à
Rennes, qui a pour mission de faire connaître la Chine à l’étranger. Cette diaspora joue un rôle très
important.
Dans les années 60, deux guerres ont opposé l’Inde et la Chine, à propos de contestations
territoriales (le Tibet avec le Dalaï Lama en particulier), mais ce n’est pas un objectif essentiel.
Les Chinois regardent plutôt au sud, et cherchent à contrôler les voies d’accès au pétrole et à
d’autres ressources.
L’Inde est aussi un peuple ancien, mais c’est une démocratie. Il n’existe pas de concurrence
entre ces deux pays, car l’Inde n’est pas un pays que les Chinois veulent vassaliser, contrairement par
exemple au Japon.
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