PRÉDICTION DE LA PERFORMANCE EN COURSE A PIED A

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PRÉDICTION DE LA PERFORMANCE EN COURSE A PIED A
MERCIER D. et LEGER L., Département d'éducation physique, Université de
Montréal, CP 6128, Succ. A, Montréal, Québec, Canada, H3C 3J7
PRÉDICTION DE LA PERFORMANCE
EN COURSE A PIED A PARTIR DE
LA PUISSANCE AÉROBIE MAXIMALE
Effet de la distance, du sexe et de la spécialité
INTRODUCTION
Parmi les déterminants de la performance en course à pied, le VO2 max est sans
doute le plus étudié. Déjà en 1937, Robinson et al. notent la grande différence entre
le VO2 max du recordman du monde du 2 miles et celui de personnes sédentaires.
Costill, Thomason et Roberts (1973) obtiennent une corrélation de 0,91 entre le
VO2max et le temps au 10 miles. Ces résultats sont par la suite confirmés par
plusieurs chercheurs. Cependant Conley et Krahenbuhl (1980) n'obtiennent qu'une
corrélation de 0,12 entre le VO2 max et la performance au 10,000 m avec un groupe
de coureurs très homogène. Par contre, lorsqu'ils utilisèrent l'efficacité de la foulée
comme variable indépendante le pouvoir de prédiction variait de 0,79 à 0,83
dépendant de la vitesse utilisée. Tous les bons coureurs ont un VO2 max élevé mais
celui-ci n'est pas suffisant pour prédire exactement la performance en course à
pied.
Suite à ces constatations, il est apparu important de vérifier si le test de piste de
l'Université de Montréal (TPUM, Léger et Boucher, 1980 et Léger et Mercier, 1983),
un test simple et accessible aux entraîneurs et où la vitesse augmente
progressivement de 1 km/h à toutes les deux minutes et dont le résultat dépend tant
du VO2 max que de l'efficacité de la foulée, pouvait mieux prédire la performance
que chacun des deux facteurs pris isolément. Comme l'homogénéité des sujets
étudiés et la distance de course semblaient, de par les études citées
antérieurement, affecter la prédiction de la performance, des équations de
régression permettant de prédire la performance à partir du TPUM furent établies en
tenant compte de la distance de course (0,2 à 42,2 km), du sexe et de la spécialité
de l'athlète.
Est considéré comme spécialiste celui dont la performance est réalisée sur une
distance pour laquelle il s'entraîne spécifiquement. Les sujets recrutés étant de
niveau régional, provincial ou national, les résultats de cette étude, surtout sous ses
aspects quantitatifs, se limiteront donc à cette population. D'autre part cette étude
est unique en raison du nombre imposant d'observations (n = 521) et de la gamme
des distances de courses couvertes.
MÉTHODOLOGIE
Sujet et schéma expérimental :
Les données de cette étude proviennent de 311 coureurs (60 femmes et 251
hommes) ayant réalisé 521 performances sur des distances variant de 200 m à 42,
195 km dans les trois semaines précédant ou suivant un test indirect mesurant leur
puissance aérobie maximale (PAM ou VO2 max). Ces données ont été utilisées pour
établir des équations de régression entre la PAM et la performance en course à
pied et ce en fonction du sexe, du statut de spécialité et la distance de course. Le
même coureur est tantôt classé spécialiste et tantôt non-spécialiste si. la
performance enregistrée est obtenue sur une distance pour laquelle il s'entraîne ou
non respectivement. Les caractéristiques des sujets (effectifs, âge, poids, taille,
PAM, niveau de performance sont présentées au tableau 1.
Tableau 1 : Caractéristiques physiques et performances des sujets (*)
Détermination de la PAM :
Le test utilisé pour déterminer la PAM, le test de piste de l'Université de Montréal
(TPUM), est un test de piste progressif et maximal : la PAM est prédite à partir de la
vitesse maximale atteinte en course (r = 0,96, Syx = 5 %, Léger et Boucher, 1980).
La vitesse de départ est de 7 km/h et est augmentée de 1 km/h (ou 1 met) à chaque
2 minutes : les sujets ajustent leur vitesse en passant aux bornes disposées à tous
les 50 m sur la piste en même temps qu'ils entendent les signaux sonores
enregistrés sur une cassette. Le résultat au TPUM correspond au dernier palier
annoncé sur la bande avant l'épuisement (i.e. quand le coureur ne peut plus suivre
le rythme imposé). De plus, puisque le coût énergétique de la course à pied sur le
plat par temps calme est directement proportionnel à la vitesse de course et lorsque
les variables sont exprimées dans les bonnes unités (Léger et Mercier, 1983), il s'en
suit que :
PAM, met = VITESSE, km/h. (1)
Ainsi, le résultat du test peut être une vitesse aérobie maximale en course à pied
(VAM) en km/h ou une puissance aérobie maximale (PAM ou VO2max en met, 1
met = 3,5 ml O2/ kg.min).
Unité de performance
Pour comparer les performances réalisées sur des distances variant de 200 m à
42,195 km, les temps de performance ont été convertis en points au moyen de la
table de cotation de Gardner et Purdy (1970). Cette table accorde un même nombre
de points aux performances de même valeur. Par exemple, un 200 m en 23,6 s, un
3 000 m en 9'25,3 et un marathon (42,195 km) en 2h 41' 02 valent tous trois 700
points. Sur cette table, plus la performance est de niveau élevé, plus elle vaut de
points. C'est ainsi que les records du monde masculins valent entre 1 050 et 1 080
points. La table de cotation de Gardner et Purdy est décrite au moyen des
équations suivantes où Y, le nombre de points mérités, varie en fonction de X, la
performance de course en km/h (vitesse moyenne) :
Distance, km Régression : POINTS = f
(vitesse moyenne, km/h)
0.2
y = -1228.821 + 63.146 x
0.4
y = -1037.814 + 64.426 x
0.6
y = -939,127 + 67.221 x
0.8
y = -895.893 + 69.033 x
1.0
y = -863.971 + 70.553 x
1.5
y = -821.917 + 73.182 x
1.61 (Mile) y = -816.172 + 73.684 x
2
y = -796.402 + 74. 797 x
3
y = -772.237 + 77.053 x
5
y = -750.405 + 79.126 x
10
y = -726.833 + 81.746 x
15
y = -713.745 + 83.383 x
20
y = -704.762 + 84.542 x
30
y = -692.713 + 86.215 x
42.2
(Marathon) y = -682.012 + 87.907 x
(2)
(3)
(4)
(5)
(6)
(7)
(8)
(9)
(10)
(11)
(12)
(13)
(14)
(15)
(16)
Techniques de régression
La prédiction de performance à partir de la PAM fut déterminée au moyen des
techniques de régression simples. Cependant, ces techniques supposent que l'une
des deux variables (x) mises en cause est indépendante (i.e. sans erreur) et l'autre
dépendante (y). La régression obtenue minimise donc les moindres carrés dans
l'axe des y. En traitant x comme variable dépendante, la régression obtenue est
alors différente, particulièrement lorsque la corrélation s'éloigne de 1,00. Comme
aucune des variables étudiées, la performance et la PAM, ne peut être considérée
comme variable dépendante ou indépendante et comme il est utile d'obtenir des
régressions valides dans les deux sens, les régressions de cette étude furent
obtenues en prenant la bissectrice des régressions obtenues en considérant
successivement x et y comme variable dépendante.
Groupe de distances
On peut émettre l'hypothèse que la PAM, comme prédicteur de la performance, n'a
pas la même importance pour toutes les distances de course. Pour vérifier cette
hypothèse, six groupes de distances furent constitués :
1. 200 m à 400 m
2. 600 m à 1000 m
3. 1500 m à 2000 m
4. 3000 m à 5000 m
5. 10 km à 20 km
6. 30 km à 42,195 km
RÉSULTATS
Prédiction de la performance pour toutes les distances Le pouvoir de prédiction (r)
de la performance, exprimée en points selon la table de Gardner et Purdy, à partir
de la PAM telle que mesurée par le TPUM, pour toutes les distances et pour tous
les sujets est de 0,897 (tableau 2). Si l'étude des performances est limitée aux
distances situées entre 0,6 et 20 km, le pouvoir de prédiction du TPUM augmente à
0,926 (tableau 2).
Tableau 2 : STATISTIQUES REGRESSIVES : Comparaison entre groupes et
distances.
Prédiction de la performance selon le groupe de distances
En séparant les performances en six groupes de distances le coefficient de
corrélation augmente avec la distance jusqu'au groupe 3 000 à 5 000 m (r = 0,980)
et diminue par la suite (figure 1 et tableau 2). Le niveau de performance, exprimé en
points, pour une même PAM est semblable peu importe la distance (tableau 3). Un
tableau semblable où la performance est exprimée en temps peut être construit à
partir des équations 2 à 16, ce qui constitue un outil très utile pour prédire la
performance à partir de la PAM et vice-versa, et ce, pour diverses distances de
course (tableau 4). Exprimer l'erreur type de l'estimé en % des valeurs moyennes
sur les points et sur les mets donne des profils semblables mais inverse à celui de
la corrélation en fonction de la distance de course (figure 1).
Prédiction de la performance selon le sexe
L'analyse plus approfondie des résultats incite à présenter séparément, selon le
sexe, les équations de prédiction de performance.
En séparant les hommes et les femmes, le pouvoir de prédiction du TPUM varie de
façon légèrement différente du groupe entier en fonction de la distance (figure 2).
Les performances des hommes et des femmes pour une même PAM, sur les
distances de 0,2 à 42,2 km et de 0,6 à 20,0 km, sont semblables (figures 3a et 3b,
tableau 5). Par contre les hommes performent mieux que les femmes, pour une
même PAM, pour les épreuves variant de 200 à 2 000 m (figures 3c, 3d, 3e). Les
performances des hommes et des femmes sont semblables pour les distances allant
de 3 000 à 5 000 m figure 3f). Pour les épreuves plus longues, de 10 à 42,2 km, les
femmes performent mieux que les hommes pour une même PAM (figures 3g, 3h, 3j).
Tableau 3 : PERFORMANCE EN COURSE A PIED A PARTIR DE LA PAM AU
TPUM - Comparaison entre groupes de distances (performance en points).
Tableau 4 : PERFORMANCE EN COURSE A PIED A PARTIR DE LA PAM AU
TPUM - Comparaison entre groupes de distances (performance en temps).
Tableau 5 : STATISTIQUES REGRESSIVES : Comparaison entre hommes et
femmes.
Tableau 6 : STATISTIQUES REGRESSIVES : Comparaison entre spécialistes et
non-spécialistes.
Tableau 7 : RECORD DU MONDE EN COURSE A PIED, PAM REQUISE ET
POUVOIR DE PREDICTION DU TPUM
Figure 4 : Corrélation entre le PAM au TPUM et la performance en course à pied en
fonction des groupes de distances, comparaison entre spécialistes et nonspécialistes.
Prédiction de la performances selon la spécialité
Lorsque l'on sépare les spécialistes et les non-spécialistes, le pouvoir de prédiction
du TPUM se comporte de façon semblable au groupe entier lorsque l'on varie la
distance (figure 4 et tableau 6). Seule différence notable, le coefficient de
corrélation pour les non-spécialistes est beaucoup plus élevé pour le groupe de
distances 200 à 400 m (figure 4).
On note également qu'à PAM égale les spécialistes font de meilleures
performances que les non-spécialistes (figures 5a et 5b). Ceci est encore plus
significatif pour les distances courtes (200 à 400 m, 600 à 1 000 m) et les distances
longues (10 à 20 km) (figures 5c, 5d, 5g). Par contre pour les distances
intermédiaires (de 1 500 à 5 000 m) la différence de performance, pour une même
PAM, entre spécialistes et non-spécialistes est mineure (figures 5c, 5f). Nous
n'avions aucune information concernant la spécialité des coureurs ayant couru les
épreuves de 30 à 42,2 km.
DISCUSSION
Prédiction de la performance sur toutes les distances
La prédiction des performances de course sur joutes les distances à partir du TPUM
est caractérisée par des corrélations plus élevées (r = 0,897 de 2 000 m à 42,2 km
et r = 0,926 de Mo m à 20 km) que celles obtenues en moyenne pour le VO2 max
(r=0,603) ou tous les autres prédicteurs pris isolément (r = 0,710) tels VO2 max, la
fréquence cardiaque de repos ou sous-maximale, le test Astrand-Ryhming, le temps
limite, l'efficacité de la foulée, le seuil anaérobie, la capacité anaérobie, d'autres
performances de course, le volume d'entraînement et le pourcentage de graisse
(Mercier et Léger, 1985). Seuls quelques chercheurs utilisant le VO2 max comme
prédicteurs (Costill, Thomp. son et Roberts, 1973 ; Farell et al., 1979 et Foster,
1983) rapportèrent des corrélations aussi élevées. Cependant aucune de ces
études ne portait sur un nombre de sujets aussi grand et une gamme de distance de
course aussi étendue. D'autre part, seul le seuil anaérobie, mesure plus complexe
et controversée (Brooks, 1985, Gladden et al., 1985), donne systématiquement des
corrélations aussi élevées ou supérieures (r = 0,90 à 0,99) au TPUM (Mercier et
Léger, 1985).
Comme le TPUM mesure globalement le VO2 max et l'efficacité de la foulée, son
pouvoir de prédiction relativement élevé est attendu et même comparable à celui
observé pour la moyenne des études utilisant la régression multiple pour prédire la
performance de course (r = 0,851, Mercier et Léger, 1985).
Si la corrélation et l'erreur de l'estimé paraissent satisfaisants lorsque toute la
gamme des distances est considérée globalement, il n'en demeure pas moins que
l'exactitude des prédictions faites au moyen d'une seule régression pour toutes les
distances comprises entre 200 m et 42,2 km, ou même entre 600 m et 20 km, baisse
considérablement à mesure que l'on s’éloigne des distances moyennes (section
suivante).
Figure 5 : Performance en course à pied (Points, Gardner et Purdy) en fonction de
la PAM au TPUM (Mets), comparaison entre spécialistes et non-spécialistes pour
les distances de :
a)0,2 à 42,2 km ; b) 0,6 à 20,0 km ; c) 0,2 à 0,4 km d) 0,6 à 1,0 km e) 1,5 à 2,0 km
f) 3,0 à 5,0 km g) 10,0 à 20,0 km h) 0,2 à 2,0 km i) 3,0 à 42,2 km
Prédiction de la performance selon le groupe de distances
Le pouvoir de prédiction du TPUM augmente en fonction de la distance jusqu'au
groupe de distances 3 000 à 5 000 m (0,980) et diminue par la suite. Ceci va à
l'encontre des études de Katch et Henry (1972), Lawson et Golding (1979) qui
obtiennent des coefficients de corrélation de plus en plus élevés en fonction de la
distance. Par contre nos données sont appuyées par les résultats de Kumagai et al.
(1982) et de Berg et Keul (1984). Pollock (1977), Svendenhag et Sjôdin (1984)
obtiennent des VO2 max plus élevé chez les spécialistes de 5 000-10 000 m que
chez les spécialistes de distances plus courtes et plus longues. Les épreuves de
1500 à 1 000 m se courent autour de 100 % du VO2 max (Costill 1979), ce qui
expliquerait les PAM plus élevées de ces coureurs et le plus grand pouvoir de
prédiction du TPUM pour ces épreuves. Pour les distances plus longues,
principalement le marathon, le % du VO2 max pouvant être soutenu (i.e. endurance
ou seuil anaérobie) prend plus d'importance et diminue ainsi la contribution relative
de la PAM à la performance (Costill, 1979). Pour les distances plus courtes,
l'importance relative de la PAM diminue également car un autre facteur important
entre en ligne de compte : la capacité anaérobie (Lawson et Golding.1979,
Svendenhag et Sjödin 1984).
Il paraît donc essentiel de faire des prédictions de performances en tenant compte
de la distance de l'épreuve.
Prédiction de la performance selon le sexe
Les études antérieures sur la prédiction de performance portaient uniquement sur
des hommes. Les résultats de la présente étude indiquent toutefois des différences
marquées entre hommes et femmes.
Pour un même résultat au TPUM, les femmes performent moins bien que les
hommes dans les épreuves de 200 à 2 000 m, de façon semblable aux hommes
pour le 3 000 m et le 5 000 m, et mieux que les hommes pour les distances de 10,0
à 42,2 km (figure 3 et tableau 5). Pour les épreuves de 3 000 et 5 000 m, la
performance est prédite presque parfaitement par la PAM (r = 0,980), il est alors
peu probable qu'une autre qualité vienne jouer un rôle très important dans la
performance. Il est donc normal que pour un même résultat au TPUM femmes et
hommes aient des performances semblables pour ces épreuves.
Il n'en est pas ainsi pour les épreuves de 200 à 2000 m et plus particulièrement
pour le groupe 200 à 400 m (figure 3C) pour lequel le pouvoir de prédiction du
TPUM est très bas (tableaux 2 et 5). Pour ces épreuves, il est très plausible que
d'autres qualités, sans doute la vitesse et la capacité anaérobie «lactacide», entrent
en ligne de compte (Lawson et Golding, 1979. Svendenhag et Sjôdin, 1984).
Contrairement à ce qui se passe pour les distances de 200 à 2 000 m, les femmes,
à PAM égale, font de meilleures performances que les hommes dans les épreuves
de 10,0 km et plus (figures 3g, 3h, 3j ). De là à dire que les spécialistes féminines
de courses de fond sont plus endurantes que les spécialistes masculins, il n'y a
qu'un pas. Pourtant Thibault et al. (1984) et Mercier, Léger et Desjardins (1984)
rapportent des indices d'endurance semblables pour les spécialistes femmes et
hommes de niveau international (PAM = environ 20,5 mets femmes et 23,0 mets
hommes). Si, dans notre étude, les femmes démontrent une endurance supérieure à
celles des hommes, c'est sans doute qu'à PAM égale, les femmes sont
généralement plus entraînées et généralement plus endurantes que les hommes.
Suite à l'analyse de nos résultats nous concluons que les prédictions de
performances devraient être faites séparément selon le sexe.
Prédiction de la performance selon la spécificité
Nos résultats indiquent qu'il faut considérer la spécialité de l'athlète lorsque l'on fait
des prédictions de performance. En effet, sous différents aspects, des différences
marquées existent entre spécialistes et non-spécialistes.
Le pouvoir de prédiction du TPUM pour les épreuves de 200 à 400 m est beaucoup
plus grand pour les non-spécialistes (pour la majorité des coureurs de 1 500 m et
plus) que pour les spécialistes (figure 4 et tableau 6). Ceci s'explique : en général,
les spécialistes ont une capacité anaérobie assez élevée qui explique en grande
partie la performance sur ces épreuves, ce qui n'est pas le cas pour les nonspécialistes. D'ailleurs McKenzie, Parkhouse et Hearst (1982) et Svendenhag et
Sjödin (1984) démontrent que les spécialistes des distances courtes (200 à 1000 m)
on de meilleures capacités anaérobies que ceux des distances plus longues (1 500
m et plus).
Les spécialistes font de meilleures performances que les non-spécialistes pour une
même PAM. Cette différence est plus marquée pour les épreuves courtes (200 m à
1000 m) et pour les distances longues (10 à 20 km que pour les distances médianes
(1 500 m à 5 km).
Pour les épreuves de 1 500 à 5 000 m, la performance est prédite presque
parfaitement par la PAM (tableaux 2 et 6). Il est alors peu probable qu'une autre
qualité vienne jouer un rôle très important dans la performance. Il est donc normal
que pour un même résultat au TPUM spécialistes et non-spécialistes fassent des
performances semblables pour ces distances de course.
Figure 6 : Corrélation entre la PAM au TPUM et la performance en course à pied
(spécialistes) et PAM requise pour faire un record du monde, en fonction de la
distance.
Il n'en est pas ainsi pour les épreuves de 200 à 1000 m et plus particulièrement
pour les groupes 200 à 400 m (figure 5c) pour lequel le pouvoir de prédiction du
TPUM est plus bas (tableaux 2 et 6). Pour ces épreuves, il est très plausible que
d'autres qualités, sans doute la vitesse et la capacité anaérobie lactacide, entre en
ligne de compte (Lawson & Golding, 1979, Svendenhag & Sjödin, 1984).
Pour les épreuves de 10 à 20 km, la performance n'est pas prédite parfaitement par
la PAM (tableaux 2 et 6), il est alors très probable qu'une autre qualité vienne jouer
un rôle dans la performance supérieure aux autres coureurs. Cette affirmation est
confirmée par Costill (1973) et Svendenhag et Sjödin (1984).
Suite à l'analyse des résultats, nous concluons que les prédictions de performances
devraient être faites séparément selon la spécialité de l'athlète.
PAM requise pour faire un record du monde
Même si les records du monde se situent hors de l'étendue des données
expérimentales de cette étude, la PAM requise pour réaliser ces records fut estimée
(tableau 7).
On remarque que la PAM requise pour faire un record du monde augmente jusqu'à
3000 m et diminue par la suite. Cela est conforme à la variation du pouvoir de
prédiction du TPUM en fonction de la distance (figures 1 et 6). D'ailleurs la
corrélation entre la PAM requise pour faire un record du monde et le pouvoir de
prédiction du TPUM pour les différentes épreuves est de 0,91.
CONCLUSION
A la suite de l'analyse des résultats, nous pouvons conclure que :
1. Le TPUM est un très bon prédicteur de la performance en course à pied, pour
toutes les distances utilisées dans cette étude, parce qu'il évalue le VO2 max et
l'efficacité de la foulée de façon simultanée. Le TPUM s'avère un meilleur prédicteur
que le VO2 max ou que les autres tests évaluant la puissance aérobie maximale.
2. Le TPUM prédit mieux la performance pour les épreuves qui se courent autour de
100 % du VO2 max, c'est-à-dire pour des distances variant de 1 500 à 5 000 m, que
pour les distances plus courtes ou plus longues, où d'autres qualités importantes
influencent la performance : la vitesse et la capacité anaérobie pour les distances
plus courtes et l'endurance pour les distances plus longues.
3. Le pouvoir de prédiction du TPUM est semblable chez les hommes et les
femmes. Pour une même PAM et TPUM par contre, les femmes performent moins
bien que les hommes dans les épreuves courtes (200 à 2 000 m), aussi bien que les
hommes pour le 3 000 et le 5 000 m, et mieux que les hommes dans les épreuves
longues (10 km et plus). Pour une même PAM en effet, les hommes seraient
généralement plus rapides et posséderaient une plus grande capacité anaérobie
que les femmes ; d'autre part, les femmes seraient généralement plus endurantes
que les hommes.
4. Le pouvoir de prédiction du TPUM est similaire chez les spécialistes et nonspécialistes. Par contre les spécialistes font systématiquement de meilleures
performances que les non-spécialistes pour une même PAM. Particulièrement pour
les épreuves où le pouvoir de prédiction du TPUM est le plus bas. Cela s'explique
par le fait que les spécialistes sont généralement mieux pourvus des autres qualités
nécessaires à leur discipline (vitesse, capacité anaérobie ou endurance) que les
non-spécialistes.
5. La PAM requise pour faire un record du monde diffère selon la distance de
l'épreuve et est directement proportionnelle au pouvoir de prédiction du TPUM pour
chacune de celles-ci, c'est-à-dire maximale sur 3 000 ou 5 000 m.
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