n° 69 - Juin 2016
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n° 69 - Juin 2016
La Promotion violette Bulletin n° 69 - Juin 2016 Section de l’Isère ISERE DAUPHINE VOIRON GRENOBLE VIENNE BOURGOIN-JALLIEU LA TOUR-DU-PIN Le Bureau de la section de l’Isère Sommaire Le Bureau de la section Le carnet de la section Editorial La promotion du 1er janvier 2016 Les activités en faveur de la jeunesse : • Les palmarès des concours 2016 : Langue française / Eloquence / Arts visuels / Petit florilège Jeune Poésie et Jeune Nouvelle • Les bourses universitaires 2015-2016 La nouvelle Université Grenoble-Alpes (UGA) Les activités culturelles de la section : • L’exposition Georgia O’Keeffe au musée de Grenoble • La Journée « Saint-Nicolas » au Clos-d’Or Les temps forts au musée de Grenoble : • Secrets de Fleurs, l’Art espagnol, l’Animal • Le spectacle des rues et des chemins au musée de l’Ancien Evêché • Deux expositions en Suisse • Introduction au voyage dans Les Pouilles L’assemblée générale de la section In memoriam : Michel PIGUET, René-Guy CABANEL, Pierre JOURDAN • Petit florilège (suite dans le prochain bulletin) Info nouveaux statuts, nouveau règlement intérieur national, code de déontologie. Président-fondateur Maître Jean EYNARD † (1912-2009) Président de la section de 1963 à 1993 Présidents d’honneur Mme Marie-Thérèse MASSARD, Inspecteur d’Académie (H), Présidente de la section de 1993 à 2012 M. André CLAUSSE, Inspecteur d’Académie (H) Vice-présidents d’honneur M. Robert SALACROUP, Inspecteur principal de l’Enseignement technique (H) M. Louis FORLIN, Professeur de lycée professionnel (H) ——O—— Présidente d’honneur : Madame Dominique FIS, Inspectrice d’Académie, Directrice académique des Services de l’Education nationale de l’Isère Président : Monsieur Jean-Cyr MEURANT, Chef d’établissement du Second degré (H) 70, boulevard Franklin-Roosevelt – 38500 VOIRON Tél. 04 76 91 14 17 / Portable 06 82 91 72 36 [email protected] Secrétaire : Madame Gisèle BOUZON-DURAND Chef d’établissement du Second degré (H) La Valsereine – 1300 La Rossetière 38960 SAINT-AUPRE - Tél. 04 76 06 04 95 [email protected] Trésorier : Monsieur Jacques PRASSE, Professeur agrégé des Lettres (H) 220, chemin du Rozat – 38330 SAINT-ISMIER Tél. 04 76 52 07 78 – [email protected] Membres : Monsieur Gérard LUCIANI, Professeur émérite de l’Université Stendhal (H) Madame Dominique ABRY-DEFFAYET, Maître de conférences de l’Université Stendhal (H) Madame Nicole LAVERDURE, Professeure agrégée de mathématiques (H) Madame Josiane POURREAU, Ingénieur d’études (H) Madame Danièle ROUMIGNAC, Professeure de lycée professionnel (H) Membres associés : Madame Mireille VINOT, Professeure de lycée professionnel (H) Monsieur Gilbert COTTIN, Technicien des métiers de l’imprimerie (H) Missions particulières : Webmestre : Jacques PRASSE ; Comité des activités culturelles (sorties, voyages, musées) : Nicole LAVERDURE Josiane POURREAU Jacques PRASSE Danièle ROUMIGNAC Liaison Université Grenoble-Alpes : Dominique ABRY-DEFFAYET Bulletin : Gilbert COTTIN Ceux qui nous ont quittés Monsieur Michel PIGUET, officier de l’ordre des Palmes académiques de la promotion de juillet 1985. Monsieur René-Guy CABANEL, officier de l’ordre des Palmes académiques de la promotion de 2007. Monsieur Roger MASSOT, chevalier de l’ordre des Palmes académiques de la promotion de juillet 1980. Monsieur Pierre JOURDAN, commandeur de l’ordre des Palmes académiques de la promotion de juillet 1992. Nous renouvelons ici aux familles éprouvées l’assurance de notre sympathie attristée. Changements de section Monsieur Guy MENANT (Alpes-Maritimes) Monsieur Philippe BRUN (Suisse) Page 2 Le carnet de la section Les nouveaux adhérents et sympathisants Adhérents Monsieur Daniel SALACROUP, chef d’établissement (H), officier Madame Claudine PETIT, SAENES à la DSDEN de l’Isère, commandeur Monsieur Michel DUBOIS, professeur des universités (ex-U2 PMF), chevalier Sympathisants Déjà « Amis » de la section de longue date Monsieur Florent CAMPA Madame Colette COING Madame Anne-Marie PAOLUCCI Madame Christiane PASSARO Monsieur Gérard THOMAS Nouvelles sympathisantes Madame Christiane MURE-RAVAUD, professeure agrégée de Lettres classiques (H) Madame Annette GUICHARD-MAHINC La Promotion Violette Chers amis adhérents et sympathisants de notre section de l’AMOPA® de l’Isère, J E voudrais tout d’abord, au nom de notre Bureau, vous adresser tous nos remerciements pour la confiance que vous nous avez accordée lors de notre assemblée générale, au moment des différents votes et notamment par celui relatif à la mise en place de la nouvelle équipe pour les quatre ans à venir. Ce témoignage que vous nous avez apporté dans l’unanimité est pour nous la marque la plus gratifiante qui soit et croyez bien que nous y avons été très sensibles ; certes, faire vivre notre section est pour les membres de notre Bureau un plaisir, mais ce plaisir ne peut se concevoir sans la certitude que nous avons d’œuvrer avec votre total agrément et c’est ce qui nous soutient quand nous nous trouvons devant des difficultés, ou simplement, permettez-moi de le dire, quand la charge de travail -car c’est quand même de travail qu’il s’agit- devient un peu lourde.Le nouveau Bureau m’a fait l’honneur de me reconduire dans ma fonction de président ; j’espère pouvoir mériter cette insigne marque de confiance lors de ce nouveau mandat. C’est un honneur, mais aussi une grande responsabilité. Ce n’est pas rien en effet de représenter l’AMOPA®, ce n’est pas rien non plus de représenter l’AMOPA® de l’Isère, et c’est pour cela que j’ai besoin de vous tous pour asseoir notre crédibilité en face de nos divers interlocuteurs. Chacun sait bien que l’on reconnaît la représentativité d’une association au nombre de ses adhérents (c’est une question qui vous est invariablement posée, et j’ai pu constater maintes fois que ce qui suscite l’intérêt, après la réaction « 23.000 ? ah bon, quand même... », c’est notre nombre dans notre département). Merci donc à toutes celles et tous ceux qui renouvellent fidèlement leur adhésion ; nous enverrons comme d’habitude un, voire deux rappels aux retardataires, en leur disant (sans trop nous répéter) pourquoi nous comptons sur eux (et puis, doit-on passer sous silence que -j’ose à peine écrire cela de cette manière, mais tant pis- nous ne sommes pas vraiment une association comme les autres ? Ce n’est pas moi qui le dis en premier, ce sont nos adhérents, nos sympathisants, qui voient en nous une grande famille, par l’esprit mais aussi par le cœur) ; oui, ceux qui peuvent convaincre les hésitants de rester parmi nous ou de nous rejoindre, finalement, c’est vous, chers amis, mieux que nos rappels, mieux que ce que je peux dire dans les cérémonies. Nous avons aussi besoin de vous pour mener à bien notre mission d’utilité publique. C’était déjà le cas pour les jurys de nos divers concours ; mais vous verrez dans les pages qui suivent qu’un nouvel et important besoin se fait maintenant sentir, du fait du retentissement croissant de notre campagne de bourses auprès des étudiants de la nouvelle Université Grenoble-Alpes amenés à effectuer, pendant leur cursus de master, des stages à l’Etranger. Nous allons donc bientôt lancer un appel à nos adhérents universitaires pour nous aider à évaluer les dossiers de demande de bourse dans les différentes formations. Et bien sûr nous accueillerons avec reconnaissance, pour nos concours habituels, les contributions des uns et des autres, selon leurs compétences, leurs connaissances, leurs intérêts. Vous trouverez dans ce bulletin, comme de coutume, divers comptes rendus ; ceux consacrés à nos activités culturelles, où nous nous retrouvons de plus en plus nombreux, se voudront l’écho de rencontres marquées au double sceau du Savoir et de de l’Amitié ; les autres donneront une idée de l’ensemble de nos activités depuis la parution du précédent bulletin. Une place a été faite, pour ce qui concerne nos activités reconnues d’utilité publique (ARUP), aux lauréats de nos concours, en plus de la publication des palmarès. Bien sûr il ne fallait pas oublier ce qui concerne le fonctionnement de notre Association : vous pourrez tout à loisir consulter les nouveaux statuts, le nouveau règlement intérieur national, le code de déontologie. Enfin, vous trouverez les descriptifs de nos prochaines activités culturelles, lors desquelles nous aurons plaisir à nous retrouver ensemble, pour celles et ceux qui pourront y participer, toujours en plus grand nombre comme je l’espère. Chers amis, je vous souhaite une agréable lecture de ce bulletin et un bel été. Votre dévoué président, Jean-Cyr Meurant Les activités en faveur de la jeunesse PALMARÈS DES CONCOURS 2015-2016 DEFENSE ET ILLUSTRATION DE LA LANGUE FRANCAISE I. Option générale « Expression écrite » 15 copies ont été présélectionnées au niveau des écoles ou des établissements Le jury a décerné 4 prix et 1 accessit CLASSES DE CM1-CM2 (Thème : « La récréation ») Premier Prix Jibril HADDAD (CM1) Elève de la classe de M. CHAPELET à l’école de la Porte Saint-Laurent à Grenoble Second Prix Kahina SAKET (CM2) Elève de la classe de M. CHAPELET à l’école de la Porte Saint-Laurent à Grenoble CLASSES DE COLLÈGE Classe de 6ème (Thème : « Grandir ») Premier Prix Loan MADULI Elève de la classe de 6ème E de Mme MAILLET au collège Marcel-Bouvier aux Abrets Deuxième Prix Jessy TAILLEFER Elève de la classe de 6ème E de Mme MAILLET au collège Marcel-Bouvier aux Abrets Accessit (sujet libre) Beyza KOKNEL Elève de la classe de 6ème E de Mme MAILLET au collège Marcel-Bouvier aux Abrets pour sa Lettre à Aurore II. Option Jeune Poésie 8 copies ont été présélectionnées au niveau des établissements Le jury a décerné 2 prix et 2 accessits Classe de 5ème Prix unique Adèle BELDJELTI Elève de la classe de 5ème 1/2/3 de Mme PIANTINO DEL MOLINO au collège du Grésivaudan à Saint-Ismier pour son poème Le Chant du Loup Accessit unique Antonin MEISS Elève de la classe de 5ème 1/2/3 de Mme PIANTINO DEL MOLINO au collège Page 4 du Grésivaudan à Saint-Ismier pour son poème L’histoire d’une fois Classe de 4ème Prix unique Adèle DEVLEESCHOUWER Elève de la classe de 4ème 1/2 de Mme PIANTINO DEL MOLINO au collège du Grésivaudan à Saint-Ismier pour son poème Utopie Classe de 1ère Pas d’attribution Classe de Terminale Accessit unique Philippe IANNETTA Elève de la classe de TL de M. VERCELLINO à l’Ecole des Pupilles de l’Air pour son poème Blancheur infernale chronique III. Option Jeune Nouvelle 8 copies ont été présélectionnées au niveau des établissements Le jury a décerné 5 prix et 1 accessit Classe de 4ème Prix unique Erin MASCLET Elève de la classe de 4ème A de Mme BOZZI au collège Le Chamandier à Gières, pour sa nouvelle fantastique Maux des sens Accessit unique Julie TOURNADRE Elève de la classe de 4ème A de Mme BOZZI au collège Le Chamandier à Gières, pour sa Nouvelle fantastique Classe de 3ème Premier Prix : non attribué Second Prix et Second Prix ex-aequo Jocelyn ROZAND Elève de la classe de 3ème A de Mme DURINDEL au collège Raymond-Guelen à Pont-en-Royans pour sa nouvelle Un soir de novembre Louis BROCHIER Elève de la classe de 3ème A de Mme DURINDEL au collège Raymond-Guelen à Pont-en-Royans pour sa nouvelle Un Air connu Classe de 1ère Prix unique Manon RICO Elève de la classe de 1ère S2 de l’atelier d’écriture de Mme MATHELIN à l’Ecole des Pupilles de l’Air pour sa nouvelle Perdurer Classe de Terminale Prix unique Philippe IANNETTA Elève de la classe de TL de M. VERCELLINO à l’Ecole des Pupilles de l’Air pour sa nouvelle Pluie d’étoiles Soit au total 15 récompenses : 7 Premiers Prix ou Prix uniques 4 Seconds Prix 4 Accessits Dernière heure : 3 lauréats nationaux : Jocelyn ROZAND 1er Prix Jeune Nouvelle des classes de collège (remis en Sorbonne) Adèle BELDJELTI 1er Accessit Jeune Poésie des classes de 5ème Erin MASCLET 3ème Accessit Jeune Nouvelle des classes de collège Toutes nos félicitations aux lauréats et à leurs professeurs ! PALMARÈS DU CONCOURS D'ÉLOQUENCE 2015-2016 ***** Prix départemental d'éloquence des classes de Première et de Terminale des lycées d'enseignement général Décerné à Nathan METENIER Élève de 1ère ES au lycée Pablo-Neruda de Saint-Martin-d'Hères Summa cum laude Accessit départemental Décerné à Landry JARGOT Élève de Terminale S au lycée Élie-Cartan de La Tour-du-Pin La Promotion Violette PALMARÈS DU CONCOURS D'ARTS VISUELS (PHOTOGRAPHIE) 2015-2016 (Cycle 3 de l'école primaire) Premier Prix Troisième Prix Premier Accessit Roméo BERNA Elève de la classe de pré-apprentissage 2 de Mme SULTAN à l'Institut La Clé de Sol à Eybens Timothé PROAL Elève de la classe de pré-apprentissage 3 de Mme SULTAN à l'Institut La Clé de Sol à Eybens Oscar GOUDAL Elève de la classe de CE2 de Mme BOUVERET à l'école Jean-Rostand à La Tour-du-Pin Deuxième Prix Quatrième Prix Deuxième Accessit Maël CROS Elève de la classe de CM2 de M. ULMER à l'école de Jarcieu Nolan VIEIRA Elève de la classe de CM2 de M. CHAMBAZ à l'école Le Barlatier de Brié-etAngonnes Joseph BERHAULT Elève de la classe de CM2 de M. ULMER à l'école de Jarcieu Infos AMOPA Nationale Les projets de nouveaux statuts (21 articles), de nouveau règlement intérieur (31 articles) et le code de déontologie sont « en ligne » sur notre site départemental AMOPA38.fr Il n'est pas possible de les reproduire ici, les modifications apportées n'apparaîtraient pas). PROMOTIONS ET NOMINATIONS DU DÉCRET DU 1ER JANVIER 2016 ******* Par décret en date du 1er janvier 2016, sont respectivement promues ou nommées dans l'Ordre des Palmes académiques les personnes suivantes domiciliées dans le département de l'Isère : Université Grenoble Alpes Officier M. GROSSMANN Francis Professeur des Universités Stendhal M. LEROY FrancisAgent de maîtriseCROUS Chevalier M. BENSIMON Jacques Professeur associé UPMF Mme DELGADO LARIOS Almuneda Professeur des Universités 1ère classe Stendhal M. DUBOIS Michel Professeur des Universités UPMF Mme GINESTE Véronique Technicienne classe except. UJF Mme LAVAULT Elisabeth Professeur des Universités Stendhal M. LEVY Patrick Professeur des Universités UJF (président) M. MICHEL GillesSAENES classe except.UPMF M. MIEL Jean-Michel Ingénieur d'Etudes 2ème classe Stendhal Mme PAILLIART Isabelle Professeur des Universités classe except. Stendhal M. VAILLANT Jean-François Ingénieur de Recherche hors-classe Stendhal Rectorat Officier Mme ARGENTO Jacqueline Chevalier Mme HACCART Christine Mme JOUBERT Christine M. PAILLOTIN Jean-François Technicien classe normale Adjoint technique principal 2ème classe Adjoint technique principal 2ème classe Ingénieur de Recherche 2ème classe DASEN Chevalier Mme BORGHESE Florence M. DELAIGUE Bruno M. TOMASSINI Joël Juin 2016 Médecin conseiller technique Personnel de direction 1ère classe (Principal-adjoint) Professeur des écoles hors-cl. Page 5 Les bourses universitaires 2015-2016 ***** L ors de notre assemblée générale le 27 janvier dernier, évoquant, après le rapport 2015, les auspices prometteurs de la campagne 2016, j'ai eu le plaisir de dire que nous avions « fait un grand pas en avant ». Eh bien ce « grand pas » s'est encore allongé dans les deux semaines qui ont suivi, de manière totalement inattendue, puisque nous avons encore reçu des dossiers jusqu'au dernier moment (1). Nous avons transmis à la commission nationale 9 dossiers, avec des avis allant de « très favorable » à « sans opposition ». Pour ce qui nous concerne au niveau départemental (2), nous avons attribué 6 bourses, d'un montant de 200 à 500€ (3), aux étudiants ayant reçu un avis allant de « assez favorable » à « très favorable »(4). (1) Et même jusqu'à la dernière seconde, puisque, « grâce » à internet, des candidats m'ont fait parvenir leur candidature jusqu'au milieu de la nuit du dimanche suivant le jour officiel de la clôture, samedi 6 février ! (autres temps, autres mœurs, on a oublié » le « tampon de la poste (du samedi à 11h. en règle générale) faisant foi »… et l'on se dit que ce qui compte c'est que le dossier « arrive » avant le lundi). Considérant la date et l'heure d'envoi des e-mails, nous avons déclaré deux dossiers irrecevables (leurs auteurs n'en ont d'ailleurs pas été pénalisés, puisque leur dossier était assez « léger »). (2) Rappelons que « Paris » n'attribue dorénavant aucune bourse si la candidat n'a pas fait l'objet d'une allocation au niveau de la section. Il nous faut donc maintenant mettre en place un nouveau poste de dépense dans notre budget… et trouver les ressources pour l'alimenter, car selon les échos reçus, nous allons avoir de plus en plus de candidats (et bien sûr nous devons . maintenant faire appel à de nouveaux spécialistes pour l'évaluation des dossiers des diverses disciplines). (3) Deux dossiers, émanant d'étudiants en médecine et pharmacie, étaient particulièrement remarquables. Outre la qualité du dossier, nous avons pris en compte le niveau d'études, puisque les étudiants de licence (en L3) et de master 1 n'effectuent qu'un stage de 3 mois, alors que ceux de master 2 partent pour 6 mois) ; et naturellement nous avons tenu compte aussi des ressources des candidats et de leurs parents. (4) Il s'agit, outre les deux candidats ci-dessus mentionnés, d'étudiants des facultés de pharmacie (Université Joseph-Fourier), Droit (Université Pierre-Mendès-France), Economie (Université Pierre-Mendès-France,) de l'UFR de sciences humaines -département d'Histoire contemporaine ( Université Pierre-Mendès-France) et de l'IAE -Institut d'Administration des Entreprises(rattaché à l'UPMF -une candidate est également étudiante, avec une deuxième formation en parallèle, à l'Ecole supérieure de commerce – école de management). La commission nationale a retenu 4 de nos propositions, accordant de son côté 2 bourses de 500€ et 2 bourses de 300€ et complétant ainsi d'heureuse manière les aides que nous avons pu allouer. Je voudrais réitérer ici mes remerciements aux professeurs responsables des masters, aux directeurs des UFR et doyens, vice-doyens, aux personnes chargées de fonctions au sein des directions ou des services des relations internationales de nos trois ex-universités pour tout le précieux concours qu'ils nous ont apporté, chacun à leur niveau, pour toute leur obligeante, voire chaleureuse attention. Et je puis assurer que, si cela a été un travail plutôt conséquent, cela a été aussi un vrai plaisir de mettre en place des relations on ne Rappelons que chaque boursier s'est engagé à présenter un rapport de fin de stage (susceptible d'être publié, sauf en ce qui concerne l'un des nôtres, astreint à un devoir de confidentialité par son laboratoire). Mais chacun tient à nous tenir au courant du déroulement de son stage, sans attendre cette échéance officielle. J.C. Meurant La nouvelle Université Grenoble-Alpes (UGA) De la fusion des universités grenobloises L peut plus agréables avec nos candidats boursiers, pour qui « l'AMOPA est décidément et vraiment une association formidable », comme nous l'a écrit l'un d'entre eux et pour ne citer que celui-là. Sont donc boursiers de l'AMOPA pour cette année 2016 : Basile LE MOIGNE, étudiant de master 2 à l'ex-Université Pierre-Mendès-France, qui effectue son stage au Mexique (bourse totale 800€, 5ème rang exaequo dans la liste des 44 boursiers nationaux). Adam NOUVEAU, étudiant de master 2 à la Faculté de Pharmacie de l'ex-Université Joseph-Fourier, qui effectue son stage dans un laboratoire rattaché à l'Université nationale d'Ho-Chi-MinhVille, au Vietnam (bourse totale 800€, 5ème rang ex-aequo). Rudy HUMBERT, étudiant de master 2 de la Faculté d'Economie, qui effectue son stage (bourse totale 700€, 7ème rang ex-aequo). Soufiane SAHRAOUI, étudiant de master 1 à la Faculté de Pharmacie, qui effectue son stage aux Etats-Unis (bourse totale 700€, 7ème rang exaequo). Mikaël MAGNANO, étudiant de master 2 à la Faculté de Pharmacie, qui effectue son stage aux Etat-Unis (bourse départementale de 300€). Romy ROUZEAU, étudiante de master 1 à la Faculté de Pharmacie, qui effectue son stage aux Etat-Unis (bourse départementale de 300€). e 1 janvier 2016, les universités Stendhal, Pierre-MendèsFrance et Joseph Fourier ont fusionné pour créer un nouvel établissement : l’Université Grenoble Alpes. Cette décision a été votée par les Conseils d’administration des trois établissements au printemps 2015. Par ce vote historique, ces 3 universités grenobloises se sont engagées vers une restructuration significative ; le nouvel établissement créé ayant pour ambition de mieux répondre à l’ensemble des défis posés aux universités par le monde d’aujourd’hui et de demain, er Page 6 et d’être encore plus visible et attractif à l’international. Grâce à ses 80 laboratoires et à sa structuration en six pôles, la recherche à l’Université Grenoble Alpes gagne en interdisciplinarité pour être à la pointe de l’innovation. Son offre de formation, divisée en quatre grands domaines, couvre désormais l’ensemble des champs disciplinaires. L’université fusionnée est aujourd’hui en mesure de proposer à ses 45 000 étudiants des formations transversales et de faciliter les passerelles entre les diplômes. Université Grenoble Alpes et COMUE : quelques précisions La La Promotion Violette Communauté d’universités et d’établissements (COMUE) est la structure qui fédère les établissements d’enseignement supérieur et les organismes de recherche de l’académie de Grenoble dont le périmètre s’étend sur l’ensemble du sillon alpin, de Valence à Annecy. Dénommée « Communauté Université Grenoble Alpes », la COMUE comprend des établissements membres, qui sont l’Université Grenoble Alpes, Grenoble INP, le CNRS et l’INRIA, ainsi que des établissements associés, en l’occurrence l’Université Savoie Mont-Blanc, Sciences Po Grenoble, l’ENSAG et le CEA. La fusion des universités grenobloises s’inscrit aussi dans un cadre de coopération avec d’autres établissements de la COMUE, notamment autour du projet Idex. L’Université Grenoble Alpes en quelques chiffres : • 45 000 étudiants • 3000 enseignants et enseignants-chercheurs • 2500 personnels administratifs et techniques • 24 facultés, écoles ou instituts • 80 laboratoires • 450 millions d’euros de budget • 500 000 m² de patrimoine sur 12 sites répartis sur 6 départements (Isère, Drôme, Ardèche, Savoie, HauteSavoie et Hautes Alpes). D. Abry « L’université conserve, mémorise, intègre, ritualise un héritage culturel de savoirs, idées, valeurs ; elle le régénère en le réexaminant, l’actualisant, le transmettant […]. A ce titre, l’Université a une mission et une fonction trans-séculaires, qui, via le présent, vont du passé vers le futur ». Edgar Morin . Les activités culturelles de la section... Georgia O’Keeffe au musée de Grenoble A vertissement : l’artiste étant décédée en 1986, ses œuvres sont protégées (encore pour quarante ans) et il n’est pas possible de les reproduire ici ni sur notre site internet, même en petit format, définition minimale et noir et blanc (un comble d’absurdité, pour cette artiste qui nous dit que « la couleur est l’expression des vibrations de l’âme »...), sauf à envisager pour notre section de s’acquitter de droits d’auteur auprès de l’ADAGP, alors qu’elle a bien d’autres dépenses à faire. C’est bien sûr infiniment dommage. Espérons cependant que nos adhérents qui n’auront pas vu cette exposition trouveront quelque intérêt à lire ce qui suit et seront ainsi incités à découvrir par eux-mêmes l’univers si singulier et si fascinant de Georgia O’Keeffe. Puisse la plume suppléer modestement un peu de ce qu’aurait apporté incommensurablement l’image. Chère Georgia, Tu nous as quittés, nous qui ne te connaissions même pas, voici bientôt trente ans. Et pendant tout ce temps, personne ne nous a parlé de toi. Ne m’en veux pas si je te tutoie, je dis tu à tous ceux que j’aime, comme disait un poète de ton temps, lorsque tu avais une soixantaine d’années. Et j’ai aimé ce que j’ai vu de toi, de tes œuvres, Juin 2016 dans notre musée de Grenoble, par un bel après-midi -un des tout derniers de notre indulgente saison- avec mes amis. Tu es maintenant célèbre parmi nous, Georgia, qui habitons si loin de ta « Terre d’enchantement », ton nom est transporté et glorifié partout dans notre ville, chaque passant peut le voir sur les tramways qui circulent dans nos rues. Et pourtant… pourtant, comme nous l’a si bien expliqué notre guide -dont l’appellation de « médiateur » a trouvé là encore une fois sa pleine justification- il a fallu bien des années avant que l’on parle de toi. Cela te déçoit, toi qui as eu l’honneur du Moma de New York ? Enfin rends-toi compte ! D’abord tu n’étais que « la femme de… » ; ensuite, l’Art réaliste américain vu par nos Parisiens, tu vois peutêtre ce que je veux dire… ; enfin, enfin quoi… tu étais « une femme » (et avoue -ou n’avoue pas- que certaines de tes peintures semblent montrer que tu avais bien conscience de cette « infériorité », quand tu as commencé à changer tes couleurs, non ?). Et puis et puis… certains disent que tu étais trop américaine pour nous. Bon, tu as quand même été « exposée » en Europe en 2012, et puis tu as eu droit au musée Pompidou, non ? Ah oui, une seule œuvre, c’est vrai… Mais aujourd’hui, Georgia, grâce à un regroupement de musées (TON musée est à Santa Fe, oui, nous ne l’oublions pas), grâce à des prêts des musées de Cleveland, de Saint-Louis, de Dallas, de Virginie, de San Francisco, Madrid, Munich, entre autres, de collectionneurs particuliers, tu es avec nous (en compagnie de tes amis photographes), avec trente-cinq œuvres exposées chronologiquement dans dix salles, où l’on retrouve des thèmes qui te sont chers -ou qui en tout cas ont marqué ta vie. Tu sais, on parle souvent de « figuration », d ‘« abstraction » dans la peinture… Je sens qu’avec toi, cela ne va pas être facile de te ranger dans une catégorie. Autant te demander si tu te sentais plutôt romantique, ou plutôt symboliste. Mais nous voilà en train de te catégoriser. Si l’on parlait un peu de toi ? On dit que tu es originaire du « Middle West ». Tu parles d’un espace ! Le « Midwest » (au secours Wiki!), c’est douze Etats, pas moins. C’est « la Prairie », les grandes plaines entre les Appalaches et les Montagnes Rocheuses (bon, un peu à droite quand même sur la carte, « Mid » ou pas). Ton Etat à toi, c’est le « Ouiskonsen » -le Wisconsin-, en pleine Amérique rurale. Et c’est dans cette Prairie que tu vis le jour, à… « Sun Prairie » (ne me dis pas que c’était un signe, parce qu’alors je te parlerais de la Virginie, de New York, du Nouveau Mexique, ok?). C’était en 1887. A quinze ans, tu pars avec ta famille pour la Virginie, justement. Ce n’est pas vraiment à côté (et tu passes de la steppe à la forêt, si je ne me trompe, mais tu aimes tellement la nature...). La nature, tu vas bientôt nous la montrer de manière incroyablement proche, frappante avec tes deux cents fleurs, à tel point qu’on dira de toi que tu es un peintre floral -même Page 7 si tu défendais de « savoir peindre une fleur », te réfugiant dans le secours de la seule couleur (en admettant tout de même que tu pouvais « faire part de ton expérience de la fleur »), cette couleur qui selon toi « vaut que la vie mérite d’être vécue », qui est « l’expression des vibrations de l’âme ». Mais de ces fameuses fleurs, nous reparlerons, car il y a beaucoup à en dire... et il est prématuré d’aborder tout de suite ce sujet. Tu as été professeur, Georgia (j’espère, avec le caractère que tu avais, dit-on -un caractère hérité de ton ascendance irlandaise ? -que tu n’as pas trop fait souffrir tes jeunes élèves dans leur petit « bled » d’Amarillo, au Kansas !), alors tu sais que lorsqu’on a la prétention de présenter une œuvre, on doit commencer par la biographie de l’auteur : ainsi reprenons le fil de ta vie un instant interrompu. Nous te retrouvons donc en Virginie, où tu commences à étudier les arts (tu avais déjà reçu dans ta famille une initiation), puis à Chicago (à l’Institut d’art) et surtout à New York, à l’école des Beaux-Arts (où enseigne William Merrit Chase, peintre très engagé en faveur de l’impressionnisme et par ailleurs portraitiste célèbre, un professeur qui comptera pour toi). « Surtout » à New York : pourquoi cette insistance ? Parce que c’est là que commence vraiment ta vie d’artiste, je crois et que c’est là que, concomitamment, tu fais la connaissance de celui qui deviendra ton mari, un certain Alfred Stieglitz -et que de là commence à se répandre ta renommée. Mais qui donc est ce monsieur ? Un peintre ? Non, un photographe, et célèbre, s’il vous plaît ! Oh vous ne vous êtes pas mariés tout de suite, vous vous fréquentâtes d’abord quelque temps... Si je me souviens bien, une de tes amies avait envoyé au propriétaire d’une galerie d’art de la 5ème avenue quelques-un de tes fusains (tu avais alors 29 ans). Cette galerie résolument « avant-gardiste », la « 291 », tu la connaissais pour l’avoir visitée un jour . Stieglitz est intéressée par tes dessins, les photographie et les expose ; l’année suivante, tu as droit à une « expo solo » ! Quelques mois plus tard tu viens t’installer à New York et vous vous marierez six ans plus tard, en 1924. C’était « le grand amour », non ? (enfin je ne veux pas être indiscret, mais 350 portraits, quand même… mazette!). En quoi la rencontre avec cet homme, puis avec certains de ses amis, eut-elle une influence dans ton propre parcours artistique, chère Georgia, en quoi fut-ce, à ce moment Page 8 de ta vie, déterminant ? Parce que plusieurs d’entre eux étaient non seulement des artistes-peintres, mais aussi des « artistes en photographie », c’est bien cela ? Des artistes qui créaient, à partir des paysages que tu as aimés, des images tellement fortes qu’elles en devenaient pour ainsi dire abstraites ? Oui, si l’on en juge par ce que toi-même as pu écrire, t’adressant à l’un d’eux (Paul Strand) : « Je crois que je regarde les choses et les vois comme je pense que vous les photographieriez ». Et de fait tu utilises maintenant la technique photo dans tes compositions où prédomine entre autres le souci du cadrage ; cette « vision photographique », elle donne de la force à tes images. Dès lors, ton mari et toi allez , depuis votre résidence au Shelton Hotel, « au milieu de l’océan », célébrer le paysage urbain, les gratte-ciel -qui remplacent les arbreset « The city of ambition » (une photo de Stieglitz, que nous montre notre guide, est quasi-impressionniste). Justement, ces compositions n’ont rien de figuratif et frisent aussi l’abstraction. L’exposition que nous visitons, en hommage à ton œuvre, par le choix qui a été fait d’exposer en parallèle tes toiles et les photos de tes amis, montre bien toutes les correspondances qu’il y a entre les unes et les autres. Je crois que tu aurais aimé cette mise en évidence particulièrement parlante. Nous parlions « d’abstraction » : il est difficile, parfois, de dire ce qui prévaut dans ta peinture même à une époque donnée, car nous voyons bien que certains de tes tableaux de fleurs ne sont déjà plus « figuratifs », depuis tes débuts. On est bien loin des « natures mortes » ! (et d’ailleurs, si je ne me trompe, tu t’étais toi-même détournée de cette orientation en adoptant un nouveau style privilégiant, à côté de la couleur -toujours la fameuse couleurla ligne, la géométrie, l’ombre). Tu as toujours voulu être le peintre des sensations. Mais, Georgia, entre nous, ces fleurs…. Si l’on en parlait un peu maintenant ? Des « natures mortes », on en connaît forcément quelques-unes (et d’ailleurs notre musée de Grenoble en compte de magnifiques dans ses collections, à tel point que notre guide attitrée nous a proposé une séance consacrée exclusivement aux « secrets de [ces] fleurs », tout en nous rappelant -j’emploie ce mot parce qu’elle nous l’avait déjà dit lors d’une précédente visite- quel était le « rang » traditionnellement, académiquement accordé aux Natures mortes dans la Peinture : pas vraiment un des premiers…). Mais des fleurs comme les tiennes, des comme ça, on n’avait jamais vues ! Bon, je récapitule et j’essaie de m’y retrouver, ne voulant pas rejoindre aveuglément la cohorte masculine critique de ton époque, qui, nous dit notre guide, n’a voulu voir dans tes toiles que des représentations d’ordre sexuel, alors que ton intention, ta volonté particulièrement depuis certaines tentatives d’interprétation freudienne antérieures étaient justement de créer à partir de l’observation en grand de tes fleurs des abstractions au caractère onirique. Et effectivement, moi, je trouve que tu as su extraire du plus profond du calice de tes fleurs leur essence -visuellement parlant-, que tu es arrivée à un niveau de ta description, de ta vision, de ta représentation qui ne peut appartenir qu’au monde du rêve : j’aimerais retrouver les mots de notre guide pour décrire en quoi tes couleurs, tes dégradés, toutes ces nuances incroyables, tes lignes aussi créent devant nos yeux ces fleurs transfigurées par la magie de ton regard -et de ton art. Des fleurs ? Oui, des fleurs. Cela dit, hum… de simples abstractions ? Difficile de ne pas ressentir la sensualité qui naît de ces formes suggestives, même en oubliant la Critique qui t’accusa de déguiser (de bien déguiser, en tout cas!) ; difficile de ne pas associer sensualité et sexualité ; difficile de de ne pas rapprocher le « sexe » floral du sexe humain, féminin ou masculin, même en tenant le plus grand compte de ton intention d’artiste (et en laissant de côté Freud & Co et toutes les métaphores). Alors, chère Georgia, « Our lady of the lily », finalement que « signifie la fleur » pour toi ? Conviens qu’il y a de quoi nager en pleine ambiguïté… Même ceux qui pensent que tu voulais ne peindre que des fleurs , qui posent cela comme un principe, font état de ton subconscient ; et puis n’estce pas une femme qui dit clairement, sans parler d’ambiguïté, s’appuyant sur un tableau comme ton Iris Noir III, que tu es « le peintre de l’érotisme au féminin » ? Bon, laissons aux uns et aux autres, comme d’habitude, leur vision des choses et partons te retrouver, à la fois dans notre musée et dans ta vie. C’est bien plus important. Nous t’avons laissée à New-York, après ton mariage. Mais depuis quelques années ton amour de la nature s’était trouvé un havre sur les bords du Lake George, à tel point que La Promotion Violette c’est dans ces lieux que tu avais installé ton atelier, dans une grange devenue « My Shanty », ta petite maison dans la prairie. C’est là que nous te retrouvons pour un petit flash back très intéressant, car ce tableau, figuratif a priori, s’apparente à une représentation « abstraite » : nous oscillons d’un aspect à un autre, passant d’une représentation somme toute réaliste d’un paysage naturel à représentation tellement stylisée qu’elle en devient abstraite. Mais pour toi, la couleur est l’essentiel, c’est « une libération ». Après la blancheur immaculée de Calla Lily in Tall Glass n°2 (1923), on en voit tout l’éclat chatoyant dans ton tableau de Pétunias violets peint en 1925, dans tes flamboyants Red Cannas peints en 1927 (dont le rouge, parmi les nuances de rose et d’orange, pourrait être, nous dit notre guide, celui de l’Amour), une peinture tout-à-la-fois romantique et symboliste. Deux magnifiques tableaux, peints en 1929 et 1930, exaltent ton éloge de la couleur : le merveilleux (à mes yeux) Gris, Bleu & Noir – Cercle Rose (1929) et White Iris (1930). Rougepassion aussi sont tes Amaryllis (1937). Laissons là cependant les fleurs car, entre 1918 et 1932, tu en as peint, rappelons-nous, deux bonnes centaines, dont nous nous souviendrons toujours avec admiration. Si la peinture de fleurs est un genre à part entière, tu l’as véritablement révolutionné. A Lake George, dans le parc des monts Adirondacks, à plusieurs centaines de kilomètres de New York, tu vas observer avec bonheur le ciel, les collines, les paysages, les arbres, en communion spirituelle avec la nature (et avec Stieglitz -qui a installé sa chambre noire également dans l’ancienne grange). Mais tu vas découvrir d’autres couleurs, avec d’autres sujets que tes fleurs -et d’autres formes aussi, qui ne pouvaient que satisfaire pleinement ton inclination pour l’abstraction : en 1929, tu découvres le Nouveau Mexique, ses espaces immenses, ses ciels changeants (tu as toujours été fascinée par le ciel) et le désert, les canyons, les os blanchis par le soleil, l’omni-présence de la Mort. « Les couleurs sont différentes là-bas », as-tu écrit à propos de cette Terre d’enchantement. Et ce choc devant ces nouvelles couleurs, ces nouvelles formes va faire de toi, nous dit encore notre guide, une nouvelle femme. A partir de ces paysages épurés, abstraits, tu vas créer une œuvre fantastique et visionnaire, Juin 2016 en sublimant ta relation avec la Nature, là où les arbres, les nuages relient la terre au ciel, chez les Indiens Pueblos et Hopis. « Il n’y a pas de fleurs dans le désert, dis-tu, seulement des os blanchis par le soleil ». Tu commences à les ramasser dans la vallée du Rio Grande, tu les collectionnes, notamment les os pelviens, en raison de leur forme, qui te permet de regarder le paysage à travers leur cavité ; plus tard tu les peindras. En attendant, ils sont pour toi l’équivalent de sculptures. Ce seront tes « trophées ». Je n’oublie pas les arbres : je pense à un certain Cotonnier au printemps, où l’on sent le souffle du vent ; il est clair que, à l’instar de la fleur, tu entretiens avec eux une relation toute particulière, tout comme ton mari et toi êtes fascinés par les nuages, par les effets du vent. Durant ces années, tes amis photographes continuent de t’influencer : après Paul Strand, qui t’a convertie voici bien des années à la photo moderne, « moderniste » (dont la nouvelle esthétique veut des plans resserrés, de la netteté dans l’ambition d’une « photographie pure », la Straight Photography), Paul Strand à qui tu disais « Vous autres, les photographes, m’avez fait voir ou plutôt sentir des couleurs nouvelles », tu te lies avec Ansel Adams, qui vous rend visite à votre « Ghost Ranch » en 1937. Ce dernier a fondé, avec quelques amis, le « Groupe f/64 » : pourquoi cette appellation ? f/64, comme le savent les photographes, est l’une des plus petites ouvertures de diaphragme possibles (en l’occurrence c’était la fermeture maximale des objectifs équipant les chambres de ces photographes), une de celles qui permettent la plus grande netteté -mises à part certaines distorsions inhérentes à l’objectif-, en tout cas la plus grande profondeur de champ (« Priorité au diaph », comme on dit de nos jours -mais une ouverture à f/64, on ne la trouve que sur une chambre) ; pour ces photographes qui refusent par principe toute manipulation, qui travaillent avec des chambres, de surcroît, de grand format, l’absolue fidélité au modèle est le credo ultime (aucune retouche possible, ni à la prise de vues, ni après : que penseriez-vous de « Photoshop », Georgia?…). La parenté entre la vision photographique d’Ansel Adams et ta vision de peintre est bien réelle. Les couleurs, tes couleurs sont toujours là : légères, nuancées et fondues, ou vives, profondes et contrastées, dans tes Falaises rouges et jaunes, ou dans tes Purple Hills, ces collines violemment violettes… Dans ce pays aride, peuplé d’ossements et habité par le Grand Esprit, où tu sens peut-être passer dans le souffle du vent l’âme des Anciennes Tribus (je me souviens d’avoir vu ton Idol’s Head et tes katsina tithu, les poupées Kachina Hopi), tu te sentiras si bien que tu t’y installeras définitivement. Des années plus tard, on retrouvera dans un tableau comme Canyon country, représentation hautement épurée, ta propension à ne retenir que la forme et les couleurs essentielles, la permanence et la continuité de ton inclination vers l’abstraction puissamment évocatrice. Mais les années passent, justement. As-tu épuisé tous les sujets visibles de cette Terre ? A soixante-six ans, tu te mets à voyager ; tu parcours le monde, tu en fais le tour en avion. Et, de làhaut, admirant de nouveaux nuages, tu vas découvrir de nouveaux paysages, retrouvant dans les méandres des rivières les lignes courbes que tu aimes. Et que de couleurs, aussi ! et le ciel. Ce ciel qui est l’emblème du pays des grands espaces dans la peinture américaine, a-t-on pu dire ; toi pour qui c’était « primordial de sentir l’Amérique, de vivre l’Amérique, d’aimer l’Amérique », tu écriras aussi : « J’aime les plaines plus que jamais -et le CIEL ». Ton inspiration est donc loin de s’éteindre. Elle s’éteindra avec toi, voici maintenant trente ans. L’année suivante, en 1987, la National Gallery de Washington célébrera ton centenaire, dans l’apothéose glorieuse d’une artiste devenue célèbre et honorée. A l’époque pas encore chez nous, maintenant, si. Je n’arrive pas à me rappeler où j’ai lu ces mots à ton propos, à propos de ton œuvre : « Une sorte de sainteté sublimée de perfection limpide ». Oui, c’est bien cela, pas besoin de commentaires abscons. C’est limpide. J.C. Meurant PS : concernant l’absence d’illustrations, je me fais l’effet d’un candidat à un examen qui rédigerait sa copie sans jamais aucune citation pour appuyer ses dires. Mais cette regrettable carence n’est peut-être pas grave, puisque j’ai choisi de m’adresser à Georgia ellemême, et qu’elle connaît ses peintures mieux que personne ? Quant à vous, amis lecteurs, si votre curiosité est éveillée, vous savez ce qu’il vous reste à faire... Page 9 Conférence de M. Delannoy, « La caverne du Pont d’Arc » L ors de notre journée au Clos d’Or en décembre 2015, M. Jean Jacques Delannoy, géomorphologue, enseignant chercheur à l’Université Savoie Mont Blanc et directeur du laboratoire EDYTEM (Environnement, Dynamique, Territoires de Montagne) a eu la gentillesse de libérer un créneau dans son emploi du temps bien chargé pour venir nous présenter la Grotte Chauvet. Il a su à merveille transmettre sa passion pour ce lieu qu’il étudie depuis de nombreuses années. Grâce à lui, nous avons fait un magnifique voyage dans le temps. Les œuvres de la Grotte Chauvet sont les plus anciennes peintures rupestres connues à ce jour. En effet, la grotte commence à être fréquentée par les hommes, les Aurignaciens, environ 37 000 ans avant JC. Sous un climat très froid, la région abrite une faune très riche avec notamment des rhinocéros, ours des cavernes, bisons, panthères, mammouths, loups… Les premières peintures réalisées sur les parois datent de 36 000 ans avant JC environ alors que l’homme de Cro-Magnon peint dans la Grotte de Lascaux environ 18 000 ans avant JC. Un nombre impressionnant d’animaux représentés (plus de 400), les techniques mises en œuvre, les conventions utilisées concourent à créer une émotion. La grotte semble vivante ; le relief s’en mêle aussi, des draperies fines comme de la soie, des aiguilles transparentes captent la lumière. La conservation remarquable des œuvres pariétales et des vestiges au sol est due au comblement de l’entrée (environ 21 500 ans avant JC) suite à un effondrement de la corniche calcaire. Le rouge de l’hématite est la couleur qui domine l’art pariétal des premières salles; au fond, ce sont les gravures et les dessins noirs qui prennent le pas. Cette partition renforce le caractère exceptionnel de la grotte. L’entrée d’origine menait directement à la salle des Bauges; ces très nombreuses bauges, sortes de nids creusés, témoignent de l’occupation récurrente des ours des cavernes pour hiberner et mettre bas. Les Salles Rouges comportent un ensemble pariétal varié dans lequel on retrouve la gravure, la peinture, le dessin. Toutes ces figurations sont peintes en rouge sauf une tête de félin en noir et deux petites têtes de chevaux jaunes. On retrouve, entre des productions de Page 10 tailles diverses, des graphismes abstraits appelés « signes » car on leur prête une valeur symbolique. La salle Brunel, elle, est caractérisée par une abondance de panneaux ornés de points ; sur l’un de ces panneaux sont juxtaposés près de cinq cents points-paumes à l’ocre rouge. Après les Salles Rouges, on pénètre dans la Grotte Noire. Une fresque monumentale qui se déroule sur plus de neuf mètres et atteint parfois trois mètres de haut orne la Salle Hillaire. Cet ensemble est spectaculaire tant par la densité et la diversité des animaux que par la vie qui les anime. Le raclage des parois avant les dessins au charbon crée un fond éclatant et l’on imagine les aurochs, chevaux, rhinocéros surgissant de la roche. La Salle du Crâne est remarquable par sa mise en scène : un espace circulaire entouré de banquettes d’argile grise qui ressemblent à des gradins et au centre, un monolithe aux arêtes vives sur lequel est déposé un crâne d’ours. Le sol recèle de nombreuses empreintes d’ours mais aussi de loups et des ossements, majoritairement des crânes d’ours. Certains sont regroupés d’une manière qui ne paraît pas entièrement naturelle. Ici se posent les questions sur la nature et les motivations des manipulations des ossements d’ours. La Galerie des Mégacéros, passage obligé sur une trentaine de mètres de long conduit à la Salle du Fond. Des mouchages de torche tous situés à environ un mètre du sol sont visibles de façon régulière, le plus souvent en vis-à-vis. Comme son nom le suggère, la décoration pariétale est marquée par la figure du cerf mégacéros mais aussi par de nombreuses autres représentations qui, par leur qualité, préparent le visiteur au choc émotionnel que lui réserve la salle terminale. La Salle du Fond est un foisonnement de représentations animales et symboliques. Cette salle a un côté délibérément spectaculaire. La superposition d’images est utilisée pour générer l’illusion du mouvement. Le Grand Panneau, élément majeur dont la mise en scène impressionne, a été soigneusement construit, symétrique par rapport à la niche centrale, chaque volet latéral représentant deux parties déterminées par des reliefs de la paroi avec des sujets distincts. Sur le panneau ont d’abord été peints en rouge cinq félins et une série de grosses ponctuations épousant la concavité de la paroi. Ces images rouges sont surchargées par quatre lions et un renne à six pattes peints en noir. Ensuite, viennent les rhinocéros, dix-sept au total de tailles et de techniques comparables. La mise en perspective décroissante des cornes pour les rhinocéros du haut et leurs lignes de dos superposées donnent une idée de mouvement. Un cheval noir dessiné au fond de la paroi de la niche centrale, son arrièretrain étant masqué par le relief donne l’impression d’un animal sortant des profondeurs de la roche. Le côté droit du panneau peut se scinder en deux parties avec des bisons à gauche et des lions à droite ceux-ci chassant ceux-là. Au pied de la paroi, on découvre un petit tas de charbon, réserve probable de matériau pour le dessin. La construction symétrique du Grand Panneau, la répétition constante des conventions pour représenter les animaux plaide en faveur d’une unité des figures noires. Même si une phase rouge antérieure à la noire a été mise en évidence sur la gauche du Grand Panneau, l’impression générale n’est pas celle d’apports multiples échelonnés mais d’une réalisation pendant un temps relativement court. Rien n’est plus pareil dans l’histoire de l’art depuis la découverte de la Grotte Chauvet. Pendant un siècle, les scientifiques estimaient que l’art avait évolué de manière linéaire : de ses balbutiements au début de l’Aurignacien (37 000 ans avant JC) à sa pleine expression au Solutréen dans la Grotte de Lascaux vers 18 000 avant JC. Les œuvres très abouties de la Grotte Chauvet viennent bouleverser cette théorie. Officiellement reconnue par l’UNESCO, la Grotte Chauvet figure désormais sur la liste du patrimoine mondial. Surveillée comme un joyau planétaire, cette cavité fait l’objet d’exceptionnelles mesures de conservation. Pour la montrer au grand public, il fallait la cloner ! Un comité scientifique international a délégué trois membres de l’équipe de recherche de la grotte, dont M. Delannoy, pour assurer le suivi scientifique de la Caverne du Pont d’Arc, réplique de la Grotte Chauvet. En avril 2015, la Caverne du Pont d’Arc ouvrait ses portes aux visiteurs : une véritable prouesse technologique et technique mais aussi le résultat de beaucoup de patience, de minutie et de savoir-faire d’hommes et de femmes, dignes héritiers des chasseurs-cueilleurs aurignaciens. Nicole Laverdure La Promotion Violette Les Temps forts de la collection du musée de Grenoble C'est avec plaisir qu'un groupe d'une vingtaine d'Amopaliens a suivi le nouveau cycle de six conférences thématiques proposé par Madame Corinne PINCHON, historienne de l'art et conférencière. Secrets de Fleurs L a visite commence par la belle nature morte d'Osias BEERT (15801624) : « Fleurs, fruits, vases et autres objets ». Ce peintre flamand né près d'Anvers est considéré comme l'un des plus remarquables maîtres de nature morte du 17ème siècle. C'est l'époque où la tulipe est l'objet d'une « tulipomania » dans les Provinces-Unies ; c'était aussi le moyen d'avoir chez soi toute l'année de luxueux bouquets. La partie droite du tableau réunit les symboles de l'Eucharistie, suscitant une réflexion sur les valeurs de l'existence. Le tableau de Philippe DE CHAMPAIGNE (1602-1674) « Louis XIV au lendemain de son sacre reçoit le serment de son frère Monsieur, duc d'Anjou, comme chevalier de l'ordre du Saint Esprit » nous permet d'étudier la symbolique de la fleur de lys, qui représente la pureté et fut choisie par les Capétiens comme fleur royale (on note que les membres de cet ordre portaient un cordon bleu : en fins gourmets, ils terminaient leurs réunions par des banquets renommés, d'où l'expression « cordon bleu » pour désigner un(e) fin(e) cuisinier(e) ! ). Nous voici au 18ème siècle devant le tableau de François DESPORTES (16611743), « Animaux, fleurs et fruits » .Cette toile est une allégorie des cinq sens, les fleurs pour le plaisir de l'œil et l'odorat, et des quatre éléments, les fleurs représentant la terre. Le tableau de Joseph-Marie VIEN (1716-1805), « L'Enlèvement de Proserpine » nous donne à voir, dans un décor de fleurs éparses, une scène bucolique de la mythologie, très en vogue au 18ème siècle . Nous voici dans les salles des œuvres du 19ème siècle. Impossible bien sûr de ne pas s'arrêter devant le tableau de François Gérard dit Baron GERARD (1770-1837) intitulé « Flore caressée par Zéphir » présentant une jeune femme au visage extatique, vêtue d'un voile transparent et nimbée de fleurs . Seuls les personnages de la mythologie permettaient de représenter des scènes à connotation érotique. Un arrêt s'impose aussi devant le très Juin 2016 joli petit tableau (33 x 30 cm) « Nature morte dite de fiançailles » exécuté par Henri FANTIN-LATOUR (1836-1904), peintre originaire de Grenoble, afin d'être offert en cadeau de fiançailles à Victoria Dubourg, sa future épouse. C'est une belle composition très équilibrée où chaque objet est judicieusement choisi ; les jonquilles symbolisant la fidélité, les cerises, le désir, le rouge du vin faisant pendant à celui des cerises, le blanc du camélia à celui de la coupe en porcelaine. Encore une nature morte, mais de grandes dimensions (130 x 97 cm), il s'agit du beau tableau « Fleurs » de ce peintre disparu trop jeune qu'était Frédéric BAZILLE (1841-1870) et représentant un énorme bouquet d'héliotropes, de dahlias et d'amarantes dans un vase posé sur une console sur laquelle des dahlias sont épars . La lumière venant de droite en fait vibrer les textures et les couleurs. L'impressionnisme est illustré par le tableau de Claude MONET (1840-1926) « Coin de l'étang à Giverny ». La toile est entièrement remplie par une végétation luxuriante où dominent le vert et le bleu, les coups de pinceaux remplacent les touches délicates des siècles précédents. L'idée de la fleur est plus importante que la représentation de la fleur. Ce tableau a été donné au musée de Grenoble en 1923 par Monet lui-même afin « d'encourager ce musée dans ses tendances modernes ». En quelques pas nous arrivons dans les salles du 20ème siècle et, à tout seigneur tout honneur, voici le fleuron de la collection d'art moderne du musée, le tableau d'Henri MATISSE (1869-1954) « Intérieur aux aubergines » : cette toile donne l'impression d'un foisonnement de couleurs alors que le peintre n'en utilisé que six environ , il n'y a aucune notion de perspective (on croit voir tomber les aubergines), l'espace est modelé par l'utilisation de la couleur. Et nous terminons cette visite par un tableau du peintre américain Tom WESSELMANN (1931-2004), « Bedroom painting N°31 ». Dans le style schématisé des affiches publicitaires, un visage de femme en très gros plan voisine avec des objets de la vie quotidienne dont une rose très sexuée . L’Art espagnol L ’art espagnol est présent dans les collections du musée de Grenoble grâce à des œuvres couvrant essentiellement le 17ème et le 20ème siècle, que l’on peut considérer comme deux des plus grands moments de la création artistique espagnole. Le 17ème siècle est considéré comme le siècle d’or. Il est pour nous l’occasion de s’arrêter devant quelques toiles signées de grands maîtres ainsi : JOSE DE RIBERA (1591-1652) : « Le martyre de saint Barthélémy », grande toile de 180 x 115 cm. Formé en Espagne, ce peintre s’installe en Italie et fait partie de l’école caravagesque. Ce tableau représente Barthélémy, martyr des premiers temps de l’Eglise attendant de subir son supplice. On retrouve dans ce tableau l’influence du Caravage dans le clair-obscur ; le réalisme du corps d’un vieil homme en gros plan dont la posture en croix, en particulier la tension du bras droit, le regard trahissant à la fois l’espoir et l’inquiétude, suscitent une grande proximité et par là-même une grande émotion chez le spectateur. JUAN DE VALDES LEAL (1622-1690) : « Portrait de Frère Alonso de Ocana ». Cet artiste espagnol à la fois peintre, sculpteur et orfèvre, proche de Zurbaran et Vélasquez, travaille à Séville, grand centre de création de l’art espagnol au 17ème siècle. Ce tableau est une commande d’un monastère et représente Frère Alonso, moine très humble qui avait pour fonction de s’occuper du bétail, puis de préparer la célébration des messes, donc représenté ici tenant des cierges ou des burettes. A ses pieds une lance brisée rappelle que dans sa jeunesse une lance envoyée par un adversaire se brisa sans l’atteindre. Ce tableau fit partie de la collection de Louis-Philippe, collection qui fut dispersée lors d’une vente à Londres. Il fut acheté en 1901 par le général de Beylié qui en fit don à la ville de Grenoble avec les quatre tableaux de Zurbaran . Page 11 FRANCISCO DE ZURBARAN (15981666) : « L’Annonciation », « L’Adoration des bergers », « L’Adoration des mages », « La Circoncision » : ces quatre toiles font partie des plus beaux tableaux que possède le Musée de Grenoble. Ces œuvres appartenaient à l’origine, avec une autre toile conservée au Metropolitan Museum de New York et quelques panneaux plus petits dont on a perdu la trace, à un retable destiné au maître-autel de la Chartreuse Nostra Senora de la Defension à Jerez. Elles ont été réalisées alors que l’artiste était au sommet de son art. Lors de la réduction puis de la fermeture des couvents d’hommes, ce magnifique retable de style baroque fut démantelé puis détruit en 1828 et les tableaux dispersés. Le général De Beylié acquit ces quatre toiles en 1901 pour en faire don au musée de Grenoble. L’Espagne, très catholique en cette période (1638-1639), laisse peu de liberté d’expression aux artistes qui doivent suivre les directives de Francisco Pacheco, peintre, théoricien sous peine des foudres de l’Inquisition. Ainsi du tableau « L’Annonciation » : tout est peint dans le respect des injonctions religieuses (une jeune vierge, un archange agenouillé, un livre de prières, la colombe au ciel.…) ; très bel avant-plan avec les lys symbole de pureté mais on peut noter l’arrièreplan moins travaillé, en effet Zurbaran maîtrisait mal les plans intermédiaires mais il se perfectionnera au contact de Velasquez. « L’adoration des bergers » est peint dans un style plus ténébriste, toute la lumière du tableau vient de l’Enfant Jésus. Nous ne verrons pas « L’adoration des mages », actuellement prêté pour une exposition. « La circoncision » : une scène aux couleurs plus froides, dont Marie est absente. Ces panneaux ont quelques points communs : il n’y a jamais de détail inutile, il y a toujours un élément architectural (colonne, pilier..) reliant symboliquement la terre et le ciel, il y a toujours un personnage nous indiquant où porter notre regard. Page 12 LE GRECO (1541-1614) : « La Pentecôte ». Prêt exceptionnel du musée national du Prado . verselle, mais le projet n’a pas abouti. Cette sculpture représente la lutte des ouvriers et la résistance des Catalans. Son exposition au milieu des salles d’art moderne peut surprendre ; c’est une exigence du musée du Prado. Considérée comme une peinture gestuelle en bronze, elle met en valeur toutes les possibilités physiques de ce matériau . Grec d’origine, ayant étudié les artistes italiens, ce peintre et sculpteur s’installe en Espagne où il mourra, à Tolède. Ce tableau appartenait à un retable démembré dont 5 panneaux sont regroupés au musée du Prado, un autre se trouvant au musée de Bucarest. Comme les tableaux de Zurbaran, il perd de sa charge émotionnelle en étant sorti de son contexte d’origine . C’est une représentation traditionnelle de la Pentecôte, les langues de feu symbolisant la venue de l’Esprit Saint sur les Apôtres, la Vierge et deux femmes. C’est un panneau à la gloire de Marie représentée dans une sorte de mandorle au centre du tableau. L’originalité de cette toile tient à la façon maniériste dont sont réalisés les portraits aux visages allongés empreints d’émotion ainsi qu’aux couleurs des vêtements et au travail des plis spécifiques de l’école vénitienne . En faisant un grand saut dans le temps et un petit trajet dans la musée, nous abordons l’art espagnol contemporain. PABLO PICASSO : « Femme lisant » : il s’agit d’un portrait d’Olga, danseuse des ballets russes rencontrée à Rome et première épouse de Picasso, réalisé lors d’une période où la peinture connaît un retour à l’ordre avec référence à l’art ancien (nez grec, yeux enfoncés, style cariatide) appelée aussi « peinture ingresque ». JULIO GONZALEZ (1876-1942) : « La Grande faucille » Gonzalez est un grand sculpteur, faisant partie d’une famille d’orfèvres et qui a connu Picasso avec qui il a travaillé à Paris ; c’est l’inventeur de la sculpture en fer (il avait appris la soudure autogène en travaillant chez Renault). En 1937, Picasso peint « Guernica » et l’agrandissement de cette sculpture devait être présenté face à la toile de Picasso dans le pavillon républicain espagnol de l’exposition uni- Cette sculpture qui sera reproduite en grand format après sa mort est une des fiertés du musée de Grenoble. JUAN MIRO (1893-1983) : « Grande bande » Cet artiste espagnol a parfois été rattaché au courant surréaliste mais en réalité, il est resté en marge des courants artistiques, en inventant son propre « miromonde » avec ses « miroglyphes en liberté» (Jacques Dupin). Cette œuvre de 57 cm x 500 cm ne raconte pas une histoire, en effet sur fond brun et bleu délavé pouvant rappeler le cosmos, flottent des signes peints s’apparentant à l’écriture automatique ; on est dans un monde à la fois onirique et naïf. EDUARDO CHILLIDA (1924-2002) : « Ikaraundi » (Grand tremblement) C’est un artiste qui a travaillé de nombreux matériaux (fer, bronze, bois, papier, albâtre) et qui travaille sans plan ni maquette, se confrontant directement à la matière. Cette œuvre est un tirage en bronze, l’original étant découpé, tordu et étiré dans une plaque de fer épaisse. Et pourtant cette sculpture dégage une impression de légèreté rappelant les papiers découpés .Pour Chillida, une sculpture est la trace d’une écriture dans l’espace. Il dira : « J’aime le net et le découpé,avec des écarts, de retournements qui créent la distance, provoquent ces silences ou ces vides, comme on voudra, où la forme peut vibrer ». Nous vous donnons rendez-vous dans le prochain bulletin pour partager d’autres découvertes muséales. Il n’est malheureusement pas possible de publier les photographies des œuvres présentées mais tableaux et sculptures seront ravis de votre visite lors d’une promenade dans ce beau musée de Grenoble. Josiane Pourreau La Promotion Violette L’Animal I l existe dans l’Art huit manières de représenter l’animal, ce sera le thème de notre visite. L’Animal, image ou attribut des dieux. Nous commençons notre visite par les collections égyptiennes . Dans l’Egypte ancienne l’animal est important puisque les divinités sont représentées indifféremment sous forme d’animaux ou d’humains. L’animal assure le lien entre le monde réel et le monde imaginaire. Ainsi la coiffe du pharaon est ornée du cobra et de la tête de vautour, représentations de deux divinités protectrices de l’Egypte, Ouadjet et Nekhbet et un autre attribut du pharaon est la queue de taureau, symbole de puissance. On remarque aussi un coffre noir sur lequel se trouve un canidé noir (chien ou chacal) représentant Anubis, grand dieu funéraire symbole de renaissance dans l’Au-delà. C’est le passeur entre le désert et le Nil. Dans une des vitrines, le scarabée (objet n° 27) mérite d’être observé car il est orné de petits personnages illustrant les formes de la divinité solaire : scarabée au lever du jour, Ré humain à tête de scarabée à midi et Atoum humain à tête de bélier au coucher du soleil (version de la rédactrice très simplifiée car ceci nécessiterait un long développement !). Remontons des profondeurs de l’Egypte ancienne pour nous intéresser au 17ème siècle, avec Jacob JORDAENS (1593-1678) et « Le sommeil d’Antiope » : ce peintre flamand, qui fut élève de Rubens, nous donne à voir ici un tableau d’inspiration caravagesque (on creuse avec des tons chauds et on rehausse avec des tons plus froids) au style très réaliste. Il s’agit d’une scène très animée dans laquelle Zeus a pris la forme d’un satyre afin de séduire Antiope dans son sommeil. Puis au 19ème siècle pour : L’animal magique ou fantastique Affrontons le monstre, en nous arrêtant devant la sculpture de François TRUPHEME (1820-1888). « Angélique attachée au rocher » : d’après Orlando furioso de L’Arioste, ce Juin 2016 récit très à la mode au 19ème siècle (le chevalier Roger aveuglera le monstre et pourra ainsi le tuer d’un coup d’épée et sauver Angélique). L’animal métaphore de l’être humain François DESPORTES (1661-1743) : « Animaux, fleurs et fruits » Il est à noter que le monstre marin n’est pas représenté dans cette sculpture de marbre exécutée en 1856. Ce peintre français fut appelé à la cour de Louis XIV pour en devenir le peintre animalier. L’animal attribut des dieux Jean-Baptiste MAUZAISSE (17841864) et son « Hercule et Lichas » : Cette peinture de grandes dimensions (325 x 272 cm) représente Hercule précipitant Lichas dans la mer après que celui-ci lui a remis de la part de Déjanire la tunique empoisonnée du sang de Nessus (Hercule est très souvent représenté vêtu de la peau du lion de Némée qui le protège). Jean-Jules-Antoine LECOMTE DU NOUY (1842-1923) et son « Homère mendiant » : Ce très grand triptyque (382 x 236 cm) est une parfaite illustration de l’art académique en vogue dans la seconde moitié du 19ème siècle. Le panneau central représente Homère sous les traits d’un vieillard aveugle conduit par un jeune garçon, auprès desquels on distingue une carapace de tortue et des cornes de bouc, avec en arrière-plan les principaux monuments d’Athènes. Le panneau de gauche, tout en sérénité, illustration de l’Odyssée, présente Pénélope tenant le portrait d’Ulysse avec à ses pieds un chien, symbole de fidélité. Le panneau de droite illustre l’Iliade et ce de manière plus violente, avec la déesse de la vengeance brandissant torche et flèches au-dessus du cadavre d’Hector. On distingue très bien la chouette d’Athéna ainsi que le serpent. L’animal tutélaire De Victor SAPPEY (1801-1856), voici « la mort de Lucrèce » : Ce sculpteur grenoblois a réalisé entre autres œuvres la fontaine de la place Grenette, la fontaine du Serpent et du Lion, la statue de Bayard, la fontaine des éléphants de Chambéry. Nous sommes ici devant l’original d’un haut-relief en plâtre, avec en haut à gauche de la scène, la louve romaine et les jumeaux. La sculpture de la louve qui a servi de modèle au sculpteur est conservée au musée du Capitole à Rome. Ce tableau est une métaphore des cinq sens. On citera par exemple le chien pour le toucher et l’odorat, le paon et ses ocelles pour la vue... Chaque animal y est représenté de manière expressive et réaliste ; il pourrait s’apparenter à un personnage de cour, donc apparaître comme une critique de la société. L’animal symbolique Simon VOUET (1590-1649) : « le Christ apparaissant à saint Antoine abbé ». Le thème de ce tableau est la tentation de saint Antoine reconnaissable à ses attributs : clochette, chapelet, tau et le sanglier envoyé par le diable comme symbole du vice et qu’il avait domestiqué. (Il faut bien observer ce tableau pour découvrir le sanglier). L’animal pour lui-même François POMPON (1855-1933) Les sculptures animales présentées dans la vitrine sont en plâtre. Ce sculpteur animalier observait attentivement les animaux du Jardin des plantes. Cette apparente simplicité nécessitait un travail de base extrêmement détaillé. L’artiste souhaitait que l’on regarde ses œuvres comme une ombre chinoise. L’animal stylisé De Etienne HADJU, sculpteur français d’origine hongroise (1907-1996) : « Le coq, la poule et le poussin », œuvre réalisée en marbre. L’idée de sculpture en volume réside dans la compression ainsi que les caractéristiques des animaux représentés. De Germaine RICHIER (1902-1959), « La fourmi » : comme chez Giacometti, l’ œuvre conserve la trace des doigts ou de l’outil qui l’ont sculptée. Nous sommes face à un être hybride, mi-femme mi-insecte, dans une attitude pouvant évoquer l’attaque ou la défense. Un réseau de fils permet d’inscrire la sculpture dans l’espace. Josiane Pourreau Page 13 Grenoble il y a 100 ans : « Le spectacle des rues et des chemins » au musée de l’Ancien Evêché P our notre deuxième sortie de la nouvelle année, nous étions de nouveau très nombreux, à tel point que nous avons dû solliciter le musée pour que nous soit accordée la possibilité d’avoir simultanément (avec un léger différé de quelques minutes) deux groupes de dix-huit personnes. Quel était donc l’objet de cette exposition qui attirait tant d’Amopaliens ce 4 février dernier au musée de l’Ancien Evêché, après nos deux dernières visites qui nous permirent d’admirer « Les Alpes de Doisneau »1 et la « palette » de Diodore Rahoult2 ? Celle-ci est consacrée une nouvelle fois à un photographe (inconnu pour nous), un certain Joseph APPRIN qui laissa derrière lui (et légua donc finalement à la Postérité, comme nous le constatons) quelque 640 négatifs sur plaque de verre de vues prises dans notre région du Dauphiné entre 1890 et 1908. L’exposition présente, en quatre espaces thématiques distincts, une sélection de 110 images qui ont pu être retouchées puis numérisées -et datées et surtout localisées, le tout par un travail considérable, on s’en doute- dans cette collection acquise un jour par un photographe grenoblois, Jean-Louis ROUX. Qui était Joseph APPRIN, photographe « du dimanche » (sans aucune connotation péjorative, bien sûr), adhérent de la Société dauphinoise d’amateurs photographes ? Un greffier. Un greffier amateur de belles photos. De belles photos de son pays. Que voyons-nous, qu’éprouvonsnous au fil de notre visite ? Des vues de la Chartreuse, du Vercors, de Grenoble mais aussi du Trièves, de l’Oisans, prises lors de promenades à la ville et à la campagne (on le voit, l’auteur a beaucoup voyagé dans la région, comme nous le fait remarquer notre guide). Des paysages magnifiques (avec la profondeur de champ -de quasiment zéro à l’infini- et les somptueux dégradés de gris permis par une chambre de grand format). Joseph APPRIN était en délicatesse avec les tenants du « pictorialisme » (tiens-tiens, est-ce Page 14 que cela ne nous rappelle pas quelque chose ? Vous savez, ces « artistes-photographes » pour qui l’Art de la photo ne pouvait exister en-dehors de la transformation du réel -à l’aide d’artifices techniques divers-, qui privilégiaient « l’impression », l’expression de la sensibilité de « l’artiste » ? Cette conception contre laquelle s’est élevée par exemple Ansel ADAMS, dont nous avons fait la connaissance en visitant l’exposition consacrée à Georgia O’KEEFFE?). Notre photographe se dégage de cette manière impressionniste -en deux mots, il préfère la netteté au flou… artistique à la mode- et nous livre des compositions de paysages empreintes d’une grande rigueur, des photos urbaines aussi parfaitement construites et si « réalistes » qu’à peu de choses près l’on pourrait penser qu’elles ont été prises hier, avec du matériel moderne : plusieurs parmi nous étaient, comme on dit aujourd’hui, « scotchés » devant des vues de Grenoble intra-muros, par exemple la place Victor-Hugo. Mais ce n’est pas tout : l’originalité vient de ce que les paysages de Joseph APPRIN ne sont pas « déshumanisés » : dans des images remarquables, nous voyons devant nous vivre ses contemporains au quotidien, qu’il s’agisse de scènes de la ville ou de la campagne (les animaux familiers ne sont pas non plus exclus, comme dans le Marché aux bestiaux). On retrouve cette présence humaine à la fois dans des scènes marquantes de l’époque, qu’elles soient courantes ou exceptionnelles (ainsi ces femmes en train de faire la grande lessive à la fontaine ou les funérailles grandioses de Mgr FAVA, évêque de Grenoble) et dans les portraits qu’il fit des membres de sa famille, loin de tout académisme : des photos prises sur le vif, comme cet enfant perché au sommet d’un escabeau, plein cadre sans arrière-plan. Ces hommes, ces femmes, ces enfants (on pense aussi à la petite fille « à la chèvre »), ces arbres -tellement présents dans les tableaux -pardon les photos- que nous voyons amènent à penser, sans trop de risque de se tromper, que notre photographe greffier « amateur » (parmi la kyrielle de ses semblables bourgeois fraîchement convertis à « l’art photographique » en ce début du XXème siècle grâce aux nouvelles techniques bien plus accessibles) était aussi un homme qui avait l’amour de ses semblables et de la nature (avec des traces de nostalgie parfois -déjà-, comme devant ces « radiers » au bord de l’Isère). Cette visite nous aura permis aussi de nous familiariser avec le matériel utilisé à l’époque de Joseph Apprin (plaques de verre, stéréoscopie…). J.C. Meurant (1) Compte rendu de Jacques Prasse dans le bulletin de juin 2013 (2) Compte rendu de Mireille Vinot et Josiane Pourreau dans le bulletin de juin 2014 La Promotion Violette Deux expositions en Suisse : Zao Wou-Ki et Paul Signac S ouvenez-vous. Le mois d’avril a été particulièrement maussade, mais en ce jeudi 28 avril, le temps est radieux, idéal pour traverser la vallée de Chamonix et rejoindre, de l’autre côté, Martigny. Pics, glaciers, massifs se déroulent, tout au long de la route, comme autant de cartes postales. Et notre Président les désigne et les nomme, forçant notre admiration (pour sa connaissance des lieux et pour la beauté des paysages). Nous arrivons à la Fondation Gianadda ; à peine sortis du car, nous nous précipitons dans la salle de conférences, pour un premier contact avec Zao Wou-Ki, qui, selon la définition de Claude Roy est « un des meilleurs peintres modernes de l’Occident ». Notre conférencière, projections à l’appui, présente sa vie et quelques œuvres que nous découvrirons plus tard dans la salle d’exposition. Résumons. Zao Wou-Ki est né le 1er février 1920 à Pékin. Sa famille est une très ancienne famille dont l’origine remonte à la Dynastie Song (XeXIIe siècles). Il est l’aîné de sept enfants. Élève très doué, passionné de littérature, Wou-Ki dessine et peint dès l’âge de dix ans. Sa famille ne décourage pas le garçon de poursuivre dans cette voie. Son grand-père lui apprend à observer et apprécier la calligraphie. En 1935, Zao Wou-Ki entre, à quatorze ans, à l’école des Beaux-arts de Hangzhou. Il étudie pendant six ans le dessin d’après des plâtres puis des modèles, la peinture à l’huile, la peinture traditionnelle chinoise, la perspective à la manière occidentale et la calligraphie. Les professeurs de l’école des Beaux-arts de Hangzhou sont en majorité chinois mais il y a aussi des enseignants venus de l’Académie royale des Beaux-arts de Bruxelles, et certains professeurs chinois ont été formés aux Beaux-Arts de Paris. Très vite, Zao Wou-Ki ressent le besoin de Juin 2016 s’éloigner de la peinture traditionnelle ou académique, et il a envie de chercher ailleurs une autre forme d’inspiration. Il la trouve dans des cartes postales que son oncle lui rapporte de Paris, ou bien dans des pages des journaux reproduisant des peintures qu’il découpe dans des revues (Life, Harper’s Bazaar, Vogue). Il est donc d’une certaine manière en contact avec Paul Cézanne, Amedeo Modigliani, Auguste Renoir. Les solutions aux problèmes qu’il se pose sont chez ces maîtres, principalement Cézanne et Matisse, et non plus dans la peinture traditionnelle chinoise ou dans la peinture académique européenne. Le 26 février 1948, il s’embarque à Shanghai avec sa femme Lan-Lan. Le couple débarque à Marseille un mois plus tard. Il arrive à Paris le 1er avril. Au chauffeur de taxi, le peintre indique le seul mot de français qu’il connaisse : « Montparnasse ». Il s’y installe, dans un petit atelier rue du Moulin-Vert voisin de celui d’Alberto Giacometti. Pendant un an et demi, chaque après-midi, il visite des musées et des expositions : Rouault, Cézanne, Renoir, Modigliani, Matisse, Picasso. Ses amis sont à ce moment-là, Nicolas de Staël, Pierre Sou- lages, Maria Elena Vieira da Silva, Hans Hartung, artistes venus de différents pays. Une exposition de gravures à Berne et à Genève, en 1951, permet à Zao Wou-Ki de découvrir Paul Klee. Pour lui, une porte va s’ouvrir : « Klee va être un médiateur, un recours merveilleux contre deux périls qui menacent alors le jeune artiste : rester un peintre enraciné à l’excès dans l’admirable passé de son peuple, ou se trouver agressive- ment détaché de celui-ci, européanisé, et peut-être par là même, dénaturé. » (Claude Roy) Car Klee aborde la peinture avec une attitude intérieure analogue à celle des peintres d’Extrême-Orient sans avoir jamais connu la Chine. Pendant quelques années Zao Wou-Ki trouvera en Klee des réponses à ses questions. Régulièrement exposé à Paris à partir de 1952, puis en Suisse, à Bâle et à Lausanne, aux États-Unis, à Washington, Chicago et New York, Zao Wou-Ki est maintenant internationalement reconnu. C’est à cette époque qu’apparaît une métamorphose de son art qui déroute les collectionneurs : « Ma peinture devient illisible. Natures mortes et fleurs n’existent plus. Je tends vers une écriture imaginaire, indéchiffrable », se souvient-il en 1976. On voit en lui l’un des tenants de l’abstraction lyrique. Pour surmonter l’épreuve que représente le départ de sa première épouse Lan Lan au début de 1957, le peintre parcourt le monde jusqu’en 1959. Il va à New York et y il rencontre des artistes qui deviendront des amis. Puis avec Pierre et Colette Soulages, il visite un grand nombre de musées (San Francisco, Chicago, Washington, D.C.). Ensemble ils découvrent l’expressionnisme abstrait, l’action painting. Zao Wou-ki est enchanté par cette peinture qui éclate de « spontanéité avec violence et fraîcheur ». Son voyage le conduit ensuite au Japon à Tokyo, puis à Hong Kong. C’est là qu’il rencontre en 1957 celle qui va devenir sa deuxième épouse : Chan May Kan, actrice de cinéma d’une extraordinaire beauté. Grâce à André Malraux, dont il a illustré « La Tentation de l’Occident » en 1962, il obtient, en 1964, la citoyenneté française. Pour s’occuper de son épouse, May, malade, sujette à des rechutes, il cesse de voyager et se réfugie dans son travail. Il se remet à peindre des encres de Chine à cause, dit-il, de leur plus grande facilité d’exécution. Chan May Kan meurt au début du mois de mars 1972. Le peintre supporte mal cette douloureuse épreuve. En 1977, il épouse Françoise Marquet, Page 15 conservatrice au Musée d’art moderne de la ville de Paris. À partir des années 1980, le talent du peintre a été reconnu et consacré dans plusieurs pays d’Europe ainsi qu’aux États-Unis et au Mexique. En 1981 une grande rétrospective de son œuvre est présentée aux Galeries nationales du Grand Palais à Paris. L’exposition sera reprise dans cinq musées japonais, à Hong Kong, puis à Singapour. En 1985 il est invité en Chine pour faire découvrir à de jeunes professeurs, conservateurs, élèves l’art occidental prohibé auparavant pendant la « révolution culturelle. Il sera déçu par ce séjour. En France il est promu en 1993 au grade de commandeur de la Légion d’honneur et reçoit la Médaille de Vermeil de la Ville de Paris. A Tokyo il reçoit le prix Praemium Imperiale - Award of Painting, des mains de l’Empereur du Japon et de son épouse l’Impératrice En 2011, après avoir longtemps vécu à Paris, le couple s’installe à Dully, en Suisse, au bord du lac Léman. Zao Wou-Ki est atteint de la maladie d’Alzheimer. Il meurt à l’hôpital de Nyon le 9 avril 2013 âgé de 93 ans. Il est enterré au cimetière du Montparnasse. Françoise Marquet va créer à Genève la Fondation Zao Wou-Ki pour promouvoir l’œuvre de son mari. Il est temps de pénétrer dans la salle d’exposition. L’architecture de celle-ci, quatre murs sur lesquels sont accrochées les œuvres et un grand espace central, permet d’embrasser du regard la cinquantaine de toiles, dont d’immenses grands formats. On reste stupéfait, interdit, subjugué. Et je crois que beaucoup d’Amopaliens ont ressenti ce choc devant des œuvres difficiles, sans aucune allusion au réel, un assemblage de formes et de couleurs animé par le seul geste pictural. L’exposition suit le parcours chronologique du peintre durant une soixantaine d’années. Sa première période est figurative : portraits, natures mortes, et paysages réinventés. L’influence de Picasso et surtout de Cézanne est manifeste. Mais déjà ses natures mortes et ses paysages se dépouillent de plus en plus : des Page 16 signes, des lignes esquissant un dessin sur un fond chromatiquement très travaillé. La découverte de Paul Klee le conduit vers de larges développements de plus en plus abstraits. Les titres des tableaux : « Corrida », « Vent », « Poursuite », « Cerf-volant et oiseaux » renvoient à des bribes de réalité à peine discernables. Les tableaux s’acheminent vers l’abstraction pure. En 1959 Zao Wou-ki décide de changer d’atelier. Il s’installe rue Jonquoy dans un entrepôt transformé en atelier. «Ce nouvel atelier me permettait enfin de peindre de grands formats. Il m’offrait de l’espace pour avoir du recul et déplacer les tableaux. (…) Je découvrais l’amplitude des gestes. (…) J’éprouvais une grande joie physique à tartiner de très grandes surfaces, au point d’en devenir obsédé et de ne faire plus que cela ». Et de fait, avec une inspiration et une énergie renouvelées, il « tartine » de grands formats qui préludent aux larges développements réunis parfois en triptyques, diptyques, brossés dans les années 80. Parmi les toiles exposées, l’une atteint 525cm de long sur 200 ! Certaines œuvres sont des hommages dédiées à une personne : « Hommage à Edgar Varèse », « En mémoire de May », « Hommage à Henri Matisse », mais la plupart portent le seul titre de leur date d’achèvement. Nous sommes dans l’abstraction pure. Libéré des contraintes du visible et de l’image, le peintre jette sur la toile son monde intérieur jubilatoire ou douloureux. Pas de repères : on n’est plus spectateur, puisqu’il n’y a rien à voir, mais « regardeur » d’une image mentale qui ne se laisse pas assimiler, mais seulement interpréter. Chacun regarde, interroge, interprète et reconstruit son propre tableau. La fondation propose aussi une rétrospective des œuvres sur papier. Si l’artiste a exécuté ses premières encres de Chine en 1945, il a abandonné cette technique pendant vingt-quatre ans. Il ne l’a reprise qu’en 1971-1972 au moment où sa seconde épouse May était malade et où il avait abandonné les grands formats. Il s’en explique à Françoise Marquet : « En 1971, May était malade, je ne pouvais plus peindre. Je n’arrivais plus à me concentrer. D’ailleurs tu peux remarquer qu’entre 1971 et 1972 j’ai fait très peu de tableaux. Dans certains moments de grandes angoisses, il m’était plus facile de prendre un morceau de papier et un peu d’encre de Chine, et d’essayer de tracer ». Sa rencontre avec Henri Michaux est également déterminante. Avec lui il découvre une nouvelle manière de travailler l’encre de Chine. Avec l’encre, l’artiste retrouve le geste de la calligraphie, le tracé du pinceau à l’encre de chine auquel l’avait initié son grand-père. Il l’adapte à son usage de l’abstraction. « C’était, dit-il, une préparation mentale à la peinture. » Les jeux d’encre, sur le blanc du papier, déploient des coulées noires plus ou moins diluées. Alors que les toiles peintes sont recouvertes en totalité, les lavis se déploient autour du vide du papier ; œuvres réalisées très rapidement comme l’exige l’exercice de la calligraphie qui n’admet aucun repentir, elles fascinent tout autant. L’exposition s’achève sur la projection d’une vidéo. On y voit quelquefois l’artiste à l’œuvre. Une séquence singulière. Zao Wou-ki, au fond de son vaste atelier, contemple longuement une immense toile. Il s’approche, retravaille deux ou trois cm2 et se déclare satisfait. La Promotion Violette Musée de l’Hermitage. Paul Signac. U n peu d’autoroute et nous voici à Lausanne, à la Fondation de l’Hermitage. L’exposition « Paul Signac » présente les toiles collectionnées par une famille de passionnés. Elle possède un des plus grands ensembles d’œuvres de Paul Signac, des premiers tableaux impressionnistes aux dernières aquarelles : près de 140 peintures, aquarelles et dessins qui illustrent la carrière du peintre, dans un déroulement chronologique et thématique. Paul Signac est né à Asnières le 11 novembre 1863, ses parents sont commerçants. Très jeune, il perd son père. Dès 1880, avec l’accord de sa mère, il quitte le lycée pour embrasser une vie d’artiste. Pour se former, il fréquente les expositions et les galeries, étudie les œuvres de Manet, Monet et des Impressionnistes. Dans leur sillage, il réalise des œuvres énergiques où prime le plaisir de la matière: « Çà consistait à empâter des rouges, des verts, des bleus et des jaunes, sans grand souci mais avec enthousiasme ». Un jour de juin 1880, il regarde les toiles de Monet à «La Vie moderne». C’est le déclic. «Qu’est-ce qui m’a poussé à faire de la peinture ? C’est Monet et l’aspect révolutionnaire de son œuvre» dit-il. En 1882, il commence à peindre, seul, mais très influencé par les Impressionnistes. La manière impressionniste se voit dans une série de marines. Deux ans plus tard, il rencontre Georges Seurat et cette rencontre va bouleverser sa vie. L’œuvre la plus marquante de Seurat, « Un dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte « met au point la technique de la division des tons. La technique divisionniste (ou pointilliste) est issue des théories scientifiques d’Eugène Chevreul, sur les phénomènes optiques et l’utilisation des couleurs complémentaires, qui permettent de faire vibrer la couleur. L’idée d’appliquer sur la toile une succession Juin 2016 de petites touches mélangées revient aux impressionnistes. Mais les peintres pointillistes, eux, ne mixent pas leurs petites touches, ils appliquent leur petits points l’un à côté de l’autre. C’est le regard de l’observateur qui recrée l’unité de l’image Grâce à Guillaumin et à Pissarro qui s’intéressent aux recherches de ces jeunes artistes, ils sont invités à exposer, en 1886, à ce qui sera la huitième et dernière exposition du groupe impressionniste. Seurat y montre son « Un Dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte », Signac, avec ses « Gazomètres » confirme son adoption de la méthode divisionniste. Il conserve la technique pointilliste, mais remplace les points par de minuscules rectangles. Leur ami, le critique Félix Fénéon, qualifiera bientôt ce mouvement de «néoimpressionniste». Désormais Signac travaille en compagnie de Seurat et Pissarro, dont il épouse une cousine : Berthe Roblès. Avec Seurat il fonde également la Société des artistes indépendants dont Signac fut président. Après avoir eu une perspective plus ou moins socialisante au cours des années 1890, le peintre engage son talent sur des paysages sans personnage, avec une palette de plus en plus libre et une grande passion des couleurs. En 1891, Signac est très marqué par la mort de son ami Georges Seurat. Il se lasse de Paris et des mondanités et l’année suivante, il découvre Saint-Tropez (il achètera sa maison, La Hune, en 1897). Là, sans rompre les liens avec la capitale, il trouve la sérénité nécessaire à son travail. Il peint des œuvres de plus en plus colorées et de grandes compo- sitions comme Au Temps d’Harmonie, révélatrices de son adhésion aux idées anarchistes. «Harmonie» devient alors l’un des maîtres- mots de l’artiste qui renonce à la peinture sur le motif, préférant rassembler des «notations», le plus souvent à l’aquarelle, à partir desquelles il travaille ensuite à l’atelier ; adoptant aussi des touches plus larges, Signac réaffirme son goût de la couleur pure, ce qui lui vaudra l’intérêt de Matisse et des Fauves. Désormais il passe une partie de l’année dans le petit port et sa maison devient un lieu de vacances et rencontres pour de nombreux peintres : Matisse, Derain, Marquet, Cross, Denis. Paul Signac adorait la voile et commença à voyager en 1892, naviguant sur un petit bateau vers presque tous les ports de France, vers la Hollande et autour de la Méditerranée, jusqu’à Constantinople. De ses différents ports d’escale, Signac ramène de vibrantes esquisses d’aquarelle colorées. En 1904 et 1908, Signac séjourne à Venise. Il est évident que cette ville d’eau, de lumière et de reflets ne le laisse pas indifférent. Il y réalise une belle toile. Le ciel occupe 70% du tableau, troué par un arc- en-ciel, dont le jaune éclaire toute la toile. Les petites touches rectangulaires bleues et rouges construisent les architectures. L’église au milieu à droite apparaît comme un deuxième soleil. Toute la majesté et la fragilité de Venise sont là. En 1909, il se rend à Londres et observe les toiles de Turner. Il est bien sûr sensible aux brumes et brouillards du peintre anglais. Libertaire et pacifiste, Signac est effondré par la première guerre mondiale. Il s’installe à Antibes où il voit souvent une vieille connaissance : Bonnard. A partir de 1929, il sillonne la France, dans le but d’en représenter les ports. Il réalise ainsi un album relié, comprenant une centaine d’aquarelles. Après un court séjour en Normandie et en Corse, Signac décède à Paris en avril 1935. Il a 72 ans. Nous arrivons au terme d’une belle journée riche en émotions esthétiques. Beauté de la nature, beauté de l’art. On oublie, une journée, le désordre du monde. Jacques Loseille. Si nous avons les autorisations nécessaires, nous publierons sur le site quelques œuvres remarquables de ces deux expositions. Page 17 Introduction au voyage dans les Pouilles Pour saluer le projet de Voyage de l’AMOPA dans cette région des Pouilles, on propose aux futurs participants ces quelques réflexions géographico-historico-etc nées d’un autre voyage, réalisé il y a bien longtemps. Pour des motifs géographiques et plus encore historiques, la Sicile mérite d’être évoquée ici. La Puglia. «La» ou «les» Pouilles ? Ce nom de région provient du latin Apulia et l’italien l’emploie au singulier, alors que le français préfère le pluriel, ce qui pourrait traduire une division géographique : la «Pouille plate»(puglia piana), celle du Tavoliere (vaste plaine, une des plus grandes de l’Italie du Sud, dont l’altitude moyenne est de 60 m.), et d’autre part les zones plus montueuses qui l’encadrent : au N., le Gargano, culminant à 1056 m., et au S.les plateaux calcaires des Murge (alt. moy. 300 m.), qui appartiennent à l’Apennin et se prolongent en direction de Tarente et du Salento. Bordée à l’Est par l’Adriatique, au Sud par la Mer Ionienne, l’Apulie forme le talon de la botte italienne et s’allonge en direction de la Grèce et du MoyenOrient, ce qui l’a longtemps cantonnée dans un rôle peu enviable de zone de passage, ou de conflits : en particulier, l’Apulie verra s’opposer l’Empire byzantin, l’Empire romain-germanique et le Saint-Siège. Par ailleurs, le Moyen-âge lui sera profitable, surtout pour sa zone côtière, avec tous les mouvements de population liés aux Croisades, et aussi du fait de l’activité commerciale dans une Adriatique dominée par la présence vénitienne. Après la Renaissance et le changement de l’équilibre européen, elle se trouvera à l’écart des grands courants d’action, sous la domination somnolente de l’Espagne, puis des Bourbons de Sicile. Quelques grands travaux assez récents d’adduction d’eau ont suffi à transformer cette terre traditionnellement assoiffée («siticulosa Apulia» disait Horace) en une immense entreprise viticole. Préhistoire. Les Pouilles sont une vieille zone de peuplement. Durant la dernière glaciation, certaines de ses grottes ont été occupées : indice de la température qui y régnait, on y a retrouvé des fossiles du grand pingouin arctique (Alca impennis)! Plus récents, on y rencontre de nombreux menhirs et dolmens. Protohistoire. L’Apulie fut occupée d’abord par des Sicules, qui passèrent ensuite en Sicile, puis par des Iapyges, Page 18 originaires de l’Italie du Nord. La proximité de la Grèce favorisa le passage de colons grecs qui fondèrent très tôt des cités : Crétois à Otrante, Rhodiens à Salapia, Laconiens à Tarente (v.-705). On trouve la trace de ces mouvements de population et de l’importance de l’apport grec dans les mythes : Minos aurait fondé Monopoli, Diomède de nombreuses cités du Tavoliere et du Gargano, et un héros troyen, Idoménée, serait à l’origine d’Otrante. Des conflits simplement locaux eurent des répercussions inattendues : au -IVème s., Rome décida de conquérir Tarente, qui fit appel à son voisin Pyrrhus, roi d’Epire (de l’autre côtté de l’Adriatique). Celui-ci, après deux campagnes victorieuses, finit pourtant par être défait et Rome s’empara de Tarente (-272). La Seconde Guerre Punique (-218/201). Hannibal avait décidé de porter la guerre en Italie. Après avoir fait le tour de la Méditerranée occidentale par l’Afrique, l’Espagne et la Gaule, il parvient aux environs de Pérouse, sur les bords du lac Trasimène où il écrase une première armée romaine (-217), avant de contourner Rome pour aller s’établir en Italie du Sud qu’il essaie vainement de soulever contre Rome. En -216, à Cannes (entre Canosa di Puglia et Barletta) [le 2ème jour], une nouvelle armée romaine envoyée en Apulie, quoique supérieure en nombre, est elle aussi écrasée (14.000 rescapés, 10.000 prisonniers, 60.000 tués dont un des deux consuls commandants en chef), au cours d’une bataille qui demeurera longtemps un modèle de manœuvre dans les écoles militaires. Capoue, alors seconde ville d’Italie, se soulève contre la domination de Rome, tandis que les cités d’origine grecque lui demeurent fidèles. Suivent treize années difficiles pour Rome, enfin sur le Métaure, une armée de renfort carthaginoise est détruite, et en -203, Hannibal obéit aux ordres de rappel de Carthage et évacue l’Italie. Ensuite, la Pax romana règne : la Via Appia Rome-Capoue, prolongée jusqu’à Bénévent, Tarente et Brindisi, verra passer les légions lancées à la conquête du bassin méditerranéen. Haut Moyen-Âge. L’empire romain s’écroule sous les coups des Barbares et l’Apulie, la région italienne la plus proche de Byzance, ressentira tout le poids du conflit. Les Goths s’emparent de Tarente et de Brindisi. Suit au VIème s. une courte trève au cours de laquelle Byzance domine la Pouille. Au VIIème s., arrivent les Lombards qui dominent la région sauf la zone côtière, s’emparant peu à peu des villes de Brindisi, Otrante, Tarente. Mais ils sont chassés de Bari et de Tarente par les Sarrazins, venus de leurs bases de Sicile, qui se maintiendront à Bari jusqu’en 848, avant qu’en 922 apparaissent les pirates slaves venus du N.E. de l’Adriatique. En fait ces semi-invasions étaient rendues possibles par le contexte historique général de lutte entre les Empires romains d’Orient et d’Occident, les Empereurs germaniques se désintéressant de la Pouille où demeuraient sensibles les influences byzantines. C’est de cette époque que datent les églises et les monastères basiliens créés en Pouille et en Calabre par des moines venus de Grèce et de Byzance. Ces monuments, qui subsisteront même après le schisme de Michel Cérulaire, ont laissé de nombreuses traces dans la région de Matera [4e jour], célèbre pour ses grottes dans lesquelles s’installèrent à cette époque monastères et ermitages troglodytiques et où subsistent encore les traces de décors de style byzantin, fruits d’un art stylistiquement pauvre mais d’une grande inspiration mystique. En 1011 c’est au tour des Normands de se manifester. Deux de leurs chefs seraient venus en pèlerinage (?) dans le Gargano au sanctuaire de Saint Michel [1er jour], et auraient été recrutés par un certain Mélès , chef local d’une révolte anti-byzantine. Avec la bénédiction du pape et l’aide de ces guerriers réputés venus du Nord, Mélès remporte quelques succès avant d’être vaincu à son tour et d’appeler à l’aide l’empereur romain-germanique Henri II. 1020 : Henri II assiège Troia sans succès. Dans un contexte général d’insurrection anti-byzantine, les NorLa Promotion Violette mands interviennent et battent les Byzantins en plusieurs batailles, dont une à Cannes (1041). À la même époque, dans le lointain diocèse de Coutances en Normandie, un petit hobereau, Tancrède de Hauteville, père de quinze enfants, dont douze fils, encourage plusieurs d’entre eux à partir tenter leur chance en Italie du Sud et en Sicile. Trois des fils, l’aîné, Guillaume (dit Brasde-Fer) avec ses deux frères Drogon (ou Dreu) et Onfroy, partent (1037) se mettre au service des Byzantins. Cependant, mécontents de leur solde, ils se retournent contre leurs employeurs et combattent désormais pour leur compte : les Byzantins sont chassés des Pouilles et Guillaume est nommé comte de Melfi en 1043. À sa mort (1046), son frère Drogon lui succéde, avant d’être assassiné (1051), alors qu’il s’apprête à combattre une coalition composée du Saint-Siège, du Saint-Empire romaingermanique, des Byzantins et de divers seigneurs lombards. Onfroy prend la suite de Drogon et affronte la coalition. Il en est victorieux à Civitale (1053) où il fait prisonnier le pape Léon IX. Dès 1045, d’autres fils de Tancrède de Hauteville étaient passés en Italie avec des renforts. Le plus jeune, Robert, dit Guiscard (l’avisé) (v.1020-1085), aide son frère Onfroy. C’est ainsi qu’il achève la conquête de la Calabre et reçoit du pape en 1056 le titre de duc de Pouille et de Calabre (ce qui ne signifie pas nécessairement que l’entente règne entre le Saint-Siège et ses turbulents voisins qui adoptent l’hérésie de Béranger de Tours hostile à la transsubstantiation). Mais l’Italie du Sud commence à constituer un «ensemble normand» : Richard, comte d’Aversa et maître de Capoue, est le beau-frère de Robert Guiscard, duc de Pouille, qui va dominer la Sicile après 1061 avec son jeune frère Roger, valeureux et subtil. Rappelons au passage que, dans la grande tradition de leurs ancêtres Varègues et Vikings, d’autres Normands établis en France cherchent fortune ailleurs, et que l’un d’eux, cinq ans plus tard (1066), ira simplement conquérir l’Angleterre… Les Normands des Pouilles font de leur mieux : ils occupent Tripoli (1146), Tunis, Kairouan, Bône, et atteignent Byzance (1149). Et surtout en Sicile, ils s’imposent avec Robert Guiscard qui, avec son cadet Roger Ier, dit Bosso, puis «le Grand Comte»(v.1031 – 1101) crée les bases d’un futur royaume. Simon Ier (1091-1105) succède à son Juin 2016 père Roger Ier, et ce sera Roger II «l’Avisé» (1095-1154) frère de Simon qui sera le fondateur du Royaume de Sicile (1130) unifiant pour la première fois les possessions normandes d’Italie. Il est surtout le promoteur d’un système politique original que lui suggère sans doute son caractère pragmatique face au peuplement multi-ethnique de la Sicile. Faisant la synthèse d’éléments féodaux normands, italo-lombards et arabes, Roger II s’inspire aussi de la monarchie et de l’administration byzantines, sans oublier les traditions fatimides qui prévalaient alors en Sicile. Mais cette construction si rapidement édifiée ne durera guère, et les signes avant-coureurs de sa ruine se manifestent rapidement. Le fils de Roger II, Guillaume Ier «le Mauvais» (v.11251166) hérite d’un royaume puissant mais y semble mal préparé et son règne s’annonce difficile : la plupart des barons normands contestent un pouvoir qu’ils jugent trop centralisé et détestent le grand-amiral (Émir des émirs) Maion de Bari, le personnage le plus puissant du royaume. Guillaume II «le Bon» (1154-1189) fils et successeur de Guillaume le Mauvais, élevé à l’orientale, très cultivé et polyglotte, semble avoir manqué d’autorité face aux barons normands. Par ailleurs, il croit trouver une garantie pour l’avenir en négociant une alliance de famille entre les rois normands et l’Empire romain-germanique : l’empereur Henri VI, fils de Frédéric de Hohenstaufen (Barberousse), épousera Constance, fille posthume de Roger II et dernière descendante des Hauteville, celle-ci héritant de la Sicile si son neveu Guillaume II meurt sans enfant. C’est ce qui advient en 1189, mais alors un cousin de Guillaume II, Tancrède (v.1138-1194), soutenu par la noblesse, se déclare prétendant au trône contre Constance (v.1154-1198), épouse depuis 1185 de l’empereur Henri VI. Couronné roi en 1190, Tancrède, face aux forces de l’empereur qui le traite en usurpateur, est fragilisé par la rébellion de ses vassaux révoltés, et il associe à son règne successivement ses deux fils : Roger III (v.1175-1193) qui mourra avant lui, et un enfant, Guillaume III (11851198), auquel Henri VI, devenu roi de Sicile, fera crever les yeux, y gagnant le surnom d’Henri le Cruel, avant de décéder lui-même en 1197. Frédéric Roger de Hohenstaufen. Fruit d’une union considérée alors comme surprenante du fait de l’âge de sa mère, Constance de Hauteville, qui avoue quarante ans (alors qu’on lui en attribue plus), le futur empereur Frédéric II naît le 26 décembre 1194 à Iesi (qu’il désignera en toute modestie dans une lettre comme «notre Bethléem»). En 1197, son père meurt, suivi en 1198 par sa mère, qui confie l’enfant au pape Innocent III, un des plus grands défenseurs du principe de l’autorité papale, et qui allait sans doute regretter toute sa vie d’avoir accepté la tutelle de celui qui, après avoir bénéficié d’une formation raffinée et pleinement assimilée, ne manquerait aucune occasion de s’affirmer en tant qu’héritier des prérogatives impériales. 1226 : Frédéric II a reçu les titres d’Empereur Auguste, de roi de Sicile et de Jérusalem. Il commence aussitôt à lutter contre le pape Honorius III, successeur d’Innocent III, en faisant édifier à Lucera, près de la frontière du SaintSiège, une cité où il installe une garnison de 20 000 Sarrazins raflés en Sicile et transportés sur le continent pour coloniser la Pouille, améliorer son agriculture et accessoirement surveiller le pape. En 1227, Grégoire IX excommunie Frédéric qui n’a pas tenu sa promesse, faite au jour de son sacre, de partir en croisade. Pour obtenir son pardon il part en Terre-Sainte en 1228-1229, mais après avoir conclu tous les arrangements nécessaires avec le sultan Malik al-Kamel avec qui des il avait tissé des liens d’amitié. Sa croisade, la sixième, fut brève et facile, voire confortable, puisqu’elle lui permit de découvrir avec enthousiasme les agréments de l’Orient, à commencer par la présence de tout un entourage féminin (que ses adversaires du clan pontifical présentèrent comme un harem). Tout se termina par quelques négociations, un simulacre de bataille et un accord, le traité de Jaffa qui lui permit d’entrer sans combattre dans Jérusalem où il se couronna lui-même roi. De retour en Italie, il allait retrouver tous les problèmes nés de l’hostilité du Saint-Siège pris en tenaille entre les territoires germaniques de l’Empire et l’Italie du Sud, ancien domaine des rois normands dont il était l’héritier légitime. À cette époque il exerce une activité administrative et culturelle débordante, faisant preuve d’une curiosité débordante et recevant à sa cour tous ses sujets quelle que fût leur religion, et tous les étrangers de passage, Page 19 pourvu qu’ils fussent dignes d’intérêt, selon les même principes que ceux qui avaient jadis inspiré son ancêtre le roi normand Roger II. Mais aussi Frédéric II crée l’Université de Naples où former les juristes qui seront à son service et, sans négliger la Sicile, Frédéric II se consacre à la bonification des campagnes de l’ancienne Apulie, multipliant méthodiquement les créations de villes et de villages, mais aussi de fermes-châteaux comme de petites résidences dont certaines destinées à lui permettre de pratiquer la chasse «à l’oiseau», un sujet sur lequel il rédigera un ouvrage qui fera alors autorité. Parmi ces résidences, il en est une, particulièrement remarquable, qui est son château de Castel del Monte [3ème jour]. Le règne de Frédéric II se terminera par une série d’échecs face au SaintSiège dans une rivalité qui se traduira par la division d’une partie de l’Allemagne et de l’Italie entre Guelfes (partisans du pape) et Gibelins (partisans de l’Empire). Dans ce jeu le pape disposait d’une autorité spirituelle qui pouvait dominer les esprits plus sûrement que la force matérielle ou le pouvoir politique d’un souverain, et surtout l’Eglise de Rome était à ce moment du MoyenAge la grande détentrice de richesse mobilière, ce qui correspondait le plus exactement aux besoins des marchands qui venaient de constituer les communes guelfes. On suscita des rivaux (le landgrave de Thuringe le comte Guillaume II de Hollande) à Frédéric et à ses successeurs immédiats. La guerre civile continua, indécise en Germanie comme en Italie. Mais c’est là, en Romagne, que Frédéric connut un grave mécompte en 1249, lorsqu’à la bataille de Fossalta les Guelfes de Bologne capturèrent son fils naturel Enzio, roi de Sardaigne, dont il essaya vainement d’obtenir la libération et qui devait mourir après vingttrois ans de captivité sans avoir jamais revu la Pouille («la Puglia piana…») qu’il chante dans un de ses poèmes de prison. Quant à Frédéric II, il mourut en 1250 en Sicile. Ensuite, après la défaite à Bénévent (1266) d’un autre fils de Frédéric II, Manfred, sous le coups de Charles d’Anjou, les Pouilles connaissent la domination des Angevins, puis des Aragonais, C’est au XIII-XIVème siècle qu’y est rapporté de Byzance le Colosse de Barletta : une des plus grandes sculptures de l’Antiquité, statue en bronze d’un empereur romain de la décadence (Valentinien ou Page 20 Honorius). Et puis, elles vont servir une fois de plus durant les Guerres d’Italie de champ de bataille où s’opposent Français et Espagnols. En 1503, le «grand capitaine», Consalve de Cordoue, est assiégé à Barletta [2ème jour] par les Français. La situation s’éternise et les esprits s’échauffent : le 13 février, un groupe de Français insulte des Italiens, dont le chef, Prospero Colonna, lance un défi au parti adverse qui l’accepte : 13 champions pour chaque camp, sur un champ de bataille entre Andria et Corato (là où Bayard avait vaincu en combat singulier un Espagnol, Alonso de Sotomayor). Le combat, connu dans l’histoire italienne sous le nom de Sfida di Barletta (Défi de Barletta), dura trois heures et se termina par la défaite du camp français. Deux Italiens en particulier s’y illustrèrent dont les noms sont encore connus : Ettore Fieramosca et Fanfulla de Lodi. Après Barletta, Cerignola vit une autre défaite française, les Espagnols maîtres de Naples et Gonsalve de Cordoue viceroi. C’était la fin de toute une époque. Les arts de l’Apulie. En matière d’art, l’Apulie se révèle un territoire d’une remarquable richesse, due aux sédiments historiques déposés par des peuples colonisateurs et occupants, guerriers, commerçants, moines, fonctionnaires ou aventuriers, sur une terre antique. Pendant dix siècles, après l’écroulement de l’empire romain, on voit une succession de ‘voyageurs’: moines basiliens, fonctionnaires grecs, nobles lombards, Sarrazins, Normands, Allemands, Angevins, Espagnols, Français, Provençaux, qui feraient presque oublier qu’il y a une population locale. On peut l’aborder, à la suite d’un guide irremplaçable, Emile BERTAUX, auteur d’une monumentale thèse sur l’Art de l’Italie méridionale de la fin de l’Empire romain à la Conquête de Charles d’Anjou, Paris, 1903, 835 p., qui nous suggère la progression suivante dont je lui laisse la responsabilité : 3 – Frédéric II et l’art impérial.(Castel del Monte) [3ème journée] ; 4 – La tradition populaire et l’’architecture des Trulli (Alberobello) [4ème journée] ; 5 – L’explosion du baroque de Lecce [6-7ème journées]. Pour le cas où vous pourriez vous arrêter à Canosa di Puglia, je souligne ces petits détails. C’est là, le seul monument consacré – hors de la Sicile – à la gloire des Hauteville : la chapelle funéraire de Bohémond, fils de Robert Guiscard et prince d’Antioche (†1111), adossée au mur Sud de la cathédrale. Cette construction est de conception résolument orientale (coupole sur plan carré), avec des inspirations locales (voûtes en demiberceau) et une minuscule abside. Sur les 5 faces visibles du tambour une inscription rappelle la gloire du prince de Syrie qui a «cinq fois vaincu la Grèce et fait retentir son nom jusque chez les Parthes». Sur les portes de bronze, une autre inscription débutant par un jeu de mots sur le nom du défunt, Boamundus, celui que boat mundus: « Unde boat mundus quanti fuerit Boamundus, Graecia testatur, Syria dinumerat […], Intrans cerne fores ; videas quid scribitur ; ores, Ut coelo detur Boamundus ibique locetur ». Enfin, on notera autour des têtes de lion sur le fermoir du panneau de gauche une décoration en caractères coufiques. Et puis, et puis … Et puis, pour le reste, VOUS VERREZ VOUS-MÊMES ! ET BONNE ROUTE … Gérard Luciani 1 – Le royaume de Dieu en Apulie : un Mont-Athos italien (Matera) [4ème journée] ; 2 – La splendeur normande : mais y a-t-il un art ‘normand’ des Pouilles ? [les basiliques des XI-XIIème siècles) [1ère journée : mais j’ai cru comprendre qu’il n’est pas prévu un arrêt à Canosa di Puglia… Cependant si vous pouvez négocier ? Cela vaut le coup.] La Promotion Violette Assemblée générale du 27 Janvier 2016 Hôtel du Département Hémicycle du Conseil départemental de l’Isère ******* E n préambule, le président Jean-Cyr Meurant adresse ses remerciements à M. le Président du Département, en la personne de son représentant M. Patrick CURTAUD, VicePrésident du Conseil départemental en charge de la Culture et du Patrimoine, pour la mise à disposition de l’hémicycle du Conseil départemental et de la salle Berlioz et remercie ce dernier de bien vouloir nous accueillir ce soir pour notre assemblée générale annuelle, en lui faisant part de notre grand plaisir d’être réunis en ce lieu et de faire connaissance avec une personnalité importante dont la mission correspond à notre propre vocation. M. le Vice-président CURTAUD, dans un exposé détaillé, présente à notre assemblée la politique départementale en matière de culture, puis nous souhaite une excellente soirée. Conformément à notre tradition, notre assemblée générale proprement dite a été précédée d’une conférence prononcée par un spécialiste reconnu. Nous avons eu l’honneur et le plaisir d’accueillir cette année M. Jean GUIBAL, Conservateur en chef du Patrimoine et directeur du Musée dauphinois, qui nous a entretenus des rapports entre un musée et son territoire, à partir de la présentation des collections, des expositions permanentes et temporaires..., en illustrant ce qu’est le patrimoine isérois, dauphinois et alpin (un patrimoine, non plutôt « des patrimoines », certains auxquels on pense spontanément, d’autres moins attendus). Ce fut l’occasion de découvrir le musée dauphinois -et aussi les autres musées du département - « de l’intérieur », de prendre conscience de l’importance des réseaux de musées et du rayonnement régional de « notre » musée dauphinois. La richesse des connaissances de M. Guibal, dont on ne peut bien sûr rendre compte en quelques lignes, mais aussi la hauteur de sa réflexion sur ce qu’est un musée aujourd’hui ne pouvaient que nous passionner. Notre conférencier ayant été chaudement applaudi et Nicole Laverdure et Jean-Cyr Meurant l’ayant prié d’accepter de petits souvenirs (dont un ensemble de DVD « Rien n’est plus vivant que le passé... » -notre « patriJuin 2016 moine » amopalien), vint le moment d’ouvrir l’assemblée générale. Adressant ses souhaits de bienvenue à cette assemblée générale aux participants, adhérents, sympathisants, amis de la section de l’Isère, J.C. Meurant leur présente ensuite ses vœux ainsi qu’à leurs familles, renouvelant les vœux qu’il a formulés pour tous dans le dernier édito de notre bulletin, « des souhaits conformes à la tradition du Nouvel An bien sûr, mais aussi marqués par les événements douloureux qui ont secoué notre pays dernièrement et qui font tellement craindre pour l’avenir de notre jeunesse, cette jeunesse qui est au cœur de nos préoccupations et dont certains éléments, comme on vient encore de le voir voici quelques jours encore, se fourvoient dramatiquement ». Il invite les participants à souhaiter avec force que ceux qui sont tentés par l’abîme se ressaisissent avant qu’il ne soit trop tard, que les valeurs humanistes qui sont les nôtres puissent leur être d’un secourable recours en affirmant leur appartenance à notre communauté nationale. Puis il présente les excuses de madame Dominique FIS, Inspectrice d’Académie-Directrice académique des Services de l’Education nationale de l’Isère, qui ne peut se joindre à nous ce soir et de mesdames Michèle CORJON et Solange GATELLET, ainsi que de Luc CHAMARD-BOIS et invite l’assemblée, comme à l’accoutumée, à honorer par quelques instants de silence la mémoire de nos amis disparus cette année 2015 : Mme Monique BURLET, professeur d’anglais en retraite, chevalier des Palmes académiques de la promotion de juillet 1996, Mme Thérèse DUTOIT, agent administratif en retraite, officier de la promotion de juillet 1999, Mme Marie-Rose CORRENOZ, directrice d’école primaire honoraire, officier de la promotion de juillet 1994, Mme Marie-Odile HENRY, épouse de notre adhérent et ami Bernard HENRY, M. Joseph ROSSI, cadre commercial retraité, chevalier 2002, M. Maxime PICARD, Principal-adjoint honoraire, commandeur 2002, M. Jean GUITTON, directeur d’école primaire honoraire, chevalier 1973, notre doyen d’âge (31.07.1917), M. MICHEL, époux de notre adhérente et amie Françoise MICHEL, M. Franck COURTOIS, président de l’association Patrimoine et Développement du Grand Grenoble, notre estimé partenaire, M. Jacques PITIOT, chef d’établissement honoraire, chevalier 1996. Il remercie l’assemblée pour cet hommage et rappelle l’ordre du jour : I. Modifications à apporter à notre règlement intérieur II. Présentation du rapport financier 2015 et du rapport du vérificateur III. Présentation du rapport d’activités 2015 IV. Présentation du rapport moral de fin de mandat V. Election du nouveau Bureau VI. Sous réserve de temps, évocation du programme d’activités 2016 (chaque membre a reçu les différentes fiches descriptives du programme du premier semestre ; rien n’est encore mis à l’étude pour le second semestre). I. LES MODIFICATIONS DU RÈGLEMENT INTÉRIEUR (au nombre de 4) - Article 2 (membres d’honneur) : Il convient d’apporter une précision, qui avait été omise dans la rédaction de notre règlement (J.C. Meurant prie l’assemblée de l’excuser de cet oubli) : « Ce titre peut être décerné par décision du Bureau à une personne extérieure à l’Association qui rend ou qui a rendu à la section de l’Isère des services signalés ». Sous réserve de parution dans les statuts nationaux et le règlement intérieur national à la date de l’assemblée générale de la section : - Article 3, §1 (nombre et durée des mandats des administrateurs de section, selon la résolution récente de l’assemblée générale en congrès) : Les membres sortants sont rééligibles (pour un mandat de même durée) une seule fois. Le président J.C. Meurant explique que cette question vient d’être mise à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale de l’AMOPA ainsi que chacun a pu le constater hier ou aujourd’hui en recevant le document joint à l’appel à cotisation 2016, et Page 21 du coup ne peut donc être traitée en aucun cas ce soir. A noter que, selon le document en question, seuls les présidents des sections seraient concernés et non plus tous les administrateurs -ce qui réjouit le président de la section de l’Isère, puisque qu’ainsi le vivier des futurs présidents pourrait être considérablement fortifié ! … (d’autres, membres du Bureau, considèrent que ce n’est pas vraiment une bonne nouvelle…). Affaire à suivre donc. Sous réserve également de parution dans les statuts nationaux et le règlement intérieur national à la date de l’assemblée générale de la section : - Article 3, §3 (remboursement des frais engagés par les membres du Bureau). Rien n’est paru à ce jour, mais il convient de toute façon de modifier ce qui figure dans notre règlement intérieur, puisque les changements sont entrés dans les faits depuis cette année. Le président J.C. Meurant rappelle la situation précédente et présente les modifications : - Président ou représentant du président : a) Participation aux réunions organisées par le président national (congrès biennal, assemblée générale annuelle, conférence des présidents, réunions ou manifestations diverses) : prise en charge, sur justificatifs transmis au trésorier de la section, de la part non remboursée par le siège national (50 % du tarif SNCF le plus avantageux) n’ouvrant pas droit à déduction fiscale personnelle et des frais annexes éventuels non remboursés ; b) Participation aux réunions de la Régionale : remboursement, sur justificatifs, des frais engagés ; c) Déplacements pour remises de prix, de médailles, représentation de l’AMOPA® de l’Isère à diverses cérémonies ou manifestations officielles : remboursement, sur justificatifs, des frais engagés. - Membres du Bureau : a) Participation au congrès et à l’assemblée générale : prise en charge, sur justificatifs transmis au trésorier de la section, de la part n’ouvrant pas droit à déduction fiscale personnelle a) b) Accompagnement du président : remboursement des frais éventuellement engagés b) c) Missions particulières confiées par le Bureau : remboursement, sur justificatifs, des frais engagés Page 22 2) Remboursement des frais engagés pour le compte de l’Association ou de la section (frais de nature diverse, hors déplacements), avec l’accord du président, ordonnateur des fonds de la section (article 12.3 des statuts) et sur avis favorable du trésorier consulté préalablement : remboursement, sur justificatifs, des frais engagés. L’AMOPA nationale et la section de l’Isère ne peuvent être que gagnantes avec ces nouvelles dispositions. - Article 4 (convocation de l’assemblée générale) : L’assemblée générale a lieu en principe chaque année le dernier ou avant-dernier mercredi du mois de janvier. La convocation, comportant l’ordre du jour, est adressée par lettre simple au moins quinze jours avant la réunion avec le bulletin du mois de décembre. J.C. Meurant rappelle notre situation de « fille », « filiale » d’une association nationale (donc non astreinte à aux obligations juridiques d’une association loi 1901 départementale) et fait valoir l’intérêt financier de ce changement de considération) ; il précise qu’on en reparlera plus loin. Aucune question ne se manifeste. L’assemblée est d’accord pour émettre un vote unique concernant ces différents articles. CONTRE : 0 ABSTENTIONS : 0 POUR : unanimité II. RAPPORT FINANCIER 2015 ET RAPPORT DU VERIFICATEUR DES COMPTES Jacques PRASSE, trésorier de la section, présente un diaporama constitué de plusieurs tableaux successifs exposant le bilan 2015 et décrivant en détail la situation financière de la section (voir documents joints). Après avoir commenté ces tableaux, il invite les participants à le questionner ; aucune intervention ne se manifestant, il appelle le vérificateur des comptes, Jean PASSARO, à présenter son propre rapport. Ce dernier, ayant décrit l’analyse à laquelle il s’est livré, appelle l’assemblée à adopter le rapport financier présenté par le trésorier et à lui donner quitus pour l’exercice 2015, en remerciant le Bureau pour son travail. CONTRE : 0 ABSTENTIONS : 0 POUR : unanimité Le président remercie le trésorier et le vérificateur pour leur remarquable travail ; ils sont vivement appalaudis par la salle. III. RAPPORT D’ACTIVITÉS 2015 André CLAUSSE, secrétaire de la section, présente en détail ce rapport, articulé en activités d’utilité publique, activités d’intérêt général, contribution au prestige des Palmes académiques. I. ACTIONS EDUCATIVES EN FAVEUR DE LA JEUNESSE 1. Les concours nationaux « Défense et Illustration de la langue française » : Comme toujours, toutes les écoles élémentaires (niveaux CM1 et CM2), tous les collèges, tous les lycées ont été sollicités (avec l’appui de Mme l’Inspectrice d’Académie) : si la participation est toujours à peu près stable pour les écoles, elle a été nettement moindre pour les collèges, et toujours nulle pour les lycées. Le jury a attribué 3 récompenses (2 prix et 1 accessit) -le détail des sujets et le palmarès ont été publiés dans le bulletin n°67 de juin dernier. 2. Le concours départemental d’arts visuels (réservé au cycle 3) : Le thème proposé «Les jouets » » -en lien avec le sujet du concours de langue française pour le niveau CM1-CM2 portant sur le jeu-, n’a pas attiré une forte participation (4 écoles, 5 classes) ; 6 prix et 3 accessits ont été décernés. Comme l’an dernier, le Bureau a décidé d’attribuer aux classes participantes un prix collectif (un chèque a donc été remis à chaque directeur) – le palmarès a également été publié dans le bulletin de juin. Les prix de ces concours (chèquescadeaux, livres et livrets « Racontemoi les Palmes académiques » et le diplôme) ont été remis lors de la cérémonie traditionnelle à la DSDEN, qui a fait l’objet d’un compte rendu dans le bulletin de décembre. Des diplômes ont été également décernés aux classes participantes. 3. Le nouveau concours départemental d’éloquence (pour les lycéens de Première et de Terminale), sur le thème de l’Europe de la culture : Nous avions prévu (espéré) de l’affluence, en organisant a priori un jury avec trois sous-commissions ; nous n’avons eu besoin que d’une seule formation… Mais nous avons eu le La Promotion Violette plaisir d’entendre une prestation particulièrement brillante et nous avons remis à la lauréate, élève de Terminale scientifique au lycée du Grésivaudan à Meylan, un prix d’une valeur de 250€ au cours de la cérémonie à la DSDEN (qui a fait l’objet d’un compte rendu dans le bulletin de décembre et d’un reportage sur notre site amopa38). 4. Le concours du meilleur projet de conception-réalisation de l’enseignement technique ou professionnel : Comme les trois années précédentes, la proposition a été envoyée aux établissements techniques et professionnels du Second degré, aux IUT et aux composantes « licences professionnelles » des universités ; malgré cette vaste publicité -et malgré le montant des prix (pour les CAP et Bac pro : 1er prix = 1500 € ; pour les BTS, DUT, licence professionnelle : 1er prix = 2500 €), nous n’avons, encore une fois, enregistré aucune participation. 5. Pour les autres prix nationaux : le concours de géographie SarraméaGriotier et le concours d’Histoire (destinés aux lycées) : Nous n’avons pas eu connaissance des candidatures, car ces concours sont gérés directement par le siège national (nous nous contentons de transmettre aux proviseurs les appels à participation et les documents). Nous avons eu le plaisir d’apprendre que le 4ème prix national de géographie avait été décerné à une élève du lycée l’Oiselet à Bourgoin : une cérémonie a donc été organisée, au cours de laquelle nous lui avons remis un chèque de 250€, au nom du président national). 6. Le concours « Nous l’Europe » : pour ce concours, notre rôle consiste, également, à transmettre les appels à participation et les documents ; il est simplement prévu que nous soyons informés par les établissements de leur intention de participer : nous n’avons (toujours) rien reçu. 7. Les bourses d’enseignement supérieur (jusqu’à 1000 € pour le niveau III, 1500 € pour le niveau II) : nous avons reçu en 2015 un seul dossier, émanant d’un étudiant de l’Institut d’études politiques de Grenoble (Université PierreMendès-France), préparant un master 2, dont le travail nécessite un séjour en Algérie. Nous lui avons accordé une aide de 250€, à laquelle l’AMOPA nationale a ajouté également 250€. 8. La Bourse Berthier (pour les élèves instrumentistes à cordes des conservaJuin 2016 toires à rayonnement régional, donc celui de Grenoble) : toujours aucune participation connue, malgré un échange poussé avec la direction du conservatoire. C’est dommage. 9. Le Prix Gaston-Vignot (arts graphiques) : un établissement (le lycée professionnel Argouges) est pour ainsi dire « abonné » aux récompenses mais cette année, 2 prix nationaux ont été attribués : un quatrième et un dixième prix ont été décernés par le jury national à deux élèves de bac pro. Une cérémonie a été organisée au lycée le 19 juin pour que le président de l’AMOPAIsère leur remette, au nom du président national, leur chèque (300 et 150€) en présence de toute l’équipe éducative. Un compte rendu figure dans le bulletin de décembre. II. ORGANISATION DE MANIFESTATIONS CULTURELLES André CLAUSSE précise qu’il s’agit d’un rappel rapide, puisque toutes les activités font l’objet d’une fiche descriptive détaillée et la plupart d’un compte rendu -dont nous remercions vivement les auteurs- publié dans le bulletin, voire d’un reportage vidéo sur notre site amopa38). En janvier : - « Journée pour la Chimie » à Jarrie, avec la visite de l’usine ARKEMA le matin, déjeuner au Château de Cornage à Vizille, et la visite du musée de la Chimie l’après-midi - Première des 6 conférences thématiques du cycle 2 au musée de Grenoble (portant sur la sculpture et la peinture) En février : 2ème conférence au musée de Grenoble En mars : - Visite de l’exposition « Confidences d’Outre-Tombe » au musée Dauphinois et au musée archéologique SaintLaurent - 3ème conférence au musée de Grenoble En avril : - Journée dans la Drôme, avec la visite de la Maison de la Céramique à Dieulefit, la visite de la Commanderie du Poët-Laval et la visite du musée du Protestantisme dauphinois - 4ème conférence au musée de Grenoble En mai : - Voyage de cinq jours à Venise - 5ème conférence au musée de Grenoble En juin : - 6ème et dernière conférence du cycle 2 au musée de Grenoble - Visite de l’exposition « De Picasso à Warhole » au musée de Grenoble - Journée « Confluences » à Lyon, avec croisière sur les deux fleuves, découverte du nouveau quartier et visite du musée des Confluences - Dîner traditionnel suivant la cérémonie de remise des diplômes à la préfecture En août : soirée musicale à La CôteSaint-André et dîner dans la cour du château Louis XI En septembre : Journée en Ardèche, avec la visite du musée de la Magnanerie à Lagorce et de la réplique de la grotte Chauvet à Vallon-Pont-d’Arc En octobre : voyage de 4 jours à Turin et Milan, avec la visite de nombreux sites, édifices, palais royaux, musées (dont le musée Egyptien, le musée du Cinéma, le musée de l’Automobile et une journée à l’Exposition Universelle En novembre : visite de l’exposition Georgia O’Keeffe, peintre américaine, au musée de Grenoble En décembre : journée traditionnelle au Clos-d’Or, avec en matinée une conférence ayant pour objet la création de la « caverne » du Pont-d’Arc, par le professeur Delannoy, le déjeuner au restaurant du lycée le midi et un divertissement littéraire et musical en compagnie de Mme de Sévigné et de sa fille l’après-midi). III. CONTRIBUTION AU RAYONNEMENT ET AU CRÉDIT DE L’ORDRE DES PALMES ACADÉMIQUES - 14 janvier : réception de Nouvel An à la Direction des Services départementaux de l’Education nationale, avec invitation de Mme l’Inspectrice d’Académie, Directrice académique, de ses adjoints et de ses collaborateurs - 12 mars : participation à la conférence des présidents à Paris - 22-23-24 mai : participation au congrès international de l’AMOPA -10 juin : organisation en totalité de la cérémonie de remise des prix des concours de langue française, d’éloquence et d’arts visuels à la Direction des Services départementaux de l’Education nationale - 19 juin : remise de prix nationaux d’arts graphiques au lycée Argouges - 24 juin : participation à la cérémonie annuelle de remise des diplômes en préfecture ; remise de diplômes aux côtés de M. le Préfet et de Mme l’Inspectrice d’Académie, Directrice acaPage 23 démique, représentant également M. le Recteur ; présentation de l’AMOPA et de sa section de l’Isère, félicitations aux nouveaux nommés et promus de l’année et invitation à nous rejoindre. Organisation d’un dîner avec les récipiendaires des deux promotions annuelles et les membres de la section - 12 octobre : présence à la réunion organisée par Mme le Recteur sur la Réserve citoyenne de l’Académie, en qualité d’association ambassadrice - 2 novembre : audience chez M. le Président du Département, pour lui présenter l’AMOPA et notre section (et solliciter la reconduction de la subvention allouée précédemment) - 24-25 novembre : participation à la seconde conférence des présidents à Paris - 11 décembre : cérémonie de remise du 4ème prix national de géographie au lycée de Bourgoin (repoussée au 15 janvier) Ajoutons notre présence - aux diverses cérémonies auxquelles l’AMOPA de l’Isère est invitée - et bien sûr à diverses cérémonies touchant nos adhérents. - Enfin, dans le domaine de la communication, rappelons : 1. La publication de nos deux bulletins semestriels « La Promotion violette », d’un contenu aussi riche que possible, envoyés non seulement aux adhérents, sympathisants et amis, mais aussi aux « détenteurs de pouvoir et d’influence » dans le département et au-delà. 2. Notre site internet www.amopa38. fr , grâce à Jacques Prasse. J.C. Meurant remercie vivement André CLAUSSE de cet exposé qui rappelle et met en relief toutes nos activités. Il fait part à l’assemblée des agréables messages de félicitations qu’il a reçus (particulièrement en ce moment de vœux) consécutivement à l’envoi de notre bulletin de décembre (qui comportait cette fois-ci 36 pages plus toutes les annexes) ; il adresse ses remerciements à tous ceux qui apportent leur concours à la réalisation de ce beau bulletin. IV. Le moment est maintenant venu, dit le président de notre section, pour présenter le RAPPORT MORAL DE CETTE ANNÉE 2015, QUI SERA EN MÊME TEMPS LE RAPPORT MORAL DE FIN DE MANDAT, puisque comme chacun sait (il a beaucoup insisté sur ce changePage 24 ment fondamental) notre bureau est parvenu au terme de son action. Ces quatre années ont été marquées par des changements importants, induits par la réforme des statuts : bien plus que d’un « toilettage » comme envisagé initialement, il s’est agi d’une refonte en profondeur, dictée par la nécessité de répondre aux critères qui justifient notre label d’utilité publique. L’élaboration du Livre Blanc de la section de l’Isère et de son règlement intérieur, qui ont demandé tous deux un temps et un travail considérables, ont été les fondations de notre nouvel édifice. Tous les adhérents ont été sensibilisés à ce changement d’orientation (qualifié au niveau national d’ « impératif absolu », de « réorientation complète », comme on s’en souvient), plutôt, pour ce qui nous concerne et pour rassurer d’éventuelles inquiétudes, de nouvelle et seconde orientation car il n’était pas question que l’une (les ARUP) se fasse au détriment de l’autre (les AIG). J.C. Meurant rappelle qu’il a donc choisi de parler de « balance égale », d’évolution et non de révolution, et cela a été avéré dans les faits, concrètement, pense-t-il. Mais la volonté manifestée par les nouvelles instances nationales a été respectée. Pour rappel : le volume horaire de notre bénévolat au sein de la section, tel qu’il l’a alors calculé alors avec autant de précision que possible et en toute clarté, est pratiquement l’équivalent d’un emploi à temps plein (à raison de 35h/semaine avec 5 semaines de congés payés (« mais on ne va pas se plaindre, puisque quand on est bénévole, c’est qu’on aime, et donc on ne compte pas! »). Dans la foulée du Livre Blanc, il y avait la recherche d’une reconnaissance plus large, sur laquelle on reviendra plus loin. Un autre gros travail a donc été l’élaboration de notre règlement intérieur, conjuguant les dispositions du Règlement intérieur national (dont il fallait décliner fidèlement les orientations) et notre affirmation d’espace d’autonomie -raisonnable. J.C. Meurant donne deux exemples de ce qui lui semble être une bonne illustration d’une possible dualité, à partir des modifications apportées aujourd’hui à notre règlement inté- rieur (dispositions financières et statut juridique). Les deux montrent que finalement nous ne pouvons échapper à notre « filiation ». Après le changement d’orientation, la recherche de « reconnaissance ». Les liens nouveaux avec les universités (concrétisés par nos participations aux cérémonies et par l’augmentation considérable -surtout en qualité- des dossiers de demandes de bourses -qui n’est pas sans nous amener à nous interroger sérieusement sur nos possibilités financières futures) sont pour nous des marqueurs importants de notre action et de notre reconnaissance. Cette reconnaissance est également acquise (au-delà d’une reconnaissance de circonstance, par exemple au moment de la remise des diplômes), comme on a pu le voir au fil des bulletins, par le Recteur de l’Académie, par l’Inspecteur d’Académie de notre département, au quotidien. Elle a aussi été actée par le rectorat par notre désignation comme ambassadeur de la Réserve citoyenne de l’Education nationale. Si l’on regarde maintenant les choses de près pour essayer de mesurer notre « impact » sur les nouveaux : certes nous avons peine à maintenir l’effectif de la section du fait des cotisations non réglées, mais nous y arrivons ; en 2013 nous avons eu, du fait du problème de la communication des adresses, 13 adhésions ; en 2014, sûrement pour la même raison, 15 ; en 2015, nous en avons eu 25. Nous n’avions pas atteint ce nombre depuis plusieurs années et l’on peut espérer qu’avec la reconnaissance qui nous est très clairement consentie, des combats difficiles sont maintenant derrière nous. « Maintenant, que voulions-nous améliorer, quelles ont été nos nouvelles ambitions ? » 1. Les activités reconnues d’utilité publique (ARUP) Pour tous les concours qui existaient, les choses n’ont pas vraiment changé : il y a du satisfaisant et du moins satisfaisant (les lycées sont toujours aux abonnés absents, sauf pour le Prix Vignot et pour notre nouveau concours d’éloquence). Mais nous persistons dans les efforts de sensibilisation. Pour la bourse BERTHIER, malgré nos liens nouveaux avec le Conservatoire régional de Grenoble, nous n’avons pas vu venir de candidatures. La Promotion Violette Pour ce qui était à l’état de renaissance en 2012 (les bourses universitaires) : nous avons fait véritablement un grand pas en avant, en rapport avec les liens établis avec les cabinets, secrétariats, vice-présidences et directions des relations internationales, vice-présidents Vie étudiante… etc). Pour ce qui est nouveau : nous avons donc institué un nouveau concours départemental, le concours d’éloquence pour les lycéens de 1ère et de Terminale. 2. Les activités d’intérêt général (AIG) Nous avons essayé de proposer le maximum d’activités susceptibles d’intéresser nos adhérents (nous en avons eu la liste tout-à-l’heure ; ce qu’elle ne montre pas, c’est le constant succès qu’elles ont rencontré -qui nous oblige à refuser des inscriptions, à notre grand regret). J.C. Meurant espère que nos bulletins rendent compte de tout cela. Il remercie au passage nos rédacteurs. Avant de conclure, il adresse ses remerciements réitérés à Alain Mistral pour son aide précieuse pendant toutes ces années. Nous espérons que grâce à l’accueil extrêmement favorable que nous a réservé le nouveau président du Département le 2 novembre, nous pourrons non seulement poursuivre, mais développer nos actions en faveur de la jeunesse. Le président sortant termine son exposé en disant que son équipe et lui ont été, pendant ces quatre années, fidèles à ce qui se faisait auparavant dans notre section de l’Isère, fidèles aussi à la nouvelle équipe dirigeante de l’AMOPA élue en 2012 dont il « salue avec respect tout l’énorme travail accompli depuis », qui, dit-il (en souriant !) « nous a donc amenés à « travailler » aussi, l’a fait quelquefois « râler devant tout le boulot demandé par Paris » -mais il se décrit lui-même comme un « rouspéteur incorrigible ») mais toujours dans l’affectueuse loyauté à l’égard de notre président Michel Berthet ». Il remercie l’assemblée de sa bienveillante écoute, il est temps de passer au vote de ce rapport d’activités et de ce rapport moral : CONTRE : 0 ABSTENTIONS : 0 POUR : unanimité Juin 2016 V. ELECTION DU NOUVEAU BUREAU J.C. Meurant exprime le souhait d’adresser d’abord tous nos remerciements aux membres sortants : André CLAUSSE, président d’honneur de la section depuis longtemps, qui a accepté avec beaucoup de gentillesse d’être notre secrétaire Luc CHAMARD, l’Homme du Festival Berlioz, depuis très très longtemps Gisèle RONDEAU, qui a coordonné pendant de nombreuses années le comité de lecture des concours de langue française Mireille VINOT, notre Dame des Musées Marie-Thérèse GUILLAUD, secrétaireadjointe. Ils ont « donné » pendant de très nombreuses années, ils ont mérité cette seconde retraite ! Il leur exprime la gratitude de notre section et aussi la sienne, personnelle, pour avoir été à ses côtés pendant ces quatre années, il témoigne de toute l’amitié qui lie, qui unit les membres à l’intérieur de notre Bureau, où règnent une atmosphère chaleureuse, un climat de transparence, de partage, de solidarité, pour tout dire, oui, de sincère amitié. Il invite l’assistance à se lever avec lui pour les applaudir chaleureusement. Ils sont très longuement, très chaudement applaudis par tous les participants debout. Le président sortant souhaite aussi adresser ses remerciements aux autres membres du Bureau pour tout le travail accompli et particulièrement à notre équipe d’animation des activités : Nicole LAVERDURE, Josiane POURREAU, Danièle ROUMIGNAC et Jacques PRASSE qui, en plus de son travail lié à sa fonction de trésorier, organise les grands voyages, aide le Président dans de nombreux domaines et gère de A à Z notre magnifique site internet, sont également chaleureusement applaudis. Jacques PRASSE Danièle ROUMIGNAC Gisèle BOUZON-DURAND manifeste alors sa volonté de rejoindre, « par amitié » (car ses occupations ailleurs sont déjà prenantes) ce groupe, ayant jusque-là espéré que d’autres candidatures se présenteraient. Bien sûr notre adhérente et amie est vivement remerciée. Le président répond à quelques questions concernant la composition du futur Bureau, puis soumet cette liste de neuf personnes au vote de l’assemblée : CONTRE : 0 ABSTENTIONS : 1 POUR : unanimité moins une voix Le président sortant présente ses remerciements à l’assemblée pour ce vote. Les fonctions au sein du Bureau feront donc l’objet d’une élection interne dans les meilleurs délais. VI. PROGRAMME D’ACTIVITES 2016 Chacun connaît le programme du premier semestre 2016, et la suite n’a pas encore été envisagée. Le trésorier et le président sortants font part de quelques observations et conseils relatifs à « l’assistance » et à « l’assurance » des participants à nos voyages. Il n’y a pas de question. Après une information finale concernant les candidats boursiers universitaires de cette année 2015-2016 et l’espoir que nous pouvons avoir pour l’avenir, le président sortant adresse donc ses remerciements à tous les participants, adhérents, sympathisants, amis de la section pour leur présence et leur fidélité et les invite à rejoindre le buffet dressé dans la salle voisine -où va régner la plus joyeuse, la plus amicale des ambiances. ULTIME APPEL AUX CANDIDATURES : J.C. Meurant présente la liste 20162020 (pour un Bureau élargi) Dominique ABRY (ex-membre associé) Gilbert COTTIN (membre associé) Nicole LAVERDURE Gérard LUCIANI Jean-Cyr MEURANT Josiane POURREAU Page 25 Page 26 La Promotion Violette In memoriam à René-Guy CABANEL René-Guy CABANEL, l’un de nos anciens et fidèles adhérents, vient de nous quitter. Nombreux ont été ceux qui ont rendu hommage à cet homme dont les qualités exceptionnelles et rarement réunies faisaient, en politique, un modèle à bien des égards dans un monde où le respect des autres, l’intégrité ne sont pas toujours des valeurs dominantes ou réellement mises en pratique. René-Guy CABANEL devient docteur en médecine en 1953 ; spécialisé en rhumatologie, il est reçu à l’agrégation en 1961, est nommé professeur à la faculté de médecine de Grenoble deux ans plus tard. Il en sera le doyen de 1969 à 1974. A ce moment commence sa carrière d’homme politique : député de 1973 à 1981, conseiller général et régional entre 1982 et 2008, sénateur de 1983 à 2001, maire de Meylan de 1983 à 1995. Dans ces deux mondes qui finalement auront été les siens, le monde de la médecine universitaire, le monde de la politique, il jouira de la considération générale due à une personnalité d’envergure et du respect également dû à un homme de dialogue et de consensus. Le professeur CABANEL sera promu commandeur dans l’ordre de la Légion d’Honneur en juillet 2011. Pour nous, ceux qui ont eu la chance de le connaître, dans le cadre de l’AMOPA ou de diverses fonctions notamment au service de la jeunesse, ou ailleurs, il demeurera un homme d’un abord charmant, raffiné, doté d’une culture impressionnante mais d’une modestie exemplaire et extraordinairement attentif aux autres, un vrai humaniste. Rien d’étonnant à ce que cet « honnête homme » ait été nommé chevalier dans notre ordre des Palmes académiques en 1971, puis promu officier en 2007. JCM Juin 2016 Page 27 In memoriam à Pierre JOURDAN Pierre JOURDAN nous a récemment quittés et lors de la cérémonie d’adieu, le 20 avril, nous avons pu nous rappeler, en écoutant l’hommage rendu par sa nièce, qu’il était de ceux qui avaient « fait bouger les choses » dans le monde éducatif -voici maintenant bientôt cinquante ans, mais sa contribution est toujours bien vivante et d’actualité. Quel « CPE » d’aujourd’hui en effet ne connaît pas « Délégué-Flash », un ouvrage connu jusqu’au Japon ? Ces mots « Vie scolaire », « Apprentissage de la citoyenneté », « Formation des délégués de classe », quand les a-t-on entendus pour la première fois ? Souvenons-nous : il y a un demi-siècle, régnaient encore (« sévissaient », dit-on…-la littérature fourmille de portraits de « surgés » de l’Ancien Régime) dans les lycées, sous l’autorité des proviseurs et principaux, les « surveillants généraux », gardiens en tout cas du Temple voué à la Discipline1 ; nous les avions connus lycéens, nous les retrouvions collègues. Qui parlait alors d’animation socio-éducative ? (quoique oui, cette dimension existât bien souvent, même sans être institutionnellement établie comme elle le fut par les textes promulgués en 1968 par le gouvernement Edgar Faure et notamment celui relatif aux « FSE », les foyers socio-éducatifs : qu’on pense à tous les « clubs » nés de l’exemple des associations d’éducation populaire dans les internats). Il fallut attendre la création du corps des conseillers d’éducation et de celui des conseillers principaux d’éducation pour la voir officiellement reconnue et prendre forme, sous leur égide. Mais, avant ce fameux « tournant » de mai 68, il y avait, dans l’Académie de Grenoble, précisément au lycée Mounier, un professeur (agrégé de Lettres), qui était passionné par ces questions (il avait même été à l’origine de la création, dans son établissement, d’un mini-parlement lycéen). Ce professeur s’appelait Pierre JOURDAN. C’est donc à lui que de nombreuses générations d’élèves2 doivent de s’être initiés à « la démocratie lycéenne », bien avant les « CVL » (conseils des délégués pour la vie lycéenne), « MDL » (Maisons des lycéens)... et d’avoir pu être de bons « délégués de classe », voire d’efficaces représentants dans les différentes instances de leur établissement. Ce professeur, nommé chevalier dans l’ordre des Palmes académiques en 1968, puis promu officier en 1973, enfin commandeur en 1992, était aussi un fidèle Amopalien, dont nous saluons avec respect la mémoire. JCM 1) Se souvient-on des « chefs de classe » ?… « C’était avant » ! 2) D’élèves, bien sûr, mais aussi de cohortes d’aspirants CPE et Personnels de direction, qui avaient dans leur poche -pardon leur petite bibliothèque- un Délégué-Flash pour se présenter avec de solides références aux épreuves orales de ces deux concours (constat personnel fait maintes fois pendant de nombreuses années à ces deux jurys nationaux). Hommage à Michel PIGUET Le 15 mars nous étions nombreux : Amopaliens, collègues et amis à rendre un dernier hommage à Michel PIGUET, ancien proviseur-adjoint du lycée Stendhal. Michel est né à Remiremont dans une famille profondément attachée à l’école laïque et républicaine. De mutation en mutation, son père, professeur de physique, obtient sa nomination pour le lycée Claude-Bernard de Villefranche-sur-Saône. Cette nomination comblait la famille Piguet car elle les rapprochait de Cortevaix, berceau de la famille. Le bac en poche, le jeune Michel poursuit ses études à la Faculté de Lyon et en 1962 part faire son service militaire en Algérie à Reggane. Il en profite pour se préparer au CAPES de physique. Il est reçu et affecté à l’école normale d’institutrices de Lons-le-Saunier. En 1963, il épouse Marie-Thérèse, professeur de Lettres. Suite à la fermeture programmée des écoles normales, il postule au poste de censeur et sera nommé à Saint-Cyrl’Ecole. En 1974, il rejoint le lycée Stendhal. Discret voire secret, Michel ne se mettait jamais en avant. Exigeant, il aimait le travail bien fait. Il fallait qu’un emploi du temps soit équilibré, respectant les vœux des professeurs et les impératifs des élèves. La porte de son bureau était toujours ouverte. Il aimait le camping, le ski et la randonnée qu’il pratiquait en famille, apportant une attention particulière à l’éducation de ses deux fils. Michel s’était investi dans le club d’escrime de Grenoble. Il assuma son engagement avec compétence et sérieux. En 1992, volontaire pour les J.O. d’Albertville, il fut chargé de convoyer les personnalités officielles pendant la durée des Jeux : un de ses plus beaux souvenirs ! Il se rendait aux réunions de l’AMOPA chaque fois que son emploi du temps le lui permettait, il appréciait ce moment, convivial et amical. Merci Michel pour l’exemple que tu nous a donné. Page 28 George SIMONI La Promotion Violette CONCOURS « DÉFENSE ET ILLUSTRATION DE LA LANGUE FRANÇAISE » Option « Jeune nouvelle » - Classe de 3ème - Collège Raymond Guelen - 38680 Pont-en-Royans Premier Prix national : Jocelyn ROZAND Un soir de novembre J e m’appelle Simon, je travaille dans un bureau d’administration à Paris. Ce soir de novembre, il faisait inhabituellement chaud. Une sacoche à la main, je me dirigeais d’un pas sûr jusqu’à ma voiture. Là, j’ai attrapé mon téléphone et appelé Camille. C’est ma petite amie, nous ne vivons pas ensemble car nos universités sont à l’opposé l’une de l’autre, on ne se voyait pas prendre les transports en commun des heures chaque jour. Elle a décroché, j’ai dit : - Je vais réserver pour une petite soirée en amoureux ce soir au restaurant. Qu’en dis-tu ? Elle m’a répondu : - Avec plaisir, tu viens me chercher ? - Je viens à huit heures. Puis j’ai raccroché et remis mon téléphone portable dans ma poche. » A ces derniers mots, Simon arrêta brusquement son récit. Je vis que c’était très dur pour lui de me raconter tout cela. Je coupai le micro quelques minutes. Après quelques instants, il reprit son histoire avec beaucoup plus d’émotion dans la voix. « J’ai pris le volant et me suis dirigé vers mon appartement. C’était un logement plutôt petit mais bien décoré, avec une vue magnifique sur l’Arc de triomphe. J’ai pris une douche, me suis habillé avec soin, je me suis mis un peu de parfum. Puis, j’ai quitté mon appartement, je suis remonté dans ma voiture et parti chez Camille. Elle m’attendait sur le trottoir où des centaines de personnes passaient chaque jour. Camille est étudiante en école de commerce depuis quatre ans. Une jeune femme simple dans une vie des plus normales mais avec un petit grain de folie incomparable ; en partant d’une seule phrase, elle peut se lancer dans des délires complètement fous ; et puis ses yeux bleus si incroyables qu’on les remarquait tout de suite. J’ai arrêté le moteur, je suis descendu. J’ai embrassé Camille, l’ai prise par la main, lui ai ouvert la portière sans un mot. Puis j’ai démarré, et Camille s’est exclamé : - Tu ne m’as même pas dit bonjour, tu es bien brusque, Simon. - On aurait perdu du temps si on avait discuté là-bas, je suis trop impatient d’être au restaurant avec toi et j’ai tellement faim. Maintenant, je peux te dire bonjour ; comment s’est passé ton examen ? lui ai-je répondu. On a discuté de nos journées, écoutant les quelques chansons qui vagabondaient de temps à autre sur le poste de radio. Quand nous sommes arrivés au petit restaurant que j’avais choisi, je la tenais par la main et nous marchions en direction d’une douce senteur, celle des bons plats qui nous attendaient. Cette année, il faisait anormalement chaud pour un mois de novembre et des personnes buvaient Juin 2016 des apéritifs ou mangeaient aux terrasses des bars et des restaurants. On entendait des gens rire de toutes parts, un musicien jouait de la guitare et le public autour de lui savourait sa musique, de temps à autre on entendait des voitures passer, un scooter ou bien une moto... Des dizaines de serveurs prenaient les commandes, une statue vivante était au milieu de la rue, des personnes restaient à côté d’elle et quand elles lui donnaient une pièce, l’artiste leur donnait un petit bonbon. C’était une soirée parfaite : un dîner en amoureux, un vent agréable, tout était bien. Nous nous sommes installés à la table qu’un aimable serveur nous a indiquée. Nous avons regardé très attentivement nos cartes où des dizaines de plats nous faisaient saliver. Après avoir réfléchi quelques minutes, j’ai décidé de prendre une assiette de nems et des nouilles, et Camille une salade chinoise et un boeuf aux cinq épices. Le serveur a pris nos commandes et est reparti comme une flèche vers la cuisine. En attendant nos assiettes, je me suis levé et agenouillé près de Camille et lui ai dit: - Camille Audero, cela fait bientôt huit ans que nous sommes amoureux l’un de l’autre et je ne veux plus vivre sans que tu saches à quel point je t’aime. Tu es une fille extraordinaire. Veux-tu m’épouser ? Quand elle a entendu ces mots, des larmes ont coulé de ses yeux et elle a dit : - Oui, je le veux... Et moi aussi, j’ai quelque chose à t’annoncer... À ce moment-là, une voiture a débarqué sur l’avenue et des hommes cagoulés ont baissé les vitres. Ils ont tiré. Une balle a frappé Camille et elle s’est écroulée. Moi, j’ai plongé au sol, mais une balle m’a atteint à l’épaule ; je hurlais. Les balles sifflaient sur l’avenue, il y avait des tas de corps inanimés, sur les chaises, qui glissaient à terre. La vitrine du restaurant était brisée et le symbole du « Petit Cambodge » ne s’illuminait plus. Des gens criaient et les tireurs ne réduisaient pas la cadence de tir, ils rechargeaient puis tiraient sur les clients qui essayaient de se cacher sous les tables. On entendit la voiture partir et ensuite, un silence, un silence macabre. L’avenue entière était silencieuse. Peu après, des bruits de sirènes se firent entendre au loin. Une voix s’éleva et cria : - C’est fini, les secours arrivent, trouvez les blessés et aidez-les ! Je me suis levé malgré la douleur qui m’accablait à l’épaule. Des corps inanimés gisaient sur les terrasses ; des blessés hurlaient. » Simon s’arrêta de nouveau dans son récit. Et sortit. Il revint cinq minutes plus tard et reprit. J’enregistrais à nouveau. « Les sirènes retentissaient sur l’avenue. Les personnes sauves portaient secours aux blessées. J’étais resté à côté de Camille ; en pleurant, j’écoutais son coeur, l’oreille sur sa poitrine, mais rien. Une tache de sang commençait à apparaître sur sa chemise, une balle avait touché son coeur - il ne battait plus. Je pleure, je lui fais un massage cardiaque, comme je le peux... Au bout d’un moment, une main me saisit à l’épaule, puis deux. C’est un ambulancier. Il me prend sous les bras et à ce moment je tombe évanoui. Puis d’autres ambulanciers arrivent, on me met sur un brancard et on m’emmène dans une ambulance. J’ai été conduit à l’hôpital le plus proche et je me suis réveillé le lendemain. Mon épaule était bandée. J’avais très mal mais les médicaments que les médecins me donnaient atténuaient la douleur. Dans mes pensées, tout se bouscule : qu’est-il arrivé à Camille ? Est-elle vivante ? Est-elle blessée ? Sa famille est-elle auprès d’elle ? Beaucoup de questions, mais aucune réponse. Une semaine plus tard, je sortais de l’hôpital et décidais de chercher Camille, j’appelais sa famille - en vain. Avec les derniers souvenirs que j’avais, j’ai décidé de commencer à la chercher dans tous les hôpitaux. Lorsque le père de Camille m’a enfin appelé, il m’a dit de les rejoindre à l’hôpital Sainte-Périne. Je suis arrivé là-bas ; ils étaient dans le hall ; je me suis dirigé vers eux. J’étais nerveux, je ne savais pas ce qu’ils allaient me dire, une mauvaise ou une bonne nouvelle. Il y avait ses parents et son frère. Sa mère avait la tête basse et un regard vide. Aucune expression sur le visage. Son frère était devant l’écran de son téléphone, l’air absent. - Simon... Son père avait la voix nouée, s’efforçait de rester digne. - Camille est morte, elle a reçu une balle dans le coeur. Je n’ai pas réussi à t’appeler avant. A ces paroles, j’ai serré les poings. Mon alter-ego est morte, ma moitié s‘est envolée. C’est un immense choc, j’allais me marier et en une seconde, une balle a détruit un amour profond de huit ans. La famille de Camille me consolait du mieux qu’elle pouvait ; l’enterrement était le jour suivant. Le lendemain, je me rendais au cimetière avec eux. Un cercueil en bois clair gisait près d’un trou profond. Ils l’ont descendu dans cette fosse qui engloutissait mon amour. Comme les autres j’ai pris une rose et l’ai jetée sur le cercueil, sans un mot, puis je suis parti, sans un mot. J’ai mis des jours avant de me remettre à parler. Trois semaines plus tard, avec la famille de Camille, je suis allé vider son appartement pour le débarrasser de tous ces souvenirs et les mettre dans un grenier. Tout le monde était au travail et j’enlevais les affaires dans la salle de bain, lorsque j’ai trouvé un test de grossesse. Les mots qu’elle avait prononcés ce soir-là me sont revenus. Je suis resté muet. Elle était enceinte. J’ai éteint le micro. Page 29 CONCOURS « DÉFENSE ET ILLUSTRATION DE LA LANGUE FRANÇAISE » Option « Jeune nouvelle » - Classe de 4èmeA - Collège Le Chamandier - 38610 GIERES 3ème accessit national : Eric MASCLET Maux des sens Nouvelle fantastique C her journal, cela va bientôt faire un an que je consigne tous mes faits en ces pages. Mais à partir d’aujourd’hui, je ne t’écrirai plus que pour mettre de l’ordre dans mes idées. Voilà maintenant quelques années que Claudia se confie à moi, et ces derniers temps, ses propos m’ont fortement intriguée. Je vais coucher en ces lignes des événements qui pourraient nous faire passer pour des folles, Claudia et moi. C’est en partie pour cette raison que je ne daterai plus mes textes, comme cela, si quelqu’un venait à découvrir ce carnet, il ne pourrait pas savoir si les épisodes datent de nos six ans, de nos trente ans ou s’ils sont contemporains de l’année où il les lit. De plus, je pourrais très bien écrire pendant longtemps sur le même sujet, d’où l’inutilité des dates. Bon, je me lance ! omme tu le sais, Claudia, dont je suis la confidente, est quelqu’un de placide, maîtresse de ses nerfs et qui n’est pas du style à s’alarmer pour un rien. C’est ce qui, en quelque sorte, m’a mis la puce à l’oreille. Il y a environ une semaine, alors que nous rentrions ensemble, elle me dit qu’elle ne voyait plus clairement les lignes du tableau et me demanda si à l’avenir elle pouvait copier les cours en s’aidant de mon cahier. Je lui répondis que oui et nous en restâmes là. Mais cet après-midi, elle m’a déclaré qu’elle ne distinguait plus le tableau alors que notre enseignant nous avait fait passer devant. J’ai lu dans ses yeux le doute. Ses sourcils auraient voulu former un point d’interrogation qu’ils ne s’y seraient pas mieux pris ! Son visage paraissait tendu... En fait, elle ne voulait pas en parler à ses parents et m’assurait que ce n’était que de la fatigue ! J’ai insisté, je ne voulais pas qu’elle reste toute seule avec ça. Je crois avoir réussi à la convaincre puisque j’étais avec elle, que son père la questionnait, que sa mère enchaînait numéro sur numéro pour trouver d’urgence un rendez-vous chez un ophtalmologue et que l’odeur du thé à la vanille mélangé au bois qui brûlait dans l’âtre de la cheminée m’apaisait, me berçait et me rassurait. Ses parents ont fini par trouver un médecin ! J’ai prévenu les miens et j’ai sauté dans la voiture de Claudia. Le trajet fut court et je n’en garde qu’un vague souvenir de moteur à plein régime. Sauf que chez l’ophtalmologue, nous nous sommes alarmés : elle ne voyait le méde- Page 30 cin que sous une vague forme de spectre pâle! Même avec des lunettes ou toutes sortes d’objet correcteur de vue, elle ne pouvait apercevoir aucun signe ! Pas même la montgolfière du test pour les enfants, rien ! Le docteur ne comprenait pas ; il a appelé ses collègues, ouvert tous ses livres de médecine, et s’est penché sur son bureau, les doigts sur les tempes. Ensuite nous avons attendu : un tour d’aiguille, une feuille tournée, deux tours d’aiguille, une mouche qui vole, quinze tours d’aiguilles... Les couleurs blanches du cabinet me faisaient mal à la tête et aux yeux. Je demandai à sortir et Claudia m’accompagna. Une fois que la brise eut fini de me sortir de ma torpeur, je me retournai vers elle et la pris dans mes bras. Que se passait-il ? Il était certain qu’elle n’était pas aveugle car elle pouvait encore voir les personnes qui avaient de l’importance pour elle. Mais comment se faisait-il qu’elle ne voyait pas le reste ? Plus tard, il se produisit un autre événement qui impliquait sa vision et qui aurait pu passer pour un gag mais qui ne réussit qu’à me faire de peine pour Claudia. C’était alors que nous rentrions de nos cours, nos carapaces de sac sur le dos, un vent chaud dans la figure et en parlant du temps. Prises dans notre discussion, nous ne vîmes pas l’imposante personne en costume-cravate qui se pressait, la tête baissée. On aurait pu penser qu’elle voulait forcer les aiguilles de sa montre à reculer tellement elle les observait avec insistance ! Claudia le percuta. Elle chercha à contourner un objet qui dans sa tête devait être un lampadaire sauf que ce n’était pas tout à fait égal à la carrure d’armoire à glace du Monsieur. Elle le heurta de nouveau et vacilla, le poids de son cartable l’entrainant vers l’arrière ! Elle retrouva son équilibre, sentit ses deux pieds en liaison avec le sol et fit mine d’avancer. Mais l’étranger se mit en colère, sous sa grosse moustache, sa bouche se contracta et sa grosse main vint saisir la frêle épaule de mon amie. Elle sursauta, et lorsque les torrents de reproches prononcés d’une grosse voix atteignirent ses oreilles, elle poussa un cri, perçant, effrayé, de désarroi ! Elle n’avait pas l’air de comprendre ce qui lui arrivait ! Le bonhomme la secoua, j’avais beau avoir une carrure plus robuste qu’elle, je ne me voyais pas intervenir. Il allait lui faire mal ! Elle hurla encore plus fort ! Son agresseur dut craindre le scandale et la relâcha. Allait-il en rester là ? Apparemment oui ! Je me précipitai sur Claudia. Elle ne pleurait pas, mais d’une voix tremblante, timide, elle me demanda ce qui s’était passé. Prise au dépourvu, je lui chucho- tai l’histoire à l’oreille. Elle me questionna sur l’apparence de l’homme. Alors, pour essayer de la détendre, je le comparai à un immeuble, avec la moustache de Maupassant et pressé comme le lapin dans Alice au pays des Merveilles. Elle ne me répondit pas. C’était impressionnant ce que ses yeux pouvaient exprimer ! A ce moment-là, ils regardaient dans le vague... Je crus comprendre, Claudia n’avait pas vu le monsieur. Elle aurait simplement été ballottée, prise dans des remous, comme une algue, et après c’était le calme. Mais dans sa tête, la tempête continuait, l’emportait. J’errais avec elle dans l’incompréhension. C’est pour cela que je suis son amie, non ? Mais pourquoi s’était-il encore produit un incident pareil ? Une autre aventure étrange m’arriva à quelques jours d’intervalles. Elle me semblait avoir une relation singulière avec les problèmes de Claudia. J’aurais bien aimé ne pas l’avoir vécu si cela avait pu lui rendre la vue intégrale. Comme j’aime me promener dans les ruines de l’ancienne ville romaine d’à côté, je passe très souvent dans l’allée des statues, en face du temple. Ce sont les dieux et déesses les plus importants qui sont représentés en haut de leur colonne, des deux côtés de l’allée et qui projettent leurs ombres au crépuscule. Je marchais habituellement à cette période de la journée sauf que cette semaine là, ce n’était plus la beauté du lieu mais bien la vie que j’y rencontrais qui me fascinait. Non, je ne voyais personne de ma connaissance comme on pourrait le croire, mais ce sont les dieux, ou plutôt leurs statues, qui retenaient mon attention. Depuis quelques temps, leurs ombres prenaient de l’importance, j’avais l’impression qu’elles voulaient me raconter leur histoire, elles devenaient plus marquées, leurs détails ressortaient... Le soir, avant l’incident de Claudia et de l’homme à la montre, j’y étais encore, le ciel se dorait et les ombres s’allongeaient, lorsque je les vis, oui je les vis... se mouvoir, elles se retournaient entre elles, se faisaient des signes, mouvaient leurs bras et remettaient leurs drapés en place. Elles se réveillaient clairement comme des enfants qui avaient fini leur sieste. Il émanait d’elles une puissante majesté, de la grandeur, quelque chose que même les statues auxquelles appartenaient les ombres ne pouvaient exprimer. C’était de la magnificence que seule la vie pouvait montrer, oui, la vie... C’était comme si ma vue percevait audelà de la réalité. Maintenant, Claudia n’entend plus ! Sa mère m’a téléphoné et apparemment La Promotion Violette mon amie s’est résignée. Elle savait qu’elle risquait de se perdre et pour elle, le monde du silence était une promesse de calme. Comme j’allais me mettre au lit, j’entendis un cri, ou une supplication. Je cherchais pendant longtemps l’origine de ce bruit mais n’en trouvant aucune source possible, je me convainquis que ce devait être des acouphènes. Néanmoins, je tergiversais pendant encore quelques temps et revint sur ma première idée, mes oreilles ne pouvaient créer un tel bruit ! Je me mis donc en quête de l’endroit d’où pouvait provenir ce son si implorant. Je cherchais, l’oreille au mur, l’oreille sur un cahier, une peluche, et finis par localiser mon bureau. J’allumai ma lampe et fouillai dans le désordre de ma table de travail à la recherche de ce qui aurait pu produire pareil bruit. Je finissais même par croire que mon chat s’était coincé quelque part ! Je fus vite détrompée. La tête emportée par la fatigue, je m’étais saisie d’un crayon quand le bruit si particulier fut remplacé par un chuintement. Je regardai ce crayon et je crus même sentir les vibrations si caractéristiques du ronronnement d’un chat. Je le posai dans la boite où j’avais omis de le ranger une fois mon dessin achevé et le bruit s’arrêta instantanément. C’était donc ce crayon seul qui criait son désespoir ? Ce tout petit crayon qui ne supportait pas la séparation d’avec ses semblables. Maintenant que j’y pense, un crayon c’est l’inverse d’un humain. Plus il est vieux, plus il rapetisse et a un caractère enfantin. En plus celui-ci avait une petite mine. J’avais l’impression de voir un petit chaton aveugle qui venait de retrouver la chaleur de sa mère. « Aveugle » dorénavant, à chaque fois que je croise ce mot je pense à elle, Claudia, la pauvre. Et je pensais qu’à moi aussi il m’arrivait de drôles de choses, sauf qu’elles étaient tout de même plus heureuses... Que m’étais-je imaginé avec ce crayon ? J’avais dû avoir des hallucinations! Je ne savais pas ce qui m’arrivait, j’imaginais la vie dans des choses si bêtes, si classiques, si... « Mortes » ? Etait-ce de la folie ? Etait-ce une sorte de maladie ? Et surtout, y avait-il un lien avec ce qui arrivait à ma chère Claudia ?! Elle qui perdait ses sens et moi qui devenais hypersensible ! Que de questions sans réponse ! Quelle angoisse ! Je me mis à courir, pieds nus dans mon jardin, sous la chaude brise qui nous venait du sud. Courir pour respirer, regarder la lune pour ajouter de la clarté dans mes idées, je suis comme ça moi, pour penser, j’ai besoin d’air. Tout en sentant la mousse ou l’herbe sous mes pieds quand je courais, je me mis à penser que Claudia n’entendait plus, alors que j’avais perçu le cri d’un crayon, si aigu, si impensable. Il m’aurait fallu quatre oreilles pour l’en- Juin 2016 tendre ? Peut-être que Claudia était avec moi ? Cela devait faire une heure que j’étais dehors. Il est surprenant de voir comment le vent chaud amène la paix et l’ordre dans ses idées. J’allai chercher un petit flacon. Je l’ouvris, laissai un instant à l’air pour qu’il se repère et s’installe. Enfin je refermai le flacon. Maintenant, il m’aidera, je le porterais toujours sur moi ! Lorsque j’approche mon oreille, j’entends comme l’ombre de ce vent, je le vois encore s’agiter dans cette petite fiole et il me protège comme un talisman. Je me suis relue, mais, qu’avais-je écrit ?? Comment se fait-il que j’entende ce vent ? Toute la nuit j’avais été bercée par ce souffle, placé sous mon oreiller, que se passait-il ? Lorsque je m’éloignais de lui, je me crispais, j’étais sur les nerfs ; pourquoi ? Etait-ce une sorte de drogue douce ? Pour quelle raison étais-je la seule à l’entendre ? Non, je ne l’avais pas imaginé ! Ou dans ce cas, mon fidèle Rus, ce petit cocker si malin, était dans le même rêve que moi. Il avait passé son après-midi à courir dans la maison et il s’était mis plusieurs fois en arrêt devant ma chambre, l’oreille attentive et quand le murmure lui effleurait l’oreille, il se calmait aussitôt ! Il était tard ! Je n’arrivais plus à dormir, le souffle qui me berçait fut couvert par un sifflement qui se jetait sur mes volets, ma petite bouteille de verre lui répondait, dans ‘ce langage si étrange...elle était si suppliante que je la pris au creux de ma main, ouvris la fenêtre et posai mon doigt sur le bouchon. Rus jaillit aussitôt dans ma chambre et se jeta sur le bord de la fenêtre. Quand je fis sauter le bouchon de liège, le vent du dehors et celui qui s’échappait de la fiole poussèrent à l’unisson un soupir de soulagement. Rus leva ses deux oreilles pour essayer d’attraper ce bruit si étrange. Dès que le courant d’air eut soulevé ses mèches de poils noirs, le chien repartit et le vent se calma. Je retournai au lit. A mon réveil, « Quel rêve étrange! » fut ma première pensée, mais le flacon vide me rappela les évènements de la nuit. Je me suis dit qu’au niveau de l’étrangeté, je devais égaler Claudia ! Puis, Claudia perdit le goût, elle ne pouvait plus savourer le chocolat chaud pour se réconforter ni le thé à la menthe. Elle ne vint plus en cours et j’avais vraiment peur qu’elle ne tombât dans la dépression. En plus de son palais, j’avais l’impression qu’elle commençait à perdre le goût de la vie, elle sombrait petit à petit dans le néant et je ne savais pas quoi faire pour l’en sortir. Je croyais qu’elle devait passer un test pour déceler un éventuel cancer ou autres maladies graves. Je n’en étais pas certaine car nous nous voyions de moins en moins. Nous étions en train de nous perdre : Au secours ! Aujourd’hui, elle a perdu le toucher. Cette fois, elle est partie, elle flotte dans un monde, quelque part, à côté de nous, mais sans nous. Je suis en train de caresser distraitement les oreilles de Rus, je passe mes doigts dans ses boucles d’ébène et j’admire les reflets de bien-être qui s’y mêlent. Je sens chaque poil, chaque bourre, je profite de ces délicieux chatouillis qui me courent le long des veines, si vivant, si sensible... Pourquoi Claudia n’y a-t-elle plus droit ? L’en aurais-je privée ? Y suis-je pour quelque chose ? D’une quelconque manière ? Les ombres des romains me sont apparues, la ville antique s’est réveillée, de son côté, à l’insu de notre monde. Ils arpentent les rues, se parlent sans que je ne puisse les entendre, hantent cette ville par leurs vies. Ils rejoignent les statues dans leur monde, intouchables mais présents. Quand le voile d’or disparaît du ciel, je pars, laissant ce peuple dans son intimité allumer de vieilles bougies et se retrouver. Je suis si bien, libre de préoccupations, la tête légère, mais je ne suis pas à ma place. Je longe le cimetière en entendant le vieux lierre me murmurer les frasques et légendes de tous ses résidents. Dans les senteurs de la nuit. Et, dans le halo de lumière des phares, je vois danser d’étranges petits êtres, ils sont si lumineux... Depuis, je les vois dans chaque rayon de lumière, jusqu’au plus profond des ténèbres et il me rappelle qu’il y a toujours de l’espoir, partout ! Même lorsque l’on se rend compte, comme moi, que les vagues de vent ne sont que des requins qui vous mordent les mollets et se tortillent... Et que je perds mon esprit ! Il est si bon de rêver, d’oublier ses problèmes, c’est si facile. Mais, suis-je folle ? Si seulement je pouvais vraiment oublier, oublier ma peur d’avoir volé les sens de mon amie, ma moitié. Est-ce de ma faute si elle est là, sous mes yeux, couverte d’un drap blanc, dans une chambre blanche, ce même blanc où tout a commencé ? Là, inerte, abandonnée de tout ce qui nous permet de goûter la vie. Juste un souffle, pour ressembler à une plante, moins vivante qu’une algue, elle m’a abandonnée. Ou est-ce moi ? Lui aurais-je volé ses sens ? Préférerais-je être folle et que toute raison m’ait abandonnée plutôt que d’accepter d’être une voleuse ? J’ouvre le journal de Claudia posé sur la table de chevet, à la dernière page. Il est écrit : « J’ai l’impression que tout ce qui est vivant et auquel je n’attachais que très peu d’importance disparaît, et si je pense que les mots qui disparaissent aussi à mes yeux sont inanimés, j’ai tort. Ils expliquent le vivant, et sont créés par le vivant pour le vivant, vivant, la vie me quitte... » Page 31 Lauréats départementaux CONCOURS « DÉFENSE ET ILLUSTRATION DE LA LANGUE FRANÇAISE » Option « Jeune poésie » - Classe de 4ème Prix unique : Adèle DEVLEESCHOUWER Collège du Grésivaudan - 38330 SAINT-ISMIER UTOPIE J’ai laissé ma malchance de l’autre côté des rails Ici c’est blanc noir ou pile face et depuis Défi folle utopie me guette me tenaille Partir ailleurs vers un autre infini Le temps a calciné le bas-côté, les buissons Noir est mon esprit et mon imagination J’ai envie d’avoir des ailes qui puissent déverser De la couleur et des rires sur ce désert déserté J’aimerais avoir des ailes ne serait-ce que pour voir De haut, cette étendue de gris qui immense broie du noir J’aimerais voir le vent fouetter mon visage exténué Mais je ne suis que moi et je ne peux que marcher Alors je cours sans m’arrêter, sans m’retourner Je n’ai que mes pieds pour aller les chercher Ces couleurs, cet espoir, cette vie, j’ai fini D’errer, d’vagabonder, c’est le temps du défi J’ai laissé ma malchance de l’autre côté des rails Ici c’est blanc noir ou pile face et depuis Défi folle utopie me guette me tenaille Partir ailleurs vers un autre infini Les rails sont rouillés, fallait s’en douter Aucun train ne pourra me retrouver Pas celui de la chance ni celui d’la victoire Tant pis, faudra plus pour que j’perde espoir Option « Jeune poésie » - Classe de TL Accessit : Philippe IANNETTA Ecole des Pupilles de l’Air - 38330 MONTBONNOT Blancheur infernale chronique Je suis là Ordinateur allumé Sans aucune idée Rien à expliquer Ou bien à critiquer Alors j’écris simplement Sans grand-chose à dire Je reste simple Face à cette feuille vierge Qui ne désire que moi N’appelle que moi Crie après moi Tandis que la musique me dit Que tout ce que j’ai à faire Est de suivre son appel Je me laisse donc emporter Dans cette poésie Au sens dérisoire La musique me parle La feuille est si belle Mais si vide Je la veux Et je ne peux rien y faire Pourtant j’ai beau courir Je ne l’atteins jamais Plus de détermination que de sang dans mon coeur Certains seraient morts, moi j’crois encore au bonheur Option « Jeune poésie » - Classe de 5ème Premier accessit national : Adèle BELDJELTI Collège du Grésivaudan - 38330 SAINT-ISMIER Là-bas je sais une lumière brille pour moi Que dans le futur un autre moi me remerciera Le chant du loup Chaque pas semble plus lourd que le précédent Ma tête me tourne, mais je serre les dents Animée par une force, je me sens invincible Je ris et tout semble à nouveau possible J’ai laissé ma malchance de l’autre côté des rails Ici c’est blanc noir ou pile face et depuis Défi folle utopie me guette me tenaille Partir ailleurs vers un autre infini Quand la nuit est à son heure la plus sombre, Les étoiles scintillant dans la pénombre, Un long hurlement triste et plaintif retentit Au plus profond des taillis. Le loup hurle, le museau pointé vers les constellations. Son chant raconte ses peines, ses émotions, Sa peur des hommes qui le chassent cruellement, Sa plainte pathétique s’éteint doucement. Directeur de publication : Michel BERTHET, Président national de l’AMOPA Rédacteur en chef : Jean-Cyr MEURANT, Président de la section Isère Maquette et mise en page : Gilbert COTTIN Impression : Rectorat de Grenoble N° ISSN : 2272-0809 (Reconnue d’utilité publique par décret du 26 Septembre 1968)