Long gue vie e au G Grand d Succ cesseu ur
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Long gue vie e au G Grand d Succ cesseu ur
Corée du N Nord Longgue viee au Grand G d Succcesseu ur 21 décembbre 2011, paar Any Bourrrier Dans son essai Le Syystème totalitaire, Hannnah Arend dt affirmait que « chaqque fin dan ns l’histoiree contient néécessairemeent un nouvveau comm mencement. Ce commen ncement esst la promessse, le seull message quue la fin puisse donnerr ». Après laa disparition n de Kim Jo ong-il et l’at attribution par p la pressee officielle ddu titre de « Grand Su uccesseur » à son troissième fils Kim K Jong-uun, quelle promesse p ett quel messaage se dessiinent à Pyo ongyang danns cette pérriode de deu uil? Une péériode d’inccertitudes ett de risques majeurs, comme c le crraignent la plupart dess observateurs du « rooyaume erm mite », aussii bien à Wasshington et Séoul qu’à Pékin? La sstabilité, comme l’affirrment d’autrres commen ntateurs? En Corée ddu Nord, laa rue réagit comme la ppropagandee massive du u régime lee lui a toujo ours appris : des scèness d’hystériee et de sou uffrance, dees larmes montrées m à la télévisioon. Elles ne n sont pass forcément fausses carr cette mortt inattenduee et soudain ne est ressen ntie par les Nord-Coréens commee une perte ; elle provoqque chez eu ux confusionn et instabiliité. Dans un n pays où toous les pouv voirs étaientt m d’un seeul homme,, il n’est pas simple pour un peuplle si soumiss d’accepterr concentréss dans les mains la disparitiion de cettee figure tutéélaire. Le viide qui a su uivi l’annonce de la moort du « Cher Leader » est difficilee à supporter pour certtains, tant ssont forts lees liens affeectifs forgéss depuis dess décenniess par l’idéologie du jucche (« auton nomie », priincipe fond dateur de la Corée du N Nord) entre le suryongg (« l’homm me fort ») et son peuple. Pour la fam mille régnaante et pourr les puissannces qui on nt participé aux négociiations à six x (les deuxx Corées, Jappon, Chine,, Russie, Etaats-Unis) suur le prograamme nucléaire de Pyoongyang org ganisées parr le gouvernnement chinnois entre 2003 2 et 20008, le meilleur scénario serait cellui de la co ontinuité duu régime. Unn consensuss national a commencéé à s’esquissser dès 2006 lorsque les premierrs badges à l’effigie dde Kim Jonng-un sont apparus suur le reverrs des vestees d’officieels et de haut h gradéss militaires. C’est le prremier indicce du chemi min tracé pou ur la Répub blique popuulaire démo ocratique dee Corée (RP PDC) : assurrer, par le biais d’unee succession n dynastiqu ue, le mainttien du systtème — unn totalitarism me confucééen nourrii des « vaaleurs corééennes », notamment n le nation nalisme ett l’homogénnéité ethniquue. Le système mis en place pour pérenniser p lla seule dyn nastie « rou uge » de l’hhistoire s’esst poursuivii avec la noomination de d ce troisièème fils à un poste de d responsab bilité au seein du dépaartement dee liaison entrre le Parti du d travail (PT) et l’arméée. Depuis 2009, 2 tous les l documennts et rappo orts officielss lui sont envvoyés aussii bien qu’à son s père, quui veillait aiinsi à son éd ducation pollitique. Maiis les Nord-Coréens ett le reste duu monde ne découvrentt le visage de d l’héritier qu’en septeembre 2010 0, date de laa publicationn de sa phottographie dans d Rodongg Sinmun, l’organe du parti. Un m mois plus taard, M. Kim m Jong-un faait une appaarition publiique à la rééunion extraaordinaire du d comité ceentral du PT. En dépitt de son inexxpérience en e matière militaire, m il eest désigné vice-présid dent de la coommission centrale dee défense et promu génnéral quatre étoiles aveec en prime le surnom de « Grandd Général ».. Depuis, lee futur succeesseur exercce une influ uence sur less affaires dee l’Etat com mparable à ccelle de Kim m Jong-il, à l’exceptionn des dossieers de politiq que étrangèère. Même si ce jeune homme de 29 ans est resté jusqu’à présent discret et effacé, les témoignages qui ont suivi la mort de son père permettent de dresser un premier portrait. Il est né en 1982 (ou 1984) de l’union de Kim Jong-il avec Ko Young-hui, sa troisième épouse. Originaire d’Osaka, cette fille d’une famille d’ascendance coréenne installée au Japon pendant la seconde guerre mondiale est décédée en 2004, victime d’un cancer. Ayant suivi ses parents lorsque ceux-ci ont décidé de rentrer en Corée du Nord en 1961, la jeune femme avait étudié la danse folklorique à Pyongyang avant d’être engagée comme meneuse de jeu dans la Mansudae Art Troupe, la plus prestigieuse du pays. Elle aurait rencontré Kim Jong-il en 1970 mais, selon le spécialiste américain Bradley Martin, auteur du livre Under the Loving Care of the Fatherly Leader — « Sous les soins affectueux du Leader paternel » [1] —, elle aurait été l’une des innombrables maîtresses de Kim Il-sung avant de rencontrer son fils. D’où la suspicion que l’héritier de Kim Jong-il serait l’un des innombrables fils illégitimes de Kim Il-sung — donc son frère. Une rumeur accentuée par la ressemblance entre le premier et le troisième Kim : selon Philippe Pons, « Kim Jong-un est tout le portrait de son grandpère lorsqu’il avait son âge, même corpulence, même coupe de cheveux, même costume Mao ». Une ressemblance, souligne Pons, qui « est cultivée afin de rassurer la population [2] ». « Kim Jong-un a le potentiel pour devenir un leader fort et intransigeant. Il a la personnalité pour assumer des responsabilités », nous assure Cheong Seong-chang, chercheur à l’Institut Sejong, l’un des principaux think tanks de Séoul. « Il a une forte personnalité et peut faire preuve d’agressivité », explique de son côté à la chaîne de télévision Al-Jazira son ancien professeur Marco Imhof, de l’Ecole internationale suisse : M. Kim Jong-un y a fait des études dans les années 1990, y a appris l’anglais, l’allemand et le français, tout en étant l’un des bons joueurs de basket-ball de l’équipe de cette école. Une fois son diplôme obtenu en 1998, il est rentré en Corée pour intégrer l’académie militaire Kim Il-sung, entre 2002 et 2006. Ce parcours peut-il permettre d’affirmer que le jeune homme sera capable de diriger un pays fortement militarisé, apte à posséder l’arme atomique et perçu comme un paria par la « communauté internationale » ? L’ancien secrétaire d’Etat adjoint américain Christopher Hill, qui a dirigé la délégation des Etats-Unis à la conférence à six sur le nucléaire nord-coréen, en doute si l’on en croit ses propos sur BBC. De son côté, M. Abraham Kim, vice-président de l’Institut économique coréen de Washington, juge que « la transmission du pouvoir n’est pas complète. Nous nous attendions à ce que Kim Jong-il vive plus longtemps. Sa mort a provoqué un grand malaise ». Même son de cloche à Pékin, qui n’était favorable ni à une succession dynastique ni au choix de Kim Jong-un comme futur homme fort. Le pouvoir aurait préféré la nomination d’une équipe collégiale. Il aura fallu quatre visites officielles en dix-huit mois de Kim Jong-il pour convaincre les autorités chinoises de soutenir son fils. « Aujourd’hui, la Chine n’a pas d’autre choix que d’accepter cette succession dynastique car le gouvernement craint l’instabilité », nous affirme M. Yang Xiyu, expert en affaires coréennes auprès du ministère chinois des affaires étrangères. La Chine est contrainte de soutenir le régime des Kim pour des raisons à la fois stratégiques et économiques. Selon l’agence Reuters, le commerce bilatéral s’est élevé à 3,1 milliards de dollars durant les sept premiers mois de 2011, en hausse de près de 90 % par rapport à la même période de l’année précédente. Le gouvernement verrait d’un mauvais œil des remous à sa frontière. Toutefois Pékin s’attend à ce que l’oncle Chang Seong-taek — l’époux de la sœur de Kim Jong-il, de facto le numéro deux du régime — soit l’homme de la stabilité et du maintien du statu quo. Chang, officieusement mentor de Jong-un, est à la fois vice-président de la Commission militaire centrale et homme de réseaux puissants. Il a la haute main sur l’armée, et ses deux frères Chang Song-u et Chang Song-kil sont respectivement commandant du 3e corps de l’armée et commandant en second du 4e corps de l’armée, Song-kil étant également commissaire politique du 82e régiment des chars d’assaut. Il y a quelques mois, Chang avait poussé le « Cher Leader » à procéder à une série de nominations à des postes déterminants au sein du parti et de l’armée. Il va certainement profiter de la transition pour renforcer son pouvoir. Quoi qu’il en soit, et compte tenu de la jeunesse de Kim Jong-un, on peut penser que l’arrivée de la troisième génération au pouvoir en Corée du Nord ne se fera que graduellement. Luttes familiales dangereuses Toutefois, il est impossible d’exclure le scénario d’un effondrement, qui pourrait être provoqué par une lutte de factions au sein de la famille Kim — comme à la mort, en juillet 1994, de Kim Il-sung, dont la deuxième épouse avait voulu barrer la route à Jong-il. Entre les murs de la somptueuse résidence du souverain rouge — une bâtisse massive, entourée de pinèdes et de magnifiques jardins, située dans le district Sanmien (Sanmyôn), à l’extérieur de Pyongyang —, une lutte à couteaux tirés s’était alors déclarée. Plusieurs membres du clan des Kim ont plus ou moins participé à la conspiration pour écarter l’héritier désigné, dont les atouts pour le poste se limitaient à une indiscutable fidélité à son père. Cette tentative de révolution de palais est arrivée trop tard. L’ambitieux Kim Jong-il avait neutralisé son oncle, sa belle-mère et ses demi-frères, envers lesquels il a entretenu une hostilité ouverte pendant des années. Kim Jong-un peut-il craindre, lui aussi, une tentative de coup d’Etat familial ? Le frère aîné Kim Jong-nam fait valoir qu’il aurait dû être choisi plutôt que le « fils favori » au nom du respect des principes confucéens. Mais, bon vivant aimant les casinos (il vit à Macao) et les grands restaurants, ne s’intéressant pas vraiment à la vie politique de son pays, Jong-nam aura-t-il la capacité et les appuis nécessaires pour mener à bien une révolution de palais ? Les pays qui négocient sur l’affaire du nucléaire redoutent un tel scénario. Tous ont des problèmes de politique intérieure à régler au cours de 2012. A Pékin, on prépare le passage du pouvoir à la cinquième génération de dirigeants cooptés par le Parti communiste, tandis que Washington, Séoul et Moscou entrent dans une période électorale avec la présidentielle américaine en novembre et celle de la Russie en mars et les législatives sud-coréennes en avril. Dans ce contexte, personne n’a intérêt à une déstabilisation de la RPDC, dont les conséquences humaines seraient terribles. Voilà pourquoi le régime chinois reste prudent et appelle aussi bien les puissances régionales que les Etats-Unis à en faire autant. Selon Yang Xiyu, « il faut que les voisins de la Corée du Nord poursuivent les politiques menées à son égard jusqu’à présent ». Le système semble toutefois à bout de souffle. La succession intervient au moment où la population connaît une nouvelle vague de famine et où une partie de la société voudrait sortir de l’impasse [3]. Corée du Nord : longue vie au « Grand Successeur » Notes [1] Thomas Dunne Books, New York, 2006. [2] Le Monde, 20 décembre 2011. [3] Lire Philippe Pons, « En Corée du Nord, la société s’éveille », Le Monde diplomatique, janvier 2011.