Pâques : Fête du Passage… - Réflexions de Raymond Gravel

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Pâques : Fête du Passage… - Réflexions de Raymond Gravel
Pâques : Fête du Passage…
Que l’on soit croyant ou pas, la fête de Pâques doit être célébrée, car cette
fête qui prend son origine dans l’hémisphère nord, au moment de l’équinoxe
du printemps, nous rappelle tout simplement la vie qui surgit, qui renaît, des
nombreux passages que nous effectuons au cours de notre existence. Toute
la vie est faite de passages à faire : on passe de l’enfance à l’adolescence,
puis à l’âge adulte, on change de profession, on passe d’un événement à un
autre , un déménagement, un état de vie, des situations passablement
difficiles à traverser, pour, finalement, arriver au dernier passage : la mort.
Mais que sont ces passages s’ils ne sont pas le désir d’un mieux-être? La
volonté d’aller plus loin? L’espérance d’une vie meilleure? C’est dans cette
perspective qu’est née la fête chrétienne de Pâques : si tous les passages que
nous faisons débouchent nécessairement sur la vie, comme un printemps
nouveau, il doit en être ainsi de la mort. C’est un peu la réflexion des
premiers chrétiens sur l’événement mort-résurrection de Jésus de Nazareth :
ce prophète, rejeté par les siens, dénoncé par les Juifs et condamné par les
Romains, Dieu l’a ressuscité; il l’a fait Christ et Seigneur et il est vivant à
travers ses disciples de tous les temps qui vivent de sa vie de Ressuscité.
Malheureusement, des auteurs contemporains comme Mel Gibson, dans son
film sur la Passion du Christ, ou bien comme Dan Brown, dans son Da Vinci
Code ou encore comme Simcha Jacobovici et James Cameron dans leur
découverte du tombeau de Jésus, à part semées la controverse aujourd’hui,
leurs œuvres littéraires et cinématographiques, qui ont la prétention
d’apporter un éclairage sur la réalité historique de Jésus, ne sont que des
relectures simplistes, matérialistes et fondamentalistes des évangiles. Ces
relectures ne correspondent pas à l’exégèse scientifique des récits
évangéliques sur la mort-résurrection du Christ.
Lorsque le journaliste israélien Jacobovici affirme que les ossuaires
découverts à Jérusalem-Est, en 1980, portant les inscriptions de la famille de
Jésus, sont authentiques, c’est ne rien comprendre aux évangiles : 1)
Comment pourrait-on retrouver un ossuaire contenant les restes de Jésus,
lorsqu’on sait ce qui lui est arrivé? Le 5 ou le 6 avril de l’an 30, à l’extérieur
des murs de la ville, Jésus a été crucifié et compté parmi les criminels de
l’époque. L’intervention d’un membre du Sanhédrin, Joseph d’Arimathie,
afin de lui assurer une sépulture décente, n’est pas historique, mais bien
théologique; c’est le fruit d’une relecture croyante post-pascale, quelque 40,
50 et même 70 ans après l’événement. 2) De plus, que penser d’un Joseph et
d’une Marie, qui seraient les parents de Jésus, mais qui sont en fait, des
personnages théologiques, puissent se retrouver, après leur mort, à
Jérusalem, puisqu’ils sont de Nazareth, dans une grande pauvreté?
À trop vouloir matérialiser les évangiles, on finit par en réduire le contenu
théologique et à déformer les messages qui en découlent. Les récits
évangéliques ne sont pas des reportages journalistiques sur le déroulement
des événements entourant la mort et la résurrection de Jésus; ce sont des
récits de foi, composés par des croyants, pour répondre aux multiples
préoccupations des premiers chrétiens, confrontés aux persécutions romaines
et à l’exclusion de l’institution juive traditionnelle. Les événements racontés,
les personnages présentés, correspondent aux chrétiens de l’Église primitive
et à leurs situations concrètes et historiques; de sorte que le procès de Jésus,
c’est aussi celui d’Étienne, de Paul, de Pierre et des autres disciples devant le
Sanhédrin et les autorités romaines. Sa mort et sa résurrection sont celles qui
attendent tous les chrétiens humiliés, rejetés, exclus et condamnés à cause de
leur foi au Christ et de leur fidélité à cette espérance que la mort n’est qu’un
passage obligé qui conduit nécessairement à la Vie avec un grand V.
Par ailleurs, on ne s’arrête pas dans le passage; un passage est fait pour
passer et, lorsque traversé, il n’est que passé. C’est pourquoi, saint Luc, dans
son évangile de Pâques, nous raconte qu’au premier jour de la semaine, de
grand matin, des femmes qui se rendent au cimetière pour embaumer un
mort, se font dire : « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts? Il
n’est pas ici, mais il est ressuscité » (Lc 24,5b-6a). La mort n’est plus; elle
n’est que le passage vers la vie. Comment peut-on croire en la Résurrection
si nous cherchons désespérément la mort?
Le théologien Michel Hubaut écrivait : « Je crois en la Résurrection du
Christ quand je vois renaître la vie autour de moi, quand je vois des
hommes et des femmes, des communautés qui se lèvent, se relèvent sans
cesse pour refuser la fatalité de l’injustice, de la violence, du mal sous
toutes ses formes. Quand je vois des hommes et des femmes habités par
une force intérieure qui les pousse à faire triompher la vie en dépit de
tous les échecs ». Illuminés par le Christ de Pâques, n’éteignons pas la
lumière qui jaillit de nos tombeaux; elle fait naître l’espérance dont le monde
a tant besoin.
Joyeuses Pâques 2007
Raymond Gravel ptre-député
Repentigny.
4 avril 2007