1. Les principes de l`organisation Fordist
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1. Les principes de l`organisation Fordist
C- La remise en cause de la croissance Fordiste ou la fin des « 30 Glorieuses » : 1. Les principes de l’organisation Fordiste sont de moins en moins bien tolérés : En premier lieu, les conditions du travail Taylorien et Fordien sont de moins en moins tolérées par ceux qui le subissent. En effet, la double division verticale et horizontale du travail atteint vite les limites de son efficacité. • Les excès de la spécialisation du travail provoquent des taux de turn-over élevés et génèrent des coûts élevés sur le remplacement de la main d'oeuvre. • De plus, les conflits - et plus généralement les motifs de conflictualité - sont de plus en plus nombreux. Ces conflictualités se traduisent pas des phénomènes de résistance au travail tels que l'absentéisme, des sabotages sur les chaînes de production afin d'en ralentir le rythme, des phénomènes de coulages sur les chaînes de production et enfin des formes assez dures de grèves et de conflits (avec séquestration des dirigeants, fortes mobilisations syndicales). En un mot, le compromis salarial Fordiste a du mal à se reproduire; les salariés rejetant les modalités mêmes de ce compromis entre augmentation des salaires et conditions de travail exécrables. • Ajouté à cela, l'arrivée de nouvelles générations d'ouvriers dans les années 60 qui ont été scolarisés et rejettent ces conditions de travail. C'est à cette époque que vont émerger les critiques les plus radicales sur l'aliénation ouvrière, le travail divisé au profit de revendications sur l'épanouissement au travail, la prise d'initiatives individuelles, le rejet des hiérarchies traditionnelles .... [Thèse de BOLTANSKI et CHAPIELLO dans « Le Nouvel Esprit du Capitalisme », Fayard.] • Enfin, les coûts de l’organisation Fordiste augmentent dans ce contexte car il faut rémunérer des salariés « improductifs » qui s'occupent de faire respecter les consignes liées à la division horizontale, de plus en plus contestée (contremaîtres, agents de maîtrise ....). (Voir Schéma 1) 2. Principal levier de la croissance Fordiste, les gains de productivité ralentissent ainsi que la croissance économique : Tout ceci se produit dans un contexte de crise structurelle du régime de production Fordiste. En effet, la croissance Fordiste commence à s'essouffler (dés la fin des années 60 aux Etats -Unis, et atteindra par contagion le reste des pays développés au cours des années 70) pour des raisons structurelles. • D'abord, les taux d'équipements des ménages sur les biens standardisés du Fordisme commencent à atteindre un niveau élevé: cela signifie que les secteurs-clés du Fordisme arrivent à saturation sous l'effet de l'équipement des ménages. Dés lors, les investissements coûteux que suppose l'organisation Fordiste commencent à être difficilement amortis ce qui fait rentrer le capital dans une crise inédite. En effet, pour se reproduire, le Fordisme a besoin de taux de profits suffisants pour continuer à accroître les gains de productivité via la réalisation d'investissement de productivité (Souvenez-vous, dans ce cas là on parle « d’accumulation intensive » ; ou de croissance intensive). Mais cela entre à contradiction avec le ralentissement de la production puisque les ménages sont déjà équipés. • De cela va découler la crise du Fordisme: d'abord, les coûts unitaires ne baissent plus (ou moins vite) alors que le rapport salarial Fordiste prévoit une augmentation régulière des salaires réels. Ceci va provoquer un effondrement de la part des profits dans la valeur ajoutée des entreprises; donc une crise d'efficacité du capital, puisque les salaires réels progressent plus vite que la productivité du travail. A cela les entreprises peuvent répondre temporairement par l'augmentation des prix mais qui est rapidement rattrapée par l'augmentation des salaires prévue par les conventions salariales propres aux incitations salariales Fordistes (indexations automatiques ....). Dés lors, ce met en place une spirale prix-salaire très inflationniste (dés que les prix augmentent les salaires augmentent à leur tout, de sorte que les entreprises augmentent de nouveau leurs prix).....Dans ce contexte, les entreprises qui veulent continuer à investir (face à une demande forte) n'ont plus les moyens d'autofinancement pour le faire; de sorte qu'elles doivent recourir massivement à l'endettement. Ceci est soutenable tant que les taux d'intérêt restent faibles ou nul, voire négatifs (c'est à dire tant que l'inflation annuelle annule les intérêts nominaux)…. Ce qui ne va pas durer. • Tout cela va se traduire par un essoufflement, un ralentissement des gains de productivité, un ralentissement corrélatif de la croissance économique et déjà une élévation des taux de chômage. (Voir Schéma 2) 3. Une organisation trop rigide et incompatible avec l’évolution du marché : En plus de tout cela, les marchés –clés (automobile, industrie lourde, sidérurgie et métallurgie, textile, électroménager ….) du Fordisme entrent dans un âge de crise puisqu’ils sont des marchés saturés justifiant donc des niveaux de production en ralentissement. Mais à ce problème qualitatif déjà expliqué plus haut se greffe un problème qualitatif. • En premier lieu, le Fordisme, bien adapté pour une production de masse rencontre des difficultés croissantes quant à la qualité de la production. La standardisation d’un côté, les problèmes sociaux liés au Fordisme, d’un autre, et enfin les flux de production élevés sous la contrainte de la chaîne de production provoque une qualité médiocre de la production ce qui augmente les coûts liés aux garanties sur les biens semi-durables ainsi que les coûts liés aux SAV (Service après vente). Dés lors, une partie des gains de productivité assurés par l’organisation Fordiste sont annulés par ces coûts. Sans compter la mauvaise réputation acquise par les marques. (Voir schéma 1) • En second lieu – et ce n’est pas le moindre- ; sur des marchés en saturation, et donc de rééquipement des ménages ; les consommateurs deviennent à la fois plus exigeant en matière de qualité mais aussi en terme de différenciation de l’offre : en claire les ménages réclament de plus en plus des biens différenciés ce qui est incompatible avec la standardisation à outrance de la production. A cela se rajoute, sous l’effet de cette nouvelle contrainte manifestée par les consommateurs, que le cycle d’obsolescence des produits (Thèse de VERNON) augmente au fur et à mesure que ces mêmes produits se diffusent chez les consommateurs. Cela oblige les entreprises à innover constamment pour se démarquer de la concurrence et satisfaire la clientèle ; mais aussi à réviser les dogmes Fordistes pour ce qui concerne notamment la standardisation et la production de masse standardisée. En clair, l’organisation Fordiste du travail et de la production souffre d’un manque de souplesse, d’adaptabilité, de flexibilité – le mot est lâché- face à des marchés saturés et en renouvellement, face à une clientèle de plus en plus volatile. Le Fordisme pour toutes ces raisons entre définitivement en crise, ne peut plus réellement se reproduire sous sa forme originelle, et doit donc s’adapter à ces nouvelles contraintes ; choses explorées dans le III de ce chapitre. Schéma 1 LIMITES TECHNIQUES ET SOCIALES DU TAYLORO-FORDISME : LIMITES TECHNIQUES : • STANDARDISATION ET APPROVISIONNEMENT RAPIDE DES MARCHES Mauvaise qualité de la production Frais élevés sur les garanties et SAV. Coûts de stockage élevés (avec risque d’obsolescence des produits). (Gardiennage, hangar de stockage … : immobilisations improductives de trésorerie). Manque d’adaptabilité et de flexibilité sur des marchés saturés et en renouvellement. LIMITES SOCIALES : Turn-over (coûts liés au remplacement de la main d’œuvre démissionnaire) • EXCES DE LA SPECIALISATION • COÛTS D’ORGANISATION Absentéisme, sabotage, grèves et conflits, coulage sur les chaînes de production Dépenses non- productives liées à la division horizontale (contremaîtres, agents de maîtrise …) Schéma 2 Schéma de synthèse sur la crise du Fordisme comme épuisement des innovations Fordiennes et Tayloriennes: Epuisement des innovations de produit-clé du Fordisme (Automobile, électroménager, textile…..) Contestation des méthodes Tayloriennes (Absentéisme, turn-over, conflits…) Ralentissement des gains de productivité Ralentissement de la croissance (Valeur Ajoutée) Epuisement des innovations de procédés (Organisation Taylorienne, standardisation, séries longues) Ralentissement de l’investissement Partage de la valeur ajoutée et des gains de productivité sur la base du compromis Fordiste (Indexation salariale automatique, hausse du pouvoir d’achat) Baisse de la rentabilité des entreprises (taux de profit à la baisse) Chômage Accroître le volume de la production n’est plus rentable à cause des coûts salariaux. Recours à l’inflation pour compenser la hausse des coûts salariaux, mais l’ indexation salariale est automatique.