Le Milan royal en hiver 2014-2015 en Wallonie

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Le Milan royal en hiver 2014-2015 en Wallonie
Le Milan royal en hiver 2014-2015 en Wallonie
1. Une région sur la marge de l’aire d’hivernage
En hiver, la Belgique se situe sur la frange nord-occidentale de la répartition du Milan royal, le gros
des effectifs se concentrant alors en France (5.000-7.000 ex.) et dans la Péninsule Ibérique.
Les Milans royaux sont alors peu nombreux et peuvent s’observer un peu partout en Wallonie (voir cicontre la carte des données des hivers 2010-2011 à 2013-2014). Des variations sont toutefois sensibles
d’un hiver à l’autre, probablement en fonction de l’abondance des micromammifères et de la météo
hivernale. Ainsi, les milans étaient assez dispersés en 2010-2011 et 2012-2013 mais très localisés sur
le Condroz et la région liégeoise en 2013-2014, un hiver pauvre en micromammifères.
L’origine des oiseaux observés en hiver en Belgique est documentée par au moins quatre reprises
d’oiseaux bagués au nid en Allemagne et une reprise en janvier 1993 d’un milan bagué au nid en
Suède; aucun des 768 pulli bagués au nid en Belgique n’a été repris en hiver dans le pays (données du
Centre belge de baguage aimablement transmises par D. Vangeluwe).
2. Dénombrer les Milans royaux en hiver
Chaque hiver en janvier, des recherches d’oiseaux présents en journée et de dortoirs sont
organisées. Cette enquête, devenue internationale, a été initialement inspirée par le recensement des
dortoirs en France (http://rapaces.lpo.fr/milan-royal/ ).
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En 2015, le 9e dénombrement du genre était centré sur le week-end des 10-11 janvier. Cet hiver, la
participation de 10 pays était annoncée par la LPO (France, Suisse, Espagne, Portugal, Italie,
Allemagne, Danemark, République tchèque, Luxembourg et Belgique).
Le mode de recensement centré sur les dortoirs et les décharges dans d’autres contrées est en fait
inopérant en Wallonie. En effet, la présence diffuse, l’absence de dortoirs utilisés à répétition et
l’attractivité réduite des dernières décharges (quasi plus de fraction alimentaire) impose de prendre en
compte l’ensemble des observations sur une plage de temps supérieure à un week-end. Une démarche
semblable est adoptée au Grand-duché de Luxembourg (Centrale Ornithologique Luxembourgeoise,
www.naturemwelt.lu ).
Sur le terrain, il s’agit donc d’être le plus attentif possible à l’espèce en journée et de rechercher les
dortoirs (même d’oiseaux solitaires). Pour cela, les observations prolongées d’oiseaux en vol orienté
au lever du jour (d’où viennent-ils ?) et l’après-midi après 15h (où dorment-ils ?) sont précieuses. La
découverte de dortoirs peut révéler une présence plus importante que soupçonnée en journée. Elle est
donc particulièrement importante pour mieux connaître le statut hivernal de cet oiseau menacé. Les
milans semblent souvent arriver dans la zone du dortoir vers 16h - 16h30 (cocher du soleil vers 16h4517h00).
La période d’observation prise en compte couvre le mois de janvier. Au coeur de l’hiver, il s’agit d’un
laps de temps sans migration apparente.
3. Le Milan royal en hiver 2014-2015 en Wallonie
Décembre.
- Des milans sont observés dans 44 localités dispersées dans la Région, la plupart au sud du sillon
Sambre-et-Meuse (voir carte).
- Les observations portent le plus souvent sur des isolés, quelques fois sur 2-3 ex., une fois 4 ex.
(réserve de la Vieille Rochette en Ardenne) et un seul groupe de 6 milans a été noté, mais en migration
apparente le 30 décembre près d’Arlon.
- L’exceptionnelle douceur de fin 2014 a en effet vu un nombre anormalement élevé de milans
prolonger leur séjour au nord des quartiers d’hiver habituels, en particulier en Allemagne et au Grandduché (www.ornitho.lu). Les passages notés en Wallonie jusqu’aux derniers jours de décembre (4, 10,
14, 30 et 31 décembre) s’inscrivent dans ce contexte.
- Indice d’hivernages locaux, quelques sites voient des observations répétées à quelques jours voire
quelques semaines d’intervalle, comme à Roisin du 10 décembre à fin janvier ou à Cherain en
décembre.
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Janvier
- Des milans s’observent dans 33 localités de Wallonie (voir carte). Ils sont concentrés au sud-est
d’une ligne Verviers – Sivry/Rance. Alors que quelques milans y avaient été pointés en décembre,
l’espèce est donc quasi absente en janvier du Condroz et du nord du sillon sambro-mosan ; aucun
contact ne provient du Pays de Herve. Cette distribution est semblable à celle observée en 2011-2012,
un autre hiver riche en micromammifères. En dépit de recherches, l’espèce s’avère manifestement très
rare dans des régions de l’aire de reproduction comme la Lorraine, la Famenne et les Cantons de l’est.
Ici, une placette de nourrissage n’est pas du tout fréquentée par l’espèce cet hiver (G. Reuter, com.
pers.).
- Tous les contacts ont eu lieu avec des isolés sauf trois mentions de 2 ex. : Thommen le 11, Chanly le
12 et Roisin en dortoir du 10 à la fin du mois.
- Les journées des 10, 11 et 12 janvier ont permis d’observer 15 ex. répartis sur 13 localités.
- Un seul dortoir a été trouvé le 10 janvier : 2 jeunes oiseaux venant de Belgique dans une peupleraie à
Wargnies-le-Petit (100m en France, département du Nord). Ils se sont déplaçés vers un petit bois à
Roisin après la coupe de la peupleraie fin janvier. Il n’y a donc pas eu de découverte de dortoir
important comme ce fut le cas début 2012 (31 à Thommen et 76 à Deidenberg dans la région de SaintVith).
Les données cumulées livrent un effectif de 39 ex. Ce total est une indication plausible de l’importance
minimale de l’effectif présent. Une estimation plus fine est illusoire vu la détectabilité modérée
d’oiseaux isolés et sans doute assez erratiques (peu de séjours manifestes). Certains doubles
comptages ne peuvent non plus être exclus.
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Collaborateurs
Les observations de décembre–janvier ont été transmises par 63 observateurs : P.Y. Bodart, G.
Brouyère, B. Calembert, C. Carels, B. Collet, E. Cordon, J. Coulee, T. Debaere, P. Deflorenne, R. de
Liedekerke, S. De Roo, C. de Wilde, G. Deschamps, C. Dordolo, C. Dortu, D. Dufour, O. Dugaillez,
R. Dujardin, R. Dumoulin, S. Farinelle, P. Freisen, Y. Giot, A. Godart, D. Grégoire, B. Hanus, Jakes,
B. Jardon, M. Kapoen, A. Kayser, C. Lange, S. Lambay, C. Legrand, V. Leirens, H. Loobuyck, J.F.
Maquet, M. Marion, V. Maucq, B. Molitor, J. Mols, M. Nicolas, J. Paternotre, P. Pierre, G. Reuter, C.
Rousseau, J.-S. Rousseau-Piot, S. Rouxhet, A. Schretter, G. Schütz, J. Seegers, N. Terordre, D.
Testaert, C. Thomas, R. Thunus, K. & N. Vanbellinghen, S. Van Rijn, S. Vanteenbrugge, F. Vassen,
D. Vieuxtemps, M. Vincent, S. Vyncke, T. Zeegers. Merci à tous.
4. Le Milan royal en Belgique en janvier 2015
En Flandre, des isolés (une fois 2 ex.) ont été pointés dans un total de 18 localités, certaines proches,
en janvier (voir observations.be). L’effectif belge peut donc prudemment être estimé de l’ordre de la
cinquantaine de milans au moins.
5. Quelle présence cet hiver dans les régions voisines ?
En Allemagne, à la suite d’une forte présence automnale permise par la douceur du temps, l’hivernage
est important à l’est d’une ligne allant grosso modo de Hambourg à Maastricht, notamment dans la
vallée de l’Elbe et plus au sud (voir ornitho.de).
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Au Grand-duché de Luxembourg, un petit nombre d’oiseaux sont présents (voir ornitho.lu) durant les
deux premières semaines de janvier : 14 oiseaux isolés sont dispersés dans le pays, dont 8 dans le sudest (M. Bastian, centrale ornithologique luxembourgeoise, www.naturemwelt.lu).
En Lorraine française, le dénombrement des 10-11 janvier, centré sur des CET (décharges) encore
bien attractifs, donne un total de 17 milans (G. Leblanc, LOANA, janvier 2015). Ce score tombe dans
la fourchette des cinq hivers précédents (1-33 ex.). Dans les Ardennes et le Nord –Pas-de-Calais,
l’espèce est seulement occasionnelle en hiver.
Jean-Paul Jacob
Département Etudes
Aves, Pôle ornithologique de Natagora
Février 2015
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