Les dernières avancées dans la prise en charge du

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Les dernières avancées dans la prise en charge du
Dossier de presse
Les dernières avancées
dans la prise en charge du
rétinoblastome
Point presse du 27 mai 2003
à l’issue du symposium international sur le rétinoblastome
(Institut Curie, 19-22 mai 2003)
Sommaire
Intervenants
p1
Les enjeux actuels du rétinoblastome
p2
Définition
p3
Les origines de la tumeur
p3
Un diagnostic simple qui doit être précoce
p5
Prédisposition génétique au rétinoblastome :
de la consultation au test
p6
Des traitements de plus en plus efficaces
et conservateurs
p9
Recherche clinique : améliorer les traitements
p 14
A la recherche de nouveaux traitements
p 16
Bibliographie
p 17
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Intervenants
I Dr Laurence Desjardins
Chef du Service d'Ophtalmologie de l'Institut Curie
Née en 1953, nommée interne des hôpitaux de Paris en 1976, Laurence Desjardins a passé un an
dans un service d'oncologie oculaire à New-York avant de rejoindre l'hôpital Necker où elle a été chef
de clinique pendant 3 ans.
En 1982, elle a pris en charge l'activité, de plus en plus importante, d'oncologie oculaire de l'Institut
Curie et elle assure la responsabilité du Service d'Oncologie Ophtalmologique depuis 1991.
Membre actif de la Société Française d'Ophtalmologie et du Groupe Européen d'Oncologie Oculaire,
elle est particulièrement investie dans le groupe international de travail sur le rétinoblastome.
I Dr François Doz
Médecin Spécialiste, Département de Pédiatrie de l’Institut Curie
Né en 1959, François Doz est médecin spécialiste au sein du Département d'Oncologie Pédiatrique de
l’Institut Curie depuis 1991.
Initiateur d'un groupe "Rétinoblastome" au sein de la Société Française d’Oncologie Pédiatrique
(SFOP), il est également vice-président de l'Association RETINOSTOP (Association de parents
d'enfants atteints de rétinoblastome et d'adultes anciennement traités pour rétinoblastome), à la
création de laquelle il a participé.
Ses nombreuses activités lui ont valu de multiples récompenses, dont la bourse James et Philippe de
Rotschild (1986/87), la bourse de la Ligue Nationale Française Contre le Cancer (1990) et le prix du
comité Seine Saint Denis de la Ligue Contre le Cancer (2001).
I Dr Rémi Dendale
Médecin Spécialiste, Département de Radiothérapie de l’Institut Curie
Né en 1964, chef de clinique-assistant des hôpitaux de Paris de 1995 à 1997, Rémi Dendale est
médecin spécialiste dans le Département d’Oncologie Radiothérapique de l’Institut Curie depuis
novembre 1997.
En 2000, il a succédé au Dr Pierre Schlienger en qualité de radiothérapeute spécialisé en
ophtalmologie. La même année, il participait à la première curiethérapie orbitaire effectuée à l'Institut
Curie avec le Dr Laurence Desjardins, le physicien médical Alejandro Mazal et le Pr Clare Stannard,
du Groote Schuur Hospital en Afrique du Sud, à l'origine de ce nouveau traitement des tumeurs
étendues.
Depuis, le Dr Rémi Dendale, le Dr Laurence Desjardins et le physicien Alejandro Mazal ont fait
progresser cette technique pour les irradiations orbitaires post-enucléation des retinoblastomes,
faisant de l'Institut Curie l'un des rares centres au monde à utiliser ce nouveau traitement en routine
I Dr Marion Gauthier-Villars
Pédiatre, Service de Génétique Oncologique de l'Institut Curie
Née en 1967, Marion Gauthier-Villars est ancienne interne des Hôpitaux de Paris, spécialisée en
Pédiatrie et titulaire d'un diplôme d’études approfondies de génétique moléculaire des maladies du
développement et de l’oncogénèse.
Depuis 1998, elle est attachée dans le Service de Génétique Oncologique du Dr Stoppa-Lyonnet et
est en charge de consultations sur les prédispositions génétiques aux cancers. Le Dr GauthierVillars est responsable de la consultation de génétique dédiée au rétinoblastome, mise en place
depuis 2000.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
Institut Curie 27 mai 2003
1
Les enjeux actuels du rétinoblastome :
Améliorer le diagnostic précoce
Rechercher de nouveaux traitements et améliorer les traitements
existants pour mieux préserver la vision
Le rétinoblastome est une tumeur cancéreuse de l’œil qui touche les cellules de la rétine.
Cancer assez rare (1 cas sur 15 000 à 20 000 naissances) et peu connu, il affecte le nourrisson e t
le jeune enfant en général avant l’âge de 5 ans, avec une légère prédominance masculine. Cette
maladie grave, souvent héréditaire, peut atteindre un seul œil (tumeur unilatérale dans 60 % des cas) ou
les deux yeux (tumeurs bilatérales dans 40 % des cas).
Relativement simple, le diagnostic reste parfois encore trop tardif. Les signes sont bien
connus (reflet blanc dans la pupille ou présence d'un strabisme) et doivent impliquer un examen
ophtalmologique dans les meilleurs délais. La précocité du diagnostic conditionne la mise en œuvre de
traitements conservant au mieux la vision.
Les traitements sont de plus en plus efficaces : à long terme près de 95 % des enfants
sont guéris dans les pays développés. Plus nombreux et mieux ciblés, ils permettent de traiter
spécifiquement chaque type de tumeur. Par contre, le pronostic visuel peut être compromis selon le
siège de la tumeur et l'impact des traitements sur la rétine.
La recherche de nouveaux traitements et l’amélioration des traitements existants,
préservant au mieux la vision de l’enfant reste une priorité. Leur mise en œuvre ne se conçoit
que dans un centre hautement spécialisé et nécessite une équipe pluridisciplinaire (ophtalmologistes,
pédiatres, radiothérapeutes, anatomopathologistes, anesthésistes, physiciens et généticiens) ayant une
grande expérience de cette maladie et disposant de tout le matériel nécessaire.
Dans la plupart des pays industrialisés, un seul centre assure la prise en charge par ces traitements
car, la maladie étant rare, les cas doivent être regroupés.
Les centres de référence dans le monde sont : Londres, Lausanne, Essen, Philadelphie, New-York,
Toronto et Paris.
L'Institut Curie est le centre de référence en France et l’un des plus importants au monde
pour la prise en charge du rétinoblastome. Plus de 60 nouveaux patients sont traités
chaque année à l’Institut Curie pour un rétinoblastome.
De par son expertise dans les traitements conservateurs, l’Institut Curie prend en charge la majorité des
patients atteints de rétinoblastomes bilatéraux et de nombreux enfants atteints de rétinoblastomes
unilatéraux.
L’Institut Curie effectue par ailleurs 90 % des tests génétiques de prédisposition.
A l’Institut Curie, médecins et chercheurs collaborent pour améliorer la prise en charge des patients,
notamment en recherche clinique, pour établir ou confirmer l’efficacité de protocoles et en
recherche fondamentale pour ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
Institut Curie 27 mai 2003
2
Définition
Le rétinoblastome est une tumeur cancéreuse de l’œil qui touche les cellules de la rétine.
Sans traitement, elle grossit, décolle la rétine et détruit progressivement la vision. La tumeur risque
ensuite d’affecter l’orbite, le nerf optique et le cerveau, voire même de disséminer dans l’organisme.
Lorsque la tumeur quitte son tissu d’origine, le pronostic vital peut alors être compromis.
Les atteintes extra-oculaires sont devenues exceptionnelles dans les pays industrialisés, mais leur
pronostic reste sévère. En revanche, dans les pays en voie de développement, elles sont encore
fréquentes.
Epidémiologie
Rare et peu connue, cette maladie affecte chaque année en France un enfant sur 15 000 à 20 000
naissances, en général avant l’âge de 5 ans, avec une légère prédominance chez les garçons.
Les origines de la tumeur
Le développement du rétinoblastome nécessite une double mutation du gène RB. Situé sur
le chromosome 13, et présent en deux exemplaires dans toutes les cellules du corps humain, le gène RB
est un gène suppresseur de tumeur c’est-à-dire que sa fonction normale est d’empêcher les cellules de
se multiplier de façon anarchique. Un seul exemplaire normal du gène suffit à prévenir la formation d’une
tumeur. Il faut donc la mutation des deux copies du gène RB pour développer un rétinoblastome.
‚ Tumeurs non liées à une prédisposition génétique (sporadiques)
Une double mutation au niveau du gène RB, sans aucun antécédent familial, peut faire apparaître une
tumeur sporadique, unique, qui ne touchera qu’un seul œil (unilatérale). Dans ce cas, les deux
exemplaires du gène RB sont inactivés dans toutes les cellules tumorales, alors que toutes les autres
cellules de l’organisme sont normales.
90% des tumeurs unilatérales entrent dans cette catégorie.
Ceci signifie que, après la naissance, deux événements génétiques distincts,
probablement indépendants, ont tour à tour altéré les deux exemplaires du gène RB dans
une même cellule qui, de ce fait, est devenue cancéreuse.
Sachant que l’inactivation d’un exemplaire d’un gène est un événement peu fréquent, et à plus forte
raison des deux exemplaires du même gène, on comprendra que ce type de rétinoblastome soit
relativement rare : 1/28 000 enfants.
ƒ Tumeurs liées à une prédisposition génétique
L'enfant est porteur d'une anomalie constitutionnelle du gène RB, c’est-à-dire une mutation
présente dans toutes ses cellules. Cette anomalie confère alors une prédisposition génétique au
rétinoblastome avec un risque de développer la maladie très élevé (90 %). Elle s'accompagne, dans une
moindre mesure, d'une prédisposition à la survenue d'autres tumeurs (sarcomes).
L’incidence de cette catégorie est d'environ 1/40 000 naissances.
Dans cette catégorie, les tumeurs sont le plus souvent multiples et bilatérales. Seuls 10%
des tumeurs unilatérales isolées sont liées à une prédisposition génétique.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
Institut Curie 27 mai 2003
3
Dans les rétinoblastomes liés à une prédisposition génétique, on distingue les :
Formes familiales (10 à 15% des rétinoblastomes)
Lorsqu'il existe un antécédent connu dans la famille, on parle de forme familiale de rétinoblastome.
L’altération, une mutation constitutionnelle du gène RB présente chez l’un des parents, a été
transmise à la descendance dans un cas sur deux. Les enfants qui en héritent ont un risque majeur de
développer un rétinoblastome.
Formes non familiales (héréditaires à partir du sujet lui-même)
De façon paradoxale, les tumeurs liées à une prédisposition génétique sont le plus souvent sans
antécédent familial (la mutation du gène RB n'est pas préexistante chez l'un des parents).
En effet, c’est au moment de la formation des gamètes ou au début du développement de l’embryon que
se produit une première mutation d’un exemplaire du gène RB. Toutes les cellules de l’organisme de
l’enfant sont touchées et l’altération devient héréditaire. L’enfant porteur de cette mutation aura un risque
sur deux de le transmettre à sa descendance.
Dans toutes les formes liées à une prédisposition génétique, l’inactivation de la deuxième copie du
gène RB apparaît au cours des premiers mois de la vie de l’enfant.
 C. Charré/Institut Curie
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4
Un diagnostic simple qui doit être précoce
La précocité du diagnostic du rétinoblastome est un élément essentiel qui conditionne les possibilités de
traitements conservateurs et le pronostic visuel de l’enfant. Un diagnostic trop tardif peut même
compromettre le pronostic vital.
Les signes cliniques
Un reflet blanc dans la pupille (leucocorie) ou la persistance d’un strabisme (loucherie) sont des
signes qui ne doivent pas être négligés. Si un strabisme accomodatif très intermittent et de courte durée
peut être banal en vision de près chez un nourrisson, l’observation d’un strabisme permanent uni- ou
bilatéral doit imposer très rapidement, quel que soit l’âge de l’enfant, une consultation ophtalmologique
afin de pratiquer un fond d’œil.
Au début, la leucocorie n’est visible que dans certaines directions du regard et sous certains éclairages.
Il faut savoir écouter les parents qui signalent cette anomalie et déclencher immédiatement un bilan
ophtalmologique complet avec examen du fond de l’œil.
La leucocorie peut être visible précocement sur les photos au flash, mais les parents ne sont pas
toujours informés de la signification possible de cette anomalie. L'utilité de cette méthode de dépistage
pourrait à l'avenir être évaluée dans les examens pédiatriques systématiques, mais elle n'est pas en
pratique courante actuellement.
L'examen du fond d'œil
Le diagnostic du rétinoblastome repose essentiellement sur l’examen du fond d’œil pratiqué sous
anesthésie générale. Il précise le nombre de tumeurs, leur taille, leur localisation et l’existence ou non
d’un envahissement du vitré (gel transparent situé à l’intérieur de l’œil).
L’examen du fond de l’œil est souvent complété par un scanner ou une IRM et par une échographie
oculaire.
Dans le rétinoblastome unilatéral, la tumeur est souvent déjà importante sur l’œil malade car l’enfant
a compensé la perte visuelle avec l’œil sain et les symptômes sont souvent tardifs. Seules les tumeurs
développées dans la partie postérieure de l’œil et responsables d’un strabisme (du fait de la destruction
de la partie centrale de la rétine, ou macula, qui empêche la fixation par l’œil malade) sont parfois
diagnostiquées plus précocement.
Pour les rétinoblastomes bilatéraux avec antécédent familial, un dépistage précoce par examen
systématique du fond d’œil, tous les mois dès la naissance si l’enfant est porteur de l’anomalie
génétique, doit permettre un diagnostic précoce et une conservation oculaire bilatérale.
Pour les rétinoblastomes bilatéraux sans antécédent familial, on peut avoir des formes
évoluées des deux côtés avec un pronostic visuel très sombre. Mais il existe de nombreux cas où
l’atteinte est asymétrique avec un œil très atteint et un œil comportant des tumeurs de petite taille
accessibles à des traitements conservateurs. Le pronostic visuel est alors meilleur.
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5
Prédisposition génétique au rétinoblastome :
de la consultation au test
Avant le développement des tests génétiques de prédisposition, pour dépister le plus tôt possible
l’apparition d’une tumeur, il était recommandé à tous les apparentés (enfant, fratrie, cousins) d’un enfant
atteint ou qui a été atteint d’un rétinoblastome, une surveillance ophtalmologique très contraignante : fond
d’œil dès le premier mois de vie, voire la première semaine de vie, réalisé en milieu spécialisé puis à un
rythme rapproché et nécessitant une anesthésie générale dès le deuxième ou troisième examen.
L’identification du gène de prédisposition au rétinoblastome, le gène RB [1]1, en 1986 a permis de
développer des tests génétiques estimant les risques tumoraux individuels. Ils consistent à rechercher la
présence d’anomalie au niveau du gène RB (voir « les mutations du gène RB » p.7).
La recherche d’une prédisposition génétique, maintenant proposée à tous les patients ayant eu un
rétinoblastome, permet soit de lever la surveillance ophtalmologique chez les apparentés qui s’avèrent
non porteurs de la prédisposition, soit de la poursuivre chez les apparentés porteurs.
Des consultations spécialement dédiées au rétinoblastome
Depuis novembre 2000, le Dr Dominique Stoppa-Lyonnet, chef du Service de Génétique
Oncologique de l’Institut Curie, a mis en place des consultations de génétique destinées
spécifiquement aux enfants atteints de rétinoblatome et à leurs parents.
Environ 90 familles sont reçues chaque année en consultations à l’Institut Curie par le Dr Marion
Gauthier-Villars [2] :
2/3 d’entre elles concernent des parents avec un enfant en cours de traitement ou venant d’être
traité et qui souhaitent savoir s’il existe un risque pour leurs autres enfants ;
1/3 sont dispensées à d’anciens patients en âge d’avoir des enfants et qui désirent connaître le
risque pour leur descendance.
Des consultations de génétique existent dans d’autres villes2 afin d’en faciliter l’accès aux familles
confrontées au rétinoblastome sur l’ensemble du territoire.
Les tests génétiques de prédisposition
Une étude génétique peut être proposée à tout patient atteint de rétinoblastome uni ou bilatéral.
En France, 90 % des tests génétiques sont pratiqués à l’Institut Curie3.
Ils permettent de détecter au niveau moléculaire les mutations présentes dans le gène RB. Ils sont
effectués sur de l’ADN extrait d’un prélèvement sanguin (globules blancs). Pour éviter toute erreur, deux
prises de sang indépendantes sont analysées.
Les altérations génétiques sont différentes d’une famille à l’autre, alors qu'une même mutation se
retrouve chez les membres d’une même famille.
Les tests génétiques se font donc en deux étapes : la première recherche de mutation familiale puis le
tests individuels.
1
2
3
Toutes les références bibliographiques sont rassemblées p. 18.
Lille, Marseille, Brest, Nantes, Lyon, Nancy, Rennes, Caen, Toulouse, Montpellier…
10% sont réalisés à Lille (Centre Oscar Lambret)
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6
La première recherche de mutation familiale (cas index)
Au préalable, un consentement éclairé signé du patient, ou de ses deux parents lorsqu’il s’agit d’un
patient mineur, est recueilli.
Cette première étape est longue (de 3 à 6 mois) puisque l’on ne sait pas quel type de mutation est en
cause et où elle se situe sur le gène.
L'identification de la mutation familiale est cruciale pour pouvoir proposer ensuite des tests de
prédisposition aux apparentés indemnes.
Les mutations du gène RB
Le test individuel
Dans un deuxième temps, un test individuel est proposé aux
apparentés (fratrie, cousins) à risque mais indemnes de la
maladie. La recherche est plus rapide (environ 1 mois)
puisque la mutation familiale est connue (cette fois on sait
exactement ce que l’on cherche). Son interprétation est
simple : porteur ou non porteur de la mutation familiale.
Si les enfants testés ne s’avèrent pas porteurs d e
la mutation identifiée dans la famille, la surveillance
ophtalmologique pourra être levée.
En cas de résultat positif (porteur de la mutation),
une surveillance
ophtalmologique
en
milieu
spécialisé est mise en place pour dépister
précocement l’apparition de la maladie.
Elles sont très diverses et dispersées sur
l’ensemble de la séquence codante du
gène RB, qui est un gène de grande
taille. Actuellement
plus
de
350
mutations différentes sont recensées.
Il s’agit, dans environ 80 % des cas, de
mutations ponctuelles ou de petite taille
conduisant à une protéine déficiente.
Dans environ 10 % des cas, il s’agit de
mutations de grande taille, délétions
complètes ou partielles du gène RB.
Enfin dans près de 10 % des cas, il s’agit
de mutations dont le caractère causal
n’est pas toujours facile à apprécier.
Le risque tumoral varie en fonction de la
nature de la mutation. En effet, il
apparaît que les porteurs d’une mutation
conduisant à une protéine défectueuse
ont un risque majeur, de plus de 90 %,
de
développer
un
rétinoblastome
bilatéral.
Le diagnostic prénatal ou néonatal
Par ailleurs, dans le cadre d’un nouveau projet parental, la recherche de la mutation peut
également être proposée aux parents de l’enfant malade.
Si l’un des deux parents s’avère porteur, un diagnostic prénatal peut être envisagé : un
prélèvement est effectué entre la 11e et la 13e semaine de grossesse, et s’il indique la présence de la
mutation une interruption volontaire de grossesse est possible.
Si les parents ne sont pas porteurs, la mutation n’est donc pas d’origine familiale. Cependant, il peut
s’agir d’une mutation uniquement présente dans les cellules reproductrices de l’un des parents
(mosaïque germinale). Ce qui explique que l’on ne la retrouve pas lors du test à partir d’un prélèvement
sanguin. Un test génétique à la naissance (diagnostic néonatal) est alors toujours proposé et certains
vont même jusqu’à préconiser un diagnostic prénatal.
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Si alors même qu’il y une forte suspicion, aucune mutation familiale du gène RB n’a été
mise en évidence, il faut évoquer les limites des techniques dont la sensibilité est estimée à 90%.
Une étude cytogénétique complémentaire, qui permet l’étude visuelle de l’ensemble du génome, est alors
effectuée par le Dr Jérôme Couturier (responsable de l’Unité de cytogénétique de l’Institut Curie). Elle
consiste en un caryotype4 standard et en une étude du gène RB par sonde fluorescente. Cette analyse
permet dans certains cas d’identifier des altérations complexes responsables du rétinoblastome.
Profil génétique et évolution tumorale
Parallèlement à la recherche de prédispositions génétiques, les médecins de l’Institut Curie cherchent à
établir s’il existe une corrélation entre le type d’anomalie génétique du gène RB et l’évolution de la
pathologie (nombre de tumeurs, survenue de rétinoblastome « trilatéral », caractère invasif…) [3].
En utilisant l’hybridation génomique comparative (CGH), qui permet notamment de détecter les gains ou
les pertes de matériel génétique, le Dr Jérôme Couturier a déjà analysé les déséquilibres
chromosomiques d’une soixantaine de tumeurs [4]. Les rétinoblastomes présentent une répartition des
anomalies de leur matériel chromosomique maintenant bien caractérisée.
Les recherches s’orientent désormais vers l’identification éventuelle d’un profil génétique spécifique des
tumeurs invasives et donc plus à risque, ce qui permettrait d’améliorer le pronostic en adaptant les
traitements. Des études sont également menées afin de mieux connaître la fonction du gène RB et de
mieux comprendre son implication dans les tumeurs de l’œil.
Pour en savoir plus : Les méthodes de détection des mutations
La très grande diversité des altérations du gène RB, différentes d’une famille à l’autre, impose l’exploration
de l’ensemble du gène lorsqu’il s’agit de la première recherche de mutation.
La première étape consiste à extraire l’ADN du sang (globules blancs) de la personne à5 tester, puis à réaliser
une amplification morcelée de la région de l’ADN concernée par les techniques de PCR .
La détection des mutations ponctuelles ou de petite taille6 s’effectue par séquençage direct ou par une
méthode de criblage associée au séquençage.
Le séquençage direct permet de déterminer précisement la succession de nucléotides dans une molécule
d’ADN. Il est toutefois limité puisqu’il ne permet pas de détecter les mutations de grande taille.
Le séquençage indirect (criblage puis séquençage) est une méthode qui repère la présence de mutations
sur des fragments d’ADN, avant de séquencer les régions présumées porteuses d’une mutation.
A l’Institut Curie, la technique de criblage utilisée est la DHPLC (DNA High Performance Liquid
Chromatography). Cette méthode physico-chimique, en repérant les régions de la double hélice d’ADN qui
ne s’apparient pas, met en évidence la présence d’une région non complémentaire dans un fragment d’ADN
et donc porteuse d’une mutation.
L’étape suivante est le séquençage classique des fragments susceptibles de porter des mutations afin de
les détecter précisément.
En ce qui concerne les mutations de grande taille, hormis les techniques de cytogénétique, caryotype et
FISH, on utilise la PCR semi-quantitative (QMPCF : Quantitative Multiplex PCR).
4
Jeu complet de chromosomes d’une cellule, rangé en fonction de la taille, de la forme et du nombre.
PCR (réaction de polymérisation en chaîne) : technique permettant de copier en plusieurs exemplaires des régions
spécifiques de l’ADN.
6
Mutations ponctuelles ou de petite taille : substitution, délétion ou insertion de quelques nucléotides, constituants
élémentaires de l’ADN (A, C, T et G). Mutations de grande taille : délétion ou insertion de plusieurs centaines de
nucléotides.
5
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8
Des traitements de plus en plus efficaces et conservateurs
L’objectif est de guérir l’enfant tout en lui conservant si possible l’œil et la vision.
L’utilisation des différents traitements est fonction de la forme de la tumeur (héréditaire/sporadique,
unilatérale/bilatérale) de sa localisation dans l’œil, de son volume et de l'âge de l'enfant [5].
L’énucléation reste encore souvent nécessaire dans les formes unilatérales et pour l’un des yeux dans
les formes bilatérales. Pour ces dernières, des traitements conservateurs peuvent être envisagés au
niveau du deuxième œil.
Les traitements sont de plus en plus efficaces, puisque 5 ans après traitement, 95 % des
enfants traités sont en vie. Ils sont considérés comme guéris avec toutefois un degré d'atteinte
visuelle variable.
La vision
L’acuité visuelle finale après traitement dépend essentiellement de la taille et de la localisation de la
tumeur initiale. Pour apprécier les résultats visuels, il faut savoir qu’il existe deux éléments importants :
-
L’acuité visuelle, qui est déterminée par l’état de la macula (partie centrale de la rétine) et qui
permet la vision fine, en particulier la lecture.
-
Le champ visuel, qui est déterminé par tout le reste de la rétine et qui permet de voir
grossièrement les formes et les obstacles, et de se déplacer normalement.
Il y a donc une différence fondamentale entre une personne aveugle et une personne qui a conservé un
peu de rétine fonctionnelle et de champ visuel. C’est la raison pour laquelle, dans les formes bilatérales
évoluées, on essaie au maximum de conserver au moins un œil avec un peu de rétine fonctionnelle.
La localisation des tumeurs
Pour bien comprendre les
indications thérapeutiques, il
faut savoir qu’il existe dans
l’œil deux parties distinctes,
antérieure et postérieure,
séparées par une ligne
virtuelle appelée équateur.
La partie de la rétine qui est
postérieure
à
l’équateur
comporte des structures très
fragiles (la macula, ou centre
de la rétine, et la papille, ou tête
du nerf optique). De ce fait, au
niveau postérieur, certaines
thérapeutiques ne peuvent pas
être
utilisées
car
elles
risqueraient de compromettre
la vision.
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9
La chimiothérapie
Dans la majeure partie des tumeurs qu'elles soient unilatérales ou bilatérales, une
chimiothérapie première est réalisée afin de les rendre accessibles à des traitements
conservateurs quand ils sont envisageables.
Le traitement conservateur local du rétinoblastome sera d’autant moins agressif que la tumeur est petite
[6]. Dans ce contexte, le traitement de l’œil malade est généralement précédé d’une chimiothérapie
première qui permet de réduire de façon significative le volume des tumeurs. Cette chimiothérapie
consiste actuellement en l’association de deux médicaments, l’étoposide et le carboplatine [7, 8].
Après la chimiothérapie première, une évaluation des tumeurs par fond d’œil sous anesthésie générale
permet d’orienter le traitement local en fonction de leur taille finale et de leur localisation.
Les traitements conservateurs
De plus en plus performants, les traitements locaux du rétinoblastome peuvent être associés sur le
même œil selon la taille ou la localisation de la tumeur.
Tumeurs postérieures à l’équateur de l’œil
Thermochimiothérapie
Introduite à l'Institut Curie en 1995, cette technique de pointe est le premier traitement
conservateur, autre que l'irradiation externe, pour les tumeurs du pôle postérieur de l'œil
mesurant jusqu'à 10-12 mm de diamètre.
Les résultats se sont encore améliorés récemment : jusqu’à 90 % de guérison e n
première intention avec le minimum de séquelles.
Cette technique combine l’action de la chaleur et celle de la chimiothérapie. La chaleur permet de
sensibiliser la tumeur au médicament dont l’action anticancéreuse est ainsi renforcée. C’est un traitement
qui conserve l’œil et qui permet d’éviter l’irradiation externe. Si plusieurs tumeurs touchent le même œil,
elles peuvent être traitées en même temps [9].
Le traitement modifie l’aspect de la tumeur, il la fragmente progressivement, voire même, en cas de petite
lésion, redonne à la rétine sa forme aplatie d’origine. La cicatrice finale reste souvent entourée d’une
zone de remaniements pigmentaires visibles.
Déroulement du traitement
Le 1er cycle du traitement commence par une séance d’une heure de chimiothérapie (perfusion intraveineuse de
carboplatine) immédiatement suivie d’une séance de termothérapie effectuée au bloc opératoire sous anesthésie
générale. La chaleur est appliquée sur la tumeur pendant 5 à 20 minutes à l’aide d’un laser d'iode dirigé par
l'intermédiaire d'un microscope opératoire, ce qui permet une grande précision. Le traitement s’échelonne sur 2 à 4
cycles espacés de 28 jours selon la taille de la (des) tumeur(s). Chaque cycle comporte 1 perfusion de carboplatine et
1 ou 2 séances de laser.
Photocoagulation
Cette technique permet d’éliminer les petites tumeurs postérieures à l’équateur n e
dépassant pas 2 mm de diamètre.
Elle consiste à projeter un faisceau lumineux intense et étroit sur les vaisseaux sanguins qui alimentent
la tumeur, pour entraîner leur destruction par brûlure.
Le traitement, indolore, ne dure que quelques minutes et se déroule sous anesthésie générale soit en
ambulatoire, soit lors d’une courte hospitalisation. Deux ou trois traitements successifs peuvent être
nécessaires.
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10
Radiothérapie externe
En cas d’échec des traitements précédents ou dans le cas de tumeurs évoluées,
volumineuses ou présentant un envahissement du vitré, les médecins peuvent avoir
recours à une radiothérapie externe.
A raison de 5 séances hebdomadaires, pendant 4 à 5 semaines, l’enfant reçoit une irradiation ciblée sur
l’œil atteint de quelques minutes. Des effets secondaires importants ont toutefois été décelés (défaut de
croissance, séquelles oculaires et endocrines, augmentation du risque de sarcome secondaire) et en
font restreindre actuellement les indications.
Risque de cancer secondaire après radiothérapie
D’après les études épidémiologiques [10], les patients ayant eu un rétinoblastome avant l’âge de un an et traités par
radiothérapie ont un risque de développer un ostéosarcome dans la zone d’irradiation durant leur adolescence. Ce
risque est encore plus élevé chez les enfants prédisposés : cette deuxième tumeur serait due à l’induction de nouvelles
lésions génétiques notamment au niveau de l’exemplaire indemne du gène RB dans les cellules saines irradiées.
Tumeurs antérieures à l’équateur de l’œil
Cryothérapie
La cryothérapie est efficace pour des tumeurs situées en avant de l’équateur et n e
dépassant pas 3 mm de diamètre et 2 mm d’épaisseur. Elle est contre-indiquée en cas
d’envahissement du vitré.
L’intervention consiste à geler la tumeur à plusieurs reprises en appliquant de très basses températures
(- 60° à - 80°C) afin de la détruire.
Déroulement de l’intervention
La cryothérapie se fait soit en ambulatoire, soit lors d’une courte hospitalisation de 24 heures. Elle s’effectue sous
anesthésie générale et ne dure que quelques minutes. Un examen du fond d’œil pendant l’intervention permet de
contrôler que la boule de glace recouvre bien la tumeur. Un contrôle du fond d’œil est effectué une semaine après
l’intervention. Si la rétine n’est pas redevenue complètement plane après le premier traitement, une seconde séance
peut éventuellement être décidée.
Curiethérapie par disque radioactif
Ce traitement permet de traiter des tumeurs périphériques antérieures à l’équateur n e
dépassant pas 15 mm de diamètre. Elle est très efficace en cas d’envahissement localisé
du vitré. Cette technique utilise des disques contenant des grains d’iode qui permettent une irradiation
très localisée de la tumeur sans risque d’endommager le contenu et la paroi orbitaires.
Déroulement de l'intervention
La curiethérapie s’effectue sous anesthésie générale et nécessite une hospitalisation de quelques jours. Après avoir
soulevé la conjonctive, fine membrane translucide qui recouvre l’avant du globe oculaire, un disque en or contenant des
grains d’iode 125 est mis en place sur l’enveloppe externe de l’œil. L’or permet d’arrêter le rayonnement de l’iode vers
les zones à protéger (paupières, tissus orbitaires et paroi osseuse). L’intervention dure de 30 à 40 minutes. Le disque
est laissé en place 2 ou 3 jours, temps nécessaire pour que le sommet de la tumeur reçoive une dose suffisante de
rayons. Puis, il est retiré lors d’une courte intervention sous anesthésie générale.
Un fond d’œil de contrôle est effectué un mois après l’intervention pour vérifier l’aspect de la tumeur qui évolue en règle
générale vers une cicatrice plane ou très peu épaisse en quelques semaines.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
Institut Curie 27 mai 2003
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Le traitement chirurgical
Lorsque la tumeur est très volumineuse et la destruction visuelle déjà importante, la
meilleure solution thérapeutique est l’ablation chirurgicale de l’œil dite « énucléation ».
Cette solution est surtout proposée pour traiter les rétinoblastomes unilatéraux (dans 80 % des cas),
d’autant qu’ils sont souvent diagnostiqués tardivement car l’enfant a tendance à compenser la perte
visuelle avec l’œil indemne. Dans les formes bilatérales, l’énucléation reste encore souvent nécessaire
pour l’œil le plus atteint, des traitements conservateurs étant envisagés pour le deuxième œil.
L’intervention, sous anesthésie générale, dure environ une heure. Après avoir procédé à l’ablation de
l’œil, le chirurgien pose un implant en corail pour préparer la mise en place d’une prothèse. Dans ce
domaine également, les progrès sont importants et les techniques permettent aujourd’hui d’obtenir des
résultats esthétiques satisfaisants.
Les traitements complémentaires
Les tumeurs étendues, c’est-à-dire celles qui ont commencé à disséminer au-delà du globe oculaire
et/ou via le nerf optique, sont exceptionnelles dans les pays industrialisés. En revanche, dans les pays
en voie de développement, les rétinoblastomes sont, aujourd'hui encore, le plus fréquemment
diagnostiqués à ce stade. Leur pronostic reste très sévère et le plus souvent vital.
Dans ces atteintes extra-oculaires, ainsi que dans les tumeurs qui présentent un risque de rechute
locale ou de dissémination métastatique, l’énucléation n’est pas toujours suffisante. Il est alors
indispensable de traiter le tissu orbitaire, afin d’éviter une récidive, voire une extention métastatique dans
l’organisme par un traitement complémentaire à l’énucléation. Les indications de traitements
complémentaires dépendent du degré de diffusion de la tumeur au niveau de l’œil et du nerf optique :
Lorsque la tumeur atteint la partie initiale du nerf optique ou l’épaisseur de la paroi de l’œil, une
chimiothérapie post-opératoire est pratiquée. Si les limites chirurgicales se situent dans le tissu tumoral
(en particulier lors de l’envahissement de la tranche de section du nerf optique), une chimiothérapie et
une irradiation sont alors nécessaires.
La curiethérapie orbitaire, nouveau traitement des tumeurs étendues
Jusqu’en 2000, l’irradiation orbitaire consistait en une irradiation externe, source d’effets secondaires
importants (voir p.11). Depuis 2000, à l’Institut Curie, le Dr Rémi Dendale, le Dr Laurence Desjardins et le
physicien médical Alejandro Mazal ont mis en application la curiethérapie orbitaire, une technique
développée en Afrique du Sud par le Pr Clare Stannard (Groote Schuur Hospital, Cape Town) depuis
1983.
La curiethérapie orbitaire permet de délivrer une importante dose d'irradiation aux tissus de la cavité
orbitaire tout en évitant les organes périphériques grâce notamment à l’utilisation de lignes contenant les
grains d’iode 125. Ces lignes ont un blindage en inox protégeant l’os de la cavité orbitaire pour préserver
sa croissance. Ce traitement a également l'avantage d'être court et de laisser moins de séquelles
esthétiques au niveau du visage et des paupières que l'irradiation externe.
Six enfants ont été traités à l’Institut Curie depuis 2000 et 56 au Groote Schuur Hospital depuis 1983, les
deux centres au monde utilisant cette technique en routine.
Déroulement de l'intervention
Après avoir enlevé l'implant de corail posé à l’issue de l'énucléation, six « gouttières » en inox contenant des grains
d'iode 125 sont implantées en périphérie et une au centre de l'orbite. Puis, un disque en or, également chargé de grains
d'iode 125, est posé sur l'ensemble du dispositif. Les paupières sont ensuite suturées sur le disque et un pansement
avec une coque de plomb est réalisé. La curiethérapie orbitaire est effectuée au bloc opératoire sous anesthésie
générale. L'enfant est hospitalisé en chambre plombée de 3 à 7 jours selon les cas. Une fois le retrait des lignes et du
disque effectué au bloc opératoire sous anesthésie générale, l'enfant peut rentrer à son domicile où lui seront prescrits
des soins locaux. Une prothèse pourra ensuite être posée.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
Institut Curie 27 mai 2003
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La surveillance après traitements
Pendant un an, une surveillance mensuelle du fond d’œil sous anesthésie doit être effectuée. Ensuite,
selon les résultats, les visites de contrôle s’échelonnent tous les deux mois, puis tous les trimestres.
Après 4 ans, l’examen du fond d’œil est en général possible sans anesthésie.
Les enfants porteurs d’un rétinoblastome unilatéral doivent avoir une surveillance prolongée de l’autre
œil car des bilatéralisations tardives sont possibles.
La surveillance ophtalmologique est complétée par une surveillance en oncologie pédiatrique destinée
notamment à déceler d'éventuels effets secondaires des traitements.
En cas d'échec des traitements conservateurs successifs, il faut parfois pratiquer une énucléation
secondaire.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
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Recherche clinique : améliorer les traitements
La recherche de nouveaux traitements conservateurs et extrêmement bien tolérés par les
patients est depuis toujours une priorité de l’Institut Curie.
Ceci nécessite la mise en commun des compétences d’équipes pluridisciplinaires (ophtalmologistes,
pédiatres, anatomopathologistes, radiothérapeutes, anesthésistes et généticiens) ayant une grande
expérience de cette maladie et disposant de tout le matériel nécéssaire.
A ce jour, les médecins et les chercheurs de l’Institut travaillent ensemble pour définir de nouveaux
protocoles alliant efficacité, confort pour le patient et conservation de la vue.
Deux protocoles sont actuellement en cours d’analyse : l’un concerne l’amélioration de l’efficacité de la
chimiothérapie administrée avant traitement local et le second vise à réduire l’utilisation du laser en
termochimiothérapie chez les enfants pour lesquels il représente un risque de perte de la vue.
Si le bénéfice pour l’enfant n’est pas avéré, il est immédiatement retiré du protocole pour être traité avec
les thérapies classiques.
Améliorer l’efficacité de la chimiothérapie
Le traitement conservateur local du rétinoblastome sera d’autant moins agressif que la tumeur est petite.
Dans ce contexte, le traitement de l’œil malade est généralement précédé d’une chimiothérapie première
qui permet de réduire de façon significative le volume des tumeurs. Elle consiste actuellement en
l’association de deux médicaments, l’étoposide et le carboplatine.
L’objectif essentiel du protocole mis en place à l’Institut Curie au printemps 2003 est dévaluer l’efficacité
de la chimiothérapie par carboplatine seul par rapport à la chimiothérapie standard (association
étoposide-carboplatine). Le carboplatine seul a en effet une excellente activité antitumorale et,
en ne lui associant pas l’étoposide, on espère réduire les effets secondaires immédiats
ou retardés observés. Car, les molécules utilisées en chimiothérapie ayant également des effets
toxiques sur les cellules saines, on peut espérer les réduire en limitant la varitété des produits.
Après deux cures de chimiothérapie première, une évaluation des tumeurs par fond d’œil sous
anesthésie générale permet d’orienter le traitement local en fonction de leur taille finale et de leur
localisation.
30 à 60 patients seront inclus dans cette étude qui se déroule sur quatre ans.
Restreindre la perte visuelle
Les traitements locaux laissent parfois une cicatrice au niveau de l’œil. Lorsque la (ou les) tumeur(s)
unilatérale (ou bilatérale) est très proche du centre de la vision (macula), la cicatrice induite par la
termochimiothérapie peut alors provoquer une perte visuelle.
Une étude anglaise parue en 2002 [11] a montré qu’une chimiothérapie composée d’une combinaison de
trois médicaments (étoposide, vincristine, carboplatine) pouvait être efficace en traitement seul de ce
type de rétinoblastome.
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Cette chimiothérapie pourrait permettre d’éviter la termochimiothérapie et donc la perte visuelle chez les
enfants atteints de rétinoblastome très proche de la macula.
Un protocole qui propose ce traitement est actuellement en cours à l’Institut Curie.
Les enfants concernés étant relativement rares, la participation d’au maximum 26 patients est prévue en
quatre ans.
A la fin de la période nécessaire au recrutement d’un nombre suffisant de patients, il sera
alors possible d’estimer le bénéfice de ces deux protocoles. S’il s’avère suffisant, ils
pourront alors devenir des traitements standards.
Les notices de consentement pour l’entrée dans ces deux protocoles ont été rédigées en partenariat
avec l’Association Retinostop, qui rassemble des familles touchées par le rétinoblastome7.
7
Rétinostop : c’est en 1993, que Martine Lorrain, mère d’une petite fille âgée de 2 ans et atteinte du rétinoblastome,
décide de créer l’association. Dès novembre 1993, une quinzaine de parents se réunissent. Aujourd’hui, Rétinostop compte
plus de 300 membres en France et à l’étranger (Suisse, Espagne et Belgique). Cette association nationale est basée à
l’Institut Curie et est en relation avec l’APAESIC (Association des Parents et Amis des enfants soignés à Institut Curie).
Elle a pour but :
- de favoriser un diagnostic précoce avec information des professionnels médicaux et paramédicaux ;
- d’apporter aux parents confrontés à la maladie, lors de l’annonce du diagnostic et des traitements, une aide morale et, si
besoin, matérielle ;
- d’informer et de sensibiliser les pouvoirs publics sur la spécificité du rétinoblastome ;
- de diffuser les informations concernant la prise en charge du handicap visuel et les structures disponibles selon les
régions ;
- de soutenir la recherche sur le rétinoblastome.
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A la recherche de nouveaux traitements
L’utilisation de traitement qui ne provoque pas d’altérations génétiques est un enjeu particulièrement
important notamment chez les patients déjà porteurs d’une mutation du gène RB pour lesquels il faut
limiter la survenue de toute nouvelle mutation (voir p. 3) qui pourrait provoquer un second cancer.
L’optimisation des traitements du rétinoblastome a d’ores et déjà permis de restreindre l’utilisation de la
radiothérapie. Quoique faible, le risque d’altérations génétiques existe également avec les
chimiothérapies.
Dans ce contexte, les chercheurs de l’Institut Curie étudient de nouvelles stratégies thérapeutiques.
La photothérapie dynamique (PDT) qui repose sur l’activation de molécules photosensibles (ou
photosensibilisateurs) par la lumière visible leur est apparue comme une alternative particulièrement
intéressante. En effet, le protocole à mettre en œuvre dans la PDT se différencie peu de celui utilisé en
thermochimiothérapie : seule la nature du médicament et de la lumière change.
Un médicament photosensibilisant, non mutagène donc sans danger à long terme pour le patient, lui est
administré par voie intraveineuse et va se fixer préférentiellement au niveau des tissus cancéreux.
Après un certain délai (quelques minutes à quelques heures), la tumeur est illuminée avec un laser dont
la longueur d’onde permet d’exciter le photosensibilisateur [12, 13]. Cette réaction photochimique, non
agressive pour le patient, entraîne la destruction des tissus tumoraux. En outre, l’association d’un produit
spécifique des cellules tumorales et d’une irradiation lumineuse locale permet de circonscrire au
maximum la région traitée et de limiter ainsi les effets toxiques sur les tissus sains.
Conscients du progrès que pourrait représenter la photothérapie dynamique dans le traitement du
rétinoblastome, les chercheurs de l’Institut Curie travaillent à la synthèse de nouveaux composés et à la
démonstration de leur efficacité in vitro puis sur des modèles animaux.
A l’Institut Curie, le groupe de Philippe Maillard8 a ainsi développé des molécules originales, à partir de
composés connus et en essayant de pallier à leurs limites, notamment en ce qui concerne l’affinité pour
les cellules tumorales.
Une étude in vitro sur des cellules de rétinoblastome d’une centaine de produits a d’ores et déjà permis
de sélectionner les composés alliant efficacité et synthèse rapide. Ils doivent dorénavant être tester sur
des modèles in vivo.
Par ailleurs, Marie-France Poupon9 vient de développer un modèle animal. C’est la première fois que l’on
réussit à obtenir des souris chez lesquelles des cellules de rétinoblastome prélévées chez un patient ont
pu être greffées. Les études pré-cliniques qui vont bientôt débuter permettront d’évaluer le potentiel
photothérapeutique des produits synthétisés par Philippe Maillard.
C’est un parfait exemple des recherches transversales, associant médecins, biologistes, chimistes et
physiciens, menées à l’Institut Curie et rendues possible du fait de la proximité des différents
spécialistes.
Ce projet bénéficie en outre du soutien financier de l’Association Rétinostop.
8
Unité CNRS/Institut Curie « Conception, synthèse et vectorisation de biomolécules » dirigée par David Grierson.
9
Equipe « Altérations métaboliques et thérapie » au sein de l’Unité Inserm/Institut Curie « Instabilité du génome et
cancer » dirigée par Michelle Debatisse-Buttin.
" Dernières avancées dans la prise en charge du rétinoblastome "
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Bibliographie
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Article sous presse
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