Pourquoi l`eau douce devient-elle « l`or bleu
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Pourquoi l`eau douce devient-elle « l`or bleu
Pourquoi l’eau douce devient-elle « l’or bleu » ? Rappel du plan I. L’accès à l’eau douce et son utilisation A) Une ressource aux utilisations variées B) Une ressource mal répartie entre les hommes II. Les menaces qui pèsent sur l’eau douce A) La rareté de l’eau B) Conflits internationaux et régionaux III. Vers des solutions au problème de l’eau ? A) Les solutions techniques B) Coopération et éducation Problématique : pourquoi l’eau devient-elle l’or bleu ? Pourquoi n’est-elle plus une ressource accessible à tous ? Comment remédier à cet état de fait ? Actuellement, les individus utilisent 10% des ressources disponibles, soit 650m3 /an/personne en moyenne. Autre chiffre : 571 m3/an/pers ou 8,8% des ressources renouvelables, selon le FAO (2008). L’eau est un milieu qui accueille une immense biodiversité. Introduction « Le droit à l’eau consiste en un approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût abordable, d’une eau salubre et de qualité acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun ». Observation générale nº15 relative au droit de l’eau, ONU, 2002. Quelles sont les menaces qui pèsent sur l’eau ? Une ressource inégalement répartie : Malgré son apparente abondance, l’eau est très inégalement répartie entre les pays et entre les hommes. C’est ce que révèle cette carte. 6 pays, dont le Brésil et la Russie, possèdent ensemble 60% des ressources en eau mondiales, la zone aride et semi-aride en est seulement dotée de 2%, bien que 1/5 de la population mondiale y vive. En conséquence, les ressources en eau par an et par habitant varient de moins de 100 m3 à plus de 100000 m3 en année en moyenne. Il faut souligner à ce stade la moitié des ressources mondiales en eau est commune à plusieurs pays, ce qui ajoute la complexité du facteur d’interdépendance. À cette forte inégalité géographique s’ajoute une inégalité sociale à l’intérieur de chaque pays. L’écart se creuse entre milieux ruraux et milieux urbains. En effet, dans les pays du Sud, le taux d’accès à l’eau potable est de 82% pour l’urbain contre 70% pour le rural. Pour l’assainissement, les taux sont respectivement de 73% et de 33%. Un autre aspect des inégalités sociales est le suivant : plus on est pauvre, moins l’accès à l’eau est facile, plus l’eau est chère. Ainsi, 80-90% du cinquième le plus riche de la population ont accès au réseau d’eau potable tandis que seulement 30-50% du cinquième le plus pauvre y a accès. Les plus pauvres dépensent ainsi quelque 20% de leur revenu pour l’eau, trois fois plus que les riches qui bénéficient également le plus des réseaux d’irrigation. 1,2 milliard de personnes n’ont pas accès à l’eau de manière suffisante, et ce sont bien sûr les plus pauvres. La dernière des inégalités d’accès à l’eau est celle entre générations, mais nous l’aborderons longuement dans notre deuxième partie. Il y a donc, à travers le monde, de grandes différences d’accessibilité et donc d’exploitabilité de l’eau. L’accès à l’eau pour tous est loin d’être garanti. Mais à ces inégalités existantes s’ajoutent des évolutions inquiétantes pour l’accès à l’eau douce dans le monde. Quelles sont les menaces qui pèsent sur cet « or bleu » ? La rareté de l’eau : si l’eau est de plus en plus rare, ce n’est pas seulement en raison de problèmes de quantité d’eau disponibles, mais aussi en raison de problèmes de qualité de l’eau. C’est pourquoi nous traiterons ces deux aspects. Commençons par certaines définitions : Pauvreté en eau : moins de 1000 m3/an /hab ou taux d’exploitation des ressources supérieurs à 50%. Pénurie en eau : moins de 500 m3/an /hab ou taux d’exploitation approchant les 100%. 23 pays et 125 millions d’habitants sont en état de pauvreté en eau, dont 15 pays et 53 millions d’habitants se retrouvent en situation de pénurie structurelle. Or, une menace pèse sur l’évolution des pénuries d’eau dans le monde : l’explosion démographique du 21e siècle pose de sérieux problèmes en ce qui concerne l’accès à l’eau pour tous. En effet, le potentiel d’eau disponible à l’homme était estimé à 6500 m3 par an / par hab. En 2025, ce chiffre diminuera jusqu’à atteindre 5100 m3 par an/personne. Certains pays auront à affronter des réductions drastiques compte tenu de l’explosion démographique, comme l’Ouganda, qui en 2000 procurait à sa population 1674 m3/an/personne et qui devra se contenter en 2025 de 384 m3/an/personne. L’explosion démographique en quelques chiffres : vers 2050, l’Inde aura accru sa population de 563 millions de personnes. Le Pakistan, l’un des pays les plus arides du monde, de 200 millions => problèmes majeurs pour les besoins en eau. La demande en eau double tous les 20 ans. Pour reprendre nos définitions initiales : en 2025, 35 pays et 1145 millions d’habitants seront en situation de pauvreté d’eau dont 26 pays et 345 millions d’habitants en situation de pénurie, et c’est ce que l’on voit sur cette carte. Vulnérabilité : 2500 m3/hab/an. Stress : 1700 m3/hab/an. Pénurie : 1000 m3/an/hab. L’augmentation des niveaux de vie est aussi un facteur qui contribue à la rareté de l’eau. En effet, des populations plus aisées auront tendance à par exemple diversifier leur nourriture, en consommant notamment beaucoup plus de viande (qui consomme bien plus d’eau par tonne produite). 250 litres d’eau pour 1kg de pommes de terre, 15000 litres pour 1 kilo de viande. À cette explosion démographique s’ajoute enfin l’évidente urbanisation. L’urbanisation a pour conséquences que davantage d’eaux doivent être acheminés pour les activités domestiques et industrielles des villes. Cela se traduit notamment par la surexploitation des ressources régionales (lacs en Inde) et leur dégradation. « Les quantités croissantes de déchets et d’eaux usées menacent la qualité de l’environnement et la durabilité de la ressource et imposent la mise en place de stations de traitement des eaux usées et de mesures de protection de l’environnement ». Quelles sont les conséquences de cette diminution quantitative des ressources en eau par individus ? =>La surexploitation des ressources, ce qui se traduit concrètement par l’assèchement des fleuves et le surpompage des nappes souterraines. L’assèchement des fleuves : certains des plus grands fleuves du monde sont déjà à sec une partie de l’année et ont beaucoup de mal à atteindre la mer. Un exemple : le fleuve jaune en Chine. La prolifération des détournements d’eau pour satisfaire des besoins surtout agricoles et industriels fait baisser considérablement le niveau des fleuves. En Chine, depuis 1985, le fleuve Jaune est à sec une partie de l’année. En 1997, il n’a pas pu rejoindre la mer pendant 226 jours. De plus, les détournements d’eau en amont portent un évident préjudice à l’aval. C’est le cas de la province de Shandong, qui un jour se trouvera totalement privée de l’eau du fleuve jaune, qui apportait 50% de son eau d’irrigation. Le surpompage des nappes phréatiques : le pompage dans les nappes phréatiques est une autre manière de répondre aux pressions hydriques. En effet, grâce à des technologies de plus en plus puissantes, les personnes peuvent désormais atteindre des nappes plus profondes jusque-là inaccessibles. Comment définir le surpompage : lorsque le pompage excède le taux de renouvellement annuel des aquifères. Cela entraine des conséquences effrayantes : « À cause du surpompage des nappes phréatiques, la ville de Mexico s’est enfoncée au XXe siècle de 9 à 11 mètres par endroits. Les bâtiments se fissurent, les réseaux d’eau, d’égouts, et de métros doivent être constamment surveillés et refaits ». La surexploitation des nappes phréatiques est surtout utilisée pour l’irrigation agricole, car rappelons que 70% de l’eau douce utilisée sert à l’agriculture. Or, entre 1950 et 2000, la superficie mondiale de surfaces irriguées est passée de 90 millions à 270 millions. Autrement dit, elle a triplé, et elle continuera d’augmenter pour répondre au défi de l’explosion démographique. L’Inde et la Chine devront bientôt faire face à un problème majeur, lorsque la totalité de l’eau disponible dans les nappes aura disparu. Selon Lester Brown, si tous les pays se mettaient d’accord pour arrêter le surpompage des nappes, la récolte mondiale de céréales chuterait de 160 millions de tonnes, soit 8% et les prix flamberaient. Mais ce sera bien pire si on attend la chute complète des niveaux disponibles des nappes. S’ajoute au problème de la quantité le problème de la qualité de l’eau. Tout d’abord, il faut rappeler la distinction importante existante entre prélèvement et consommation. Ce qui retourne au cycle de l’eau sous forme d’évaporation ou d’écoulement vers les nappes souterraines n’est souvent pas de la même qualité que l’eau fournie au départ. À cause de l’utilisation intensive en agriculture d’engrais et de produits chimiques, la qualité de l’eau tend à se dégrader, ce qui contribue à augmenter sa rareté. Le problème est que l’homme, après avoir utilisé l’eau à des fins domestiques et industrielles, rejette l’excédent usé enrichi en « sels, bactéries, produits chimiques, matières organiques, métaux lourds, hormones et produits toxiques ». 400 millions de tonnes de matières organiques et de produits toxiques sont déversées tous les ans par l’activité industrielle (l’industrie alimentaire à 50%). Les détritus concentrés dans des décharges ainsi que les produits de leur décomposition sont aussi lessivés vers les nappes phréatiques et contribuent à leur pollution. C’est ce qu’on appelle les zones localisées. Les zones diffuses sont des surfaces cultivées pour la plupart. « La salinisation et l’augmentation des concentrations en nitrates sont propres aux aquifères phréatiques dans les régions cultivées et ont des conséquences importantes sur la quantité des volumes d’eau utilisable. ‐ La pollution industrielle et urbaine : les pollutions industrielles sont anciennes, mais elles ont pris une dimension nouvelle avec l’industrialisation. Exemple des pluies acides. ‐ La pollution agricole : elle est liée à l’essor de l’agriculture intensive dont les engrais et pesticides dépassent la capacité d’autoépuration des milieux terrestres et aquatiques et s’accumulent dans les écosystèmes. Un des problèmes majeurs est le coût de l’assainissement. Les pays les plus pauvres ne peuvent s’offrir des stations d’épurations. C’est ce qu’on voit sur cette carte. Beaucoup de pays ne peuvent assurer le traitement des eaux usées, ce qui porte préjudice, évidemment, à la qualité de l’eau. À ce danger sur la quantité disponible d’eau s’ajoute le facteur du réchauffement climatique. En effet, le réchauffement de plusieurs degrés va perturber le cycle de l’eau, modifiant les cycles de précipitations, mais également les cycles de sécheresse. La collaboration et l’éducation « Aujourd’hui, la recension réalisée par A. Wolf, de l’université de l’Oregon, sur plus de 450 évènements liés à l’eau montre que, souvent, la coopération l’emporte largement sur les conflits ». C’est ce que prouve ce graphe qui montre les différentes relations interétatiques liées à une gestion commune de l’eau. Au XXIe siècle on observe la prise en compte que l’eau a une valeur de partage. Donc, de nombreux pays ont pris conscience de l’intérêt que représentent la coopération et la collaboration autour du partage des richesses hydriques => création de commission jointes d’experts dans le but de trouver un terrain d’entente ainsi que réalisation d’un traité pour garantir le respect de la décision commune. Par exemple, protection du Danube par l’action conjointe de l’Union Européenne et du WFD (Water Framework Direction), par la constitution d’une commission internationale l’ICPDR (commission internationale de protection du Danube) détermine un cadre commun de tous les pays riverains dans le principe de base est la gestion d’un bassin unique. Objectif de réduction de la pollution. Cette prise de conscience de nécessité d’action commune laisse entrevoir un avenir positif au bassin. Un exemple de la coopération : Israël et la Jordanie, autour du Jourdain. 1994, signature d’un traité de paix abordant notamment la question du partage de l’eau entre les deux pays. Israéliens et Jordaniens optent pour une coopération technologique et pour une gestion commune d’une partie du Jourdain. La coopération vise à développer, grâce à des techniques de pointes, la maximalisation des apports d’eau. Construction de réservoir pour capter le surplus des pluies hivernales et barrage sur le Yarmouk pour régulariser son débit. Accord également sur la quantité d’eau allouée à chaque pays. On voit que la coopération autour de l’eau est possible malgré des tensions politiques très fortes. Ainsi, aujourd’hui, presque tous les grands bassins mondiaux ont au moins une instance de coordination technique et la plupart ont des commissions permanentes pour coordonner les politiques de l’eau. Enfin, la juridiction internationale semble essentielle pour protéger les ressources hydriques mondiales. La convention des Nations Unies de 1997 définit le droit de partage équitable et raisonnable de l’eau, en opposition du principe de souveraineté de l’État riverain. Même si elle n’est toujours pas en vigueur, elle constitue tout de même un support dans le règlement des problèmes inhérents à chaque État qui revendique une partie d’un cours d’eau. Ces solutions sont à exploiter et le sont déjà. De plus, aucun progrès technique ne peut supplanter les bienfaits de l’éducation à l’épargne de l’eau. En effet, le comportement des citadins, surtout dans les pays développés, repose sur la conception que l’eau est abondante, simplement parce qu’elle coule lorsqu’on ouvre le robinet. Des comportements d’épargne pourraient réduire de moitié la consommation en eau des citadins. Dans les vieilles villes ou les pays pauvres, ce sont les fuites de canalisation des systèmes de distribution qui occasionnent des pertes très importantes. Ainsi, les problèmes de l’accès à l’eau sont d’abord des problèmes de comportement et d’attitude qu’il faut résoudre, principalement par une approche éducative. Enfin, question de donner un prix plus judicieux à l’eau pour remédier à la sousévaluation de la ressource. Voir l’eau et la vie p. 93-94. En effet, l’eau est trop souvent subventionnée dans les pays, ce qui entraine son gaspillage. Il faut donc repenser la valeur économique de l’eau. L’auteur affirme que l’augmentation du prix de l’eau aurait pour effet paradoxal d’être plus favorable aux pauvres, à condition de mettre en place des moyens de compensation, c’est-à-dire d’aide à la personne au moyen de paiements forfaitaires. Conclusion Quel avenir se dessine quand à l’accès à l’eau et son utilisation par les hommes ? En 2000 avaient été posés les objectifs du millénaire : réduire de moitié la proportion de la population mondiale n’ayant pas un accès minimal à l’eau potable et à l’assainissement. Selon les plus récents rapports de l’OMS et de l’Unicef, l’objectif pourra être atteint à 90% pour l’eau potable. Cela prouve que la crise de l’eau est davantage liée à la capacité de mobilisation plutôt qu’aux ressources brutes. 3 scénarios pour 2025 ‐ La solution « business as usual » : crise de l’eau, augmentation de la pollution et baisse des rendements de l’agriculture irriguée. ‐ Situation intermédiaire : aggravation de la situation dans les pays du Sud et situation critique pour de grands bassins versants comme le Nil, le Niger ou l’Indus. ‐ Situation la plus optimiste : mise en œuvre réussie des techniques innovantes. Consommation en eau globale et pression sur l’environnement n’augmenteraient que très peu. Quel impact du réchauffement climatique ? Encore assez incertain, mais il va surement accélérer le cycle de l’eau (inondations et sécheresses plus fortes et plus intenses).