La création d`entreprise par les femmes
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La création d`entreprise par les femmes
Proposition de communication La création d’entreprise par les femmes : une démarche identitaire singulière ? Proposition de communication La création d’entreprise par les femmes : une démarche identitaire singulière ? M.N. Chalaye IAE de Bretagne Occidentale, Laboratoire I.C.I . I. Guégen, chargée de mission EQUAL Conseil Général du Finistère [email protected] '[email protected]' Nous souhaitons, dans notre intervention, rendre compte des résultats de l’étude sociologique sur les freins à la création d’entreprise par les femmes dans le Finistère, recherche menée dans le cadre de la mission EQUAL « égalité professionnelle ». Cette recherche action avait pour objectif de construire les hypothèses permettant d’expliquer un taux de création d’entreprise par les femmes plus faible dans le département que pour l’ensemble du pays. Cette recherche devait également permettre la mise en place de mesures d’accompagnement spécifiquement destinées aux femmes. Ces mesures ont été mises en œuvre et nous serons au moment du colloque en mesure d’en donner la pertinence. Les hypothèses suivantes ont été explorées durant la phase d’étude : HYPOTHESE 1 : Il existe une spécificité des femmes créatrices / hommes : pour les femmes, la création d’entreprise est une démarche identitaire et un instrument de réussite personnelle. A travers les différentes études et notamment celle de l’APCE, et des différents constats réalisés, nous pouvons indiquer que : Les femmes créatrices sont plus âgées que les hommes créateurs Elles sont plus opportunistes Elles sont moins influencées par leur entourage Elles sont plus diplômées mais moins qualifiées 2/3 des femmes ne suivent aucune formation préparatoire à la création d’entreprise Elles développent des projets d’envergure économique et financière plus réduite que les hommes ( moins de capitaux investis, CA plus faible, moins de création d’emplois…) Elles se concentrent dans des domaines d’activités particuliers et relativement dominés par les femmes ( services aux personnes, santé, formation …) Il nous semble que c’est la nature de la démarche des femmes qui induit ces différences. Parmi les raisons citées pour créer, c’est le goût de l’autonomie, de l’indépendance qui est cité presque systématiquement. La création d’entreprise par les femmes doit donc être appréhendée comme une démarche identitaire. La situation des femmes salariées renforce leur volonté de démontrer leurs capacités, de prouver leurs compétences professionnelles. Comme le souligne le rapport Génisson, les femmes restent victimes d’un certain nombre de discriminations : Elles re présentent 60% des employés, 28 % des cadres et seulement 11.7% des cadres dirigeants. Elles ont peu de chance d’accéder aux postes décisionnels. Elles supportent des conditions de travail difficiles en étant fortement représentées dans les métiers exigeant une forte disponibilité horaire ( soins aux personnes, commerce …). Cette situation s’aggrave du fait du développement d’horaires de travail atypique. Elles sont plus touchées que les hommes par la précarité et le temps partiel subit Leurs revenus sont plus faibles : 80% des salariés percevant moins de 3650 FF net mensuel en 1997 étaient des femmes. L’entreprise offre donc peu d’opportunités aux femmes de démontrer l’étendue de leurs compétences, de se réaliser sur le plan professionnel. Créer son entreprise permet de répondre à la question qui suis-je ? à se positionner par rapport à ses parents, à l’éducation reçue et à une forme de conditionnement familial, mais aussi vis à vis du conjoint. Créer une entreprise c’est se construire une image de soi. « L’entreprise ou son projet a une forte résonance symbolique dans l’inconscient de son promoteur. Elle apparaît clairement comme une prolongation narcissique de sa personnalité, comme une « prison psychique ( Morgan, 1996) et donc, comme un objet de souffrance et de plaisir. Elle est un lieu de projection des fantasmes de puissance de son créateur. (…). Elle permet dans certains cas de réparer des évènements anciens par la construction de représentations dynamiques, conscientes et inconscientes. »1. Les femmes créatrices n’expriment pas de recherche de puissance, mais elles affirment de manière systématique leur besoin de prouver quelque chose à leur environnement essentiellement familial. Ce besoin serait ainsi d’autant plus fort lorsque le contexte familial les a dévalorisée. HYPOTHESE 2 : Créer son entreprise, c’est renouer dans certains cas avec son identité de femme : Les femmes développent un rapport spécifique à leur entreprise. Elles sont moins intéressées que les hommes par la réussite sociale dont les indicateurs les plus classiques sont le revenu tiré de l’entreprise, le nombre de salariés, le développement du chiffre d’affaires. Au contraire, l’effet revenu est largement sacrifié à la flexibilité dans l’organisation du travail ( voir Hypothèse 4). Leur rapport au pouvoir et à l’autorité est plus lâche. Elles entretiennent, même lorsqu’elles occupent des positions hiérarchiques élevées, une image de soi peu valorisante et expriment des valeurs telles que la modestie, l’humilité, le doute vis à vis de leurs compétences. Elles sont donc peu enclines à adopter, en tant que salariés des postes d’autorité. En effet, les femmes salariées désirant prendre des responsabilités doivent renoncer à leur féminité ( J. Laufer), adopter des règles comportementales établies par des hommes. Il existe ainsi une mauvaise image des femmes « chef », trop dures, trop exigeantes manquant d’humour. Cela 1 Extrait de « La temporalité des nouveaux entrepreneurs » de J.J. Pluchart in Revue Française de Gestion, janvier –février 2000 serait lié au fait qu’elles sont contraintes de se « masculiniser », pour se conformer aux attentes de l’employeur dont les références de performance sont celles des collègues masculins. De fait, les femmes seraient ainsi prisonnières de la culture de leur entreprise dont elles ne maîtrisent pas les caractéristiques. Créer son entreprise permettrait ainsi aux femmes de renouer avec leur identité de femme. Elles s’inscrivent alors dans une conception plus « féminine » du travail. Leur vision est ainsi globale vie professionnelle et vie familiale ne sont plus dissociées. Leur projet serait plus citoyen, et viserait à répondre en priorité à des besoins sociaux. Le caractère participatif serait une des spécificités du management féminin. Les femmes chercheraient ainsi à développer un lien social particulier avec leurs salariés, même si elles ne souhaitent pas pour la majorité embaucher de salariés Pour toutes ces raisons, elles cherchent avant tout à pérenniser leurs entreprises, pas toujours à les développer. HYPOTHESE 3 : Pour les femmes la création d’entreprise est l’occasion de renégocier la hiérarchie des rôles sociaux assumés ( professionnel, de femme et de mère ) : la liberté dans la gestion des temps et de l’espace est plus un élément de motivation qu’un frein à la création. Les femmes créatrices subissent les mêmes difficultés que leurs homologues masculins sur le plan économique, administratif, financier. Ce qui les distingue se sont les difficultés psychosociologiques et notamment la conciliation des rôles sociaux : travailleuse, conjointe, mère. La création d’entreprise permet également aux femmes de renégocier la hiérarchie de ces rôles sociaux. Dans leur vie privée, 80% de l’activité domestique ( soins des enfants) repose sur les femmes, soit une charge de 3H30 par jour. La recherche d’un fort taux d’implication et une exigence de disponibilité des salariés dans les entreprises obligent bien des femmes à sacrifier en partie au moins leur rôle de mère. Obligées de confier leurs enfants dès 5H30 le matin pour certaines ( ouvrières, infirmières)ou les récupérant tardivement, manquant de temps et contraintes de se concentrer sur l’essentiel souvent matériel, elles ressentent pour beaucoup un sentiment de culpabilité, elles peuvent même se sentir disqualifiées comme mère mais également comme épouse. Etre indépendante sur le plan professionnel leur permet de revaloriser leur rôle de mère grâce à une meilleure organisation du temps qui lui permet d’être plus présente auprès de ses enfants à certains moments de la journée. Certaines organisation spatiale de l’activité, permettent également à certaines chefs d’entreprise de « profiter » des enfants tout en travaillant ( ex commerçant vivant dans le même bâtiment que le local commercial, agricultrice…). Ainsi durant les entretiens préliminaires, les difficultés traditionnelles ne sont pas évoquées, de même que le problème de la garde des enfants. Au contraire, les femmes interrogées soulignent que la gestion du temps est plus simple dans un statut d’indépendante que dans un statut de salariée. Les contraintes d’horaires semblent plus simples à déverrouiller, (la proximité du domicile / travail semble fondamental). A cet égard notons que ce que souhaiteraient les femmes, ce ne sont pas des solutions de garde supplémentaire mais plutôt des solutions au sein des entreprises qu’elles dirigent pour être plus présentes auprès de leur famille. HYPOTHESE 4 : La démarche de création par les femmes est un processus autonome. Dans la mesure ou créer son entreprise est une marque de recherche d’autonomie et d’identité, les femmes créatrices pourraient rejeter la volonté d’autres acteurs ( y compris du conjoint) de s’immiscer dans leur projet. Ce qui expliquerait qu’elles sont plus distantes vis à vis des institutions et qu’elles supportent mal les jugements distanciés, les demandes de cautionnement du conjoint par exemple. Les femmes finistériennes créent leur entreprise à une période cruciale de leur vie psychique, autour de 35 ans, temps de la conjugalité et de la maternité. Le projet s’inscrit souvent dans un processus de revalorisation de l’image de soi. La démarche doit ainsi nécessairement être autonome : construire ou reconstruire son identité ne peut se faire de manière saine dans un contexte de dépendance en particulier affective. L’entreprise peut également être une dérivation du désir ou du désir d’enfant, un substitut plus ou moins conscient du conjoint ou de l’enfant. Il est évident que dans ce cas, la situation conjugale pourrait être menacée. C’est pourquoi l’ensemble des acteurs de la création d’entreprise souligne l’importance de l’adhésion du conjoint. L’adhésion du conjoint au projet est un préalable à la plupart des créations, comme tendrait à le montrer la fréquence des difficultés conjugales pour les femmes chefs d’entreprises ne bénéficiant pas de ce soutien. L’entreprise est en effet, un objet de puissance susceptible de bouleverser l’équilibre d’un couple. HYPOTHESE 5 : Les freins majeurs concernent la période de genèse du projet. Cela est dû à la nature psycho-sociale des freins majeurs. Plus de 85 % des projets initiés n’aboutissent pas à une création et ne donnent lieu qu’à l’établissement d’une première fiche contact. Notre attention doit donc tout particulièrement sur la compréhension de cette phase assez obscure et peu analysée dans les différentes études disponibles. D’après une étude menée au sein de la Chambre des Métiers du Finistère en 2001 2, les causes d’abandon du projet sont majoritairement des raisons personnelles. Les causes commerciales ne sont évoquées que dans 2.2 % des cas, les causes financières ( manque d’apport, prêt refusé, absence de subvention) dans 21.7% des cas. Il est ainsi possible de décomposer le mécanisme de la création : ARRET Evènement déclencheur Situation professionnelle Période de construction d’une représentation entreprise future Situation financière POURSUITE CALCUL RISQUES Phase de mise en œuvre projet ENTREPRISE REELLE Parent Caractéristiques Conjoint Milieu personnelles : 2 « Porteurs de projets, qu’êtes vous devenus ? » suivi des créateurs, antenne de Brest de la Familialdes Métiers 2000-2001 Âge Chambre Formation Expérience Place dans fratrie … FEED BACK Amis Collègues Enfants HYPOTHESE 6 : L’attitude des réseaux constitue un frein à la mise en œuvre des projets La littérature sur la création d’entreprise par les femmes laisse penser que les femmes souffriraient d’un déficit de réseaux dans la mise en œuvre de leur projet et la pratique de leurs affaires. L’attitude des banques, conseils, avocats, services de soutien aux créateurs, conjoints, réseaux amicaux affectent particulièrement les femmes compte tenu du caractère identitaire de leur démarche. Il existerait ainsi une phase critique, celle de la distension des liens entre créateurs et l’ensemble de ces institutions publiques, de ces partenaires. Ainsi par exemple un retard apporté à une réponse, des absences aux réunions …auraient des effets de déconcentration, de déréalisation, de dépersonnalisation. Le projet serait ainsi perçu par les femmes comme éphémère, non viable et serait donc abandonné. Cette distance vis à vis du créateur est dommageable dans la mesure où la démarche de la créatrice est appréhendée comme phénomène de construction identitaire. Développer son identité ne peut se faire en dehors du processus d’identification / opposition. Le registre attendu des relations est ainsi d’ordre affectif plus que technique. HYPOTHESE 7 : Le poids de la culture finistérienne marquée par le matriarcat est un frein à la création d’entreprise par les femmes de part le rôle marqué du chef d’entreprise. Dans la culture traditionnelle, la femme se verrait dotée de prérogatives importantes au sein du foyer. Néanmoins sur le plan de la vie sociale, c’est l’homme qui doit, du moins en apparence affirmer sa domination. De ce fait, devenir chef d’entreprise impliquerait pour une femme de sortir de son rôle social. En effet cette fonction implique d’assumer des fonctions de représentation sociale traditionnellement dédiées aux hommes. Il semble évident que ce type de frein doit être plus marqué en zone rurale qu’en zone urbaine. De même pouvons nous penser que les cultures littorales et maritimes doivent se distinguer des cultures purement rurales. La méthodologie retenue : La nature des phénomènes étudiés, nous a conduit tout naturellement à opter pour une méthode qualitative fondée sur la réalisation d’entretiens semi directifs type « histoire de vie ». Notre objectif, compte tenu de l’absence d’éléments de réponse évidents à priori, était de construire des hypothèses, de rechercher des liens de causalité d’un phénomène lié à un contexte particulier : celui du Finistère. Nous avons donc cherché à comprendre le phénomène et non à identifier et évaluer des liens statistiques entre des variables. Il s’agit bien d’une étude sociologique et exploratoire. Ainsi les résultats obtenus ne s’appliquent-ils qu’à la création d’entreprise par les femmes dans le Finistère. La généralisation à d’autres situations n’est pas fondée scientifiquement. Toutefois, nos conclusions ont largement rejoints celles obtenues dans le cadre d’études similaires menées en France et a Québec. Le caractère probatoire des résultats obtenus est néanmoins fondé. Nous avons veillé à la mise en œuvre des principes de réplication et de saturation indispensable à l’établissement de la valeur scientifique de notre travail. Depuis la fin de l’étude, un travail parallèle sur les hommes créateurs a permis d’établir définitivement les distinctions entre hommes et femmes créatrices Les principales conclusions : H 1 - Il existe une spécificité des femmes créatrices par rapport aux hommes : pour les femmes, la création est une démarche identitaire et un instrument de réussite personnelle. Complètement vérifié, le poids des aspects psychosociologiques du phénomène est indéniable. La démarche est bien de nature affective, même si elle est rationalisée. La rationalisation apparaît plutôt à posteriori. Toutefois : Attention à des perceptions voire des besoins différents selon les catégories socioprofessionnelles. A la l’éventuelle influence de la forme de recueil de l’information. Des entretiens individualisés pourraient légèrement influencer le besoin d’écoute (de photographe on se transforme en médecin) H 2 - Créer son entreprise, c’est renouer dans certains cas avec son identité de femme Complètement vérifiée H 3 - : Pour les femmes, la création d’entreprise est l’occasion de renégocier la hiérarchie des rôles sociaux assumés (professionnel, de femme et de mère). C’est un instrument de flexibilité dans l’organisation des temps sociaux. Complètement vérifiée, c’est en particulier les possibilités d’organiser de manière autonome les temps sociaux qui rend cette conciliation possible. Toutefois les problèmes liés à la maternité ( congés maternité mal indemnisé, problème des conditions d’allaitement) restent avérés. H 4 – La création d’entreprise est un processus autonome A partir du moment ou il commence à être mise en œuvre. Car comme nous le pensions, la plupart des démarches débutent par un événement introduisant une rupture familiale ( divorce, veuvage…) ou professionnelle ( perte d’emploi, mésentente avec employeur..) qui facilite le démarrage. H 5 - Les freins majeurs apparaissent pendant la période de conception du projet. Forcément ils sont plus nombreux. Le retour en arrière est encore possible. Plus la démarche est engagée, plus une remise en cause serait mal vécue du fait de la dimension affective. H 6 – L’attitude des réseaux constitue un frein à la mise en œuvre des projets En vérité, cela ne constitue pas un véritable frein mais plutôt une difficulté supplémentaire. Les partenaires du projet les plus important s appartiennent à l’entourage familial, amical et professionnel ( anciens collègues, employeurs) des créatrices. Les discours et les pratiques des institutions dédiées au soutien à la création sont perçues comme purement techniques. Les femmes ont peu d’attentes à cet égard. H 7 - Le poids de la culture finistérienne marquée par le matriarcat est un frein à la création d’entreprise de part le rôle social marqué du chef d’entreprise. Peut être de légères tendances semblent se vérifier. C’est peut être davantage la culture rurale qui expliquerait davantage le déficit de « créatrice ». L’agriculture reste un monde d’hommes, où les filles semblent peu valorisées. Il est possible que dans ce contexte, les blessures narcissiques de filles élevées dans un contexte de sur valorisation des frères, les handicapent pour créer une activité. Notons également qu’elles ont eu à entendre la souffrance de leurs mères qui ne les incitent pas à s’installer. Une femme créatrice a également avancé une autre explication, concernant le poids de la religion. Pour elle, les Bretons sont incapables d’exprimer leurs sentiments, cette absence d’élan affectif, vécu comme un manque de dignité aggraverait le manque de confiance en eux des gens, hommes et femmes confondus. C’est ce manque de confiance qui empêcherait le développement de projet de création d’entreprise. Nous n’avons pas pu explorer également le rapport particulier au patrimoine qui pourrait singulariser la population finistérienne. La peur de la perte du patrimoine, en particulier vis à vis des enfants pourrait également être évoqué ici. PRECONISATIONS pour l’accompagnement spécifique des femmes créatrices L’AIDE AU FINANCEMENT C’est une des demandes qui ressort nettement. Nous n’avons, cependant, pas de préconisations particulières à émettre dans ce domaine. Suite à ces différents entretiens deux remarques peuvent, toutefois, être faites : L’insuffisance de financement au démarrage d’un projet n’est pas spécifique aux femmes. Les réserves faites par le système bancaire sur certains dossiers ne sont pas forcément illégitimes, les projets peuvent ne pas être viables économiquement, cela d’autant plus que la dimension affective est forte dans les motivations des créatrices. LE SOUTIEN COMMERCIAL Plusieurs femmes évoquent en effet les difficultés qu’elles éprouvent à définir précisément leur activité, leur produit. C’est d’autant plus vrai pour celle qui veulent développer une activité éloignée de leur formation et de leur expérience préalable. Les femmes créatrices, comme les hommes d’ailleurs, doivent souvent se débrouiller seules pour réaliser une approche du marché. Ce qui explique la fréquente superficialité du travail réalisé. Explorer son marché est un travail complexe qui ne s’improvise pas. Les informations lors des formations obligatoires pour les créateurs paraissent insuffisantes à cet égard. Les prises de contact, la constitution d’un réseau professionnel sont difficiles (d’autant plus pour les personnes qui souffrent d’un déficit d’estime de soi). Un soutien particulier dans ce domaine pourrait ainsi aider la plupart des créatrices. LA PROMOTION DE L’ENTREPREUNARIAT FEMININ Deux axes possibles : Une réflexion sur l’orientation des filles au cours de la scolarité. En premier lieu il faudrait étudier comment et selon quels critères les filles choisissent leur formation. Le faible nombre d’étudiantes dans les filières technologiques et scientifiques est un fait avéré. Le comportement des parents mais aussi celui des enseignants devrait être cerné. Un travail de communication autour le l’entrepreneuriat pourrait être plus développé au sein des dispositifs de formation et d’insertion. LE SOUTIEN PERSONNALISE Le besoin d’un soutien personnel apparaît de manière indéniable : Tout d’abord, au niveau des motivations des femmes pour lesquelles la dimension affective est notable. Puis, dans les freins, non seulement les freins d’ordre psychologiques sont clairement abordés, mais plus indirectement parmi les difficultés citées certaines sont du même ressort : Déficit de réseaux professionnels. Manque de soutien de l’entourage. Enfin, lorsque des souhaits de solution sont clairement abordés, le besoin d’aide personnalisée apparaît spontanément, voire fait la quasi-unanimité lorsqu’il est cité (à l’issue de l’entretien) parmi les pistes possibles. Même si le besoin d’une aide psychologique (voire d’une psychothérapie) a clairement été abordé par certaines femmes interviewées, il convient d’être extrêmement prudent sur ce terrain : Il s’agit de ne pas se laisser entraîner sur le terrain de l’assistance ou de la prise en charge. Le rôle de l’accompagnant n’est pas de se substituer à un psychothérapeute. Il faut, également, tenir compte de la réserve et/ou de l’incompréhension de certaines femmes à l’égard de la dimension psychologique (corrélation avec le niveau d’études ?). Ce préalable étant posé, deux axes pourraient être travaillés : Proposer un accompagnement individualisé. Favoriser, lorsque le besoin le nécessite, un soutien psychologique. D’une manière générale, il faudra se pencher sur la légitimité des personnes devant assurer ces soutiens. L’expérience du terrain, la proximité psycho-sociologique est à favoriser. Tous les intervenants devront bien sûr être attentifs et respectueux du caractère identitaire de la démarche. Les outils de communication écrits et oraux devront être adaptés. Il faudrait ainsi s’interroger sur la pertinence de disposer d’outils spécifiques destinés aux femmes créatrices. ( les supports actuels que nous avons pu étudier présentent un vocabulaire et une iconographie laissant penser qu’un créateur d’entreprise c’est un homme.) Mise en place d’un accompagnement individualisé Les objectifs de cet accompagnement pourraient être les suivants : Répondre à une attente de soutien moral. Informer sur les interlocuteurs adaptés (sans se substituer à eux). Mettre en relation – Aider à la constitution d’un réseau. Aider la personne à mettre en cohérence les contacts avec les différents interlocuteurs. Alerter sur les points faibles d’un projet. Constituer et entretenir un réseau de partenariat avec l’ensemble des interlocuteurs institutionnels. Lors de la phase de projet de création, un accompagnateur (de profil généraliste) suivrait individuellement les personnes qui le souhaitent. Cela pourrait se faire sur la base d’échanges téléphoniques, e-mail, entretiens, éventuellement d’accompagnement lors de rendez-vous. Phase expérimentale : Compte de la délicatesse du sujet une phase expérimentale est nécessaire pour : Vérifier le bien fondé de l’aide Evaluer le temps et le poids optimum de l’accompagnement Permettre de définir un cahier des charges (ou une description de fonction) qui pourrait être intégré dans une démarche de « formation-action ». Définir la présentation qui pourrait être faite aux intéressées par la démarche. Favoriser un soutien psychologique La dimension psychologique est délicate à aborder, où placer les frontières entre le « manque de confiance en soi », le « manque de moral », la dépression, voire la maladie mentale. Prendre en compte la dimension psychologique dans toutes les interventions (comptables, juridiques, économiques…) ? Informations préalables déculpabiliser ? Dédramatiser ? Faire prendre conscience d’un « plafond de verre ». Offrir dans certains cas la possibilité d’aide à la carte (entretien avec un psychologue répondant à un cahier des charges précis ?, remise d’une liste ?...). Le dispositif de la mission EQUAL : La Plateforme Entreprendre au Féminin et le réseau des Femmes créatrices. A décrire Les préconisations ont été mises en œuvre à la fois dans un dispositif de formation et d’accompagnement individualisé, intégrant le genre. Cette expérimentation de 2 ans nous permets aujourd’hui non seulement de valider par la pratique la pertinence des résultats de l’étude sociologique. D’autre part d’évaluer les mesures d’accompagnement spécifiques. Les résultats de cette évaluation seront connus au moment du colloque. Une des principales conclusions de cette expérience riche, est de montrer que les femmes créatrices proposent une nouvelle vision de l’entreprise. Elles refusent l’intitulé traditionnel de chef d’entreprise. Les compétences qu’elles mettent en œuvre, les actions de coopération et de solidarité sur lesquelles elles s’appuient, sont de nature, pensons nous, de remettre en cause la vision traditionnelle de l’entreprise. Une entreprise plus citoyenne, permettant à ses dirigeants de mieux concilier ses différents rôles sociaux, c’est ce que veulent promouvoir ces femmes entrepreneures rompant ainsi avec la vision traditionnelle du chef d’entreprise. Nous souhaiterions ainsi susciter un débat autour de la place des femmes dans le développement économique.