Les hommes qui n`aimaient pas les femmes

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Les hommes qui n`aimaient pas les femmes
Les hommes qui n’aimaient pas les femmes
« LES HOMMES QUI N’AIMAIENT PAS LES FEMMES. »
(Stieg Larsson, premier tome du « Millenium » )
« La loi doit être l’expression de la volonté générale; toutes les citoyennes et
citoyens doivent concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa
formation ; elle doit être la même pour tous : toutes les citoyennes et tous les
citoyens, étant égaux à ses yeux, doivent être également admissibles à toutes
dignités, places et emplois, selon leurs capacités, et sans autres distinctions que
celles de leurs vertus et de leurs talents ; »
Monsieur le Président, chers amies et amis :
Comme suite à votre fraternelle demande de me présenter devant vous, je viens
de mettre en exorde de ma très courte planche une phrase extraite d’un texte
peu connu, publié en 1791.Ce texte s’intitule : « La déclaration des droits de la
femme. « Le fait que j’ai sollicité ma mutation dans une Loge mixte s’inscrit en
effet dans le cadre d’une réflexion sur la mixité, entreprise suite à un évènement
que j’ai mal vécu dans ma Loge du Grand Orient. Je souhaite vous la faire
partager, tout restant modeste : car ce n’est pas aux F :.et aux S :.de Lithos qu’il
serait nécessaire de rappeler que l’ouverture d’esprit, dont faisait preuve
Condorcet, n’a pas encore percolé dans l’esprit de certains autres M :..
Qui suis-je pour prétendre oser jeter un regard sur ce problème qui a déchiré et
qui déchire encore les Grands Orients de France et de Belgique, où l’on débat en
des termes qui à mon sens font plus souvent appel au juridisme qu’au cœur et à
la raison ?
Je suis un maçon qui a reçu la lumière en 1978, et a ensuite cheminé jusqu’au
26e degré du REAA., mais qui malheureusement ne fréquente plus l’Aéropage,
car si l’âge permet d’accéder à une certaine sagesse, il place aussi des limites
aux performances physiques. C’est le conflit de la liberté et des contraintes : j’y
reviendrai .En relation avec mon perfectionnement Maçonnique, permettez –moi
de dévoiler un léger pan de nos secrets : Durant mon parcours j’ai vécu de
nombreuses initiations reposant sur un fond mythique commun; dans ce mythe
fondateur, combien ai-je vu de personnages du sexe féminin ? La réponse,
Vénérable Maître, c’est : Aucun. Faut –il voir dans ce constat un symbole sur
lequel nous devrions longuement méditer ? Je vous en laisse juge …Dans un
autre ordre d’idées, je pourrais aussi ajouter que dans mon passé, M :. j’ai
rencontré des FF :. qui entendaient pratiquer une Fraternité « dure ». Je ne les ai
pas très bien compris, je ne savais pas qu’il puisse exister une Fraternité
« molle » ; pour moi, il existe une Fraternité-point Ou plutôt : trois points. Mais
laissons cela ... Pour en terminer avec ma présentation « spirituelle » j’ajouterai
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enfin que non seulement je suis laïc, mais qu’en plus j’ai récemment sollicité
ma débaptisation.
Mon parcours est par ailleurs celui d’un médecin qui, dans l’ordre anti
chronologique, a exercé les fonctions de gestionnaire, de chargé de mission en
pays du tiers-monde, de biologiste -hématologue, d’isotopiste, mais avant tout
de pédiatre .Oui ,le socle de ma formation professionnelle est bien dans ce que
Roger Martin Du Gard ,dans « Les Thibaud », qualifiait de « plus beau métier
du monde » : la médecine des enfants. Soit dit entre parenthèses, je n’ai plus
actuellement d’obligations médicales, et emploie mes nombreux loisirs à
l’apprentissage du russe (ou je me débrouille assez bien), ainsi que de la flûte
traversière (ou je commets d’innombrables fausses notes).
Ce que je viens de dire explique les quelques réflexions que je souhaite faire
devant vous à propos de la position de la femme dans la société. Domaine
infiniment vaste s’il en fut, mais où je vais donner un vigoureux coup de
zoom ,en vous livrant les réactions d’un pédiatre-Maçon à la problématique de
la maternité, telle que posée par Mme Elisabeth Badinder dans son livre
intitulé : « Le conflit ».
Deux préambules me paraissent utiles avant d’entrer dans le cœur du problème.
1. Le premier consiste à réaliser qu’au cours du dernier quart du XXe siècle,
la philosophie féministe s’est complètement métamorphosée : à
l’approche culturaliste de Simone de Beauvoir, qui préconisait une
politique de l’égalité et de la mixité des sexes en vertu de leur
ressemblance, a succédé une approche naturaliste, considérant que la
féminité est non seulement une essence, mais aussi une vertu, dont le
cœur est la maternité. C’est cette théorie qui prévaut actuellement.
2. Mon second préambule est de constater que le problème de la natalité se
pose en des termes contradictoires selon que l’on envisage les intérêts de
l’humanité, celui des religions, celui des états, ou celui des individus.
Comme l’a bien illustré le Professeur de Duve dans son livre intitulé « La
génétique du péché originel », l’intérêt de l’humanité impose un contrôle
strict des naissances, afin que l’effectif humain, qui atteindra les 9
milliards en 2050, ne s’accroisse plus en épuisant irréversiblement les
ressources naturelles. Tout autre est l’intérêt des états, qui doivent
augmenter leurs effectifs afin de garantir leur prospérité et leur défense
individuelles, et aussi de remplir les caisses de pension. Autre chose aussi
est l’intérêt des religions monothéistes, pour qui il s’agit d’accroitre le
nombre de leurs seuls fidèles; Mahomet ne disait –il pas que l’Islam
triompherait grâce aux ventres de ses femmes ? Mais ce qui retiendra ici
notre attention est l’intérêt de la femme –individu .Ecoutons en premier
lieu Mme Badinter, puis l’humble. Pédiatre –Maçon que je suis.
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Dès le début de sa grossesse, la femme éprouve des malaises variés, parfois tels
qu’un repos très strict lui est indispensable. On lui conseille à juste titre de
s’abstenir de tabac et d’alcool,mais ces recommandations sont parfois formulées
d’une manière vexante er culpabilisante. A l’heure actuelle, les douleurs de
l’accouchement peuvent être évitées grâce à l’anesthésie péridurale ou,
lorsqu’elle s’impose, par la césarienne .Toutefois, certains tenants de la théorie
naturaliste ne voient dans ces mesures antalgiques que les signes d’une
civilisation industrielle dégénérée; pour eux, la femme n’atteint pleinement sa
dignité et n’assume vraiment son authenticité que si elle s’en abstient .Alors, »tu
enfanteras dans la douleur » : liberté ou contrainte ?
Un peu plus loin ,Mme Badinter s’en prend au « bonding », c’est-à –dire à
l’attitude qui consiste à maintenir des contacts physiques aussi étroits que
possibles entre la mère et l’enfant, et cela dès le moment de la naissance. Elle
n’y voit qu’une mode, de même que dans le « cododo », c’est-à dire dans le fait
de faire dormir l’enfant dans le lit de ses parents, au mépris de l’intimité de
ceux-ci.
Mais c’est l’allaitement maternel prolongé qui préoccupe le plus Mme Badinter,
et il faut bien reconnaitre que là, elle ne manque pas de bons arguments. En
effet, certains ayatollah de l’allaitement maternel prolongé ont imputé à
l’allaitement artificiel une liste de maladies bien plus longue que celles des
maux imputés à la masturbation par le Dr Tisot, au XIXe siècle .Ces ayatollah
ont mis au bûcher l’allaitement au biberon parce que la paroi de certains de
ceux-ci contient du bisphénol A, une substance qui pourrait peut-être posséder
une certaine toxicité : comme si les biberons en verre n’existait pas? Le tire-lait
permet-il à la femme allaitante de retrouver une certaine liberté ? Pas sûr, pense
Mme Badinter, cela ne fait qu’amenuiser la servitude. Les inconvénients
encourus par la femme -telles que les crevasses mammaires- sont-ils tous
évitables? Mme Badinter en doute. Mais là où elle va chercher ses arguments les
plus décisifs, c’est lorsqu’elle décrit la » Leche League ». La » Leche Leage »
trouve son origine dans la concertation d’un petit noyau de femmes catholiques
militantes, en 1956, dans la banlieue de Chicago. Ce mouvement devint bientôt
mixte et se structura très rapidement sur un mode professionnel. Il organisa des
réunions en nombre croissant exponentiellement, et, en quelques années, fit
tache d’huile au Québec puis dans plusieurs pays européens. Il publia deux
livres et créa un site sur Internet. La « Leche Leage » fonde son action sur les
principes suivants :
1) La bonne mère fait « naturellement » passer les besoins de son
enfant avant tout ;
2) Les besoins de l’enfant ont été définis par la nature, dont
l’autorité est indiscutable ;
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3) L’allaitement possède d’innombrables avantages physiques et
psychologiques pour l’enfant, mais aussi pour la mère, dont la
santé s’en trouverait améliorée à de multiples égards ;
4) L’allaitement maternel est avantageux sous l’angle économique ;
5) Il présente des avantages au point de vue écologique ;
6) Et enfin, l’allaitement prolongé doit permettre à la mère de rester
au foyer, ce qui est de nature à renforcer le noyau familial. Ce
qui est extraordinaire, c’est qu’une telle philosophie, pur produit
de la théorie naturaliste du féminisme, a pu s’attirer la sympathie
de nombreuses associations médicales et que bien plus, elle a
trouvé de solides écho auprès de l’OMS et de l’UNICEF. Ces
deux organismes ont ainsi pris l’initiative de parrainer l’octroi
du label » Hôpital amis des bébés aux établissements qui
s’engagent à promouvoir l’allaitement maternel.
Mme Badinter se dresse avec la plus grande fermeté contre cette philosophie
qui, selon elle, réduit la place de la femme à celle de primate gestante, et a pour
résultat de remplacer son ancienne soumission au macho par une soumission au
bébé. Elle ne voit dans la « Leche Leage » qu’une déviance liberticide ,et je ne
puis que la rejoindre lorsqu’elle y déchiffre, en filigrane, les stigmates d’un
mouvement sectaire .Face à de telles outrances, elle estime qu’il est inadmissible
de jeter l’opprobre sur la femme qui fait le choix de ne pas allaiter, pas plus
d’ailleurs que sur celle qui choisit de ne pas avoir d’enfant afin de consacrer sa
vie à son couple, à sa profession, ou à son art. En la matière, ce qui doit
prévaloir est pour elle le libre choix de la femme, et non les contraintes qu’on
prétend lui imposer.
Voici, esquissée à grands traits, la pensée de Mme Badinter. Que peut lui
répondre le pédiatre qui, à juste titre, se prévaut d’être seulement l’avocat de
l’enfant ? Personnellement, je crois pouvoir invoquer les arguments suivants :
1) Première observation : la position de Mme Badinter est celle d’une
femme nantie, vivant dans un pays occidental. Le choix qui est le sien
ne peut être facilement endossé par les femmes moins fortunées, pour
lesquelles, en dépit des boucliers sociaux prévus par l’état, il s’impose
de rechercher, dès les premières semaines suivant l’accouchement, un
indispensable emploi rémunérateur. Mais le choix de Mme Badinter ne
peut surtout pas être élargi aux pays du tiers-monde. Là, compte tenu
de la mortalité infantile fort élevée, des procréations multiples sont
indispensables afin de maintenir une main d’œuvre juvénile nécessaire
à la survie du groupe. En outre, prôner l’allaitement artificiel dans ces
contrées, comme l’ont jadis fait certaines multinationales au nombre
desquelles figure Nestlé, est un total non-sens : comment serait-il
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justifié d’imputer de telles dépenses à ces personnes, d’autant que la
reconstitution des laits en poudre s’effectuerait dans des conditions
non-hygiéniques, et avec une eau contaminée ?
Deuxième observation : Mme Badinter me semble donner l’impression
qu’elle entretient avec le corps médical une relation qui ne correspond
plus aux pratiques actuelles. Au XXIe siècle, nous n’en sommes plus à
l’heure des grands patrons parisiens, nés avant 1968, et qui prônaient
comment il s’agit de se lever, de vivre sa journée, puis de se coucher.
Contrairement à ce que pourrait laisser entendre le papier par lequel
les médecins peuvent prescrire des médicaments, il ne leur incombe
plus d »’ordonner » ; il leur faut, au contraire, informer, et ensuite
laisser au patient le droit de disposer d’eux-mêmes. Le patriarcat
médical a vécu, et le législateur belge s’y est adapté en conférant au
patient, ou à son porte-parole, le droit de consulter à tout moment son
dossier médical.
Troisième observation : le pédiatre conteste à Mme Badinter le droit de
vouer aux oubliettes toute forme de « bonding ». En cas
d’hospitalisation prolongée d’un enfant en bas âge, il faut en effet
favoriser la création de liens très proches entre la mère et l’enfant.
C’est pourquoi les hôpitaux pédiatriques de pointe ont récemment
ouvert des »services kangourou », dans lesquels les mères des grands
prématurés peuvent vivre auprès de leur nouveau-né.
Quatrième point : le recours au lait maternel est indispensable chez les
enfants qui sont allergiques au lait de vache. C’est entre autres pour
cette raison qu’ont été créées des « lactariums », autrement dit des
banques de lait maternel.
Enfin, dernier point, l’allaitement maternel permettrait de conférer au
nouveau-né une immunité susceptible de contribuer à sa défense contre
certaines infections. Il me semble toutefois que ce dernier argument
doit être utilisé avec prudence, tant il n’est guère étayé par les données
de santé publique. Relevons à cet égard que la pratique de l’allaitement
maternel a été approchée de manière fort différente selon les
politiques de santé publique adoptées par les pays européens : c’est
ainsi qu’en Norvège, le taux d’allaitement est de 100 p .c ; à la
naissance et de 80 p.c. à 6 mois ; alors qu’en Belgique, ces
pourcentages sont respectivement de 68 p.c. .et de 11 p.c. seulement.
Or, les taux de morbidité et de mortalité infantiles ne sont pas
sensiblement différents lorsque l’on compare ces deux pays.
Monsieur le Président, chers amies et amis : après ce bref exposé des motifs sur
lequel je pourrais à votre gré revenir plus en détails en chambre humide, vous
venez d’entendre la voix de l’accusation, puis celle de la défense. Il s’agit
maintenant de juger, et c’est ici que la voie maçonnique peut nous aider.
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N’oublions jamais que devant le questionnement complexe que je viens
d’évoquer brièvement devant vous, notre conscience reste finalement notre seul
Juge. Epris de Liberté, d’Egalité et de Fraternité, le Maçon ne saurait tolérer que
prévalent sous la voûte sacrée des dogmes ou des sectes. Chez nous, il n’y a pas
de place pour la « Leche Leage ».Et il n’y en a pas non plus pour le sectarisme
sexiste .Quoique…Quoique le comportement d’une minorité de Frères
…Comment dire ? …Quoi qu’au terme de près de 30 ans de vie maçonnique,
j’ai pris la décision de venir frapper à la porte d’une loge mixte !
Monsieur le Président, chers amies et amis,
Mon regard sur la place de la femme dans la société est celui d’un médecin qui
s’interroge plus particulièrement sur les questions relatives à la maternité. Ce
regard ne pourrait être complet si je ne m’interrogeais pas aussi sur quelques
problèmes éthiques posés par les bouleversements de la procréation
traditionnelle auxquels nous assistons depuis quelques décennies. Ces problèmes
concernent la procréation médicale assistée, l’homoparentalité, et la gestation
par autrui.
Plus de 30 ans se sont passés depuis que la première procréation médicalement
assistée - ou PMA - a permis à la petite Louise Brown de voir le jour en
Angleterre. Depuis lors, plusieurs centaines de milliers de bébés ont pu naitre
grâce à la PMA. Il existe plusieurs méthodes de PMA, mais la plus classique
d’entre elles, communément appelée FIVETTE, comporte les étapes suivantes :
1) la fonction ovarienne est stimulée grâce à un traitement hormonal
adéquat;
2) les ovocytes sont prélevés par ponction ovarienne;
3) les ovocytes sont mis en présence de spermatozoïdes préparés : c’est alors
qu’a lieu la fécondation in vitro;
4) on choisit 1 ou 2 embryons et on les implante dans l’utérus avant la
fécondation proprement dite, les gamètes peuvent être congelés : c’est
habituellement le cas des spermatozoïdes et parfois des ovocytes, par
exemple lorsqu’une femme souffrant de cancer doit être soumise à un
traitement susceptible de la rendre stérile.
La PMA a connu un succès tel que sa légitimité ne peut généralement plus être
mise en cause chaque fois que peuvent en bénéficier des couples infertiles. Sauf
toutefois aux yeux de certaines religions et surtout du catholicisme, puisque
l’Eglise continue à interdire toute naissance qui ne serait pas le fruit d’une
relation sexuelle au sein d’un couple marié; mais heureusement, comme vous le
savez, la voix du Vatican tend à devenir de plus en plus inaudible.
Ce serait une erreur de penser qu’à l’heure actuelle, la PMA ne suscite plus de
questions éthiques. Ainsi, certains se demandent si la fécondation par des
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spermatozoïdes d’un père mort est légitime. Mais les questions éthiques
résultent du fait que la technique permet de féconder les ovocytes maternels par
des spermatozoïdes provenant d’un homme autre que le partenaire légal.
Autrement dit, la PMA peut-elle être envisagée dans des circonstances autres
que l’infertilité d’un couple, et plus précisément pour des raisons que nous
pourrions appeler »sociales » ? Quelle réponse est-il opportun de donner à une
femme célibataire qui désire enfanter ? Et si votre réponse est affirmative,
estimez-vous que le donneur de spermatozoïdes doit rester anonyme, ou bien le
contraire ? Ces questions continuent à faire débat, et les législateurs y donnent
des réponses variables. Certains pays –telle l’Italie- sont plutôt restrictifs, alors
que d’autres – telle la Belgique - sont plutôt permissifs.
Je m’écarterais trop de mon sujet si j’abordais ici la question de
l’homoparentalité, c’est-à-dire de la demande de procréation formulée par
certains couples homosexuels, soit par procréation médicalement assistée, soit
par adoption. N’empêche, au passage, posez-vous la question : quelle serait
votre attitude si vous appreniez que, dans votre entourage ,un couple lesbien
souhaite ardemment élever et éduquer un enfant ? Votre attention privilégiée se
porterait-elle vers le couple, ou vers le futur enfant ? Ou vers les deux ?
Pourquoi ? Je ne développerai pas non plus la question de la gestation pour
autrui, autrement dit des mères porteuses .Ce problème justifierait à lui seul une
autre planche, ou il serait question du risque d’assujettissement de la mère
porteuse, et du risque de dérive mercantile de cette procédure. Pour l’instant, je
me limiterai à une seule hypothèse à méditer il semble qu’au sein des pays
occidentaux, nos mentalités évoluent à un point tel que la notion de « droit
d’enfanter » pourrait bientôt être remplacée par celle de « droit de fonder une
famille ». Ce qui est fondamentalement différent !
Monsieur le Président, chers amies et amis,
Par ces quelques exemples, j’ai tenté de montrer qu’après les victoires décisives
qu’ont représenté la légalisation de la contraception et la dépénalisation de
l’avortement, sont venues d’autres avancées médicales qui ouvrent des débats
éthiques passionnants mais, plus encore dégagent de nouveaux espaces de
liberté au bénéfice des femmes. Cela étant, on peut se poser la question de savoir
si, à l’échelle de notre monde globalisé actuel, la médecine est la voie qui
apporte à toutes nos sœurs –avec un petit ou avec un grand S – les plus larges
perspectives d’épanouissement physique et moral. Je ne le pense pas. Oui, vous
le saviez déjà : dans le dilemme de la liberté et des contraintes faites aux
femmes, la principale contrainte continue à se situer dans le machisme ordinaire,
et dans les fondamentalismes. Le monde a certes besoin de progrès médicaux,
mais bien plus encore de progrès moraux.
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J’ai commencé cet exposé par une citation non maçonnique : je le terminerai par
une autre citation non maçonnique, inspirée de mon implication passée dans les
pays en voie de développement :
« Femmes, libérez-vous des morsures de la peur pour vous tenir debout, droites
et fières, non comme des lianes agrippées et dépendantes, mais comme de
grands arbres aux racines solides ! Une femme peut grandir, se déployer, et faire
croitre toute une forêt. »
Je viens de citer Taslima Nasreen, médecin et écrivain bangladeshi, plusieurs
fois condamnée à mort par les intégristes de son pays.
J’ai dit.
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