Revue technique décembre 2012

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Revue technique décembre 2012
REVUE DE PRESSE DECEMBRE 2012
Par Emmanuelle Carre-Raimondi, journaliste
BREVES
Etats-Unis
Le syndrome de stress post-traumatique reconnu chez les chiens militaires
La présence d'un compagnon a été reconnue comme étant d'une grande aide pour les vétérans
revenant d'un conflit et manifestant un syndrome de stress post-traumatique. Mais il semble bien
que les chiens militaires eux-mêmes aient aussi besoin d'une aide similaire.
Les éducateurs et comportementalistes canins de la base aérienne de Lackland, au Texas, ont observé
que le comportement de nombreux chiens envoyés sur des zones de conflit avaient changé à leur
retour, et qu'ils pouvaient bel et bien souffrir de PTSD (Post-traumatic Stress Disorder).
Le Los Angeles Time rapporte ainsi l'histoire de Cora, une chienne de 5 ans, dressée pour la recherche
d'explosifs, revenue d'Irak avec des symptômes de ce syndrome similaires à ceux observés chez les
humains. D'un animal amical, indépendant et obéissant, elle est devenue peureuse, agressive envers
ses congénères, demandant une attention constante et refusant parfois d'obéir aux ordres.
Cora fait partie des 10% de chiens militaires qui ont manifesté les mêmes symptômes. De retour au
foyer, ces chiens ont les nerfs usés par les nombreuses expériences stressantes qu'ils ont vécues, les
bruits d'explosions incessants et surtout le fait de sentir l'anxiété et la peur chez leurs compagnons
humains.
Puisque de plus en plus de chiens reçoivent un entraînement spécial et sont déployés sur les zones
militaires, l'armée s'emploie à trouver des solutions pour aider les chiens vétérans. L'une des
approches employées consiste à habituer les chiens aux choses qu'ils détestent ou qu'ils craignent. Le
but étant que les animaux trouvent en eux-mêmes la ressource nécessaire pour combattre leur
phobie.
Parmi les autres pistes envisagées on trouve la rééducation, le placement dans un environnement
dépourvu de stress, et parfois quand c'est nécessaire, la prescription d'anxiolytiques comme le Xanax.
Selon le Los Angeles Time, la moitié des chiens vétérans, une fois de retour, sont incapables de
repartir sur un terrain d'opérations et sont simplement mis à la retraite. Les chiens vétérans les moins
affectés sont entraînés pour d'autres tâches d'accompagnement des militaires ou sont redirigés vers
des opérations policières.
(in NewStat, 28/11/12).
Etats-Unis
Une loi de l'Etat du Massachusetts protège les animaux de compagnie en cas de violence
domestique
Une nouvelle loi (Senate Bill 2192) adoptée dans l'Etat du Massachusetts permet désormais de
protéger les animaux de compagnie des violences domestiques, par exemple dans le cas d'un divorce
difficile, ou si l'un des deux membres d'un membre est violent envers l'animal.
Un chien de 6 ans, nommé Panzer, a été le premier à bénéficier de cette loi, qui permet à une cour de
justice de placer l'animal dans un environnement plus sûr. Sa maîtresse de 38 ans avait porté plainte
contre son petit ami qui l'a battait elle et son chien. Elle a aussi précisé à la cour qu'il serait capable
de le lui enlever si on lui en laissait la possibilité.
La cour ayant statué, Panzer a été confié à une famille d'accueil le temps que sa propriétaire et son
fils puissent quitter le foyer d'accueil pour femmes battues. Elle reçoit régulièrement des nouvelles
de son chien, qu'elle pourra récupérer dès qu'elle aura trouvé un nouveau logement.
Ce cas illustre parfaitement le lien souvent établi entre violences conjugales et maltraitance animal.
Près de 70% des gens qui se plaignent de violence domestique affirment que leur conjoint a
également menacé l'animal, souvent pour forcer la victime à rester au sein du foyer...
(in Newstat 28/11/12).
NOTES DE CLINIQUE
Comment enrichir l'environnement des chats de refuges ?
Fournir aux chats de refuge un environnement agréable pour eux, dans lequel ils s'ennuient moins,
est facile à mettre en place et, étonnamment, tout à fait abordable !
Des jouets, des jouets, des jouets !
C'est tout bête, mais c'est une recette qui a fait ses preuves et qui semble inépuisable. En plus, ils
favorisent l'adoption des chats. Une étude menée à l'ASPCA Adoption Center de New York
démontrait que les adoptants s'attardaient davantage auprès des chats qui avaient des jouets dans
leur cage qu'auprès de ceux qui n'en avaient pas. Et que le chat joue avec ou pas n'avait même pas
d'importance !
Les chats adorent les choses simples, que l'on trouve dans tout foyer : papiers, bouteilles, cartons...
ne pensez pas que pour enrichir un environnement il faut... être riche soi-même. Essayez par
exemple :
–
les sacs en papiers. Non seulement ils représentent un bon moyen de s'éclater pour les chats
avides de faire leurs griffes, mais en plus ils peuvent constituer un bon refuge pour un chat timide qui
souhaite se cacher.
–
Boules en papier. Si vous avez des feuilles à jeter, faites-en des boulettes et jetez-les à vos
petits pensionnaires.
–
Nettoyeurs de tuyauterie : ces espèces de petites tiges avec des brosses peuvent être liées
entre elles, et accrochées aux grilles des cages pour que les chats s'amusent avec.
–
Bouchons en liège des bouteilles de vin, capuchons de bouteilles de lait, rouleau en carton du
papier toilette, tout est bon, ne jetez rien !
–
Le « puzzle » : faites des trous dans une petite boîte en plastique ou un Tuperware et mettezy quelques croquettes. Solution très efficace avec les chats qui ont bon appétit...
–
le « clicker-training » : plus élaboré. Il faudra dresser le chat à répondre positivement à une
demande, et pour l'habituer, un petit clicker qui ponctue chaque comportement positif est
nécessaire.
Faites-en sorte de faire tourner les jouets un jour sur deux, afin que les chats aient quelque chose de
nouveau régulièrement pour s'amuser. Pensez à désinfecter les jouets si vous les réutilisez ou si vous
les donnez à l'adoptant en guise de trousseau de son nouveau compagnon.
Qui dit cachettes dit chats plus zen
Les chats ont besoin de pouvoir se cacher si nécessaire. Cela les apaise et leur permet d'être moins
stressés au sein du refuge. Et ne soyez pas inquiets pour les visiteurs et éventuels adoptants : les
études prouvent que les chats qui ont la possibilité de se cacher montrent le bout de leur nez plus
volontiers.
Serviettes tendues, boîtes à chaussures, sacs peuvent faire des cachettes tout à fait adaptées. (from
ASPCApro.org)
NOTES DE CLINIQUE
Calicivirose systémique hypervirulente : une épizootie émergente ?
Les caliciviroses sont des maladies fréquentes et bien connues des praticiens. Certaines formes de
calicivirose, hautement mortelles, semblent cependant de plus en plus décrites. Il s'agit ici de deux
chatons atteints de calicivirose systémique hypervirulente présentés en consultation en août 2010 et
août 2012, dans une clinique de l'est parisien. (in l'Essentiel n°272)
CAS 1
Il s'agit d'un chaton mâle non castré de 4 mois, récemment adopté auprès d'une association, où il
était en contact avec d'autres chats. Il a reçu une injection vaccinale contre le typhus et le coryza et a
été testé négatif pour le FIV et le FeLV. Il a été préalablement hospitalisé pour hyperthermie et rendu
aux propriétaires après deux jours d'hospitalisation. Il est présenté en consultation pour abattement
et anorexie depuis deux jours. Le chaton présente un net retard de croissance : il ne pèse qu'un
kilogramme, il est maigre et déshydraté à 10 %. La température rectale est de 37 °C, les muqueuses
sont roses. Aucune anomalie n'est détectée lors de l'auscultation cardiaque. Le chaton 1 présente un
œdème important au niveau de la face et des 4 membres, l'œdème étant nettement plus prononcé
sur les membres antérieurs. Un suintement et une irritation de la peau sont présents au niveau des
doigts des deux membres antérieurs. La palpation abdominale ne présente pas d'anomalie. Aucun
signe respiratoire (éternuement, toux, jetage) n'est décrit par les propriétaires. Le chaton 1 est
hospitalisé et mis sous perfusion de Ringer lactate. Il reçoit un traitement antibiotique large spectre
(céfalexine, 15 mg / kg matin et soir par voie intraveineuse). Son état s'améliore rapidement : il se
réalimente seul le lendemain et la déshydratation régresse. Cependant, l'œdème de la face et des
membres progresse et la peau est de plus en plus érythémateuse : la pyodermite se généralise. Une
radiographie du thorax révèle la présence d'un épanchement pleural de faible volume.
Face à ce chaton issu d'un refuge, aux antécédents d'hyperthermie et présentant un épanchement
pleural, les maladies infectieuses (PIF, calicivirose systémique hypervirulente) constituent les
principales hypothèses diagnostiques et doivent être explorées.
Le liquide d'épanchement pleural est ponctionné : il s'agit d'un transsudat séro-hémorragique. Une
analyse par PCR pour les coronavirus et la calicivirose est demandée au laboratoire Scanélis. La PCR
est négative pour les coronavirus mais positive pour la calicivirose. Il s'agit donc d'une calicivirose
systémique hypervirulente. L'état du chaton se dégrade et il décède deux jours après la ponction du
liquide d'épanchement.
CAS 2
Le chaton 2 est un européen mâle non castré de 4 mois, non vacciné, présenté pour diarrhée,
abattement et anorexie depuis 2 jours. Il était en pension avec d'autres chiens et chats, dont certains
ne sont pas vaccinés, au moment de l'apparition des signes cliniques. Le chaton est hypothermique
(37,1 °C), a des muqueuses subictériques et présente une déshydratation estimée à 10 %. L'inspection
de la bouche révèle d'importants ulcères au niveau de la langue. La palpation abdominale est souple,
non douloureuse et ne révèle aucune masse anormale. L'auscultation cardiorespiratoire est normale.
L'analyse biochimique met en évidence une urémie élevée (1g / l), probablement secondaire à la
déshydratation, la créatininémie étant normale. L'analyse hématologique montre une anémie
débutante, une thrombopénie importante, une lymphopénie ainsi qu'une éosinophilie. Le chaton est
placé sous perfusion intraveineuse de Ringer lactate, reçoit un antibiotique large spectre ainsi qu'un
traitement symptomatique contre la diarrhée. Le chaton est gavé plusieurs fois par jour avec un
aliment de soutien humide (Hill's A/D). Trois jours après le début de l'hospitalisation, des œdèmes
des membres et de la face apparaissent, ainsi que des excoriations des coussinets (photos 6 et 7). Les
moyens financiers des propriétaires ne permettant pas une prise en charge plus longue, le chaton 2
est rendu à ses propriétaires, sous traitement antibiotique large spectre, traitement anti-diarrhéique
et alimentation forcée (Hill's A/D).
Le chaton reçoit des injections quotidiennes d'interféron oméga (Virbagen®, 2 MU SC) pendant 5
jours.
La diarrhée, l'atteinte de l'état général, les œdèmes et le statut vaccinal du chaton 2 mettent en avant
des hypothèses infectieuses. Des analyses par PCR (parvovirus, coronavirus et calicivirus) sont
envoyées au laboratoire Scanélis. Le résultat est positif pour les coronavirus et les calicivirus. Le
chaton 2 est donc atteint d'un typhus, ce qui explique la diarrhée et certaines anomalies
hématologiques, et d'une calicivirose systémique hypervirulente, ce qui explique les ulcères de la
langue et l'apparition des œdèmes de la face et des membres. Contre toute attente, le chaton
récupère en quelques jours : la diarrhée cesse, le chaton s'alimente normalement et reprend le cours
de sa croissance sans séquelle.
Discussion
Les calicivirus sont des virus à ARN, non enveloppés, appartenant au genre vesivirus et à la famille des
Caliciviridae. Leur répartition est mondiale et la contagiosité élevée. La grande variabilité génétique
et antigénique de ces virus explique la variété des signes cliniques associés à l'infection. La plupart
des infections par les calicivirus entraînent des signes au niveau de l'appareil respiratoire supérieur
(jetage nasal, oculaire, plus rarement atteinte de l'appareil respiratoire inférieur) ou des gingivostomatites, maladies bien connues des praticiens. Depuis une quinzaine d'années, des cas
sporadiques de caliciviroses hypervirulentes systémiques (FCV-VSD : Feline calicivirus-Virulent
Systemic Disease) sont décrits, prenant le plus souvent naissance dans des communautés de chats. La
première épizootie est décrite aux États-Unis en septembre 1998, suivie de plusieurs autres cas au
cours des années suivantes. En Europe, les premiers cas surviennent en Grande Bretagne en juillet
2003 et les premiers cas français émanent de l'ENVT en mars 2005. La FCV-VSD se caractérise par un
syndrome inflammatoire systémique et une défaillance multiorganique. Les FCV-VSD se répliquent
rapidement et ont un tropisme marqué pour les cellules endothéliales et épithéliales de la peau et
des organes parenchymateux (foie, rate, pancréas notamment).
L'incubation est courte : 1 à 5 jours, l'évolution de la maladie également : une semaine généralement.
La mortalité est très élevée puisque 50 à 67 % des chats décèdent des suites de l'infection. Les chats
atteints sont jeunes ou adultes, vaccinés ou non. Les signes cliniques sont généraux : anorexie,
amaigrissement, hyperthermie généralement élevée au début de l'infection (jusqu'à 41 °C) puis
intermittente. En début de maladie, des signes d'atteinte de l'appareil respiratoire peuvent être
présents : écoulement oculaire, jetage nasal. Rapidement, des ulcérations et de la nécrose
apparaissent au niveau de la peau et des muqueuses : oreilles, muqueuse orale, lèvres, coussinets,
nez. Des œdèmes des membres et de la face s'accompagnent d'alopécie et de dermatite. Un ictère
peut être présent, ainsi qu'une dyspnée ou des troubles de la coagulation (CIVD, thrombo-embolie).
Des pancréatites, des hépatites, des épanchements thoraciques, comme dans le cas du chaton 1, et
abdominaux sont décrits.
Les anomalies biochimiques décrites sont une hypoprotéinémie, une hypoalbuminémie, une
hyperbilirubinémie, une augmentation de l'activité des Pal et des gamma-GT. Les anomalies
hématologiques décrites sont une anémie et une leucocytose modérées ou une lymphopénie
accompagnée d'une thrombopénie.
La suspicion clinique de FCV-VSD (hyperthermie, ulcérations oro-nasales, œdèmes) est confirmée par
le laboratoire. La technique de choix est une RT-PCR sur prélèvements de sang (EDTA) ou sur grattage
des lésions cutanées ulcératives. Post-mortem, la RT-PCR est réalisée sur des prélèvements de
poumon, de foie ou de rate. L'histologie met en évidence une vasculite nécrosante sévère et aiguë
des vaisseaux sous-cutanés et de la muqueuse orale, une dermatite suppurée ulcérative, une glossite,
une chéilite, ainsi qu'une pneumonie interstitielle, une nécrose hépatique et pancréatique.
Il n'existe aucun traitement antiviral spécifique. La prise en charge thérapeutique est donc
symptomatique : réhydratation intra-veineuse, correction des déséquilibres hydro-électriques
alimentation entérale assistée, oxygénothérapie si nécessaire. L'administration d'AINS se justifie dans
le cadre de la lutte contre l'inflammation généralisée et la fièvre.
L'utilisation d'interféron n'est pour l'instant pas vraiment décrite dans le cadre de cette maladie. La
transmission est directe, par les sécrétions oronasales, ou indirecte et peut également se faire à
distance. L'excrétion virale perdure plusieurs semaines après la guérison clinique et le virus est très
résistant dans l'environnement. Il est donc impératif de respecter des règles d'hygiène strictes lors de
la manipulation de ces animaux et de prévenir le propriétaire lorsque celui-ci possède plusieurs chats
ou lorsque le cas provient d'un élevage, d'une pension ou d'un refuge. La désinfection des locaux et
du matériel est possible à l'eau de Javel, au dioxyde de chlore, aux ammoniums quaternaires. Un vide
sanitaire peut être nécessaire. Plusieurs cas décrits concernent des chats vaccinés contre le
calicivirus. Cependant, si les vaccins ne semblent pas protecteurs face à ces souches mutantes de
calicivirus, il semblerait que l'excrétion soit moindre chez les chats vaccinés. D'autre part, il existe des
cas de calicivirose systémique hypervirulente isolés chez des chats ayant eu des contacts rapprochés
avec d'autres chats qui n'ont pas développé la maladie, comme dans le cas du deuxième chaton. En
effet, aucun autre cas n'a été décrit parmi les chats ayant été en contact avec ce chaton. Le statut
immunitaire des chats pourrait donc intervenir dans le développement de la maladie.
Concernant le cas 1, il n'a pas été possible de savoir si d'autres cas ont été identifiés dans le refuge
d'origine du chaton. Les deux chatons décrits ici n'ont jamais présenté de signes d'atteinte de
l'appareil respiratoire supérieur ni d'hyperthermie au moment de la consultation initiale et de
l'hospitalisation. Le chaton 1 avait néanmoins un historique d'hyperthermie en début d'évolution de
la maladie. Les œdèmes de la face et des membres semblent être des signes d'apparition tardive,
environ 5 jours après le début de la maladie. Dans le cas 2, la présence simultanée d'un typhus et
d'une calicivirose systémique hypervirulente reflète une immunodépression du chaton. Il aurait été
intéressant de connaître le statut FIV/FeLV de ce chaton. D'autre part, il semble probable que la
calicivirose se soit développée après le typhus, peut-être favorisée par celui-ci. La caliciviros e
systémique hypervirulente doit donc être envisagée face à un chat, vacciné ou non, présentant une
atteinte de l'état général, des ulcérations oronasales et des œdèmes de la face et des membres.
L'extrême contagiosité de cette maladie impose le respect des règles d'hygiène au sein de la clinique
afin de circonscrire l'infection au plus vite.
SYNTHESE
Etude : causes diverses de l'obésité (Morris Animal Foundation)
L'obésité chez les animaux de compagnie suit de façon assez évidente l'augmentation des cas
d'obésité chez les humains. Depuis les 5 dernières années, le poids moyen a augmenté de 37% chez
les chiens et de 90% chez les chats domestiques, selon le Banfield State of Pet Health 2012 Report !
Les animaux de compagnie dépendent de leurs maîtres pour satisfaire leurs besoins alimentaires,
mais en les gavant de nourriture trop riche et de friandises, nous ne leur rendons pas service. Le plus
souvent, les maîtres ne s'en rendent pas compte, et c'est là le pire.
Le terme « fat gap », théorisé par le Dr Ernie Ward, fondateur de l'Association for Pet Obesity
prevention, désigne la divergence, souvent énorme, entre la perception que le maître a du poids de
son animal, et la réalité. Et cela va au-delà d'un problème esthétique, puisque la santé des animaux
est très souvent en jeu.
Des animaux trop gros ne vivent pas aussi longtemps que leurs camarades minces. D'après une étude
réalisée par Nestlé Purina en 2002, un animal au poids normal pour sa race, sa taille etc. vivra
aisément 2 ans de plus qu'un animal en surpoids. Sans compter pour ces derniers les multiples
problèmes de santé que leur obésité leur causera : intolérance au glucose, diabète, problèmes
articulaires, fragilisation du système cardiaque et respiratoire, tension, pression sanguine importante,
problèmes dermatologiques, impossibilité de faire de l'exercice et de résister correctement à la
chaleur. Un surpoids peut aussi contribuer au développement de cancers et autres maladies
dégénératives comme l'arthrite.
15 problèmes liés à l'obésité
–
espérance de vie réduite
–
maladies cardiaques
–
diabètes
–
problèmes articulaires, dont arthrite
–
rupture des ligaments, fragilité des genoux
–
fatigue
–
difficultés respiratoires
–
risque accru de crises cardiaques
–
déficience immunitaire
–
problèmes pancréatiques
–
risque accru de cancer des mamelles (chez les chiens)
–
risque accru de problèmes dermatologiques (chez les chats qui ne peuvent plus faire leur
toilette)
–
reproduction déficiente
–
problèmes digestifs
–
risques accrus lors d'interventions chirurgicales et anesthésies
La recette la plus communément admise pour garantir à son animal un poids raisonnable pour sa
santé est simple : déterminer avec votre vétérinaire le nombre exact de calories nécessaires au
quotidien selon l'âge, la race et le style de vie de votre animal.
Le déséquilibre alimentaire n'est qu'une raison parmi d'autres
Chats et chiens obèses inondent les news de notre société occidentale, et ils ne sont d'ailleurs qu'un
miroir de nos propres mauvaises habitudes alimentaires. Les estimations varient, mais il reste
reconnu que 25% des chats et 22% des chiens sont obèses. Le taux peut parfois atteindre les 40%, et
si cela reste exceptionnel, il grimpe (trop) rapidement.
Bien qu'il soit facile d'accuser les propriétaires de tels animaux, en ne leur fournissant pas l'exercice
et le régime alimentaire nécessaires, des études récentes démontrent que d'autres facteurs peuvent
entrer en jeu : hérédité génétique, produits chimiques présents dans l'environnement, et même la
stérilisation. En moyenne, les animaux qui peuvent se nourrir librement après une stérilisation
gagnent 25 à 30% de poids en plus.
Cependant, tous les animaux ne sont pas sensibles à ce facteur. Les variations de prise de poids entre
animaux mangeant les mêmes choses et vivant dans le même environnement peuvent aller de 0 à
50%. Les différences génétiques entre individus sont tout aussi importantes, et expliqueraient que
certaines races soient plus prédisposées à l'obésité que d'autres.
La peur d'un gain de poids ne doit donc pas être un critère pour que les propriétaires ne fassent pas
stériliser leur animal.
6 facteurs favorisant l'obésité
–
prédisposition génétique
–
stérilisation
–
régime alimentaire trop riche, trop gras
–
manque d'exercice
–
produits chimiques présents dans l'environnement et hormones qui peuvent affecter le
métabolisme
–
maladie sous-jacente, telle que l'hypothyroïdie
Les œstrogènes : une des clés du surpoids
Plusieurs vétérinaires et/ou chercheurs se sont sur les facteurs déterminant qu'au sein d'une même
portée, des petits prennent plus facilement du poids que d'autres. La réponse pourrait venir d'une
hormone dont on parle beaucoup y compris en médecine humaine : l'œstrogène. Il est bien connu
dans le domaine scientifique que le manque d'œstrogène peut favoriser le gain de poids. On ne sait
cependant pas encore pourquoi ce manque influe sur l'obésité : cette hormone, avec d'autres,
semble affecter la région du cerveau qui contrôle la prise de nourriture.
Ces 10 dernières années, le Dr Backus et ses collègues ont découvert que l'œstradiol, l'œstrogène le
plus puissant chez les femelles, inhibe la prise de nourriture, et sans cette hormone, les chats
mangent davantage et prennent du poids. Et le plus intéressant, c'est que ce manque peut également
affecter les chats mâles.
Le point positif de cette recherche est qu'en donnant ne serait-ce qu'une petite quantité d'œstradiol
à des animaux stérilisés, on empêche la prise de poids. Le seul problème est que l'œstrogène est une
hormone complexe, puissante, qui comporte plusieurs effets secondaires. Une recherche plus
poussée doit être menée avant qu'elle puisse être prescrite sans danger aux animaux de compagnie.
Il est également nécessaire de mieux comprendre l'incidence du niveau d'œstrogène sur la prise de
poids. La recherche devra déterminer comment la stérilisation affecte le métabolisme, afin que les
vétérinaires puissent mieux contrôler, à terme, le poids de leurs patients.
En particulier, les chercheurs devront identifier les facteurs génétiques et environnementaux propres
à l'animal et qui pourraient favoriser l'obésité. La plupart des études vétérinaires et médicales
s'intéressent aux produits chimiques naturels ou synthétiques qui pourraient bouleverser les taux
d'oestrogène. Par exemple, un des champs d'études les plus courants concerne les régimes
alimentaires contenant des substances qui « miment » l'oestrogène, comme le soja, et en quoi ils
pourraient être utiles pour la perte de poids.
Un autre champ d'investigation concerne évidemment les perturbateurs endocriniens, qui pourraient
expliquer les variations de poids chez les chiens et les chats après la stérilisation.
Les principaux responsables du régime alimentaire de leur compagnon restent bien sûr les
propriétaires eux-mêmes : après une stérilisation, leur rôle est de réguler leur animal, qui n'a plus
forcément la capacité de le faire par lui-même.
SYNTHESE
Etude : lien entre génome et santé chez les chiens
(Analysis of the canine genome and canine health : a commentary, P. Bateson ; D.R. Sargan, in The
Veterinary Journal 194 (2012) 265–269)
Il est communément admis chez les biologistes que les reproductions entre individus d'une même
race conduisent à un appauvrissement génétique. Les animaux issus d'une telle lignée ont moins de
chance de vivre longtemps et de se reproduire que les autres, et ceci a été démontré à de
nombreuses reprises. Les reproductions au sein d'une même race peuvent entraîner, chez les
animaux qui en sont issus, des troubles de la fertilité, un développement perturbé, un taux de
mortalité accru, une espérance de vie moins longue, une transmission accrue des troubles
héréditaires, un système immunitaire déficient et plus de chances de cancer (Charlesworth and Willis,
2009).
Cependant, la reproduction au sein d'une même race peut avoir pour effet de retirer du pool
génétique une proportion de gènes allélomorphes comportant de sérieux effets destructeurs, ce qui
bénéficie donc à la santé des individus. Mais lors du processus, d'autres gènes aux effets moins
démonstratifs peuvent devenir homozygotes et être maintenus dans le pool génétique. D'où le
bénéfice des croisements entre races, qui en apportant du sang nouveau atténueront de tels effets en
introduisant de la variété génétique. Mais le risque du croisement est de nuire à la purge des gènes
allélomorphes et d'introduire de nouveaux gènes récessifs.
La reproduction au sein d'une espèce était jusqu'à présent mal considérée, mais le débat est plus
nuancé depuis quelques années, en vertu de ces observations. Il est faux qu'une maladie héréditaire
soit transmise par une seule paire de gènes. Au contraire, beaucoup d'entre elles émergent suite à la
combinaison de plusieurs gènes différents. Si l'un de ces gènes, ou plusieurs d'entre eux, sont
éliminés grâce à un contrôle génétique efficace, il pourrait être possible, bien que cela reste
hypothétique, que la maladie soit éradiquée de la lignée.
Le lien entre la diversité génétique chez les chiens de race et les maladies qui leur sont parfois
propres doit être établi, car nombreux sont les éleveurs qui minimisent l'impact de la reproduction
entre individus d'une même espèce sur la mauvaise santé des chiens qu'ils font naître. Ils sont
d'ailleurs confrontés à un dilemme : éviter les croisements permet certes de fixer certaines
caractéristiques appréciables (qu'elles soient physiques ou comportementales) dans une race, mais
en faisant se reproduire ensemble des individus à la parenté trop proches, le désir de pureté de la
race devient dangereux et excessif. Ce conflit, entre la préservation de qualités et l'évitement d'effets
indésirables qui peuvent résulter de ces reproductions, est une réalité.
Malgré ce dilemme, ces risques et effets nocifs doivent être sérieusement pris en compte. 6 races de
chiens anglais sur 10 subissent trop de reproductions entre individus de même race. Les maladies
génétiques engendrées affectent péniblement les individus qui en sont porteurs et les font souffrir. Il
est de la responsabilité des chercheurs et des éleveurs d'encourager une politique d'élevage qui
limite le développement de maladies génétiques héréditaires, une responsabilité qui devrait être plus
forte que la notion, somme toute assez nébuleuse, de préservation de pureté de la race.
Des outils pratiques, tels que le site Internet du Kennel Club anglais « Mate Select », créé en 2012
sont très utiles pour dispenser aux éleveurs les informations nécessaires pour faire des
accouplements judicieux, bien qu'elles se basent sur des pedigrees parfois incomplets. L'avancée de
la recherche moléculaire pourrait, à l'avenir, influer de façon encore plus précise sur ces décisions.
SYNTHESE
Evaluer l'impact des stratégies d'élevage sur la diversité génétique et les troubles
héréditaires chez les chiens
(Assessing the impact of breeding strategies on inherited disorders and genetic diversity in dogs ;
G.Leroy, X. Rognon, in The Veterinary Journal 194 (2012) 343–348)
Dans le but de favoriser une meilleure gestion de la diversité génétique et du contrôle des troubles
héréditaires au sein d'une race canine, une méthode est proposée, consistant à évaluer l'impact de
différentes stratégies prenant en compte les informations généalogiques propres à une race donnée.
Deux stratégies différentes ont été étudiées :
–
stratégie visant l'éradication de troubles récessifs identifiés, en prenant en compte trois
limitations différentes dans les combinaisons d'accouplement
–
stratégie limitant le nombre de petits par reproducteur.
Cette méthode a été testée sur 4 races de chiens : Braque Saint Germain, Berger des Pyrénées, Coton
de Tuléar et Epagneul breton.
Ainsi, écarter du pool de reproduction les individus porteurs de maladies héréditaires peut avoir un
impact sur la diversité génétique d'une race, selon cette race et le nombre de gènes allélomorphes
malades. Par ailleurs, limiter le nombre de descendants par reproducteur peut avoir un effet positif
sur la diversité génétique d'une race.
Les 4 races choisies disposaient de pedigrees très complets. Les chercheurs ont fini par conclure que
retirer tous les porteurs de gènes malades du pool reproducteur ôtaient du même coup tout risque
de transmission héréditaire. Les évaluations propres à chaque race sont indiquées dans l'étude, et les
chercheurs ont pu établir un certain nombre de recommandations spécifiques pour la reproduction
de chaque race. Il est démontré également que limiter le nombre de petits par reproducteur
contribue à une plus grande diversité génétique.
Le choix de l'une des deux stratégies dépend grandement des caractéristiques comportementales que
l'on souhaite préserver, ou de la sévérité de la maladie héréditaire observée. Ainsi, une maladie ayant
un impact certain sur la viabilité des individus réclamera une stratégie d'élevage très stricte,
davantage qu'une maladie relativement bénigne. L'adaptation de la procédure à des situations plus
complexes (héritage plus complexe, éradication de plusieurs maladies) pourra faire l'objet de futures
études.
SYNTHESE
Colites chroniques : intérêt des probiotiques
La colite chronique est une affection courante et l’une des causes les plus fréquentes de diarrhée chez
le chien. Si elle ne menace pas la vie de l’animal, elle est néanmoins très incommodante pour les
propriétaires. Diverses approches peuvent être utilisées pour traiter ces maladies. (in l'Essentiel
n°273)
Le terme de colite chronique englobe plusieurs maladies dont le facteur commun est l’inflammation
du côlon. Les colites chroniques peuvent être d’origine parasitaire, infectieuse, immunitaire ou
purement inflammatoire. Malgré des causes diverses, les signes cliniques sont faciles à reconnaître
car la diarrhée colique se caractérise par une fréquence des défécations élevée, une défécation
souvent prolongée associée à du ténesme, des selles d’aspect semi-moulé à liquide avec du mucus
souvent présent. Le diagnostic clinique ne peut être établi avec certitude qu’après avoir effectué de
nombreux examens complémentaires. Lorsque les causes infectieuses et parasitaires ont été
écartées, le recours à la biopsie muqueuse est nécessaire afin d’établir le diagnostic avec précision.
Néanmoins elle est rarement réalisée en pratique en raison du coût et du caractère invasif de la
procédure. Les différents traitements des colites incluent les traitements de soutien pour restaurer
l’équilibre hydrique, les antidiarrhéiques ou antispasmodiques lors de crises aiguës, les antibiotiques,
les anti-inflammatoires non stéroïdiens coliques comme la salazopyrine ou stéroïdiens comme les
corticoïdes. L’ajustement du régime, fortement conseillé, n’est pas toujours effectué.
A propos de deux cas cliniques
Un chien mâle entier husky de 4 ans, Bryton et une chienne berger allemand stérilisée de 6 ans,
Belue sont présentés à la consultation de nutrition. Bryton présente des épisodes de diarrhées
chroniques depuis son acquisition à l’âge d’un an et Belue depuis maintenant 6 mois. Lors des
examens cliniques, aucune anomalie n’est notée sur l’un ou l’autre chien. Ils sont tous deux en bon
état général. Belue pèse 28 kg et présente un score corporel de 5/9, Bryton pèse 21 kg avec un score
corporel de 4/9. Les chiens présentent des selles fluctuantes de liquides à molles, peu moulées et de
score fécal 6/7 ou 7/7 selon les jours. Belue reçoit une alimentation industrielle sous forme de
croquettes pour chien adulte et Bryton une alimentation mixte formulée par sa propriétaire à base de
croquettes, de riz ou pâtes accompagnée de jambon ou de viande rouge et ceci afin de stimuler la
prise alimentaire suite aux nombreux refus du chien. Les deux animaux sont correctement
vermifugés et vaccinés. Bryton a déjà reçu auparavant de nombreux traitements dont des
pansements intestinaux, des corticostéroïdes, des antibiotiques (métronidazole) et des antiinflammatoires coliques (salazopyrine) sans grande amélioration. Belue a aussi reçu des antibiotiques
(métronidazole) et des pansements intestinaux à plusieurs reprises sans aucune amélioration.
Examens complémentaires
Dans le cas de Bryton, des dosages de TLI, folates et vitamine B12, de l’albumine et des acides
biliaires ainsi qu’une coproscopie et une échographie abdominale ont été réalisés. Seule une
hyperfolatémie (18,6 microgramme / l) témoin d’une prolifération bactérienne intestinale a été mise
en évidence. Pour Belue une analyse hématologique et biochimique complète, une analyse urinaire,
une coproscopie, des dosages de TLI, folates et vit B12 ainsi qu’une échographie abdominale ont été
pratiqués. Une hyperfolatémie (16,5 microgramme / l) et une hypovitaminose B12 (223 ng / l) ont été
mises en évidence signant une prolifération bactérienne active.
Traitement
Un traitement diététique à base de probiotiques et d’alimentation hyperdigestible a été proposé. Des
croquettes Purina Veterinary Diets Canine EN® ainsi qu’un sachet de Fortiflora® Chien journalier sont
prescrits. Le mode de distribution de l’aliment est aussi révisé afin de fractionner l’alimentation en 3
repas journaliers. Pour Belue, une injection intramusculaire de vitamine B12 vient compléter le
traitement. Une amélioration est notée dans les 4 jours qui suivent. Les selles sont d’aspect moulé et
consistantes, le score fécal est de 3/7. Les deux chiens sont restés un mois sous ce régime. Belue a
ensuite effectuée une transition vers un aliment pour chien adulte Purina ProPlan Adult Original®
tout en conservant le traitement aux probiotiques, et ce pendant 3 mois. Il n’y a pas eu de rechutes
pendant le traitement et le chien a conservé des selles de score 3/7. Bryton a conservé son aliment
hyperdigestible avec le traitement aux probiotiques pendant 2 mois, en ajoutant 30 g de fromage
blanc sur la ration pour stimuler l’appétit. Il n’y a pas eu de rechutes. Les propriétaires ont arrêté le
Fortiflora® au bout de 2 mois mais ont conservé l’aliment hyperdigestible EN très apprécié du chien.
Suivi
Belue a été revue deux fois lors de consultations de suivi. L’état général était bon, l’amélioration
clinique jugée très satisfaisante. Les contrôles biochimiques ont confirmé la normalisation du niveau
sanguin de vitamine B12, avec une hyperfolatémie persistante. Une hyperfolatémie isolée n’est pas
spécifique car elle peut être en rapport avec une concentration accrue de folates dans le régime
alimentaire du chien ou avec une production in situ d’acide folique par certaines bactéries comme ici.
Sans répercussion pathologique et signes cliniques associés, elle doit
être considérée comme transitoire.
Pour Bryton, un premier suivi en consultation a permis de noter une disparition des épisodes
diarrhéiques et une légère reprise de poids (+1 kg). Lors du deuxième contrôle téléphonique 4 mois
plus tard, les propriétaires ont confirmé l’absence de rechute et la pérennité des résultats.
A propos des probiotiques
Les probiotiques (du grec pro : qui est positif et bios : vie) sont des micro-organismes vivants qui,
ingérés en quantité suffisante, procurent un bénéfice sur la santé de l’hôte. Ce sont des microorganismes tels que des bactéries ou des levures bénéfiques au bon fonctionnement de l’intestin. Les
probiotiques doivent être spécifiques de l’hôte, non pathogènes, et résistants à la digestion gastrique
pour être efficaces. Ils ne colonisent pas l’intestin, mais exercent un effet bénéfique lors de leur
passage car ils sécrètent des facteurs qui sont capables de stimuler la croissance d’autres microorganismes.
Ils sont donc capables :
• d’influencer la composition de la flore intestinale lorsqu’ils sont présents en quantité élevée (plus
de 10 8 UFC /g) et de favoriser le développement des bonnes bactéries,
• de modifier la couche de mucus de l’intestin et les cellules épithéliales pour renforcer l’intégrité de
la barrière intestinale, et
• de stimuler la synthèse de substances bactéricides par les cellules de la muqueuse, contribuant
ainsi à la lutte contre les agents pathogènes.
Les principales indications connues des probiotiques sont :
• Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin pour leurs actions immunomodulatrices,
• Diarrhée aiguës ou chroniques : car ils s’opposent au développement des bactéries pathogènes
comme les colibacilles ou les salmonelles
• Renforcement de la barrière immunitaire
Dans le cadre des colites chroniques, les probiotiques exercent à la fois des actions sur la flore
bactérienne intestinale en modifiant son profil et des actions immunomodulatrices et antiinflammatoires locales. Un traitement diététique à base d’aliment hyperdigestible renforce son effet
car l’augmentation de la digestibilité des nutriments de la ration entraîne une diminution de résidus
non digérés dans le côlon. Il faut choisir des probiotiques adaptés à l’espèce concernée, garantissant
une grande quantité de microorganismes vivants dans le secteur à traiter.
Dans les deux cas présentés, le supplément de probiotiques garantit une quantité suffisante de
bactéries vivantes pour exercer un effet thérapeutique. Il est de plus simple à utiliser (à saupoudrer
sur l’aliment) et appétent ce qui garantit une bonne observance. Enfin, en cas d’affections anciennes,
un traitement long est recommandé afin de pérenniser les adaptations bénéfiques de la flore.
L’avantage d’un tel traitement est qu’il est sans danger et fait appel à des mécanismes locaux.
Pronostic
Le pronostic de ces affections reste bon étant donné que l’état général n’est pas affecté. Mais la prise
en charge et la disparition des épisodes diarrhéiques doivent être recherchées afin de restaurer le
bien-être digestif du chien. Les phénomènes de diarrhées coliques chroniques peuvent être
responsable, à long terme, de déséquilibres électrolytiques. Lors de prolifération bactériennes
avérées et de colites chroniques récidivantes malgré les traitements habituels, l’usage des
probiotiques peut être fortement recommandé. Les probiotiques devraient de ce fait trouver une
place dans l’arsenal thérapeutique du praticien pour traiter ces affections fréquentes et dont la base
du traitement reste la diététique.
CAS CLINIQUE
Prothèse de membre : les chiens aussi
Happy pourra de nouveau mener une vie normale !
A l’instar d’Oscar Pistorius, le désormais célèbre athlète sud-africain aux deux jambes amputées qui a
participé aux derniers JO aux cotés des valides, « Happy » a également l’intention de pouvoir profiter
à nouveau pleinement de sa vie de chien avec ses congénères valides et sa propriétaire. Et cela
malgré l’absence d’une bonne partie de son postérieur gauche. (in l'Essentiel n°273)
Cette chienne, berger des lagunes stérilisée de 7,5 ans, a en effet subi une amputation au niveau du
tiers proximal de son tibia gauche à l’âge d’un an suite à un enchevêtrement de sa patte dans une
ficelle, qui a conduit cette dernière à la nécrose. Depuis, la chienne se déplaçait sur trois pattes mais
a toutefois gardé une bonne musculature de la hanche et une bonne mobilité du genou. Sa
propriétaire ne trouvant pas de solution, elle a décidé de venir consulter à l’École Nationale
Vétérinaire d’Alfort (CHUVA).
Un moignon apte à recevoir une prothèse
La consultation initiale de chirurgie a permis de confirmer, à l’aide d’une radiographie du grasset, que
l’extrémité de l’os était bien à bords nets, et donc le moignon apte à recevoir une prothèse. Suite à
cela, la chienne a été transférée à l’Unité de Médecine de l’Élevage et du Sport (UMES), unité qui
dispose d’une entité de physiothérapie.
Réalisation de la prothèse
Après un premier contact, il a été décidé de lui fabriquer une prothèse externe sur mesure en faisant
appel à un orthoprothésiste humain. Un moulage en plâtre de sa patte a été réalisé, afin de pouvoir
obtenir un positif et de disposer d’un élément parfaitement adapté à son membre. Ceci afin d’éviter
toute plaie de frottement ou lésion du moignon. Deux « essayages » auront ensuite suffi pour obtenir
une prothèse en plastique thermoformable sur laquelle est fixée une lame en matériau composite
souple permettant de restituer l’énergie lors de la marche. Un élastique a été rajouté pour permettre
d’aider au retour du membre vers l’avant.
La principale problématique était de savoir si après tout ce temps (près de 7 ans), la chienne allait de
nouveau se servir de son membre. Et très étonnamment, dès les premières heures, la chienne s’en
est servie pour s’appuyer dessus, comme en témoigne la symétrie des hanches constatée à la
radiographie. Ceci a été possible grâce au confort du rembourrage de mousse et un design
parfaitement adapté. Le maintien de la prothèse au cours des différents mouvements de l’animal a
été résolu par un système de harnais, là encore, spécifiquement dessiné pour la chienne. Cette
prothèse constitue une première en France car la longueur de membre postérieur remplacé est
importante (24 cm) et le maintien externe efficace, aussi haut au niveau de la cuisse (forme conique
de la cuisse et présence de poils).
Des systèmes similaires plus « industriels » existent dans d’autres pays, mais la solution du «
complètement sur mesure » apportée ici permet d’améliorer l’acceptation de la prothèse par l’animal
et d’augmenter la satisfaction des propriétaires. Il en aura couté environ 800 € à la propriétaire, pour
un travail à la fois long et minutieux dont le résultat dépasse les espérances !
Pour plus de renseignements, contacter l’UMES au : 01 43 96 70 31.
PROFESSION
Gériatrie féline : des consultations gratifiantes
Richard Gowan est intervenu lors du pré-Congrès de l’International Society of Feline Medicine (ISFM)
à Budapest, le 14 juin dernier, pour présenter la consultation du chat senior et la prise en charge des
polypathologies liées à l’âge. Un créneau à explorer pour le praticien. (in l'Essentiel n°273)
Richard Gowan est un jeune vétérinaire australien qui a une passion pour les chats, les clients et le
marketing joyeusement contagieuse. Il a ouvert en 2003 sa Cat Clinique, la plus grande structure
spécialisée de toute l’Australie avec 5 vétérinaires, 9 ASV et 2 experts. Il se définit lui-même comme
un vétérinaire généraliste - de famille - et il adore les consultations « normales », tout
particulièrement celles que nous allons être appelés à faire le plus souvent, lorsque les chats
deviennent seniors. En tant que vétérinaire pour chats, il ne s’estime pas si différent que ça de ses
confrères humains. « Le médecin est un véto qui ne s’occupe que d’une seule espèce, l’humain. Qui
est un chat, sans le pelage » dit-il en boutade.
Prendre le temps en consultation
Les propriétaires de nos patients félins sont souvent demandeurs de bilan de santé. Leur éducation
est plus facile à réaliser que celles des propriétaires de chiens. En consultation senior ou gériatrique,
Richard Gowan consacre un minimum d’une demi-heure à chacun de ses patients, en prévenant au
préalable le client sur ce qui sera fait (prise de tension artérielle systématique, bilans sanguin et
urinaire), afin que ce soit validé par celui-ci. Dans l’entretien avec le client, il est important de poser
les bonnes questions, notamment en matière d’arthrose, car le chat, chez son vétérinaire, saute la
plupart du temps toujours suffisamment vite pour redescendre de la table de consultation sans
difficulté. Reste qu’à la question, comment votre chat saute-t-il sur le lit, sur la table, ou sur l’armoire,
les réponses donnent une toute autre idée des capacités motrices du patient, toujours en phase avec
la réalité. Les urines sont, pour Richard Gowan, la meilleure porte d’entrée pour mettre en place le
plan épargne santé avec les check-up réguliers à partir de l’âge de 7 ans. Au cours de la consultation
bisannuelle, Richard Gowan vérifie les 9 grandes entités pathologiques qui frappent le chat âgé :
l’hyperthyroïdie, la maladie rénale chronique (MRC), le diabète, les affections inflammatoires
digestives chroniques (MICI), l’hypertension artérielle, les affections cardiaques, les cancers, l’arthrose
et la démence sénile.
Fournir des outils parlants
Le propriétaire, comme son chat, est un visuel, et Richard Gowan lui remet dès l’âge de 7 ans une
carte Senior, sur laquelle sont notés les principaux paramètres (poids, densité urinaire, tension
artérielle, créatinine), matérialisés sur un graphique, rendant visuelle la valeur ajoutée du suivi du
patient félin. Entre 7 et 10 ans, en l’absence de symptômes évocateurs, Richard Gowan se contente
de mesurer la densité urinaire 2 fois par an. Entre 10 et 12 ans, il ajoute un bilan sanguin et une
évaluation des compétences locomotrices pour dépister l’arthrose, 2 fois par an. A partir de 14 ans, il
mesure systématiquement la tension artérielle, fait un fond d’œil et des bilans urinaires et sanguins à
chaque consultation, de 2 à 4 par an. Il débusque la constipation chronique, dont le propriétaire n’a
pas toujours conscience, et qui cache souvent une MRC sous-jacente, un mégacôlon ou plus
fréquemment des douleurs arthrosiques, responsables aussi parfois de malpropreté urinaire.
Pour aider ses clients à mieux soigner leur chat polypathologique, il reformule et dose de façon
précise les médicaments qu’il prescrit, reconditionnés par un pharmacien en une seule gélule, plus
faciles à administrer au chat en une administration unique que 3 ou 4 comprimés différents. La
compliance est très nettement améliorée, et cette activité est loin d’être neutre dans son résultat
puisqu’elle génère 10 à 15 % de son chiffre d’affaire.
Poser les bonnes questions
Le dépistage de l’arthrose demande une éducation et une écoute du client importantes. En effet,
beaucoup de propriétaires croient encore que la baisse d’activité de leur chat senior ou âgé est
normale, liée à l’âge. Ils n’envisagent pas que la douleur soit responsable de la résignation silencieuse
de leurs chats. Un chien âgé va tenter de courir derrière la balle qu’on lui lance, sans réfléchir, arrêté
net au beau milieu de sa course par une douleur qui le fait alors boiter franchement au point
d’apitoyer légitimement son maître. Le chat, lui, réfléchit et anticipe la douleur que va générer tel ou
tel mouvement. Soit il y renonce, comme ces chats qui restent au sol ou hésitent longuement devant
une marche d’escalier trop haute, soit il négocie, en faisant des étapes - au lieu de monter d’un saut
sur la table, il monte d’abord du sol sur la chaise, puis de la chaise sur la table. Les signes
radiologiques ne sont pas toujours présents ni proportionnels à la douleur. Par ailleurs, le propriétaire
rechigne parfois à investir dans un examen d’imagerie qui peut demander une tranquillisation ou
anesthésie générale, et un risque médical perçu négativement par le propriétaire. Le diagnostic
repose donc sur son questionnement méticuleux, une bonne connaissance des habitudes de son chat
et la reconnaissance des modifications apparues, dans la façon de sauter surtout, de manger
éventuellement, de dormir, de se toiletter, etc.
La discussion avec le propriétaire sur les comportements quotidiens de son chat à la maison est non
seulement un outil diagnostique mais également un élément qui renforce la relation entre patient et
soignant, témoignant de l’attention, de l’écoute et de l’empathie par la prise en charge d’une douleur
quotidienne.
Une approche méthodique
Richard Gowan utilise toujours, dans les premiers stades de l’arthrose, les chondroprotecteurs, acides
gras essentiels, ou aliments diététiques. S’ils restent sans succès, ou dans les formes plus sévères, il
utilise le méloxicam à la dose initiale de 0,1mg / kg le premier jour puis 0,05 mg / kg ensuite, en
diminuant jusqu’à 0,01 à 0,03 mg / kg pour les chats atteints de Maladie Rénale Chronique (MRC). Il
effectue systématiquement un bilan sanguin (avec dosage de T4) et urinaire sur tous ses patients
avant prescription. Il insiste pour calculer la dose thérapeutique à partir du poids idéal de ses patients
(évaluation de la masse maigre), et pour faire un suivi régulier à 7, puis 14 et 30 jours pour vérifier
que la dose est la bonne et qu’aucun effet indésirable ne se produit. La dose est ensuite diminuée
pour trouver la posologie idéale en termes de résultat. Richard Gowan préfère prescrire en continu
plutôt qu’en intermittence, ce qui lui permet d’utiliser des doses moindres et de limiter la spirale
délétère de l’effet wind-up, consubstantiel de la douleur chronique. Il informe également tous les
propriétaires des informations pertinentes sur l’usage des AINS chez le chat, en leur remettant le lien
ou le document publié en 2010 par l’ISFM (disponible en français sur
http://www.isfm.net/toolbox/info_sheets/index.html).
Améliorer la qualité d’une fin de vie prolongée du patient félin
Après avoir publié une première étude sur l’administration de méloxicam (à la dose moyenne de 0,02
mg / kg, soit 40 % de la dose recommandée) sur des chats atteints d’arthrose et de MRC, stabilisés,
dont la progression avait été ralentie, il vient de publier dans le JFMS une étude rétrospective, de
1998 à 2011, sur le suivi de 82 chats arthrosiques âgés de plus de 7 ans, traités de façon continue
avec du méloxicam pour une période d’au moins 6 mois. Quarante-sept de ces chats étaient atteints
de MRC et 35 simplement âgés. Les chats MRC ont été classés selon la classification IRIS, en fonction
de leur créatininémie, densité urinaire et signes cliniques. Sont considérés comme stables, dans cette
étude, les chats atteints de MRC sans évolution clinique notable, dont la créatininémie n’a pas
augmenté de plus de 10 à 15 % dans les 2 derniers mois, dont l’hypertension, les infections urinaires
et les affections bucco-dentaires, si elles sont présentes, sont contrôlées. Aucun chat MRC présentant
un RPCU > 0,4 n’a été inclus dans cette étude.
L’âge moyen de la prescription de méloxicam était de 14,4 ans pour les chats MRC et 16,6 pour les
non-MRC, la durée moyenne de prise du méloxicam était respectivement de 852 et 1866 jours. La
longévité moyenne a été de 18,6 ans pour les chats MRC et 22 ans pour les nonMRC. Les causes de
décès des deux populations sont présentées sur la figure 1, soulignant que la prise en charge
conjointe de la MRC et de l’arthrose n’a pas porté préjudice aux chats, bien au contraire puisqu’en
améliorant leur qualité de vie au quotidien, la médiane de longévité après le diagnostic de MRC est à
1608 jours (soit presque 5 ans). Comme en médecine humaine, les patients MRC décèdent souvent
d’affections cardiaques. Les néoplasies restent la première cause de décès dans les deux populations
étudiées ici.
Sachant les propriétaires de chats plus soucieux de la qualité de fin de vie de leurs chats que de la
durée même, Richard Gowan a souligné qu’avec une approche attentive, adaptée et personnalisée
pour chaque chat, en cherchant la dose thérapeutique minimale efficace de méloxicam, on peut
conjuguer qualité et durée de vie pour nos patients félins.
PROFESSION
La consultation comportementale : MSD contribue à la formation des vétérinaires
Le laboratoire MSD investit dans la formation des praticiens au comportement du chien et du chat.
Sur plusieurs dates réparties dans toute la France, une journée de théorie (conférence) puis de
pratique (ateliers) en comportement est ouverte aux vétérinaires, quel que soit leur niveau, et
animée par des formateurs expérimentés. Une bonne occasion de réintégrer le comportement dans
une approche médicale globale. (in l'Essentiel n°273)
La journée Aixoise de comportement de MSD, animée par les Dr Beata, Beaumont et Marion, a
permis à une trentaine de confrères de venir réfléchir sur le déroulement d’une consultation
comportementale, dans un modèle zoopsychiatrique. Des bases théoriques d’une sémiologie
complète aux écueils à éviter, les conférenciers ont dressé un panorama détaillé des différents temps
de la consultation comportementale, dans une conférence particulièrement imagée.
Médecine et comportement
Le rappel n’est pas inutile : l’examen comportemental fait partie d’une démarche médicale, et
appartient donc à la consultation d’un vétérinaire. Au moins parce que nombre d’affections médicales
présentent des signes comportementaux (qui sont parfois les seuls aux premiers stades de la
maladie), mais aussi car il n’y a qu’une seule santé, une seule médecine. Examiner le comportement
dans une démarche médicale est nécessaire pour montrer que l’on reconnaît l’intrication physique et
comportementale des maladies, et pour se différencier des consultants non vétérinaires, très
nombreux, en particulier lorsqu’il s’agit de chiens (éleveurs, dresseurs, éducateurs, etc.). Les habitués
du comportement vous le diront : la consultation comportementale apprend beaucoup au praticien,
et s’entraîner à la démarche ou aux techniques de communication habituellement employées dans
cette discipline peut s’avérer très utile pour tous les autres types de consultation.
Fixer le cadre
Une des premières précautions pour une prise en charge comportementale est de rester maître chez
soi. Pour cela, c’est au vétérinaire de fixer le cadre du suivi, et de définir tout d’abord où celui-ci sera
réalisé. Le débat « en clinique » vs « à domicile » est souvent ravivé… Les arguments majeurs en
faveur de la consultation en clinique sont :
• L’absence de débat lorsqu’il s’agit de tout autre motif de consultation (médecine, locomoteur,
cardiologie),
• La disponibilité des moyens diagnostiques (analyseur en cas de doute sur une affection médicale,
radiographie en cas de douleur chronique, etc.),
• La standardisation de notre observation dans le terrain connu qu’est notre salle de consultation,
• Les écueils notamment émotionnels des consultations à domicile (perte de temps voire
énervement lié au déplacement, sensation de peur face à un chien agressif, familiarité avec les
propriétaires) ; la consultation en clinique permet plus facilement de garder la distance
thérapeutique nécessaire.
Les 5 premières minutes
Lorsqu’arrive l’heure du rendez-vous, que l’on ait ou non pris connaissance du motif de consultation,
la première prise de contact entre le praticien, l’animal et les propriétaires est déterminante.
Elle permet :
• Une prise de contact, une première impression sur les propriétaires, l’élaboration du diagnostic
différentiel possible, voire probable, et déjà les premiers a priori (personne n’y échappe, l’important
étant de s’en rendre compte pour ne pas trop se laisser polluer dans son analyse),
• L’exposé du motif de consultation : il permet aux propriétaires « d’ouvrir leur sac » et de décharger
toutes les émotions accumulées suite au trouble de leur animal. Cette décharge émotionnelle est
importante, elle va alléger la suite de la consultation. Les troubles du comportement sont encore
largement considérés comme étant le fait de mauvais maîtres (poncifs du type « c’est le maître qu’il
faut éduquer, pas le chien »). Des études viennent certes réfuter cette hypothèse, mais à ce jour, un
des sentiments les plus communs pour les propriétaires qui viennent en comportement, c’est… la
culpabilité ! Il est donc important de les encourager à parler, et de les laisser le faire.
• L’obtention rapide de l’historique du trouble : il permet notamment de savoir ce qui a été essayé
par les propriétaires, ou par des confrères.
S’observer du coin de l’œil
Pratiquer le comportement, c’est apprendre à utiliser des outils inspirés des thérapies humaines.
Nombre de techniques existent (thérapie cognitivo-comportementale ou TCC, thérapies systémiques,
programmation neurolinguistique ou PNL) qu’il n’est pas question d’exposer ici, mais qui peuvent
faire l’objet de lectures personnelles très instructives. Moins compliqué, le vétérinaire doit apprendre
à maîtriser sa communication paraverbale, c’est-à-dire toute les attitudes, mimiques, gestes qui
parlent à sa place, souvent involontairement. Rappelons-le, les propriétaires arrivent souvent avec un
fardeau, et tout signe du vétérinaire qui semble les disqualifier peut les bloquer irrémédiablement,
ou les pousser à masquer certains comportements de leur animal. L’écoute neutre, par laquelle le
soignant doit être capable de se détacher de ses propres émotions et a priori, est une attitude qui se
travaille.
Parallèle ou corollaire, le praticien doit faire preuve d’empathie. L’empathie n’est ni de la sympathie ni
de la compassion, or c’est bien là l’erreur la plus fréquente : l’empathie consiste à saisir et admettre
les émotions et les représentations de l’autre, donc à le comprendre et à pouvoir « se mettre à sa
place », sans pour autant se laisser envahir par ses émotions ni altérer la distance thérapeutique
nécessaire. En ce qui nous concerne, l’empathie du soignant va permettre aux clients de parler en se
« sentant compris », sans se sentir jugés, ce qui est le préalable indispensable à un exposé complet
des troubles de l’animal.
Lors du recueil d’information, le vétérinaire gagne à utiliser des questions ouvertes (« que fait-il
quand vous le brossez ? »), qui génèrent plus d’information que les questions fermées (« quand vous
le brossez, il grogne ? »), et doit relancer le propriétaire lorsque la question bloque : il y a souvent un
symptôme crucial qui se cache derrière ce blocage…
Enfin, tous les membres de la famille doivent pouvoir exprimer leur avis sur l’animal, son trouble, et
la consultation. Ceux qui sont absents ont sans doute exposé leur avis à ceux qui sont présents : on
peut obtenir cet avis même en leur absence. Faire parler tout le monde sera également indispensable
pour repérer les « saboteurs de thérapie », qui ne sont pas d’accord soit avec le trouble, soit avec les
mesures, et qui peuvent, de par leur résistance passive (ou parfois active), mettre en échec la
thérapie entreprise.
Sémiologie comportementale
Le recueil des symptômes est une phase importante, qui doit être exhaustive, sans toutefois dépasser
une trentaine de minutes. L’examen direct, donc l’observation du chien ou chat en liberté dans la
salle, a commencé dès le début de la consultation, il permet notamment d’objectiver l’activité
générale, le niveau de peur, la qualité d’attachement avec les propriétaires, etc.
L’examen clinique (puisque nous sommes vétérinaires) doit notamment rechercher les manifestations
organovégétatives du trouble comportemental (tachycardietachypnée, tremblements, troubles
digestifs, plaies de léchage, etc.), les douleurs (à l’origine de nombreuses agressions), l’état des
organes des sens, ainsi que toutes les maladies à expression comportementale (affections
endocriniennes, urinaires, cutanées par exemple). Attention à anticiper la possibilité d’un trouble
organique associé, dont l’exploration purement médicale va prendre sur le temps de consultation
comportementale. L’utilisation de procédures standardisées (et expliquées aux assistantes qui fixent
les rendez-vous) peut être très utile : on peut par exemple imposer une analyse urinaire préalable à la
consultation comportementale lors de malpropreté du chat (ou du chien), ou un examen biochimique
de dépistage pour tout animal âgé.
La sémiologie comportementale proprement dite se base sur l’entretien, et il est souvent pratique de
s’aider d’une feuille de sémiologie pour n’oublier aucun item. Classiquement, les comportements
sont classifiés comme suit :
• Comportements centripètes (centrés sur l’animal) : alimentation, boisson, sommeil, propreté, prise
de contact avec le corps (léchage par exemple),
• Comportements centrifuges (tournés vers l’extérieur) : exploration (socialisation, peurs), jeux
(indicateurs de la hiérarchie, des autocontrôles), comportements agonistiques (fuite et agressions),
• Comportements mixtes : sexuel, maternel, attachement et, pour le chat, marquage.
Chaque item est plus ou moins « creusé » en fonction du motif de consultation.
Gérer son temps
L’écueil majeur de la consultation de comportement, c’est la fuite du temps. Dès lors, au cours de son
entretien, le vétérinaire doit toujours se demander pourquoi il pose une question. Il faut apprendre à
ne pas perdre de temps avec des informations vouées à être inutiles : si la réponse est sans intérêt
pour le diagnostic ou le traitement, ou si la réponse confirme un diagnostic déjà certain, mieux vaut
éviter de la poser !
Il y a nombre de moyens de perdre son temps, ce peut être parce que la consultation ne se passe pas
bien, auquel cas il peut être nécessaire de s’interrompre, et de reprendre après quelques jours ; ce
peut être parce que la consultation se passe trop bien, que le cas est intéressant ou les clients très
volubiles, auquel cas il faut savoir contrôler son attitude et apprendre à couper la communication, à
ne pas relancer.
Demande
La demande des propriétaires est parfois différente du motif de consultation, et elle doit être
clairement évoquée : c’est donc au praticien, puisque c’est lui le professionnel, de la clarifier. En effet,
lorsqu’un propriétaire consulte pour son chien agressif (motif), la demande peut être très variable : «
comment le soigner définitivement? », « est-ce ma faute ? », « comment sécuriser lorsque des
enfants viennent à la maison ? », « ai-je raison de vouloir m’en séparer ? ». Parfois la demande est
multiple, parfois les propriétaires ont du mal à l’avouer ; c’est le cas notamment lorsqu’ils envisagent
l’euthanasie, et qu’ils viennent chercher l’aval du professionnel. Il faut donc y passer le temps
nécessaire, soit avant, soit après l’entretien sémiologique, afin de ne pas se méprendre sur l’objectif
de la thérapie et d’être sûr que propriétaires et vétérinaire sont bien en train de regarder dans la
même direction.
Enfin, il est parfois nécessaire de se raisonner soi-même sur le but à atteindre. Les propriétaires
viennent souvent chercher une solution pour mieux vivre avec leur animal, pour restaurer une
harmonie familiale. Le but est rarement de rendre l’animal parfait, selon la définition que nous
pouvons donner à cette expression : cette notion est très importante.
Diagnostic et prescription
L’énoncé du diagnostic s’accompagne généralement d’un recadrage du trouble : le praticien explique
l’origine et les causes scientifiques du trouble, en rectifiant les constructions erronées élaborées par
les maîtres pour expliquer la genèse des symptômes : leur exposé initial est en effet rarement
descriptif, le plus souvent les symptômes de leur animal sont « sur-interprétés ». Un exemple
classique est d’expliquer que ce chien (ou ce chat) n’a pas « été battu » mais a été victime de
mauvaises conditions de développement, associées à une susceptibilité individuelle (et non liée à la
race !) : ces deux paramètres ont généré un syndrome de privation. Cette phase est nécessaire mais
ne doit pas non plus noyer les maîtres, ni les emporter vers des notions trop complexes. Pour
exemple, la hiérarchie d’une meute de loups ne va pas les intéresser, ils sont venus pour soigner le
chien de la famille ! Trop d’information tue l’information, et il faut essayer d’aller à l’essentiel. Le
pronostic et le planning du traitement doivent être annoncés, c’est en quelque sorte la couleur du
chemin de randonnée : les propriétaires ont besoin d’être avertis du temps, des efforts et de l’argent
qu’ils devront a priori consentir pour soigner leur animal.
La prescription des mesures de thérapie comportementale doit être succincte, réaliste et réalisable :
3 à 4 mesures par consultation semblent souvent un maximum à l’acceptation. Trop de mesures
prescrites poussent les maîtres à ne réaliser que les mesures les plus faciles de la liste, or ce sont
souvent les mesures les moins significatives pour le chien ! Gare donc aux thérapies fleuve… Chaque
mesure doit impérativement être validée et acceptée par le propriétaire : c’est bien lui qui va devoir
travailler à présent ! Enfin, la rédaction doit être très claire, les mesures ne seront pas toujours très
évidentes pour les maîtres : l’envoi a posteriori d’un document écrit peut permettre de détailler les
mesures de façon plus claire, avec un peu plus de recul.
Oser prescrire !
La prescription d’un psychotrope fait encore trop souvent débat. Les psychotropes ont mauvaise
presse et les gens sont parfois réticents, pensant à tort qu’il s’agit d’endormir leur animal, effet
pourtant bien rarement recherché. Plusieurs arguments peuvent aider à enterrer la controverse, car il
n’y a pas de raison de ne pas faire en comportement ce que nous faisons pour toutes les autres
maladies :
• L’utilisation de psychotropes est a minima un facilitateur de thérapie, un moyen de restaurer plus
rapidement l’harmonie familiale autour de l’animal, au plus il est simplement indispensable,
notamment lors de danger, ou face à un trouble du développement handicapant.
• Reconnaître que plus de la moitié des troubles n’est pas causée par les maîtres et les priver d’un
psychotrope pour les aider à résoudre ce trouble est parfaitement incompatible…
• Aucun psychotrope n’est efficace sans thérapie comportementale, il ne représente donc qu’une
partie du traitement.
• En revanche, les mesures prescrites seront beaucoup plus faciles à appliquer si un psychotrope
adéquat y est associé.
• Quel vétérinaire s’interroge sur la médicalisation d’un diabète ou d’une pyodermite profonde ? Le
comportement appartient à la médecine vétérinaire, et la question ne devrait pas se poser non plus.
• Pour les plus réticents et pour certaines symptomatologies, le développement de compléments
alimentaires à visée psychotrope très efficaces peut permettre un compromis acceptable.
Attention, la construction thérapie comportementale/thérapeutique doit être synergique : les effets
des psychotropes doivent être connus et non incompatibles avec les mesures prescrites (pas
d’association, par exemple, d’une thérapie par le jeu et d’un traitement par inhibiteur sélectif du
recaptage de la sérotonine, ou de clomipramine).
A l’issue de la consultation, la mise en place d’un suivi formalisé (calendrier fixant les dates des suivis
téléphoniques et des consultations suivantes) semble associée à de meilleurs résultats : si les
améliorations, étape par étape, ne sont pas différentes, la formalisation du suivi est en revanche
associée à une meilleure satisfaction du client. Or c’est sa satisfaction qui génère son assiduité, et qui
va permettre d’aller « au bout » d’une thérapie qui, comme nombre d’autres maladies, nécessitera le
plus souvent quelques mois pour obtenir rémission ou stabilisation.
Prévention
Développer ses compétences en comportement et proposer une consultation comportementale
permettent de développer l’activité clinique. C’est également un moyen d’être plus efficace et plus
complet lors des consultations pédiatriques : le vétérinaire est en effet le meilleur acteur dans la
prévention des troubles comportementaux, et notamment pour ceux qui se mettent en place dans le
jeune âge.

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