LE DEVOIR DE CONSEIL de l`entrepreneur

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LE DEVOIR DE CONSEIL de l`entrepreneur
LE DEVOIR DE CONSEIL
de l’entrepreneur
Catherine EMON
Chef du service Assurance
à la Fédération Française du Bâtiment
Les techniques évoluent, le monde change, et l’exigence toujours croissante d’une
protection du consommateur, conduisent nécessairement au développement des devoirs
contractuels, dont celui de conseil.
Si tous les contractants sont a priori débiteurs d’un devoir de renseignement et de
conseil (J. MESTRE, obs. : RTD civ. 1986, p. 341), ce sont les professionnels qui sont
plus particulièrement visés. Ainsi dans le domaine de la construction tous sont
concernés : les architectes, les maîtres d’œuvre, les ingénieurs et techniciens, les
entrepreneurs mais aussi les sous-traitants ou les fabricants-vendeurs de matériaux de
construction, etc.
Aujourd’hui, je vous propose de traiter plus particulièrement de l’obligation qui pèse sur
l’entrepreneur que je représente au sein de cette haute assemblée.
Faisons d’abord un peu de sémantique ensemble.
DIFFERENCE ENTRE DEVOIR DE CONSEIL
ET RENSEIGNEMENT
Le renseignement est plus neutre et a priori sans orientation. Il peut résulter de la
remise pure et simple de documents, type notice de fonctionnement, par exemple...
Le renseignement est spontané Tout constructeur se doit de fournir spontanément au
maître d'ouvrage et aux autres constructeurs, tous les renseignements en sa possession
pour permettre une réalisation parfaite de la construction(1).
Le conseil implique le renseignement. La jurisprudence utilise d’ailleurs souvent les
termes « obligation de conseil et d’information » ensemble, quand il s’agit du devoir de
conseil.
Le conseil vise un double objectif :
- mettre en garde le maître d'ouvrage sur les risques et inconvénients de l’opération de
construction,
- l’aider à choisir la solution qui répondra le mieux à ses besoins en lui apportant la plus
grande sécurité.
(1)
Cass. Com. 6 décembre 1983 : Bull. civ. IV, n°339, p. 294 (s’agissant de la remise de notices techniques et de directives,
entre entrepreneur de spécialités voisines, mais distinctes) et Cass. 3e civ. 14 mai 1985 : RDI 1985.378 (une entreprise
d’étanchéité doit signaler à l'entreprise de gros-œuvre les erreurs qu’elle a faites qui compromettrait l’efficacité de ses
travaux) et 3 octobre 1984 : RDI 1985.60
En clair, le conseil c’est prendre parti !
Mais l’entrepreneur n’est pas seul pour faire face à cette obligation de conseil, c’est une
œuvre collective impliquant tous les constructeurs.
SUR QUOI et ENVERS QUI ?
SUR TOUT !
Aucun aspect de l’opération de construction n’est a priori exclu du devoir de conseil de
chaque constructeur, quel que soit l’objet de son intervention. En tout état de cause, le
constructeur ne peut se contenter d’exécuter ses prestations conformément au marché,
pour estimer qu’il a rempli son devoir(1bis) de conseil. Il doit se renseigner lui-même « pour
conseiller en toute connaissance de cause »(2).
Et ENVERS TOUS !
Le conseil diffère suivant l'interlocuteur auquel il est destiné, étant cependant précisé que le
créancier naturel de l’obligation de conseil des constructeurs est le maître de l’ouvrage.
n Vis-à-vis du maître d'ouvrage
- sur les existants par exemple : « l’entrepreneur chargé de l’aménagement d’une
cheminée (foyer fermé) dans une construction neuve doit préalablement vérifier l’état du
conduit de cheminée... (3)»
- sur les risques du sol
maître d'ouvrage.
(4)
: sur ce point également l'entrepreneur se doit de conseiller le
- sur la règlementation applicable, l'entrepreneur doit en appoint de la maîtrise
d'œuvre :
. attirer l’attention du maître d'ouvrage sur certaines règles d'urbanisme et leur
modification(5), sur les effets du permis de construire(6) et le contenu du cahier des
charges de lotissement(7),
. lui signaler un défaut d’implantation de la construction(8).
. en revanche, il ne peut être reproché à un entrepreneur de ne pas avoir rappelé au
maître de l’ouvrage l'exigence d'un permis alors que celle-ci était évidente pour lui
qui travaillait à la mairie(8bis), idem pour une autorisation administrative(8ter).
- sur la conception, toujours à titre subsidiaire de la maîtrise d'œuvre, l’entrepreneur peut
se voir reprocher de ne pas avoir attirer l’attention du maître de l’ouvrage :
(1bis)
Cass. 3e civ. 11 février 1998 : G.P. 12/98 som. p. 17 (l'entreprise avait réalisé un escalier dangereux sur la base d’un tracé du
maître d’œuvre. Il est tenu à réparation envers le maître d'ouvrage au titre du devoir de conseil) – idem 12 janvier 2000, Mon.
TP 24/3/2000, p. 87 et 28 janvier 2003, Mon. TOP 11/04/2003, p. 89
(2)
ère
Dijon, 1 ch. 7 janvier 1997 : RDI 1998.123
(3)
Cass. 3e Civ. 22 juillet 1998 : bull. civ. III, n° 172
(4)
Cass. 3e civ. 11 mars 1998 : JCP const. Juil-août 1998, p. 10
(5)
Cass : 3e civ. 11 mai. 1994 : Sté BASSO Sud Villas Toit d’azur c/ HADJI... G.P. 1995, som. p 32; 2 octobre 2002, Bull. III.. n° 196
p. 165 (les travaux doivent s’inscrire dans les limites des règles d’urbanisme et les respecter – problème de conception reproché)
(6)
Cass : 3e civ. 16 juillet 1996 : RDI 1996.575
(7)
Limoges, 14 décembre 1992 : JCP.IV.16 et Jurisdata n° 048322
(8)
Cass : 3e civ. 17 mars 1999 : Mon. T. P. 11/06/99 p. 73
(8bis)
Cass : 3e civ. 30 juin 1993 ; Dseuste c/ Vuceta…
ème
(8ter)
Cass. 3 civ. 28/5/2002, Mon. TP, 11/10/2002, p. 75 (interruption des travaux faute d’autorisation administrative)
. sur l'insuffisance des travaux prévus(9) ou une erreur de calcul(10) même si elle est
commise par un autre constructeur,
. sur la nécessité de mettre en place une étanchéité non prévue initialement(11),
. sur l'impossibilité de remonter les bâtiments à l'identique (12),
. et sur une conception non conforme des travaux par rapport aux règles de l’art(13).
- le coût de la construction, est également un domaine dans lequel l'entrepreneur peut
être amené à conseiller le maître d'ouvrage. En l’occurrence, quand l'entrepreneur
découvre une erreur d'appréciation flagrante du coût, entraînant un dépassement
considérable du prix(14).
En tout état de cause, l’entrepreneur doit même aller jusqu’à rectifier des renseignements
erronés fournis par un maître d'ouvrage incompétent (15).
L'absence de maître d'œuvre a pour effet de renforcer le devoir de conseil de
l'entrepreneur, qui doit alors :
- suppléer son absence(16),
- ou refuser une tâche qui dépasse sa compétence ou ses capacités(17),
- voire même conseiller au maître d'ouvrage de recourir à un maître d'œuvre(18).
o L’entrepreneur a également certains devoirs envers le maître d'oeuvre.
Si l'entrepreneur et l’architecte ne sont liés par aucun contrat, ils « collaborent »
néanmoins à une oeuvre collective : la construction.
Et même si le conseil est plutôt réservé au maître d'ouvrage, qui doit le transmettre à
l’architecte pour suite à donner, l’apport de l'entrepreneur à la maîtrise d’œuvre n’est pas
nul. Mais il s’agit plutôt de donner des informations dès lors qu’elles relèvent de son
domaine de compétence.
Dans ce cadre, l'entrepreneur peut se voir reprocher de ne pas avoir :
. contrôlé les plans de l'architecte et au besoin les refuser(19) dans sa sphère de
compétences ;
. relevé la violation des règles de l'art que sa compétence lui permet de
découvrir(20);
. relevé une insuffisance des fondations(21) ou d’étanchéité(22);
. attiré l’attention du maître d’œuvre sur les problèmes techniques susceptibles de
surgir(23) ou sur les risques de nuisance liés à l’implantation arrêtée(24).
p Enfin, le devoir de conseil s'étend aussi aux autres professionnels entre eux dès
lors que le travail de l'un dépend du travail de l'autre(25).
(9)
Cass. 3e civ., 03 juin 1988
Cass. 3e civ.,11 février 1998, RGDA 1998 (2), p. 301
(11)
Cass. 3e civ., 30 mars 1989 : Mon. T.P. p.32
(12)
Cass. 3e civ., 20 novembre 1991 : bull. III n°285
(13)
Cass. 3e civ., 27 avril 2000, GP 9/10/2001, som. P. 28
(14)
Cass. 3e civ. 20 novembre 1991
(15)
Cass. 3è civ. 31 mars 1993 : RGAT 1993.611 et notamment sur la destination des travaux : 25 mai 2004, RDI 2004.382
(16)
Cass. 3e civ. 6 janvier 1994 : RDI 1994.251
(17)
Cass. 3e civ., 15 décembre 1993 : RDI 1994.251
(18)
Versailles 21 janvier 1994 : RDI 1994.456
(19)
Cass. 3e civ., 12 février 1974 : bull. III n° 73 ; 17 mai 1983 : RDI 1983.454 ; 13 décembre 1983 RDI 1984.188
(20)
Cons. d’Etat 19 avril 1991 SARL Cartigny
(21)
Cass. 3e civ., 4 fevrier 1981 : RDI 1982.82
(22)
Cass. 3e civ., 8 juin 1994 : Mon T.P. 26/08/94 p. 23
(23)
Cass. 3e civ., 18 novembre 1992
(24)
Cass. 3e civ., 17 septembre 1997 : fichier SMABTP ;
(25)
Cass. 3e civ., 14 mai 1985
(10)
Abordons maintenant les aspects juridiques de cette obligation.
DEVOIR DE CONSEIL ET DROIT
Sur quel fondement juridique le professionnel de la construction peut-il être mis
en cause au titre du devoir de conseil ?
Nous savons que cette obligation constitue un accessoire à l’obligation contractuelle
principale. Dès lors, dans le domaine de la construction le fondement juridique applicable
dépendra à fois de la qualité du créancier du devoir de conseil, du type de dommage
invoqué, etc. c'est-à-dire :
- soit du domaine des garanties légales (articles 1792 et suivants) dans les rapports
maître d'ouvrage/entrepreneur, lorsque les conditions nécessaires à l’application de
ces articles sont réunies ;
- soit de la responsabilité contractuelle de droit commun (articles 1134, 1135 ou 1147
du code civil) lorsque les garanties légales ne sont pas applicables ;
- soit de la responsabilité quasi-délictuelle (articles 1382 et suivants du code civil),
entre constructeurs, puisqu’ils ne sont pas liés par contrat ;
- ou encore, du domaine de la vente, par exemple pour les fabricants-vendeurs(26) ;
etc.
Il n’y a pas de réelle divergence d’application du devoir de conseil en droit privé par rapport
au droit public(27). Et les délais de prescription pour agir sont liés au fondement juridique
applicable(28).
Comment faire la preuve du respect de l’obligation de conseil ?
Le 25 février 1997(29), la cour de cassation a rendu un arrêt important dans le domaine de la
responsabilité médicale pour préciser que « celui qui est tenu d’une obligation d’information
doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation ». Ce principe d’un renversement
de la charge de la preuve dépasse en fait largement le domaine médical.
Ce n’est pas une nouveauté dans le domaine de la construction, la jurisprudence impose,
depuis longtemps déjà, aux architectes et entrepreneurs de prouver qu’ils ont bien respecté
leur devoir de conseil envers le maître d'ouvrage(30).
Il s’agit cependant d’une présomption de faute limitée à l’existence matérielle de
l’information.
En effet :
1) celui qui doit le conseil doit faire la preuve que la victime du dommage a été informée.
On admet que le conseil ait pu être donné éventuellement par un autre, le conseil de
l’un valant alors pour les autres(31). Mais attention, le contraire n’est pas vrai : l’absence
de conseil d’un des constructeurs n’exonère pas l’autre de son obligation(31bis).
2) il revient alors à la victime de démontrer que l’information ou le conseil donné était
erroné, insuffisant, incomplet, ambigu…
(26)
Cass. 3e civ., 15 mai 2001, RDI 2001.395
CE 15 décembre 2000, Ville d’AMIENS, RDI 2001.90
(28)
Cass. 3e civ., 16 octobre 2002, Argus Assurance n° 6808, p. 46
(29)
Cass. 1è civ. 25 février 1997 rapport Pierre SARGOS, Bull I, n° 75
(30)
Cass. 3è civ. 4 mai 1976, Bull III, n° 184
(31)
Cass. 3è civ. 9 juin 1999, SCI Domaine de St Louis…, pourvoi 97-18.950
(31bis)
Cass. 3e civ., 22 février 1989 : sem. Jur. Not. 24/09/89, p. 452 et 9 février 2000, n°193 D (Bull. MAF)
(27)
Le conseil se manifeste généralement par des réserves. Et le juge exige que ces réserves
soient expresses, précises, explicites et concordantes(31ter).
Le professionnel doit donc toujours garder à l’esprit qu’il doit se ménager des preuves en
conservant les traces des conseils qu’il a donnés au cours du chantier, jusque et y compris
la réception pour l’architecte.
Et même si l’on sait que cette preuve peut se faire par tous moyens(32), mieux vaut recourir
à l’écrit pour exprimer ou confirmer ses réserves.
Certes, je vous accorde qu’il est parfois délicat de recourir à la lettre recommandée au cours
d’un chantier, mais c’est un moyen efficace pour ensuite prouver que le devoir de conseil a
été accompli. En tout état de cause même si c’est chaque fois une question d’espèce
appréciée au cas par cas par le juge.
Dans nos sociétés, où trouver un payeur est devenu un sport national, l’action en non
respect du devoir de conseil devient une des voies royales pour obtenir une indemnisation.
Comment le professionnel peut-il alors se défendre ?
QUELLES LIMITES ?
Prenons par exemple le domaine de la responsabilité décennale dans son régime issu de la
loi du 4 janvier 1978. La force majeure, la faute du maître de l’ouvrage, son immixtion
fautive dans l’opération de construction ou l’acceptation délibérée des risques peuvent être
de nature à dégager la responsabilité du constructeur.
C’est également le cas :
-
lorsque les faits sont connus de tous ou à la portée d'un maître d'ouvrage compétent.
Ainsi "le maître d'ouvrage devait savoir que ses exigences nouvelles et changeantes
ainsi que de multiples adjonctions et transformations entraîneraient une augmentation
du coût des travaux"(32bis) ;
-
ou lorsque le maître d'ouvrage cache délibérément certains éléments comme en ne
fournissant pas à l'entrepreneur les plans de géomètre en sa possession ou/et en taisant
l’existence d’accords anciens sur les limites de propriété(32ter).
Pendant des années cependant, la situation de l’entrepreneur n’a pas été particulièrement
confortable. Même s’il faisait des réserves écrites, on lui reprochait, en sa qualité de
professionnel, de n’avoir pas refusé de faire le travail en connaissance du problème
soulevé(33).
On constate désormais une évolution sensible depuis la fin des années 90. Nombre de
décisions font en effet application de la notion de transfert de risques pour faire supporter
au maître d'ouvrage une partie de la responsabilité, lorsque face à des réserves claires,
délibérément il n’en a pas tenu compte.
(31ter)
Cass. 3e civ., 8 juin 1994
ère
Cass. 1 civ. 14 octobre 1997, JCPG 1997,II,22942, rapp. SARGOS
(32bis)
Cass. 3e civ., 21 novembre 1991 : GP 23/07/92, som. 15
(32ter)
Cass. 3e civ., 31 mars 1988
(33)
PARIS 23e ch., 3 avril 1996, Jurisdata 020609 ou CE 18 mai 1962, Tables, p. 1024,
(32)
A titre d’exemple, parmi les décisions rendues, il a été jugé que le maître d'ouvrage
assumait une responsabilité pour avoir pris des risques en toute connaissance de cause :
-
même s’il n’a aucune compétence technique particulière, dès lors qu’il passe outre les
réserves formulées par un constructeur(34); ces réserves devant être « précises,
explicites et non équivoques sur l’amplitude et l’étendue des risques de désordres que
présente la solution technique initialement retenue »(35).
-
en cas de recherche abusive d’économie, considérant qu’il n’est « ... pas honnête de
faire supporter aux constructeurs le coût des réparations consécutives aux désordres
qui ne pouvaient manquer de survenir compte tenu des contraintes budgétaires
imposées... peu respectueuses des normes qui s’imposent à tous ...»(36), ou encore
pour avoir choisi une solution économique ou minimaliste tout en étant averti des
risques(37) ou qui passe outre, pour des raisons d’économie, le conseil du professionnel
de recourir aux services d’un maître d’œuvre compte tenu de la spécificité des
travaux(38).
-
alors que l'entrepreneur lui a fait des réserves sur les travaux à effectuer, le maître
d'ouvrage avait néanmoins imposé des matériaux inadaptés en toute connaissance(39),
-
en imposant à un entrepreneur de remettre en place des projecteurs halogènes qui
multiplient par deux la puissance, alors même que l’installation venait d’être réalisée
sous contrôle d’un architecte(40).
-
La solution vaut également lorsque les conseils (écrits) de l’entrepreneur portent sur
les conditions d’utilisation des biens et que le maître de l’ouvrage passe outre ; ainsi le
maître de l’ouvrage qui s’abstient de fermer le compteur d’eau alors qu’il sait que les
combles ne sont pas isolés (il a refusé cette isolation par souci d’économie) et qu’il
s’absente au mois de décembre (après plusieurs périodes de gel antérieures), il est considéré
comme ayant rendu le sinistre « inéluctable »(41).
-
et il ne suffit pas à l’entrepreneur de proposer au maître d’ouvrage des travaux en
option (peinture anti-corrosion dans un bac de repompage) et de le laisser choisir, pour lui
transférer une part, voire la totalité de la responsabilité. Il faut l’informer clairement
sur les risques inhérents à l’absence des travaux en question (fuites en soudure) pour
éclairer son choix (42)
La jurisprudence est désormais bien fournie et la sanction du maître de l’ouvrage pour
acceptation délibérée des risques est retenue aussi bien au titre des garanties légales(43)
qu’au titre de la responsabilité contractuelle de droit commun(44).
Cette évolution jurisprudentielle, qui considère l’acceptation délibérée du risque comme une
cause autonome d’exonération de la responsabilité des constructeurs(45), se pose également
comme une limite au développement sans fin du devoir de conseil dans le domaine de la
construction. Elle a le mérite de mieux responsabiliser les maîtres d'ouvrage, professionnels
ou non, au rôle qu'ils entendent effectivement jouer dans la construction.
(34)
H. GROUTEL, resp. et ass. Juil-août 1999, p.4
PARIS 23e ch., 10 novembre 1999, AJDI 10/01/2000
Cass. 3è Civ. 11 octobre 1995, SCIV
(37)
Cass. 3è Civ., 23 février 2000 – Epoux Chiaporrel c/ Claveau (solution de rejointoiement au lieu de la restauration d’un mur
fragile)
(38)
Cass. 3è Civ., 29 octobre 2003, Mon. TP 19/12/2003, p. 57
(39)
Cass. 3è civ. 15 décembre 1999 : Mon. T. P. 10/03/2000, p. 76 et 20 mars 2002, Bull III, n° 68 p. 57, RDI 2002.236
(40)
Cass. 3è civ., 25 novembre 1998 : Mon. T.P. 15/01/99, p. 45
(41)
PARIS, 19è ch., 25 juin 2003 : AXA c/Galdie et autres, Argus Assurance n° 6855
(42)
Cass. 3è civ., 3 mars 2003, société Sollac Atlantique c/ …., n°281 FS-PB
(43)
par exemple, déjà cité, supra
(44)
Cass. 3e Civ. 7 octobre 1998 : RDI 1999.105
(45)
Cass. 3e civ. 6 mai 1998 : RDI 1998.377
(35)
(36)
Si vous le permettez, je voudrai conclure ce sujet très sérieux par une note plus légère:
quelles qualités l’entrepreneur doit posséder pour pouvoir respecter l’obligation
de conseil ?
Nous savons que pour conseiller en connaissance de cause, celui qui conseille :
- doit interroger son partenaire,
- et même procéder à certaines investigations.
Pour ce faire :
- il est censé connaître tous les règlements de son métier et ses usages particuliers.
- il doit être "à la page", puisqu’on lui demande de se tenir au courant des innovations
techniques, mais aussi des évolutions juridiques pour avertir son client des
modifications législatives intervenues.
- il doit se montrer humble, modeste, puisqu’il doit aller jusqu'à refuser une tâche qui
dépasse ses capacités
- faire preuve de promptitude pour accomplir les démarches nécessaires en temps utile.
- il doit être persévérant, avoir l'esprit d'initiative sans toutefois s'immiscer dans les
affaires du maître d'ouvrage, le zèle n'étant pas synonyme d'immixtion.
- les conseils qu'il donne doivent être pertinents, puisque entre diverses solutions
possibles, il doit proposer celle la plus adaptée à la situation et la plus favorable au
client,
- il doit aussi prévoir les maladresses du maître d'ouvrage, tenter d'y porter remèdes par
anticipation et même rectifier les renseignements erronés fournis par un maître
d'ouvrage incompétent.
Doit-il aussi prédire l’avenir ?
Respecter le devoir de conseil tient donc de la perfection. L'entrepreneur doit être un
véritable "homme orchestre".
Ne dit-on pas déjà qu’il est "l'homme de l'art" ?
Désormais il lui faut également être conseiller juridique, grand communicateur,
parfois même extralucide.
La tâche de l’entrepreneur est rude. Car même si tendre vers l'idéal est un
objectif. Il est parfois difficile de faire coïncider "idéal" et"réalité" sur un
chantier.
Je vous remercie de votre attention.