Véronique MATHELIN IUFM de Dijon

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Véronique MATHELIN IUFM de Dijon
Véronique MATHELIN
CAPES Lettres Modernes
Lycée Montchapet (Dijon)
IUFM de Dijon
Année 2003-2004
(03STA16099)
QUELS SCENARIOS DE COURS UTILISER
POUR SUSCITER L’INTERET D’ELEVES
DIFFICILES DE SECONDE?
Mémoire professionnel
sous la direction pédagogique
de Marina Jovignot
SOMMAIRE
INTRODUCTION
P2
ETAT DES LIEUX
P4
LES ECLAIRAGES APPORTES PAR LA FORMATION ET MES LECTURES
P8
I- Mieux connaître les élèves au sein de la classe et du système éducatif, pour
améliorer les conditions de travail
1- Les élèves et les adolescents d’aujourd’hui : comment se comportent-ils en
groupe et quelle est leur relation avec le système?
2- Leurs difficultés par rapport à la discipline (lectures, connaissances)
3- leurs difficultés générales dans les différentes matières : de nouveaux
comportements
II- Les apports théoriques au point de vue pédagogique
1- Familiariser les élèves avec l’univers du livre et la notion de littérature
2- Favoriser l’appropriation vocale et imaginaire des textes
3- Initier au jeu des hypothèses pour forcer l’élève à être acteur dans la
construction du sens
LES SOLUTIONS MISES EN OEUVRE ET LEUR ANALYSE
I- D’un point de vue pédagogique pour aider les élèves à entrer dans les textes
1- Transmettre l’émotion et le plaisir
2- Passer par l’image pour revenir au texte
3- Reprendre contact avec les livres
4- Autre scénario : lectures analytiques de textes sous forme de tableaux
à deux ou trois colonnes selon les objectifs à faire percevoir : faire
fonctionner le texte comme piège
5- Leur donner un but final pour les motiver
P12
P15
II- Pour rétablir l’ordre et dynamiser la classe
1- Quelques petites astuces pour animer la classe
2- Le professeur : un comédien, un confident? en tout cas, quelqu’un qui
sait établir un contact avec ses élèves
P25
NOUVELLES PERSPECTIVES
P27
CONCLUSION
P28
BIBLIOGRAPHIE
P29
ANNEXES
2
“C’est
grâce
aux
élèves
“difficiles” que des enseignants
peuvent
être
amenés
à
s’interroger sur leurs pratiques,
leurs valeurs. C’est avec eux
qu’ils vivent des moments
privilégiés,
quand
ils
réussissent à créer le contact, à
renouer un fil rompu, quand ils
parviennent à réveiller le désir
d’apprendre ; lorsqu’ils arrivent
à mobiliser cette formidable
énergie vitale présente au fond
de chacun, c’est alors que le
1
métier prend tout son sens.”
C’était avec un peu d’appréhension, ce fut finalement avec beaucoup
d’intérêt que j’ai abordé ce mémoire ; d’une certaine façon, je suis quelque peu
privilégiée par rapports aux autres stagiaires puisque nous sommes au mois de mai
et que je commence simplement mon mémoire, j’ai ainsi du temps à consacrer à la
lecture d’ouvrages concernant mon sujet et j‘ai aussi la possibilité de prendre du
recul par rapport à cette première année qui est en train de s‘achever. Mais cela a
cependant un côté frustrant car toutes les techniques et tous les conseils que je peux
découvrir dans les livres, je ne pourrai les appliquer qu’à la rentrée prochaine, or ils
m’auraient été d’un précieux soutien cette année.
Lorsque l’on débute, on a tendance à idéaliser la profession, à se dire
qu’on aura toujours des classes plus ou moins faciles, et surtout qu’ avoir des
classes difficiles n’arrive qu’aux autres.
Mais lorsque l’on se retrouve réellement face à des élèves difficiles et
qui plus est en difficulté, après le premier “instant” de destabilisation, il faut
rapidement réagir : deux orientations sont alors possibles :
- soit on cherche uniquement à conserver une bonne relation avec les élèves et à les
occuper par des tâches actives ; mais c’est souvent au détriment des contenus que
l’on fait passer au second plan.
- soit on cherche à amener les élèves vers ces mêmes contenus, le professeur étant
alors celui qui va leur donner les moyens de parvenir à ce but fixé.
1
M.T.Auger et Ch.Bourchalat, Elèves « difficiles« , profs en difficulté.
3
La première orientation est bien sûr réalisable mais elle a des
conséquences déplorables, en lycée en particulier. Par contre, mettre à la portée des
élèves les contenus fixés par les programes de seconde et leur donner les moyens
d‘y accéder, c’est les rendre acteurs et capables d’entrer dans les textes. Voici donc
ce que j’ai essayé de mettre en oeuvre cette année, sans perdre de vue qu’il est
aussi utile d’entretenir de bonnes relations avec les élèves pour éviter les tensions et
pour qu’ainsi, la transmissions des savoirs soit facilitée. Tout cela demande des
efforts, évidemment de la part du professeur mais aussi de la part des élèves ; mais
quelle satisfaction pour moi de voir une progression, une amélioration sensible dans
le travail et dans les résultats, et pour les élèves, de se sentir capables de faire, de
produire.
4
ETAT DES LIEUX
Présentation de l’établissement :
J’ai effectué mon stage en responsabilité au lycée Montchapet à Dijon.
Construit en 1964, il accueillait cette année 1225 élèves réunis en 42 divisions. Sa
particularité est de pouvoir offrir aux élèves qui le souhaitent une section européenne
en espagnol et des classes post-bac (4 B.T.S : Assistant Secrétaire Trilingue / Force
de Vente / Commerce International / Banque.) C’est un lycée urbain dont l’un des
objectifs est l’ouverture internationale grâce à des échanges avec l’Allemagne,
l’Angleterre, l’Italie et les USA.
Présentation de la seconde 12 :
Cette classe de seconde comprenait à la rentrée 29 élèves: une élève
est partie dans les premiers jours et a changé de classe ; une autre est partie pour
raison médicale dans un établissement spécialisé ; enfin une troisième élève est
partie juste avant les vacances de février pour un autre établissement de
l’agglomération dijonnaise. Il reste donc aujourd’hui 26 élèves dont 11 filles et 15
garçons ; tous ont deux langues vivantes et ont choisi l’option SES ; parmi eux on
peut compter 5 redoublants tandis que 16 élèves proviennent de collèges proches du
lycée Montchapet et 5 élèves seulement viennent de l’extérieur de Dijon ; tous sont
issus de milieux plutôt favorisés ; ainsi, un tiers de ces élèves a au moins un des
deux parents qui exerce le métier d’instituteur ou de professeur.
Conditions de travail et premiers constats
Mes heures de cours sont réparties du lundi au vendredi en semaine A
et du lundi au samedi en semaine B, avec ce jour là deux heures de 10 heures à midi
; les élèves sont en général concentrés durant la première heure et plus dissipés la
deuxième ; le cours du mardi de 15 à 16 heures est le plus difficile : c’est en effet leur
dernière heure de la journée et leur dernière heure avant le jeudi matin : ils ont donc
beaucoup de mal à se concentrer.
5
Contrairement aux autres élèves stagiaires, je n’ai pas fait ma rentrée
en septembre mais le 1er décembre 2003 à la fin de mon congé de maternité.
Quelques jours avant ma prise de fonction, je me suis mise en contact avec ma
remplaçante afin de connaître ses premières séquences et de pouvoir ainsi mieux
élaborer une suite cohérente avec ce qui venait d’être réalisé. C’est à ce moment là
que j’ai appris que la seconde 12 était une classe particulièrement difficile : l’équipe
pédagogique s’était en effet déjà réunie à la mi-octobre pour faire un point et prendre
des mesures à l’égard de certains élèves : des fiches de suivi concernant le travail et
la discipline sont alors mises en place pour assurer un lien entre les professeurs, les
élèves concernés et leurs familles respectives. Ma remplaçante se plaint du manque
de travail personnel à la maison et en classe, de l’ambiance au sein de la classe, des
bavardages et de l’insolence de certains élèves. A mon arrivée, malgré toute ma
bonne volonté, ma motivation et mon enjouement de jeune maman, je ne peux que
constater, à mon tour, les difficultés qui m’attendent.
Une ambiance particulière règne entre les élèves
- Agressivité entre certains élèves
- Les insultes au sein même de la classe sont courantes
- “Guerre” larvée entre un élève juif et un élève musulman,
- Vols de manuels scolaire et d’un portable
- Rackett de devoirs
- Certains élèves (studieux en général) semblent être des boucs-émissaires
Il règne donc dans cette classe une ambiance peu propice au travail.
A mon arrivée, une relation conflictuelle et tendue s’instaure à mon
encontre
Avertie par ma remplaçante de l’atmosphère qui régnait dans la classe,
du bavardage permanent de certains élèves et du manque de travail, je décidai dès
les premiers jours de décembre d’appliquer un plan de classe afin d’essayer
d’instaurer une atmosphère de travail mais aussi d’établir (je croyais) une certaine
autorité. Les élèves, qui s’étaient habitués à un professeur pendant trois mois, ont
aussi bien vite vu qu’avant de chercher à vraiment les connaître je m’étais appuyée
sur les jugements de ma remplaçante et donc que mon regard sur eux était rempli de
préjugés. Cette expérience montre clairement que le fait de catégoriser les élèves
comporte un réel danger et que la manière dont un professeur regarde ses élèves
est déterminante ; c’est évidemment sans vouloir mal faire et sans en connaître les
conséquences, que j’ai commis cette erreur. Du coup, chaque début de cours se
passait, pour ma part, à tenter de maintenir le plan de classe institué tandis que la
plupart des élèves cherchait à le modifier. Il en résultait beaucoup d’énervement et
de tension à chaque heure.
6
Après les vacances de Noël, cette tension est de moins en moins
perceptible mais de nombreux cours se passent encore dans le brouhaha, sans que
je parvienne à véritablement m’imposer et surtout à les intéresser et plusieurs élèves
ont un comportement désagréable et fatigant qui déstabilise l’ensemble de la classe
et détruit la moindre velléité de mise au travail : les textes donnés à lire à la maison
ne sont pas lus et les trois quarts des élèves ne cherchent pas à répondre aux
questions qui doivent préparer la lecture analytique d’un texte.
Premiers constats d’un point de vue pédagogique
Les premières visites de mon tuteur m’ont alors été d’un précieux
soutien, moralement tout d’abord, mais évidemment aussi dans ma pratique
pédagogique. Les premiers constats que nous faisons concernent l’hétérogénéité de
la classe :
- Un grand nombre d’élèves sont en difficulté et n’ont visiblement pas leur place en
seconde générale.
- Cependant, certains d’entre eux sont intéressés, ont envie d’entrer dans les textes
mais ils n’ont pas les connaissances ni les outils pour aller vers l’interprétation.
- D’autres encore ne savent pas faire et ne veulent pas se donner la peine de
chercher dans les textes. Il suffirait de permettre aux premiers d’entrer dans les
textes pour que les autres aient l’envie de les suivre.
- Autre constat en effet, ils ont besoin d’être guidés, voire même “tenus par la main”,
et surtout d’être mis en confiance ; j’ai ainsi pu rapidement constater une certaine
bonne volonté : la plupart lit les oeuvres données en lecture cursive et pour l’étude
d’une oeuvre intégrale.
Les élèves sont démotivés
Conséquence de ce qui vient d’être énoncé, beaucoup d’entre eux se
sentent en situation d’échec et se considèrent comme une classe “déchet”. Dès les
premières heures de cours, leur manque d’intérêt pour la matière est flagrant. A
plusieurs reprises j’ai entendu des remarques telles que “mais à quoi ça sert ?”
d’étudier tel ou tel texte.
Conclusion
Tout juste sortie de mes études littéraires qui m’ont passionnée, bien
décidée à transmettre à mon tour ce goût pour la littérature mais aussi pour l’objetlivre en lui-même, j’ai été très déstabilisée face à ces adolescents qui ont bien
d’autres préoccupations. Mais cette passion a été un atout puisque j’ai eu envie de
leur transmettre le goût pour la lecture et l’interprétation des textes, de leur faire
7
découvrir tout ce qui se cache derrière des phrases et des mots, tout ce qu’un auteur
a pu mettre de lui-même, de son coeur et de son art pour eux, pour nous ; je voulais
encore plus leur donner le plaisir de chercher par eux-mêmes, d’être autonomes pour
redécouvrir le plaisir de lire.
La question que je me suis alors posée et à laquelle je vais tenter de
répondre, ou tout au moins d’apporter quelques solutions, est de savoir quels
scénarios de cours utiliser pour susciter l’intérêt d’élèves difficiles de seconde :
l’accès à l’autre au travers des discours, des oeuvres a toujours été un moyen de
connaissance fondamental. En effet, contrairement à ce que l’on croyait, l’ordinateur
a accru la production et la diffusion des oeuvres. et nos élèves doivent comprendre
que s’ils ne sont pas capables d’entrer dans cet univers, ils seront handicapés dans
leur vie sociale, professionnelle, personnelle. Dans un premier temps, il faut les
convaincre de la nécessité d’entrer dans l’univers des livres. Dans un second temps,
il faut leur faire comprendre que la littérature est le moyen le plus diversifié, le plus
riche, qui peut susciter toutes sortes de plaisirs. Mais lire suppose des compétences,
donc des efforts de la part des élèves pour les acquérir et les développer, et un vrai
travail de la part du professeur : trouver les moyens didactiques et pédagogiques les
plus adaptés et les plus efficaces. Tel est l’objet de ce mémoire.
Tout d’abord, je ferai un état des lieux des problèmes rencontrés d’un
point de vue relationnel et d’un point de vue pédagogique, puis j’exposerai les
éclairages apportés par la formation et mes lectures personnelles, enfin je
présenterai les différentes solutions (démarches) mises en place avec mes élèves,
leurs succès et leurs échecs ; pour finir je proposerai d’autres perspectives possibles,
à mettre en oeuvre l’année prochaine par exemple.
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LES ECLAIRAGES APPORTES PAR LA
FORMATION ET MES LECTURES
I- Mieux connaître les élèves au sein de la classe et du
système éducatif, pour améliorer les conditions de travail
1- Les élèves et les adolescents d’aujourd’hui : comment se comportent-ils en
groupe et quelle est leur relation avec le système?
Qu’est-ce qu’un élève difficile aujourd’hui ?
c’est soit un élève qui perturbe la classe par l’agitation, la contestation, la
provocation, l’agressivité et la violence, soit un élève qui refuse de travailler.
Pour quelles raisons un élève peut-il être difficile?
Les adolescents sont souvent confrontés à un environnement social en crise : crise
de l’emploi, crise de la famille, crise des valeurs traditionnelles : les discours sur le
travail et l’effort ne sont plus en cohérence avec les pratiques actuelles des adultes ;
c’est la valeur de l’effort moindre qui règne aujourd’hui.
L’adolescence est aussi une période où les émotions se manifestent plus facilement ;
pour s’en défendre, l’adolescent met en place des réactions de provocation,
d’agressivité.
Comment fonctionne le groupe-classe?
L’ouvrage de M.T Auger et Ch.Bourchalat dont j’ai cité un passage en exergue,
Elèves difficiles, profs en difficulté, m’a beaucoup aidée
à comprendre le
fonctionnement d’un groupe-classe.
- Celui-ci se caractérise par son besoin de sécurité (contre l’injustice), de cohésion et
de reconnaissance (contre le mépris), d’expression et de communication. La nonsatisfaction de ces besoins entraîne une frustration qui peut se traduire par une
dynamique de groupe difficile à gérer.
- L’hostilité du groupe peut se manifester de façon indirecte à travers le
comportement individuel de certains élèves : il y a celui qui sera le bouc-émissaire, le
clown, ou bien encore le rebelle. Comble de malchance, ces trois catégories d’élèves
étaient représentées au sein de ma classe ; malheureusement aussi, il y eut
apparemment plusieurs élèves qui furent boucs-émissaires, mais comme les
langues ont eu du mal à se délier, nous n’avons jamais vraiment su identifier les
rapports de force qui s’exerçaient dans la classe.
9
2- Leurs difficultés par rapport à la discipline (lectures, connaissances)
Le passage de la classe de troisième à la seconde est une transition
difficile. En français, le travail sur des objets d’étude est nouveau pour eux ; ils sont
alors confrontés à des programmes fondés sur des perspectives historique,
générique, pragmatique, intertextuelle, voire génétique, ce qui constitue une manière
nouvelle d’aborder le français.
De plus la lecture est souvent associée dans leur esprit à l’école et aux
études ; tandis que lire pour son plaisir, pour son bien personnel et sa culture est une
idée peu évidente pour les élèves. De plus les oeuvres choisies sont souvent
éloignées dans le temps, loin de leurs préoccupations et elles véhiculent des valeurs
étrangères aux élèves ou, du moins, qu‘ils ne reconnaissent pas.
C’est pouquoi “la médiation enseignante ne consiste pas à s’efforcer de
prouver d’emblée et souvent contre le premier sentiment des élèves, l’actualité des
oeuvres du passé, mais au contraire à souligner l’écart entre notre horizon d’attente
et celui du public de l’époque où l’oeuvre est parue. C’est seulement quand l’oeuvre
aura cessé de planer dans une époque indistincte, irréelle, que la lecture pourra
redevenir le lieu d’un réinvestissement personnel.”1
De plus, pour aborder la littérature, les élèves doivent mobiliser des
compétences linguistiques, logique, encyclopédique et rhétorico-pragmatique.
La compétence encyclopédique constitue un obstacle majeur pour les
élèves : de la carence des connaissances découlent la pauvreté des indices en
quantité et en qualité, puis rapidement, un blocage de tout le processus de la
construction du sens.
Une culture littéraire suffisante, mais aussi la connaissance du monde,
de l’histoire, de la géographie, des vocabulaires spécifiques permettent en effet de
donner sens au texte, de faire émerger tout l’implicite que recouvrent certains textes.
Il faut d’ailleurs distinguer l’implicite du texte qui n’est pas dit car il
semble aller de soi et on suppose que les lecteurs connaissent les idées et l’univers
dont on parle, et l’implicite du texte qui est caché par l’auteur car celui-ci écrit pour
des gens qui partagent la même idéologie que lui ; or dans les deux cas les élèves
sont souvent démunis.
D’où ma difficulté lorsque j’ai commencé l’étude de La Machine
infernale de Jean Cocteau, que j’évoque d’ailleurs plus loin ; en effet, je me suis
rendu compte que les élèves avaient beaucoup de mal à percevoir le comique et le
burlesque de la pièce car bien souvent ils ne connaissent pas l’histoire antique en
général mais aussi l’histoire même d’Oedipe ; de plus ils n’ont pas les connaissances
ni le recul nécessaire sur l’évolution du théâtre et la manière avec laquelle Cocteau,
dans la lignée des auteurs du XXè siècle, rompt avec les codes classiques : tout cela
bloque évidemment leur entrée dans les textes.
La même difficulté s’est retouvée dans ma séquence 6 (argumentation
1
G.Langlade et M.J Fourtanier, Enseigner la littérature
10
à travers le thème de l’éducation / voir ANNEXE 1) : ma problématique était la
suivante : une “bonne” éducation doit-elle passer par la contrainte ou la liberté? Nous
sommes entrés dans cette séquence par une comparaison de deux passages de
Gargantua : le premier, extrait du chapitre XI, montre Gargantua livré à lui-même : il
ne reçoit aucune éducation et se comporte donc comme un petit animal ; dans un
deuxième temps je leur ai fait lire plusieurs extraits du chapitre XXIII dans lequel il est
raconté “Comment Gargantua fut éduqué par Ponocrates en telle discipline qu’il ne
perdait heure du jour.” La première réaction des élèves fut de comparer leur
éducation à celle du “pauvre” Gargantua et de dire que ses horaires, son emploi du
temps étaient vraiment contraignants ; ils ne comprenaient pas pourquoi Gargantua
en éprouvait du plaisir et ils ont eu beaucoup de mal à replacer cette éducation dans
le contexte du XVIè siècle et à comprendre l’immense progrès dans ce domaine
permis par le mouvement humaniste.
Enfin dernière difficulté, dont je vais reparler, ils savent trouver le sens
mais ils n’ont pas les outils nécessaires pour justifier ce sens qu’ils ont réussi à faire
émerger. C’est donc au professeur de leur fournir ces outils.
11
3- Leurs difficultés générales dans les différentes matières
comportements
: de nouveaux
L’ennui et le manque de motivation
Les élèves qui sont dans une situation contraignante, répétitive, développent un
sentiment d’ennui pouvant s’extérioriser dans la classe.
La passivité des élèves
Elle est inéluctable tant que n’est pas proposé à l’élève un enjeu pour son activité.
Ce qui leur importe, c’est le sens de la tâche, de la situation, du moment présent. Les
élèves ont besoin de satisfaction immédiate. Il leur est difficile de s’investir en
fonction d’un avenir lointain, qui souvent ne les concerne pas directement.
Que font ceux que le travail scolaire n’intéresse pas?
Philippe Perrenoud dans son ouvrage Métier d’élève et sens du travail scolaire
n’hésite pas à dire que pour “survivre au nombre d’heures de travail et de cours, les
élèves doivent souvent tricher, ruser avec le système, faire semblant. Une classe est
ainsi le théâtre permanent d’une “comédie du travail”. Il décrit cinq stratégies utilisées
par les élèves :
- il y a celui qui accepte les exigences et les contraintes du système et qui fait
docilement ce qu’on lui demande
-il y a celui qui, pour être plus rapidement tranquille, n’hésite pas à bâcler son travail
-il y a aussi celui qui cherche constamment à gagner du temps, à différer le moment
de se mettre au travail
-feindre de ne pas comprendre ou de ne pas pouvoir faire tel ou tel exercice permet
aussi à certains de justifier de longs moments d’inactivité
-enfin il y a celui qui conteste ouvertement l’utilité d’un travail en invoquant son peu
d’intérêt ou tout simplement par manque d’envie. S’exposant à des sanctions, cet
élève ne réagira de cette façon que de manière occasionnelle ; “ceux qui y recourent
souvent n’ont en général plus grand chose à perdre et mènent une guerre d’usure
contre l’institution“.
La formation suivie cette année et mes lectures personnelles m’ont
permis de faire le point sur les nouveaux comportements des adolescents et des
élèves au sein de la classe, mais aussi de mieux connaître leurs comportements face
aux savoirs enseignés : ce qui est frappant, c’est leur difficulté à s’intéresser et à
rester attentif, ce qui peut provoquer de l‘agitation, en particulier si l’on n’est pas
vigilant.
12
II- Les apports théoriques au point de vue pédagogique
1- Familiariser les élèves avec l’univers du livre et la notion de littérature :
A l’heure actuelle, les adolescents n’ont plus le même rapport au livre ;
ils peuvent se cultiver ou trouver tous les renseignements qu’ils souhaitent ailleurs
que dans les livres. Le livre est alors considéré comme un domaine réservé, comme
élitiste ; à nous, professeurs de français, entre autres, de le faire redescendre de son
piédestal en favorisant sa rencontre par l‘élève.
“Apprendre à être en contact familier avec des livres nombreux et divers, à s’orienter
dans la production, à aborder les textes avec le regard du bricoleur et du connaisseur
devient l’une des tâches prépondérantes de l’enseignement du français.”
“Explorer l’objet livre (....) mais aussi s’intéresser aux lieux d’offre (librairies,
bibliothèques), (...) aux conditions de production et de diffusion, à la découverte du
champ littéraire et de la notion de littérature.”
Les auteurs préconisent “des méthodes actives qui impliquent le lecteur et qui
favorisent une appropriation personnelle des lieux et des objets de lecture.”
2- Favoriser l’appropriation vocale et imaginaire des textes :
“Ecouter une lecture à haute voix peut aider à comprendre le sens de
certains mots, à percevoir l’organisation de certains passages, à mieux saisir telle ou
telle intention. (...) la lecture capte l’attention et peut provoquer une impression sur
les auditeurs.”
En fin d’année, j’ai participé à deux journées culturelles avec une
comédienne ; l’intitulé de ce module était “le goût des mots”. Nous étions une
douzaine, un peu interrogateurs au début puisque l’intitulé de ces deux journées
n’était pas très explicite. Deux moments forts ont été au centre de ce module :
→ tout d’abord se détendre, être à l’aise avec son corps et son esprit pour mieux
proférer les mots : nous avons donc commencé par des exercices de relaxation, de
respiration et de placement de la voix.
→ puis dans un second temps nous avons lu des textes poétiques : il s’agissait
d’apprendre à proférer les mots et à lire très lentement pour qu’entre chaque
ponctuation, c’est à dire entre chaque silence, vienne s’intercaler la possibilité de se
13
créer ses propres images, qui aideront à mieux ressentir les mots, et qui permettront
de mieux entrer dans les textes.
Après une première lecture, chacun pouvait donner son avis sur la
manière de le lire ou même de le jouer. C’est ainsi que nous avons “joué” le poème
“Complainte amoureuse” d’Alphonse Allais qui devient une parodie du théâtre
classique par la récurrence des verbes au subjonctif imparfait ; et on peut même le
rendre burlesque si l’on insiste sur leur prononciation tout en prenant une position
très solennelle ;
Nous avons aussi “mis en scène” le poème “Image” de Guillevic. Il
s’agissait ici de rendre visible et presque palpable le grouillement des petites bêtes
sous les herbes rien qu’en prononçant les verbes (“ ça se cajole, ... ça s’ébouriffe...
ça s’épouille et se tripatouille.“) et en mimant presque de façon imperceptible la
scène. (voir ANNEXE 2)
Ces deux journées nous ont vraiment enthousiasmés et c’est avec un
réel plaisir que j’aimerais reprendre ces méthodes pour aborder certains textes avec
les élèves et pour ainsi leur montrer que la lecture est non seulement très importante
en soi mais qu’elle peut déjà faire apparaître un sens.
3- Initier au jeu des hypothèses pour forcer l’élève à être acteur dans la
construction du sens :
Il est nécessaire de “rendre conscients les élèves qu’ils effectuent des
hypothèses en lisant, qu’ils recourent à certains types de codes. Il s’agit de stimuler
l’élève à se poser des questions.”
“Il faut renverser des habitudes “passives” de lecture grâce à des textes et des
démarches qui contraignent le lecteur à se servir des compétences, à se comporter
activement parce qu’ils provoquent son désir de trouver la solution, de résoudre
l’énigme, de gagner le jeu.”1
Dans le domaine des théories de l’apprentissage, il est nécessaire que
l’élève puisse acquérir une plus grande autonomie et exerce librement son activité de
lecture en partant de ses propres hypothèses. Alors le professeur n’est plus le
détenteur du sens qu’il transmet : l’élève lui-même est mis en situation de recherche
et de travail sur ses propres hypothèses. Il doit s’approprier les savoirs et les outils
qui lui permettent d’avoir de bonnes intuitions et de les vérifier lui-même
efficacement.2
Mes lecture personnelles et la formation à L’IUFM m’ont permis de
mieux comprendre les élèves d’aujourd’hui, à savoir leurs difficultés, leurs
1
2
J.L.Dufays, L.Gemenne, D.Ledur, Pour une lecture littéraire
Pratiques à partager/lettres/du collège au lycée
14
comportements et de mettre en place des démarches ou plutôt des scénarios de
cours pour amener les élèves à dépasser leurs difficultés face à la matière et à se
dépasser eux-mêmes.
15
LES SOLUTIONS MISES EN OEUVRE ET
LEUR ANALYSE
I- D’UN POINT DE VUE PEDAGOGIQUE POUR AIDER
LES ELEVES A ENTRER DANS LES TEXTES
1-Transmettre l’émotion et le plaisir
Notamment par le choix des oeuvres intégrales ou des groupements de
textes étudiés au cours de l‘année. Les professeurs ne sont, en effet, jamais à l’abri
de rencontrer cette difficulté : l’indifférence des élèves face aux textes. Le choix
d’une oeuvre est toujours un risque : il faut se représenter les attentes des élèves et
chercher des oeuvres qui puissent faire évoluer leur horizon d’attente sans les
bousculer trop brutalement ; le choix doit être ambitieux pour assurer des progrès
mais pas trop pour que les élèves ne décrochent pas.“ 1
Ainsi dans ma séquence sur l’éducation, dans le cadre de l’étude de
l’argumentation, je leur avais donné le choix de lire l’un des trois livres suivant : Le
Sagouin de Mauriac ou L’Enfant de Jules Vallès ou encore Vipère au poing de Bazin
: sujet qui leur a plu et surtout qui les a interpellés puisqu’il mettait en scène le
monde de l’enfance confronté à l’injustice. Ils voulaient ensuite savoir si Jules Vallès
par exemple avait vraiment vécu cette vie décrite dans son livre.
Le choix des textes est donc très important car cela permet d’éveiller leur intérêt ; ils
se sentent du coup presque davantage concernés. Le but est de stimuler le plaisir de
lire et de faire en sorte que les élèves s’approprient les valeurs suscitées par les
textes.
Le plaisir et l’émotion passent aussi par la lecture expressive qui est un
premier pas vers l’interprétation du texte et donc vers le plaisir. Soit on procède à
une lecture expressive avant d’avoir expliqué le texte, soit on commence par une
lecture neutre puis on relit le texte en mettant le ton qui correspond aux hypothèses
de lecture que l’on vient de vérifier tout au long de l’explication.
Cet exercice se prête particulièrement bien aux textes de théâtre : dans
1
G.Langlade et M.J.Fourtanier, Enseigner la littérature
16
une séquence composée d’un groupement de textes théâtraux et d’une oeuvre
intégrale, La Machine infernale de Jean Cocteau, j’ai voulu montrer aux élèves que si
les registres comique et tragique étaient plutôt bien séparés l’un de l’autre
auparavant, ce n’était plus du tout le cas au XXè siècle et que les barrières avaient
volé en éclats : pour cela j’ai choisi d’expliquer ce fameux passage où Jocaste se
présente sur les remparts de Thèbes comme une star capricieuse et autoritaire.
Lors de la première lecture, volontairement neutre, les élèves n’ont pas
vraiment perçu l’aspect comique du personnage ; ils ont bien vu par contre que
Tirésias est un personnage ridicule, dirigé par la reine et à qui on ne donne guère le
droit de s’exprimer. Nous avons alors mené ensemble l’explication du texte : je leur ai
demandé dans un premier temps de quelle manière jocaste leur apparaissait-elle, et
de quelle façon se comportait-elle avec les autres, en l’occurrence avec Tirésias. Je
leur ai demandé de s’appuyer sur les didascalies (“elle a un accent très fort” ou bien
“elle pousse un cri”), de s’interroger sur les types de phrases utilisés : ils ont alors
bien vu la récurrence des exclamations ; puis je les ai poussés à se demander s’ils
avaient souvent l’habitude de maudire des marches ou des escaliers. A part
quelques traits d’ironie de la part de certains élèves, les autres ont bien vu qu’elle
utilisait un langage hyperbolique. Les termes “hystérique” et “éxubérante” sont alors
venus spontanément afin de caractériser jocaste ; je leur ai aussi suggéré
“surexcitée” et “excentrique”.
Vis-à-vis de Tirésias, ils ont bien vu qu’elle lui coupait sans cesse la
parole (“taisez-vous”), qu’elle rejetait souvent la faute sur lui ; ainsi c’est elle qui a
décidé de venir mais c’est Tirésias qui sera responsable si elle se casse une jambe.
Les adjectif “autoritaire” et “capricieuse” sont alors venus compléter ce portrait de
Jocaste. Par contre ils ont eu du mal à rendre compte de son côté autoritaire, rendu
par les impératifs “Ne soyez pas têtu” ou encore “prenez moi la main”.
La seconde étape de cette explication a été de montrer qu’il y avait du
comique mais aussi du tragique : ils ont facilement identifié trois formes de comique
(de mots avec le surnom de “zizi”, de caractère avec celui de Jocaste en particulier,
enfin de situation lorsque Jocaste monte les escaliers à reculons par exemple. En
leur rappelant qu’il s’agissait de personnages mythiques, ils ont plutôt bien perçu
qu’ils étaient ici dépossédés de leur solennité et de leur majesté. Ils ont aussi bien
compris la notion de burlesque introduite à ce moment-là.
Ils ont eu beaucoup plus de mal avec l’aspect tragique de ce passage
et le principe de la double énonciation : il a vraiment fallu pointer les éléments
tragiques : l’écharpe de Jocaste, les objets qui l’entourent, l’oeil de Tirésias, les
escaliers qu’ils montent ici, et que Jocaste, Antigone et Oedipe redescendront à la fin
comme s’ils retournaient vers le néant, jusqu’à ce qu’un autre auteur vienne les en
tirer.
Ainsi, après avoir expliqué le texte, il était intéressant de faire relire le
texte par les élèves : ils ont alors beaucoup apprécié de pouvoir exprimer ce qu’ils
avaient réussi à mettre en évidence lors de l’explication et ils sont très bien parvenus
à mettre le ton qui convenait.
17
2-Passer par l‘image pour revenir au texte :
Au retour des vacances de Noël j’ai mené une séquence conséquente
sur le romantisme (voir ANNEXE 3), dont le but était de leur faire comprendre ce
qu’était un mouvement littéraire et culturel, de leur faire identifier ses
caractéristiques, ses principaux représentants, ainsi que le registre lyrique. Je voulais
aussi leur faire connaître le romantisme au travers des différents genres littéraires : la
poésie évidemment mais aussi le théâtre et le roman, ainsi que dans différents arts :
la littérature mais aussi la peinture ; c’est pourquoi j’ai emmené les élèves au CDI
pendant l’heure de module. Après avoir étudié le romantisme dans la littérature, il
s’agissait pour les élèves réunis en groupes de quatre, de retrouver les thèmes déjà
vus, dans la peinture : chaque groupe devait travailler sur un peintre romantique
différent ; ils avaient à leur disposition Internet, des encyclopédies, des dictionnaires
et des manuels spécialisés de peinture ; le travail se décomposait en trois parties
(voir ANNEXE 4) : il s’agissait de réaliser une courte biographie du peintre choisi, de
trouver les thèmes romantiques récurrents dans toute son oeuvre, enfin d’analyser
plus précisément, mais toujours dans le cadre du romantisme, un tableau en
particulier. Certains ont ainsi travaillé sur Caspar David Friedrich, d’autres surTurner
ou encore Delacroix.
Une surprise de taille m‘attendait dès le début de ce travail, mené avec
l’accord et l’aide de la documentaliste, dans la mesure où j‘ai appris que certains
élèves non seulement n’étaient jamais venus au CDI, mais pire encore ne savaient
pas où il se situait dans l’établissement.
Autre surprise : la première difficulté rencontrée par les élèves a été
tout simplement le contact avec les livres. Dans les consignes de travail, je n’avais
donné aucun nom de peintre : il s’agissait pour eux de partir du général, c’est à dire
du mot “romantisme” pour aller vers le particulier (un peintre). Beaucoup ne savaient
pas se diriger non seulement dans le CDI mais aussi au milieu des livres. Certains
ont commencé par aller dans les livres sur les peintres et à m’énumérer chacun
d’entre eux pour savoir s’il appartenait au mouvement romantique (comme Dali ou
Picasso par exemple). Finalement après avoir été orientés vers des manuels plus
généraux, ils ont fini par affiner leur recherche.
En passant dans les groupes, j’ai pu constater la satisfaction des élèves
à pouvoir réinvestir les analyses effectuées en cours sur le romantisme comme la
solitude de l’homme, sa petitesse face à l’immensité du monde, la nature etc.
Certains étaient même enchantés de réaliser un véritable dossier. Comme le travail a
eu lieu sur deux heures de module, certains ont pris le soin de travailler un peu chez
eux, d’affiner leurs recherches, de photocopier ou de scanner un tableau en
particulier, et au final plusieurs groupes m’ont rendu des travaux soignés. (Voir
ANNEXE 5)
Ce travail fut intéressant sur le plan pédagogique puisqu’il leur a permis
de réinvestir des connaissances et de faire prendre conscience aux élèves que
l’étude des textes n’était pas inutile. J’ai pu constater d’autre part que se familiariser
avec l’univers du livre n’est pas chose aisée mais que les élèves sont capables de
18
s’investir d’une manière extraordinaire à condition d’être guidés.
Pour ce qui est de l’organisation du travail, je n’avais pas voulu imposer
les groupes et j‘ai sans doute eu tort : en effet, certains groupes motivés ont bien
fonctionné car tous ceux qui les composaient étaient motivés ; ils se sont répartis les
tâches puis ont organisé un travail de mise en commun. Mais certains, qui
manifestement n’avaient rien envie de faire, se sont mis avec des élèves studieux,
sur lesquels ils pouvaient compter pour faire le travail à leur place et qui surtout ne
diraient rien. Et même dans un autre cadre que la classe, entourés d’élèves au
travail, il était difficile de les mettre en activité de recherche ou même d’écriture.
Quant aux consignes, elles avaient été clairement exposées à plusieurs
reprises et elles ont été plutôt bien respectées ; cependant un petit nombre d’élèves
ne voyaient pas ce qui était demandé ou bien avaient même tout simplement oublié
ce qu’était le romantisme! Il y a donc eu un petit moment de flottement dans la
première demi-heure. Heureusement que j’avais prévu deux heures car dans ce
genre de travail, le temps passe très vite : il faut prévoir le temps de se rendre au
CDI, puis les élèves ont du mal à se calmer et à se mettre au travail car ils ne sont
pas dans les mêmes conditions que dans la classe ; et puis d’autres élèves
travaillaient dans une autre salle du CDI ; même avec la moitié de la classe et l’aide
de la documentaliste il était difficile de les surveiller, car en cherchant des livres,
certains auraient bien voulu aller se mêler à l’autre groupe et inversement.
Pour finir, je dirai qu’il m’a manqué du temps et de l’expérience sans
doute pour mettre en commun toutes les recherches des élèves. Je pense que si je
devais recommencer ce travail, et si je possédais une salle de classe attitrée, je
demanderais aux élèves de faire leur travail non pas sur des feuilles doubles de
classeur mais sur de grandes feuilles blanches que j’afficherais dans la salle afin que
tous les élèves puissent consulter les travaux des uns et des autres : c’est à la fois
très enrichissant, très valorisant et donc très motivant pour tous.
19
3-Reprendre contact avec les livres
Au programme de seconde, deux objets d’étude sont directement en
rapport avec le livre : il s’agit du “Travail de l’écriture” et de “Lire, écrire, publier”. J’ai
décidé de les aborder en fin d’année dans une seule et même séquence (voir
ANNEXE 6) qui s’est ouverte avec un bref récapitulatif sur le livre en tant qu’objet, de
l’Antiquité à nos jours et sur le statut de l’écrivain au fil des siècles ; puis a suivi un
groupement de textes autour des difficultés rencontrées par l’écrivain pour écrire,
mais aussi du plaisir d’écrire. En module, des textes sur les buts de l’écriture et le
monde de l’édition ont permis de compléter cette séquence. A partir de toutes ces
données vues en classe, j’ai proposé aux élèves de chercher à en savoir plus sur le
monde du livre, et de partir à la recherche de ces gens qui les côtoient tous les jours,
à savoir les libraires, les bibliothécaires et les éditeurs.
La consigne était la suivante : les élèves devaient, par groupe de deux,
se renseigner sur ces différents métiers dans Dijon ou la commune de leur choix.
Nous avions élaboré ensemble une série de questions (voir ANNEXE 7). Les élèves
avaient environ 10 jours pour réaliser ce travail, sachant que pour certains endroits il
fallait prendre rendez-vous. Les deux délégués étaient chargés de me remettre la
liste des groupes constitués ainsi que pour chacun le lieu choisi : deux groupes ne
devaient pas se rendre dans le même lieux.
Le but de cet exercice était de non seulement mieux connaître les
métiers du livre, de rencontrer pour la plupart des gens passionnés par leur métier
mais aussi de leur faire prendre conscience du contact que l’on peut avoir avec
l’objet livre, qui peut être différent de celui qu’ils connaissent à l’école.
Le résultat de cette enquête fut positif même si quatre groupes
seulement ont pu venir faire leur compte-rendu devant les autres élèves, faute de
temps ; deux groupes sont allés voir des bibliothécaires, un autre un éditeur , enfin le
dernier est allé dans une librairie ; à part deux groupes qui n’ont pas pu être reçus
dans les lieux qu’ils avaient choisis, le travail demandé a été bien fait dans
l’ensemble : l’un des groupes a même réalisé un compte-rendu écrit (voir ANNEXE
8) ce qui prouve qu’ils se sont pris au “jeu”.
Tous ont rencontré des gens passionnés par leur métier au contact du
livre, curieux de tout et prêts à rendre service aux clients ou aux lecteurs de plus en
plus exigeants ; des gens dynamiques aussi, en particulier dans les petites
bibliothèques de communes où la lecture devient finalement presque un combat,
puisqu’il faut toujours essayer d’attirer plus de lecteurs et exiger des subventions
pour que certaines bibliothèques perdurent. La plupart des élèves sont rentrés dans
des lieux chaleureux et accueillants où on les a reçus aimablement.
Les deux élèves qui sont allés voir l’éditeur, ont rencontré un homme
soucieux de faire connaître de nouveaux auteurs et des livres qui lui ont plu, plus que
de faire du profit. Ils ont été marqués par le lieu exigü dans lequel il exerce son
métier et par une réponse à une de leurs questions, réponse qu’ils tenaient vraiment
20
à faire partager à leurs camarades. Ils lui ont demandé : “selon vous, qu’est-ce qu’un
bon écrivain, quelles qualités doit-il posséder?” ; il leur a répondu qu’un bon écrivain,
c’est avant tout quelqu’un qui se renseigne sur les maisons d’édition et qui n’envoie
pas son manuscrit n’importe où!
Le bilan de ce travail est donc positif dans la mesure où les élèves ont
découvert d’autres lieux que l’école où l’on peut côtoyer les livres. Ce fut aussi un
travail bénéfique dans la mesure où les questions ont été élaborées en même temps
que la conduite de la séquence sur l’écriture. Ils ont donc pu se resservir de ce que
nous avions déjà vu dans les textes, en particulier ceux du module sur le monde de
l’édition où nous nous étions interrogés sur le devenir d’un manuscrit à partir du
moment où il est sélectionné par un éditeur.
J’ai été agréablement surprise de la capacité d’écoute des autres
élèves vis-à-vis de leurs camarades mais il fallait tout de même que je sois vigilante :
certains auraient bien profité de ce moment un peu particulier pour bavarder. Cela
prouve cependant qu’il y a eu une amélioration sensible de l’atmosphère de la
classe.
Quant aux groupes qui ne sont pas passés, beaucoup ont retrouvé
dans les exposés des éléments qu’on leur avait signalés ; avec un peu de recul je
pense que c’était mieux de ne pas faire passer tous les groupes car cela aurait peutêtre semblé répétitif. Par contre, là encore on aurait pu faire un travail d’affichage :
chaque groupe aurait pu présenter au mur son dossier, de la manière qu’il souhaitait,
soit avec des dessins, soit avec des schémas, avec beaucoup ou peu d’écriture, le
but étant qu’ils laissent libre cours à leur imagination à partir de leurs recherches.
21
4-Autre scénario : lectures analytiques de textes sous
forme de tableau à deux ou trois colonnes selon les
objectifs à faire percevoir : faire fonctionner le texte
comme piège
Dans le cadre de l’objet d’étude sur le théâtre nous avons étudier La
Machine infernale de Jean Cocteau ; le premier texte vu en lecture analytique est l’
apparition de Jocaste et de Tirésias sur les remparts de Thèbes dans le premier
chapitre, ce dont j’ai déjà parlé précédemment. Le but final de la séquence est de
réaliser deux paragraphes d’une dissertation qui posera la question de savoir si La
Machine infernale est une oeuvre tragique. Les textes étudiés dans l’oeuvre auront
tous pour caractéristique principale de mêler le comique et le tragique, registres qui
auront d’ailleurs été revus auparavant dans un groupement de textes.
Lecture analytique du texte (voir ANNEXE 9). On commence par
paraphraser le texte. Les élèves trouvent facilement les deux principaux axes
directeurs, à savoir le personnage de Jocaste, et la présence de deux registres,
comique et tragique ; ils ont par contre beaucoup plus de mal à démontrer en quoi
Jocaste est un personnage autoritaire, capricieux et exubérant et aucun élève ne se
donne vraiment la peine de chercher dans le texte : ils attendent passivement que les
choses se passent, et dans cette classe plus particulièrement, ce genre d’attitude est
la porte ouverte aux bavardages. Les questions pour les guider se doivent d’être très
précises (cf p 15). Pour démontrer que Jocaste est autoritaire, ils ont tendance à citer
les verbes (“taisez-vous”, “ne soyez pas têtu”) ; à moi de les aider à justifier par la
forme : il leur manque le plus souvent les outils grammaticaux pour y parvenir. En
l’occurrence ici, il s’agissait de montrer que Jocaste s’adressait à Tirésias avec des
verbes à l’impératif, mode qui exprime l’ordre et que sa récurrence révèle le
caractère autoritaire de Jocaste.
L’exercice étant nouveau, pour eux et pour moi, nous avons passé
beaucoup de temps sur cette première question et il y avait aussi beaucoup de
choses à dire sur le texte. Par contre ils ont eu bien plus de facilité à justifier que le
passage était à la fois comique et tragique. Pour ce qui est du comique, on venait en
effet de décortiquer le caractère de Jocaste et sa relation avec Tirésias, personnage
qui est d’ailleurs affublé d’un surnom ridicule (“Zizi”). Ils ont bien perçu que la fonction
de devin était ridiculisée comme celle d’ailleurs de la reine. Ils ont donc compris la
notion de burlesque. De plus, dans ce passage, les élèves ont retrouvé les quatre
formes de comique vues précédemment dans des extraits du Bourgeois
gentilhomme de Molière. Mais contrairement à l’autre axe il ne s’agissait pas de faire
des remarques formelles mais plutôt de constater des faits comme l’accent de
Jocaste ou le fait qu’elle monte les escaliers à reculons.
22
Constat : il faut partir du sens, généralement trouvé facilement par les
élèves et les amener à justifier par la forme. “Le sens d’abord, les outils techniques
après. L’inverse entraîne une dérive de la technicité qui substitue un apprentissage
des outils à un apprentissage de la lecture et qui bloque l’activité même de lecture.“1
D’autre part l’utilisation de la paraphrase facilite la première rencontre
avec le texte : elle consiste à redire le texte avec d’autres mots et permet ainsi à
l’élève de comprendre et de s’exprimer, donc de mieux s’approprier le texte ; elle est
aussi un bon indicateur pour le professeur dans la manière dont le texte est
appréhendé par les élèves. Enfin elle permet de prendre appui sur la sensibilité des
élèves et de savoir utiliser les interactions de la classe pour stimuler les interactions
particulières de chaque élève avec le texte. C’est par les interactions de la classe
entre pairs et avec le professeur que se construit l’interprétation d’un texte et
l’apprentissage de l’élève.”2
Le système du tableau permet ainsi aux élèves de ne pas travailler
dans le flou et de savoir exactement où on cherche à les diriger. Je l’ai mis en place
à la fin du deuxième trimestre, en particulier pour les textes les plus importants d’un
groupement et lorsque je savais qu’ils pourraient être réutilisés dans une dissertation.
Ainsi le même procédé d’analyse de texte sera employé dans la
séquence suivante sur l’argumentation et plus précisément sur le thème de
l’éducation : deux textes sont à nouveau étudiés sous la forme de tableau : l’incipit de
L’Enfant de Jules Vallès et un extrait de L’Emile ou De L’Education de J.J Rousseau.
Les élèves sont désormais habitués à cette forme de présentation des lectures
analytiques. D’ailleurs certains élèves qui ne prenaient aucune note auparavant, font
l’effort de remplir le tableau au fur et à mesure et ont l’air même plutôt satisfait de
cette présentation. Ils se sentent impliqués par rapport à la tâche, ils sont devenus
acteurs du sens du texte et ils en ont conscience. Ils savent aussi maintenant que
cette méthode de travail leur permet de passer plus facilement du tableau à la
rédaction d’un commentaire composé ou de rédiger une argumentation.(cf p 22 et
23)
1
2
G.Langlade et M.J.Fourtanier, Enseigner la littérature
ibid.
23
5-Leur donner un but final pour les motiver
C’est en milieu d’année que je me suis vraiment rendu compte de
l’utilité d’avoir en tête l’exercice d’écriture final de chaque séquence, car ainsi on
choisit uniquement des textes sur lesquels les élèves pourront s’appuyer. Au bout
d’un moment les élèves eux-mêmes ont perçu que tous les textes étudiés en
groupement ou dans les oeuvres intégrales étaient réutilisables, pour les
dissertations par exemple.
Ainsi la dissertation donnée à la fin de la séquence sur le théâtre leur
permet entre autre de réutiliser le texte que j‘ai évoqué précédemment, à savoir la
première apparition de Jocaste et de Tirésias, pour démontrer que La Machine
infernale n’est pas seulement une oeuvre tragique. (voir ANNEXE 10).
De même, les textes étudiés en cours dans le groupement sur
l’éducation leur permettront de répondre à la question suivante : l’éducation par la
contrainte permet-elle à l’enfant d’accéder à l’épanouissement et à l’autonomie? (voir
ANNEXE 11)
A partir de cette question j’ai décidé d’organiser pour la première fois un
travail en groupes afin de préparer la dissertation : la consigne était de trouver le plan
et les principales idées à partir de la question posée et de tous les textes étudiés.
C’était à la fois un travail de réinvestissement des connaissances vues sur le thème
de l’éducation mais aussi, par la même occasion, de l’approfondissement de
l’apprentissage de la méthode de la dissertation.
Les élèves devaient se mettre par deux, réfléchir à la question posée,
élaborer un plan et replacer les textes dans les sous-parties. C’est avec beaucoup
d’étonnement mais aussi de plaisir que j’ai constaté que les élèves, pour la plupart,
avaient fait l’effort d’organiser leurs idées ; beaucoup m’ont demandé mon avis,
certains m’ont présenté leur plan à deux ou trois reprises. Ce travail, avec la mise en
commun des idées, a duré une heure et demie un samedi matin ; personne n’a vu le
temps passer et tout le monde était motivé puisque leur travail personnel à la maison
dépendait en grande partie de ce premier travail d’organisation et de mise en
commun des idées.
On constate là encore, que la mise en activité, l’observation du travail,
l’intervention et la régulation de l’action mettent l’élève en situation de réussir, et
d’autre part qu’un but d’apprentissage favorise une attitude positive. Ch.Daujeard
explique, en effet, que la connaissance du but, de l’objectif à atteindre est toujours
pour l’homme quelque chose qui l’aide à se motiver ; et il cite un proverbe chinois : “il
n’est pas de bon vent pour celui qui n’a pas de port.” En effet communiquer les
objectifs de la tâche à réaliser, en justifier l’intérêt permet à l’élève d’anticiper la
satisfaction qu’il va pouvoir ressentir en la réalisant et de ce fait cela provoque
24
l’action.
A travers tous ces choix, on constate que l’élève est au centre du cours,
qu’il en est acteur ; le but ultime de ces scénarios est de transmettre des savoirs
mais en tenant toujours compte de l’élève, de ses possibilités et surtout en le
poussant à se dépasser, en l’invitant toujours à se remémorer ce qu’il sait déjà faire
pour aller de l’avant.
Pourtant rien n’est jamais acquis : ces scénarios parviendront à les
motiver quelques temps et puis il faudra trouver autre chose. Enfin il ne faut pas non
plus oublier tout ce qui accompagne la transmission de ces savoirs, tous ces petits
“trucs” qui permettent de rétablir l’ordre et de dynamiser une classe.
25
II- POUR RETABLIR L’ORDRE ET DYNAMISER LA
CLASSE
1- Quelques petites astuces pour animer la classe
“L’effet d’une belle séquence peut être réduit à néant par une mauvaise
animation, qui laisse de côté un certain nombre d’élèves bavards, inattentifs.1
-Ritualiser les débuts de cours afin que les élèves se sentent d‘emblée pris en main :
par exemple ne pas avoir peur de passer dans les rangs pour les obliger à sortir
leurs affaires : au début de l‘année je leur disais de le faire, depuis le bureau et puis
je commençais sans réellement savoir si tout le monde avait respecté la consigne ;
or cela ne servait strictement à rien avec cette classe car parfois, au bout d’une
demie-heure, certains élèves n’avaient pas encore sorti leurs affaires.
Avec cette technique, non seulement je veille à ce que tout le monde sorte le bon
texte et démarre donc le cours dans les mêmes conditions, mais en même temps je
peux mieux faire taire les bavards.
Autre manière de ritualiser le début d’un cours : interroger un élève pour redonner les
grandes lignes du cours précédent. Cela permet à la longue d’obtenir un certain
silence puisqu’en général j’interroge un élève qui est encore en train de bavarder et
puis cela permet aussi à tout le monde de démarrer dans les mêmes conditions.
-Utiliser davantage le tableau, pour les consignes et pour le plan du cours. En
général, lorsque les élèves copient et peuvent suivre ce qu’il y a d’écrit au tableau
donc mieux comprendre, ils ne pensent plus à bavarder.
-Face à des élèves qui bavardent, la personnalisation est plus efficace : au début de
l’année, je répétais des “chut” à longueur de cours, or cela ne servait strictement à
rien ; par contre, dire ”X, tu fais beaucoup trop de bruit” ou “X, tu gênes le bon
déroulement du cours”, cela avait beaucoup plus d’impact.
2- Le professeur : un comédien, un confident? en tout cas quelqu’un qui sait
établir un contact avec ses élèves
Une des caractéristiques du métier est de sans cesse susciter l’intérêt,
soutenir l’attention, encourager les efforts.
-Varier les approches, les exercices, faire en sorte que chaque cours constitue pour
l’élève une surprise : du travail en groupe, en classe ou au CDI, remplir un tableau et
ne pas avoir l’impression que l’on explique un texte, aller sur le terrain pour
1
Ph.Perrenoud, 10 nouvelles compétences pour enseigner
26
rencontrer des professionnels du livre : il faut être le plus souvent en train de
surprendre les élèves.
- Etablir une complicité et une solidarité crédibles dans la quête du savoir. Le
professeur doit chercher avec ses élèves. A plusieurs reprises au cours de l’année, il
s’est trouvé que certains élèves proposent des explications, des interprétations
auxquelles je n’avais pas pensé et qui étaient parfaitement recevables ; je n’ai pas
hésité à les féliciter, à les encourager ; du même coup, les autres étaient d’autant
plus motivés pour chercher à leur tour et je sentais une sorte d’émulation, de
compétitivité, très appréciable pour la dynamique d’un cours.
Dur travail que celui qui consiste à toujours innover, toujours chercher
pourquoi tel ou tel cours n’a pas fonctionné : cela ne tient pas forcément à l’aspect
pédagogique car souvent de petits riens dans notre attitude font qu’un cours peut
être transformé. Mais cet investissement physique et moral est toujours payant
surtout lorsque l’on voit les élèves satisfaits d’eux-mêmes, contents de s’être
dépassés et d’avoir accepté l’effort.
27
NOUVELLES PERSPECTIVES
Cette année fut un peu particulière, car c’est au printemps que j’ai
vraiment senti que je “tenais” la classe ; il m’a vraiment manqué les trois premiers
mois de l’année. Et avec un peu de recul maintenant, il y a des activités que j’aurais
pu mener différemment. Ce sont ces divers aspects que je souhaite envisager dans
cette dernière partie et qu’il me plairait de mettre en place dans les années à venir, et
pas seulement avec une classe difficile. En voici une liste non exhaustive :
→ Utiliser davantage l’aspect ludique pour entrer dans les textes comme je l‘ai vu
dans la formation sur le goût des mots avec une comédienne et dans un module sur
le théâtre.
Il s’agit :
-de faire percevoir, au moyen de la lecture ou de l’écoute, toute la créativité du texte.
-de mettre les élèves en position d’acteur : devant un texte inconnu : comment le
jouer brièvement, quel ton employer?
-pour les faire entrer dans un texte de manière différente : mimer une scène
emblématique ou chuchoter des bribes de passages, afin de permettre aux élèves de
faire des hypothèses et de développer leur imaginaire.
-d’utiliser davantage des scémas ou des dessins pour entrer dans un texte cf Phèdre.
⇒ toujours surprendre l’élève
→ Donner davantage de travaux notés comme des exposés rapides ou des petits
travaux de création personnelle. Ainsi au fur et à mesure de l’année, ils pourront
constater leurs progrès et leur facilité à écrire par exemple.
→ Récompenser davantage : par exemple, à partir de travaux menés au CDI ou sur
le terrain, afficher ce qu’ils ont réalisé pour que les élèves soient fiers d’eux-mêmes
et qu’ils aient conscience que ces travaux étaient utiles pour eux mais aussi pour
d’autres.
28
CONCLUSION
Ce fut une année difficile avec moralement “des hauts et des bas” mais
au final ce fut aussi une expérience très enrichissante sur le plan pédagogique,
relationnel ainsi que personnel :
- d’un point de vue pédagogique, apprendre à toujours innover, ne jamais s’endormir
sur ses lauriers et croire que parce qu’une heure de cours s’est bien déroulée, tout
ira bien aussi le lendemain. Toujours trouver de nouveaux scénarios pour mettre les
textes, la lecture à leur portée ; là aussi, il se peut qu’une manière d’entrer dans les
textes “marchent” pendant quelque temps ou à certaines heures de cours et pas à
d’autres moments.
- d’un point de vue relationnel, apprendre à découvrir des enfants difficiles, à les
cadrer, à les gérer au sein du groupe-classe et finalement s’apercevoir que ce sont
des enfants qui ont envie d’apprendre, à partir du moment où on se met soi-même à
leur portée et dans la mesure où l’on parvient à mettre aussi les savoirs à leur portée.
- du coup, cela provoque un enrichissement personnel : ne surtout pas croire que l’on
est seul détenteur du savoir, leur montrer que le cours se construit grâce à eux et
avec eux et que c’est le mélange de toutes ces idées qui fera, au bout du compte,
sens.
- Enfin cette année m’a permis de prendre un peu de recul, et au final de
dédramatiser : certes, c’était une classe difficile, guère motivée mais ils savent faire
une dissertation, un commentaire composé et ils connaissent un certain nombre
d’outils pour entrer dans les textes. Tout au long de l’année, je me suis efforcée de
leur proposer des activités variées, pour éviter la monotonie mais surtout aussi pour
toujours les surprendre. Chaque fois ces travaux étaient accueillis avec des soupirs,
des revendications, de même que pour les lectures, mais au final, le travail était en
général fait et les livres lus. Je n’ai donc jamais renoncé et j’ai toujours eu confiance
en leurs capacités.
(Pour information, voici le résultat des orientations : après avis du conseil de classe
du troisième trimestre, 4 élèves redoublent et 7 sont réorientés.
4 sont admis en 1ère STT, 5 en ES, 3 en L et 3 en S)
29
BIBLIOGRAPHIE
LIVRES LUS
Alain Lieury, Motivation et réussite scolaire, Dunod, 1997
M.T Auger et Ch. Bourchalat, Elèves “difficiles”, profs en difficulté ; coll.Pédagogie
formation, 1995
Ch.Daujeard, Animation et dynamisation de la classe : principes, techniques et trucs ;
CRDP Dijon ; coll. Les Clefs du quotidien, 2002
LIVRES CONSULTES
R.Laborderie et A.Jacquard, Le métier d’élève, Hachette, 1991
Ph.Perrenoud, 10 nouvelles compétences pour enseigner : invitation au voyage ;
ESF, 1999
et Métier d’élève et sens du travail scolaire, 1994
G.Langlade et M.J.Fourtanier, Enseigner la littérature (Actes du colloque IUFM MidiPyrénées), Delagrave, 2000
Pratiques à partager/lettres/du collège au lycée (CRDP)
J.L.Dufays, L.Gemenne, D.Ledur, Pour une lecture littéraire/Approches historique et
théorique/propositions pour la classe de français, De Boeck, 1996
30
ANNEXES
31
RESUME
Ce mémoire a eu pour but de montrer un certain nombre de difficultés qu’un
jeune professeur peut rencontrer, en particulier lorsqu’il s’agit de confronter des
élèves de seconde avec les textes littéraires. Après avoir essayé de mieux
comprendre les adolescents d’aujourd’hui et leurs comportements, ce mémoire
montre différentes solutions mises en oeuvre afin d’aider des élèves difficiles et en
difficulté à acquérir les connaissances nécessaires et à reprendre confiance en eux.
MOTS-CLES
Animation et dynamisation d’une classe
Adolescents
Elèves difficiles
Littérature et plaisir du texte
L’image
32