la peche dans le lac de tunis

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la peche dans le lac de tunis
LA P E C H E D A N S
LE LAC DE TUNIS
IN T R O D U C T IO N
La variété des côtes tunisiennes a déterminé, sur les 1.200 km. de
leur étendue, la constitution d'une faune m arine d 'u n e très grande
diversité.
Les poissons migrateurs, tels les thons, font prospérer d'importants
établissements. Les esp èces sédentaires assurent aux nappes d 'ea u
existant au bord d e la mer une abondante production.
Il existe, en effet, en différents points de la côte tunisienne, des
n appes d 'ea u très étendues et peu profondes, en com m unication a vec
la mer par d'étroits chenaux : lacs de i'Ischkeul, de Porto-Farina, de
Tunis, des Bibans, am m odiés ou exploités par l'Etat.
O n y p êch e en grande quantité : anguilles, mulets, bars,
daurades qui venus d e la mer, grandissent là et prospèrent.
ment d e la reproduction, ces espèces s'en iront pondre au
leurs alevins remonteront plus tard em poissonner à n ouveau
soles et
A u m o­
large et
le lac.
Nous nous p roposons d'étudier la pêch e dans le la c de Tunis.
Le lac de Tunis s'étend sur une superficie de cinquante kilomètres
ç_arrés. Il est limité à l'O uest par Tunis, au Nord par El-Aouina, au
Sud par Rades, et un isthme étroit le sépare à l'Est d e la mer. Le lac
a été divisé en deux parties par le creusem ent du ca n al Tunis-Goulette ; les b ou es de d ra g a g e rejetées sur les bords constituent les ber­
ges fermes.
La partie Nord du lac a la form e d'un ov a le a llon g é mesurant 10
kilomètres suivant son grand a x e parallèle au ca n a l sur une largeur
m oyenn e d'environ 3 kilomètres. Elle cou vre une étendue d e plus d e
3.000 hectares. La profondeur du lac varie d e 0 m. 50 à 0 m. 80, la
plus grande hauteur d 'ea u qu 'on puisse y rencontrer est d e 1 m. 50.
Le lac Nord com m unique a v e c la mer aux extrémités du ca n al à
Tunis et à La Goulette et par le ca n al d e Khereddine creusé depuis
d eux ans.
(1) Les élèves de 4" année des Ecoles Normales d'instituteurs et d’ institutrices de Tu
nis sont tenus de présenter à la fin du stage de formation professionnelle, une
étude sur un sujet de leur choix, d'ordre littéraire, historique, géographique
ou sociologique intéressant la Tunisie. Cet article est extrait d'une de ces études.
LA PECHE DANS LE LA C DE TUNIS
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Le lac Sud com m unique indirectement a v e c la mer par le can al
Tunis-Goulette en deux endroits. Il com m unique directement par le
can al de Radès.
C'est à ces endroits d e com m unication q ue sont installées les bordigues, dispositifs de p êch e fixes qui fournissent la plus grande part
d e la production du lac.
H I S T O R I Q U E
O n peut distinguer plusieurs périodes dans l'histoire d e la pêche
dans le lac d e Tunis.
Avant 1896, la p êch e était libre dans le lac. Les pêcheurs goulettois pratiquaient en barques à leur propre com pte.
En 1896, le Gouvernem ent Tunisien, désireux de tirer parti de la ri­
chesse du lac, le divise en sept lots d e 500 ha. chacun. L 'adjudica­
tion a lieu le 2 mars 1896 — 9 soum issions dont 7 d e M. C oste sont
réunies. M. Coste est d écla ré am odiataire pour 9 ans. Il fait aussitôt
installer des bordigues en bois et en roseaux et em ploie égalem ent
quelques anciens pêcheurs du lac, bénéficiant ainsi d e leur expérien­
ce et de leurs barques. Ainsi ceux-ci ne sont pas réduits au ch ôm a ge
et pour cette raison l'Etat a ccep te d e prolonger l'am odiation d e 5 an­
nées par un avenant en date du 13 avril 1899. Cette am odiation se
termine le 2 mars 1910.
Devant l'opposition des pêcheurs goulettois, désireux d'obtenir la
liberté d e p êch e dans le lac, l'Etat ne renou velle pas l'am odiation.
Aussitôt les pêcheurs se ruent vers le la c pour pratiquer à leur
compte. Certains m êm e quittent leur p la ce sur les chalutiers. M ais
cette p êch e intensive et non rationnelle d épeu p le progressivem ent le
lac. Les pêcheurs se retrouvent sans ressources et sans travail car
d'autres moins ambitieux m ais plus prudents ont pris leur p la ce sur
les chalutiers.
L'Etat d écide alors d'am od ier le la c une se con d e fois. M ais l'e x ­
ploitation des eaux, toujours trop intensive, ne favorise pas le réem ­
poissonnem ent et nuit à l'avenir d e la p ê ch e dans le lac.
En 1919, la Direction des Travaux Publics, sur l'initiative de
M. Bourge, Inspecteur des Pêches Maritimes à cette époque, résolut
d e tenter l'exploitation du lac en régie directe. L'am odiation qui se
termine le 28 février 1920 n'est p as renou velée et le l ’ 1' m ai de la m ê­
m e année les travaux com m encent.
Les buts poursuivis sont les suivants :
1.) L'exploitation m éthodique et m od érée du lac dont le d épeu p le­
ment s'a g g ra v e ;
2.) Le contrôle des cours du poisson et l'opposition à une ascension
injustifiée ;
3.) La création de ressources au profit d e recherches scientifiques
destinées au développem ent des pêch es dans la R égence.
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BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JANVIER 19SS)
Pour atteindre ces trois buts, des am éliorations techniques sont
apportées aux procédés d e pêche.
Des bordigues très scientifiques étudiées et entièrement métalli­
ques, m ontées sur dalles d e ciment, rem placent les anciennes ins­
tallations en b ois d'eucalyptus. O n em ploie égalem ent des barques
péchant au tramail ou aux palangres. O n proscrit l'em ploi des filets
tramants. Pour am éliorer le rendement on pratique égalem ent la p ê­
che a u caisson et autres procédés spéciaux. O n p rocèd e en outre à
l'approfondissem ent des chenaux d 'a ccè s entraînant ainsi l'a ccrois­
sement des courants et d e la circulation d e l'eau.
Pour supprimer les intermédiaires la Direction G én érale des Tra­
vaux Publics prend égalem ent en main la vente des produits. Com m e
ceux-ci sont des poissons fins (loups, daurades, mulets, soles, an­
guilles) elle com plète l'organisation en s'adjoignant le S ervice d e la
petite Criée, inaugurée quelques années plus tôt, pour la vente du
poisson commun.
En m êm e temps la Direction G én érale fait établir les plans d e la
station océan ograp h iqu e d e Salam m bô dont les fondations sortent
d e terre à la fin d e 1922.
G râ ce aux précautions prises, à partir d e 1920, les résultats dé­
passent les espérances les plus optimistes. La production qui s'était
maintenue autour d e 100.000 kg. pendant les huit premières années de
l'am odiation dépa sse 175.000 kg. pendant les six années suivantes.
Cette am élioration est la preuve d 'u n e m eilleure direction et d un
contrôle plus sévère des quantités pêch ées. Nous constatons d onc un
fort accroissem ent au b én éfice d e l'exploitation d'Etat.
Le b én éfice net réalisé au 1er janvier 1925, d é p a sse 1.200.000 francs;
il a servi en partie à construire la station en la dotant d e tous les
appareils nécessaires, et, sans en attendre l'achèvem ent, d 'a ccord er
à cette ép oqu e une subvention annuelle d e 40 à 50.000 francs aux
Bâtiments d e l'O ffice Scientifique et Technique des Pêches Maritimes
en vu e d e croisières d'études.
A u début l'exploitation en régie directe fut d on c une sou rce appré­
cia ble d e bénéfices.
O n constate, malheureusement, ces dernières années, une diminu­
tion du rendement. Nous aurons l'occa sio n d'en donner les causes.
R A T IO N A L IS A T IO N DE LA PECHE D A N S LE LAC DE T U N IS
La Direction G énéral^ des Travaux Publics, créant la Station O c é a ­
nographique d e Salam m bô a inscrit en prem ière ligne d e son pro­
gram m e 1 étude du Lac d e Tunis. En effet, des notions précises sur le
régim e des eaux et la b iolog ie des espèces peuvent guider a v e c cer­
titude une exploitation rationnelle.
V égétation et faunule du lac : La végétation du lac est très ri­
ch e ; elle est constituée par des ulves, des entérom orphes q ue les
pêcheurs appellent « laine » et qui forment par endroits des feutrages
très épais, ainsi q ue par des herbiers plus clairsem és d e Ruppia.
IA CAMPAGNE D'AGRUMES J 953-1954
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La présence dans le la c d e cette végétation et la variété d e la faunule qui y vit sont parm i les principales causes d e sa gran de richesse
ichtyologique.
Les plantes vertes assurent une oxygénation plus active des eaux.
Cette oxygénation est particulièrement nécessaire au la c dont l'eau
est insuffisamment bra ssée pour être renouvelée. En été on voit sou­
vent flotter des poissons morts ; cette mortalité coïn cid e avec, l'ép oqu e
où les ulves étant détruites l'assim ilation chlorophylienne est en par­
tie supprim ée et par suite la quantité d 'o x y g è n e produite dans le lac
beaucoup moins grande.
Les végétaux du la c assurent don c à l'eau les qualités nécessaires
à la respiration des êtres. Ils jouent en outre un rôle important dans
leur alimentation et en particulier dans ce lle des poissons : les espè­
ces végétariennes s'en nourrissent et ils fournissent aux alevins et
autres espèces les crustacés et les m ollusques qui s 'y abritent en
grand nombre.
Absence des œufs de poisson dans le lac : Cette constatation est
très importante. Elle prouve, que contrairement à ce que croyaient les
pêcheurs, aucun poisson n e se reproduit dans le lac. C e sont les
alevins nés en mer d'autres reproducteurs qui permettent le réem ­
poissonnement du lac.
Une vie de poisson. Laissons p a rle r M . H e ld t, ancien d ire c te u r de
la S ta tio n O céanographique de S alam m bô :
« Le hasard des v o y a g e s et les courants aidant, conduisent la jeune
daurade à l'entrée du chenal d e Tunis. Une eau en sort q u'elle re­
monte. Entrée dans le la c elle y rencontre à profusion les «cardium s»,
ces m ollusques vivalves qui y abondent et q u 'elle apprécie, les cra­
b es verts qui y pullulent et dont elle ra ffole et d e petits gastéropodes:
les Paludestrina, qui vivent en foule sur les ulves et dont elle est jus­
tement friande. Elle éla b ore assez d e substances grasses pour con s­
tituer ses œufs.
« Et voilà notre daurade prête pour la ponte. C'est alors q u 'elle en­
tend la grande voix d e la nature. Une eau tiède ven u e d e la m er l'im ­
prègne et la convie. Elle écoute cet appel du large, rem onte toujours
plus avant le courant qui le lui apporte et trouve en foule ses com p a ­
gnes sollicitées com m e elle par la d ou ce et im périeuse invitation.
Mais cette cou rse au bonheur aboutit aux bordigues des pêcheries et
c'est là que se termine cette v ie d e poisson, lamentablement... »
Le lac apparaît d onc com m e un riche dom aine où les poissons vien­
nent effectuer une période de croissan ce en attendant la maturation
d e leurs produits sexuels. Les poissons s 'y gavent en toute quiétude
de proies abondantes et faciles. Leur croissance est accélérée. En
mer il n'en est p as d e m êm e : les fonds sont agités, appauvris, les
proies traquées d e partout se dissimulent.
En outre, il faut s e défendre contre les autres carnassiers marins :
« Là point de franches lippées ».
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BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JANVIER 1955)
Ainsi, une daurade de mer met douze ans pour atteindre 43 cm.,
taille q u'elle aurait acquise dans le lac en trois ans seulement.
Une daurade de 3 ans, par exem ple, m esure :
— 25 cm en mer,
— 34 cm dans le lac d e Porto-Farina,
— 43 cm dans le lac d e Tunis.
Ce~ écarts sont si importants qu'ils caractérisent la p roven a n ce du
sujet. C ela est très précieux pour dépister les pêcheurs clandestins.
Les recherches d e la station fournissent encore de fructueuses in­
dications. Ainsi, savoir qu'une dau rade de 50 gram m es en pèsera 150
deux m ois plus tard, c'est pouvoir conseiller aux pêcheurs d e la reje­
ter dans le lac. Savoir qu’un poisson fabrique m oins d e 200 gram m es
de substance pendant sa prem ière ann ée et près d e 500 la secon d e,
c'est conseiller au Chef d'entreprise d'attendre un an pour tripler ses
gains.
C'est pourquoi dans le la c de Tunis on n 'accep te p as dans les ch am ­
bres de capture les trop jeunes sujets (loups, mulets, daurades).
D'ailleurs, l'application de cette m esure s'est fait sentir im m édiate­
ment. Ainsi la ca m p agn e des loups (Bars) en 193S dans le Lac Nord
a été d e 23 tonnes, près du d ou b le de la m oyen n e de la production,
et de 33 tonnes l'an née suivante.
Les recherches scientifiques ont don c contribué largem ent a inten­
sifier le rendement sans nuire à la bonn e conservation des especes.
LES
B O R D I G U E S
O rigine du mot bordigue. Depuis l'an 920, l'A rch e v ê ch é d'A rles
exploitait à M artigues des pêcheries. A u XIII' siècle. Sa Grandeur M gr
Bourdi-Hugo, A rchevêque d'A rles, continuait l'exploitation par un
systèm e constitué d'un b arrage en V établi au travers du ca n al fai­
sant com m uniquer l'étang a v e c la mer. A ces installations, on donne
le nom de Bourdi-Hugo qui devint Bourdigo et qui fait aujourd'hui
Bordigue.
Les bordigues sont des engins fixes utilisés aussi bien par les Eu­
ropéens que par les Tunisiens qui leur donnent, suivant les régions,
le nom d e « Cherfias » (Kerkennah) ou de « Zroubs » (Djerba). Le prin­
cipe est le m êm e, seuls les détails et les matériaux d e construction
varient.
Principe des bordigues :
Le principe des bordigues est très sim ­
ple. Il est b a s é sur le fait que les poissons naviguent à co n ­
tre-courant. Q uand le courant sort du lac le poisson veut en­
trer, on lui ouvre alors les portes qui lui donnent a ccè s dans
le lac. Q u and le courant se renverse le poisson voudrait sortir.
M ais c e n'est qu'aux périodes de passes, lorsque le besoin de
reproduction les entraîne vers la mer, qu'on leur ouvre une porte cen ­
trale et celle-là leur donne a ccè s dans les cham bres de capture.
LA PECHE DANS LE LA C DE TUNIS
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Cette m éthode très sim ple nécessite d on c la présen ce de courants
dans le la c d e Tunis. Les eaux du G olfe d e Tunis sont soum ises à un
mouvement d e m arée d e faible am plitude (10 à 40 cm suivant les
vents). C e m ouvem ent suffit à créer dans le la c des courants alter­
natifs d'entrée et de sortie dans les chenaux de com m unication a vec
la mer. Ces courants assez rapides (2 à 3 nœ uds) sont favorables, sui­
vant la saison, à la sortie du poisson ou à la m ontée des alevins.
Situation des pêcheries : Les grou pes d e pêcheries sont d onc ins­
tallées aux points où le la c com m unique a v e c la mer : pour le Lac
Pêcheries du lac de T unis
Nord les pêcheries d e La Goulette, d e la N ouvelle-Brèche (2) et de
Tunis-Marine. Pour le la c Sud, les pêch eries d e Radès, d e la Brèche
n° 4 et d e Djebel-Djelloud. Une seu le d e ces com m unications a vec la
mer est directe (canal de Radès) ; les autres donnent a ccè s dans le
canal dans les bassins des ports d e La Goulette et de Tunis. Mais
(2) Supprimée pour construction de l'autoroute Tunis-La Goulette.
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BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JANVIER 1955)
I
Lei chambre* de capture
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BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JAN VIER 1955)
des changem ents ont un peu b ou leversé cette situation dans le lac
Sud.
En 1947, les violentes tempêtes d e l'été ensablent la p êch erie de
Radès. En 1948, cette pêch erie est désa rm ée et m ise en gardien n age.
D'autre part, la pêcherie d e D jebel-D jelloud a été supprim ée en
1948 pour ca u se d'extension du port. La m êm e année, la pêcherie
d e M a d a g a sca r est m ise en service pour rem placer la première.
Nous aurons l'occa sion plus loin d e nous étendre plus longuem ent
sur les nouvelles réalisations.
Description d'une bordigue : Maintenant que nous sav on s où se
trouvent les pêcheries exam inons de plus près une bordigue.
Elle est constituée par une barrière dou ble en V faisant saillie côté
mer. Elle a la form e d'un fer de lance. De ch aqu e côté d e ce V deux
portes latérales permettent aux poissons venant d e la mer d e p én é­
trer dans le lac. A u centre du V une légère fente verticale permet aux
poissons d e passer dans un sens et non dans l'autre. A ux 3 angles
d e ce fer d e la n ce sont disposées des cham bres d e capture où s 'a cc u ­
m ule le p oisson et o ù il est fa cile d e le prendre à l'a id e d 'h a ven eau ".
Les bordigu es du la c 'd e Tunis sont en treillis d e fil d e fer galvan ise
maintenus dans des cadres en cornières de fer, cadres qui coulissent
dans des montants m étalliques, fixés eux-m êm es sur des plaqu es en
ciment q ue l'on cou le à dem eure sur le fond.
Q uand le treillis est usé on en lève simplement le ca d re et on en
met un sem b la b le en attendant la réparation du précédent. C o m m e
tous ces cadres sont interchangeables, cela sim plifie é n o r m é m e n t
le travail quand il s'agit d'u ne sim ple réparation. Les frais d e pre­
mière installation sont naturellement b ea u cou p plus élevés. M ais
a v e c un peu d'entretien on g a g n e b eau cou p par la facilité des ré­
parations et surtout on n'im m obilise p as les engins.
La m aille norm ale est de 19 à 25 mm, celle des grillages à an­
guilles mis en p la ce d e n ovem bre à janvier de 13 m /m s e u l e m e n t .
Tous les barrages sont levés pendant les m ois de mars et avril con ­
sidérés com m e étant les plus favorables au peuplem ent du lac.
Ces bordigu es sont d onc très m odernes, et constituent un énorm e
progrès sur les anciennes bordigues en b ois de La Goulette car les
changem ents de grillages sont rapides, moins onéreux et les fuites
de poissons, com m e les anguilles, m oins importantes.
LES AUTRES PROCEDES DE PECHE
La plus grosse partie de la production vient des bordigues, mais on
em ploie égalem ent d'autres procédés pour accroître le rendement.
Le tram a il: app elé en core batuide est utilisé pour la pêch e dans
le lac en dehors des époqu es régulières d e passe. C eci permet de
prendre le poisson déjà adulte et de décongestionner les bordigues
aux périodes où le bssoin de reproduction attire le poisson vers la
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LA PECHE DANS LE LA C DE TUNIS
mer. Le tramail, com m e son nom sem ble l'indiquer, consiste en un
triple filet ou, si l'on veut, un filet à trois nappes.
La longueur d'un tramail peut varier d e 75 à 150 mètres. Deux bar­
ques s'attèlent à ch a q u e extrémité et déposent le filet en ligne courbe
ou en ligne brisée. La ralingue inférieure, lestée d e plom b, traîne
sur le fond vaseux du lac. La ralingue supérieure est m aintenue en
surface par des p laqu es d e liege. Les 3 filets forment d on c 3 nappes
parallèles et verticales. La n a p p e intérieure a des m ailles plus fines
gu e les nappes extérieures. Les 3 filets ainsi disposés forment une
double poche. Les p oissons qui pénètrent dans ces p och es s'e m p ê ­
trent dans les m ailles et ne peuvent se d é g a g e r ou bien ils restent
coin cés par les ouies. La hauteur d e chute d ’un tramail varie d e 0,80
à 4 m., ™al® a p rofon deu r du lac d e Tunis ne dépassant jam ais
c e U1 „ e
m ; es* 1® seu l e m p lo y é (3). Nous allons voir que
ce filet peut etre utilise d 'u n e autie m anière.
rrfmvTrfpHmiirc[l*x m ois d é té , on utilise un autre filet, la can n a, ou
t
. ' rpr. ■ a P e c
aux m u ges ou mulets. C es poissons pénècertaines e p oq u es dan s le lac pour frayer, en particulier la
^ t
mU<3e .c é Phale (Bitoune). La ca n n ad e ou en core
■ fnnt
' S , COn^ue spécia lem en t pour la p êch e de ces poissons
^U't
„n ? 0n v ? ,es b on d s énorm es au-dessus d e l'ea u quand ils
son enc rc es.
n es a p p elle vulgairem ent « mulets sauteurs ».
rT
,arcîu? s ° e ees a un filet vertical à sim ple n ap p e tenant toute
a au eur e eau, en cerclent le b a n c d e mulets aperçus. Deux aues,.err? arC° 10tnf suivc*nt les prem ières disposent au-dessus du filet
vertical un filet tramai], horizontal celui-là, et maintenu flottant par
es roseaux,
n pourrait com parer l'en sem ble à un im m ense cha­
peau canotier dont les bords seuls flotteraient en surface.
Le b an c en cerclé, les pêch eu rs se mettent à l'ea u à l'intérieur du
chapeau et effraient les p oissons en battant l'ea u a v e c des avirons.
rloQQncT
rw tp nlnq
' Ci Bn
ans
reste plus qu a les ram asser.
vertical dans leur fuite, sautent par
horizontal la queu e en l'air. Il ne
1
^ructueuse. Il arrive qu'un m êm e b an c fournisse
plusieurs centaines d e mulets.
î
ct*'sson° Du début d'août à la fin septem bre, c'est
a gran e pa se e= mulets. En avant du barrage des pêcheries on
i n s a e c o .e
or igu e des « C aissons ». C e sont d e grands réservoirs
qui com m um quen a v e c le la c par une porte étroite. Les m uges re­
montent le courant qui vient d e la mer, pénètrent dans ces réservoirs.
Un guetteur arm e a une p och e les em p êch e de sortir à la renverse du
courant.
Ces installations n étant q ue temporaires, aucune passerelle n'est
a m én agée pour prendre le poisson à l'h a ven eau com m e dans les
(3) Depuis juillet 1954 les tramails en nylon ont remplacé les tramails en coton et
donnent des *endements très supéiieurs.
50
BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JANVIER 1955)
cham bres d e capture. On le rassem ble à l'intérieur du caisson à
de d'un filet plom bé (anchère). Le poisson est attrapé à la m ain
les hommes qui se mettent à l'eau. Ceux-ci ont le visa g e protégé
des m asques sem blables à des m asques d'escrim e pour éviter
accidents lorsque les mulets sautent en l'air.
l'a i­
par
par
des
La pêche à la fem elle. La pêch e dite « à la fem elle » est assez
surprenante. Au moment d e la maturité sexuelle des mulets, une
fem elle roguée, vivante, attachée à une ligne sans ham eçon, est pro­
m enée derrière une barque. Elle attire les m âles qui se rassem blent
autour d 'elle et lui font un galant cortège que l'o n conduit au-dessus
de l'épervier qui termine brutalement cette aventure sentimentale.
Et cette allum euse involontaire, toujours rem orquée par la barque, re­
part à la recherche d e nouveaux prétendants.
Cette pêch e réussit égalem ent en mer pour la seiche, au printemps.
LES BARQUES
Nous avons vu que la p êch e dans le lac ne se fait pas u n i q u e m e n t
au m oyen d e bordigues mais aussi à l'a id e de filets. Aussi la pêche­
rie possède-t-elle quelques barques de 5 m. destinées à cette pêche.
Des petites barques de 2 m. 50 rendent égalem ent de nom breux ser­
vices à la pêcherie.
Ainsi elles servent au moment d e la « matanza » dans les bcrdigues. Deux pêcheurs juchés sur la petite plateform e triangulaire sur­
montant la cham bre de capture puisent le poisson à l'a id e d e grands
haveneaux et le déversent directement dans la barque. A u début
mai une seule barque suffit pour faire les trois bordigues d e La Gou
lette. Un seul hom m e peut la mener. Un systèm e de cord age entou­
rant la pêch erie permet à la barque d e se d éplacer rapidement d'une
bordiaue à l'autre. Le courant dans les canaux des bordigu es étant
assez violent, ce systèm e ingénieux évite au pêcheur la fatigue des
avirons.
Au moment de pleine passe, plusieurs barques sont nécessaires
pour transporter le poisson. Elles accostent ensuite auprès d'u n appontement m én agé auprès du m agasin où est stocké le poisson dans la
glace.
Les barques d e la pêcherie sont parfois affectées au service de
surveillance du lac.
Elles rendent de grands services pour la réparation des bordiguesLes pêcheurs entretiennent eux-mêmes ces barques. Ils p o s s è d e n t
un petit atelier de menuiserie et travaillent a v ec goût et habileté.
LES ESPECES PECHEES D A N S LE LAC DE T U N IS
Les esp èces capturées dans le la c de Tunis sont, par ordre d'im ­
portance :
— les mulets,
— les daurades.
51
LA PECHE DANS LE LA C DE TUNIS
— les anguilles,
— les loups,
— les soles.
Le mulet et la daurade fournissent toujours la m ajeure partie d e la
production, les 4 /5 environ. Le la c contient égalem ent des spars,
saupes, marbrés, liches, m aignes, etc... qui n'atteignent pas leur
plein développem ent.
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Les époques de migration du poisson
Les époques d e migration et par conséquent de pêch e sont :
—
—
—
—
—
juin pour les soles,
août-septembre pour le mulet d'été,
septem bre-octobre pour le mulet doré,
octobre-novem bre pour la daurade,
décem bre-janvier pour le loup, l'an gu ille et le mulet d'hiver.
Il est à rem arquer qu'on ne peut établir de parallélism e entre la
production par esp èces et par année pour le la c Nord et le lac Sud.
C eci s'expliqu e d 'u n e part par le fait que le chenal d e la ville à
la mer sépare le lac en deux nappes d 'ea u voisines m ais cependant
presque autonom es.
D'autre part, dans la partie Nord se déversent les égouts ; il en ré­
sulte une nourriture abondante sinon saine pour les poissons qui
l'aiment : les mulets. En outre, cet apport diminue notablem ent la s a ­
linité des eaux et les courants sortant portent en mer l'a pp el du lac.
En effet, les « alevins » com m e ceu x d 'an gu illes et d e mulets sont
sensibles aux influences d 'ea u douce. A u ssi anguilles et mulets pul­
lulent-ils dans la partie Nord. (Nous verrons néanm oins les incon­
vénients des eaux d'égouts).
Le m ulet. Il s'a ccom m od e particulièrement bien des eaux douces
ou saumâtres et y prend un développem en t rem arquable. Il fournit
52
BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JANVIER 1955)
plus de la moitié de la production totale. Il est très apprécié d e la
population tunisienne et ses œ ufs constituent un mets très délicat :
« la boutargue ». « Elle ouvre l'appétit et fait venir la soif ». Le mu­
let donn e lieu à un com m erce très important pendant une partie
d e l'année
La daurade. Nous avons déjà parlé de ce délicieux poisson. C'est
une des plus belles espèces du lac de Tunis. Elle y trouve un milieu
particulièrement favorable à son développem ent. Signalons qu'on la
rencontre plus particulièrement dans le lac Sud.
L'anguilte. Les civelles arrivent nom breuses dans les lacs d e Tu­
nis, où elles se développent rapidement. L'anguille vit en fon cée dans
la vase. Elle attend les nuits très obscures d e novem bre, d écem bre
et janvier pour entreprendre son v o y a g e de noces qui devrait la ra­
m ener vers la mer des Sargasses. Entre le dernier quartier d e la lune
et le premier quartier d e la nou velle lune, par vents forts d e NordOuest qui remuent les fonds, l'anguille de passe cherche une sortie
et est capturée dans les bordigues arm ées à faibles mailles. O n en
prend plusieurs tonnes en quelques heures et les marins s'épuisent
à relever des « cop es » d e 50 kilos.
C onservées en vivier, ces anguilles approvisionnent le m arché de
Tunis. D'autres sont exportées en Italie, en H ollande et en A llem agne,
en bateaux et wagons-viviers.
La sole. Elle se plaît égalem ent dans le lac car elle aim e les fonds
vaseux.
Signalons enfin un fait curieux qui tém oigne des « divergences de
vues » pouvant survenir entre différentes espèces de la faune lacus­
tre.
Parmi les mulets retirés le matin des cham bres d e capture où ils
ont p assé la nuit, il arrive de trouver des individus morts, en a p p a ­
rence intacts mais en réalité com plètement vidés d e leurs organes
internes. Ces mulets sont vidés par les anguilles, en dehors de la
période d 'avalaison , dans les cham bres d e capture. Elles vident
ces poissons en les attaquant aussi bien par les yeu x et les branchies
q ue par l'opercule.
LA SU R VEILLAN C E DU LAC
La Tunisie est divisée en deux quartiers maritimes. Celui de Tunis
et celui d e Sfax.
Le lac d e Tunis fait partie de l'arrondissement de Tunis-Ville (de
l'em bouchure d e la M edjerdah ju squ 'à l'em bouchure d e l'ou ed EsSoltane).
La réglementation d e la p êch e dans le lac est très sim ple : elle est
interdite aux particuliers. Un décret du 12 juillet 1922 interdit d 'a il­
leurs la circulation sur la partie Nord du lac.
Il est expressément défendu de jeter dans les eaux du la c d e la
chaux, des noix vom iques, des noix d e cyprès, des coques du Le-
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LA PECHE DANS LE LA C DE TUNIS
vcint, d e la m anne, du m usc et toute autre substance liquide ou plante
en vue d'appâter, enivrer ou em poisonner le poisson.
Nous avon s vu en outre, dans les techniques d e pêche, qu'on n'uti­
lisait pas les engins traînants et q ue les m ailles des filets em p loyés
n'étaient jam ais inférieures à 2 cm d e côté. Les filets traînants tartarone, senne bourgin n e sont pas em p loyés car ils prennent a veu glé­
ment dans leurs m ailles les plus petits poissons. Nous savons qu'il
n 'y a pas d'œ u fs d e poissons dans le la c, d 'o ù la nécessité d e pros­
crire l'em ploi de ces filets. Ainsi, le tartarone est un petit filet à
m ailles serrées dont une aile est fixée sur un grappin, tandis qu'une
barque à ram es fait tourner l'ensem ble autour de ce pivot, raclant
lamentablement le fond g râ ce au poids de ralingue et arrachant ain­
si les herbiers. (La senne est une sim ple n ap p e de filet, le bourgin est
une senne com portant en plus une poche).
Les gardes de l'Etat sont actuellem ent équipés a v e c des hors-bord
et des projecteurs m ontés sur des em barcations plates indispensa­
bles pour naviguer par petits fonds.
M alheureusement, la présen ce dans le lac Nord, d e récifs de Mercierella qui déchirent les barques, permet aux braconniers qui con ­
naissent leurs em placem ents d e s'esquiver sur la rive.
LA
P R O D U C TIO N
Nous allons exam iner ce qu'était la production du lac d e Tunis
avant son exploitation en régie, puis les années qui suivirent l'Exploitation par l'Etat et enfin la période d'après-guerre.
Production du temps des am odiations. L'exploitation en régie
a com m en cé au m ois d e mai 1920. Les années précédentes, la pro­
duction m oyen n e annuelle par période triennale était la suivante :
1911 - 1913 ................................................
1914 - 1916 ................................................
1917 - 1919 ................................................
199.000 kg.
202.000 kg.
196.000 kg.
La production oscillait d on c autour d e 200 tonnes.
Production par la régie. A partir de l'exploitation par l'Etat, la
production annuelle m oyenne par période triennale est la suivante :
1920 - 1922 ................................................
1923 - 1925 ................................................
et en 1926 ...............................................................
289.000 kg.
295.000 kg.
326.000 kg.
Cet accroissem ent très net de la production est le résultat d'une
meilleure direction et des mesures techniques dont nous avons déjà
parlé.
Les années 1926, 1927, 1928 voient la production s'accroître d'une
m anière vertigineuse puisqu'en 1928, elle atteint 690 tonnes. Il faut
rem arquer que l'année 1928 est exceptionnelle.
Par la suite, malheureusement, nous constatons que la production
décroît jusqu'en 1938 (387.376 kg.).
54
BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE (JANVIER 1955)
Diverses causes sont à la b a se de cette évolution. On peut citer :
le développem ent des récifs d e M ercierella Enigmatica, le déverse­
ment des eaux sales des égouts.
En 1934, l'apport des égouts, qui était déjà de 10.000 m3, se voit
augm enté par une autre bouch e au kilomètre 4 du T.G.M. Les eaux
d'égout avides d 'ox y g èn e absorbent celle de l'eau du lac et com pro­
mettent sérieusement la vie aquatique. D'autre part, pendant les gran­
des chaleurs d'été, à l'ép oqu e où les ulves sont détruites, l'assim i­
lation chlorophyllienne est en partie supprim ée et le m anque d 'o x y ­
gèn e se traduit par une forte mortalité.
De 1939 à 1941, la production se maintient au-dessus de 300 T. :
A nnée 1939
343.231 kg.
A nnée 1940
384.810 kg.
A n née 1941
303.239 kg.
Pendant la guerre de Tunisie 1942-1943, les destructions dues aux
bom bardem ents, la présence des troupes ennemis, puis des troupes
alliées qui ne voient dans le lac qu'un « garde-m anger » pratique
dans lequel elles ne cessent de puiser, n e font qu'accentuer la b aisse
de production am orcée en 1941.
A nnée 1942
245.749 kg.
Année 1943
260.677 kg.
A nnée 1944
220.774 kg.
A nnée 1945
185.630 kg.
En 1946, la cam pagne d e pêche est d e 166.422 kg. En 1947, elle est
encore plus faible (142.402 kg.). C'est le résultat des mortalités de
poissons survenues dans le lac Nord par suite d e la chaleur. En ou­
tre, des brèches ouvertes, lors des travaux d'extension des installa­
tions portuaires, ont fait com m uniquer le lac Sud a v e c le can al TunisGoulette, laissant libre passage au poisson lors des passes des mu­
lets, des daurades, des loups et des anguilles. D'autre part, la p ê­
cherie de Radès, ensablée lors de violentes tempêtes d e l'été, a eu
une production nulle.
En 1948, la production remonte à 181.401 kg. A ucune mortalité
n'est enregistrée dans le lac Nord. Dans le lac Sud toutes les ou­
vertures susceptibles de laisser passer le poisson ont été bouchées.
La pêcherie de M adagascar rem plaçant la pêcherie d e Djebel-Djelloud, supprim ée pour cau se d'extension du port, a été mise en ser­
vice. La pêcherie de Radès, com plètement ensablée, a été désarm ée
et m ise en gardiennage. La production a donc été dans l'en sem ble et
pour toutes les passes, supérieure à celle d e l'an née précédente. Re­
prenant la tradition suspendue depuis 1939 une adjudication publique
a été ouverte pour la vente des anguilles des lacs : l'adjudicataire
s'est vu e accorder un lot de 13 tonnes, représentant près d e deux mil­
lions de francs. En résumé, cette année, sans atteindre la production
des années antérieures peut être cla ssée dans la m oyenne.
En 1949, la production s'élève à 228.631 kg.
55
LA PECHE DANS LE LAC DE TUNIS
La production des lacs d e Tunis a été ensuite :
A n née 1950 : .............................................
235.041 kg.
A nnée 1951 : ..............................................
178.192 kg.
A nnée 1952 : .............................................
270.527 kg.
A nnée 1953 :
208.150 kg.
A n n ée 1954 : .............................................
311.633 kg.
La production d e l'an née 1954, après de sévères mesures prises
pour consolider la surveillance, est à imputer à la m ise en œ uvre de
m oyens modernes de production (4). D'autres m oyens de m êm e es­
p èce pourront être em ployés ultérieurement et accroître la produc­
tion qui dépasse cette année les 300 tonnes, production qui était
norm ale pendant les années 1939 à 1941.
L 'E X P E D IT IO N ET LA VE N TE DU POISSON
Un agent du m arché central vérifie le poids du poisson et celui-ci
traverse le petit chenal dans la barqu e destinée au service de passa­
ge. Un cam ion attend la m archandise et celle-ci prend la direction
d e Tunis où elle sera vendue le lendem ain matin. Il s'écou le donc
très peu de temps entre le moment où le poisson est p éch é et celui
où il sera consom m é.
Le poisson est vendu aux enchères publiques au M arché Central
d e Tunis.
L 'A V E N IR DU LAC
On peut affirmer que la production des lacs d e Tunis a diminué
depuis 1930, mais c'est surtout le lac Nord qui a le plus souffert. D 'a­
près la production de 1 année 1954 — année où les circonstances
atm ospériques ont été très m oyennes — on peut soutenir que le rap­
port d e décroissance est d e 33% environ.
Lac Nord
a) le percement d e l'isthme de Kherredine a permis l'installation
d'une nouvelle pêcherie et une souille a été creusée dans le lac Nord
pour prolonger ce canal ;
b) une nouvelle com m unication entre la c Nord et canal TunisGoulette a été percée au lieu dit Chickly.
Malheureusement les eaux noires du fond du la c Nord se déversent
par cette brèche dans le can al et salissent les eaux du lac Sud par
la brèche du kilomètre 4.
(4) Entre autres l'usage de tramail en nylon.
BULLETIN ECONOMIQUE ET SOCIAL DE LA TUNISIE f/ANV/ER 1955)
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Lac Sud
Exploité par trois bordigues, à M ad agascar (kilomètre 2) à la brè­
ch e 4 (kilomètre 4) et à Radès. Une zone de 100 hectares a été déta­
chée par la Régie des Pêches et les riverains peuvent obtenir l'auporisation d e pêcher dans cette zone.
Il est certain que la production des lacs d e Tunis pourrait être ra­
m enée au niveau de 1930. La solution est dans l'assainissem ent des
eaux du lac Nord (suppression d e l'évacuation des eaux des égouts)
et dans la destruction des récifs de M ercierella. Un projet est depuis
longtem ps à l'étude pour évacuer les eaux des égouts vers la Soukra.
Il serait rentable de le réaliser rapidement, car en quelques années,
la production du lac Nord pourrait augmenter d e plusieurs vingtai­
nes d e millions et l'amortissement du can al d'évacuation serait ra­
pidement réalisé. Il permettrait de réaliser en m êm e temps :
— un vaste chantier qui occuperait la m ain-d'œ uvre lo ca le ;
— une entreprise d'assainissement des alentours directs de Tunis ;
— un a pp el d e poissons vers la Soukra qui favoriserait la p êch e
côtière.
G u y CHAMFR AULT.

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