Ferme Frazer teste le volet bien-être animal de proAction

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Ferme Frazer teste le volet bien-être animal de proAction
R E P O R TA G E À L A F E R M E
Par YVON GENDREAU, journaliste, PLQ
Ferme Frazer
teste le volet
bien-être animal
de proAction
Pour Patrick Samson,
de la Ferme Frazer de
Saint-Narcisse-de-Beaurivage,
participer au projet-pilote
de proAction sur le volet
bien-être animal allait
presque de soi : « Je savais,
dit-il, que tôt ou tard,
on en viendrait là. »
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Patrick fait partie des 37 producteurs de lait des MRC de Bellechasse,
de Lotbinière et de Nouvelle-Beauce
qui ont participé au projet-pilote visant
à mettre à l’épreuve le volet préliminaire bien-être animal de proAction
(voir l’article On a testé le volet bienêtre et soins des animaux de proAction,
p. 18). Comme tous les participants, il
a assisté à une journée de formation
qui lui a permis de se familiariser avec
les exigences de ce volet.
En plus de la production laitière,
Patrick est également éleveur de
porcs. Il était déjà sensibilisé à la
mise en place de telles mesures. En
effet, depuis 2008, il existe des règles
concernant le bien-être animal en
production porcine – devenues obligatoires en 2012.
C’est donc sans trop d’hésitation,
mais aussi par intérêt, que Patrick a
accepté de participer au projet-pilote
sur le bien-être animal du programme
proAction. « Je n’avais rien à perdre,
lance-t-il. En participant, je pouvais
connaître à l’avance ce qu’était le
programme, voir comment ma ferme se
situait et me préparer pour les années
futures. Ça me permettait aussi de
planifier les changements à faire, si
jamais il y en avait, et de mieux les
répartir dans le temps en fonction de
mes moyens. »
Les dernières modifications apportées à l’intérieur de l’étable datent déjà d’une quinzaine
d’années et visaient à améliorer l’espace et le confort.
METTRE LE PROGRAMME
À L’ÉPREUVE
Selon Patrick, tôt ou tard, les producteurs n’auront d’autres choix que
de se conformer aux règles concernant le bien-être animal. Quant à
lui, il n’aime pas être à la remorque
et préfère prendre les devants pour
parer à toutes les éventualités. Il a
d’ailleurs emboité le pas très tôt quand
le programme Lait canadien de qualité a vu le jour. Les primes liées à
Patrick déplore que les producteurs aient
de plus en plus de documents à lire et à
remplir pour répondre à toutes les nouvelles
exigences.
ce programme lui ont permis d’aller
chercher un montant appréciable qu’il
a pu investir avec d’autres sommes
pour améliorer encore la qualité de son
lait (nouveaux lactoduc et système de
lavage, principalement). Des changements qu’il dit bénéfiques, puisqu’il a
pu augmenter sa production laitière,
améliorer la qualité de son lait et éliminer depuis deux ans les problèmes
de mammite dans le troupeau.
L’expérience du projet-pilote sur le
bien-être de proAction a-t-elle nécessité beaucoup de temps? En incluant
les procédures normalisées d’opération
(PNO) à rédiger ainsi que les visites
du vétérinaire et de l’agent de validation, Patrick estime à environ une
dizaine d’heures le temps qu’il a dû
consacrer à ce projet. « Une fois que
tu as mis par écrit tes PNO, le gros du
travail est fait. Le reste, c’est du suivi
normal. Comme le projet a été réalisé
PROACTION EN BREF
Les Producteurs laitiers du Canada ont donné le coup d’envoi à l’Initiative proAction en 2013. L’idée derrière
celle-ci est d’avoir un programme de certification prenant en compte plusieurs aspects de la production laitière qui serait uniforme à travers le Canada. L’objectif de cette initiative est de positionner le lait canadien
auprès des consommateurs comme l’un des meilleurs au monde et qui réponde aux plus hautes normes.
Les aspects concernés par ce programme sont le bien-être animal, la biosécurité, l’environnement, la salubrité par Lait canadien de qualité (LCQ), la qualité et la traçabilité. Pour en apprendre davantage sur cette
initiative, vous êtes invités à lire les chroniques publiées régulièrement sur le sujet à l’intérieur de la revue.
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REPORTAGE À LA FERME
Malgré l’âge des installations de la Ferme Frazer, le projet pilote a montré que celles-ci étaient conformes au volet bien-être et soin des animaux de
proAction.
à l’automne tard, après les récoltes,
c’était aussi plus facile de lui consacrer
du temps. » Plutôt porté vers l’action et
le travail manuel que vers « l’écriture »,
Patrick déplore toutefois le temps que
les producteurs doivent de plus en plus
passer à lire et remplir des documents
pour répondre à toutes ces nouvelles
exigences. « Heureusement, dit-il, j’ai
pu compter sur la participation de ma
conjointe Marie-Pierre pour remplir
Patrick et sa conjointe Marie-Pierre en
compagnie de leurs deux enfants : Noah et
Julianne.
Selon les exigences de proAction,
les veaux doivent être en mesure
de se tourner sur 180 °.
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les questionnaires, les PNO et toute
la paperasse liée à ce projet », avouant
toutefois qu’il était quand même facile
et peu contraignant de mettre en
œuvre le volet bien-être et soin des
animaux. « Tant qu’on n’apporte pas
de changements à ce que l’on fait ou
à nos installations par la suite, le suivi
est simple. »
Dans le cadre du projet-pilote,
Patrick a reçu la visite de son vétérinaire qui a évalué l’état de chair de
ses vaches laitières, les blessures aux
jarrets, au cou et aux genoux ainsi que
la boiterie. Cette évaluation a permis
de confirmer que la ferme de Patrick
n’est pas parfaite, mais que les petites
imperfections ne seraient pas des
freins à l’obtention de sa certification
si celle-ci était déjà obligatoire. Comme
bon nombre de producteurs qui ont
participé au projet, Patrick n’a pas
atteint toutes les cibles fixées dans le
cadre du projet-pilote, principalement
pour ce qui touche les blessures aux
jarrets et au cou. Lors de la validation, il a perdu des points concernant
le logement des veaux du fait que
ceux-ci ne pouvaient pas se tourner à
180° et voir les autres veaux. « Dans
l’ensemble, les résultats ont montré
que mes installations sont conformes,
mentionne-t-il. » En effet, aucune modification majeure de la ferme n’aurait
été requise.
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REPORTAGE À LA FERME
En plus de sa ferme laitière,
Patrick Samson élève du porc.
UN PROGRAMME
DE BIEN-ÊTRE
ANIMAL
EN PRODUCTION
PORCINE
Depuis le 1er janvier 2012, les
producteurs de porcs doivent
obligatoirement appliquer le
Programme Bien-être animal
(BEA), piloté par le Conseil
canadien du porc (CCP). Chaque
province a la responsabilité de
le mettre en œuvre. Ici, ce sont
Les Éleveurs de porcs du Québec
qui s’occupent du dossier. Le BEA
comporte quatre procédures :
• Traitement pour les porcs
malades ou blessés
• Problème de comportement
social
Patrick se dit d’ailleurs content des
résultats : « Je m’attendais à pire, mais
ma ferme s’en est bien sorti. C’est
bien d’avoir un point de vue extérieur
sur son entreprise. Ça nous permet
de nous accepter comme on est. »
L’expérience lui a aussi permis de
constater qu’il était prêt pour ce volet
de proAction.
L’étable de la Ferme Frazer doit
avoir une bonne centaine d’années
d’existence. Hormis la vacherie qui a
été allongée pour ajouter des stalles
et quelques aménagements apportés
à l’intérieur par son père il y a une
quinzaine d’années afin d’offrir un
peu plus d’espace et de confort aux
animaux, les installations sont sensiblement demeurées les mêmes. Pour
l’instant, Patrick n’envisage pas d’investissements majeurs sur sa ferme ni
de grandes modifications à ses installations pour les dix prochaines années. Il
attend de savoir si les enfants souhaiteront prendre la relève de l’entreprise.
PORTRAIT DE LA FERME
DES EFFETS POSITIFS
À LONG TERME
Conscient que ce ne sont pas tous
les producteurs qui partagent son avis,
Patrick ne voit pas d’inconvénients à ce
que la production laitière se donne des
règles en matière de bien-être animal.
« Si ma vache reste plus longtemps sur
la ferme parce que son milieu de vie
• Euthanasie
• Panne électrique
Ce programme permet d’évaluer l’environnement dans
lequel évoluent les animaux :
ventilation, abreuvement,
alimentation, surface allouée à
chaque animal (calcul).
Afin de se conformer au
programme, le producteur doit
répondre à 26 questions obligatoires (le programme comprend
un total de 61 questions).
Patrick précise que l’arrivée de
ce programme dans la production porcine ne l’a pas obligé
à modifier ses installations,
mais il a dû adapter quelque
peu ses méthodes de travail et,
bien sûr, remplir un peu plus de
paperasse...
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lui permet de produire plus et mieux
pendant plus longtemps, je pense que
je suis gagnant à la fin du compte. Ça
nous permet aussi d’être en bonne
position sur les marchés face aux produits venus de l’extérieur et d’offrir
des produits d’animaux élevés dans
de bonnes conditions en lesquels les
consommateurs auront confiance. »
Outre le projet-pilote, Patrick est
aussi d’avis qu’il y a eu beaucoup
d’amélioration au fil des ans et que
les producteurs ont fait un bon bout
de chemin en matière de confort,
de bien-être, mais aussi sur le plan
environnemental et de la qualité du
lait. « Ces programmes confirment ce
que l’on fait déjà sur nos fermes. On
est rendus là. Aujourd’hui, avec les
téléphones portables, c’est facile de
prendre des photos qui peuvent nuire
aux producteurs et de les publier à
large échelle. Mieux vaut donc montrer
que nous faisons déjà bien les choses. »
Patrick compte depuis peu sur la participation
de son nouvel employé, Maxime Gosselin,
pour l’appuyer dans ses tâches
Patrick Samson est la troisième
génération de la famille à devenir propriétaire de la Ferme Frazer, spécialisé
en production laitière. Il est aussi propriétaire de la ferme de production porcine qui porte son nom et d’une petite
érablière de 3 000 entailles. Associé
avec son père Michel depuis 2005, il a
acheté l’entreprise en 2010, devenant
ainsi propriétaire unique.
En plus de son élevage de quelque
1 200 porcs à l’engraissement, Patrick
possède un troupeau holstein pur-sang
de 120 têtes, dont environ 55 vaches
en lactation. Sur les quelque 121 ha de
terre de la ferme, 113 sont consacrés
aux cultures. De cette superficie, 48 ha
sont cultivés en céréales (maïs, blé) et
en soya, et le reste, 65 ha, sont en foin,
ce qui lui permet d’assurer l’autosuffisance de la ferme.
Lui et sa conjointe Marie-Pierre
Bilodeau, infirmière au CHUL, ont
deux enfants : Julianne, 10 ans, et
Noah, 8 ans. Encore bien jeunes pour
s’avouer intéressés à prendre la relève
de l’entreprise, Patrick se dit déjà prêt
à leur laisser la porte ouverte quand
viendra le temps de faire leur choix
pour l’avenir.
Pour l’aider dans ses tâches au quotidien dans l’entreprise, Patrick peut
compter sur l’appui de Maxime Gosselin,
son nouvel employé à temps plein. ■
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