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Spécial immobilier
DOMINIQUE
PERROT
directrice pour le
Rhône de l’Association
départementale
pour l’information sur
le logement (Adil)
Le Nouvel Observateur. – A travers les
consultations que donne l’agence, comment
percevez-vous le marché dans Lyon intramuros et le Grand Lyon ?
Dominique Perrot. – Depuis le quatrième
trimestre 2009, nous sentons un regain d’intérêt vis-à-vis de l’acquisition. Les acheteurs
potentiels se renseignent sur le Pass-Foncier
collectif, désormais en vigueur dans le Grand
Lyon, et le doublement du prêt à taux zéro
(PTZ) pour le neuf et dans l’ancien. En un an,
nous constatons ainsi deux fois plus de
consultations sur le financement et nous
devrions revenir au niveau d’activité de 2007,
soit 30 000, dont 20% sur l’accession à la propriété. Cela dit, nous remarquons que les prix
proposés à Lyon et dans ses environs restent
globalement trop élevés pour les capacités
budgétaires des ménages, écartant les primoaccédants qui ne disposent d’aucun apport.
Ces achats sont donc encore différés, sauf si,
par exemple, il y a agrandissement ou
recomposition de la famille. Le dispositif
Scellier dynamise l’investissement et contribue à mettre des locations sur le marché.
Mais cela ne suffit pas pour répondre à la
demande locative, et certainement pas à celle
de la demande sociale – 55 000 demandeurs
dans le Rhône, dont 86% dans le Grand
Lyon –, pour laquelle il y a près de quatre ans
de délai d’attente.
N. O. – Existe-t-il, chez les acquéreurs lyonnais, des attentes spécifiques ?
D. Perrot. – L’enveloppe budgétaire est bien
évidemment le nerf de la guerre. Mais, audelà, deux attentes, souvent liées, se font sentir, notamment dans le Grand Lyon. D’une
part, l’environnement sur le plan éducatif
(écoles, lycées…) s’avère de plus en plus
déterminant dans le choix d’une commune,
d’un quartier et d’un logement. D’autre part,
la proximité des transports en commun –
métro et tramway – influe sur la décision, ce
qui explique le développement de communes
comme Meyzieu ou Saint-Priest.
N. O. – Et le développement durable ?
D. Perrot. – Ce n’est pas la première priorité
des futurs acquéreurs qui franchissent notre
porte. Certes, ils sont sensibilisés par le
travail de pédagogie et d’information fourni
par l’Adil pour faire connaître les diverses
aides, mais ils doivent souvent faire un arbitrage de coût. Propos recueillis par E. L.
II ● LE NOUVEL OBSERVATEUR
La rue Saint-Jean,
dans le Vieux-Lyon,
est toujours courue
Certains biens exceptionnels atteignent
même les 5 000 euros/m2, mais ils ne constituent pas l’essentiel du marché. Comme le
constate Gilles Vaudois, patron de cinq
agences Laforêt, « la demande émane majoritairement de primo-accédants ou d’investisseurs recherchant des petites et moyennes
surfaces pour un budget allant de 120 000
à 280 000 euros. Dès l’instant où le bien est
au juste prix, la vente peut se conclure en
quelques jours ». Le marché des surfaces
standard (de 80 à 100 m2) est encore un peu
LE DISPOSITIF SCELLIER ET
LE DOUBLEMENT DU PRÊT
À TAUX ZÉRO ONT PERMIS
UN DÉSTOCKAGE RAPIDE
atone, même si la demande de crédit-relais
réapparaît, qui pourrait redonner du souffle
à ce créneau. Mais c’est le manque global de
biens à la vente qui inquiète les professionnels. « Tout ce qui est au prix du marché part
très vite, grâce à une demande forte qui
profite de la légère baisse des prix. Pour peu
que les vendeurs reprennent confiance et
augmentent leurs tarifs, les acheteurs
peuvent être à nouveau désolvabilisés, et le
marché risque de se bloquer à nouveau »,
résume Eric Daveau, du GIE Orpi. En outre,
« le manque de logements neufs à l’achat va
mécaniquement peser sur le marché de l’ancien », remarque Hervé Joly, du Crédit foncier.
L’immobilier neuf se résume à une offre dramatiquement basse, de l’ordre de 1 000 logements dans toute l’agglomération, soit moins
de six mois de vente, selon le Centre d’Etudes
de la Conjoncture immobilière (Cecim). Le
dispositif Scellier et le doublement du prêt à
taux zéro ont permis un déstockage rapide,
portant les ventes à près de 6 700 unités en
2009, soit deux fois plus que l’année précédente. Le prix moyen est resté stable, à
3 234 euros/m 2. Mais, observe Thierry
Mépillat, directeur régional de Bouygues
Immobilier, « d’une part, le marché est sous
perfusion, 90% de la production bénéficiant
d’une aide de l’Etat ; d’autre part, l’offre,
gelée pendant les mois de crise, ne peut apparaître en quelques mois sur le marché ».
La fin programmée du doublement du
prêt à taux zéro et celle du Pass-Foncier, de
même que la pression foncière entre les
divers opérateurs et le délai nécessaire pour
monter un programme laissent augurer d’un
marché complexe ces prochaines années.
Pas question pour autant de renoncer à la
politique sociale de la Ville. Gilles Buna, adjoint au maire, chargé de l’urbanisme dans
le Grand Lyon, confirme les bons résultats :
« Nous avons réalisé +28% de logements
sociaux en 2009 par rapport à 2008 et nous
entendons poursuivre sur les secteurs
Confluence, Bon Lait, Carré de Soie. » La
reconversion des prisons de la presqu’île
devrait voir l’émergence de résidences pour
étudiants, et, à la place de l’ancien hôpital
Debrousse, seront construits des logements
et des hôtels. Des projets à long terme qui
néanmoins sont une réponse à des besoins
de diversification de la deuxième ville de
France qui, intra-muros, a gagné 40 000 habitants ces cinq dernières années.
ELISABETH LELOGEAIS