Mâchefers d`incinération :
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Mâchefers d`incinération :
M0000TOR 29/01/04 13:32 Page 1 FICH E DE SYNTHÈSE SCI ENTI FIQUE N° 5 - Février 2004 Mâchefers d’incinération : un nouveau matériau pour le développement durable En France près de 70 % de la production totale de MIOM (mâchefers d’incinération d’ordures ménagères) soit 2,25 millions de tonnes sont traités en IME (installation de maturation et d’élaboration). Le recyclage constitue la solution optimale si on considère les contraintes environnementales et économiques pour ces produits qui sont à la fois des déchets et un matériau. Par son expertise, le BRGM participe aux recherches pour améliorer cette valorisation. haque Français produit un kilo d’ordures ménagères chaque jour avec un volume à traiter toujours plus important. Alors que les décharges sont progressivement fermées, l’incinération, combinée à la valorisation des matières recyclables (papiers, cartons, plastiques,..), s’impose comme le mode de traitement le plus répandu dans les communes. Mais l’incinération produit aussi ses propres déchets, les MIOM et les REFIOM (résidus de fumée d’incinération d’ordures ménagères). Chaque tonne incinérée produit ainsi 250 à 300 kg de mâchefers et 50 à 70 kg de résidus d’épuration de fumées. Alors que les REFIOM, considérés comme déchets ultimes du fait de leur toxicité, doivent être envoyés en décharge, les MIOM peuvent au contraire être valorisés dans le BTP, évitant ainsi des coûts importants de mises en décharges pour les collectivités. À l’heure où les granulats naturels deviennent plus rares et donc plus chers, l’utilisation de MIOM peut-elle représenter une alternative économique et environnementale crédible ? Ces mâchefers, qui représentent MIOM (mâchefers d’incinération d’ordures ménagères) 1 Ordures ménagères 2 Incinération 3 Production de MIOM 4 Confortement de carrières souterraines 5 Sous-couche routière 6 Granulats de charge dans le béton 7 Possible influence sur la qualité des eaux souterraines Direction de la Communication et des Éditions - D. Roblin - Tél. 02 38 64 39 76 1 2 3 © M.Villey-Brgm C 6 4 5 7 2% du tonnage total de matériaux consommés en France, peuvent-ils avoir des incidences sur l’environnement, la santé, la qualité de l’air ou des eaux souterraines ? Ce sont quelques-unes des 29/01/04 13:32 Page 2 questions auxquelles le BRGM veut répondre grâce à des études destinées à évaluer le comportement des mâchefers à moyen et long terme. «La valorisation des MIOM, explique Patrice Piantone, chargé de ce dossier au BRGM, apparaît comme un important challenge aussi bien pour les collectivités territoriales que pour les industriels du BTP». Placé en maturation à l’air libre entre trois mois et un an maximum, le MIOM perd une bonne partie de ses capacités polluantes et acquiert ainsi des qualités qui le rendent plus compatible avec l’environnement (abaissement du pH alcalin à l’origine). Les premiers résultats sont donc encourageants. QUEL IMPACT SUR L’ENVIRONNEMENT ? Le projet européen AWAST © BRGM La valorisation des mâchefers n’est pas une nouveauté (la ville de Toulouse les utilise depuis 1926 dans ses travaux urbains). Pourtant, leur utilisation a encore mauvaise presse : les défenseurs de l’environnement y voient une source de pollution potentielle des eaux souterraines tandis que les élus et les administrations hésitent à les utiliser. C’est pourquoi, sur environ trois millions de tonnes de MIOM produites chaque année, il semblerait que seulement 50 % soient valorisés dans les travaux publics où ils sont utilisés comme sous-couche routière ou pour le comblement de fossés et de remblais. Alors qu’une partie encore importante de la production part en décharge, le défi actuel consiste donc à promouvoir leur valorisation. Le BRGM travaille notamment sur l’impact des MIOM dans l’environnement (présence de métaux lourds et de dioxines) et sur leur qualité «géotechnique» de matériau de substitution. Fragment de mâchefers issu de l’incinération des ordures ménagères vu au microscope électronique à balayage (x 750) © BRGM Mâchefers Des progrès sensibles ont été enregistrés en quelques années. Ainsi, une circulaire de 1994 définit des indications de bons usages pour la production et l’utilisation des mâchefers avec des analyses obligatoires au sortir des fours. En fonction de leur composition, ces résidus peuvent être valorisés après une maturation minimale de trois mois sur une plate-forme d’élaboration ou, pour les plus médiocres au terme d’une année de maturation, stockés en centre d’enfouissement technique de classe 2. jouer la carte de la transparence et surtout d’innover pour produire un meilleur matériau, encore plus compétitif et surtout avec peu d’impact sur l’environnement. Les mâchefers pourront alors véhiculer une «image d’avant garde», celle du concept «d’écologie industrielle qui préfigure la coopération future entre industriels, collectivités et gestionnaires des milieux naturels». UN MATÉRIAU TECHNIQUEMENT FIABLE Une étude du ministère de l’Ecologie et du Développement Durable a montré que la migration des dioxines dans les sols et les eaux souterraines était inexistante (il n’y a pour ainsi dire pas de dioxines dans les mâchefers actuels, bien moins de 20 µg TEQ par kg, ce qui les met au niveau d’un sol faiblement pollué). D’autres études se poursuivent cependant afin d’améliorer encore les performances environnementales et géotechniques de ces résidus. Certaines portent en particulier sur l’ajout de liants pour stabiliser et/ou emprisonner les éléments polluants dans une matière solide par liaison chimique (stabilisation) ou mécanique (encapsulation). Une bonne valorisation des MIOM suppose qu’ils soient bien adaptés aux techniques routières. Des tests réalisés sur des chantiers menés dans les années 70 montrent une bonne durabilité mécanique des structures et une faible influence des MIOM sur la qualité des sols. De nouvelles techniques (traitement par des liants pour assurer une meilleure cohésion, ajout de gravillons, enrobage par bitume…) permettent encore d’améliorer ce matériau qui pourrait également être utilisé dans le confortement de carrières souterraines pour prévenir les effondrements. L’ajout de liant, chaux, ciment, pourrait aussi favoriser l’utilisation de mâchefers comme granulat de charge dans le béton bien que cela pose le problème de la banalisation du déchet comme matériau et donc de sa traçabilité. La réussite de la valorisation suppose, au préalable, de vaincre des préjugés, de La valorisation des résidus d’incinération est un des éléments de la gestion globale des déchets ménagers. Le BRGM travaille avec 10 autres partenaires européens au programme AWAST (Aid in the Management and European Comparison of Municipal Solid Waste Treatment methods for a Global and Sustainable Approach). L’objectif est de créer un outil d’aide à la décision pour collectivités locales afin d’améliorer leur gestion des déchets avec des approches en termes de qualité et de quantité, d’énergie, de coûts et d’environnement. Une rentabilité économique immédiate Pour une collectivité, la valorisation des mâchefers peut représenter une bonne opération. Le coût global des mâchefers sur une plate-forme de maturation s’établit en moyenne à 40 euros la tonne contre au minimum 70 euros la tonne stockée en décharge. Une ville moyenne avec une production de 35 000 tonnes par an peut donc économiser plus d’un million d’euros. Pour les entreprises de BTP, l’intérêt est également évident avec un coût de un à deux euros la tonne contre trois à quatre euros pour les granulats naturels… Pour en savoir plus : Patrice Piantone - Tél. 02 38 64 34 27. Collaboration rédactionnelle : Jean-Jacques Talpin Centre scientifique et technique BRGM - 3, avenue Claude-Guillemin - BP 6009 45060 Orléans Cedex 2 - Tél. 02 38 64 34 34 www.brgm.fr Février 2004 M0000TOR