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Cité Martignac
111, rue de Grenelle
75353 PARIS 07 SP
Paris, le 14 juin 2007
AVIS
RELATIF A CERTAINS LUMINAIRES PORTATIFS HALOGENES A
TRANSFORMATEUR INTEGRE
LA COMMISSION DE LA SECURITE DES CONSOMMATEURS,
VU le code de la consommation, notamment ses articles L. 224-1, L. 224-4,
R. 224 4 et R. 224-7 à R. 224-12
VU la requête n° 06-028
Considérant que,
I.
LA REQUETE
Le 3 avril 2006, l'UFC Que Choisir de Moselle-Est saisissait la CSC à la suite d’un
incident qu’avait connu une petite fille, âgée de 7 ans, lors de l'utilisation d'une
lampe de bureau, référencée 0035516 portant l'estampille SEYLUMIERE, lampe
Méga GY35W maxi classe II, fabriquée par la société SEYNAVE Luminaire.
En effet, le requérant, prévenu par les parents de l'enfant, précise dans sa lettre :
« Ils ont constaté son extrême dangerosité après l'accident survenu le 22 décembre
2005 à leur petite fille. En effet, les deux bras télescopiques et articulaires de cette
lampe sont en même temps conducteurs du courant alimentant l'ampoule. Bien que
s'agissant d'un courant 12 volts, en voulant récupérer un objet se trouvant sur le
bureau à proximité de cette lampe, leur fille a heurté par inadvertance les bras de
cette lampe avec une fine chaînette de cou. Cette dernière a immédiatement « brûlé
» portant toute la chaînette à une température extrêmement élevée ce qui a eu pour
effet de lui brûler 3 doigts de la main droite, entraînant une plaie profonde. Il va
______________________
Secrétariat
Tél : 01 43 19 56 68
Fax : 01 43 19 56 66
Documentation
Tél : 01 43 19 56 60
Fax : 01 43 19 57 00
…/…
Internet
http://www.securiteconso.org
sans dire que, selon les circonstances, les conséquences auraient pu être bien plus
graves, puisqu'un fil métallique porté au rouge peut conduire à un incendie ».
Quelques mois plus tard, la CSC était informée par l'UFC Que Choisir de Martigues
d'un autre incident survenu lors de l'utilisation d'une lampe conçue selon le même
principe, achetée dans un magasin BUT situé à Plan de Campagne (13), le 21 mai
2006.
« Cet accident est survenu le dimanche 4 juin 2006. Les circonstances sont les
suivantes :
Lors de l'achat de la lampe qui était un modèle d'exposition, l'ampoule a été
endommagée. J'ai donc changé celle-ci puis branché la lampe sur le secteur. Je
tenais cette même lampe par les deux tiges métalliques télescopiques de la main
gauche et j'ai appuyé sur l'interrupteur de la main droite afin de vérifier que tout
fonctionne correctement. C'est à ce moment là que j'ai été foudroyé par une douleur
terrible. Ma main gauche est restée collée sur les tiges métalliques et mon corps a
été parcouru par le courant électrique. Mon épouse m'a aussitôt secouru et
transporté aux urgences après appel téléphonique au centre 15. J'ai été hospitalisé
ce même jour en urgence à la Clinique Générale d’Istres pour des brûlures et une
tétanisation des muscles ».
II.
LES APPAREILS
Les appareils sont constitués d'un socle massif contenant un transformateur
délivrant au secondaire une tension (TBTS)1 de 12 volts (V). Cette tension est
conduite jusqu’au niveau de la douille de l'abat-jour contenant la lampe halogène
par deux brins métalliques, télescopiques ou non.
Ces luminaires sont normalement équipés d'un ou plusieurs dispositifs de sécurité
destinés à éviter tout incident sur les enroulements du transformateur (dispositif
1
Très basse tension de sécurité. Un transformateur de tension est constitué de deux circuits, le circuit
primaire qui est directement relié à l'alimentation (220 V) et le circuit secondaire qui fournit la tension
d'utilisation (ici 12 V). Dans le cas de la TBTS, ces deux circuits sont non seulement séparés
physiquement mais, de surcroît, isolés de manière renforcée de telle sorte qu'un défaut sur un circuit ne
puisse en aucun cas avoir de répercussion sur l'autre.
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thermique sur le primaire pour éviter les échauffements excessifs ou fusible –
accessible ou non – pour éviter les conséquences d’une mise en court-circuit du
secondaire).
Les deux bras supportant l'abat-jour sont donc constamment sous tension (TBTS –
12 V) durant le fonctionnement de la lampe.
III.
LA REGLEMENTATION ET LA NORMALISATION
Les luminaires sont soumis à l'application des directives européennes relatives à la
compatibilité électromagnétique (CEM) qui n'entre pas directement dans le champ
de compétence de notre Commission2 et la directive “basse tension”. Cette dernière
a été transposée en droit français par le décret n° 95-1081 du 3 octobre 1995
modifié relatif à la sécurité des personnes, des animaux et des biens lors de l'emploi
des matériels électriques destinés à être employés dans certaines limites de tension.
Cette règlementation privilégie comme présomption de conformité aux objectifs
généraux de sécurité, la conformité à des normes pertinentes dont la liste est publiée
au JORF. La dernière liste a fait l'objet d'un avis publié le 9 janvier 2007.
Depuis le 1er janvier 1997, les appareils commercialisés doivent être revêtus du
marquage CE (relatif aux deux règlementations précitées).
Les normes pertinentes concernant ces luminaires sont les suivantes :
− norme NF EN 60598-1 (février 2005) : Luminaires – Partie 1 :
Prescriptions générales et essai ;
− norme NF EN 60598-2-4 (juillet 1999) : Luminaires – Partie 2 :
règles particulières – Section 4 : Luminaires portatifs à usage
général ;
− norme NF EN 60598-2-6 (mars 1995) + amendement A1
(juillet 1999) : Luminaires – Partie 2 : règles particulières –
Section 6 : Luminaires à transformateur intégré pour lampes à
filament de tungstène.
IV.
A.
LES ESSAIS REALISES A LA DEMANDE DE LA CSC
DESCRIPTION
Afin de vérifier l'éventuelle dangerosité de ces produits, la CSC a confié à un
laboratoire agréé, le laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE), des essais
portant sur un échantillon représentatif de dix modèles de lampes.
Les luminaires (2 exemplaires de chaque marque) ont été achetés en région
parisienne, dans des grandes surfaces généralistes, des magasins de bricolage, un
magasin spécialisé dans l'éclairage et par correspondance.
Il a été convenu de pratiquer des essais partiels conformément aux prescriptions des
normes précitées, en relation directe avec les incidents relatés par les requérants, à
savoir : article 3 - marquages ; article 4 - construction ; article 5 - câblage externe et
interne ; article 10 - résistance d'isolement et rigidité diélectrique ; article 11 - ligne
2
La CEM (compatibilité électromagnétique) traite des influences entre appareils et ne semble relever
de la compétence de la CSC que dans des cas très particuliers (interférences entre détecteurs de
métaux et pacemakers par exemple).
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de fuite et distance dans l'air ; article 12.5 - échauffement en fonctionnement
anormal.
De plus, compte tenu de la spécificité de ces matériels, il a été demandé au
laboratoire d'effectuer des essais complémentaires de sécurité électrique portant sur
la mesure du courant consommé en utilisation normale ; la mesure du courant et du
temps de réponse lorsque l'on court-circuite le luminaire au niveau de l'ampoule ; le
contrôle de la présence d'un verre de protection ; la mesure de la résistance
secondaire du bobinage du transformateur, contrôle de son isolation
primaire/secondaire, tension de sortie à vide et en charge ; l’identification des
composants.
B.
RESULTATS OBTENUS
Pour ce qui concerne les points des normes testés, les échantillons 5, 6 et 8 sont
conformes. Les 7 autres échantillons font, au total, l'objet des remarques suivantes :
− échantillon n° 1 : il manque sur la notice les spécifications de
l'écran de protection ainsi que l'avertissement pour le changement
de câble de type Y : « si le câble extérieur souple ou le cordon de
ce luminaire est endommagé, il doit être remplacé exclusivement
par le fabricant, son service de maintenance ou toute personne de
qualification équivalente, et ceci afin d'éviter tout risque » ;
− échantillon n° 2 : il manque sur la notice les spécifications de
l'écran de protection ainsi que l'avertissement pour le changement
de câble de type X : « si le câble extérieur souple ou le cordon de
ce luminaire est endommagé, il doit être remplacé par un câble ou
un cordon spécial provenant exclusivement du fabricant ou de son
service de maintenance » ;
− échantillon n° 3 : il manque l'indication « MAX » après 20W près
de la lampe (nota : indication présente sous le socle).
− échantillon n° 4 : il manque sur la notice, l'avertissement : « le
luminaire doit être utilisé complet avec son écran de protection ».
Au cours de l'essai portant sur l'article 12.5.1.a.1), le luminaire
réglable doit être incliné le plus près possible du plancher (partie
lampe). La surface chauffée par la lampe dépasse la limite admise
par la norme (175°C) et atteint 224°C ;
− échantillon n° 7 : il manque sur le luminaire le symbole indiquant la
distance minimale des objets éclairés. La tension secondaire
nominale (12V) n'est pas indiquée près de la lampe ni l'indication
« 20W MAX » (nota : indication présente sous le socle) ;
− échantillon n° 9 : il manque sur la notice les spécifications de
l'écran de protection ;
− échantillon n° 10 : il manque l'indication « MAX » après 20W près
de la lampe (nota : indication présente sous le socle).
C.
ETUDE DES RISQUES CONSTATES
Pour un modèle (échantillon n° 4) la température atteinte par la surface proche de la
lampe, lorsque le luminaire est incliné le plus près possible du plancher, est de
224°C alors que la limite maximale prévue par la norme est de 175°C. La
température atteinte est donc susceptible d'occasionner un début d'incendie, en
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présence de matériaux combustibles (papiers notamment) à proximité immédiate.
Ces lampes sont, en effet, très souvent posées sur un bureau.
Pour ce qui concerne les temps de coupure lorsqu’un court-circuit est provoqué au
secondaire (cas de la chaînette), il est à remarquer que si les appareils équipés d'un
fusible au secondaire réagissent quasi instantanément, ceux uniquement pourvus du
seul protecteur thermique interne au circuit primaire du transformateur ont un temps
de réponse beaucoup plus long, allant suivant les cas (douille en court-circuit ou
résistance “shuntant” les bras télescopiques à la moitié de leur longueur) de
30 secondes à 2 minutes 30 secondes (échantillons n° 1, 4 et 9). Compte tenu des
courants mesurés lors de cette mise en court-circuit qui vont de 9,8 A à 19,2 A
(alors qu'en fonctionnement normal, il est inférieur à 2 A), une chaînette (ou tout
autre objet métallique) en contact avec les deux bras pourrait occasionner des
brûlures sévères, bien que sur une surface limitée.
Comme tous les luminaires halogènes, d'autant plus dans le cas d'un éclairage
direct, l'ampoule doit être protégée par un verre filtrant dont la principale fonction
est d'empêcher toute projection de morceaux de quartz brûlants lors de l'explosion
(rare mais possible) de la lampe qui risquerait de provoquer un départ d'incendie.
Une autre fonction du verre protecteur est de filtrer les rayons UV émis par la lampe
qui, compte tenu de la proximité de celle-ci avec l'utilisateur, notamment au niveau
des mains, pourraient à long terme occasionner des désagréments.
V.
L’AUDITION DU GROUPEMENT INTERPROFESSIONNEL DU
LUMINAIRE
M. J., représentant le groupement interprofessionnel du luminaire (GIL) a été
auditionné par messagerie électronique et par téléphone en présence du rapporteur.
Il a apporté les précisions suivantes :
Je fais suite à votre courrier en date du 11/05/2007 et à notre visite en vos locaux le
24 mai pour une consultation du dossier.
Après étude des prescriptions normatives actuelles comprises dans les normes
luminaires actuelles de la série NF/EN 60598 :
−
−
−
NF/EN60598.1 Règles générales ;
NF/EN60598.2.4 Luminaires portatifs ;
NF/EN60598.2.6 Luminaires pour lampes à filament incorporant un
transformateur.
Il nous semble que ces prescriptions ne sont pas suffisantes pour empêcher le
dommage aux personnes constaté dans cette affaire.
Après consultation d’un laboratoire de référence, il semblerait qu’il n’existe pas de
disposition permettant de limiter la température de surface des conducteurs sous
tension en cas de court-circuit appliqué à ces conducteurs pourvu qu’ils ne servent
pas de dispositif de réglage.
En effet les tiges accessibles transportant le courant ne sont pas considérées (par
les laboratoires) comme « des parties destinées à être saisies ou fréquemment
touchées » et ne font pas l’objet d’une limitation de la température
Quoiqu’il en soit, dans le cas de ces produits, des moyens techniques simples
existent pour éviter ce genre d’accident. Il s’agit en l’occurrence d’une protection
thermique complémentaire à ajouter dans le circuit secondaire du transformateur.
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L'immense majorité des luminaires de ce type sont fabriqués dans les pays
asiatiques, notamment en Chine. Une partie des usines de fabrication ne respectent
pas les prescriptions normatives européennes, ce qui peut expliquer les cas de non
conformité constatés, l'importateur en France ne s'étant pas suffisamment
préoccupé des caractéristiques de construction des produits qu'il importait.
Ces luminaires sont commercialisés dans de nombreux types de magasins, parfois à
des prix très bas. Seule une surveillance accrue du marché semble susceptible
d'améliorer la situation.
SUR LA BASE DE CES DONNEES
Considérant que, sont présents sur le marché, des luminaires souvent vendus à bas
prix, qui comportent des parties sous tension accessibles à l'utilisateur ;
Considérant que, contrairement à certaines conditions d'application d'essais
définies dans les normes pertinentes (article 4.26.2 et 4.26.3, tableau 12.1 et renvoi
(6) dudit tableau), les tiges métalliques télescopiques sont, de manière
raisonnablement prévisible, des parties du luminaire qui, en utilisation normale,
sont destinées à “être saisies ou touchées fréquemment” par l'utilisateur ;
Considérant que ces luminaires présentent des parties sous tension accessibles au
consommateur, la sécurité de l'utilisateur ne peut être assurée que par un strict
respect des prescriptions normatives et un contrôle de la qualité de la production
efficace et précis ;
Considérant que cette exigence suppose un engagement fort de tous les
professionnels intervenant depuis la fabrication jusqu'à la mise sur le marché de ces
luminaires ;
Considérant que, au vu de l'enquête réalisée et des résultats des essais, il semble
que l'amélioration des contrôles des importations, de manière ciblée et dissuasive,
serait de nature à éviter la mise sur le marché de produits non conformes et
potentiellement dangereux.
EMET L’AVIS SUIVANT
La Commission recommande :
1.
Aux autorités administratives
•
2.
D'effectuer des contrôles de ce type spécifique de lampe afin de vérifier,
sur la base des normes applicables, leur conformité aux dispositions
réglementaires en vigueur, y compris en matière de marquage et de clarté
des notices d’utilisation, et éliminer du marché les modèles présentant des
risques de chocs électriques, d’incendie et de brûlures.
Aux autorités en charge de la normalisation
•
D’engager les démarches nécessaires en vue de modifier la norme
NF EN 60598-1 (février 2005) afin :
-
de faire évoluer les prescriptions relatives à l'essai prévu aux points
4.26.2 et 4.26.3 en spécifiant clairement une température
maximale3 de toutes les parties sous tension accessibles à
3
Voir aussi les recommandations de l'avis de la CSC du 20 janvier 2005 concernant d'autres types de
luminaires halogènes déplaçables.
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l'utilisateur (fussent-elles en TBTS) limitée à 60°C, comme le
prévoit le tableau 12.1 de la norme pour les parties métalliques ;
-
3.
d'inclure une spécification relative au temps de coupure du ou des
dispositifs de sécurité ou imposer la présence d'un dispositif séparé
de coupure du courant au secondaire (tel qu'un fusible) afin
d'assurer, en cas de défaut, une coupure du courant aussi rapide que
possible.
Aux consommateurs
De veiller à respecter les consignes générales de sécurité d'utilisation de
ce type de luminaire ; dans ce but, la CSC édite une fiche de prévention
notamment disponible sur son site internet www.securiteconso.org.
ADOPTE AU COURS DE LA SEANCE DU 14 JUIN 2007
SUR LE RAPPORT DE M. JEAN-PIERRE STEPHAN
Assisté de M. Jean-Michel MAIGNAUD, conseiller technique de la
Commission, conformément à l’article R. 224-4 du Code de la Consommation
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