pour simplementy voter, y vivoter, y vivre... et y mourir

Transcription

pour simplementy voter, y vivoter, y vivre... et y mourir
brèves5
80% des isolats de VIH aux
USA résisteraient à au moins
un antirétroviral.
A l’occasion du congrès sur
les résistances qui s’est tenu
à Sitges, en Espagne, le 15
juin dernier la société Virco,
qui est spécialisée dans les
tests de résistance du VIH, a
présenté une étude qui ne
peut que nous inquiéter. En
effet, selon les résultats obtenus par le test génotypique
du virus de 11 900 patients, il
n’y a que 21,8 % des
souches de VIH actuellement
isolées aux USA qui seraient
encore sensibles aux trois
classes d’antirétroviraux :
les analogues nucléosidiques, les non nucléosidiques et les antiprotéases.
L’ampleur du développement des résistances paraît
donc très préoccupante, ce
d’autant plus que 27,2 % des
souches résisteraient aux 3
classes d’antirétroviraux,
29,1 % à deux classes et
21,9% à une classe.
10
SIDA ET PR ECAR ITE
Les séropositifs souffrent souvent d’une maladie sociale en plus de
leurs problèmes de santé
pour simplementy voter,
y vivoter, y vivre... et y mourir
Plus de cent vingt mille personnes sont touchées par le VIH en France s’il faut croire les
chiffres aseptisés par la DGS qui circulaient jusqu’en novembre 1998. Depuis cette date
aucun chiffre ne vient informer gouvernement et associations du nombre de personnes
contaminées par le virus du sida et surtout en sida avéré ; celles là même qui font tou jours l’objet d’une déclaration obligatoire. Face à ce vide, sur quelles données chiffrées
s’appuyer en 2000 pour les logements dont la population contaminée a besoin ?
c
3614
hivinfo
Depuis quatre ans, un service minitel est à votre disposition.
Un médecin spécialiste du
VIH répond à vos questions
concernant les traitements,
les infections opportunistes,
les nouveaux essais, les stratégies thérapeutiques…
I N F O T R A I T E M E N T S
e sont des dizaines et
des dizain es de de mandes de logements
pour des personnes infectées et en difficultés
sociales, que les associations tenant des permanences sociales devaient gérer fin 1998. Depuis, les
comportements à risques n’ont jamais été aussi visibles. L’épidémie
continue de s’installer sournoisement dans un silence assourdissant
touchant gays, hétéros, toxicos, pap i e s , m a m i e s , b l a n c s , b e u r s,
blacks… Comment expliquer aux
personnes sous Viagra® qu’elles sont
toutes aussi concernées par cette
maladie que les gays de la première
génération sida qui ont connu les années noires des cocktails dansants
hebdomadaires au père Lachaise ?
L’absence de données épidémiologiques et le fait que nombre des personnes contaminées ne recourent
pas aux associations ou pratiquent la
politique de l’autruche nous fait
pressentir que la demande en logement est bien plus pressante et importante qu’on ne pourrait l’imaginer.
que de nous accueillir ; parce que le sida
est plus que jamais l’exclusion sociale.
Les droits sociaux des personnes malades leur permettent de prétendre à
une pension d’invalidité de première
ou de deuxième catégorie. Cette pension ne peut s’adresser qu’aux personnes qui ont travaillé assez longtemps et sans interruption, sinon son
montant est inférieur au montant de
l’AAH1 qui reste encore défiscalisée,
puisque encore reconnue comme un
minimum social du type RMI, qui lui
s’adresse aux personnes en bonne
santé et présumées en transit dans le
“Les AL ou APL ne sont pas prises en
compte dans le calcul des ressources fixes
lors des commissions d’attribution de
logements...
Fragilité sociale
dispositif. L’invalidité n’est pas systématiquement définitive et certains malades se sont vu déclassés en première
catégorie, leur handicap sida ayant été
considéré “consolidé” par les thérapies
aux effets secondaires multiples. De
même des AAH se sont transformées
en RMI, le sida devient désormais un
“handicap léger"…
Le sida entraîne la précarité, parce que
être malade interdit souvent un premier emploi ou une activité débouchant sur un vrai plan de carrière, parce
que être malade interdit l’accès aux
mutuelles et aux assurances plus empressées de se débarrasser de nous
Trois droits élémentaires. L’esprit Républicain retient trois droits élémentaires ouverts à tous : le droit à l’éducation, au travail et au logement. La
problématique de logement devient
cruelle à Paris et en proche banlieue,
car pour pouvoir prétendre avoir
N ° 8 2 / 8 3
J U I L L / A O U T
2 0 0 0
accès à un appartement, il faut justifier de ressources suffisantes. Ainsi,
pour un 20 m2, il faut pouvoir justifier
de ressources minimales, à savoir
7000F pour une personne seule et
pour un F2 destiné à un couple, 14000F
! Nous parlons bien pourtant de logements sociaux destinés par essence
même aux plus démunis fragiles et précaires. Alors comment attribuer un logement social à une personne ayant
pour seule ressource une AAH qui, au
mieux, atteint avec le complément à
l’autonomie 4106F ? Une AL2 ou une
A P L3 est servie par la CAF et vient
compléter les ressources de la personne
malade du sida, or ces AL ou APL ne
sont pas prises en compte dans le calcul
des ressources fixes lors des commissions d’attribution…
La précarité n’in téresse plus personne
Voilà pourquoi des listes sida en attente
de logements se constituent à Paris depuis des années sans aucun regard ni
égard des politiques. Comprenons la
donne, c’est la droite parisienne qui a le
monopole des attributions puisque les
mairies d’arrondissements (particulièrement les mairies de gauche) n’ont
1 AAH. Allocation Adulte Handicapé.
2 AL. Allocation Logement.
3 APL. Aide Personnalisée au Logement.
4 IGAS. Inspection Générale des Affaires
Sociales.
qu’un contingent limité et souvent
épuisé d’emblée. La droite ne souhaite pas forcément attribuer de logements aux personnes malades du
sida, qui, en théorie, votent plus à
gauche qu’à droite, précarité oblige ! Et
la gauche parisienne considère pour acquis ces votes séropos, alors pourquoi
focaliserait-elle sur ces questions difficiles ? Paris, capitale de la France, pôle
européen voire international ne veut
Des mesures inadaptées. A Paris, le
seuil pour la CMU semble avoir été
“hissé” à 4006 F, mais bien entendu,
nous sommes toujours dans l’attente
d’une confirmation de notre inclusion
ou de notre exclusion de ce système qui
gèrera la nouvelle précarité des soins.
Quand vous tentez un retour infructueux vers l’emploi, vos salaires ne sont
pas neutralisés et vous perdez derechef
votre AAH à taux plein, votre complé-
“Les CAF traquent désormais les AAH
des couples sidéens, pacsés ou pas, hétéros
ou gays, ils se voient amputés de leurs
droits c’est-à-dire d’une des deux AAH !
pas voir de pauvres ! Alors épuisés d’attendre parfois plus de huit ans dans des
hôtels sociaux cinq étoiles de précarité,
WC sur le palier, douches collectives,
ces malades se rabattent sur des logements de banlieue, de grande banlieue ou de province lointaine, quand
ces solutions sont encore possibles.
D’un département à l’autre. C’est
ainsi que nous retrouvons nos séropos parisiens en Bretagne ou plus loin
encore essayant de cultiver de nouveaux liens amicaux et médicaux avec
de nouvelles équipes techniques souvent mal formées et informées, tant en
matière de soins qu’en matière de
droits sociaux. Ils ont à faire face aux
préjugés, à l’ignorance, à l’exclusion.
Pour bien user ce qu’il leur reste d’énergie, il leur faudra faire face aussi à la sinistrose financière de ces départements
lointains en matière d’aide médicale
gratuite par exemple, récemment nommée Couverture Médicale Universelle
(CMU), qui délègue aux conseils généraux la possibilité ou pas de remonter le seuil fatidique des 3500F par mois
pour l’accès à la CMU complémentaire gratuite. Cette “universalité” des
soins dépend de l’état financier des
départements qui peuvent par le biais
de prestations extralégales, négocier ou
pas une prise en charge départementale en contractant une assurance de
groupe pour les précaires, dont les
malades du sida font pleinement partie
et qui sont encore réputés non assurables par ailleurs et à ce jour.
ment à l’autonomie (allocation de la
Ville de Paris) et une partie conséquente de votre allocation logement.
Vive l’IGAS4 qui vous exclu définitivement d’une éventuelle candidature à
un logement social et qui vous enfonce dans la spirale du surendettement. Interdiction pour nous d’être malades.
Pour voter,
il faut une adresse
Voter est un droit et un devoir citoyen
mais voter c’est être inscrit sur une liste
électorale et donc être logé. Nous savons tous que des dizaines de milliers
de mètres carrés sont disponibles à la
location à Paris. Pourtant nous n’y
avons pas accès, puisque prétendument trop à gauche ou alors pas assez,
trop précaires, trop sidéens, trop exclus! La démographie de Paris change
et continue d’évoluer défavorablement
en ce qui nous concerne. Quant aux appartements relais sociaux sensés nous
abriter le temps de se refaire un nouveau souffle, ils deviennent inaccessibles.
Un nouveau visage du sida ?Outre ses
soucis financiers, la population sidéenne devient une population difficile
et nouvellement psychiatrisée à cause
de cette mort prochainement programmée et toujours reportée. De nombreux
suicides sont désormais connus. Le
moyen-âge de la psychiatrie française
l’emportant, des discours simplistes et
commodes se mettent irrémédiable-
ment en place en nous jetant simplement à la rue. Les associations sensées
nous protéger et constituant l’ultime
filet de sauvetage social nous dédaignent par manque de moyens et de
volonté politique militante. Pourtant
nous avons fait face aux toxoplasmoses
cérébrales, aux Kaposi pulmonaires à
toutes ces maladies opportunistes méconnues alors et considérées comme
des maladies orphelines. Alors pourquoi démissionner devant le nouveau
visage du sida sans au moins tenter
d’y faire face et de trouver des solutions
aux maladies comme les leuco encéphalites multi focales évolutives
(LEMP) effrayantes et invalidantes et
diagnostiquées dans l’urgence chez des
personnes qui n’avaient pas jugé utile
de se faire dépister ? Une petite lueur
quand même, pour ceux (celles)
d’entre nous qui ont encore la chance
d’avoir un compagnon ou une compagne, les premiers effets de ce Pacs
tant attendu se font enfin ressentir.
Soyons zen
Les CAF traquent désormais les AAH
des couples sidéens , pacsés ou pas, hétéros ou gays, ils se voient amputés de
leurs droits c’est-à-dire d’une des
deux AAH ! Mais raisonnons par l’absurde, puisqu’avec deux AAH on n’arrive déjà pas à se loger, peut-être
qu’avec l’AAH unique “familiale” on
accédera plus facilement à un toit
pour pouvoir simplement y finir ses
jours ; car on a tendance à l’oublier un
peu trop, en juillet 2000 on meurt encore du sida dans une indifférence inqualifiable. Mais soyons zen, il restera
encore aux plus désespérés ou téméraires d’entre nous des possibilités de
s’exprimer sur leur vie et leur mort
place du Trocadéro, à l’endroit même
où nous avons entendu la droite pure et
dure nous crier “pédés au bûcher” .
Après tout, pourquoi pas, au père Lachaise ou place du Trocadéro, quelle
différence, pour la droite comme pour
la gauche, morts on ne vote plus.
Eric Dagher (membre d’ActUp-Paris)
I N F O T R A I T E M E N T S
N ° 8 2 / 8 3
brèves6
Il faut faire une croix
sur le nonoxynol-9 en tant
qu’anti-VIH
Le spermicide en gel nonoxynol-9, déjà commercialisé en Chine et aux EtatsUnis sous le nom Advantage
S, était sensé protéger contre
l’infection à VIH lors de rapports sexuels en détruisant le
virus. En fait, il ne semble
pas protéger contre le virus
de l’immunodéficience humaine (VIH) si l’on en croît
la conclusion préliminaire
des essais cliniques de phase
III menés depuis 1996 chez
des femmes en Afrique, au
Bénin, en Côte d’Ivoire et en
Afrique du Sud ; ainsi qu’en
Asie, en Thaïlande. Pourtant, les études de phase I et
II, qui avaient montré une
réelle inocuité, révélaient
aussi une certaine efficacité
antimicrobienne dont on espérait la confirmation dans
les essais de phase III. C’est
dire si ces résultats déçoivent. Malgré tout, la recherche continue. Pas
moins de trente-six autres
composés sont actuellement
en essais précliniques. Vingt
d’entre eux sont déjà prêts
pour des tests d’innocuité
sur l’homme et trois autres
attendent la troisième phase,
les tests à grande échelle.
La recherche pour la mise au
point d’un microbicide
contre le VIH apparaît
comme réellement primordiale dans un contexte ou
plus de cinq millions de personnes sont infectées
chaque année dans le monde
alors que la grande majorité
des personnes atteintes
n’ont pas accès aux antirétroviraux. On conçoit aisément l’intérêt d’une telle
substance chimique pourrait
détruire le virus avant qu’il
ne franchisse les muqueuses
vaginales ou anales et qui serait bien tolérée par ces muqueuses. En gel, en crème,
en suppositoire ou en film,
tout nouveau produit de ce
type serait une bénédiction,
n’en déplaise à notre pape
sénile anticapote.
J U I L L / A O U T
2 0 0 0
11