L`amour au temps du choléra, version 2.0

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L`amour au temps du choléra, version 2.0
L’amour au temps du choléra, version 2.0 ANNE SOPHIE LAFRAMBOISE On parle d’amour aujourd’hui comme d’un projet immobilier. Dans une société où tout est fait briller, mais rien n’est fait pour durer, difficile d’aimer, d’être aimé, d’être soi, sans complexe et en toute simplicité. L’amour se boit à grand coups de shooter de tequila. On veut le buzz, l’effet immédiat, l’ivresse des sens. L’amour nous est catapulté. Ça pleut, l’amour, depuis Walt Disney. Aujourd’hui, l’amour ça se Google, ça se twitte, ça se Facebook, ça se visite. Il y a les livres, les modes d’emploi, les statistiques, les psys, le porno, le Kama Sutra, le mommy porn, l’échangisme, les infidélités, ça se bouscule de partout pour nous parler d’amour avec un grand « A », petit « a » ou un « a » comme tu voudras. Ça te garroche des comédies-­‐romantiques, l’amour. Ça te donne une durée de vie, l’amour. Alors trois ans, vraiment? L’amour à la vitesse grand V, l’amour le temps d’une virée. Je t’aime, tu m’aimes, mais nous aimons-­‐nous vraiment? Et puis l’autre d’à côté? Pourrais-­‐je lui aussi, l’aimer? Je t’aime, tu m’aimes, mais est-­‐ce assez ? J’ai peur, aujourd’hui d’aimer. Parce que l’amour, ça se projette, ça fait des plans à court-­‐moyen terme et puis ça se revend, comme un projet immobilier. L’amour d’aujourd’hui se rénove moins bien, difficile de recoller les pots cassés, de réparer ce qui est brisé. Avec du neuf, on peut toujours s’en tirer. Difficile d’affronter la réalité de l’amour de nos jours. Faut être vachement romantique, faut être farouchement amoureux. Il faut surprendre, il faut écouter, avec son cœur surtout, paraît que c’est mieux, il faut s’accrocher contre vents et marées pour que l’amour subsiste entre nous deux. Je pense qu’il en reste un peu, de cet amour qui, doucement, envenime nos cœurs et bouscule notre raison. Suffit d’écouter son cœur, il paraît que c’est mieux. Une amoureuse de l’amour, encore, malgré tout.