SERRES RICHEL : AUTOMATISME À OUTRANCE

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SERRES RICHEL : AUTOMATISME À OUTRANCE
ENTREPRISES ET RÉGIONS
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MERCREDI 1er AOÛT 2012 LES ECHOS
CES PME QUI DÉFENDENT LE MADE IN FRANCE
SERRES RICHEL : AUTOMATISME À OUTRANCE
Pour rester en France malgré
une production fortement
consommatrice de maind’œuvre, l’entreprise pousse
les automatismes. Elle exporte
dans 80 pays.
Quand ses
troupeaux ont
ététouchéspar
la fièvre aphteuse, dans les
années1960,le
PME
père de ChristianRichels’est
lancé dans le
négocedeproduits agricoles.
Aux premières
logespourobserverlesévolutionsdu
marché, il voit naître les couvertures
sous serres. L’urbanisation grandit.
Les besoins de maraîchage précoce
explosent. L’entreprise suit la même
courbe. Mais encore trop chétive
pour absorber une croissance à marche forcée, elle doit se vendre à son
principal fournisseur.
Toutjustesortiedel’écoledecommerce, le jeune Richel est aux commandes. La deuxième crise pétrolière s’annonce sévère. Il a l’idée de
concevoir une enveloppe plastique
à double paroi gonflable. Plus isolante, elle procure 30 % d’économie
d’énergie par rapport aux abris en
verre. Son succès est immédiat et
place d’emblée Richel Serres de
France parmi les fournisseurs de
qualité sur le marché. « En une
dizaine d’années, notre réputation
RICHEL SERRES
DE FRANCE EN CHIFFRES
Implanté à Eygalières
(Bouches-du-Rhône).
Présent dans 80 pays.
Chiffre d’affaires consolidé
de 84 millions d’euros.
65 % de son activité sont
réalisés à l’export.
Un effectif de 240 salariés,
dont une vingtaine d’expatriés
dans les bureaux de
représentation de l’entreprise
à l’étranger.
Contrat : 200.000 mètres
carrés de serres viennent
d’être livrés à un exploitant
mexicain, pour une facture
de 5 millions d’euros.
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DR
SÉRIE
D’ÉTÉ
#
DÉVELOPPEMENT
La maîtrise de la qualité passe par le contrôle de l’ensemble
des composants d’une serre, à commencer par les profilés d’acier complexes.
s’est propagée dans 80 pays », expliqueChristianRichel,leprésidentdu
groupe. Ingénieurs ou techniciens,
les responsables commerciaux de
zone sont tous recrutés en France et
expatriés. Ils peuvent ainsi relayer
mieux qu’un distributeur le savoirfaire de l’entreprise. « Nous possédons maintenant 18 bureaux à
l’étranger qui nous coûtent cher en
salaires, mais les services que nous
rendons à nos clients sont inestimables : conception sur mesure, suivi de
commande, supervision du mon-
sesetrenoncéàchaquefois :impossible de maîtriser aussi bien la
logistique, la qualité de nos sous-traitants (une cinquantaine, tous basés
en Europe) et nos approvisionnements en matières premières sans
une organisation verticale comme la
nôtre. » Pour maîtriser ses coûts,
l’entreprise automatise à outrance.
« En vingt ans, nous avons quadruplé notre chiffre d’affaires mais seulement doublé nos effectifs de production », résume le patron. Sur
30.000 mètres carrés d’ateliers dans
tage… Notre présence sur place
garantit les délais de livraison dans
un milieu agricole qui compte les
jours. » Grâce à ces implantations,
l’entreprise peut répondre à de gros
appels d’offres : des projets de 1 à
plusde10hectares,quisenégocient
plusieurs mois et se chiffrent en millions d’euros d’investissement.
Produire en France coûte cher et
les discussions se cristallisent souvent sur le prix, admet le patron.
« Nous avons regardé des opportunitésdedélocalisationàplusieursrepri-
le village provençal d’Eygalières, il
transforme15.000tonnesd’acierpar
an en profilés complexes permettant la construction de 300 hectares
de serres qui font de l’entreprise le
numérounmondialdusecteuravec
65 millions d’euros de chiffre d’affaires et 180 employés (dont le tiers en
production).
Numéro un mondial du secteur
La maîtrise de la qualité passe aussi
par le contrôle de l’ensemble des
composants d’une serre. « Nous
livrons des usines clefs en main, comprenantleséquipementsdegestionde
la température et de l’irrigation »,
souligne Christian Richel. Après
tée par un même capitaine, Alsace
Capital, dont les 5 salariés chapeautent tous les dossiers d’intervention dans le haut du bilan.
« Nous créons aussi un nouveau
fonds d’intervention en faveur des
PME, doté de 25 millions d’euros,
conjointement avec la région Franche-Comté », souligne l’élu.
Le vaisseau amiral de la stratégie
régionale, Alsace Croissance, étudiera également des dossiers
d’entreprises des régions voisines,
indique-t-on au conseil régional.
Doté de 50 millions d’euros
(25 millions d’euros du Crédit
Mutuel, 18 millions du FSI et
« Les règles sont
transparentes, il existe
une volonté de jouer
collectif. »
7 millions de la région), le FCPR
privilégie une gouvernance basée
sur la confiance mutuelle : « Les
règles du jeu sont claires et transparentes, il existe une volonté de jouer
collectif », souligne Philippe
Braidy, directeur général délégué
du FSI, qui constate « un petit
miracle alsacien ».
Je a n - L i n B e r g é, d i re c t e u r
d’Alsace Capital, rappelle que le
FCPR est prévu pour dix ans et
qu’il est dirigé par 2 comités où les
souscripteurs s’expriment, même
si les règles de l’AMF exigent
l’indépendance de la société de
gestion d’un fonds. « Nous pren-
PHILIPPE BRAIDY, DIRECTEUR
GÉNÉRAL DÉLÉGUÉ DU FSI
drons ensemble nos décisions, en
visant l’unanimité », indique-t-il.
Parmi les écueils potentiels, les
divergences d’analyse sur des dossiers d’entreprise en difficulté,
pour lesquelles la volonté d’un
soutien « politique » peut se heurter aux règles plus tranchées des
Piscines : Waterair veut se développer dans le « prêt-à-plonger »
Une culture très familiale
« Non seulement cette opération
consolide l’entreprise, mais assure
aussi sa pérennité et permettra, le
jour venu, de saisir des opportunités
de croissance externe », explique le
PDG. En effet, le groupe alsacien
DR
Le plongeon de ses ventes
en Espagne, au Portugal et en
Grèce n’affecte pas la bonne
santé financière des piscines en
kit Waterair, à Seppois-le-Bas,
dont l’actionnariat vient de se
renforcer avec l’arrivée du
fonds Alsace Croissance.
Sale temps pour le marché de la
piscine privée. La piètre météo du
printemps et du début d’été, alliée
à la morosité économique
ambiante, s’est traduite pour le
numéro un européen de la piscine
en kit par un recul de son chiffre
d’affaires de 7 % sur les six premiers
mois. Pas de quoi inquiéter, pourtant, Jacques Braun, qui avait
racheté en 2002 cette PME alsacienne avec l’appui de deux établissements financiers. Le CIAL,
aujourd’hui intégré dans CM-CCI
Finance, reste dans le tour de table
des actionnaires, à côté d’Alsace
Croissance qui, avec un apport de
3 millions d’euros, vient de prendre
le relais du fonds MBO Partenaires.
La famille Braun et le management
conservent 80 %.
PAUL MOLGA
CORRESPONDANT À MARSEILLE
Demain : Pétrole Hahn,
100 % rémois
Les trois premiers dossiers traités par le nouveau FCPR Alsace Croissance représentent 5 millions d’euros investis dans trois PME régionales.
Cet outil s’inscrit dans la nouvelle stratégie de soutien à l’économie alsacienne par le renforcement des fonds propres des entreprises.
L’Alsace renforce le haut de bilan de ses PME
L
e Conseil régional d’Alsace,
confronté comme toutes les
collectivités à la raréfaction de
ses ressources, a choisi de réduire
ses subventions directes et de privilégier l’entrée dans le capital des
entreprises. « Nous déployons une
panoplie complète de structures
capables d’intervenir dans des dossiers de création, d’innovation, de
croissance et de développement en
partant des plus petites entreprises
jusqu’aux PME jusqu’à environ
50 millions d’euros de chiffre d’affaires », commente Philippe Richert,
président du conseil régional. Et
cette stratégie est désormais pilo-
avoir racheté son entreprise (passée
entre-temps dans les mains d’Elf
Atochem),ilmetlamainen2007sur
l’équipementier angevin Dimac, un
spécialiste régional du chauffage et
de l’irrigation assistée par ordinateur.
L’entreprise compte un millier de
clientsréguliers,dontplusdelamoitié à l’étranger. « Nous accompagnons leur croissance en répondant à
leurs exigences de sécurité et de productivité », poursuit le patron. Son
dernier-né a demandé deux années
de travaux à ses ingénieurs et 8 millionsd’eurosd’investissementsdans
une nouvelle ligne pour concevoir
uneserrepluslargeetplushautequi
optimise le microclimat et l’apport
lumineux aux plantes. Deux ans
après ses débuts, le modèle représente 40 % des ventes et pourrait
bientôt couvrir deux tiers de l’activité,assurantàl’entrepriseunecroissancerégulièredeplusde5 %paran.
Prochaine étape : gagner le cœur
d’un plus large public avec des abris
inspirés de la structure de ses serres
pour protéger toutes sortes de
machines ou de véhicules dans un
jardin. « C’est un relais de croissance
important qui s’appuie sur notre
notoriétépoursécuriserl’activitéavec
une production régulière. » Lancée il
y a peu, la gamme représente déjà
10 % des ventes.
La société a été créée il y a quarante ans sur la base d’un brevet
de bassin dont l’ossature consiste en panneaux d’acier galvanisé.
cherche à se développer sur le
marché français du « prêt-à-plonger » et examine plusieurs opportunités d’acquisitions. C’est
d’ailleurs l’un des axes de son plan
stratégique 2014, à côté de l’activité
de vente de consommables et de
rénovation de bassins, dont la
croissance dépasse actuellement
les 10 % et qui pèse déjà pour un
quart du chiffre d’affaires de
l’entreprise. L’objectif étant de se
doter d’une source de revenus
récurrents.
Par nature, en effet, le secteur de
la piscine traverse des hauts et des
bas. « Nous avons été très touchés
depuis deux ans par la chute des
ventes en Grèce, au Portugal et surtout en Espagne, où notre filiale
était leader sur le marché », commente Jacques Braun. Malgré tout,
Waterair avait encore enregistré
une croissance globale de son chif-
fre d’affaires de 6 % en 2011. Mais le
dirigeant, compte tenu de la baisse
du premier semestre, sait qu’il
n’atteindra pas les 55 millions
d’euros en 2012. Si l’export, qui
représente 20 % de l’activité, a été
son talon d’Achille de 2011 et
de 2012, le groupe n’en persévère
pas moins : il vient de lancer une
offensive dans les pays du Golfe,
notamment à Dubaï, et a ouvert un
showroom à Bangalore avec un
partenaire indien.
Sur le plan industriel, Waterair
poursuit son développement et ses
investissements à Seppois-le-Bas,
où le groupe emploie quelque
130 salariés sur 342 au total, tout
comme à Damazan (Lot-et-Garonne), où sont fabriqués les escaliers de piscine, et dans la filiale
allemande de Marsal, qui produit
les margelles.
Créée voici quarante ans sur la
base d’un brevet de bassin dont
l’ossature se compose de panneaux d’acier galvanisés, cette
entreprise aux 90.000 piscines
aujourd’hui a su conserver une
culture très familiale. Et elle se distingue par une politique sociale à
la fois dynamique et généreuse, ce
que revendique le PDG. Le mois
dernier, l’intéressement et la participation versés ont représenté
deux mois de salaire.
CHRISTIAN LIENHARDT
CORRESPONDANT À STRASBOURG
financiers privés. « Nous gérerons
en intelligence et la région reste
minoritaire », commente Philippe
Richert. « Notre volonté est de ne
pas perdre d’argent, mais il n’y a
pas d’objectif de rentabilité »,
ajoute Jean-Lin Bergé, qui précise
que les conditions de sortie du
capital seront négociées au cas par
cas.
Restant pour l’heure le plus
richement doté des FCPR français
en activité, Alsace Croissance vise
à traiter de 5 à 7 dossiers par an.
Mais sa reproduction ailleurs en
France avec l’appui du Crédit
Mutuel n’est pas à l’ordre du jour,
Michel Lucas (président du
groupe) ayant clairement répondu
qu’il n’avait pas donné suite à des
demandes émanant d’autres
régions. Le montage, associant le
banquier numéro un en Alsace, le
FSI et une collectivité, repose principalement sur l’« intuitu personae » de Philippe Richert, qui
n’exclut pas de travailler aussi avec
la région Lorraine, si l’occasion
s’en présente, pour faire profiter
des compétences régionales en
matière de gestion de fonds d’aide
aux TPE et PME.
DIDIER BONNET
CORRESPONDANT À STRASBOURG
EN BREF
NOVASEP. Spécialiste des solutions de purification et de
production pour les industries des sciences de la vie, Novasep
engage un investissement de 3 millions d’euros pour augmenter
ses capacités de production d’ingrédients pharmaceutiques
hautement actifs (HPAPI) sur son site du Mans (Sarthe).
Le STIF sommé par Montebourg de revoir
l’attribution de son centre d’appels
Le feuilleton continue dans l’affaire de délocalisation du centre
d’appels du Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF). Hier,
le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a
affirmé devant l’Assemblée nationale que le président (PS) du
STIF, Jean-Paul Huchon, allait revoir l’appel d’offres pour son
centre de relations clientèle pour l’instant confié à un prestataire
implanté au Maroc. Cette annonce intervient après que le
président François Hollande a appelé les responsables publics à
« faire prévaloir » autant que possible « le travail en France »,
même s’il a précisé que les règles des marchés publics avaient
été respectées par le STIF. Cette délocalisation menace deux
centres d’appels en France, à Fontenay-le-Comte, en Vendée, et
à Saint-Avold, en Moselle, appartenant à la société Webhelp.
Xilofrance : liquidation judiciaire avec
maintien de l’activité pendant un mois
Faute d’accord sur la prise en charge partielle des créances
évaluées à 45 millions d’euros entre les banques italiennes et
le candidat à la reprise, la société holding MAR, constituée par
des cadres de Rolpin à Labouheyre (Landes), le tribunal de
commerce d’Agen a décidé la liquidation judiciaire avec
maintien de l’activité jusqu’au 31 août du fabricant de
contreplaqués de peupliers Xilofrance à Damazan (Lot-etGaronne). A cette date, MAR a encore la possibilité de déposer
son offre qui consiste à reprendre 50 des 68 salariés de Xilofrance
et à mettre à niveau l’outil de production. Créée en 2008, l’usine
conçue pour produire 200 m3 de contreplaqués par jour n’a
jamais pu fonctionner à plein régime.