L`Agefi : 2016-02-15 lun - S07 - J046 - Edition n°031

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L`Agefi : 2016-02-15 lun - S07 - J046 - Edition n°031
Lundi 15 février 2016
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Numéro 31
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Créé en 1950
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Vendu en kiosques et par abonnement
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Prix 4,50 CHF (TVA 2,5% incl.) - 4,50 EUR
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[email protected]
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Rédacteur en chef: François Schaller
Grands groupes aux USA
Contre-offensive
anti-actionnaires
activistes
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JA-PP/JOURNAL — CASE POSTALE 5031 — CH-1002 LAUSANNE
SMI 7656.60
7620
7560
7500
7440
DOW JONES 15973.84
15900
15750
15600
15450
+2.13%
+2.00%
AFFAIRE RYBOLOVLEV-BOUVIER À GENÈVE
80 Picasso placés
aux Ports Francs
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CEO DE LA BANQUE CANTONALE DE ZURICH
Le point sur une grande banque
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LA MARQUE PORTUGAISE DELTA CAFÉS
Implantation en cours à Aclens
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ALARME SUR LSFIN ET LEFIN (RÉGULATION)
Par un grand spécialiste à Genève
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TROPHÉES DU COMMERCE FRANCE-SUISSE
Industrie et ferroviaire primés
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DE LA COMPRESSION À LA DIFFÉRENCIATION
La dette souveraine ressurgit
Les composantes d’un succès
durable à l’échelle de la planète
GENEVA MOTOR SHOW. Il n’y a que deux rendez-vous annuels de ce genre. A quand un troisième dans un Etat émergent?
DANNY BAUMANN
86e édition du Geneva International Motor Show du 3 au 13 mars:
GIMS , ou Salon de l’Auto pour les
locaux.Le grand rendez-vous qui
bouscule tellement Genève est en
pleins préparatifs. On sait déjà que
plus de cent premières européennes
et mondiales seront présentées.
En matière de fréquentation et
d’exposants, les superlatifs appartiennent certainement au passé. La
plus grande manifestation de
Suisse n’a plus à affronter des problèmes de croissance, mais de maturité. Elle est plus ou moins stable
depuis des années (entre 650.000
et 700.000 visiteurs , toutes surfaces attribuées).
Le public du salon est essentiellement suisse et français, à parts
égales. C’est par les médias internationaux que notre cher Salon de
l’Auto a acquis une envergure
mondiale.
Comme chacun sait, la manifestation fait partie des cinq plus
grandes du genre avec Paris, Francfort, Détroit et Shanghai. Tout le
monde ne réalise pas en revanche
qu’elle est seule avec Detroit à avoir
lieu chaque année. Les autres sont
des biennales.
L’ ancienneté et la constance du
salon, localisé juste à côté d’un aéroport international (avec accès
direct aux aires de chargement),
lui ont permis d’acquérir bien des
avantages, et cette position glo-
ANDRÉ HEFTI. Entretien de
fond avec le directeur général.
En pleins préparatifs.
bale très enviée. Avec un sens assez remarquable de l’adaptation,
qui fait par exemple que le thème
de la voiture connectée n’a eu aucun mal à se substituer à ce lui de
l’éco-voiture.
De même que la fameuse neutralité, le fait que la Suisse n’a pas d’industrie primaire de l’automobile,
et que le GIMS n’est pas dominé
par de grandes marques nationales. Les principaux constructeurs sont en principe traités sur
un pied d’égalité. Qu’est ce que
cela signifie au juste? Que se passera-t-il le jour où un Etat émergent autre que la Chine voudra
développer un concept directement concurrent?
Le Geneva Motor Show est détenu
et exploité par une fondation privée, conjointement à Palexpo, Palais des Expositions à caractère public. Une partie des bénéfices sont
rétrocédés aux exposants selon les
résultats. PAGE 3
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LA CHRONIQUE DE BRUNO BERTEZ
ÉDITORIAL FRANÇOIS SCHALLER
Les taux négatifs appellent l’or
Semaine cruciale sur les marchés
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PRODUITS STRUCTURÉS
Le rendez-vous du lundi
Le modèle historique
a atteint ses limites
EDGAR MORIN. Grand entretien avec le sociologue
et philosophe français des changements de civilisation.
Dans un long entretien, le sociologue et philosophe
Edgar Morin ausculte, du haut de ses 94 ans, l’état du
monde et celui de la France. Economie, Front national,
islam, fanatisme, immigration, mondialisation,
Europe, démocratie, environnement: ces enjeux trouvent leur issue dans l’acceptation du principe,
aujourd’hui rejeté, de «complexité».
Complexité pour décloisonner les consciences, conjurer les peurs, confronter les idéaux, hybrider les imaginations, et ainsi «réenchanter l’espérance» cultivée
dans la fraternité, la solidarité et l’exaucement de
sens. «Le seul véritable antidote à la tentation barbare
a pour nom humanisme», considère-t-il à l’aune des
événements, spectaculaires ou souterrains, qui ensanglantent la planète, endeuillent la France, disloquent
l’humanité. «Il est l’heure de changer de civilisation.»
Et de modeler la «Terre patrie.»
«Notre nation porte en elle deux messages qu’ont toujours transformé en français des ressortissants de peuples progressivement provincialisés et francisés au
cours des siècles d’histoire, puis ensuite issus d’émigration: celui d’intégration de la diversité ethnique
puis religieuse dans une grande unité supérieure, qui
se nourrit de cette diversité sans la détruire. Autrement
dit reconnaître que la France est en fait multiculturelle,
c’est donner aux enfants d’immigrés la possibilité de
se sentir français.» A LIRE SUR AGEFI.COM
Il est évidemment possible de penser que
ce qui s’est produit la semaine dernière
sur les marchés financiers est en premier
lieu la résultante d’un malheureux
concours de circonstances. Dont des fêtes
de fin d’année en Chine, la perspective
d’un autre week-end prolongé aux EtatsUnis… La vigoureuse reprise des cours
du pétrole et des marchés actions vendredi peuvent aussi suggérer que la crise
- le début de crise s’agissant des banques
- est en voie de résolution. Dans la phase
baissière qui a commencé en août dernier, les indices ont pour l’instant corrigé
dans des proportions comparables à
l’alerte souveraine de 2011. Il est possible
que l’on en reste là, tout de suite ou dans
quelques jours, et que les investisseurs
se remettent à investir.
Ce scénario très optimiste à ce stade est
toutefois peu probable. Les deux fondamentaux sur lesquels tout repose n’ont
pas changé d’apparence (et tout repose
sur les apparences dans ce genre d’affaire): totalement imprévue lorsqu’elle a
commencé, la baisse continue du pétrole
reste en partie insaisissable. Surtout, le
retournement du phénomène repose
beaucoup sur des Etats comme l’Arabie
saoudite, l’Iran, le Venezuela… et des
accords cartellaires pour le moins aléatoires.Autant dire qu’il n’y a aucune prévisibilité de ce côté, si ce n’est que des
prix évoluant historiquement de manière
cyclique finissent toujours par repartir à
la hausse après avoir baissé… En ce
sens, il y a certainement une part de défi
s’agissant des hydrocarbures. Des opérateurs testent le marché, cherchent le
plancher.
L’autre grande dimension du drame, c’est
la croissance mondiale. Jamais le
manque de fiabilité des chiffres macros
en Chine n’est apparu avec autant d’insistance. Les Etats-Unis, qui ont repris le
lead, entrent dans une période électorale
qui s’annonce mouvementée et très incertaine. La Réserve fédérale semble avoir
épuisé ses dernières munitions, et la perte
de crédibilité des banques centrales devient un thème assez tendance. L’Europe
ne sait plus très bien où elle en est. La
politique monétaire a encore quelques
marges de manœuvre, mais le problème
non complètement résolu et toujours redouté du surendettement public dans la
périphérie sud n’attend qu’un incident,
un signal pour ressurgir.
Les toutes récentes démonstrations de
sérénité dans un secteur bancaire en
proie au stress test à l’échelle 1:1 ne
convainquent qu’à moitié. De grands
fonds acquièrent en masse des titres bien
massacrés, dont Credit Suisse et UBS, ce
qui est aussitôt interprété comme un acte
de foi. La performance annuelle spectaculaire de Commerzbank et l’annonce
de Deutsche Bank d’acquérir sa propre
dette pour plusieurs milliards d’euros,
montrant ainsi qu’elle en a les moyens,
peuvent aussi être reçus comme des signaux à double sens. Le plus parlant a
peut-être été l’annonce du président de
JPMorgan qu’il avait investi la semaine
passée l’équivalent d’une année de rémunération personnelle dans des titres
de sa société. Mais combien d’effets de
ce genre faudrait-il dans les banques
d’affaires pour démontrer qu’on peut de
nouveau leur faire confiance?n
Accord régional problématique
PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE. Partisans et détracteurs s’affrontent à travers des modèles opposés et concurrents.
DANI RODRIK*
Le Partenariat transpacifique
(PTP) – méga-accord commercial
concernant 12 Etats représentatifs
de plus d’un tiers du PIB mondial
et un quart des exportations à
l’échelle planétaire –représente le
tout dernier champ de bataille
d’une confrontation longue de
plusieurs décennies entre partisans
et détracteurs de ce genre d’ accords commerciaux.
Comme d’habitude, les partisans
de cette entente font valoir plusieurs modèles quantitatifs annonciateurs d’une réussite sans encombre. Leur modèle favori prévoit en
effet, à l’issue de 15 ans, une augmentation des revenus réels allant
de 0,5% aux Etats-Unis à 8% au
Viêtnam. Par ailleurs, ce modèle
– élaboré par Peter Petri et Michael
Plummer, respectivement des universités Brandeis et John Hopkins,
sur la base d’une longue lignée de
cadres similaires conçus par euxmêmes et par d’autres – ne prévoit
qu’un tribut relativement insignifiant en termes d’emploi au sein
des secteurs concernés.
De leur côté, les opposants au
PTP s’identifient à un modèle
concurrent, qui formule des prévisions tout à fait différentes. Elaboré par Jeronim Capaldo de
l’Université Tufts et par Alex Izurieta de la Conférence des Nations
Unies sur le commerce et le développement (avec l’aide de Jomo
Kwame Sundaram, ancien Secrétaire général adjoint de l’ONU),
ce modèle prévoit en effet de plus
faibles salaires et un chômage plus
élevé dans tous les Etats concernés, ainsi qu’une baisse des revenus dans deux pays clés, à savoir
les Etats-Unis et le Japon. Ce n’est
pas autour des effets sur le com-
merce que s’opposent ces deux
modèles. D’ailleurs, Capaldo et
ses collaborateurs prennent pour
point de départ les prévisions
commerciales issues d’une version antérieure de l’étude PetriPlummer. SUITE PAGE 2
* Harvard
9HRLEMB*jeiaae+[B\K\K\A\H
PAGE 15